Programme éditorial - Page des libraires

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Programme éditorial - Page des libraires
Programme éditorial
rentrée littéraire 2014
MISE EN VENTE DU 28 AOÛT 2014
MARION RICHEZ
L’ODEUR DU MINOTAURE
premier roman
128 pages / 14 euros
CATHERINE MAVRIKAKIS
LA BALLADE D’ALI BABA
roman
200 pages / 18 euros
MISE EN VENTE DU 11 SEPTEMBRE 2014
YANICK LAHENS
BAIN DE LUNE
roman
280 pages / 20 euros
À PARAÎTRE LE 2 OCTOBRE 2014
ROBERT SEETHALER LE TABAC TRESNIEK
roman traduit de l’allemand (Autriche) par Élisabeth Landes
320 pages / 22 euros
En août 1937, le jeune Franz Huchel quitte ses montagnes autrichiennes pour
faire à Vienne son apprentissage auprès d’Otto Tresniek, buraliste unijambiste,
bienveillant et caustique, qui ne plaisante pas avec l’éthique du métier. Au Tabac
Tresniek, se mêlent classes populaires et bourgeoisie juive de la Vienne des années
trente. Franz fait là son éducation politique et sentimentale, sous la houlette du
buraliste et du « docteur des fous », Sigmund Freud en personne, grand fumeur
de cigares. Mais, en mars 1938, l’Autriche est rattachée à l’Allemagne nazie.
Otto Tresniek, peu disposé à boycotter sa clientèle juive, s’attire les foudres de la
Gestapo, tandis que Freud se résigne à émigrer en Angleterre…
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MISE EN VENTE
DU 28 AOÛT 2014
MARION
RICHEZ
L’ODEUR DU
MINOTAURE
premier roman
De la blessure que lui firent les fils de fer barbelés,
alors qu’elle s’élançait, confiante, dans un champ
où broutaient des vaches, la petite fille n’a gardé
qu’une trace sur le bras. Elle qui ne voulait pas
grandir a réussi un parcours sans faute. Son enfance
terne, sa première histoire d’amour avec un jeune
homme aussi rangé qu’elle, elle les a remisées
bien loin. Marjorie, après de brillantes études, est
devenue la « plume » d’un ministre. Caparaçonnée
dans ses certitudes, belle et conquérante, elle se
joue des hommes et de son passé.
Mais le numéro qui s’affiche sur l’écran de son
téléphone portable alors qu’elle s’apprête à rejoindre
son ministère, elle le reconnaîtrait entre mille, bien
qu’elle ne l’ait plus composé depuis bien longtemps.
Sa mère l’appelle au chevet de son père mourant.
Quand, au volant de sa puissante voiture, elle quitte
l’autoroute qui la conduisait chez ses parents pensant
prendre un raccourci, un choc violent la fait s’arrêter
net. Elle vient de heurter un animal. Bouleversée,
tremblante dans la nuit de la forêt, elle recueille le
dernier souffle du grand cerf qu’elle a tué. Et c’est à
ce moment que sa vie bascule.
La femme pressée et sûre d’elle vacille, et même
si, un temps, elle parvient à donner le change,
quand elle rentre à Paris après avoir enterré son
père, sa cuirasse est fendue. Le trouble s’empare
d’elle… et du lecteur.
L’Odeur du Minotaure, comme les contes
initiatiques auxquels il s’apparente par l’extrême
concision de sa langue et la simplicité de sa
structure, est un beau roman de la métamorphose.
Née dans le Nord en 1983, MARION RICHEZ grandit
à Paris puis dans la Creuse ; elle y prend goût au
théâtre via la Scène nationale d’Aubusson. Reçue à
l’École normale supérieure de la rue d’Ulm, agrégée de
philosophie, elle prépare un doctorat à Paris-Sorbonne
IV sur la conscience corporelle. Ses recherches
universitaires s’inscrivent dans une quête générale du
mystère du corps et de l’incarnation, qui l’a amenée à
devenir l’élève de la comédienne Nita Klein.
