Robert Oumaou musicien : « Je veux que ma musique fa
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Robert Oumaou musicien : « Je veux que ma musique fa
Toute l'actualité de la Guadeloupe sur Internet - FranceAntilles... Actualité http://www.guadeloupe.franceantilles.fr/imprimer.php Culture et Patrimoine Robert Oumaou musicien : « Je veux que ma musique favorite, le gwo-ka, avance » Propos recueillis par Rebecca Valentine MARIVAL France-Antilles Guadeloupe 25.07.2009 Robert Oumaou reprendra le morceau Algérie 62, qui sera interprété par la chanteuse cubaine Chabela. (R.V.M.) Ce samedi, à partir de 19 heures, le musicien Robert Oumaou, qui a développé il y a trente ans le style musical du ka évolutif, anime avec son quintet la soirée culturelle du premier Festival de la gastronomie, à la friche industrielle de Baie-Mahault. Qu'allez-vous présenter lors de votre représentation de samedi ? Nous ne jouerons pas du Gwakasonné, nous ne reprendrons pas les titres de mon album Sang comment terre, sorti en 2007. Ce n'est pas encore le moment. J'ai des projets... Samedi, j'interpréterai quelques-unes de mes compositions. J'ai choisi des amis musiciens pour la circonstance. Comme le batteur Éric Danquin, qui est un copain de très longue date, même si nous faisons très peu de choses ensemble. J'ai aussi convié José Bellerose, du groupe Pakala de Paris, que tout le monde connaît en Guadeloupe car il était le marqueur de mon groupe Gwakasonné. Cela fait vingt ans qu'il a quitté le département. Mais quand je vais à Paris, ça m'arrive de faire des disques avec lui, comme il collabore avec moi quand il revient ici. Avec José, nous voulons garder ce lien fort, surtout qu'il est originaire de la même région que moi, Sainte-Rose/Lamentin. J'ai aussi invité le pianiste Jocelyn Marboeuf avec qui je travaille pour la première fois et dont j'apprécie le talent. 1 sur 3 26/07/09 1:38 Toute l'actualité de la Guadeloupe sur Internet - FranceAntilles... http://www.guadeloupe.franceantilles.fr/imprimer.php Comment a été monté le quintet Robert Oumaou ? Il faut bien souligner ce que je vais dire, c'est très important... J'ai constaté qu'en Guadeloupe, c'est très compliqué de se réunir entre musiciens et surtout entre musiciens qui font des musiques différentes. Un tel ne veut pas fréquenter celui-là, celui-là ne veut pas fréquenter Un tel. Celui-ci ne parle pas à l'autre, etc. Moi, j'ai voulu casser tout ça. Ce sont des complications qui m'énervent. Je veux tout faire pour que ma musique favorite, qui est le gwo-ka, avance. Je travaille beaucoup dans ce sens et j'ai des compositions qui s'y prêtent. J'ai donc réuni dans mon quintet des musiciens de genres différents du gwo-ka. J'aime associer tous ces genres, pour que nous gardions un bon contact entre musiciens. Il fallait, au sein de mon quintet, que la vibration prenne véritablement. Il faut que nous commencions un jour à bien faire les choses entre musiciens. Donc, pour le Festival de la gastronomie, j'ai sacrifié quelques-unes de mes compositions. Je veux voir maintenant comment ça sonne avec ces musiciens de tendances diverses. Je n'aime pas faire de fusions qui ne ressemblent à rien. Chaque musicien de mon quintet a apporté sa personnalité... Vous avez « sacrifié » des compositions. Vous ne ferez ni du Gwakasonné, ni du . Mais alors qu'allez-vous plus précisément nous donner à apprécier ? Comme je disais, j'ai repris quelques-unes de mes compositions. Je ferai ce que je sais faire de mieux, c'està-dire la musique de Robert Oumaou. Une musique créative faite sur la base du gwo-ka. Ce ne sera pas l'expérience Gwakasonné, mais ce sera du Robert Oumaou, qui effectue sans cesse un long travail de recherche... En fait, j'ai des projets avec le concept Gwakasonné et je reviendrai à 1989, l'année où nous avons arrêté l'expérience, à la suite du cyclone Hugo, pour en parler. Selon moi, en 1989 nous avions atteint nos objectifs avec Gwakasonné, bien que nous n'avions pas fini de traiter la musique gwo-ka. Le gwo-ka doit encore être étudié, nous n'avons pas fini, donc nous reviendrons sur ce que nous avions commencé en 1979. Tant que les hommes sont là, il y a des expériences à faire et quand le moment sera venu, je rappellerai tous les membres de Gwakasonné. Ceux qui seront disponibles remonteront avec moi sur scène, pour mes projets futurs. En ce qui concerne mon album solo Sang comment terre, il y a également des choses à faire. Je