l`etat d`avancement de la reforme de la securite civile
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L’ETAT D’AVANCEMENT DE LA REFORME DE LA SECURITE CIVILE Antonio CACI Octobre Editrice responsable : A. Poutrain – 13, Boulevard de l’Empereur – 1000 Bruxelles 2009 Introduction ............................................................................................ 2 A. B. C. D. E. Organisation actuelle de la sécurité civile ...................................... 3 1. Les services régionaux d’incendie ............................................... 3 2. La Protection civile.................................................................... 5 3. Les services d’aide médicale urgente (SAMU) ............................... 5 La réforme de mai 2007 ................................................................. 6 1. Les principes ............................................................................ 6 2. La nouvelle organisation des services d’incendie ........................... 7 Le fonctionnement ......................................................................... 7 1. Le financement de la zone ......................................................... 8 2. Un nouveau statut pour le personnel........................................... 8 3. Le lien avec la réforme de l’Aide médicale urgente ........................ 9 La mise en œuvre de la loi de 2007 ................................................ 9 1. Etat d’avancement .................................................................... 9 2. Les organes mis en place pour la mise en œuvre de la réforme ...... 9 3. Le résultat du conclave budgétaire ........................................... 11 4. Que retenir de tout cela ? ........................................................ 12 5. Les pistes des différentes parties à la réforme. ........................... 13 Conclusion : quelles pistes pour l’avenir....................................... 14 1 Institut Emile Vandervelde – www.iev.be - [email protected] Introduction La loi du 15 mai 2007 a profondément réformé l’organisation de la sécurité civile dans notre pays. Cette réforme était guidée par trois grands principes : le droit à l’aide la plus rapide et la plus adéquate, un même niveau de protection pour une contribution équivalente et le changement du niveau dauquel s’organise la gestion des services (des communes vers des structures supra-communales : les Zones de secours). Cependant, à l’heure actuelle, cette réforme n’est toujours pas effective. A l’exception de l’Arrêté royal délimitant le territoire des nouvelles zones de secours et de celui instituant une commission d’accompagnement de la réforme, aucun autre texte d’application de la loi (statut, organisation de la zone, normes minimales, financement) n’a été adopté. La sécurité civile est donc toujours principalement organisée par la loi de 1963, à l’exception de l’application du principe de l’intervention du service de secours adéquat le plus rapide. Le financement de la réforme est un élément important pour sa mise en œuvre. Selon certaines estimations la réforme couterait entre 180 et 200 millions EUR soit une augmentation de 35 % au regard du coût actuel. Le principe du rééquilibrage progressif des efforts financiers des communes de la zone de secours et du fédéral vers une parité 50/50, ayant été inscrit dans la loi de 2007, implique que le surcout de la réforme soit pris en charge par l’autorité fédérale. A l’heure actuelle, la sécurité civile est principalement du ressort des communes, non seulement, parce qu’elles contribuent à 90 % de leur coût total, mais surtout parce que la bonne organisation des services de secours et leur bon fonctionnement relèvent de leur responsabilité. Les difficultés budgétaires actuelles ne permettent ni à l’autorité fédérale ni aux communes de disposer des moyens financiers suffisants pour la mise en œuvre immédiate et complète de la réforme des services de secours. Malgré cette situation, il est nécessaire de poursuivre l’amélioration de la qualité des services de secours, des conditions de travail et de formation des pompiers, de rendre plus transparent les mécanismes de financement, d’amplifier les coopérations et les synergies entre les différents services de secours, ainsi que de continuer à investir dans les équipements. Il convient de s’interroger sur un phasage de la réforme et d’un avancement par étapes en fonction des marges budgétaires du Fédéral. Dans un premier temps, des solutions concrètes aux problèmes urgents rencontrés sur le terrain (formation des pompiers, temps de travail, amplification des collaborations entre SRI) pourraient être apportées et dans un second temps, la mise en place effective des nouvelles zones de secours, la réforme du statut et les nouveaux mécanismes de financement pourrait être abordées dans la sérénité. 