gk-savar au bangladesh : une ong en continuel renouveau

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gk-savar au bangladesh : une ong en continuel renouveau
DOSSIER ONG-ENTREPRISES
GK-SAVAR AU BANGLADESH :
UNE O.N.G. EN CONTINUEL
RENOUVEAU
En décembre 2000, la
première Assemblée Populaire Mondiale de la Santé
s’est tenue au centre GK à
SAVAR au BANGLADESH ;
elle rassemblait 1500 militants d’O.N.G. représentant
95 pays. Ils sign-èrent une
Charte populaire de la
santé(*).
Le lieu de cette réunion n’a
pas été choisi au hasard : le
centre GK-SAVAR, fondé en
1972 par le Dr Zafrullah
Chowdury, est une réalisation étonnante qui a été, et
continue d’être, un exemple
pour le tiers-monde. Non
seulement cette réalisation
perdure, mais elle se développe et se diversifie au fil du
temps : Zafrullah Chowdury
est un " précurseur permanent ".
" La santé est une discipline
multisectorielle " dit Zafrullah Chowdury. S’atta-quer
aux problèmes de santé des
plus pauvres, c’est éliminer
les racines du mal et non en
soigner les effets superficiels
: c’est donc désamorcer le
cycle infernal de l’ignorance
et de la pauvreté. En éradiquant ces deux fléaux, on
éliminera les problèmes de
santé les plus aigus.
Depuis quelques années,
cette idée a fait son chemin
parmi les O.N.G. et chez les
gouvernants
des
pays
pauvres. Partant de ce principe, les objectifs suivants se
dégagent :
• Éviter d’inonder le tiersmonde, à l’instar des
multinationales, d’une foule
de médicaments coûteux,
souvent inutiles, voire
nuisibles car inadaptés ou
mal utilisés (" lutter contre
l’apartheid médical "(**)). Se
contenter d’un nombre limi-
té de produits génériques
bien ciblés pouvant être
fabriquer à bon marché sur
place (voir à ce sujet le jugement de Pretoria ; quoique
peu satisfaisant, il met le
doigt sur le problème).
• Développer la protection
maternelle et infantile, l’éducation sanitaire (hygiène,
nutrition, etc.) des fa-milles
pauvres, ce qui nécessite
l’accession à l’éducation des
femmes et leur émancipation.
• Scolariser les enfants
(garçons et filles) pour les
arracher à des travaux durs
ou dégradants.
• Éviter l’endettement des
paysans et petits artisans afin
qu’il ne deviennent pas la
proie des usuriers : d’où
création de micro-crédits
(voir le forum d’Agen 2000).
• Lutter contre le manque
de transparence, voire
contre la corruption au sein
des O.N.G. elles-mêmes
(forum d’Agen 2001).
Tous ces thèmes ont nettement émergé ces dernières
années. Mais, pour le Dr
Zafrullah Chowdury, il ne
s’agit pas de nouveautés :
c’est il y a 20 ans et plus qu’il
se battait déjà sur tous ces
fronts (et d’autres) et il
continue inlassablement de
le faire malgré les difficultés
et les embûches(***).
Voyons plutôt :
• C’est il y a vingt ans que
GK-SAVAR se lançait dans la
production de médicaments
essentiels afin de les rendre
accessibles à la population.
Son usine G.P.L. (Gonoshathaya Pharmaceuticals limited) emploie 250 ouvriers,
en majorité des femmes des
villages environnants et
produit 60 médicaments
génériques de haute qualité,
la production de 60 tonnes
par ans couvre, actuellement, 90% des besoins du
pays. C’est à l’instigation du
Dr Zafrullah Chowdury que
le président Ershad avait
adopté une politique très
volonta-riste à l’égard des
multinationales du médicament. Mais, c’est une lutte
sans fin qui nécessite une
vigilance continuelle(**).
