Efficacité et transparence dans les procédures de spécification sur
Transcription
Efficacité et transparence dans les procédures de spécification sur
Efficacité et transparence dans les procédures de spécification sur les marchés publics O. Compte∗ et A. Lambert-Mogiliansky† Etude RCB réalisée pour le compte de la Direction de la Prévision, Ministère de l’Economie de Finances et de L’Industrie. Novembre 2000 ∗ † CERAS, Ecole Nationale des Ponts et Chaussées, URA 2036. CERAS, Ecole Nationale des Ponts et Chaussées, URA 2036 et ALM-Consultants Paris. 1 Résumé L’objectif de cette étude est de comparer diverses procédures d’allocation des marchés publics quant à leurs performances en termes de pression concurrentielle et de risque de favoritisme. Nous trouvons que les procédures avec sélection sur critère annoncé à l’avance, tendent à induire une pression concurrentielle plus forte et sont associées à des rentes de favoritisme moins importantes que les procédures qui consistent à offrir aux soumissionaires un cahier de charges avec des clauses techniques précises. Nous trouvons également que l’incertitude sur le critère peut nuire à l’efficacité et que cette incertitude à elle seule peut générer des rentes de favoritisme. Enfin nous offrons une caractérisation de la variante résultant du favoritisme. Le favoritisme sélectionne des variantes techniques non-standards ou bien des critères qui valorisent des caractéristiques spécifiques à un petit nombre de candidats. Un étude de cas sur le marché des fournitures de papier est proposée. L’examen comparé des procédures d’achats dans deux administrations publiques, nous offre une occasion d’élargir la réflexion à d’autres aspects des procédures. Sur la base de notre analyse nous formulons quelques recommandations pour améliorer l’efficacité et réduire les risques de favoritisme sur les marchés publics. En particulier, il convient de minimiser le recours aux spécifications techniques au profit d’une spécification en termes de performance. Il est aussi préférable de sélectionner l’entreprise gagnante sur la base d’un critère d’évaluation (de la performance) plutôt que sur la base d’un objectif minimal de performance. Enfin, une définition transparente des critères de sélection rendue publique au préalable, est désirable tant du point du vue de l’accroissement de la concurrence que de la limitation du risque de favoritisme. 2 Prologue: le coût social du favoritisme - un exemple. L’exemple qui suit est tiré du Rapport de la Cour des comptes (1997), ”La gestion des services publics de l’eau et de l’assainissement”. A Dinard, la commune avait confié à un cabinet privé l’étude et la construction d’un barrage. Le marché initial fut sujet à des avenants de 15% au total. De plus, il s’est avéré que les eaux recueillies n’offraient pas les qualités suffisantes pour être distribuées sans traitement. L’utilisation du barrage, qui a couté 30 millions de francs, reste conditionnée à la construction d’une usine d’épurement, projet qui n’est pas encore programmé par la collectivité. Pour l’instant, le seul effet de ce marché a été d’augmenter le coût de l’eau de 2.40fr par m3 . Est-il question d’incompétence, de négligence ou bien de favoritisme? A notre connaissance aucun jugement n’a été prononcé. Cet exemple illustre néanmoins la nécessité d’une réflexion approfondie sur les mécanismes d’allocation des marchés publics. 1 Introduction L’objectif de cette étude est de comparer diverses procédures d’allocation des marchés publics. Par procédure d’allocation, on entend le processus qui mène de la décision politique de financer un nouveau projet à la signature d’un contrat détaillé entre l’autorité publique et la firme qui réalisera le projet. Tout contrat final doit généralement inclure une spécification précise des charges et contraintes imposées à l’entreprise sélectionnée. Différentes procédures sont susceptibles de conduire à différentes spécifications. Notre objectif est d’apprécier comment se comparent ces procédures quant à la spécification retenue, la dépense publique, l’adéquation avec les préférences de l’acheteur public et l’efficacité sociale. On discutera aussi l’effet de ces procédures sur les risques de favoritisme et de collusion. 3 Pour illustrer l’effet possible des procédures sur la spécification finale retenue, considérons une procédure d’allocation au moins disant. Dans une telle procédure, la firme offrant le prix le plus bas est sélectionnée. Clairement, chaque entreprise va proposer la spécification qui minimise son coût, sans tenir compte des préférences de l’acheteur public, par exemple en matière de qualité. Ainsi l’adéquation de la spécification retenue avec les préférences de l’acheteur public a toutes les chances d’être faible. Pour pallier à ce problème, les procédures utilisées en pratique font appel à des critères autres que le prix: 1. Spécification ex-ante du projet. L’agent affine la définition du projet. Les firmes font leurs offres. L’agent choisit la moins disante parmi les firmes dont l’offre respecte les contraintes annoncées. 2. “Best value”. L’agent annonce à l’avance une règle d’évaluation ( la définition de critères et le mode d’aggrégation de ces critères). Les entreprises font leurs offres. Puis l’agent se conforme à la règle annoncée pour sélectionner la firme gagnante. 3. Evaluation ex-post. Les entreprises font leurs offres. L’agent sélectionne une entreprise en prenant en compte d’autres critères que le prix. L’agent explicite ex-post la manière dont il a pris sa décision. Cette procédure permet à l’agent de prendre en compte d’autres critères que le prix mais n’exige pas que ces critères soient annoncés à l’avance: une certaine incertitude sur la règle d’évaluation subsiste. Les trois types de procédure décrits ci-dessus vont induire des comportements de la part des firmes. Nous nous intéresserons à la performance de ces procédures en terme de pression concurrentielle et de risque de favoritisme. Dans une approche très générale, plusieurs articles (par exemple Laffont et Tirole (1987), Mc Afee et Mc Millan (1987)) ont identifié un mécanisme de révélation optimal dans un environement similaire au nôtre. La ques4 tion de la mise en oeuvre pratique de cette solution théorique a été abordée par Che (1993). Il s’intéresse à la forme du critère de sélection optimal dans une enchère bi-dimensionnelle. Un résultat particulièrement intéressant pour notre propos est que le critère optimal qui pondère qualité et prix ne reflète pas naïvement les préférences de l’acheteur. Ce critère discrimine contre la qualité. Laffont et Tirole (1991) offrent une première exploration du problème du favoritisme dans les enchères. Leur approche en terme de mécanisme optimal se révèle cependant très laborieuse. Notre approche ici est différente. Nous ne sommes pas préoccupés par la dérivation d’une procédure de spécification optimale. Notre objectif est de mettre en évidence certaines propriétés, en termes d’efficacité et de risque de