2 Institut Emile Vandervelde – www.iev.be - [email protected] A. Organisation actuelle de la sécurité civile La sécurité civile recouvre l’ensemble des moyens mis en œuvre par un Etat pour protéger ses citoyens contre les incendies, les accidents et les calamités (catastrophes naturelles, sinistres, épidémies, …), ainsi que l’aide médicale urgente. Dans notre pays, les missions de sécurité civile sont assurées principalement par les services régionaux d’incendie qui relèvent des communes, par la Protection civile les services de l’aide médicale urgente dont les missions sont essentiellement remplies par les pompiers. D’autres services de l’Etat assurent aussi des missions spécifiques de sécurité civile : on peut citer, le Centre de crise du SPF Intérieur, l’Agence fédérale de contrôle nucléaire et dans des cas exceptionnels, l’Armée. Les normes générales de prévention contre l’incendie sont de la compétence fédérale. Les Régions sont aussi compétentes pour imposer des normes particulières en lien avec leurs compétences (notamment le logement). Au niveau local, c’est le bourgmestre qui reste l’autorité administrative responsable de la prévention et de la sécurité. 1. Les services régionaux d’incendie Organisation et fonctionnement Les services régionaux d’incendie (SRI) dépendent directement des communes. C’est une des missions de base des communes : assurer la sécurité, la salubrité et la tranquillité publique. L’intercommunale d’Incendie de Liège et d’Environs est la seule intercommunale chargée de cette mission pour les compte des communes associées. Les services d’incendie sont au nombre de 251 pour les 589 communes belges, dont 85 en Wallonie et un seul – le SIAMU – pour Bruxelles. Ils sont classés en 4 catégories en fonction de leur importance et de leur personnel : les centres Z sont composés essentiellement de pompiers volontaires, généralement, on y trouve aussi un professionnel. Ce sont la majorité des services : 122 en Belgique, dont 53 en Wallonie. les centres Y composés de pompiers professionnels et de pompiers volontaires. Ces corps mixtes sont répartis dans les 25 villes moyennes, dont 10 en Wallonie. les centres X sont les 5 grands SRI belges, dont 2 en Wallonie et le SIAMU bruxellois. Ils sont composés uniquement de professionnels. les centres C, il s’agit de services d’incendie protégeant une seule commune et composés de volontaires. On en dénombre 20 en Wallonie. 3 Institut Emile Vandervelde – www.iev.be - [email protected] On distingue les pompiers professionnels des pompiers volontaires. Ces derniers ont par ailleurs une activité professionnelle principale. En Belgique, ils représentent deux tiers des effectifs, soit 11.000 volontaires pour 5000 professionnels. Les pompiers professionnels ont le statut de personnel communal. Tandis que les pompiers volontaires n’en bénéficient pas, ils sont engagés pour 5 ans renouvelables et leur rémunération varie en fonction de leurs prestations. En pratique, les SRI sont organisés et gérés par une commune, appelée « commune-centre » et couvrent plusieurs communes dénommées « communescouvertes ». . Cette participation financière est calculée selon une clé de répartition des frais engagés par les communes-centres Pour faciliter la coordination des secours, la loi de 1963 sur la protection civile a prévu, à l'initiative du gouverneur ou d'une commune, et avec l'accord des communes concernées, la création de " zones de secours regroupant les territoires protégés par plusieurs services publics d'incendie ". Elles sont au nombre de 42 plus Bruxelles, (28 en Flandre et 14 en Wallonie). Les missions Contrairement à l’idée généralement répandue, les missions des SRI ne se limitent pas aux seules interventions urgentes contre les incendies et les explosions. Les deux tiers des interventions des SRI concernent l’aide médicale urgente. Les pompiers doivent également remplir des tâches importantes de prévention : contrôler les mesures de prévention et de sécurité prescrites par les autorités publiques. Le financement Sur base des dernières données disponibles1, le coût actuel des services d’incendie se chiffre – pour l’ensemble du pays – à 476 millions EUR, dont 344 millions EUR