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UNIVERSITE TOULOUSE 1 CAPITOLE
Année universitaire 2015-2016
Première session
Session DECEMBRE 2015
LICENCE EN DROIT ECONOMIE GESTION
MENTION DROIT parcours public et privé
3ème NIVEAU
SEMESTRE 5
GROUPE DE COURS N° 1
DROIT DES LIBERTES PUBLIQUES
MARDI 15 DECEMBRE 2015
13 H – 16 H
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AUCUN DOCUMENT N’EST AUTORISE
SUJET : En vous appuyant, notamment, sur ces deux arrêts, déterminez s’il existe en France une
liberté d’expression cinématographique.
CE, 18 décembre 1959, Société des films Lutétia
Vu 1° la requête et le mémoire présentés pour la société à responsabilité limitée "Les films Lutétia",
dont le siège social est ..., agissant poursuites et diligences de son gérant en exercice, ladite requête et
ledit mémoire enregistrés sous le n° 36385 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 30
septembre 1955 et 25 avril 1956 ;
Vu 2° La requête et le mémoire ampliatif présentés pour le Syndicat français des producteurs et
exportateurs de films, dont le siège social est ..., agissant poursuites et diligences de ses représentants
légaux, ladite requête et ledit mémoire enregistrés sous le n° 36428 comme ci-dessus les 4 octobre
1955 et 3 février 1956 et tendant à ce qu'il plaise au Conseil annuler un jugement en date du 11 juillet
1955 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté la demande de la société "Les Films
Lutétia", tendant à l'annulation, pour excès de pouvoir, de l'arrêté en date du 3 décembre 1954 par
lequel le maire de Nice a interdit la projection du film "Le feu dans la peau", ensemble annuler
l'arrêté susmentionné ; Vu la loi du 5 avril 1884 ; Vu l'ordonnance du 3 juillet 1945 et le décret du 3
juillet 1945 ; Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Considérant que les deux requêtes susvisées sont dirigées contre le même jugement et présentent à
juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre pour y être statué par une seule décision ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête du syndicat français des producteurs
et exportateurs de films : Considérant qu'en vertu de l'article 1er de l'ordonnance du 3 juillet 1945 la
représentation d'un film cinématographique est subordonnée à l'obtention d'un visa délivré par le
ministre chargé de l'information ; qu'aux termes de l'article 6 du décret du 3 juillet 1945, portant
règlement d'administration publique pour l'application de cette ordonnance, "le visa d'exploitation
vaut autorisation de représenter le film sur tout le territoire pour lequel il est délivré" ;
Considérant que, si l'ordonnance du 3 juillet 1945, en maintenant le contrôle préventif institué par des
textes antérieurs a, notamment, pour objet de permettre que soit interdite la projection des films
contraires aux bonnes mœurs ou de nature à avoir une influence pernicieuse sur la moralité publique,
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cette disposition législative n'a pas retiré aux maires l'exercice, en ce qui concerne les représentations
cinématographiques, des pouvoirs de police qu'ils tiennent de l'article 97 de la loi municipale du 5
avril 1884 ; qu'un maire, responsable du maintien de l'ordre dans sa commune, peut donc interdire sur
le territoire de celle-ci la représentation d'un film auquel le visa ministériel d'exploitation a été
accordé mais dont la projection est susceptible d'entraîner des troubles sérieux ou d'être, à raison du
caractère immoral dudit film et de circonstances locales, préjudiciable à l'ordre public ;
Considérant qu'aucune disposition législative n'oblige le maire à motiver un arrêté pris par lui en
vertu de l'article 97 susmentionné de la loi du 5 avril 1884 ;
Considérant que l'arrêté attaqué, par lequel le maire de Nice a interdit la projection du film "Le feu
dans la peau", constitue une décision individuelle ; que, dès lors, le moyen tiré par les requérants de
ce que le maire aurait excédé ses pouvoirs en prenant, en l'espèce, un arrêté de caractère
réglementaire est, en tout état de cause, inopérant ;
Considérant que le caractère immoral du film susmentionné n'est pas contesté ; qu'il résulte de
l'instruction que les circonstances locales invoquées par le maire de Nice étaient de nature à justifier
légalement l'interdiction de la projection dudit film sur le territoire de la commune ;
Considérant, enfin, que le détournement de pouvoir allégué ne ressort pas des pièces du dossier ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que
c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté la demande de la Société
"Les Films Lutetia" tendant à l'annulation de l'arrêté contesté du maire de Nice ;
DECIDE : Article 1er : Les requêtes susvisées de la Société "Les Films Lutetia" et du Syndicat
français des producteurs et exportateurs de films sont rejetées. Article 2 : Expédition de la présente
décision sera transmise au Ministre de l'Intérieur.
