Claude Stadelmann: «Le sauvage est parti, je suis triste»
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Claude Stadelmann: «Le sauvage est parti, je suis triste»
n DÉCÈS D’OSCAR WIGGLI Claude Stadelmann: «Le sauvage est parti, je suis triste» C omme nous l’annoncions dans notre édition de samedi, Oscar Wiggli, l’artiste de Muriaux aux multiples talents, est décédé la semaine dernière. Malgré une santé déclinante, il a pratiquement jusqu’à la dernière minute continué de travailler dans son atelier. Surtout connu pour ses sculptures monumentales, l’homme à la crinière blanche était également une référence mondiale en matière de musique électroacoustique; à la demande de Georges Zaugg, il avait créé, à l’occasion du Festival du Jura 2011, en dialogue avec le compositeur Roger Meier, une œuvre à 4 mains intitulée Kenazouan. Et à l’occasion de ses 80 ans, des compositeurs de tous horizons étaient venus à Saignelégier lui offrir une œuvre spécialement composée pour lui. Toutes les personnes qui ont eu la chance de vivre ce moment absolument magique ne vont pas l’oublier de sitôt. «Pas une nécrologie avancée» Le réalisateur jurassien Claude Stadelmann a suivi le sculpteur et compositeur durant plusieurs mois, à l’occa- plusieurs reprises dans le film: «Ça, c’est la sauvagerie». Alors maintenant, ce que j’ai envie de dire, c’est: le sauvage est parti, je suis triste.» Claude Stadelmann tient également à rendre hommage à Janine, l’épouse de l’artiste: «Elle a mis une grande énergie dans la diffusion de son œuvre, et a toujours joué un important rôle technique dans le processus de création.» «Une vraie figure locale» Oscar Wiggli a continué à travailler dans son atelier de Muriaux pratiquement jusqu’à la fin. PHOTOS OLIVIER NOAILLON sion du tournage d’un film qu’il lui a consacré: «À l’inverse de Coghuf, Oscar Wiggli était un artiste que je ne connaissais pas. Je le trouvais à vrai dire un peu inaccessible. La première fois que je l’ai rencontré, quand je lui ai dit que je voulais faire un film sur lui, il m’a répondu: «Il faut qu’on en parle. Mais en tout cas, je ne veux pas une nécrologie avancée.» Avant d’accepter de participer à ce projet, l’artiste murivalais avait demandé à visionner les films du réalisateur. «Je lui ai montré le travail que j’avais consacré à Rémy Zaugg. Et il m’a alors donné son accord. Cela m’a frappé qu’il m’ait fait confiance, cela m’a flatté.» Avant de commencer le tournage, Claude Stadelmann se plonge dans l’œuvre Une sculpture d’Oscar Wiggli dans l’atelier de l’artiste. de Wiggli, et notamment dans les ouvrages que ce dernier a consacré à la musique électroacoustique: «Pour moi, c’était carrément une énigme, j’ai trouvé ces textes inaccessibles, complètement hermétiques. Par contre, sa sculpture, quelle épure, quelle puissance! Avec encore et toujours le corps de la femme comme source d’inspiration.» Au fil des mois et des dialogues avec l’artiste, Claude Stadelmann finit quand même par découvrir que les compositions musicales d’Oscar Wiggli n’étaient pas si différentes de ses sculptures: «J’ai fini par réaliser qu’il s’agissait en fait de sculptures musicales, il sculptait des sons.» «Ce qui caractérisait le plus son acte créateur, c’est la sauvagerie. Il le dit d’ailleurs à Le maire de Muriaux, Pierre-André Gigon, dit aussi sa chance de l’avoir connu: «Je l’ai côtoyé depuis une dizaine d’années. C’était une chance de le connaître, car s’il était connu très loin, il a su rester un homme modeste. Pour le village, c’est une perte, c’était une vraie figure locale, au même titre que Coghuf. Avec sa tignasse de lion, c’est une figure qu’on aimait bien voir. Il va nous laisser un grand vide, mais heureusement il laisse une fondation très appréciée.» La cérémonie d’adieu à Oscar Wiggli aura lieu mercredi à 14 heures, à l’Abdankungshalle du cimetière de Soleure, sa ville natale. PJN