pour le personnel. Pour la Wallonie, les dépenses - selon l’analyse de l’UVCW2, sur base des dépenses pour l’année 2007 – sont de 190,8 millions d’Euros. On retiendra aussi de cette analyse de l’UVCW deux éléments importants : d’une part, la disparité entre les communes : « … ce poste pèse, en moyenne, 3,7 % des dépenses totales des communes, mais offre en la matière une forte disparité entre la Flandre (3,03 %) et la Wallonie (5,08 %). Les disparités au sein des 250 communes disposant d’un SRI sont très importantes en la matière, ainsi, pour 6 communes, dont 5 situées en Région wallonne, le poste incendie représente plus de 10 % des dépenses ordinaires » ; et d’autre part, que ces dépenses sont essentiellement financées par les moyens propres des communes (84,5 %), ensuite par des recettes de prestation (surtout le paiement des prestations d’ambulances) qui sont de l’ordre de 8,8 % et des dotations provenant principalement du fédéral de seulement 6,3 % en moyenne. 1 Memo interne du SPF Intérieur daté du 24 mai 2009 Note « Etat des lieux des finances des services d’incendie en Belgique – UVCW – 23/07/08) 2 4 Institut Emile Vandervelde – www.iev.be - [email protected] 2. La Protection civile La Protection civile dépend du SPF Intérieur. Elle a essentiellement des missions d’appui orientées vers des opérations de secours aux personnes et de protection de biens lors de calamités ou de sinistres importants. Progressivement, la Protection civile s’est spécialisée dans la protection contre les risques majeurs naturels, chimiques et nucléaires. Elle emploie 526 agents professionnels et peut faire appel à 808 volontaires. 3 Ils sont répartis dans des unités opérationnelles, actuellement au nombre de six, situées à : • Brasschaat (près d’Anvers) ; • Crisnée (près de Liège) ; • Ghlin (près de Mons) ; • Jabbeke (entre Bruges et Ostende) ; • Libramont (en Province de Luxembourg) ; • Liedekerke (en Province de Brabant flamand, près de Bruxelles). Une nouvelle unité est en projet à Gembloux, mais est en attente d’un financement fédéral et d’une décision définitive. 3. Les services d’aide médicale urgente (SAMU) L'aide médicale urgente (AMU)apporte une aide médicale aux personnes victimes d'un accident ou d'une affection brutale et inattendue. Elle comporte à la fois un système d'alerte, par lequel la victime ou les témoins peuvent demander cette aide, et des services mobiles d'intervention. L'aide médicale urgente (AMU)en Belgique, régie par la loi du 8 juillet 1964 (modifiée par la loi du 22 mars 1971), est définie comme « le système d'appel unifié, les premiers soins sur place aux personnes se trouvant sur la voie publique ou dans un lieu public et dont l'état de santé par suite d'accident ou de maladie, requiert des soins immédiats, ainsi que leur transport à l'hôpital et leur admission dans un service hospitalier. » La gestion des appels d’urgence L'aide médicale urgente est articulée autour des Centres d'appel unifiés "100" (c'est le numéro d’urgence, il est doublé par le numéro Européen "112"). Ces centres d'appel unifiés sont situés à Anvers, Arlon, Bruxelles, Liège, Mons, Namur. Ces centres d'appel, qui dépendent du Fédéral coordonnent les moyens disponibles parmi lesquels les ambulances "normales", les Service Mobile d'Urgence et de Réanimation (SMUR) ainsi que les moyens techniques mis à disposition par les services incendie. 3 Note du portail des services publics belges – Sécurité – Protection civile. Octobre 2009. 5 Institut Emile Vandervelde – www.iev.be - [email protected] Un médecin DSM (directeur des services médicaux) est également de garde pour gérer les situations d'exception. Tous ces moyens sont mis en œuvre pour adresser les patients vers les services hospitaliers d'urgence agréés, voire vers certains services spécialisés (par exemple: centres pour grands brûlés, centres spécialisés dans la chirurgie de réimplantation des membres sectionnés). L’option prise en 1999 par le Conseil européen de créer un numéro d’urgence unique « le 112 » a eu pour conséquence pour les Etats membres, et donc la Belgique, de réorganiser profondément les centres d’appels d’urgence, jusqu’alors organisés de manière distincte pour les appels destinés aux services de police, aux services d’ambulances et aux services d’incendie. Les appels d’urgence 100 et 110 sont intégrés dans une plate-forme unique 112 où l’on scinde la prise de l’appel urgent par un call-taking neutre et son analyse, le dispatching, selon la discipline concernée (AMU, pompiers et police). Les services