l`avenir des - Côtes d`Armor 2mille20
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l`avenir des - Côtes d`Armor 2mille20
Les objectifs du schéma Armoroute sont bien entendu l’attractivité de nos territoires, le développement économique, mais aussi le développement durable et solidaire et la prise en compte des enjeux environnementaux, tous thèmes qui sont abordés par nos intervenants. La méthode, c’est ce négociation qui doit aboutir à élaborer notre nouveau schéma départemental Armoroute 2020 pour le début de l’année 2008. De nombreuses réunions sont prévues, au cours de cette année, avec l’ensemble de nos partenaires élus, économiques, représentants de la vie sociale, associations de défense de la nature. Mais auparavant, je souhaitais que nous puissions disposer des réflexions sur la vision prospective, par des experts, de la tonalité, du contexte, de la recherche sur les modes de transport. » Claudy Lebreton, président du conseil général des Côtes d’Armor. C et ouvrage retrace la session extraordinaire du conseil général qui s’est déroulée le 22 mai 2007 sur le thème de l’avenir des déplacements en Côtes d'Armor. -:HSMHPC=[UX^^^: éditions de l’aube l’aube ouest partenaires, le dialogue et, de plus en plus, cette idée de la L’avenir des déplacements en Côtes d’Armor que j’appelle l’esprit de réforme, avec l’information de nos L’AVENIR DES DÉPLACEMENTS EN CÔTES D‘ARMOR Armoroute 2020 l’ aube ouest aussi avec la perspective de Côtes d'Armor 2020. […] François de Singly « Cette session extraordinaire sur Armoroute a lieu dans le cadre de l’actualisation du schéma départemental, et L’avenir des déplacements en Côtes d’Armor Armoroute 2020 La collection Bibliothèque des régions est dirigée par Jean Viard Série l’Aube Ouest Texte établi sous la responsabilité de l’éditeur Dans la même série : Regards d’aujourd’hui, regards de demain, 2007 L’avenir de l’agriculture en Côtes d’Armor, 2007 Hervé Le Bras, La Bretagne en mouvement. Terrains démographiques, politiques et sociaux de l’avenir, 2008 L’avenir des déplacements en Côtes d’Armor Armoroute 2020 Session extraordinaire du 22 mai 2007 Conseil général des Côtes d’Armor présidé par Claudy Lebreton © Éditions de l’Aube et conseil général des Côtes d’Armor, 2008 www.aube.lu ISBN 978-2-7526-0399-9 éditions de l’aube Avant-propos Claudy Lebreton Ce livre est issu de la session extraordinaire du conseil général des Côtes d’Armor consacrée au schéma départemental des routes et déplacements qui s’est déroulée le 22 mai 2007 Cette session extraordinaire sur Armoroute a lieu dans le cadre de l’actualisation du schéma départemental et aussi avec la perspective de Côtes d’Armor 2020. Il faut rappeler que c’est en 1978 que l’assemblée départementale a initié le premier schéma départemental d’aménagement routier. Félix Leyzour, président de la Commission des infrastructures routières et des transports d’alors, en a été le maître d’œuvre, et il l’est toujours, puisque tous les cinq ans, nous actualisons ce schéma. Au total, ce sont pratiquement 220 millions d’euros qui ont été consacrés à Armoroute. C’est une satisfaction et les Costarmoricains ne s’y sont pas trompés lorsqu’ils se sont exprimés dans le cadre du questionnaire que nous leur avons adressé à propos des politiques départementales. 70 % ont dit leur satisfaction à ce qui concerne le réseau routier départemental. Il est vrai que beaucoup d’efforts ont été consentis dans le cadre des axes routiers les plus importants au niveau départemental, ce qu’on appelle le réseau A. Nous avons aussi bien entretenu le réseau B et le réseau Président du conseil général des Côtes d’Armor. des routes départementales secondaires à faible trafic. Aujourd’hui, nous pouvons tirer satisfaction du travail entrepris depuis trente ans mais c’est aussi le cas pour l’ensemble de la population. Le contexte actuel n’est pas celui des années 1970, et les choses ont beaucoup changé. D’abord, les modes de déplacement s’abordent avec l’esprit du transport par route, que ce soient les voyageurs à titre personnel, individuels, ou les transports de marchandises, certainement le mode de transport le plus usité dans notre pays, en Europe et dans le monde. Par ailleurs, les véhicules automobiles ont beaucoup changé – nous sommes loin du temps de la Traction, de la Dauphine, de la R12 : ils utilisent de plus en plus d’intelligence embarquée avec tous les traitements informatiques, les matériaux utilisés, matériaux composites en ce qui concerne les carrosseries automobiles. Dans le domaine de la sécurité également, il y a maintenant des limitations de vitesse partout. Le gabarit des véhicules de transport de marchandises a évidemment beaucoup évolué et nous avons dû constamment nous adapter voire anticiper les modes de transport. Toutes ces évolutions sont à prendre en compte dans l’abord de ce schéma départemental d’aménagement routier. C’est pour cela que nous avons voulu qu’il y ait une intervention d’experts sur la démarche prospective des transports en 2050 : il s’agissait de mesurer l’évolution du transport de voyageurs et du transport de marchandises, avec la logistique, à l’échelle des territoires français, breton et costarmoricain, et l’innovation en matière de transports, de déplacements et de sécurité. Là aussi, la demande exprimée par l’ensemble de nos compatriotes, mais plus sûrement par leurs représentants légitimes, les maires, les conseillers généraux, les conseillers régionaux, s’est progressivement modifiée. Il y a beaucoup de demandes de routes départementales, de déviations de villages, ce qu’on appelle les rocades : rocades urbaines, rocades pour les collectivités rurales et les gros bourgs, les villes moyennes et autres ; plus que de réalisations intervillages ou interurbaines, même s’il reste encore des travaux à réaliser dans ce domaine. Nous sommes dans un nouveau contexte, par la loi du 13 août 2004 qui transfère une partie du patrimoine routier national au patrimoine départemental ; ce sont des milliers de kilomètres qui deviennent « routes nationales d’intérêt local » ; c’est une partie du personnel qui entretenait ces routes nationales qui est désormais accueilli dans les services départementaux des infrastructures et des transports ; c’est la prise en compte, pour le département des Côtes d’Armor, de la territorialisation de nos politiques publiques, y compris la politique publique d’aménagement des territoires et des infrastructures ; c’est la nouvelle organisation administrative du service départemental avec nos agences techniques départementales, nos antennes et nos centres d’exploitation. La protection de l’environnement est venue impacter nos réflexions, et toutes les décisions politiques : il faut que nous ayons cette nouvelle culture avec la formation des élus, celle des personnels territoriaux, et que nous pensions toujours infrastructures en lien avec préservation de notre environnement. À ce titre, nous avons à stimuler les modes de déplacement collectif des v oyageurs dans le département : nous avons d’ores et déjà les Tibus (car interurbain à 2 euros), le « ticoto.fr », pour le covoiturage, qui se développent. L’intermodalité des modes de transport est aussi un thème qui désormais s’insère dans nos réflexions : que ce soit dans le domaine maritime, aérien ou ferroviaire. Les départements sont appelés, en termes de solidarité et de partenariat, à financer les nouvelles infrastructures ferroviaires ainsi que les gares, donc le transport routier dans l’intermodalité. Et puis le département des Côtes d’Armor a choisi de s’investir dans les « systèmes de transport intelligent ». ITS Bretagne, dont je suis le président, a été constitué avec les centres de recherche, les centres de formation, la plupart des collectivités bretonnes : la région, les quatre départements, les grandes agglomérations sont partie prenante de ITS Bretagne. Et nous avons l’opportunité, avec une délégation costarmoricaine régionale et nationale, avec ma fonction de président de l’ADF, de participer au congrès mondial des ITS d’octobre 2007 à Pékin. Les objectifs du schéma Armoroute sont bien entendu l’attractivité de nos territoires, le développement économique, mais aussi le développement durable et solidaire et la prise en compte des enjeux environnementaux, tous thèmes qui sont abordés par nos intervenants. La méthode, c’est ce que j’appelle l’esprit de réforme, avec l’information de nos partenaires, le dialogue et de plus en plus cette idée de la négociation qui doit aboutir à élaborer notre nouveau schéma départemental Armoroute 2020 pour le début de l’année 2008. De nombreuses réunions sont prévues, au cours de cette année, avec l’ensemble de nos partenaires élus, économiques, représentants de la vie sociale, associations de défense de la nature. Mais auparavant, je souhaiterais que nous puissions disposer des réflexions sur la vision prospective par des experts, de la tonalité, du contexte, de la recherche sur les modes des transports, et qu’ensuite un échange avec les membres de l’assemblée départementale vienne enrichir cette démarche. Première partie Les transports : perspectives, évolution et innovations 10 11 I Une prospective des transports 2050 Jean-Noël Chapulut Le Conseil général des ponts et chaussées est un service du ministère de l’Écologie, du Développement et de l’Aménagement durables, chargé à la fois de l’inspection des services et de donner des conseils au ministre et à ses directeurs sur les actions qui sont de leur ressort. En 2002, le gouvernement a demandé un audit des grandes infrastructures de transports du pays, notamment sur les lignes à grande vitesse et les grandes infrastructures routières et aéroportuaires. Cet audit, qui a été examiné par le Parlement, a fait l’objet de certaines critiques dont celle de ne s’être pas suffisamment porté en avant et de n’avoir pas suffisamment fait de prospective. Sensibles à ces critiques, nous avons immédiatement constitué une équipe, essentiellement des membres du CGPC mais également des experts du ministère et des chercheurs de l’Institut national de recherche sur les transports et leur sécurité (Inrets). De 2003 à 2005, nous avons élaboré une réflexion sur ce que pourrait être le monde des transports dans une projection à 2050. Ingénieur général des Ponts et Chaussées. 