N° D’ÉDITEUR : 132
ISBN : 978-2-84805-166-6
128 PAGES / 14 e
EXTRAIT
« Soudain je vois le panneau d’une sortie
imminente dont je crois reconnaître le nom,
et – pourquoi ? Pour ne plus entendre le
vacarme du vide à la place de mon cœur ? –
sans réfléchir je braque et quitte l’autoroute
de ma vie planifiée, pour m’engouffrer sur
une départementale inconnue, dont je ne
tarde pas à comprendre que ce n’est pas du
tout la bonne route. Je m’éloigne de chez
mes parents au lieu de me rapprocher. Mais
il est trop tard pour retrouver la sortie ;
et j’ai l’idée d’accélérer, pour quitter ce
département par les routes nationales, ne
pas perdre la cadence de l’autoroute. Ma
voiture traverse à toute allure des villages
morts, éclairés d’un réverbère qui les
distingue à peine du reste. Je cherche des
panneaux indiquant des villes alentour,
des noms familiers ; je n’en vois aucun.
Derrière moi, il n’y a plus rien. La route est
dissoute : tout s’effondre sous mon propre
poids ; je dois fuir. J’accélère. Je n’ai même
pas le temps de tendre la main pour allumer
la radio, tant j’ai peur d’être engloutie
par la nuit. Je suis sortie du territoire des
hommes.
Autour de moi, les arbres, de grands
frênes au tronc pâle comme des jambes
d’éléphant, blêmissent encore sous le fouet
de mes phares. J’accélère. Je fuis toujours
plus en avant de moi-même, gagnée peu à
peu par la nuit qui se rapproche derrière
moi. Mais déjà il est trop tard : du néant
s’est infiltré à l’intérieur de la carrosserie ;
ou bien c’est la poche scellée dans ma
poitrine qui s’est percée. Déjà je sens
une sueur froide me geler les os ; j’ouvre
la bouche pour crier, mais ma gorge est
verrouillée ; quelque chose comme la main
d’un mort me palpe insolemment le dos,
dérange mon chignon, pince le lobe de mes
oreilles, et son haleine glacée givre ma
peau et jusqu’à mes pendants d’argent. Il
y a quelqu’un, il y a quelqu’un derrière
moi, qui est mort : seuls les coups de mon
cœur comme des poings dans ma poitrine
retentissent encore de la vie. Sauvez-moi,
sauvez-moi de ça…
Une masse noire a bondi devant moi ;
toute la tension accumulée se détend comme
un ressort et je hurle, je hurle de toutes mes
forces en cherchant le frein du pied… »
MISE EN VENTE
DU 28 AOÛT 2014
CATHERINE
MAVRIKAKIS
LA BALLADE
D’ALI BABA
roman
Dédiée « aux quarante voleurs », La Ballade d’Ali
Baba est un hommage ébouriffant au père disparu.
De Key West, où il conduit ses filles dans sa Buick
Wildcat turquoise afin de saluer la naissance de l’année 1969, à Kalamazoo, où il les dépose pour une
semaine et où il ne viendra jamais les récupérer, en
passant par Las Vegas où il prétend utiliser son aînée
de dix ans comme porte-bonheur près des tables de
jeu, Vassili Papadopoulos donne le change et veut
épater la galerie. De ce père fantasque et séducteur,
qui très tôt usa la patience de sa femme, et qu’elle
ne revit que sporadiquement après le divorce de ses
parents, Érina, la narratrice du roman, n’a pas été
dupe longtemps.
Le premier saisissement passé, c’est à peine si la
spécialiste de Shakespeare qu’elle est devenue s’étonne
de le retrouver, vieillard frêle et vêtu d’un léger pardessus, dans les rues de Montréal balayées par une
tempête de neige, alors qu’il est mort neuf mois plus
tôt… Sans avoir rien perdu de son aplomb, il lui explique doctement, lui qui a quitté l’école à quatorze
ans, que son apparition lui permettra de comprendre
enfin la phrase de Hamlet – « le temps est hors de ses
gonds » –, à laquelle elle a consacré deux chapitres
de sa thèse. Érina pressent qu’il ne va pas s’arrêter là.
Catherine Mavrikakis tutoie les fantômes et se
joue de la chronologie dans cet éblouissant portrait
d’un homme dont l’existence nous est donnée par
éclats, comme à travers un kaléidoscope. À Rhodes
qu’il quitta en 1939 avec sa famille ; à Alger où,
très jeune, il dut gagner sa vie ; à New York où il
vint en 1957 « faire l’Américain » : partout, il est
terriblement présent, et terriblement attachant.