• C’est il y a plus de vingt ans
que le Dr Zafrullah Chowdury créait les " paramédics ",
ces auxiliaires de santé (des
femmes pour la plupart) qui
sillonnent à bicyclette la
campagne bangladaise pour,
non seule-ment prodiguer
les soins élémentaires aux
villageois, mais encore,
enseigner (spécialement aux
mères de famille) les notions
essentielle d’hygiène, de
nutrition, de planning fami-
AVENTURE N°93 - AUTOMNE 2001 - LA GUILDE EUROPEENNE DU RAID
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DOSSIER ONG-ENTREPRISES
mais s’amusent font du
lial. L’hôpital créé à Savar,
sport, etc.
quoique un peu " rustique ",
• Toujours il y a vingt ans, en
fournit à la population un servivoyant combien les paysans
ce de bien meilleure qualité
sans terre étaient exploités
que les hôpitaux gou-vernepar leurs pro-priétaires qui
mentaux de la région. Dès
les maintenaient dans un état
1974, GK-SAVAR instituait un
d’endettement constant et
système d’assurance maladie
en faisaient la proie des
dont les cotisations sont
usuriers, le Dr Zafrullah
basées sur les revenus des
Chowdury a lancé un systèfamilles et couvrent plus de
me de micro-crédits leur
50% des frais de fonctionnepermettant de sortir de ce
ment du département santé.
cycle infernal.
• C’est aussi il y a vingt ans
• Depuis vingt ans et plus
que le Dr Zafrullah Chowdule Dr Zafrullah Chowdury
ry a commencé un programa manime d’alf e s t é
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tion " ditpour leurs
il. Les salaires des membres
enfants. Actuellement, cet
de l’O.N.G. ainsi que les
aspect de l’œuvre de GKrapports financiers sont affiSAVAR a pris des proporchés dans les divers centres
tions gigantesques : les
GK car : " les populations que
écoles de GK se multiplient,
nous servons sont les
se diversifient et couvrent
premières auxquelles nous
tout le pays. Elles vont de
avons à rendre des comptes ".
l’école primaire à l’université
Ceci rejoint la préoccupation
puisque, actuellement, GKde l’Abbé Pierre qui, dès
SAVAR a ouvert cinq facultés
1972, a fait au Dr Zafrullah
: médecine, pharmacie, soins
Chowdury son premier don
dentaires, physiothérapie et
d’argent étranger en lui précisciences de l’environnement.
sant : " Rappelez-vous que je
Pour les jeunes enfants, la
vous confie l’argent des
scolarisation leur évite de
pauvres pour les pauvres du
travailler durement : dans le
Bangladesh. Assurez-vous
bâtiment pour les garçons, le
toujours qu’ils en soient bien
textile pour les filles (voire la
les bénéficiaires ".
prostitution). Le Dr Zafrullah
Chowdury veut " rendent leur
Il y a bien d’autres réalisaenfance " aux enfants pauvres
tions de GK-SAVAR concerqui, non seulement étudient,
nant l’agriculture, l’aide d’urgence lors des catastrophes
naturelles (si fréquentes au
Bangladesh) etc. mais nous
avons insisté ici sur les
thèmes plus à la pointe de
l’actualité.
" Le développement est un
processus lent " qui demande
beaucoup de patience et
d’obstination dit le Dr
Zafrullah Chowdury. Tout ce
travail acharné, inlassable,
conduit à des résultats admirables sur le plan matériel :
amélioration de la santé, du
bien-être des populations ;
c’est ainsi, par exemple, que
maintenant, la mortalité
infantile dans ces régions a
diminué de 50% (ce qui
entraîne une chute de 50%
des naissan-ces !). Mais, plus
encore, ces hommes et ces
femmes prennent conscience
de leur dignité, de leur rôle
dans la société.
Citons seulement ce petit
fait, bien d’actualité : dans les
écoles de GK-SAVAR, les
enfants chantent sou-vent ce
refrain : " nous voulons être
de bons citoyens, ni chrétiens ni juifs ni musulmans ".
■
mars 2001 : " Stratégies mondiales
pour la santé populaire ".
(***)Voir aussi l’article de Diane de
la Bathie dans Croissance d’août
2001 " La nouvelle approche de la
santé pour tous "
C. ARNAUD-TINEL
Antenne agenaise du Comité
Français de soutien à GKSAVAR
(*)Pour se procurer la charte ou en
savoir plus long sur le centre GKSAVAR, s’adresser au Comité français de soutien à GK-SAVAR-Bangladesh, 23, esplanade R. Follereau,
92130 Issy-les-Moulineaux.
Site internet :
http : //www.teaser.fr/~abigeault
Ou encore s’adresser au stand de
l’antenne agenaise du comité au
Forum d’Agen
(**)Voir article de Philippe Demenet
dans Le Monde Diplomatique du 26
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