12 13 Lorsque l’on entame une réflexion sur un objectif aussi lointain que 2050, on a de grandes chances de faire des erreurs. Pourquoi 2050 ? Parce que l’audit avait montré qu’en matière de transports, le temps joue un grand rôle sur les décisions. Entre le moment où l’idée d’une grande infrastructure émerge et le moment où elle est réalisée, une bonne vingtaine d’années s’écoulent, parfois plus. Ensuite, comme il s’agit d’un investissement lourd, une trentaine d’années sont nécessaires pour le rentabiliser d’un point de vue économique pour la collectivité. C’est donc à un terme de l’ordre de cinquante ans que la réflexion doit s’établir. Nous avons fait appel à des experts à la fois dans le monde public et dans le monde de l’entreprise, dans le monde privé en général, puis, en cours de route et surtout à la fin, nous avons testé ce qui émergeait avec des groupes spécialisés d’experts. Nous avons procédé dans le cadre de la démarche assez classique de prospective, à savoir que l’on commence par faire une rétrospective sur la même durée que celle dans laquelle on se projette. Nous avons ensuite construit des scénarios généraux d’aménagement, des scénarios d’évolution du monde puisque nous sommes dépendants du monde extérieur. Nous avons choisi des futurs possibles et des cheminements, traitant assez peu des crises et des ruptures. Puis nous avons modélisé nos hypothèses. Enfin, nous en avons tiré des enseignements et dégagé les principaux enjeux. Rétrospective La rétrospective montre une évolution concernant les transports extrêmement importante au cours des cinquante dernières années, qui a été provoquée par cinq facteurs principaux : 1) l’accroissement de la richesse (multipliée par trois à quatre sur cette période) ; 2) l’ouverture des économies avec le traité de Rome et, plus largement, l’ouverture au commerce mondial qui a amené des échanges importants ; 3) la transformation des modes de vie, en particulier de l’habitat et de l’automobile : il n’y avait pratiquement pas d’automobiles et le taux de motorisation était extrêmement faible (pratiquement tous les ménages sont maintenant motorisés, beaucoup sont bi-motorisés) ; 4) une énergie abondante et à bas prix, un phénomène qui risque de ne pas se reproduire dans l’avenir (rappelons qu’en valeur actuelle, en 1970, le baril de pétrole était à 10 dollars et en 2000 à 33 dollars) ; 5) enfin, le développement des transports rapides : on a un peu oublié ce qu’était la France des années 1960 en termes de réseaux rapides, c’est-à-dire autoroutes, lignes à grande vitesse et aéroports. Il y avait quelques fragments d’autoroutes aux sorties de Paris, Lyon, Marseille et Lille. Aujourd’hui, c’est un réseau pratiquement complet qui couvre l’ensemble du territoire, y compris sur le réseau breton qui est à caractéristiques autoroutières. Le maillage est important et complété par deux grands aéroports nationaux plus le développement de Nice, alors qu’en 1960, on inaugurait simplement Orly. Pendant cette période, le trafic de marchandises a crû énormément, de la même manière que l’économie (mis à part la stabilisation du nucléaire et la sidérurgie côtière). La courbe des transports montre que cette 14 15 Les perspectives énergétiques Nous avons quelques données sur l’approvisionnement énergétique et sur les émissions de gaz à effet de serre, qui sous-tendent nos problèmes. Nous savons que nous aurons encore du pétrole pendant au moins la première moitié du xxie siècle, avec une croissance de la production appuyée sur deux phénomènes : 1) d’une part, le développement des pétroles non conventionnels, des pétroles lourds – qui pose des problèmes de traitement ; 2) d’autre part, une hausse de la part du pétrole en provenance du golfe Persique – qui pose le problème de la sécurité d’approvisionnement. Avec cela, bien entendu, la production augmente, mais la demande augmente beaucoup plus, ce qui ne manquera pas d’avoir une incidence sur l’évolution des prix du pétrole et du gaz. Sans politique de freinage de la demande ou de stimulation d’une offre concurrentielle, on voit que le prix du pétrole pourrait croître jusque vers 120 dollars en 2050 hors manifestations erratiques liées à la sécurité qui ne sont pas à écarter, tant s’en faut. Nous avons à peu près les mêmes problèmes pour le gaz, dont la ressource, à un peu plus long terme, viendra à manquer. Le vrai problème derrière, le plus grave, est celui de l’émission des gaz à effet de serre et du réchauffement climatique. Nous savons que sur les cent dernières années, la température du globe a augmenté de 0,6 °C environ, mais que, pour des raisons variées dont les principales sont probablement l’influence humaine et l’augmentation de la concentration de CO2 dans l’atmosphère, nous risquons d’avoir une croissance d’ici 2100 de la température comprise, d’après les experts, entre 1,6° et 6°, sachant qu’au-delà de 1,6-2 °C, les conséquences risquent d’être difficilement supportables, tout au moins extrêmement graves. L’émission de gaz à effet de serre représente aujourd’hui la contrainte peut-être prédominante pour une politique des transports. En revanche, l’effet positif est que, si nous parvenons à limiter les émissions des gaz à effet de serre, nous aurons un effet – nous le verrons avec les différents scénarios que je présente – de 16 17 croissance s’est faite quasi exclusivement au profit du transport routier, comme d’ailleurs le trafic voyageurs, encore que, pour celui-ci, les transports collectifs se sont notablement accrus grâce au transport aérien. Mais en gros, la forte évolution du trafic voyageurs qui est due à des effets de revenu et de motorisation se rapporte essentiellement au trafic des véhicules particuliers. La conséquence est une consommation d’énergie qui a été multipliée par cinq. En France, nous avons peu d’électricité d’origine hydrocarbonée – grâce à l’énergie nucléaire –, il en résulte un très fort poids des transports dans les émissions des gaz à effet de serre : 27 % ; l’industrie représente 21 %, et le logement avec le bâtiment, 20 %. Au niveau mondial, la part des transports dans les émissions de gaz à effet de serre n’est que de 13 %. Cela ne vient pas tellement du fait que nos transports seraient plus importants, mais du fait que notre électricité est d’origine nucléaire à 80 % et que des efforts ont été accomplis depuis plusieurs années pour réduire la consommation d’énergie dans l’industrie. tassement de la hausse du prix du pétrole en freinant la demande et en créant des offres alternatives. Par conséquent, par la loi de l’offre et de la demande, les prix augmenteront moins. Quatre scénarios pour 2050 Nous avons bâti pour 2050 quatre scénarios croisant des entrées de croissance économique, politique énergétique et un peu démographique. 1) Le scénario 1, « Gouvernance mondiale et industrie environnementale », montre un monde dans lequel il y a une coopération, en particulier à cause du réchauffement climatique, et qui développe des technologies énergétiques très performantes. 2) Le scénario 2, « Repli européen et déclin », traite d’un monde peu ouvert, peu prêt à coopérer, et – c’est peutêtre une idée reçue – prévoit parallèlement une faible croissance de l’économie et du revenu. 3) Le scénario 3, « Grande Europe économique », alliée d’ailleurs avec le Maghreb et la Russie, indique un développement des échanges et de la richesse, mais sans coopération mondiale au niveau des gaz à effet de serre. 4) Le scénario 4, « Gouvernance européenne et régionalisation » – il s’agit de l’Europe stricto sensu –, implique un coût élevé de l’énergie et une intégration régionale. Précisons que ces scénarios ne représentent en aucune manière des prévisions. Il s’agit d’émettre des hypothèses extrêmement contrastées pour examiner, suivant les hypothèses, ce qui peut se passer et comment on peut réagir. Les scénarios ont des croissances de PIB et de population relativement différentes. Le scénario le plus pessimiste, dans notre optique, est le scénario du repli européen et du déclin, la France restant à 59 millions d’habitants, décroissant même un peu (la décroissance démographique est effective dans un grand nombre de pays européens, à l’exception de la France heureusement) avec un taux de croissance relativement bas à 1 %. Le scénario 3, la « grande Europe économique », est plus contrasté en PIB avec 67 millions d’habitants et 2 % de croissance ; les deux autres sont autour de 1,5 % de croissance. Sur les cinquante dernières années, le taux moyen de croissance a été en France de 2,2 % par an. Les hypothèses clés qui différencient nos scénarios sont surtout les hypothèses énergétiques, d’une part, sur le prix du baril du pétrole, qui dépend du marché mondial de l’énergie, et, d’autre part, sur la taxe carbone que l’on ajouterait au prix du baril du pétrole brut et bien entendu à la TIPP (taxe intérieure sur les produits pétroliers), que l’on conserve. Parmi ces quatre scénarios, nous en avons un extrême qui est celui de la gouvernance européenne, où, pour avoir un prix du baril de pétrole bas, on a une politique relativement environnementaliste mais dans un cadre étroit. À l’opposé, nous avons, dans le premier scénario, une politique environnementaliste au niveau mondial, c’est-à-dire un protocole de Kyoto à l’horizon 2050 auquel tous les pays adhèrent, avec une taxe de carbone mondiale, d’où un effort général pour essayer de trouver des solutions énergétiques satisfaisantes. Cela donne une industrie automobile qui arrive à des performances techniques importantes et une politique de carburant alternatif sur la biomasse relativement importante. 18 19 Nous voyons par là qu’il existe des alternatives énergétiques possibles à la situation d’aujourd’hui : par exemple, un véhicule hybride rechargeable qui est d’ailleurs déjà une réalité, puisqu’il y a au moins deux véhicules japonais qui sont de ce type et qui consomment de l’ordre de 90 grammes de CO2 par kilomètre contre plus de 200 grammes pour les véhicules extrêmement consommateurs – en particulier les 4 x 4 ; par exemple encore, en matière de carburant, les biocarburants classiques de première génération, qui sont en concurrence avec les productions agricoles, pourraient être remplacés par la biomasse ligneuse, c’est-à-dire les déchets de la forêt, ce qui fait l’objet de recherches assez poussées actuellement. Avec un rendement élevé à l’hectare, on peut utiliser des terres non agricoles en ayant un bilan nul en émission de CO2. Dans notre scénario 1, on imagine ainsi fournir en biomasse 50 % de l’énergie pour les transports en mobilisant le tiers des espaces naturels non agricoles français. Entre 2007 et 2050, on peut imaginer une série d’itinéraires divers avec des aboutissements qui sont eux aussi divers. Crises et ruptures d’origines diverses peuvent surgir : une crise politique dans le golfe Persique compromettrait l’essentiel des approvisionnements énergétiques ; en matière démographique et économique, peuvent survenir des mouvements de populations ou des changements importants des parités des monnaies. De vraies ruptures peuvent intervenir dans les comportements, pouvant être positives, avec une plus grande conscience des problèmes environnementaux et une prise en compte dans la politique de mobilité, ou négatives avec les problèmes de sécurité ou de sûreté. Ce qui s’est passé en 2001 à New York donne une idée des répercussions possibles sur le monde des transports du fait de problèmes de sécurité. Ces crises et ruptures n’ont été qu’effleurées, parce que non seulement elles ne concernent pas que les transports mais aussi, à la limite, parce qu’elles ne concerneraient les transports qu’en dernier ressort. Si l’on voulait les étudier, il faudrait le faire avec des équipes beaucoup plus importantes et beaucoup plus pluridisciplinaires que ne l’était la nôtre. Ce serait d’ailleurs probablement utile parce qu’à notre connaissance cela n’existe pas, pas même au point de vue de la sécurité nationale où il y a des cas graves que l’on n’envisage pas forcément. Nous avons ensuite modélisé nos hypothèses, en employant des modèles Matisse (Modèle d’analyse du transport interrégional pour des scénarios de service en Europe), modèle développé par Olivier Morellet, chercheur à l’Institut national de recherche sur les transports et leur sécurité (Inrets), en ce qui concerne les déplacements de personnes, et un modèle établi à cet effet pour les déplacements de marchandises. Les modèles tiennent compte des comportements actuels, qui ne seront certainement