Les clones 1124 et 1125 de Cabernet Sauvignon N

Les clones 1124 et 1125 de Cabernet
Sauvignon N
Date de rédaction : 10 octobre 2011
Réf :
Nom du média : Vinopole
Auteur : Alexandra LUSSON
L’enroulement viral de la vigne est une maladie présente dans tous les pays viticoles du
monde. Cette maladie est considérée en expansion par les virologues. Elle peut toucher tous
les cépages et porte greffe. En France, on retrouve principalement l’enroulement type 1, 2 et
3 communément appelé GLRaV 1, 2 et 3 (Grapevine LeafRoll associated Virus). Ces virus
provoquent une diminution de la production des pieds de vigne.
L’enroulement dans tous ses états
Ces virus se présentent sous la forme de filaments qui obstruent les vaisseaux du phloème
et empêchent les produits de la photosynthèse de circuler jusqu’aux grappes. Outre
l’enroulement vers le bas du limbe des feuilles, ces virus se manifestent dès les mois de juinjuillet, sous forme de taches rouges (sur cépage rouge) ou de taches jaunes (sur cépage
blanc) sur les feuilles de la partie inférieure des rameaux. Ces taches s’élargissent à
l’ensemble du limbe épargnant les nervures primaires et secondaires qui restent vertes. Les
symptômes sur les cépages blancs sont plus difficiles à diagnostiquer de part la quantité
d’autres maladies présentant également des jaunissements comme symptômes foliaires.
L’enroulement viral ne cause pas la mort immédiate du cep mais entraîne une diminution des
rendements pouvant atteindre parfois 40 %. Cette diminution est principalement due à la
baisse de fertilité, du poids des grappes et de la vigueur des pieds. Sur le plan œnologique,
l’enroulement entraîne un retard de maturité, une acidité plus élevée et une baisse du degré
alcoolique potentiel et de la concentration des composés polyphénoliques dans les baies.
Aucune rémission des ceps n’est possible.
A l’heure actuelle, 2 modes de propagation de ces virus ont été identifiés. Le premier
concerne la dissémination de matériel végétal contaminé à travers le monde. Le second est
lié à des insectes vecteurs : les cochenilles. 2 familles identifiées (à carapace et farineuse)
regroupent 4 espèces de cochenilles responsables de l’enroulement 1 et 3. Le vecteur du
GLRaV2 n’a pas encore été identifié.
La sélection clonale reste un moyen simple d’éviter la propagation de ces viroses. En effet,
cette sélection élimine systématiquement du processus les plants infectés par les viroses les
plus nuisibles. L’enroulement viral est dépisté grâce à des tests sérologiques tels que
l’indexage (technique consistant à greffer des variétés indicatrices, les maintenir dans les
conditions optimales de développement et à relever les symptômes après le greffage) et les
tests ELISA (utilisation d’antisérums spécifiques permettant la mise en évidence de la
présence des virus responsables de l’enroulement).
Dans le schéma de la sélection clonale et de la multiplication du matériel végétal, les tests
ELISA sont le plus couramment utilisés. En effet, ils permettent un contrôle rapide, à tout
moment, des vignes mères de greffons et de porte greffe, des conservatoires et collections
d’étude. Le moyen pour lutter contre la propagation de l’enroulement viral est l’utilisation de
plants certifiés issus de la sélection clonale.
La Gironde adopte 2 nouveaux clones de Cabernet Sauvignon N
En Gironde, au début des années 2000, les 2 clones de Cabernet Sauvignon N les plus
plantés sont le 191 et 337. Ils sont porteurs de l’enroulement type 2. Actuellement, ces
clones ne sont plus multipliés en matériel de base sauf pour les complantations.
Le financement du Conseil Régional d’Aquitaine, de FranceAgriMer, du Conseil
Interprofessionnel du Vin de Bordeaux et de la Chambre d’Agriculture de la Gironde a permis
la plantation d’une collection d’étude de Cabernet Sauvignon N au domaine du Grand Parc à
Latresne (INRA de Bordeaux). Il s’agit d’étudier le clone 191, traité par thermothérapie,
indemne du GLRaV-2 en remplacement de son homologue porteur de la virose. Et
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39 rue Michel Montaigne - B.P. 115 - 33294 BLANQUEFORT CEDEX - Tel : 05.56.35.00.00
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Sauvignon N
Date de rédaction : 10 octobre 2011
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Auteur : Alexandra LUSSON
également de comparer le 337 F481, une famille sanitaire* du clone 337 indemne de viroses
graves, à 337 F1, porteur du GLRaV-2 et couramment multiplié dans le vignoble. Après 5
années d’observations et de microvinifications, 2 nouveaux clones ont été agréés en janvier
2010 : le 1124 en remplacement du 191 et le 1125 pour proposer une alternative au 337.