CE, 30 juin 2000, Association Promouvoir
Vu 1°/, sous le n° 222194, la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 21
juin 2000 présentée par l'association Promouvoir demandant que le Conseil d'Etat :
1°) annule la décision du 22 juin 2000 du ministre de la culture et de la communication accordant le
visa d'exploitation du film "Baise-moi" en tant qu'elle comporte seulement une interdiction de
représentation aux mineurs de moins de seize ans, assortie de l'obligation d'apposer un avertissement
à l'entrée des salles et d'insérer cet avertissement dans tous les documents publicitaires concernant le
film et qu'elle ne l'inscrit pas sur la liste des films pornographiques ou d'incitation à la violence
soumis aux dispositions des articles 11 et 12 de la loi du 30 décembre 1975 portant loi de finances
pour 1976 ;
2°) prononce le sursis à l'exécution de cette décision ;
3°) condamne l'Etat à lui verser la somme de 10.000 F au titre des frais irrépétibles ;
4°) admette son intervention au soutien de la requête n° 222195 ;
Vu 2°/, sous le n° 222195, la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 23
juin 2000 présentée par M. et Mme Luc H..., M. et Mme A..., M. et Mme Georges B... ; M. et Mme
H... et autres demandent que le Conseil d'Etat :
1°) annule la décision du 22 juin 2000 du ministre de la culture et de la communication accordant le
visa d'exploitation du film "Baise-moi" en tant qu'elle comporte seulement une interdiction de
représentation aux mineurs de moins de seize ans, assortie de l'obligation d'apposer un avertissement
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à l'entrée des salles et d'insérer cet avertissement dans tous les documents publicitaires concernant le
film et qu'elle ne l'inscrit pas sur la liste des films pornographiques ou d'incitation à la violence
soumis aux dispositions des articles 11 et 12 de la loi du 30 décembre 1975 portant loi de finances
pour 1976 ;
2°) prononce le sursis à l'exécution de cette décision ;
3°) condamne l'Etat à lui verser la somme de 10.000 F au titre des frais irrépétibles ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la Convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;
Vu le code de l'industrie cinématographique ;
Vu le code pénal ;
Vu la loi de finances du 30 décembre 1975 ;
Vu le décret n° 90-174 du 23 février 1990 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n°
87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Considérant que les requêtes de l'association Promouvoir et de MM. et Mmes H..., A... et B... sont
dirigées contre une même décision ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur la recevabilité des requêtes :
Considérant que les requérants contestent la décision du 22 juin 2000 du ministre de la culture et de
la communication accordant le visa d'exploitation au film "Baise-moi" assorti de l'interdiction de sa
représentation aux mineurs de moins de seize ans et de l'obligation d'apposer à l'entrée des salles et
d'insérer dans tous les documents publicitaires concernant le film un avertissement ainsi rédigé : "Ce
film, qui enchaîne sans interruption des scènes de sexe d'une crudité appuyée et des images d'une
particulière violence, peut profondément perturber certains des spectateurs" ; que tant l'association,
eu égard à son objet social, que MM. et Mmes H..., A... et B..., en qualité de parents d'enfants âgés de
plus de seize ans et de moins de dix-huit ans, justifient d'un intérêt leur donnant qualité pour déférer
cette décision au juge de l'excès de pouvoir ;
Sur les interventions :
Considérant que MM. et Mmes D..., de Chanterac, Tertrais, G..., Loyer, de Z..., Barthelemy, E..., Y...
et C... justifient d'un intérêt à intervenir au soutien des requêtes ; que, dès lors, leur intervention est
recevable ;
Sur la légalité de la décision attaquée :
Sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen des requêtes :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le film "Baise-moi" est composé pour l'essentiel d'une
succession de scènes de grande violence et de scènes de sexe non simulées, sans que les autres
séquences traduisent l'intention, affichée par les réalisatrices, de dénoncer la violence faite aux
femmes par la société ; qu'il constitue ainsi un message pornographique et d'incitation à la violence
susceptible d'être vu ou perçu par des mineurs et qui pourrait relever des dispositions de l'article 22724 du code pénal ; que, par suite, dès lors que les dispositions de l'article 3 du décret du 23 février
1990 susvisé ne prévoient pas qu'une oeuvre cinématographique puisse être interdite de
représentation aux mineurs de moins de dix-huit ans autrement que par son inscription sur la liste des
films pornographiques ou d'incitation à la violence soumis aux dispositions des articles 11 et 12 de la
loi du 30 décembre 1975 portant loi de finances pour 1976, le film relevait de l'inscription sur cette
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liste ; qu'en se bornant à assortir le visa d'exploitation du film "Baise-moi" d'une interdiction aux
mineurs de moins de seize ans et d'un avertissement, le ministre de la culture et de la communication
a entaché sa décision du 22 juin 2000 d'excès de pouvoir ; que les requérants sont fondés à en
demander l'annulation ;
Sur les conclusions de l'association Promouvoir et de M. et Mme H..., M. et Mme A..., M. et Mme
B... tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à payer à
l'association Promouvoir, d'une part, et à MM. et Mmes H..., A... et B..., d'autre part, la somme de
10.000 F qu'ils demandent respectivement au titre des sommes exposées par eux et non comprises
dans les dépens ;
Sur les conclusions de l'Etat tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10
juillet 1991 :
Considérant que les dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que
l'association Promouvoir, d'une part, et MM. et Mmes H..., A... et B..., d'autre part, lesquels ne sont
pas les parties perdantes dans la présente instance, soient condamnés respectivement à payer à l'Etat
la somme de 10.000 F au titre des sommes exposées par lui et non comprises dans les dépens ;
Article 1er : L'intervention de MM. et Mmes D..., de Chanterac, Tertrais, G..., Loyer, de Z...,
Barthelemy, E..., Y... et C... est admise.
Article 2 : La décision du 22 juin 2000 du ministre de la culture et de la communication accordant un
visa d'exploitation au film "Baise-moi" est annulée.
Article 3 : L'Etat est condamné à payer à l'association Promouvoir, d'une part, et à MM. et Mmes
H..., A... et B..., d'autre part, la somme de 10.000 F en application des dispositions de l'article 75-I de
la loi du 10 juillet 1991.
Article 4 : Les conclusions de l'Etat tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi
du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à l'association Promouvoir, à MM. et Mmes Luc H...,
Bruno A..., Georges B..., M. et Mme Dominique D..., M. et Mme X... de Chanterac, M. et Mme
Jérôme J..., M. et Mme Luc G..., M. et Mme Frédéric F..., Mme Bénédicte de Z..., M. et Mme I...
Barthelemy, M. et Mme Yves E..., M. et Mme Marc Y..., M. et Mme Guillaume C... et au ministre de
la culture et de la communication.
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