favoritisme, afin de permettre une comparaison entre trois procédures rencontrées dans la pratique. Cette approche a l’avantage de ne pas faire appel à des calculs très sophistiqués (et peu réalistes) sur les coûts espérés des firmes pour des variantes hypothétiques du projet.1 Nos premiers résultats mettent en évidence l’arbitrage fondamental qui régit la décision de spécification: l’arbitrage entre pression concurrentielle et adéquation avec les préférences de l’acheteur public. Réduire la pression concurrentielle équivaut à favoriser certaines firmes aux dépens des autres. Cette discrimination se fait au profit des firmes dont le projet plait à l’acheteur public lorsque l’agent est bénévole mais elle peut être exploitée pour générer des rentes de favoritisme lorsque l’agent est opportuniste (corrompu). Nous contrastons la procédure de spécification (technique) ex-ante avec la procédure de sélection sur critère (”best value”), pour établir que cette dernière peut sélectionner le même projet que la première mais à un coût inférieur. Il découle de ce résultat que les rentes de favoritisme (lorsque la décision de l’a1 Mis à part l’hypothèse peu réaliste sur les capacités de l’agent à optimiser, les résultats dans ce type d’analyses dépendent également des hypothèses particulières faites sur la structure de l’information (voir Brusco 1997). 5 gent est capturée par une firme) seront toujours moins importantes dans une enchère sur critère comparé avec une enchère au moins disant avec spécification (technique) ex-ante. Dans les deux cas on trouve que la spécification qui ressort d’une procédure capturée tend à minimiser la pression concurrentielle par exemple en posant des exigences non-standards ou bien en valorisant des caractéristiques spécifiques à une firme. Le rôle de l’incertitude sur le critère de sélection, est abordé. Nous montrons que l’incertitude peut réduire l’efficacité de l’enchère. Mais le résultat le plus intéressant est que l’incertitude à elle seule génère des rentes de favoritisme dans un contexte où toutes les firmes sont semblables et donc que les rentes sont nulles pour tout critère annoncé à l’avance. Nous proposons également une étude de cas qui, si elle permet d’élargir la réflexion à d’autres aspects des procédures (par exemple remise en concurrence dans un pool restreint), ne permet cependant pas de tirer des conclusions probantes sur les avantages comparatifs des procédures étudiées dans la partie théorique. Une des raisons est que le marché étudié a subi de nombreux chocs d’envergure durant la période étudiée ce qui rend les comparaisons difficiles. La section 2 introduit le modèle de base. Les procédures sont analysées sous l’angle de la concurrence. Dans la section 3, nous étudions les risques de favoritisme associés aux trois types de procédures. La section 4 présente une étude de cas sur le marché des fournitures de papier. Enfin, la section 5 conclut sur quelques recommandations. 2 2.1 Concurrence Modèle de base Spécification On considère un projet dont l’ensemble des spécifications possibles est Ω. On dénote ω ∈ Ω, une spécification particulière. Par exemple 6 Ω correspondrait ”à une école primaire pour trois cents enfants satisfaisant les standards de sécurité” tandis que ω serait une description architecturale détaillée. Dans ce qui suit un sous-ensemble Ω0 ⊂ Ω représentera une spécification partielle du projet. Pour le cas où ω représente le niveau de qualité, on prendra typiquement Ω0 = {ω ∈ Ω; ω ≥ ω 0 } où ω 0 est un niveau de qualité minimum. Préférences On considère un nombre n de firmes caractérisées par une fonction de coût ci (ω) où ω est une spécification du projet. Lorsque la firme i est sélectionnée pour réaliser la spécification ω au prix p, elle obtient un profit π i = p − ci (ω) . (1) Les préférences de l’acheteur public sont représentées par une fonction objective: W = B (ω, θ) − p où B (ω, θ) est le gain social généré par la spécification ω, et où θ ∈ Θ paramétrise les préférences sur les dimensions autres que le prix et p est le prix payé à la firme qui obtient le contrat. Enfin, l’efficacité sociale vaut E = B (ω, θ) − ci (ω), et on notera ω e et ie la spécification et la firme qui maximise l’efficacité sociale: (ω e , ie ) = arg max B (ω, θ) − ci (ω) ω∈Ω,i Les firmes sont en information symétrique: elles connaissent les fonctions de coût {ci (.)}i et ont la même information sur les préférences de l’acheteur public, à savoir, θ est distribué sur Θ selon f (.). L’acheteur public ne connaît pas les fonctions de coûts. 7 Critères de sélection et procédures: Un critère de sélection de l’acheteur public est une fonction s(ω, p) portant sur la spécification retenue ω et le prix payé p. Les critères envisagés sont les suivants: Moins disant: s(ω, p) = −p, Spécification ex-ante: Ω0 ⊂ Ω: s(ω, p) = −p si ω ∈ Ω0 , s(ω, p) = −∞ sinon. (Ce critère correspond donc au critère moins disant sous contraintes.) Mieux disant: s(ω, p) = B(ω, θ̂) − p, où θ̂ est le paramètre annoncé par l’acheteur public. Evaluation ex-post: s(ω, p) = B(ω, θ) − p, où le paramètre θ est distribué selon une densité de probabilité f (.) (le critère est stochastique). Cette situation correspond au cas où le critère n’est pas annoncé à l’avance, par exemple parce que l’acheteur public n’est pas en mesure d’évaluer le gain social associé aux diverses variantes possibles avant de connaître ces variantes. A chaque critère s(., .) est associée une procédure: 1) Chaque firme fait une offre (ω i , pi ). 2) L’acheteur public sélectionne la (ou une des) firme(s) qui maximise le critère s(., .) 3) La firme sélectionnée signe un contrat aux conditions offertes par cette firme. On notera (i∗ , ω ∗ , p∗ ) l’issue de la procédure, ainsi que W ∗ et E ∗ les valeurs de l’objectif de l’acheteur public et de l’efficacité sociale respectivement. 2.2 spécification technique du marché et moins disant Dans une procédure au moins disant, la spécification retenue émerge de la mise en concurrence. Dans une procédure spécifiée, l’acheteur public a choisi 8 Ω0 ⊂ Ω, et la spécification est ainsi partiellement (voir complètement si Ω0 est un singleton) définie par l’acheteur public. Une spécification partielle consiste par exemple à donner un objectif de performance: plusieurs solutions techniques sont alors susceptibles de satisfaire cet objectif. Pour mettre en évidence l’arbitrage qui régit la décision de spécification ex-ante nous allons établir deux résultats correspondant à deux situations extrêmes caractérisées par les hypothèses 1 et 2 ci-dessous. Hypothèse 1 : B (ω, θ) = B ∀ω ∈ Ω. L’hypothèse 1 caractérise une situation où les variantes sont équivalentes en termes de bénéfice pour l’acheteur public. Par exemple les spécifications ont trait à des solutions techniques sans implication pour l’usager (deux techniques d’épuration de l’eau conduisant au même niveau de qualité). Notre premier résultat exhibe l’effet de la décision de spécification sur la pression concurrentielle. Proposition 1 Plus la spécification