la grande dame en noir - Lionel Dérot Communication

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Cette lampe créée en 1972 est un
objet presque vivant ! Souple,
élancée, joueuse, elle sait se plier aux
multiples besoins d’éclairage de son
heureux propriétaire.
aites l’expérience. Dans un appartement vide, posez
sur le beau parquet blond une lampe Tizio grand modèle,
noire. Par beau temps, les lignes épurées de ses grands
bras fins se détacheront en contre-jour sur la fenêtre
éclairée d’un soleil de printemps. Émotion garantie.
S’il fait sombre, branchez-la simplement. Appuyez sur
le petit interrupteur rouge, position I pour une lumière
douce, position II pour une lumière plus vive. Remarquez
au passage le petit clic qui suggère immédiatement
que nous avons affaire à un objet solide et fiable.
L’enchantement est immédiat : comment une simple
lampe peut-elle à ce point transformer une pièce ? Sa
présence est comparable à l’improbable visite surprise
d’une star de cinéma italienne en robe du soir. Plus son
environnement est dépouillé, plus elle est à l’aise, à
l’image d’une danseuse se livrant à des exercices d’assouplissement sur une scène de théâtre. Car elle sait tout
faire. Éclairer l’endroit précis du bureau où l’on souhaite
bénéficier d’un éclairage intime pour écrire une lettre
d’amour avec un beau stylo plume – ce qui soit dit en
passant a tout de même un peu plus d’allure qu’un clavier
d’ordinateur, qu’elle sait par ailleurs très bien caresser
de lumière. Éclairer une gravure ancienne, son socle
lourd et sécurisant tranquillement posé sur la console
de l’entrée. Flasher toute une pièce pour aider les
étourdi(e)s à retrouver leurs clés de voiture. Donner
une douce lumière aux visages des copains venus boire
l’apéro. Ses bras de géante ne l’empêchent pas de bouger,
puisqu’elle peut venir déposer son flux de lumière à
l’endroit souhaité, au millimètre près, grâce à son ingénieux système de contrepoids qui lui autorise toutes
les positions sans perte d’équilibre. « Un seul être vous
manque, et tout est dépeuplé », dit-on. Pour Tizio, c’est
l’inverse : une seule lampe Tizio dans une pièce et elle
est habitée.
Dessinée en 1972 par Richard Sapper, designer d’origine allemande, éditée par Artemide à Milan, la grande
dame en noir de la lumière est un des classiques du
design. Elle porte très bien ses trente-sept ans, n’a pas
pris une ride et séduit toujours toutes les générations.
À l’époque où les oranges vifs, les marrons et les verts
acides envahissaient nos appartements, elle est venue
nous apporter une leçon de sobriété, d’intelligence élégante ou d’élégance intelligente. L’épreuve du temps
est impitoyable pour certains objets. Tizio la traverse
62 I convergences > mars//2009
la grande dame
en noir
Lionel Dérot
Sous son apparente fragilité
sommeille une créativité de haut
niveau. Fiat lux !
avec brio. Le temps qui passe lui donne même des lettres
de noblesse supplémentaires. On la rencontre dans les
endroits les plus inattendus, dans le capharnaüm d’un
atelier de menuiserie, sur le bureau d’un architecte, sur
un meuble ancien dans un château du xvie. Elle se plaît
partout.
Sa conception basée sur des solutions technologiques automobiles appliquées au design ne surprend
plus personne, mais il s’agit d’une véritable innovation.
La petite ampoule halogène de phare automobile
permet de réduire considérablement la taille de l’abatjour, qui devient alors un réf lecteur de très petite
dimension. La basse tension permet de faire circuler
l’électricité dans ses bras et d’orienter l’éclairage à 360
degrés sans avoir de fil électrique. Nous sommes là en
présence d’un objet intelligent, parce qu’il se sert de la
technologie pour créer de l’élégance. Le bon design est
l’histoire d’un mariage réussi entre la forme et la fonction. C’est pourquoi Tizio figure en bonne place au
Metropolitan Museum of Art de New York 1972 année de création
de la lampe Tizio...
>> Ouverture au public du musée national
des Arts et Traditions populaires à Paris.
>> Exposition internationale d’art
contemporain à Kassel, avec pour thèmes
l’hyperréalisme et l’art conceptuel.
>> Construction de la tour Montparnasse à Paris.
>> Parution de l’album Exile on Main Street
des Rolling Stones.
>> Michel Polnareff chante On ira tous au
paradis.
>> Quelques automobiles circulant en 1972 :
Citroën SM, Renault 8 et 10, Fiat 128.
quelques
adresses
www.metmuseum.org
www.artemide.com
www.madeindesign.com