pas les comportements de demain, mais ils font ressortir que la croissance de la mobilité devrait se ralentir surtout sur les courtes distances, pour plusieurs raisons : d’une part, un ralentissement de la croissance de la richesse ; d’autre part, une maturité de la motorisation des ménages (quand les ménages ont une voiture, ils peuvent éventuellement en avoir deux mais guère plus…) ; enfin, une stabilisation voire une diminution de la vitesse du transport, c’est-à-dire que, pour des raisons notamment politiques, l’ère de 20 21 la création des réseaux rapides de transports arrive un peu à son terme. Donc, les vitesses moyennes ne vont pas continuer à croître comme elles l’ont fait au cours des cinquante dernières années ; elles vont plutôt diminuer, à l’exception des transports collectifs urbains où l’on recherche une amélioration de leur compétitivité. Les budgets consacrés au transport sont relativement constants. On s’aperçoit, sur une période assez longue, que le temps consacré chaque jour au transport n’a pas tellement varié, au moins sur ces dernières décennies : il est de l’ordre d’une heure par jour. Et plus les vitesses augmentent, plus les gens peuvent aller loin, voire avoir leurs logements loin. Enfin, dans nos scénarios, nous avons prévu que le coût de la voiture et de l’avion, qui consomment une forte part de l’énergie, augmenterait plus vite que le coût de la vie. Les projections pour les transports Compte tenu de tout cela, nous avons fait des projections sur les cinquante ans à venir. Le taux de croissance des cinquante prochaines années serait ainsi nettement plus faible que celui des cinquante précédentes années pour le transport à courte distance – moins de 50 kilomètres –, compris entre 15 % et 40 %, alors qu’il a doublé entre 1975 et 2000. En revanche, nous aurions une plus forte croissance – malgré tout inférieure à celle de ces dernières années – pour les transports de moyenne et longue distances, cela provenant de l’augmentation du temps de loisirs. On voit qu’il y a une grande différence entre le scénario 2, qui est dû d’ailleurs à la faible croissance du revenu par tête, et les autres scénarios où l’on n’est pas loin du doublement à moins de prendre des mesures plus contraignantes. Pour les voyageurs aériens, nous avons conservé une valeur assez forte de la croissance, cependant nettement moins forte que la précédente qui était à 4,3 % par an dans les vingt dernières années, que le scénario le plus élevé évalue à 2,2 % par an. À titre d’exemple de ce qu’il est possible de prévoir en fonction de ces trois scénarios, on peut s’interroger sur l’opportunité d’une troisième plate-forme dans la région parisienne. Pour les marchandises, on pense aussi que la croissance de flux de marchandises sera ralentie, mais plus ciblée sur l’international, parce que la part des croissances liées à l’industrie est plus faible – elles sont plus tournées vers les services donc moins consommatrices de marchandises. En revanche, on a un développement plus rapide des échanges internationaux et du transit que du trafic interne, et une concentration sur les ports et sur quelques grands axes de transit. Seul, le scénario 2 est en repli. Finalement, alors que nous avions un doublement entre 1965 et 2000, nous sommes là dans des hypothèses – les plus importantes – qui tournent autour de 50 % d’augmentation sur les cinquante prochaines années. Pour envisager comment ceci peut se traduire en modes de transports, entre la route, le fer, l’aérien, etc., cela donne des potentialités de développement de modes alternatifs à la route : transports collectifs dans les grandes agglomérations, surtout s’ils sont aidés, TGV, qui domine complètement le transport aérien intérieur et peut-être européen ; enfin, fret massifié – avec des techniques de type autoroutes ferroviaires avec développement du transport combiné. Mais le mode routier 22 23 restera normalement prédominant à moins de mesures administratives très fortes. Nous avons fait ce travail avant les décisions du gouvernement relatives à la raréfaction de l’énergie. L’effet de serre La sensibilisation aux problèmes de l’effet de serre, lorsqu’on analyse les trois ou quatre dernières années, a été extrêmement rapide. Dans notre scénario 1, qui est le plus environnementaliste, on a uniquement une division par 2,5 des émissions de gaz à effet de serre des transports et ceci grâce à la taxe au carbone mondiale et à l’effort mondial pour produire des technologies à basse émission. Premier mode de raisonnement : le fait qu’on ne soit qu’à 2,5 n’est pas traumatisant, car le problème de l’énergie ne doit pas s’affecter de la même manière à toutes les activités nationales : peut-être faut-il faire plus sur l’habitat et moins sur le transport. Deuxième mode de raisonnement : il faut progresser, si on veut arriver à une division par 4 dans les modes de transport, dans la tarification des hydrocarbures, dans les taxes de carbone ou TIPP ou dans certains mesures réglementaires. Tout cela montre que la division par 4 est possible même avec un mode routier prédominant, avec des véhicules plus efficaces : 3 litres de carburant par 100 kilomètres. Cela suppose ce qu’on n’a pas envisagé dans un premier temps, c’est-à-dire un certain type de véhicules urbains, et moins de dépendance au carburant pétrolier : la consommation s’investit en biomasse, avec un tiers d’électricité d’origine nucléaire et un tiers de pétrole. L’essentiel des économies est à attendre des techno logies des véhicules et des carburants : le chiffrage de 2025, temporaire, montre ce qu’on peut en attendre : une économie de 50 Mt de CO2 par an par rapport à l’émission actuelle de 149 Mt. Le report modal affiche une économie entre 13 et 30 Mt, les comportements des conducteurs entre 5 et 20 Mt ; avec les technologies imaginables, c’est plutôt sur les véhicules légers que sur les poids-lourds que l’on escompte les plus grosses économies. Les enjeux qui se dégagent de cette réflexion, c’est d’abord que fin 2005 nous étions déjà conscients que le problème était l’émission des gaz à effet de serre. Donc, pour préparer l’ère de l’après-pétrole et la lutte contre le changement climatique, trois types de mesures sont préconisés : 1) accentuer la recherche de développement sur le véhicule hybride rechargeable, sur l’électricité sans carbone, sur les carburants de synthèse ; 2) la recherche ne suffisant pas, mener une action normative plus volontariste, au moins au niveau européen si ce n’est au niveau mondial, et cette idée fait son chemin (ce n’est pas simple parce que les Allemands ont de plus grosses cylindrées, de meilleur confort, et il sera difficile de leur demander le même niveau d’émission moyen qu’aux industriels français qui ont un parc de cylindrées beaucoup plus réduites) ; 3) mettre en place des outils de régulation économique au niveau mondial ou, à défaut, européen sur l’effet de serre. Il existe deux types de régulation économique : soit la taxe, qui est relativement simple, dont nous nous sommes servis dans notre réflexion, soit les permis d’émission, qui sont des outils un peu plus complexes à manier mais qui garantissent les niveaux d’émission 24 25 que l’on veut atteindre. Et dans le cas, souhaitable, d’un consensus mondial, la France représente à peu près 1,5 % des émissions mondiales des gaz à effet de serre. Le problème du réchauffement climatique est un problème global grave, dont dépend l’avenir de nos enfants et petits-enfants. Une politique menée par la France seule est dénuée de sens ; menée par l’Europe, elle en acquerra un peu plus, mais guère, puisque l’Europe ne représente que 14 % des émissions de gaz à effet de serre. Donc, il y a vraiment une nécessité d’arriver à un consensus mondial. Là aussi, le temps passant, nous sommes peut-être moins pessimistes que nous pouvions l’être il y a seulement un an. Du côté des États-Unis d’Amérique, on voit certaines évolutions, même sans changement de gouvernement : ils sont très orientés vers les solutions technologiques. Au niveau des infrastructures, compte tenu du fait que le rythme de croissance de la mobilité va un peu se ralentir, il n’existe pas trop de problèmes, sauf quelques-uns, en particulier en ce qui concerne les TGV. Les capacités de la ligne sud-est, dès 2025, devraient être insuffisantes, mais aussi la LGV atlantique et la LGV nord avant 2050 ; les deux grands axes de transit atlantique, l’axe rhodanien, l’aéroport de Paris, probablement l’aéroport de Nice, et enfin les deux grands ports à conteneurs, si ce trafic continue à croître comme on peut le penser – au moins pendant un certain temps mais pas jusqu’à 2050. particulier sur les technologies du futur, sur l’évolution de la mobilité des personnes, des modes de vie et de l’organisation du territoire, 2) le tourisme, qui est le grand générateur de trafic aérien et de gaz à effet de serre, 3) l’évolution des flux de marchandises liée aux systèmes de production et de distribution, 4) l’évolution de la logistique liée à de grandes évolutions techniques, et 5) la sécurité et la sûreté. Cinq messages clés sont attachés à ces axes de travail : 1) la croissance de la mobilité sera ralentie ; 2) le développement de modes alternatifs ne modifiera pas la prédominance de la route ; 3) la priorité est de développer la recherche et la normalisation sur les économies et les alternatives énergétiques ; 4) la nécessaire négociation, à partir d’une volonté européenne, de la régulation des émissions de CO2 au niveau mondial ; 5) une action immédiate consiste à faire partager et approfondir une vision commune sur le devenir des transports – ce que nous essayons déjà de faire au niveau européen. Questions Pour conclure, il nous faut travailler dans cinq directions : 1) la veille technologique et la recherche, en Claudy Lebreton Concernant la diminution de la ressource pétrolière, où en est la recherche sur les nouveaux champs pétrolifères à l’échelle mondiale ? Et qu’advient-il si la Bolivie devient, comme cela se dit, le plus grand producteur de pétrole au monde ? Ensuite, où en sommesnous de la recherche automobile, notamment en ce qui concerne les deux grands groupes français ? Et toujours 26 27 * en France, où en sommes-nous de la recherche par les grands groupes français sur le diesel, la pile à combustible, etc. ? Jean-Noël Chapulut Nous nous sommes évidemment préoccupés de la ressource pétrolière puisque le monde du transport en dépend. Nous avons compris qu’il y a peu de découverte de nouveaux champs de pétrole conventionnel, c’est-à-dire classique. Ce qui commence à se développer ce sont plutôt des champs de pétrole lourd, comme ceux du Canada, plus chers à exploiter et gros émetteurs de gaz à effet de serre. Les opinions des experts divergent, en particulier sur ce qu’on appelle le peak oil, c’est-à-dire le sommet de la production, qui va de 2010 pour les plus pessimistes jusqu’à 2025-2030, qui sont les prévisions par exemple de Total et de l’Institut français du pétrole (IFP). La fusion des trois minis tères concernés va peut-être nous faire avancer dans la connaissance du problème. lequel on vient mais un pays que l’on traverse et une grande partie du transport européen transite par le terri toire français. C’est un élément qui doit être pris en compte pour mesurer les responsabilités respectives des uns et des autres, notamment pour chercher des solutions dans le cadre national et dans le cadre européen. 