est restrictive plus l’efficacité est faible: le coût de l’entreprise sélectionnée ci∗ (ω ∗ ) et le prix de passation p∗ augmentent. Proof. On note i(1) (Ω0 ) l’entreprise ayant le coût le plus bas quand la spécification est Ω0 : ³ ´ i(1) Ω0 = arg min min0 ci (ω) i ω∈Ω On note c(1) (Ω0 ) le coût correspondant. On définit de façon similaire l’entreprise i(2) (Ω0 ) ayant le deuxième plus bas coût, et on note c(2) (Ω0 ) le coût correspondant. A l’équilibre (en stratégies non-dominées), l’entreprise i(1) (Ω0 ) est sélectionnée et paye p∗ = c(2) (Ω0 ). L’efficacité sociale vaut donc B − c(1) (Ω0 ). Pour tout Ω0 ⊆ Ω, ³ ´ ³ ´ c(1) Ω0 ≥ c(1) (Ω) et c(2) Ω0 ≥ c(2) (Ω) . L’efficacité sociale est maximum et le prix de passation est minimum quand Ω0 = Ω. 9 Notons qu’un objectif de performance est équivalent à une spécification technique incomplète, c’est-à-dire à une spécification qui laisse une certaine liberté aux firmes dans le choix de la variante. Soit B 0 la performance souhaitée, une spécification en terme de performance peut s’écrire de manière suivante : Ω0 = {ω; B (ω, θ) = B 0 }. Les firmes choisissent leur variante préférée dans Ω0 ou ce qui est équivalent, choisissent leur manière préférée d’atteindre l’objectif de performance. Un Corollaire de la Proposition 1 est qu’un objectif de performance du type Ω0 = {ω; B (ω, θ) = B 0 } est toujours préférable à une spécification technique particulière induisant la performance souhaitée (c’est à dire, Ω0 = {ω 0 } où ω 0 est tel que B (ω 0 , θ) = B 0 ). L’objectif en terme de performance induit une pression concurrentielle plus importante que la spécification particulière car il laisse les firmes tirer au mieux parti de leurs avantages comparatifs respectifs, et cela sans pour autant réduire le gain social B (.) . La proposition 1 fait apparaître, en l’isolant, un des effets fondamentaux de la spécification: plus une spécification est discriminatoire c’est à dire plus l’ensemble des variantes acceptables est restreint, plus la pression concurrentielle est faible; le seul effet de la spécification du marché en précisant la technique est de faire augmenter le coût de l’entreprise sélectionnée et la dépense (et donc de reduire W ∗ et E ∗ ). Ce premier résultat est essentiel pour appréhender la question du favoritisme dans notre contexte. Il montre que toute spécification(autre que l’absence de spécification) est par nature discriminatoire. Spécifier équivaut à biaiser la concurrence en faveur de certaines solutions. Par conséquent, toute spécification favorise la ou les firmes qui ont un avantage comparatif dans les spécifications retenues aux dépens des autres firmes. On va désormais s’intéresser à des situations où les diverses spécifications possibles affectent le gain social du projet. Par exemple un projet de stade 10 peut inclure un dispositif spécial qui augmente la sécurité. Un autre projet peut inclure un dispositif qui garantit une qualité de terrain par tous les temps. Chacun de ces aspects est important pour l’acheteur public. La proposition 2 ci-dessous illustre un cas simple où les projets sont associés à des valeurs sociales différentes. Considérons la situation où la spécification est définie par un paramètre unique par exemple un niveau de qualité (chaque niveau de qualité correspond à une variante): Hypothèse 2 : ci (ω) croit avec ω ∈ Ω = [ω, ω] et pour chaque entreprise, ∂ B ∂ω (ω, θ) − ci (ω) |ω=ω > 0. L’hypothèse 2 caractérise une situation où i) la spécification correspond à un niveau de qualité (de sorte que les coûts croissent avec ω) et où ii) localement, autour de la qualité minimum ω, l’efficacité sociale croit avec ω. Proposition 2 Sous l’hypothèse 2, il existe une spécification Ω0 ⊂ Ω plus restrictive que Ω pour laquelle le bénéfice social E ∗ et le bénéfice de l’acheteur W ∗ augmentent strictement. Proof. On adopte les mêmes notations que dans la preuve de la Proposition 1 et on suppose Ω0 = [ω 0 , ω̄]. Sous l’hypothèse 2, les entreprises choisissent toujours la spécification la plus basse possible (c’est à dire ω i = ω 0 ), et l’efficacité maximum max B(ω, θ) − ci (ω) i croît avec ω autour de ω. Ainsi l’efficacité E ∗ (Ω0 ) résultant de la procédure avec spécification Ω0 croît avec ω 0 (autour de ω). Pour la spécification Ω0 = [ω 0 , ω̄], le bénéfice de l’acheteur vaut W = B(ω 0 , θ) − ci(2) ({ω0 }) (ω 0 ) et croît avec ω 0 car B(ω, θ) − ci (ω) croit avec ω pour chaque firme i. 11 Lorsque les projets proposés par les firmes ne sont pas équivalents pour l’acheteur public, alors il peut être optimal de préciser la spécification du marché malgré la perte de pression concurrentielle mise en evidence dans la proposition 1. Un résultat de ce type subsiste même sous des hypothèses moins restrictives. Prenons le cas hypothétique où l’acheteur public connait la spécification efficace ω e et supposons que ∂B(ω,θ) ∂ω |ωe 6= 0. Si Ω0 = {ω e }, alors l’entreprise sélectionnée est l’entreprise efficace ie . Considérons maintenant le cas où la spécification est moins fine, de sorte que Ω0ε = [ω e − ε, ω e + ε]. Alors: 1. la spécification Ω0ε conduit à une allocation moins efficace (car l’entreprise efficace choisit une spécification différente de ω e pour diminuer ses coûts).2 2. si de plus, pour i 6= ie , | d c (ω e ) dω i |<| d c e (ω e ) dω i |, alors l’accroissement de pression concurrentielle ne compense pas la perte d’efficacité, et le bénéfice de l’acheteur décroit. 2.3 Critère “best value” L’objectif de cette section est de mettre en évidence deux propriétés particulièrement attractives de la procédure ”best value”. La première est que cette procédure sélectionne la spécification efficace et l’entreprise efficace. La seconde est qu’elle améliore la pression concurrentielle relativement à la procédure spécifiée Ω0 = {ω e } (permettant elle aussi de sélectionner l’entreprise efficace). Proposition 3 La procédure best value où θb = θ (le critère prend en compte le vrai gain social) sélectionne la spécification efficace ω e et l’entreprise effi2 En effet, pour l’entreprise efficace, ∂E(i,ω,θ) |i,ωe = ∂ω 12 0, donc dcie (ω) |ωe 6= dω 0. cace ie . Proof. On note ω ei = arg maxω B(ω, θ) − ci (ω) la spécification qui maximise l’efficacité quand l’entreprise i est sélectionnée. On note aussi E (2) = maxi6=ie ,ω B (ω, θ) − ci (ω). On va montrer que les stratégies suivantes con- stituent un équilibre: pour i 6= ie , la firme i choisit ω ei et pi = ci (ω ei ). La firme i choisit ω e et pie = B(ω e , θ) − E (2) . Ces stratégies forment un équilibre pour la raison suivante. Etant donné ces stratégies, le valeur du critère atteint par ie vaut B(ω e , θ) − pie = E (2) , et le maximum de la valeur du critère atteint par les firmes autres que ie vaut aussi E (2) . Aucune firme autre que ie ne peut surpasser ce critère tout en faisant des profits positifs. Les stratégies des firmes i 6= ie sont donc optimales. Compte tenu des stratégies des firmes i 6= ie, la firme i résoud max p,ω t.q. B(ω,θ)−p≥E (2) p − ci (ω). Le choix ω e, pei est clairement