d’intervention Les services d’intervention sont agréés par le SPF Santé. Différents types d’organismes ou d’entreprises sont agréés AMU : les services Incendie, Sapeurs-Pompiers (principalement ambulances normales et chauffeurs Smur), c’est la grande majorité surtout en Wallonie ; la Croix Rouge de Belgique (principalement ambulances normales) ; la Protection Civile (ambulances normales) ; certains services privés d'ambulance (ambulances normales, mise à disposition de véhicules avec chauffeurs pour les Smur) ; hôpitaux agréés (services d'urgences, équipes médicales des Smur) ; certains services privés d'hélicoptères médicaux (2 Smur existent sous cette forme en Belgique. B. La réforme de mai 2007 1. Les principes Le 15 mai 2007, une nouvelle loi relative à la sécurité civile réformant en profondeur l’organisation et le fonctionnement de la sécurité civile a été adoptée. Cette réforme a été fondée sur trois principes de base : Le droit à l’aide la plus rapide et la plus adéquate pour le citoyen ; un même niveau de protection pour une contribution équivalente; 6 Institut Emile Vandervelde – www.iev.be - [email protected] Le changement du niveau auquel s’organise la gestion des services (des communes vers des structures supra-communales : les Zones de secours). Pour concrétiser ces principes, la loi instaure une structure de services d’incendie à trois niveaux : 1. Un niveau exécutif assurant les missions de base des services d’incendie, constitué d’un réseau de postes d’incendie qui doivent disposer du personnel et du matériel nécessaires, conformément aux normes minimales imposées. 2. Un niveau organisationnel, à savoir la zone de secours, composée d’un certain nombre de communes et dotée de la personnalité juridique. 3. Un niveau réglementaire, à savoir l’autorité fédérale. 2. La nouvelle organisation des services d’incendie La loi de 2007 organise la sécurité civile en deux niveaux administratifs juridiques : le gouvernement fédéral – dans l’état actuel de la répartition des compétences - qui sera compétent pour les normes et les zones de secours ayant une personnalité juridique propre qui seront compétentes pour l’organisation des services. Les zones de secours constitueront la structure d’organisation des futurs services d’incendie. L’organisation des services d’incendie passera donc d’un système communal vers un système supracommunal. Chaque zone de secours comprendra un certain nombre de postes de secours dont elle assurera la gestion. Les postes formeront entre eux un réseau au niveau belge afin que les frontières entre zones ne soit pas un obstacle ni aux interventions ni aux collaborations avec d’autres postes qui pourraient être appelés en renfort sur les lieux d’un sinistre. Par ailleurs, sur base d’une analyse des risques réalisée sur l’ensemble de la Belgique, la réforme prévoit d’optimaliser le degré de couverture du territoire par les postes de secours en raccourcissant les délais d’intervention. Ces nouvelles entités supracommunales couvriront des territoires plus étendus que ceux actuellement couverts pas les SRI et les zones de secours actuelles. Un arrêté royal du 2 février 2009. découpe la Belgique en 32 zones de secours. C. Le fonctionnement S’inspirant du fonctionnement des zones de police, la zone de secours sera gérée par un conseil et un collège. Le conseil - composé d’un représentant par commune (le bourgmestre) - disposera de toutes les compétences, sauf celles attribuées au collège comme l’administration des bâtiments et des propriétés, la gestion des revenus et de l’ordonnancement des dépenses, la surveillance de la comptabilité ou la surveillance du personnel. 7 Institut Emile Vandervelde – www.iev.be - [email protected] La province pourra être membre du conseil de zone, à condition qu’elle contribue à son financement. ,Le commandant de zone sera le responsable de la gestion journalière de la zone sous l’autorité du Collège. 1. Le financement de la zone Le financement de la zone de secours devra être assuré par 5 sources : • les dotations communales ; • une dotation fédérale ; • une rétribution pour l’exécution des missions dont le Roi autorise la récupération ; • des sources diverses ; • et le cas échéant, une dotation – facultative – de la province. Concernant les dotations communales, la loi prévoit que les communes pourront déterminer d’un commun accord le montant de leur dotation respective. Un arrêté royal déterminera cependant de quelle manière les dotations communales devront être réglées en l’absence d’accord. Cet arrêté royal devra tenir compte, pour chaque commune, de différents critères tels que la population résidentielle et active, la superficie, le revenu cadastral ou les risques présents sur le territoire. Le principe du rééquilibrage progressif des efforts financiers des communes de la zone de secours et du fédéral vers la parité 50/50, a été inscrit dans la loi de 2007, Le surcoût de la réforme devra donc être pris en charge par l’autorité fédérale et non par les communes qui assurent toujours à l’heure actuelle 90 % de la charge des services d’incendie. 