Les clones 1124 et 1125 mis à nu
Le clone 1124 est légèrement plus productif que le clone 191. En se basant sur une souche,
1124 a un poids moyen de raisin plus élevé, une fertilité plus importante et des grappes plus
grosses. En revanche, la taille des baies est équivalente d’un clone à l’autre.
Les clones 1125 et 337 ont un poids moyen par souche identique. Cependant, 1125 est
beaucoup plus fertile (en moyenne 3 grappes de plus par souche) et présente des baies plus
petites donc des grappes plus légères que le clone 337. Les grappes du clone 1125
apparaissent moins compactes que celles du 337, on peut penser qu’elle seront moins
sujettes à la pourriture grise.
Tableau 1 : Données agronomiques
Clones
Poids par
souche
(kg)
191
1124
337
1125
1,22
1,50
1,46
1,46
Nb de
grappes
par
souche
11
12
9
12
Pesée
Poids
Poids de
des bois
d'une
Puissance* 100 baies
de taille
(g)
grappe (g)
(g)
114
368
193
126
127
126
592
246
122
493
615
130
128
115
608
701
* la puissance correspond à 20 % du rendement auquel on additionne 50 % du poids des bois de
taille.
Poids d'une grappe (g)
12,5
12
1124
1125
11,5
11
191
191
10,5
1124
10
337
9,5
1125
337
9
8,5
8
1,1
1,15
1,2
1,25
1,3
1,35
1,4
1,45
1,5
1,55
Poids par souche (kg)
Graphique 1 : Poids d’une grappe en fonction du poids des raisins par souche
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Date de rédaction : 10 octobre 2011
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Poids de 100 baies (g)
Auteur : Alexandra LUSSON
130,5
130
129,5
129
128,5
128
127,5
127
126,5
126
125,5
112
337
191
1124
1125
337
1125
1124
191
114
116
118
120
122
124
126
128
Poids d'une grappe (g)
Graphique 2 : Poids de 100 baies en fonction du poids d’une grappe
Les 2 clones récemment inscrits présentent une vigueur plus importante que leurs
homologues. Cette vigueur se traduit, surtout pour le clone 1124, par une production de
raisins plus élevée. Néanmoins, la production est plus qualitative et les raisins sont plus
mûrs. Au vu des résultats d’analyses des baies, on observe que les clones 1124 et 1125
produisent des baies ayant un taux d’anthocyanes plus important. Un taux plus élevé traduit
une plus grande capacité d’accumulation des anthocyanes dans les baies et de ce fait une
meilleure qualité générale du clone par rapport au terroir sur lequel il est implanté. On
remarque que le clone 1125 présente des baies dont les pépins sont plus mûrs que ceux des
autres clones. Les pépins issus du clone 1125 contribuent moins à la richesse phénolique
totale, ce qui confère à son vin moins de tanins indésirables qu'à celui du 337.
Tableau 2 : Analyses des baies
Clones
191
1124
337
1125
Anthocyanes à
IPT à pH3,2
pH1 (mg/L)
1167
46
1247
48
1210
47,8
1352
46,2
EA %
41
42
40,4
43,6
Maturité
des pépins
42
41
41
36
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Des vins particulièrement appréciés à la dégustation
Le clone 1124 présente un moût dont le taux de sucres est plus élevé (211 contre 205 g/L) et
un taux d'acide malique et une acidité totale plus faible que 191. Son moût est nettement
plus riche en anthocyanes (210 contre 182 mg/L), ce qui coïncide avec les différences
précédemment relevées dans les baies.
Le clone 1125 produit des moûts dont la teneur en sucres (206 g/L) est plus élevée que pour
son homologue 337 (192 g/L). L'acidité totale et l'acide malique sont plus faibles que ceux de