3) Enfin, si la route doit rester un élément important du transport, tout en faisant des économies d’énergie au niveau de l’intermodalité, ne faut-il pas essayer de réserver la part la plus importante possible de nos énergies fossiles, en particulier du pétrole, pour ce type de consommation en développant évidemment par ailleurs toutes les énergies potentielles renouvelables, du point de vue de la production du courant électrique ? Félix Leyzour, conseiller général du canton de Callac Je retiendrai trois éléments : 1) En ce qui concerne l’intermodalité des transports, la route restera, quelles que soient les autres formes développées, un élément déterminant. Cela pose les problèmes des infrastructures mais aussi des modes de transports. 2) En ce qui concerne les émissions de CO2, la situation de notre pays n’est-elle pas caractéristique de l’ensemble de l’Europe par rapport à d’autres pays ? En effet, nous ne sommes pas seulement un pays dans Jean-Noël Chapulut Le transit est un problème important pour la France, que ce soit en voyageurs ou en marchandises. Le transit de marchandises représente 15 à 20 % du trafic intérieur, essentiellement lié d’ailleurs à la péninsule Ibérique et à l’Italie. Trois remarques là-dessus. La première, c’est que nous ne sommes plus les seuls, car les Allemands, par exemple, occupent, avec l’extension de l’Europe, une position encore plus centrale que la nôtre. D’où, deuxième remarque : les Allemands ont instauré un péage sur toutes les autoroutes ; nous n’avons des péages que sur les autoroutes concédées, et la TIPP n’est pas uniformisée. Il y a donc des véhicules qui rentrent avec jusqu’à 1 000 litres de gazole dans leurs cuves, sans payer de TIPP, qui sert à financer les infrastructures. Et, troisième remarque, je pense que la péninsule Ibérique se trouve, au point de vue 28 29 é conomique, dans une nouvelle situation puisque ce sont les pays de l’Est, les nouveaux entrants, qui jouent en partie le rôle économique qu’elle jouait auparavant. Par ailleurs, à la question « est-ce qu’il ne faut pas réserver le pétrole au transport ? », les transporteurs aériens disent toujours que la dernière goutte de pétrole sera pour eux. En dernier ressort, une décision politique qui devra figurer rapidement sur l’agenda du gouvernement, puisqu’on s’est fixé l’objectif de diviser par 4 en 2050, sera le partage entre les secteurs. Sur l’habitat, par exemple, des études sont menées, notamment par la commission Énergie, présidée par Jean Syrota, et nous-mêmes. Charles Josselin, sénateur des Côtes d’Armor Parmi les hypothèses émises, il y en a une qui se traduit par une régression démographique de la France, ce qui est un peu en contradiction avec ce que l’on observe aujourd’hui : cela veut dire qu’il y aurait un renversement de la courbe dans les années à venir. Il me paraît important d’examiner la question du vieillissement de la population pour savoir si une population qui vieillit modifie ses consommations – en énergie en général ou en transports en particulier. On a souligné l’importance de la gouvernance mondiale, ou la mauvaise volonté continue à s’exprimer du côté du gouvernement fédéral américain, la bonne nouvelle, c’est la mobilisation des villes et États américains sur ces objectifs. La bonne nouvelle aussi, c’est, semble-t-il, la prise de conscience de la Chine sur l’importance de ces questions. Il semble que des 30 réflexions sur le thème de l’économie circulaire sont actuellement conduites autour des villes chinoises qui sont des acteurs essentiels. Je veux également évoquer la question des résistances ou des complicités des intérêts financiers et industriels. On a pendant très longtemps incriminé les pétroliers qui n’étaient pas très favorables à une recherche dans le sens d’une plus grande économie. On sait la difficulté, dans une économie de profit, de raisonner à cinquante ans, alors que le souci est le rendement immédiat. Estce que les groupes industriels ou les intérêts financiers vont être partenaires ou adversaires dans les choix difficiles à prendre ? Par ailleurs, croit-on vraiment que la biomasse, hormis des exceptions comme le Brésil, et encore, soit une alternative ? Le propos de Chavez ou de Castro, « pétrole ou nourriture », ne finira-t-il pas par s’imposer ? L’explosion du prix de la tortilla mexicaine ne peut pas nous laisser indifférents et la tension sur le prix des céréales fait redouter que ce parti pris du biocarburant amène de nouvelles dérives, avec les engrais qu’on y mettra et les pesticides pour avoir davantage de biocarburant. Bref, est-ce que ce pari sur un tiers de biomasse pour le transport routier ne paraît pas excessif ? Jean-Noël Chapulut Le vieillissement de la population n’a pas un effet majeur sur la mobilité parce que les personnes âgées se déplacent – elles ont le permis de conduire –, ce qui n’était pas le cas des générations précédentes. Nous avons, dans un scénario, pris en compte une régression démographique pour la France parce que nous voulions 31 avoir une hypothèse relativement contrastée et pour rappeler que plusieurs pays européens auront moins de population en 2050 qu’aujourd’hui. Les Italiens, notamment, risquent de n’être plus très nombreux. Il n’est pas évident de faire des prévisions démogra phiques parce qu’il y a non seulement les phénomènes naturels mais aussi l’immigration. On ne maîtrise pas la démographie, qui peut réserver des surprises. Sur la gouvernance mondiale, en ce qui concerne les États-Unis d’Amérique, le discours paraît moins fermé depuis quelque temps, sans parler de ce qui pourrait se passer avec un nouveau président. Et il est vrai aussi que les Chinois et peut-être même les Indiens bénéficient quelque peu des progrès d’efficacité énergétique faits par les constructeurs en général. Je ne crois pas trop à la diplomatie de l’exemple, je crois beaucoup à l’intérêt, puisque le pétrole coûtera cher. En ce qui concerne les pétroliers ou les intérêts financiers, les pouvoirs publics ont tous les moyens pour donner les signaux au monde économique, à l’aide de taxes et de normes. L’évolution de l’industrie automobile et du poids-lourd a été considérable ces vingt dernières années grâce aux normes. Sur les autres types d’émissions, les progrès sont importants également : on a affaire à des interlocuteurs qui paraissent conscients des difficultés du monde des décennies prochaines. Dernier point : il faut savoir que le biocarburant pose plus un problème de fabrication que de consommation, parce qu’on pourrait en mettre beaucoup plus dans les moteurs tels qu’ils existent, en particulier dans les moteurs de poids-lourds. C’est le problème de la production de biocarburant à partir de végétaux. 32 Mais nous pensons à la solution que confortent certains spécialistes d’un autre type de biocarburant à partir de la biomasse : nos collègues de l’agriculture comme de l’énergie pensent que c’est possible mais pour l’instant encore du domaine des hypothèses et de la recherche. Loïc Raoult, conseiller général du canton d’Étables La prévision que la route restera le modèle déterminant pour les trente années à venir est inquiétante. Est-ce une affirmation ? Est-ce un constat ? Est-ce une position ? Même si la technologie avance avec des carburants moins polluants, il n’en restera pas moins que le bruit sera toujours un élément important, qu’il faudra construire des infrastructures de plus en plus importantes, et que la croissance, si elle continue sur le rythme actuel, nécessitera une mobilisation d’espaces considérables pour créer de nouvelles routes, de nouveaux parkings, de nouveaux espaces pour la voiture. Je crois qu’il faut s’inscrire dans une dynamique autre. On sait que la voiture va continuer à prospérer. Il faut que les pouvoirs publics s’engagent dans des alternatives au développement de la voiture, notamment à travers les transports collectifs. Si nous ne mettons pas massivement en place une alternative à la voiture, nous serons en échec dans les années à venir. C’est le rôle des politiques d’affirmer et d’infirmer ce constat d’un modèle qui est derrière nous dont on n’est pas capable de modifier le cours et la tendance. Donc, est-ce que c’est une position ou est-ce que c’est un constat ? La différence n’est pas neutre. 33 Jean-Noël Chapulut Dans l’équipe qui travaillait, nous avions des opinions diverses. Nous avons été incapables de bâtir un scénario du type de celui que vous esquissez : il faut avoir des ordres de grandeur en tête. Le plus simple, c’est la règle de trois. Nous savons qu’en moyenne nationale, la part des transports collectifs dans les déplacements de moins de 50 kilomètres est 10 %, d’ailleurs en diminution, soit 90 % restant du ressort de l’automobile. En région parisienne, on est à 25 % et à Paris à 50 %, mais nous sommes un pays assez particulier dans la morphologie européenne, par rapport aux pays de l’Europe du Nord au moins, assez peu dense. Il est difficile de monter – pour les voyageurs à courte distance – des systèmes collectifs coûteux en investissement et en fonctionnement avec des prix trop réduits sauf à s’endetter. On peut faire des efforts mais nous sommes un pays à faible densité où le transport collectif coûte relativement cher. On voit bien que l’effort envisagé sur le scénario le plus favorable fait passer de 10 à 12 ou 13 % ; vouloir passer à 20, 30 ou 40 % paraît économiquement impossible. Le trafic de marchandises, en France, est de l’ordre de 400 milliards de tonnes kilomètre – unité qui n’est d’ailleurs qu’une valeur relative, mais c’est la plus pra tique. Nous avions 50 milliards de tonnes kilomètre par fer et un peu plus de 300 par route. Il avait été décidé en 2000 d’augmenter de 50 à 100 milliards de tonnes kilomètres le fret ferroviaire ; or nous sommes aujourd’hui à 40 milliards de tonnes-km. Et même si on faisait passer le fret ferroviaire dans nos plans les plus ambitieux, au moins en 2020, à 100 milliards de tonnes kilomètre, on ne diminuerait ainsi que de 5 à 10 % le trafic des poids-lourds. Cela implique de tels bouleversements qu’on ne les voit pas. Ce que nous proposons, c’est d’agir pour que le transport automobile en général soit de moins en moins gênant : ne pas multiplier les infrastructures, donc moins de consommation d’espace, des véhicules moins nuisants surtout sur la partie électrique en ville. Il nous semble que ces scénarios sont plus faciles à atteindre qu’un scénario de fort report modal que nous n’avons pas su rédiger. 34 35 II Évolution des transports et de la logistique à l’échelle des territoires français, breton et costarmoricain Hervé Le Jeune, Philippe Plantard Hervé Le Jeune Pour parler du transport routier, on parle généralement du transport, pas simplement les poids-lourds, marchandises, ou véhicules de voyageurs. Quand on parle de transports routiers, on parle aussi des véhicules particuliers. Dans les chiffres, il faut faire la différence : le transport routier, ce n’est pas simplement le poids-lourd. Quelques signaux d’alarme affectent le transport routier : il enregistre une baisse de 0,5 % du chiffre d’affaires en 2005. La sinistralité des entreprises est deux fois plus élevée dans le transport routier de marchandises que dans le reste de l’économie. Et le pavillon français est en recul de 33 % depuis 1992, ce qui signifie également que le trafic international se développe. Nous avons perdu là 15 000 emplois entre 2001 et 2005, alors que c’est un Respectivement délégué régional de la Fédération nationale des transports routiers et délégué régional de la Fédération nationale des transports de voyageurs. 