2. Un nouveau statut pour le personnel En ce qui concerne le personnel, la loi de 2007 a opté pour un statut fédéral uniforme arrêté par le Roi, et cela tant pour les pompiers professionnels que pour les pompiers volontaires dont le principe a été maintenu. C’est l’un des points les plus sensibles de la réforme. Les situations sont actuellement fort disparates de communes à communes et selon qu’on se trouve en Wallonie et en Flandre. Cette situation est en partie liée au fait qu’il y a plus de volontaires en Flandre qu’en Wallonie. Pour Bruxelles, la question ne se pose pas car il n’y a que des pompiers professionnels dont des éléments du statut est fixé par la Région bruxelloise. L’enjeu pour les pompiers volontaires est de rendre leur statut suffisamment attractif et compatible avec leurs obligations professionnelles principales. 8 Institut Emile Vandervelde – www.iev.be - [email protected] 3. Le lien avec la réforme de l’Aide médicale urgente Compte tenu des liens étroits entre les services d’incendie et l’aide médicale urgente, il avait été décidé de lier la réforme de la sécurité civile avec les projets de modernisation de l’aide médicale urgente. Bien que la Ministre fédérale de la Santé publique ait lancé une dynamique positive et concertée de modernisation de certains aspects de l’AMU, la concertation entre les deux SPF doit encore être améliorée. Le résultat le plus intéressant a été l’intégration des appels d’urgences au sein d’une plateforme commune 112 pour lequel des moyens budgétaires conséquents ont été dégagés en 2009 et pour les années suivantes. D. La mise en œuvre de la loi de 2007 1. Etat d’avancement La loi du 15 mai 2007 est une loi-cadre qui doit être mise en application à travers plusieurs arrêtés royaux. Plusieurs éléments importants de la réforme des services de secours ne sont pas réglés dans la Loi mais le seront via des arrêtés royaux. : par exemple, le statut des pompiers professionnels et volontaires, l’analyse des risques, les normes d’organisation et de fonctionnement et surtout les règles du financement. A cet égard, la loi a prévu que les arrêtés royaux de financement devront être avalisés par le Parlement fédéral. A l’heure actuelle, cette réforme n’est toujours pas effective. A l’exception de l’Arrêté royal délimitant le territoire des nouvelles zones de secours et de celui instituant une commission d’accompagnement de la réforme, aucun autre arrêté royal d’application de la loi n’a été adopté. Si bien qu’actuellement, la sécurité civile est toujours principalement organisée par la loi de 1963, à l’exception de l’application du principe de l’intervention du service de secours adéquat le plus rapide. 2. Les organes mis en place pour la mise en œuvre de la réforme Le SPF Intérieur a mis en place des organes pour accompagner la mise en œuvre de la réforme de la sécurité civile. Le comité de pilotage et les groupes de travail Patrick Dewael, le précédent Ministre de l’Intérieur, avait confié le pilotage de la réforme à la Présidente du comité de direction du SPF Intérieur. Afin d’avoir une vision optimale de la situation actuelle et de la direction à prendre, celle-ci s’est 9 Institut Emile Vandervelde – www.iev.be - [email protected] entourée de différents experts issus tant de l’administration que parmi les gens de terrain. Différents groupes de travail ont été mis en place afin d’établir des rapports sur des questions spécifiques (statut, financement, normes, …) et de formuler des avis au comité de pilotage. Jusqu’ici pourtant, le bilan de ces groupes de travail reste fort maigre. Aucune proposition valable d’avant-projet d’arrêtés royaux n’a été émise jusqu’à présent. Les task-forces A la suite de l’adoption de l’arrêté royal du 2 février 2009 délimitant le territoire des zones de secours, il était important de préparer sur le terrain la mise en place de ces nouvelles entités supra-communales. Pour accompagner ce travail, le Ministre De Padt a demandé