optimal. Ainsi, contrairement à la procédure spécifiée, où l’acheteur public doit connaître ω e afin d’être certain de sélectionner l’entreprise efficace, la procédure best value fait émerger la spécification efficace. Qui plus est, la mise en concurrence par la procédure best value induit une pression concurrentielle supérieure à la procédure spécifiée Ω0 = {ω e}, comme le montre la proposition suivante: Proposition 4 Le prix de passation dans la procédure best value (avec θb = θ) est inférieur ou égal au prix de passation dans la procédure spécifiée Ω0 = {ω e }. Par ailleurs, le bénéfice de l’acheteur dans la procédure best value (avec θb = θ) est supérieur ou égal à celui résultant d’une procédure complètement spécifiée Ω0 = {ω e}. Proof. Dans l’enchère spécifiée où Ω0 = {ω e }, le prix de passation vaut p∗ = c(2) ({ω e}) ≥ c(1) ({ω e }) . Le prix de passation de l’enchère de ”best 13 value” vaut pie = B (ω, θ) − E (2) (voir prop. 3), pie − p∗ ≥ B (ω, θ) − E (2) − c(1) ({ω e }) = E − E (2) ≥ 0. L’intuition pour le premier résultat est immédiate: les deux procédures envisagées sélectionnent la même spécification et la même entreprise. Laisser à des entreprises autres que ie l’opportunité de choisir leur spécification efficace ω ei plutôt que de les contraindre à choisir ω i = ω e accroît la pression concurrentielle sur l’entreprise efficace ie . 2.4 Critère d’évaluation ex post et incertitude Nous nous intéressons dans cette section au cas d’un critère d’évaluation ex post inconnu des firmes lors de la soumission des offres (soit parce que l’acheteur public préfère tenir secrète la règle, soit parce que l’acheteur public ne connait pas bien l’ensemble des variantes possibles et préfère attendre de voir les offres des entreprises). Nous allons montrer que rendre publique la règle après la soumission des offres (plutôt que de l’annoncer avant la soumission) réduit l’efficacité sociale et peut aussi réduire le bénéfice de l’acheteur. L’idée est que dans le cas d’une procédure où la règle d’évaluation n’est pas divulguée à l’avance, les entreprises sont obligées de prendre des paris sur la valeur de θ. Elles ont donc toutes les chances de se tromper. Dans le cas d’une procédure best value, la règle d’évaluation est annoncée à l’avance et l’issue est la suivante: pour chaque réalisation θ ∈ Θ, la procédure sélectionne la spécification ω e(θ) et l’entreprise efficace ie (θ). Sup- posons que d e ω (θ) dθ > 0. Soit Θ1 , Θ2 , ...Θn+1 une partition de Θ. Dans le cas d’une procédure d’évaluation ex post, les entreprises soumettent une seule offre. Il est facile de montrer qu’il existe k0 et q > 0 tels qu’avec probabilité q, les entreprises auront toutes choisi une spécification n’appartenant pas à 14 ω e (Θk0 ).3 Avec probabilité positive l’allocation ne sera donc pas efficace. Supposons en plus que les fonctions de coût des entreprises soient identiques. Alors le prix de passation vaut p∗ (θ) = c(ω e (θ)) dans le cas d’une procédure best value et les profits sont nuls (et donc le revenu de l’acheteur est à son maximum pour θ). Dans le cas d’une procédure ex post, on va montrer que les profits d’équilibre sont nécessairement strictement positifs. En effet, en choisissant ω e (θ i ) avec θi ∈ Θk0 comme défini ci-dessus, l’entreprise i est sûre de faire face, avec probabilité au moins égale à q, à des entreprises e k ⊂ Θk , / Θk0 . On peut donc choisir Θ ayant toutes choisi ω e (θj ) avec θj ∈ e k et a > 0 de sorte que θe ∈ Θ e θ) − c(ω e (θ)) e ≥ a + max B(ω e (θ0 ), θ) − c(ω e (θ0 )). e k , B(ω e (θ), ∀θ ∈ Θ 0 k θ ∈Θ / e et p = c(ω e (θ)) e + a− , l’entreprise i est Ainsi, en choisissant ω i = ω e (θ) i k e k et θ ∈ sélectionnée dans tous les évènements où θ ∈ Θ j / Θ ∀j 6= i, et fait un profit strictement positif (égal à a). Le bénéfice de l’acheteur public est réduit d’autant (en plus de la reduction induite par la perte d’efficacité.) 3 Favoritisme Des opportunités de favoritisme existent dès lors que les procédures de passation de marché ne sont pas transparentes et que l’agent chargé d’administrer le marché peut affecter la procédure d’attribution, par exemple en échange d’un pot-de-vin. Les procédures envisagées dans cette étude sont diversement transparentes. La procédure au moins disant est parfaitement transparente et n’offre 3 Pour chaque entreprise i, soit k(i) l’entier k qui maximise Pr(ωi ∈ ωe (Θk )). Notons que l’on a forcément Pr(ωi ∈ ω e (Θk )) ≤ 1/2 pour tout k 6= k(i). Soit K = ∪i=1,...n k(i). L’ensemble K a au plus n éléments, et donc il existe k0 ∈ / K, et on a donc Pr(ωi ∈ / ω e (Θk0 ) )≥ 1 2n pour tout i. 15 ainsi aucune possibilité de favoritisme. Les procédures reposant sur la définition préalable d’un critère de sélection ne sont transparentes que pour l’attribution du marché: le choix du critère n’est pas transparent et des possibilités de favoritisme sont possibles lors du choix du critère. Enfin, la procédure d’évaluation ex post n’est transparente ni dans l’attribution du marché (le critère peut être choisi sur mesure, après réception des offres), ni avant la soumission des offres, puisque le choix du critère d’évaluation peut être décidé secrètement entre l’agent et une des entreprises, ou communiqué secrètement par l’agent à une des entreprises. L’objectif de cette section est de comparer ces diverses procédures quant aux effets du favoritisme. 3.1 Choix de spécification Pour mettre en évidence l’effet de la corruption sur l’efficacité de la procédure spécifiée nous allons développer le modèle de la section 2.1 en intégrant la corruption de la manière suivante. Avant de déterminer les contraintes de spécifications, l’agent se tourne vers les firmes en leur demandant combien elles sont prêtes à payer pour avoir la possibilité de choisir les contraintes de spécification Ω0 . Nous modélisons le jeu de corruption comme une enchère au premier prix en pots-de-vin dont l’enjeu est le droit de déterminer Ω0 . Le pot-de-vin est une prime de succès: il n’est payé par la firme que si celle-ci obtient le contrat. Lorsque l’agent est corrompu, l’allocation du marché s’opère de la manière suivante: - à t = 1, l’agent sollicite une offre secrète de pot-de-vin bi de chaque firme i. - à t = 2 l’agent offre à la firme (une des firmes) qui offre le pot-de-vin le plus important la possibilité de choisir une spécification Ω0 ⊆ Ω. On note 16 if la firme sélectionnée. La firme sélectionnée communique son choix Ω0if à l’agent. - à t = 3, l’agent annonce la spécification. Si aucune firme n’offre de pot-de-vin à t = 2, il annonce Ω, sinon il choisit Ω0if . L’agent est payé par la firme if si celle-ci obtient le marché. Par ailleurs, pour chaque contrainte Ω0 ⊆ Ω, on définit R(Ω0 ) ≡ c(2) (Ω0 ) − c(1) (Ω0 ), R(Ω0 ) est la rente de la firme gagnante lorsque Ω0 est la spécification offerte dans l’enchère. On considère la situation intéressante où il existe ω, ω 0 ∈ Ω tel que i(1) (ω) 6= i(1) (ω 0 ) où i(1) (ω) = arg mini ci (ω) , c’est à dire une situation où ce n’est pas toujours (pour toutes