337. Il présente un taux d'anthocyanes (200 mg/L) plus élevé que 337 (170 mg/L).
Tableau 3 : Analyses des moûts
Clones
Sucres
(g/L)
191
1124
337
1125
205
211
198
206
Acide
malique
(g/L)
4,5
3,9
5,1
4,3
AT
(g H2SO4/L)
pH
IPT
Anthocyanes
(mg/L)
3,9
3,6
4
3,7
3,54
3,59
3,55
3,58
16
18
16
16
182
210
170
200
Les vins des clones 1124 et 1125 sont respectivement, quasiment identiques aux clones 191
et 337. Ils présentent les mêmes titre alcoométrique volumique, acidité totale, acidité volatile
et indice de polyphénols totaux. Le vin issu du clone 1125 présente néanmoins un taux
d'anthocyanes (584 mg/L) plus élevé que celui du clone 337 (512 mg/L). A la dégustation, le
vin issu du clone 1124 a une intensité colorante et aromatique plus élevée que le vin issu du
clone 191. Il est fruité, gras et tannique. Il est également moins animal. Le clone 1124 est
très apprécié. Il permet la production d'un vin structuré et équilibré. Le vin issu de 1125 est
très apprécié pour son équilibre, son gras, sa qualité aussi bien olfactive qu'organoleptique,
sa couleur et sa structure. 1124 et 1125 permettent l’élaboration de vins de garde.
Tableau 4 : Analyses des vins
Clones
TAV (% vol.)
AT
(g H2SO4/L)
pH
AV (g/L)
IPT
Anthocyanes
(mg/L)
191
1124
337
1125
12,2
12,5
12,2
12,4
3,4
3,5
3,4
3,5
3,78
3,75
3,85
3,77
0,01
0,01
0,3
0,3
49
51
50
51
521
550
512
584
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Date de rédaction : 10 octobre 2011
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Auteur : Alexandra LUSSON
100%
90%
% de dégustateurs
80%
70%
60%
Apprécient
Rejettent
50%
40%
30%
20%
10%
0%
1124
191
1125
337
Graphique 3 : Répartition des préférences des dégustateurs
Selon les résultats de la dégustation, on remarque que 77 % des dégustateurs apprécient le
clone 1124 et 23 % le rejettent à la dégustation. Le clone 1125 est également plébiscité par
les dégustateurs puisque 62 % l’apprécient. En comparaison, les clones 191 et 337 sont
rejetés par un plus grand nombre de dégustateurs.
Les clones étant agréés, la production des plants selon les règles de la sélection clonale a
débuté en 2010 et les 2 clones seront disponibles pour les viticulteurs à partir de 2016.
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Les clones 1124 et 1125 de Cabernet
Sauvignon N
Date de rédaction : 10 octobre 2011
Réf :
Nom du média : Vinopole
Auteur : Alexandra LUSSON
Ce qu'il faut retenir :
Les 2 nouveau-nés de Cabernet Sauvignon N, les clones 1124 et 1125, présentent des
caractéristiques similaires respectivement à 191 et à 337. Ils sont légèrement plus productifs.
Ils sont avant tout plus qualitatifs que les clones 191 et 337. Ils produisent des vins riches en
anthocyanes, colorés, structurés, gras et équilibrés. Les clones 1124 et 1125 présentent de
très bons résultats à la dégustation, ils sont aptes à la production de vins typiques et de
garde. Ils ne sont pas porteurs de l'enroulement type 2 ce qui leur confère un bel avenir au
sein du vignoble aquitain. Ces clones seront disponibles pour les viticulteurs à partir de
2016.
* Une famille sanitaire correspond à l'ensemble de la descendance obtenue (au premier
degré) après multiplication végétative ou greffage en assemblant les greffons d'un seul pied,
d'un clone d'une variété à fruits aux boutures d'un seul pied, d'un clone d'une variété de
porte greffe.
Bibliographie
ème
Boudon-Padieu E. et al. 14
congrès de l’ICVG. Progrès Agricole Aquitain, 2003, 120, n° 24.
Dufour M-C. Etude de la transmission du virus de l’enroulement type 2. Rapport annuel
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Galet P. Précis de viticulture, 2000.
IFV. L’enroulement Viral de la Vigne. www.vignevin-sudouest.com/publications/fiches-pratiques.
Mannini F. et al. Contribution des infections virales à la variabilité de quelques cépages de Vitis
Vinifera. Bulletin OIV, n° 817-818, mars-avril 1999.
ème
Reynier A. Manuel de viticulture, 8
édition. Editions Tech&Doc, Paris, 2002. p 79.
Sforza R. et al. Les cochenilles et l’enroulement viral de la vigne. Phytoma, n° 532, novembre 2000.
Walter B. Effets des viroses sur la vigne et ses produits. Progrès Agricole Aquitain, 1996, 113, N° 22 .
Mots-clés
Enroulement viral, anthocyanes, vigueur, rendements, fertilité, cochenilles, Tests ELISA, GLRaV 1, 2
et 3, clones 1124 et 1125.
A. Lusson
Responsable Matériel Végétal
Chambre d'Agriculture de la Gironde
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