36 secteur qui recrute en permanence. Le transport routier en France, ce sont 40 000 entreprises de transport public, c’est-à-dire du transport de produits qui ne leur appartiennent pas. Les poids-lourds, aujourd’hui, ce ne sont pas forcément les entreprises de transport public ; il y a aussi ce qu’on appelle « les comptes propres », des flottes comme Intermarché, par exemple, qui transportent en partie leurs produits et qui ne rentrent pas dans ce chiffre. Un poids-lourd sur la route n’est pas forcément une entreprise de transport public. En Bretagne, ce sont 2 500 entreprises et c’est globalement l’une des premières régions les plus fortes en matière de transport routier : 400 entreprises sont inscrites au registre en Côtes d’Armor. Le nombre d’emplois directs est de 419 500 salariés au niveau national, 40 000 en Bretagne et plus de 5 000 dans les Côtes d’Armor. Il est important de rappeler que les deux tiers du trafic se situent sur l’axe nord-sud, ce qu’on appelle la « route des estuaires » : ce sont les échanges entre les trois régions, Basse-Normandie, Bretagne et Paysde-la-Loire. Le transport routier autre que les marchandises est lié à l’activité agricole, qui représente près du tiers des marchandises transportées ici dans l’Ouest alors qu’en moyenne nationale, elle n’est que de 20 %. Le transport routier en Bretagne concerne donc d’abord l’agroalimentaire. Le transport est constitué à la fois par le transport routier et par la logistique, car l’ensemble des clients demandent à leur transporteur de gérer toute leur logistique. Les Côtes d’Armor avaient un peu de retard en matière de logistique. Les deux départements les plus avancés en la matière sont l’Ille-et-Vilaine – c’est 37 dû à sa situation géographique – puis le Morbihan. Le Finistère se développe de façon également importante pour des raisons un peu historiques. Les Côtes d’Armor commencent à avoir des atouts en matière de logistique et nous trouvons des implantations qui ne sont pas négligeables, notamment à proximité de Saint-Brieuc. La logistique est un facteur important en matière de développement du réseau routier. Le projet qui touche aujourd’hui Rennes et la plate-forme de Châteaubourg gagnerait à être vivement et rapidement défendu : ce sera la plate-forme de l’Ouest, et pas simplement de l’Ille-et-Vilaine, susceptible d’engendrer un développement économique important. La synthèse des flux au niveau régional montre l’impact et le poids des Côtes d’Armor dans les différents modes de transport. Au niveau intradépartemental, le chiffre de 20,9 Mt se situe plutôt bien dans la moyenne des autres départements. Au niveau du rail, il n’y a rien. Au niveau interdépartemental, les Côtes d’Armor se situent plutôt bien par rapport aux autres départements. Le poids du fer, même s’il est plus important dans les Côtes d’Armor que dans les autres départements, ne représente rien par rapport au poids de la route. Au niveau interrégional, on n’est plus qu’à 43 Mt au total. Là encore, les Côtes d’Armor se situent dans la même moyenne que le Finistère, moins bien que l’Ille-et-Vilaine et le Morbihan, pour les situations et des régions géographiques où nous sommes à presque 6 Mt. À l’international, nous sommes à 525 000 tonnes pour les Côtes d’Armor, donc un trafic international fort éloigné. La part du rail, une nouvelle fois, est insignifiante. Au niveau des flux intrarégionaux, on décèle une progression permanente. Le trafic intrarégional a augmenté de 16,6 Mt en neuf ans, essentiellement grâce au département des Côtes d’Armor. Il faut savoir que 6 % seulement des véhicules qui empruntent les routes sont des poids-lourds : l’image du poids-lourd partout n’est pas fondée, même si j’estime que le camion tuera le camion. 78 % des volumes transportés le sont sur moins de 150 kilomètres. Cela signifie que, lorsque les communes font des déviations, elles doivent savoir que ce sont d’abord les Bretons qui sont pénalisés. Généralement, cela ne fait que déplacer le problème sur les communes voisines. L’intermodalité n’a d’intérêt que si l’on peut éviter la rupture de charge, ce qui veut dire qu’à moins de 300 kilomètres, le fer n’a aucun intérêt ; ce qui explique d’ailleurs les chiffres quasiment nuls au niveau interrégional. Et seuls 5,32 % des transports réalisés par la route sont susceptibles d’être transférés par le rail. Quelles que soient les mesures administratives qui pourraient être mises en place, le rêve du fer a encore du chemin à faire. À titre d’exemple, je citerai la ligne Modalor, qui permettrait de transporter 30 000 véhicules par an dans le cadre du transit sur la ligne Luxembourg-Perpignan. Cela peut paraître merveilleux : enfin, les camions vont prendre le rail ! Or, le premier transporteur routier français étant l’État – c’est lui qui est actionnaire –, il peut décider de faire passer la route sur le rail. Il lui appartient simplement de prendre des décisions avec les sociétés qu’il contrôle. 30 000 véhicules par an sur les rails, c’est le nombre de véhicules qui passent par jour au péage de Lyon. 38 39 La mesure risque de coûter cher au contribuable. Aujourd’hui, la politique de la SNCF est axée sur le transport des voyageurs (nous espérons avoir une ligne TGV jusqu’à Brest). Néanmoins, la SNCF ne souhaite pas développer le fret pour des raisons diverses. Concernant le fer et le transport fer, trois volets sont à distinguer : 1) le ferroutage est tout ce qui va directement sur le fer avec des wagons ; c’est le premier type classique, qui ne fonctionne pas très bien, alors que c’est un atout pour la Bretagne par rapport à l’agroalimentaire ; 2) le « combiné », c’est prendre les conteneurs sur les camions et les mettre directement sur le rail pour les récupérer ensuite ; une ligne existait entre Rennes et Lyon, qui a été fermée en 2005 ; 3) Modalor, ce sont les camions qui montent sur le rail et qui traversent la France plutôt la nuit. Nous avions proposé à Jean-Claude Gayssot, alors ministre des Transports, de mettre tous nos camions en transit sur l’axe Paris-Lyon. Résultat : 20 % de nos camions sont sur le rail et 90 % de nos trains sont à l’heure. Aujourd’hui, nous devons réfléchir à l’intermodalité, sachant que certains paramètres ne changeront pas. La distance de rupture de charge ne changera pas. L’attente des consommateurs, que nous sommes tous, restera la même : sommes-nous prêts à attendre plus longtemps pour avoir nos produits ? Donc, l’économie aujourd’hui a un impératif, c’est l’immédiateté. Et comme nous n’avons plus de stocks, inévitablement, les trafics sont importants. Cela ne veut pas dire pour autant qu’il ne faut pas y réfléchir. Lorsque l’on développe les axes routiers, il est important de savoir ce qu’on a à faire en matière de sécurité. De 1990 à 2004, les poids-lourds ont divisé par trois leur implication dans les accidents. Encore les poids-lourds sont-ils impliqués mais pas forcément responsables. En performance durable aussi, les camions neufs polluent aujourd’hui dix fois moins que ceux de 1990 : nous avons des impératifs au niveau européen, avec ce qu’on appelle les normes Euro 2, Euro 3, Euro 4, Euro 5, qui imposent des consommations et des réductions de consommation dites polluantes. Si demain il faut rouler à l’électricité, pourquoi pas ? Mais il y a quand même quelques normes techniques importantes : une tonne de marchandise transportée sur 100 kilomètres nécessite 20 % de gazole en moins, et la consommation est en perpétuelle baisse. Il ne faut pas oublier non plus qu’un poids-lourd étranger est capable de traverser la France entière sans prendre une goutte de gazole en France. Les poids-lourds produisent 6,2 % du CO2 émis dans l’atmosphère contre 14 % pour les voitures. Le tertiaire, c’était 24 %. En matière de fiscalité, le transport routier de marchandises a versé en taxes 4,3 milliards d’euros en 2005 ; si l’on ajoute les charges, ce sont 8 milliards d’euros. Donc, le poids-lourd est un très bon contribuable. 22 % du chiffre d’affaires d’une entreprise de transport routier est réservé aux taxes, aux impôts et aux charges. Le transport routier de marchandises est taxé deux fois et demie plus que l’ensemble de l’économie. Un camion rapporte à l’État 3 euros par tonne sur 100 kilomètres. Le sujet le plus important, c’est le pavillon français dans l’Union européenne : la circulation des poidslourds étrangers augmente plus rapidement que celle des poids-lourds français. Ils en sont à plus de 150 % 40 41 contre 20 % de 1990 à 2005. Le pavillon national a donc des progrès à faire en transport international. Le coût de l’heure de conduite en France est supérieur de 20 % à la moyenne des pays comparables. Si le transport routier va bien, le transport routier français, en revanche, va mal. Le marché est international, le transport polonais qui vient en France a des coûts sociaux différents ; et ce coût, le client n’est pas prêt à le payer. Je ferai quelques remarques pour expliquer les atouts et les faiblesses que je vois dans ce département. – Tout d’abord, la situation géographique de la Bretagne est une véritable faiblesse, dans une logique globale et peut-être encore plus dans les Côtes d’Armor parce que celles-ci sont plus dépendantes en matière de trafic par rapport à l’Ille-et-Vilaine. – Ensuite, au nom du développement durable, je suis certain qu’on va nous mettre de la fiscalité à toutva. La grande idée, depuis qu’on a vu que ça marche bien en Allemagne, c’est ce qu’on appelle le « On Board Unit » (OBU) un petit boîtier qui permet à l’État de récupérer des taxes au kilomètre. Ce type de fiscalité est aujourd’hui dans l’esprit de tous, parce qu’on parle de taxe au kilomètre en 2008 pour les poids-lourds, on parle d’une taxe au kilomètre pour les véhicules légers en 2012. Mais est-ce que cette logique de fiscalité ira au bénéfice des routes ? L’autre volet de cette réflexion sur la fiscalité, c’est la récupération du réseau routier, avec laquelle on est supposé récupérer une TIPP régionale. Mais que se passe-t-il quand la TIPP régionale est différente d’une région à l’autre ? Cette TIPP régionale va une nouvelle fois compléter le dispositif et le coût du kilomètre. Il ne faut pas oublier la situation géographique de ce département et de la Bretagne dans son ensemble. – Dernier point à propos des faiblesses, c’est que le trafic routier va continuer à croître, il faudra se poser le problème de la couleur de la plaque d’immatriculation qui circulera. – En ce qui concerne les atouts de ce département, on ne peut manquer de voir qu’il est dynamique, avec un président et une assemblée dynamiques. Le réseau routier est de qualité ; il doit cependant être travaillé sur l’axe sud-nord Loudéac-Saint-Brieuc. Il faut défendre également l’axe Rennes-Loudéac-Brest. L’agroalimentaire est le monde le plus important en Bretagne et peut-être encore plus ici dans les Côtes d’Armor. Pour terminer, je poserai quelques pistes de réflexion. 