les spécifications) la même firme qui remporte le marché. On a la Proposition suivante: Proposition 5 La procédure avec corruption définie ci-dessus conduit à la ³ ´ spécification Ωf qui maximise R(Ω0 ) et à la sélection de if = i(1) Ωf . Comparée à la procédure spécifiée Ω0 = {ω e }, l’efficacité sociale se détéri- ore. Le montant du pot-de-vin bif ,est égal à la rente maximale du gagnant i 6= if , quand if ne participe pas à l’enchère en pot-de-vin. ³ ´ Proof. Soit Ωf = arg maxΩ0 R (Ω0 ) , on définit if = i(1) Ωf . Soit Ω∗ = n o ω, i(1) (ω) = if , on a par hypothèse Ω∗ 6= Ω et on définit R∗ = maxω∈Ω / ∗ R (ω) . Le montant R∗ est le montant maximum que les firmes autres que if sont prêtes à payer pour avoir le droit de spécifier. L’entreprise if est prête à ³ payer R Ωf ´ > R∗ . L’enchère en pot-de-vin est donc une enchère clas- sique au premier prix dont l’issue est la suivante: la firme if gagne et offre bif = R∗ . Le résultat principal de la proposition 5 est que la corruption induit un biais anti-concurrentiel: la spécification sélectionnée est celle qui maximise 17 les rentes du gagnant (et donc minimise la pression concurrentielle), ce qui a pour effet de diminuer l’efficacité. On note également que la corruption diminue le bénéfice espéré de l’acheteur public. Le biais anti-concurrentiel peut s’interpréter comme un choix de solution technique non-standard. Ainsi sous le couvert d’un argumentaire en faveur d’une innovation peut se cacher une tentative de favoritisme. Le biais anticoncurrentiel peut aussi s’exprimer dans le choix de solutions techniques que peu de firmes maîtrisent. Ainsi dans le rapport de ”Marchés publics et politique criminelle” Direction des Affaires criminelles et des Grâces Fevrier 1996, on relève le cas suivant. Sur un marché géré par un centre hospitalier, un Cahier des Clauses Techniques Particulières fut établi tel qu’il spécifiait si précisément le matériel de stimulateur et de sondes cardiaques que seule une firme pouvait répondre à l’appel d’offre. Ce résultat est dans l’esprit de Schleifer et Vishny (1993) qui ont eux aussi discuté les liens entre corruption et biais de sélection anti-concurrentiel. 3.2 Choix d’une règle d’évaluation Quel est l’effet de la corruption sur le choix du critère d’évaluation? L’allocation du marché s’opère de la manière suivante: - à t = 1, l’agent sollicite une offre secrète en pot-de-vin bi de chaque firme i. - à t = 2, l’agent offre à la firme (une des firmes) qui offre le pot-de-vin bi le plus important la possibilité de choisir une règle θ de son choix. On note is la firme sélectionnée. La firme sélectionnée communique son choix θif à l’agent. - à t = 3, l’agent annonce le critère B(θif , ω) − p. Ou bien si aucune offre de pot-de-vin n’a été faite à t = 2 l’agent annonce le critère B(θ, ω) − p. Les firmes font leurs offres. 18 - à t = 4 l’agent sélectionne la firme qui maximise le critère. Il est payé par la firme is si celle-ci obtient le marché. On définit: R(θ) ≡ E(θ) − E (2) (θ). Le montant R(θ) correspond à la rente p∗ − ci∗ (ω ∗ ) obtenue par l’entreprise gagnante (rente non diminuée du montant du pot-de-vin bi∗ ) quand le critère 0 vaut θ]. On considère le cas intéressant où il existe θ, θ tel ie (θ) 6= ie (θ0 ) , c’est à dire que ce n’est pas toujours(pour tous les critères) la même firme qui gagne le marché. On a la Proposition suivante: Proposition 6 i) La procédure avec corruption définie ci-dessus conduit au critère θf qui maximise R(θ). L’entreprise sélectionnée est l’entreprise if = ie (θf ) qui maximise l’efficacité pour le critère θ f . Comparée au critère θ (qui sélectionne l’allocation efficace), l’allocation est donc inefficace Proof. L’argument est identique à celui de la Proposition précédente. On définit θf = arg maxθ R(θ), if = ie (θf ) et Θ∗ = n o θ, ie (θ) = if . Par hypothèse Θ∗ 6= Θ où Θ est l’ensemble de tous critères possibles. Soit R∗ = maxθ∈Θ / ∗ R (θ) . Comme dans la proposition précédente, l’enchère en pot-de-vin est une enchère classique au premier prix dont l’issue est la suivante: l’entreprise if enchérit R(θf ) > R∗ et gagne. Il est intéressant de comparer les rentes partagées par la firme gagnante et l’agent selon qu’on utilise une procédure best value ou une procédure spécifiée. Celle-ci vaut maxθ R(θ) dans le premier cas, et maxΩ◦ R(Ω◦ ) dans le second. On a la Proposition suivante: Proposition 7 maxθ R(θ) ≤ maxΩ◦ R(Ω◦ ). Proof. La rente de la firme gagnante dans la procédure de best value avec ³ ´ ³ ´ ³ ´ favoritisme est R(θf ) = E θf − E (2) θ f , où E (2) = maxi6=if ,ω B ω, θf − 19 ³ ci (ω), la rente correspondante dans la procédure spécifiée est R ω f ³ ´ ³ ´ ´ = c(1) ω f − c(2) ω f . Soit if la firme sélectionnée dans ce dernier cas, et ω ∗∗ sont choix de spécification. On va montrer que R(θf ) ≤ R (ω ∗∗ ) . Par ³ ´ définition R(θf ) = B(ω ∗∗ , θf ) − c(1) (ω ∗∗ ) − E (2) θf . Nous utilisons le fait ³ que E (2) θf ´ ≥ B(ω ∗∗ , θf ) − c(2) (ω ∗∗ ) pour obtenir R(θf ) ≤ c(2) (ω ∗∗ ) − c(1) (ω ∗∗ ) = R (ω ∗∗ ). La proposition 7 montre que les rentes de favoritisme dans la procédure de best value sont toujours inférieures aux rentes de favoritisme de la procédure spécifiée. L’intuition est que les rentes sont plus fortes quand la pression concurrentielle est plus faible. La pression concurrentielle est plus faible quand une firme peut choisir la spécification pour laquelle elle a l’avantage comparatif le plus fort. 3.3 Ex-post incertitude et favoritisme Nous avons montré dans la section 3.4, que l’incertitude pouvait nuire à l’efficacité de la mise en concurrence. Nous allons dans cette section montrer que l’incertitude peut être génératrice de rentes de favoritisme. Nous considérons une situation où l’offre gagnante est celle qui maximise un critère de best value mais ce critère n’est pas annoncé à l’avance. Comme dans la section 4.2, le favoritisme consiste à donner à une firme la possibilité de choisir le critère de sélection en échange d’un pot-de-vin avant la remise des offres. Celui-ci est gardé secret pour les autres firmes. L’allocation du marché s’opère de la manière suivante. Soit Θ l’ensemble des critères possibles: - à t = 1, l’agent sollicite une offre secrète en pot-de-vin bi de chaque firme i. - à t = 2, l’agent offre à la firme (une des firmes) qui offre le pot-de-vin bi le plus important la possibilité de choisir le critère. La firme sélectionnée ( if ) communique son choix θif ∈ Θ. 20 - à t = 3, les firmes remettent leurs offres sans connaitre le critère, à l’exception de if (qui connait le critère). - à t = 4 si aucune offre de pot-de-vin n’a été faite à t = 2 l’agent choisit B(θ, ω) − p comme critère de sélection. Sinon, l’agent sélectionne la firme gagnante sur la base du critère θif . Il est payé par la firme if si celle-ci obtient le marché. Comme dans la section 3.4 nous faisons l’hypothèse que les fonctions de coûts des firmes sont identiques. Nous avons le résultat suivant Proposition 8 Si le critère est annoncé à l’avance, il n’y a pas de corruption