CATHERINE MAVRIKAKIS est née à Chicago en
1961, d’un père grec et d’une mère française. Elle
enseigne la littérature à l’université de Montréal.
Depuis la parution de son premier essai en 1996,
elle construit une œuvre littéraire de premier plan.
Deux de ses romans ont déjà été publiés chez Sabine
Wespieser éditeur, Le Ciel de Bay City (2009) et Les
Derniers Jours de Smokey Nelson (2012).
N° D’ÉDITEUR : 131
ISBN : 978-2-84805-165-9
200 PAGES / 18 e
INCIPIT
Dans la lumière incandescente de l’aurore,
les rayons impétueux du soleil à peine
naissant tachaient la nuit d’une clarté
carmin. Nous roulions à tombeau ouvert
à travers tout Key Largo. Les néons des
enseignes des motels vétustes bâtis à la
hâte dans les années vingt et trente et
les panneaux multicolores des bars de
danseuses nues datant de 1950 faisaient
des clins d’œil au ciel tumescent du jour
à venir. Les phares des voitures roulant
en sens inverse nous éblouissaient par
intermittence. Ils nous lançaient des signaux
de reconnaissance lubriques.
Nous entamions les Keys.
[…]
La voiture tanguait, désorientée. Par
moments, elle se transformait en navire
et fendait, victorieuse, les vagues qui,
quelques instants plus tôt, semblaient la
menacer d’engloutissement. Après avoir
volontairement plongé dans la mer, la
Buick, char d’assaut devenu bathyscaphe,
nous faisait visiter les fonds sous-marins,
en dansant à travers les bancs de poissons
fluorescents. Elle suivait un poulpe aux
ventouses collantes et s’alignait sur la
démarche d’une étoile de mer qui nous
indiquait le sud. Puis, métamorphosée en
animal amphibie, en alligator menaçant, elle
émergeait lentement du milieu aquatique. Elle
traversait des marais infinis, puis reprenait
sa course erratique sur la U.S. Route 1, celle
qui menait à l’extrémité du pays, aux confins
de ce continent dont nous ne connaissions,
nous, que la cruauté et la morsure hivernales.
Mon père venait de me réveiller. J’étais
installée à ses côtés, les yeux voraces devant
le paysage insensé, violent, qui s’étalait
devant moi. À Orlando, je m’étais endormie
sur la banquette avant. Alors que la Buick
Wildcat turquoise consommait les milles
nous séparant de notre destination et que
la musique rock à la radio me protégeait du
monde, par son ronronnement ininterrompu,
je dormais, bienheureuse.
Je m’étais assoupie vers deux heures
du matin, ne pouvant plus garder les yeux
ouverts, et je n’avais donc rien vu de notre
traversée des autoroutes de Miami. L’océan
m’était encore inconnu. Je ne l’avais jamais
embrassé du regard. Depuis ma naissance,
il était une chimère magnifique, intensément
impossible. Ici, inopinément, il s’offrait à
moi dans le matin coloré. »
YANICK LAHENS
BAIN DE LUNE
roman
Après trois jours de tempête, un pêcheur découvre, échouée
sur la grève, une jeune fille qui semble avoir réchappé à
une grande violence. Mais y a-t-elle vraiment réchappé ? La
voix de la naufragée s’élève, qui en appelle à tous les dieux
du vaudou et à ses ancêtres, pour tenter de comprendre
comment et pourquoi elle s’est retrouvée là. Cette voix
expirante viendra scander l’ample roman familial que
déploie Yanick Lahens, convoquant les trois générations qui
ont précédé la jeune femme pour tenter d’élucider le double
mystère de son agression et de son identité.
Les Lafleur ont toujours vécu à Anse Bleue, un village
d’Haïti où la terre et les eaux se confondent. Entre eux et
les Mésidor, devenus les seigneurs des lieux, l’histoire est
ancienne, et le ressentiment aussi. Il date du temps où les
Mésidor ont fait main basse sur toutes les bonnes terres de
la région. Les Lafleur vivent depuis lors du maigre produit
de leur petite exploitation.