1) La première porte sur le véhicule de PTRA (poids total roulant autorisé) de 44 tonnes. Les Ponts et Chaussées y sont défavorables et plus encore la Direction des routes, au motif que cela va abîmer les routes et que c’est désagréable. Mais les poids-lourds belges qui font 44 tonnes ne laissent pas 4 tonnes à la frontière. Les Pays-Bas sont en train de réfléchir au 60 tonnes. Le monde agroalimentaire – et le transport routier que je représente – attend avec impatience que le 44 tonnes soit autorisé, notamment pour le vrac et la benne, au moins celui qui est concurrencé directement par la Belgique, l’Espagne ou l’Italie. Il faut que nous ayons les mêmes armes pour se battre et les 44 tonnes circulent sur nos routes en toute tranquillité. C’est important pour une instance départementale, parce 42 43 qu’elles vont récupérer le réseau : le 44 tonnes n’abîme pas plus les routes mais, en revanche, dans le cadre du développement durable, cela représente théoriquement 10 % de véhicules en moins sur la route. Et le 44 tonnes n’est pas un véhicule différent, mais mieux chargé. 2) En ce qui concerne les biocarburants, ce département dispose d’atouts. On parle du colza et d’autres céréales, mais on peut réfléchir aussi au niveau des algues. Est-ce que ce département n’a pas intérêt à réfléchir sur les algues dont nous sommes entourés ? Bien sûr, il faut dans ce cas réfléchir au devenir de la TIPP ! 3) Pour terminer, j’évoquerai les ITS (systèmes de transports intelligents), qui sont aujourd’hui la force de ce département et dont on peut s’étonner que d’autres départements ne s’y impliquent pas plus. Nous avons à nous battre sur la traçabilité dans le monde agro alimentaire – il ne s’agit pas simplement de flux, mais de façon générale « du champ à l’assiette » et « de la fourche à la fourchette » – pour avoir une vraie réflexion globale. Les consommateurs que nous sommes tous ne supporteront plus le moindre risque alimentaire. Derrière la traçabilité et derrière les nouvelles techno logies, nous avons des emplois et de la recherche. Par parenthèse, au titre du Conservatoire national des arts et métiers (Cnam), que je représente en Bretagne, nous avons obtenu, pour la première fois en France, une chaire nationale, qui sera située à Ploufragan et qui va donc travailler sur la traçabilité. Ce poste et cet ITS que le conseil général des Côtes d’Armor est en train de développer, il faut les renforcer, avec l’appui de l’ensemble de la filière agroalimentaire et à la fois du monde industriel, du monde de la recherche et du monde de la formation. Je finirai par une citation qui est propre à la FNTR, dont il faudra se souvenir, c’est que « le consommateur paiera demain ce que le citoyen exige aujourd’hui ». Philippe Plantard Je présenterai brièvement et d’une manière assez générale le transport routier de voyageurs pour ensuite mettre en perspective deux enjeux essentiels à l’horizon 2010/2020, que sont les énergies et le développement durable d’une part et l’intermodalité d’autre part. • Le transport public de voyageurs se compose de deux grandes familles, les transports urbains et les transports interurbains, également appelés transports routiers de voyageurs. Le transport urbain, ce sont 35 000 salariés hors SNCF et RATP, et le transport interurbain, 65 000 salariés. La Fédération nationale des transports de voyageurs (FNTV), que je représente, n’est concernée que par le transport interurbain ; c’est donc le transport routier de voyageurs que je présente ici. Sous un angle politique, celui-ci est essentiel pour la mobilité, pour l’aménagement du territoire et pour le développement durable. En termes d’emplois, l’autocar en Bretagne représente le même nombre d’emplois que la SNCF. Ce point n’est pas négligeable mais cela reste très relatif au regard du poids économique, par exemple, du transport de marchandises. Les principales activités du transport routier de voyageurs sont constituées de services réguliers et de services occasionnels. Le service régulier, ce sont les lignes régulières départementales 44 45 ou régionales, les services spécialisés de transport scolaire, les services périurbains, le transport de personnel, les services à la demande. Les services occasionnels sont les services à caractère touristique, à la place, ou collectifs. Ce métier évolue dans un contexte institutionnel et réglementaire spécifique à travers trois textes principaux. D’une part, la loi d’orientation du transport intérieur (Loti) du 30 décembre 1982 dispose que le système de transports intérieurs doit satisfaire les besoins des usagers dans les conditions sociales et économiques les plus avantageuses pour la collectivité ; elle affirme également la liberté de choix des usagers. Ensuite, nous avons la loi solidarité et renouvellement urbains (SRU) du 13 décembre 2000 qui a renforcé le transfert de compétences vers les collectivités locales déjà engagé par la Loti. Enfin, la loi relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques du 29 janvier 1993 (dite loi Sapin) a fixé des règles précises d’attribution des marchés dans le cadre d’une mise en concurrence régulière. Le transport routier de voyageurs est une activité régie par une multitude de réglementations, notamment celles relatives à la sécurité routière, à l’aspect social, à l’accès au marché et à la profession, à l’organisation et la vente de voyages et de séjours. Par exemple, en matière sociale, les entreprises doivent respecter le code du travail et la convention collective naturellement, des réglementations nationales dont un décret de transport de voyageurs, une ordonnance de transposition de textes européens, et des textes européens, notamment le règlement 561/2006 qui est entré en vigueur le 11 avril 2007. Tous ces textes superposés exigent une organisation très pointue sur le plan des plannings et sur le plan social. Le transport routier de voyageurs en Bretagne concerne environ 90 entreprises dont une quinzaine dans les Côtes d’Armor. Ce sont plus de 3 000 autocars dont environ 450 dans les Côtes d’Armor et près de 4 000 salariés dont 3 500 conducteurs et dont 600 pour les Côtes d’Armor, un chiffre d’affaires, toutes activités confondues, de 150 millions d’euros. • L’avenir du transport de voyageurs repose sur une chance importante à saisir au regard des problèmes liés à la croissance des besoins de mobilité, même si on l’envisage moins soutenue pour les années à venir, et à une saturation des infrastructures routières. Tout cela résulte de plusieurs facteurs : 1) l’explosion du coût du foncier qui a conduit à un étalement urbain et par conséquent à ce besoin de mobilité et à la saturation des infrastructures ; 2) une pollution atmosphérique préoccupante, liée à l’utilisation de l’automobile, en matière d’émission de polluants et de gaz à effets de serre ; quand on parle de pollution ou d’émission polluante, on parle des transports, alors qu’il faudrait toujours dire « transports et déplacements », parce que la part principale incombe bien à l’automobile et non pas aux poids-lourds ni aux autocars ; 3) la raréfaction des énergies fossiles associée à la consommation du carburant. Ce contexte est nouveau et très porteur d’une révolution à accomplir en matière de transports collectifs. 46 47 • Après ces généralités, un premier zoom sur les énergies : la FNTV a réalisé avec l’Ademe une analyse approfondie des différentes technologies qui permettent de réduire les émissions polluantes des autocars. Cette analyse a donné lieu à 11 fiches-conseils qui sont réunies dans une brochure . Ce document a pour ambition d’être un outil d’aide à la décision, destiné à la fois aux élus et aux entreprises de transports, notamment pour veiller à ce que les solutions envisagées soient compatibles avec les conditions d’exploitation des véhicules. Nous craignons qu’il y ait un effet de surenchère de la part soit des opérateurs de transport soit des collectivités et que l’on aille un peu trop vite pour être dans le temps de la mode. Il faut être prudent. Chaque fiche reprend les avantages et les inconvénients pour chaque filière sur les plans techniques, environnementaux et économiques. Ces 11 filières technologiques sont étudiées en partant de la plus connue, le gazole, à la plus expérimentale, la pile combustible. Les fiches sont présentées avec un tableau de synthèse à travers quatre critères : 1) l’impact sur la santé, 2) les gaz à effet de serre, 3) les coûts, 4) la perception en termes de bruit, d’odeur, de fumée et d’image. Chaque filière est positionnée par rapport à la filière de référence, le diesel Euro 3. Ce qui ressort de ce travail, c’est que le diester et la combustion au gazole, couplés à des systèmes de Ademe/FNTV, Énergies : quelles filières technologiques pour les autocars : premières évaluations, fiches-conseils environnement, mars 2007. 48 post-traitement (filtre à particules et systèmes DeNOx pour réduire les émissions d’oxyde d’azote), paraissent constituer les pistes les plus raisonnables et les plus plausibles pour le développement durable en matière d’autocar. Les autres pistes sont nombreuses, mais aucune d’elles ne peut être aujourd’hui considérée comme une alternative au pétrole et par conséquent au gazole : pour la plupart, elles constituent des compléments permettant de réduire les émissions polluantes et/ou d’apporter une énergie complémentaire. Ces autres pistes envisagées concernent : 1) les véhicules hybrides, voie prometteuse à moyen terme sur les zones périurbaines mais pas au-delà, pour des questions d’autonomie ; 2) la pile à combustible, autre option intéressante à plus long terme, quinze à vingt ans, pour réduire les émissions de gaz à effets de serre au niveau du véhicule, mais en l’état actuel des recherches, de nombreux freins subsistent, dont les pertes énergétiques, le stockage difficile de l’hydrogène, l’importance des coûts de mise en œuvre ; 3) l’éthanol est appelé à se développer fortement pour les véhicules légers en mélange avec de l’essence pour obtenir le superéthanol E85, mais il n’est pas près d’être commercialisé pour les autocars en l’absence de filière adaptée pour les moteurs diesel ; 4) l’utilisation du gaz, quant à elle, semble inadaptée au transport interurbain, qu’il s’agisse de GPL ou de GNV, notamment en termes de coût et de contraintes techniques qui ne sont pas en faveur du gaz. Les principales pistes d’améliorations à l’horizon 2020-2030 portent sur : 49 – les moteurs avec un maintien de la filière diesel complétée par un système DeNOx, éventuellement un développement de la filière hybride avec des motorisations diesel ou à allumage commandé avec des objectifs de réduction de consommation de l’ordre de 10 à 20 %, – les carburants, avec une réduction de la teneur en soufre du gazole, et l’augmentation progressive de la teneur en biocarburant. Mais en parallèle, il faudra travailler à la réduction de la masse du véhicule, notamment sur sa structure et ses différents organes (diminution de la résistance au roulement, perfectionnement environnemental des équipements auxiliaires à l’intérieur du véhicule, récupération de l’énergie au niveau de l’échappement, renforcement des formations à la conduite économique, aide à la conduite avec le géopositionnement et l’intégration du trafic en temps réel). Pour conclure ce premier « zoom », les transports collectifs ne pourront s’imposer comme une alternative efficace et pertinente à la voiture particulière qu’avec une amélioration continue de leur performance et une politique de transport visant à une meilleure fluidité. • L’intermodalité apparaît ensuite comme une donnée essentielle du développement de l’autocar. Le concurrent de l’autocar, ce n’est ni