à l’équilibre. Quand le critère est gardé secret, il est, à l’équilibre, sélectionné par une des firmes qui paye un pot-de-vin positif. Proof. Lorsque les firmes sont identiques et que le critère est annoncé, il n’y a pas de rentes le prix d’équilibre est p = c (ω e (θ)) pour tout θ. En conséquence aucune firme n’offre de pot-de-vin positif, il n’y a pas de favoritisme. Supposons maintenant que le critère soit gardé secret. Alors il n’existe pas d’équilibre en stratégie pure: s’il en existait un, alors le critère, disons θ, serait parfaitement anticipé à l’équilibre, et les firmes choisiraient toutes la spécification efficace ω e (θ) (et feraient un profit nul à l’équilibre). Mais alors, la firme sélectionnée aurait alors interêt à choisir θ0 6= θ, ω e (θ 0 ) et un prix p satisfaisant B(ω e (θ0 ), θ0 ) − p > B(ω e (θ), θ0 ) − c(ω e (θ)) et p > c(ω e (θ0 )). Un tel prix existe forcément par définition de ω e (θ0 ), et il permet à la firme sélectionnée de faire des profits strictement positifs. En stratégie mixte, le critère est incertain, et comme dans la Proposition 5, on obtient que les profits d’équilibre sont strictement positifs. La proposition 8 montre qu’une procédure qui permet de garder le critère de sélection secret jusqu’après la remise des offres, peut faciliter le favoritisme car elle génère de l’incertitude de manière endogène sur le critère finalement utilisé. 21 4 Etude de cas: le marché des fournitures de papier Cette section a pour objet de comparer les procédures de passation de marché dans deux administrations publiques, en l’occurence des ministères, pendant la période 1998- 2000. Nous les appelerons A et B. Afin de simplifier la comparaison des procédures, nous avons considéré un article (raisonnablement) standard, le papier pour photocopieurs (A4 , 80g. cat. C), et pour lequel les besoins des administrations considérées en terme de qualité de papier sont vraisemblablement similaires. Le marché du papier est conditionné par celui de la pâte à papier, dans lequel opèrent 5 leaders mondiaux: International Paper (Etats Unis), Stora Enso(Finlande, Suède), UPM-Kymmene(Finlande), Abitibi-consolidated (Canada) et Sappi (Afrique de Sud).4 Ce marché est caractérisé par une grande volatilité des prix. L’embellie du marché actuel due à la reprise de l’économie en Europe et en Asie, se traduit par exemple par des augmentations de prix très significatives: le cours de certains papiers a doublé de janvier à avril 2000. Aussi pour faire face à une demande inattendue ou bien pour profiter de prix intéressants, les producteurs de papiers peuvent faire le choix d’acheter des lots flash sur le marché international. Ces lots flash sont de qualité très inégale. Instabilité des prix et risque de qualité médiocre sont deux problèmes spécifiques au marché des fourniture de papier auquels les procédures d’achats doivent pouvoir répondre. 4 Ces dernières années ont vu les crises se succéder, menant à une contraction du secteur. Les entreprises françaises ont été mises hors course. 22 4.1 Les procédures Dans les deux administrations, les fournitures de papier sont achetées dans la cadre de la procédure de ”marché à bons de commande”. La procédure aboutit à sélectionner une entreprise, qui s’engage, pendant une période donnée, à livrer sur commande de l’administration, à un prix donné. La définition du marché (durée du contrat, quantités à livrer) ainsi que la procédure exacte de sélection (moins disant, mieux disant) varie d’une administration à l’autre. 4.1.1 Administration A L’administration A procède par appel d’offres ouvert. Les firmes remettent leurs offres dans deux enveloppes. Dans la première enveloppe elles remettent les documents qui servent à établir l’éligibilité du candidat, certificats de l’administration fiscale, sociale, extrait du registre de commerce. Dans la seconde enveloppe, les entreprises soumettent leur offre de prix. Cette offre de prix se présente sous la forme d’un tableau qui donne un prix par tranche (six tranches en tout) de livraison de 40 à 200 ramettes jusqu’a 8801 ramettes et plus. Enfin, dix feuilles de la qualité proposée doivent également être jointe à l’offre. La sélection s’effectue parmi les entreprises éligibles (celles dont les capacités techniques et financières ont été reconnues). Les offres sont classées sur la base d’un critère qui prend en compte le prix et la qualité. La firme qui réalise le meilleur score est sélectionnée. La note technique attribuée aux candidats est établie sur la base de tests en laboratoire. Les candidats sont informés des aspects soumis au test par exemple, tuilage, blancheur. Cependant l’arbitrage entre prix et qualité n’est jamais divulgué: ni avant la mise en concurrence, ni après. De plus, l’administration ne s’est pas fixée de règles explicites conduisant à un tel arbitrage. Le cahier de charge précise un min- 23 imum et maximum d’achat, mais il ne précise pas la répartition par tranche de livraison ou par localité (des livraisons peuvent être exigées dans toute la France.). Les prix peuvent être révisés en cours d’execution du contrat sur la base de l’évolution d’un index de l’INSEE (ils l’ont été une fois en 1998 et une fois en 1999). 4.1.2 Administration B La procédure utilisée par l’administration B se caractérise par une remise en concurrence fréquente. La sélection se fait en plusieurs temps. Dans un premier temps, on détermine les entreprises éligibles (financièrement et techniquement). Dans un deuxième temps, on sélectionne quatre entreprises dites titulaires (parmi les éligibles), avec l’idée que sur les deux années à venir, seules les entreprises titulaires peuvent obtenir un contrat. Jusqu’en 1999, la sélection des titulaires et de l’entreprise gagnante se faisait par une enchère au moins disant, avec contrainte minimale de qualité: les quatre moins disantes parmi celles ayant passé le test de qualité sont dites titulaires, l’entreprise moins-disante obtient le marché pour un trimestre. Deux semaines avant la fin de chaque trimestre, un nouvel appel d’offre (restreint aux titulaires) est lancé pour sélectionner la firme qui fournira l’administration pendant le trimestre suivant. Ce dernier appel d’offre est au moins disant (sans contrainte de qualité minimale). Ayant été confrontée à de gros problèmes de qualité du papier, la sélection des titulaires et des gagnants au moins disant a été abandonnée début 1999. Cette sélection s’effectue désormais au mieux disant. Les critères techniques sont connus des candidats (blancheur, main, passage en machine...). Les notes techniques obtenues dans des tests en laboratoire ”à l’aveugle” sont aggrégés avec l’offre en prix selon une règle bien définie mais tenue secrète: le score final est obtenu en additionnant le classement technique avec 24 le classement en prix. 4.2 Comparaison entre les procédures Les principales différences entre les procédures portent sur i) la durée des contrats, ii) l’engagement sur la quantité totale demandée et les quantités par livraison, iii) le