en mars 2009 aux Gouverneurs de province de créer au sein de chaque zone de secours, une structure de coordination informelle dite « Task Force ». Par ailleurs, il est aussi prévu de réunir tous les bourgmestres d’une future zone dans une sorte de « préconfiguration » du conseil de zone. Cette instance est appelée à arrêter la composition de la task Force, à encadrer et orienter ses travaux. Les autorités locales jouiront donc d’une grande autonomie afin de garantir une prise en compte des spécificités de chaque future zone tant dans la composition des différentes Task Forces que dans l’approche des missions qui lui sont confiées. La tâche prioritaire de la task Force sera la collecte d’éléments concrets sur le terrain pour la création des structures. En d’autres termes, la préparation d’outils indispensables comme le sont, par exemple, l’évaluation des moyens disponibles en personnel et en matériel, une pré-analyse et un inventaire des risques sur le terrain, etc. Les données rassemblées seront réinjectées dans les travaux menés dans le cadre de la Réforme. Les task-forces devaient remettre leurs rapports pour la fin de l’année 2009. Mais cette échéance est reportée à courant 2010 compte tenu des difficultés rencontrées sur le terrain et des vitesses différentes prises par chacune des taskforce. La Commission d’accompagnement de la réforme La Commission d’accompagnement de la réforme de la Sécurité civile doit évaluer l’impact financier de la réforme. Elle assurera également du suivi de la réforme et rédigera un rapport d’évaluation annuel. Le comité de pilotage et les groupes de travail thématiques devraient s’intégrer dans le fonctionnement de la commission.. Cette commission sera co-présidée par les deux présidents des unions des villes et communes flamandes et wallonnes. Elle ne s’est réunie qu’à deux reprises, sans réel intérêt pour l’instant. 10 Institut Emile Vandervelde – www.iev.be - [email protected] 3. Le résultat du conclave budgétaire Les faibles disponibilités financières. Selon la dernière note provenant de l’administration et présentée à la Commission d’accompagnement, les chiffres sont les suivants : Coûts actuels des SRI > dont coût du personnel Estimation du coût de la réforme > dont coût personnel > dont surcoûts structure Surcoût 476 millions d’Euros 344 millions 182,8 millions 75,3 millions 107,5 millions + 38 % Ces chiffres appellent plusieurs commentaires. D’une part, le coût actuel des SRI dont encore être validé par les task forces au niveau local et par la Commission d’accompagnement au niveau national. Ensuite, il n’est pas tenu compte du coût de la Protection civile (et donc des possibilités de synergie avec les SRI). D’autre part, le coût de la réforme est basé sur des éléments, critères et normes qui n’ont jamais été validés scientifiquement et politiquement, notamment la norme du temps d’intervention utilisé pour les calculs de ces chiffres. Les demandes budgétaires de la Ministre de l’Intérieur Sur base de cette estimation, le SPF Intérieur a pourtant demandé une augmentation du budget dédié à la mise en œuvre de la réforme de 50 millions Euros en engagement et de 69,9 millions Euros en ordonnancement. Les remarques formulées sur le fond de la réformez par le SPF Budget et l’Inspection des finances sont, à cet égard, particulièrement sévères : « … la valeur ajoutée de cette réforme n’est pas encore claire … on peut également s’interroger si : a) le gouvernement fédéral dispose de moyens suffisants pour la mise en œuvre d’une telle réforme ; b) la réalisation d’une telle réforme ne pourrait pas, au moins, être financée par des recettes spécifiques. » A l’issue du conclave, les montants supplémentaires mis à disposition de la Ministre de l’Intérieur ont été les suivants : mise en œuvre de la réforme : 2 millions d’Euro pour « l’amélioration des services de secours ». formation de base des sapeurs-pompiers (formation passe de 90h à 130h) : 1 million d’Euro pour 2010. mise en place des plateformes 112 dans les provinces (reprise du personnel communal et investissements) : montants complémentaires de 12 millions en 2010 et 12 millions en 2011. 