Quand, au marché, Tertulien Mésidor, cinquante-cinq ans,
s’arrête comme foudroyé devant l’étal d’Olmène (dont le
grand-père était un Lafleur), seize ans à peine, l’attirance
est réciproque. La passion de ces deux-là va s’écrire sous le
regard des hommes et des dieux, à rebours des idées reçues
sur une île à genoux où les femmes seraient les jouets des
puissants. Leur enfant sera le début d’une lignée, et bientôt
Olmène quittera la case familiale pour aller vivre dans la
maison que lui fait construire Tertulien.
Mais, dans cette île également balayée par les ouragans
politiques, le monde nouveau vient chevaucher le monde
ancien. En ce début des années soixante, des camions passent
de village en village pour conduire des hommes aux grands
rassemblements qui doivent se tenir à Port-au-Prince en
l’honneur de l’« homme à chapeau noir et lunettes épaisses ».
Un voile noir s’abat pour longtemps sur Anse Bleue…
Prenant à témoin le chœur immémorial de ces villageois à
qui elle donne corps et chair, Yanick Lahens, portée par une
langue d’un sourd lyrisme, fait entendre la voix des oubliés
de son pays, la masse silencieuse de ces paysans avec
lesquels s’écrit pourtant l’histoire. Son roman est magistral.
EXTRAIT
« Le regard fuyant des hommes, celui
légèrement effaré des femmes à l’arrivée de
ce cavalier, tout laissait croire qu’il s’agissait
d’un être redoutable et redouté. Et c’est vrai
que nous redoutions tous Tertulien Mésidor.
Tertulien Mésidor aimait traverser tous les
villages jusqu’aux plus lointains lieux-dits
pour mesurer sa force. Évaluer le courage
des hommes. Soupeser la vertu des femmes.
Et vérifier l’innocence des enfants.
Il avait surgi des couleurs cotonneuses du
devant-jour. À cette heure où, derrière les
montagnes, un rose vif défait des lambeaux
de nuages pour déferler à bride abattue sur
toute la campagne. Assis sur son cheval gris
cendre, il était comme toujours coiffé d’un
chapeau de belle paille à large bord rabattu
sur deux yeux proéminents. Il portait un
coutelas suspendu à sa ceinture et traînait
à sa suite deux autres cavaliers, qui
avançaient du même pas lent et décidé que
leur maître.
Tertulien Mésidor se dirigea vers l’établi
aux poissons sentant fort les tripes et la chair
en décomposition. À son approche, nous nous
étions mis à parler très fort. Bien plus fort
qu’à l’accoutumée, vantant la variété des
poissons, la qualité des légumes et des vivres,
mais sans lâcher des yeux le cavalier. Plus
nous le guettions et plus nous parlions fort.
Notre vacarme dans cette aube n’était qu’un
masque, un de plus, de notre vigilance aiguë.
Quand sa monture se cabra, le cortège se
figea en même temps que lui. […]
À peine avait-il avancé de quelques
mètres qu’il tira cette fois sur les rênes
pour s’arrêter à nouveau. Le mouvement
fut si brusque que les deux autres cavaliers
eurent du mal à retenir leurs chevaux qui
piaffaient eux aussi. Tertulien Mésidor
venait d’entrevoir, assise entre toutes les
femmes, Olmène Dorival, fille d’Orvil
Clémestal, dont le sourire fendait le jour
en deux comme un soleil et qui, d’un geste
nonchalant, avait torsadé le bas de sa jupe
pour la glisser entre ses cuisses. Deux yeux
la déshabillaient déjà et elle n’en avait pas
le moindre soupçon. »
YANICK LAHENS vit en Haïti. Dans ses romans – chez Sabine
Wespieser éditeur, La Couleur de l’aube (2008 ; prix RFO
2009) et Guillaume et Nathalie (2013) – comme dans ses
nouvelles et ses essais, elle a toujours brossé sans complaisance
le tableau de la réalité caribéenne. Failles (Sabine Wespieser
éditeur, 2010), récit écrit dans l’urgence après le tremblement
de terre, a marqué par sa lucidité et son exigence.
N° D’ÉDITEUR : 112
ISBN : 978-2-84805-117-8
280 PAGES / 20 e
© Photos : Marco Castro pour Marion Richez, Marie-Reine Mattera pour Catherine Mavrikakis, Jacques Leenhardt pour Yanick Lahens.
MISE EN VENTE
DU 11 SEPTEMBRE 2014