critère de sélection, iv) la constitution d’un pool d’entreprises restreint (les titulaires). Enfin les deux adminitrations se veulent discrètes sur la manière d’aggréger prix et qualité quand ils sont multiples, au moins vis à vis des firmes. Nous passons ici en revue chacun des aspects ci-dessus. i) la durée des contrats. Dans un marché volatil, où la date des décisions d’achats de pâte de papier a un effet significatif sur le coût unitaire du papier, une remise en concurrence fréquente a deux effets. D’une part, elle fait supporter à l’administration le risque sur l’évolution des prix.5 D’autre part, elle permet de sélectionner à chaque trimestre l’entreprise qui a le mieux géré ces achats de pâte à papier. Etant donné que l’acheteur de l’administration a sans doute moins d’aversion au risque que les entreprises, ces deux arguments militent en faveur d’une remise en concurrence fréquente. Notons cependant qu’une remise en concurrence fréquente, surtout si elle est au mieux disant, peut s’avérer coûteuse. Notons aussi que la structure des contrats entre producteurs de papier et producteurs de pâtes à papier est importante. Plus ces contrats sont longs, moins la remise en concurrence fréquente sera effective. ii) Les quantités. Les procédures diffèrent à la fois sur l’engagement concernant la quantité totale (quantité minimale et maximale pour A), et sur la prise en compte de 5 Ce risque est aussi supporté en partie par l’administration, même si la fréquence d’attribution n’est pas très grande, dans la mesure où les prix sont conditionnés à un index qui reflète bien l’évolution des prix de la pâte à papier. 25 la taille des livraisons (prix conditionels à la taille pour A). Une spécification peu précise sur la quantité totale demandée fait supporter aux entreprises un risque sur la demande effective, pouvant conduire à une augmentation des prix. Notons cependant que si l’administration considérée représente un faible pourcentage de l’activité de ces entreprises, l’effet sur les prix sera faible. La taille des livraisons, en revanche, a indiscutablement un effet significatif sur les prix. Les entreprises les mieux informées sur les demandes réelles en terme de taille de livraison sont avantagées dans le processus, que les prix soient ou ne soient pas conditionnels à la taille. Notons cependant que la procédure de l’administration A protège les firmes peu informées d’une mauvaise estimation de la demande réelle, et peut donc accroître la pression concurrentielle. Enfin notons que la procédure la mieux adaptée dépend de la structure des coûts des entreprises. Si les entreprises se différencient plutôt par les coûts de gestion de la taille des lots (transports, stockage) et non par les coûts de production, alors aucune des deux procédures envisagées ne semble bien adaptée. Une procédure alternative, qui consisterait à demander aux entreprises des prix contingents à la taille de livraison, et à sélectionner ensuite, pour chaque taille de livraison souhaitée, l’entreprise la mieux disante, serait sans doute plus adaptée.6 iii) le critère de sélection. L’expérience de l’administration B montre qu’utiliser le prix comme seul critère peut avoir un effet désastreux sur la qualité. Il semble ainsi nécessaire de faire passer à chaque remise en concurrence un test de qualité minimale 6 Notons qu’une fois la sélection effectuée, chaque entreprise aurait intérêt à oeuvrer pour que la taille pour laquelle elle est sélectionnée soit le plus souvent choisie. Mais dans la mesure où les demandes de papier émanent de services très variés, ce risque est sans doute faible. 26 que les entreprises candidates doivent satisfaire. Les deux administrations ont en fait opté pour des solutions plus complexes. L’administration A n’a pas dévoilé de règle pour arbitrer entre prix et qualité, et a même indiqué qu’elle n’utilisait pas de règle! L’administration B a dévoilé la règle suivante (gardée secrète pour les entreprises): Le score final consiste en la somme d’une note technique (4 pour la meilleure, 3 pour la suivante,...) et d’une note financière (4 pour la moins-disante, 3 pour la suivante,...). Le choix d’une telle règle, a priori surprenante car l’écart entre les prix annoncés ne joue aucun rôle, est sans doute une indication de la difficulté à valoriser les différences de qualité entre les soumissionnaires. Enfin, au delà de l’effet sur la pression concurrentielle et les risques de favoritisme, l’absence de critère public ne permet pas de connaître le niveau de performance souhaitée par chaque administration, et donc éventuellement de les comparer, afin par exemple de limiter les dérives en terme de qualité souhaitée. iv) constitution d’un pool d’entreprises restreint (les titulaires). La constitution formelle d’un pool d’entreprises restreint (les titulaires) parmi lesquelles est choisie l’entreprise gagnante à chaque remise en concurrence, est une idée innovante, qui se rapproche de la manière dont fonctionnent les achats dans les entreprises privées. Dans la forme utilisée par l’administration B, elle a pour principal intérêt de diminuer les coûts de remise en concurrence. On pourrait imaginer diverses manières de développer cette idée, et de la rendre encore plus attractive: i) il serait possible de faire payer un droit d’entrée dans le pool (enchère sur droit d’entrée par exemple), ii) il serait aussi possible de prévoir des exclusions temporaires ou définitives du pool en fonction par exemple de la qualité des prestations fournies ou de l’agressivité lors de la participation aux remises en concurrence (les entreprises ayant un score moyen supérieur à la moyenne des scores sont progressivement éliminées du pool). Cette dernière modification du système 27 envisagée par l’administration B est sans doute un moyen de lutter contre la collusion (partage dans des marchés dans le temps - à tour de rôle) qui pourrait s’instaurer entre les firmes du pool. v) des critères secrets. Le caractère secret des critères utilisés semble être la porte ouverte au favoritisme, conscient ou inconscient.7 Les raisons qui poussent les administrations à conserver le secret (vis-à-vis des firmes) sur les tests techniques utilisés et sur la manière d’agréger prix et qualité devraient faire l’objet d’une étude plus approfondie. Pour l’heure, mentionnons que le Conseil de la Concurrence a fait en 1996 (Avis n. 96-A-08 du 02.07.96) une proposition concernant le nouveau Code des Marchés Publics allant dans le sens souhaité par ces 2 administrations. Le Conseil de la Concurrence souhaite en effet qu’on ”n’oblige pas a priori l’acheteur public à définir ses critères de choix, et à les porter à la connaissance des soumissionaires”. L’argument est qu’en ne portant pas à la connaissance des soumissionnaires les critères de choix, on rend l’issue moins prévisible ce qui rend les ententes plus difficiles. Nous souhaitons formuler trois remarques: i) l’évaluation de la qualité peut être déjà une source importante d’incertitude, rendant ainsi l’issue peu prévisible; réduire encore la transparence du processus n’est donc pas forcément nécessaire. ii) si les entreprises souhaitent s’entendre pour que l’une d’entre elles obtienne le contrat, il suffit que les autres fassent des offres extravagantes, et le caractère peu prévisible du processus n’aura que peu d’effet. Notons néanmoins que l’adjonction d’un sytème permettant de pénaliser les entreprises dont les offres seraient significativement plus mauvaises que les 7 Dans l’administration B un contrôle minimum de cohérence peut-être réalisé ex-post puisque le critère (règle de mesure et de pondération) est alors annoncé. Cela n’exclut pas le favoritisme dans la détermination ex-ante de ce critère (voir la partie théorique section 3.3). Dans l’administration A, aucun contrôle n’est possible puisque les critères ne sont annoncés ni avant ni après. 