le train, ni le bus, c’est bien la voiture particulière. Celle-ci représente 85 % du trafic terrestre, le train et le métro 9 %, le bus 4-5 % et l’avion 1 %. S’il n’est pas raisonnable d’envisager demain une place prépondérante ou même importante de l’autocar, la marge de progression n’en est pas moins importante. Si l’on passait de 5 à 10 % du trafic, cela représenterait ni plus ni moins qu’un doublement des activités des entreprises d’autocars. Or, l’intermodalité est en panne en France et en retard par rapport aux autres pays européens. C’est un concept dont on parle beaucoup, mais dont les réalisations concrètes sont peu nombreuses et manquent de cohérence et de lisibilité. L’évolution des bassins de vie a multiplié le besoin de mobilité des citoyens, dont la seule préoccupation est de disposer d’un réseau de services lisible, facile d’accès et d’un coût raisonnable. En d’autres termes, les déplacements des citoyens font fi des frontières institutionnelles et administratives alors qu’opérateurs de transports et autorités organisatrices de transports restent dans une logique de prés carrés territoriaux. De la même manière, l’urbanisation croissante et l’extension des périmètres de transports urbains (PTU) – qui sont une exception française – ont rendu obsolète la différence entre les opérateurs urbains et interurbains pour ce qui concerne le transport collectif routier. Aussi, bien que les autorités organisatrices de transports et les opérateurs aient presque tous engagé une réflexion sur l’intermodalité, celle-ci est en panne et en retard en France par rapport à ses voisins. Les freins à l’intermodalité sont de plusieurs ordres : 1) institutionnels : s’il y a beaucoup de collectivités territoriales à compétences de transports, il n’y a pas de structure technique ou politique de concertation et de coordination suffisamment efficace ; 2) économiques : les budgets plus faibles que les collectivités territoriales y consacrent ne permettent pas et permettront sans doute de moins en moins de faire face au développement du transport collectif ; 50 51 3) culturels : le transport collectif ne fait pas – ou peu – partie de la culture française, et les atouts de l’autocar dans la chaîne des transports collectifs sont mal connus. Pourquoi faut-il agir maintenant ? Le transport collectif et l’intermodalité sont en pleine évolution et les prochaines années seront déterminantes pour l’avenir des différents opérateurs de transports. Le contexte est aujourd’hui particulièrement favorable pour que les choses bougent : le coût du carburant, le développement durable, l’apparition de nouveaux marchés dans et autour des PTU, l’évolution de la notion de PTU vers celle de bassins de déplacements, l’apparition de véhicules miurbains mi-interurbains, le transport de personnes à mobilité réduite, le transport à la demande, etc. Comment agir ? Pour nous, la première chose est de placer le voyageur au-dessus de toutes les réflexions sur l’intermodalité. Le transport collectif doit être construit pour et avec le voyageur. Ensuite, il faut construire une offre intermodale pertinente, le transport collectif doit s’adapter à la nouvelle géographie des territoires de vie et de déplacement, et prendre en compte les nouvelles exigences des voyageurs, en termes de billettique, d’information, de continuité du déplacement, de tarification, etc. Enfin, il faut inventer une coordination efficace : les modes actuels de coordination ne donnent pas satisfaction ; il faut en inventer d’autres, car la coordination est la clé de la réussite de l’intermodalité. L’enjeu de l’intermodalité, c’est bien de diminuer la pénibilité des ruptures de charge afin de permettre aux voyageurs de passer aisément d’un mode à un autre. La seule méthode pour que cela fonctionne, c’est de mettre en place d’abord une offre structurée et cohérente avant de mettre en œuvre des politiques adaptées de tarification, billettique et information. Pour cela, il faut une volonté politique forte de développement du transport collectif dans sa globalité et donc du développement de l’intermodalité. Le transport par autocar souple, réactif, faible en consommation d’énergie et économique, trouvera sa pleine efficacité par une augmentation significative des fréquences et de l’amplitude des services. Si l’offre n’est pas suffisamment cadencée et consistante, il n’y a pas de crédibilité pour le transport collectif. 52 53 Pour conclure, le débat d’aujourd’hui est bien celui de la volonté politique de développer le transport collectif et l’intermodalité. Attention à ne pas manquer un rendez-vous historique du développement du transport collectif, dont l’avenir est entre les mains des instances politiques, donc entre les vôtres ! Vous l’aurez compris, les enjeux et les défis à relever sont nombreux pour notre profession : nous avons parlé des énergies et du développement durable, ainsi que de l’intermodalité, mais il y en a d’autres : – l’accessibilité des véhicules, – l’image du transport par autocar, – la sécurité. Le recrutement de conducteurs qualifiés et bien formés (soucieux de leur consommation d’énergie, de la satisfaction du client, de la sécurité dont ils sont les premiers garants…) est essentiel pour que la profession conserve sa capacité d’assurer ses missions de service public et la revalorisation du métier de conducteur devra se poursuivre, même si elle ne peut s’envisager qu’avec le soutien des collectivités clientes. Notre profession est donc en devenir, évoluant vers la gestion de la mobilité au service du voyageur, au-delà des frontières administratives et techniques. Questions Claudy Lebreton Le pourcentage du trafic de marchandises a été évoqué, s’établissant à 5,32 % qui pouvait être transporté par voie ferrée. Qu’en est-il pour le transport maritime ? Il y a une politique de cabotage. En est-elle à ses balbutiements ? Des études ont-elles été faites ? Est-ce qu’on peut plus facilement transporter certaines marchandises par la mer ? port du Légué, a-t-il un avenir considérable ? Je n’en ai pas le sentiment. Je regarde simplement la configuration géographique du port, du point de vue maritime et du point de vue des routes pour y accéder. Je ne parle même pas du rail. Y a-t-il un avenir sur un axe avec un grand port brestois où l’armée défend encore coûte que coûte sa prédominance ? On se dit qu’aujourd’hui la protection maximale au nom de la défense est complètement stupide. Il faut développer l’activité portuaire de Brest. La région en a-t-elle la volonté ? Est-ce que c’est véritablement un marché ? Je n’en sais rien, mais on me dit que non. L’avenir maritime et portuaire n’est certainement pas, visiblement, en Bretagne ; on se pose des questions sur les ports du Havre, de Bordeaux et de Marseille. Hervé Le Jeune Le type de marchandises transportées par la mer n’est pas le même que celui qui est transporté par route. On l’a vu, une part importante du trafic est d’abord régionale, moins de 150 kilomètres. Il faut savoir qu’aujourd’hui, il est moins onéreux pour une compagnie maritime de faire transporter à vide ses conteneurs plutôt que de les laisser en stockage dans un port. Par ailleurs, l’avenir maritime portuaire est-il en France où à l’étranger ? Quand on voit les investissements qui sont faits au Havre et la part de marché que Le Havre récupère, c’est pour le moins inquiétant. Pour revenir à la Bretagne, il faut réfléchir à la question. On parle du Charles Josselin, conseiller général du canton de Ploubalay ancien président du conseil général et ancien ministre J’observe que certains dossiers s’inscrivent dans la durée. Lorsque j’étais secrétaire d’État aux Transports, en 1985, la question du 44 tonnes ou du 50 tonnes se posait déjà, la question des normes sociales opposant et discriminant les entreprises françaises était déjà évoquée… Et il y avait une autre question, celle de la discrimination dans le contrôle dont seraient victimes les chauffeurs français par opposition à leurs collègues étrangers, notamment en ce qui concerne les temps de conduite. J’espère que ces questions trouveront une solution. On ne peut qu’être partisans d’une harmonisation des normes sociales par le haut, puisque c’est nous qui serions au plus haut ; il reste que le ministre de l’Environnement est aussi ministre des Transports. 54 55 C’est une nouveauté. Nous attendons de voir comment vont s’articuler rupture libérale et pacte écologique. Il va être intéressant de voir comment les choses vont se passer, lors du Grenelle Environnement. Il faut s’attendre à des ruptures importantes ou des changements importants dans un avenir proche. Comment peut-on gérer cette relation entre environnement et transport ? Enfin, il me semble que, lorsqu’on parle du retard par rapport aux autres pays européens, il faudrait nuancer parce que je suis sûr que nous ne sommes pas en retard par rapport à tous les pays européens mais par rapport à certains. S’agissant de la voiture, on parle toujours de l’effet environnement, mais je voudrais insister sur l’aspect pouvoir d’achat. L’automobile est, de toute évidence, avec le logement et probablement le portable, ce qui plombe le plus aujourd’hui le pouvoir d’achat. C’est pour cela qu’au-delà des considérations environnementales que nous avons pour essayer de nous sortir de ce tout-automobile, il y a aussi des considérations sociales. On a parfois tendance à l’oublier. Hervé Le Jeune Comment concilier transport et environnement ? C’est une vraie question à laquelle nous sommes sensibles. Nous souhaitons nous investir dans un développement durable, mais que cela ne soit pas, de grâce, un moyen supplémentaire pour demander de l’argent aux gens au nom du développement durable, parce que l’État a besoin d’argent, et que cet argent en question ne sert pas là où il doit servir. Et la France reste la France dans une logique mondiale où l’environnement n’a pas forcément la même connotation qu’ailleurs. Et puis, au nom du développement durable – je pense aux biocarburants –, faut-il faire bien pour faire plus mal ailleurs ? Il y a des effets de mode et des choses intéressantes, il faut y réfléchir mais de façon objective et avec tout le recul nécessaire. Sur le retard européen, on est allé trop vite, probablement, au niveau européen et les pays tels que la Pologne, la Hongrie et d’autres ne voient que le jeu de la concurrence, et ils n’ont pas les mêmes règles du jeu que moi. Cela veut dire que l’harmonisation par le haut, nous pouvons la souhaiter, mais la réalité économique est différente. Je pense simplement au chrono électronique, je peux assurer que les transporteurs s’arrachent les cheveux. En matière de repérage du temps de conduite, nous avons un décalage qui peut varier d’un quart d’heure à une heure et demi de différence par jour par rapport au temps qui était calculé par l’informatique embarquée. Cela montre bien qu’il y a un problème majeur, mais chaque pays européen a une vision différente du texte. Et puis la réglementation européenne est la même pour tous, mais chacun a son contrôle et son application. Je ne suis pas sûr qu’en Italie, la vision des choses soit tout à fait la même. Enfin, est-ce qu’on veut que le transport routier soit dans la même configuration que le transport maritime ? Le bateau était contrôlé de la même façon par des pays européens, mais le contrôle était un peu différent. Ces gens-là étaient sur nos mers, ces camions-là sont sur nos routes. De façon générale, il faut qu’on ait ce Grenelle Environnement mais intelligent, avec la part économique qui doit avoir sa place, dans l’intérêt de l’ensemble de l’économie et de l’ensemble de nos concitoyens. Et tout cela aura un coût. 56 57 Sommes-nous prêts à le payer ? Est-ce que vous, élus, qui êtes en train de parler de développement durable, avez bien évidemment fait covoiturage ?