11 Institut Emile Vandervelde – www.iev.be - [email protected] Réactions du secteur de la sécurité civile Les réactions du secteur de la sécurité civile ont été particulièrement sévères. Pour l’Union des villes et communes de Wallonie : « La réforme incendie ; au feu, c’est l’asphyxie ». Elle estime que « le constat est accablant : plus de deux ans après la publication de la loi, la réforme incendie semble éteinte. Pour la sécurité des citoyens et celle des hommes du feu, il est impératif de remédier aux dangers créés par cet état de fait » Et demande que « dans le cadre des budgets dont il dispose, le Fédéral finance des mesures minimales nécessaires » pour résoudre les vrais problèmes. La CGSP – ALR rappelle que le maigre résultat du conclave budgétaire « ne constitue pas une surprise : cela fait 4 ans que cela traîne, ce n’est donc pas maintenant que l’on va trouver les millions d’Euros nécessaires à la mise en œuvre de la réforme » et d’exiger des améliorations concrètes aux conditions de travail et au statut des pompiers. Pour l’organisation syndicale : « (ses) revendications n’ont pas changé, elles sont même plus urgentes que jamais. Toutes ses années d’incertitude ont conduit à une dégradations des conditions de travail sur le terrain » Du côté des fédérations professionnelles des pompiers, c’est également une grande déception. Début décembre 2009, des actions de protestation ont été organisée, barrages filtrants aux frontières, conférences de presse, visites aux présidents des partis politiques. D’autres actions sont à nouveau prévues pour janvier 2010. 4. Que retenir de tout cela ? Outre les faibles disponibilités financières pour l’application complète de la réforme de la sécurité civile telle que prévue par la loi du 15 mai 2007, il faut constater que la mise en œuvre de la réforme est particulièrement lente et laborieuse. Cette situation - amplifiée par les silences de la Ministre de l’Intérieur - crée des incertitudes à tous les niveaux et est de nature à provoquer des inquiétudes et des mécontentements chez les pompiers qui attendent des améliorations concrètes à leurs conditions de travail. Mais également chez les citoyens qui pourraient s’inquiéter d’une moindre protection civile et des communes qui se demandent si elles doivent continuer à investir dans leur service d’incendie. L’enjeu réside aujourd’hui dans le fait de savoir quel sera le rythme de la réforme. D’autant que la mise en œuvre du principe de l’intervention du service de secours adéquat le plus rapide a nécessité une coopération accrue entre les différents Services Régionaux d’Incendie (double appel, mise en conformité du matériel d’intervention, …) et a engendré des frais supplémentaires. 12 Institut Emile Vandervelde – www.iev.be - [email protected] Enfin, plusieurs questions appellent des réponses rapides telle celle relative au temps de travail imposé par la Directive européenne qui pourrait mettre à mal le système des volontaires dans les services de secours et la question des fins de carrières pour les pompiers. 5. Les pistes des différentes parties à la réforme. Les différents acteurs de la sécurité civile ne se sont pas contentés d’exprimer leur mécontentement face à la situation d’incertitude, mais ils ont émis des pistes de solutions. L’Union des villes et communes de Wallonie Tout en rappelant que « … aux antipodes d’une réforme mégalomane, l’UVCW a toujours demandé une réforme pragmatique qui allait à l’essentiel et s’attachait à résoudre les vrais problèmes. » Le syndicat des communes rappelle que pour lui l’essentiel est : L’amélioration de la formation de base des pompiers, ce qui implique de renforcer l’infrastructure (écoles du feu), en ce compris pour les techniques spéciales. En ce qui concerne les pompiers volontaires, notamment: o la clarification de la base de leur rémunération (gardes, en caserne et à domicile) et, pour éviter tout contentieux inutile, la confirmation de leur régime de temps de travail, conformément aux dérogations permises par le droit européen; o la préservation des cumuls de professions ou situations (chômeur, employé communal, voire pompier professionnel dans un autre corps); o la sécurité sociale identique à celles des professionnels, notamment en cas d’accident. En ce qui concerne les pompiers professionnels, la problématique des fins de carrière, notamment. L’amélioration des collaborations opérationnelles entre les services d'incendie actuels afin d’arriver au service le plus efficace possible pour la population. Enfin, l’UVCW insiste sur un point qu’elle juge impératif : dans le cadre des budgets dont il dispose, le Fédéral doit financer ces mesures minimales nécessaires. Les organisations syndicales La CSC ne s’est pas positionnée sur ce dossier, en revanche, la CGSP, qui n’a jamais réclamé une réforme d’une telle envergure, exige avant tout : • De meilleures conditions de travail (organisation, coopération