28 autres pourrait être de nature à rendre difficiles les ententes; iii) enfin, on pourrait imaginer d’autres moyens de réduire les ententes, qui ne se fassent pas au détriment de la transparence (voir suggestion du point iv ci-dessus). Pour finir, nous donnons à titre indicatif une comparaison des prix obtenus dans chacun des ministères. Il faut toutefois être prudent sur ces comparaisons car nous ne disposons pas d’informations sur les critères de qualité retenus par les administrations, et sur lesquels les firmes ont sans doute une idée plus précise que la notre. Nous comparons ici les prix de passation arrêtés dans l’administration A pour la tranche de livraison typique de l’admnistration B (4000-8000 ramettes), avec les prix de passation obtenus pour chaque trimestre dans l’adminstration B, pour la même période. Pour l’année 98/99 le prix unitaire (par ramette) arrêté dans la classe de livraison pertinente était de 13.37 FFR HT ce qui correspond à 16.12 TTC FFR (TVA 20.6). Les prix TTC de l’administration B pour le 98/3 (3eme trim) sont de 15.1 FFR, pour 98/4 de 15.98 FFR, pour 99/1, de 14.44 FFR, 99/2 de 13.80 FFR, ce qui fait une moyenne de 14.83 FFR. Le prix moyen dans l’administration B est de presque 9% inférieur au prix moyen de l’administration A. Notons cependant qu’au cours de cette période, l’administration B a été confrontée à un important problème de qualité du papier et s’est trouvée dans la nécessité de refuser certaines livraisons. C’est ce problème qui induira le changement de procédure afin de faire intervenir la qualité dans le critère de choix trimestriel. Pour l’année 99/2000, la convention de prix dans l’administration A pour la tranche 400-8000 ramettes s’élevait à un prix unitaire TTC de 14.17 FFR. Le prix payé par l’administration B pour 99/3 s’élevait à 15.08 FFR, pour 99/4 à 15.33 et pour 2000/1 à 16.88 FFR, ce qui fait une moyenne de 15.76 FFR. Le prix moyen dans l’administration B est de plus de 11% supérieur au prix moyen de l’administration A. Notons cependant que du fait de la hausse 29 des prix sur le marché de la pâte à papier, l’administration A a dû réviser à la hausse tous ses contrats au début 2000. 5 Conclusions et discussion L’objet de cette étude a été d’analyser les modes de mise en concurrence pour l’attribution de marché public et la question du choix des critères de sélection. Trois considérations nous semblent importantes. La première est liée aux possibilités de favoritisme induite par la procédure. Afin de réduire les possibilités de favoritisme, il nous semble important que les acheteurs publics expriment des besoins en terme de niveau de performance plutôt que par l’imposition de contraintes techniques. Il nous semble aussi important que si des besoins (autres qu’un prix le plus bas possible) sont exprimés, ils reflètent les préférences réelles de l’acheteur. En effet, décrire des besoins de performance rend généralement plus difficile la manipulation en faveur d’une firme particulière. De plus, ces besoins de performance une fois exprimés sont plus facilement contrôlables que des besoins techniques, par exemple parce qu’ils deviennent comparable entre différents acheteurs publics. Aussi, il nous parait important qu’ils reflètent les préférences de l’acheteur, car ceci rend la justification de ces besoins moins opaque. La deuxième concerne la pression concurrentielle induite par la procédure. Afin d’accroitre la pression concurrentielle, il nous parait préférable que d’une part l’acheteur public exprime des besoins en terme de niveau de performance,8 et que d’autre part il définisse un arbitrage entre prix et per8 Un exemple intéressant allant dans cette voie est celui fourni par la réforme du marché des photocopieurs réalisée par un service du ministère B. Chaque service est appelé à exprimer ses besoins non pas en termes de photocopieurs mais en termes de performances 30 formance rendant compte de ses propres préférences plutot qu’un objectif minimal de performance. Il faut cependant que cet arbitrage ne se fasse pas au détriment d’une plus grande manipulabilité du critère de la part de l’acheteur public, et il y a donc un arbitrage à faire entre l’accroissement de la pression concurrentielle et la réduction des possibilités de favoritisme. La troisième considération concerne les possibilités de collusion induites par la procédure. Il est parfois indiqué que des critères de sélection secrets rendent plus difficile la mise en oeuvre d’une entente entre les entreprises.9 Il nous semble cependant que, tant du point de vue de l’accroissement de la pression concurrentielle que de la limitation des risques de favoritisme, une définition transparente et préalable des critères de sélection utilisé est désirable. References [1] Bernheim D. Whinston M. (1986) ”Menu auction, Resource Allocation, and Economic Influence” Quarterly Journal of Economics pp 1-32. [2] Brusco F. (1997) ”The Design of Multidimensional Auctions” Rand Journal of Economics Vol 28/1, 63-81. [3] Che Y K (1993) ”Design Competition through multidimentional auction” RAND Journal of Economics Vol 24 No.4669-680. [4] Compte O, A. Lambert-Mogiliansky et T. Verdier (2000) ”Corruption and Competition in Public market Auctions” CEPR Discussion papers N. 2434. c’est à dire de photocopies/mois. 9 Nous avons brièvement discuté les fondements (l’absence de?) de cette assertion en Section 4.2. 31 [5] Ganuza Juan-Jose ”Competition and Cost over-run: Optimal Misspécification of Procurement Contracts” Mimeo 1999. [6] Laffont J-J and J. Tirole (1987) ”Auctioning Incentive Contracts” Journal of Political Economy Vol. 95 (1987) 921-937 [7] Laffont J-J and J. Tirole (1991) ” Auction Design and favoritism” International Journal of Industrial Organization Vol. 9, 9-42 [8] McAfee and Mc Millan (1987) ”Competition for Agency Contracts” Rand journal of Economics Vol 18 296-307. [9] Mc Afee and Mc Millan (1992),”Bidding rings” American Economic Review. [10] Branco F. (1997) ”The Design of Multidimensional auction” Rand journal of Economics Vol 28/ 1, 63-81. [11] Shleiffer et Vishny (1993) ”Corruption” Quartely Journal of Economics 108 599-612. 32