prendrai le temps de les faire. Je ne veux rien bâcler... Comment défendez-vous encore votre musique en 2009 ? Ma musique se défend toute seule. Lè an ka fè on mizik fo i débrouyé-y pou i défand li li mèm, parce que j'y mets toute ma sincérité et toute mon honnêteté, quand je la fais. Quand je crée un morceau, je ne me prends pas la tête, pour savoir comment il va être compris, je donne ce que j'ai. Quand, par exemple, on doit reprendre une composition faite par un tiers, on s'arrange pour bien la reproduire, mais à sa façon et avec un certain feeling. Quand je joue un morceau, je présente ma manière de voir les choses. Donc, ce samedi, je présenterai mes compositions avec un traitement particulier de tout ce que j'ai déjà fait depuis trente ans. Présentez-nous le répertoire que vous jouerez avec ce nouveau « traitement » . En fait, j'ai tout de même choisi un titre-phare de chacun de mes albums. Nous reprendrons par exemple Algérie 62, qui sera chantée par la chanteuse cubaine Chabela. Cette chanson traite d'une histoire particulière, qui remonte à l'époque où, tout petit, j'ai découvert que quelque chose s'était passé sur l'habitation de ma famille à Reiset/Sainte-Marie à Lamentin. Un jour, j'ai vu les grandes personnes de ma famille se réunir et pleurer. Je devais avoir quatre ans et je ne comprenais pas pourquoi ces adultes pleuraient. Mais à l'époque zafè a gwan moun pa té ka gadé ti moun, donc je n'ai pas posé de questions. Un an plus tard, j'ai constaté que ces mêmes adultes s'étaient réunis à nouveau et pleuraient encore. Cela m'a beaucoup frappé, mais je n'ai encore pas posé de questions. En grandissant, j'ai fini par comprendre ce qui s'était passé. J'ai su qu'un des nôtres était allé à la guerre d'Algérie et qu'il n'était jamais revenu. Je me suis donc inspiré d'une comptine que nos mères nous 2 sur 3 26/07/09 1:38 Toute l'actualité de la Guadeloupe sur Internet - FranceAntilles... http://www.guadeloupe.franceantilles.fr/imprimer.php chantaient « Lè ti moun an mwen ka mandé tété, mwen kalé ba li manjé matété. Dodo pitit, papa pa la, sé man- man tou sèl ki dan lanbara. » Je suis parti de cette énergie, j'en ai fait un autre traitement mélodique, pour que ça reste dans les mémoires... En tout cas dans ma mémoire. C'est ma façon à moi d'exorciser ce problème de l'absence d'un proche. Algérie 62 est une chanson que j'ai composée il y a très longtemps. J'ai choisi Chabela pour l'interpréter, car j'avais déjà collaboré avec elle en 2006. Cela vous plaît-il de vous produire dans le cadre du premier Festival de la gastronomie de la Région Guadeloupe ? L'association musique et art culinaire ne m'est pas étrangère car je fais partie du collectif An tout sos concept et nous avons l'habitude de traiter cette approche de la musique avec le culinaire. En plus, j'ai remarqué que de nombreux musiciens guadeloupéens, en tout cas dans ceux que je connais, savent très bien faire la cuisine. Selon ce qu'on me dit, il semble que je sais aussi très bien faire la cuisine. C'est peut-être quelque chose de naturel chez les musiciens d'oeuvrer dans le culinaire également. Peut-être qu'il existe une vraie cohésion entre la musique et le culinaire. Alô kè yo envité mizisyen adan on biten a manjé, ça coule de source! Le mot de la fin est à vous... Je profite de cette prestation sur le territoire de Baie-Mahault, pour rendre hommage à un grand musicien guadeloupéen qui est Gérard Lockel. Il faut que tout le monde sache ce que ce monsieur a fait pour l'évolution du gwo-ka. Baie-Mahault c'est aussi la terre de Man Soso, de Guy Conquet, de Carnot. Baie-Mahault est un bastion du gwo-ka pur et du gwo-ka évolutif et je suis fier de me produire dans cette commune. - Chabela : « Un beau tableau de la Guadeloupe » « Ma participation au sein du quintet de Robert Oumaou est un projet de longue date. Je considère la musique d'Oumaou comme la quintessence du son de la Guadeloupe, avec du rythme et de la mélodie. Dans la musique de Robert, on retrouve tous les airs du gwo-ka. C'est une poésie buccolique. C'est un beau tableau de la Guadeloupe. J'interpréterai trois chansons en créole : Algérie 62, Piti ké gwane et Le conseil des sages. C'est assez difficile pour moi qui suis Cubaine de chanter les oeuvres de Robert Oumaou, car il joue avec les consonnes dans ses textes et n'étant pas créolophone, je dois faire de gros efforts pour jouer avec la langue et articuler les mots. » 3 sur 3 26/07/09 1:38