entre services et matériel en suffisance et adéquat) ; 13 Institut Emile Vandervelde – www.iev.be - [email protected] • • • • • • Le respect de la loi sur le temps de travail ; L’augmentation des normes de personnel ; Une solution structurelle du congé préalable à la retraite ; Une pension en 50ème dès qu’un agent est revêtu d’un grade de pompier ; Des améliorations en matière de formation ; Des précisions sur les dispositions concernant les règles applicables « aux volontaires ». La Fédération germanophones royale des sapeurs-pompiers francophones et Elle dénonce l’immobilisme du SPF Intérieur dans l’exécution de la réforme et le manque de considération dont ils font l’objet. Les pompiers exigent – notamment - un statut administratif, de meilleures formations, le rétablissement de la Direction générale de la Sécurité civile et un calendrier réaliste pour la mise en œuvre de la réforme. En outre, la fédération demande que soient explorées toutes les pistes alternatives de financement de la sécurité civile. E. Conclusion : quelles pistes pour l’avenir Les difficultés budgétaires actuelles ne permettent ni à l’autorité fédérale ni aux communes de disposer des moyens financiers suffisants pour la mise en œuvre immédiate et complète de la réforme des services de secours. Malgré cette situation, il est nécessaire de poursuivre les efforts pour améliorer la qualité des services de secours, les conditions de travail et de formation des pompiers, rendre plus transparent les mécanismes de financement, amplifier les coopérations et les synergies entre les différents services de secours, ainsi que de continuer à investir dans les équipements. La mise en œuvre du droit pour chaque citoyen à l’aide la plus rapide et la plus adéquate demeure une priorité à mettre en œuvre. Vu les difficultés budgétaires contrées, la réforme de la sécurité civile pourrait être phasée. Il pourrait être proposé d’avancer par étapes en fonction des marges budgétaires du Fédéral. Dans un premier temps, il convient d’apporter des solutions concrètes aux problèmes urgents rencontrés sur le terrain (formation des pompiers, temps de travail, amplification des collaborations entre SRI). Dans un second temps, il s’avère nécessaire d’aborder dans la sérénité la création juridique des zones de secours, la réforme du statut et de mettre en place de nouveaux mécanismes de financement. Afin de rassurer les citoyens, les pompiers et les communes, la Ministre de l’Intérieur devrait d’abord s’atteler - en concertation avec tous les partenaires de la sécurité civile (Fédéral, les Régions, les communes, les représentants des pompiers) - à répondre au mieux aux priorités suivantes : 14 Institut Emile Vandervelde – www.iev.be - [email protected] 1°. L’amélioration de la formation de base, de la formation continuée et de l’entraînement des pompiers, ce qui implique de renforcer l’infrastructure (écoles du feu), en ce compris pour les techniques spéciales et d’améliorer l’offre globale de formation ; 2°. La poursuite de la mise en place de coopérations entre les différents services de secours au sein des zones de secours et au niveau national ; 3°. La mise en place des centres d’appel d’urgence 112 et la concrétisation des investissements décidés lors du conclave budgétaire ; 4°. En concertation avec toutes les parties et selon les disponibilités budgétaires, l’amélioration de certains aspects du statut des pompiers, notamment, pour éviter tout contentieux inutile. Mais également la confirmation du régime de temps de travail, conformément aux dérogations permises par le droit européen et pour ce qui concerne plus particulièrement, les pompiers volontaires : la clarification de la base de leur rémunération et l’amélioration de leur protection sociale; 5°. La mise en place, au sein du SPF Intérieur, d’une inspection de la sécurité civile afin de permettre un meilleur accompagnement des services de secours. Ces avancées permettraient non seulement d’améliorer concrètement la sécurité civile selon les disponibilités budgétaires, mais aussi de prendre le temps de réfléchir sereinement et en concertation à la mise en place effective ultérieure des nouvelles zones de secours, à la réforme plus approfondie du statut des pompiers et à l’instauration de nouveaux mécanismes de financement. … Institut Emile Vandervelde Bd de l’Empereur, 13 B-1000 Bruxelles Téléphone : +32 (0)2 548 32 11 Fax : + 32 (02) 513 20 19 [email protected] www.iev.be 15 Institut Emile Vandervelde – www.iev.be - [email protected]