… Félix Leyzour Je crois que les observations et le débat recoupent les discussions que nous avons déjà eues dans le domaine, par exemple, de l’agriculture. À savoir que, lorsqu’on aborde les questions de l’environnement, on recoupe très rapidement les rapports sociaux et les rapports écono miques. Évidemment, toutes les questions soulevées ne trouveront pas leur réponse ici. Mais nous sommes obligés de réfléchir dans le cadre général qui nous est imposé. Et nous sommes en Bretagne. Quand on parle d’accessibilité en Bretagne, il faut trouver des réponses adaptées à notre région. Et c’est là que nous avons certainement des observations à faire, par exemple du point de vue routier, du point de vue ferroviaire, et il n’est pas non plus inutile d’y réfléchir en termes maritimes parce qu’il ne faudrait pas que nous tournions le dos à la mer. Je crois que dans nos politiques, nous avons eu ce soucilà. Concernant le transport de voyageurs, je crois qu’il est important, dans l’intermodalité, d’avoir une bonne interconnexion entre les différents modes de transports en termes de lieux, d’horaires, de façon à ce qu’on ne perde pas son temps à chercher une place quand on a besoin de changer de mode de transport. Et nous avons quelques expériences en la matière. de temps et qu’il y ait un confort aussi bien à changer de mode qu’à voyager. On est dans un métier extrêmement peu libéralisé, et on voit bien que des pans entiers ont été négligés. Il y a une réflexion qui commence à s’engager sur les dessertes par autocar, sur les liaisons par voie rapide et autoroute, avec des véhicules à haut niveau de service. La réalité, c’est que ces lignes-là n’ont pas été développées parce qu’il y a le monopole de la SNCF qu’on ne peut pas concurrencer. C’est un marché qui n’est absolument pas libéralisé. Il y a là un moyen de développer considérablement le transport par autocar dans la mesure où l’on y met de la fréquence et du confort ; et l’interconnexion est pertinente. On sort d’une période où l’autocar avait une image ringarde, et c’est à la faveur du contexte que nous connaissons aujourd’hui qu’il appartient aux élus de donner le coup de pouce nécessaire pour qu’un nouveau développement soit donné, sachant que, contrairement à ce qui a été dit, l’autocar ne me paraît pas coûteux en investissement et en fonctionnement puisque, notamment, il n’exige pas une infrastructure particulière. Philippe Plantard L’intermodalité, c’est avant tout une perception de confort, c’est-à-dire qu’il faut qu’il n’y ait pas de perte 58 59 III Innovation en matière de transports, de déplacements et de sécurité routière Guy Bourgeois La recherche apporte des réponses scientifiques aux questions qui sont débattues en sachant que la science par construction est modeste, c’est-à-dire qu’elle s’efforce de dire quelles sont les zones de certitude et les zones d’incertitude. Je suis un haut fonctionnaire, mais néanmoins un scientifique. L’Inrets a la particularité de regarder ce qui se passe à travers le monde à la fois dans le temps et dans l’espace. Cela nous permet d’obtenir des informations sur ce qui se passe dans d’autres secteurs géographiques ou histo riques. Nous sommes dans une réflexion qui intègre la notion du temps. Sur la ville, je voudrais, à l’échelle du temps – nous regardons là sur deux cents ans et nous faisons de la prospective à cinquante ans, il s’agit donc des mêmes ordres de grandeur –, montrer l’importance sur les systèmes de transport de l’enjeu de la densité. À la Directeur de l’Institut national de recherche sur les transports et leur sécurité (Inrets). 60 fin du xixe siècle, il y avait deux villes dans le monde qui dépassaient le million d’habitants. Ces deux villes étaient Paris et Londres. La densité moyenne de ces deux villes était comparable : entre 35 000 et 40 000 habitants au kilomètre carré ; cette densité a été atteinte par New York qui s’est développée très rapidement. Avec Los Angeles, ces quatre grandes agglomérations comptent aujourd’hui, à l’échelle géographique, à peu près les mêmes densités. La zone agglomérée de l’Île-de-France a aujourd’hui la même densité urbaine que la zone agglomérée de Los Angeles. Avec l’étalement urbain, la population de l’Île-de-France a été multipliée par vingt en deux cents ans, sa densité a été diminuée par dix, donc sa surface a été multipliée par deux cents. Les problèmes de transport sont donc éminemment liés aux problèmes de densité. Par rapport à l’intermodalité, au transfert modal, nous devons examiner ce qu’il est possible de faire et de ne pas faire. Et si je suis bien d’accord que le voyageur est au centre, il n’empêche que celui-ci commence par faire le bon choix, son choix par rapport à ce que le système des transports lui permet de faire. L’Inrets a réalisé une étude, que l’on peut transposer, toutes proportions égales, dans le système français qui est le mieux desservi par les transports en commun, à savoir le système de l’Île-de-France. Nous constatons que 92 % des conducteurs qui utilisent leur voiture n’auraient pas pu réaliser leurs activités quotidiennes autrement qu’en voiture. Ces 92 % de conducteurs réalisent 95 % du trafic automobile de l’Île-de-France. Si l’on disait à ces personnes : « Si vous doublez votre temps de trajet, estce que vous continuerez à prendre la voiture ? Ou est-ce 61 que vous basculerez sur les transports en commun ? », il en résulterait que nous ne serions plus à 95 % de trafic automobile, mais à 75 %. C’est-à-dire que le transport routier a atteint un tel avantage compétitif que le renversement de la tendance ne peut se faire à l’horizon de quelques semaines, quelques mois ou quelques années. Mais dès lors que l’on réfléchit sur du long terme, on a des éléments et c’est ce sur quoi je vais insister. La problématique de l’énergie Ce qui est important sur l’évolution de la consommation énergétique française dans la période 19732004, ce sont l’industrie, les transports, les autres secteurs et le logement. L’industrie a globalement très fortement diminué sa consommation d’énergie, de même qu’elle a très fortement diminué sa consommation de pétrole. Dans les autres secteurs, la consommation d’énergie a augmenté globalement, mais la consommation de pétrole a très fortement décru. Au passage, nous avons, c’est une particularité de la situation française, le poids de l’électricité, notamment d’origine nucléaire. Mais la situation française reste néanmoins très dépendante du pétrole. À ce titre, je rappellerai que, depuis que l’histoire de l’humanité a commencé, nous avons toujours été dans des coûts d’énergie décroissants, et c’est probablement la première fois dans l’histoire de l’humanité que nous basculons dans un système de coût d’énergie croissant. Le coût d’énergie est évidemment fondamental pour l’activité économique, de même que le coût d’énergie du transport est évidemment fondamental pour la performance des systèmes de transport. L’étalement urbain est un sous-produit de deux grands événements qui se sont conjugués à l’histoire du temps : au xixe siècle, le développement du ferroviaire, l’étalement urbain autour des voies de chemins de fer, l’urbanisme… ; et, phénomène de la seconde moitié du xxe siècle, l’étalement urbain lié à l’automobile. Avant l’invention du chemin de fer, le mode dominant, sur le plan économique, était le transport maritime : Venise s’est imposée dans l’histoire économique pendant mille ans parce qu’elle avait l’avantage compétitif considérable du transport maritime. Dans le jeu de la mondialisation, le transport maritime redéveloppe une capacité concurrentielle que la France commence à percevoir. Ce serait une erreur de ne pas s’intéresser au maritime dans une région comme la Bretagne, avec l’augmentation des coûts de l’énergie et vraisemblablement les changements profonds que cela va avoir sur les activités humaines. Les problèmes majeurs concernant la localisation d’activités – où s’installer pour habiter, où installer les activités économiques – ne se posent pas du tout de la même façon lorsqu’on est en énergie chère ou en énergie bon marché. On voit bien que les hypothèses sont assez contrastées en matière d’évolution d’énergie. Pour ma part, je pense que nous sommes installés de façon durable dans un contexte de pétrole cher mais non pas de pétrole rare. Nous ne sommes au terme ni de l’exploitation des réserves comme, par exemple, les schistes bitumineux d’Alabama, ni des techniques d’extraction du pétrole dans les puits déjà existants, puisqu’on n’extrait qu’une très faible partie des pétroles d’Arabie saoudite aux conditions économiques actuelles. Plus le 62 63 prix du pétrole augmente, plus on peut se permettre d’utiliser les techniques d’extraction chères, auquel cas les réserves sont encore assez importantes. Nous serons dans un scénario d’énergie chère, mais pas d’énergie rare, du moins en ce qui concerne le pétrole. Concernant la consommation de cette énergie, nous avons aujourd’hui un système routier qui fonctionne avec des moteurs à explosion. Ces moteurs ont trois caractéristiques : ils sont parfaitement au point, il y a cent ans d’histoire économique et de recherche industrielle derrière, et extrêmement résistants. Ils sont toutefois d’un faible rendement, mais ils ont l’avantage d’avoir une faculté de stockage de l’énergie à bord. Les motorisations électriques, elles, sont à l’inverse d’un excellent rendement, mais nous ne savons pas stocker à bord. Avec le système ferroviaire ou le tramway, qui sont alimentés par des caténaires, nous savons assurer de meilleures performances. On nous annonçait il y a une quinzaine d’années l’arrivée de la voiture électrique, mais nous n’avons pas résolu le problème des batteries, dont nous ne savons pas assurer la fiabilité sur le long terme (nous faisons tous l’expérience des batteries qui meurent sur les téléphones portables, sur les voitures). Les systèmes hybrides se distinguent schématiquement en trois catégories : une première qu’on voit apparaître, c’est par exemple la C4 de Citroën dotée de ce qu’on appelle un « alterno-démarreur » qui coupe le moteur à l’arrêt. C’est intéressant pour le bruit, mais modeste en économie d’énergie ; cela n’a d’intérêt que pour les véhicules qui passent leur temps à s’arrêter et à redémarrer. Il est vrai que lorsque les autobus seront équipés de systèmes de cette nature, ils cesseront de faire tourner leur moteur à l’arrêt, ce qui leur donnera une bien meilleure image auprès de l’opinion publique. Et c’est une technologie disponible actuellement pour le court terme. Nous disposons déjà du « mild hybrid », par exemple la Toyota Prius, qui comporte une batterie de technologie actuelle, et qui a juste ce qu’il faut d’énergie pour assurer l’optimisation du moteur. La batterie sera sollicitée chaque fois qu’on peut éviter des consommations trop importantes, notamment au démarrage. L’énergie électrique donne ce qu’il faut au démarrage, quand le moteur thermique est le moins performant. Là aussi, on va trouver des systèmes urbains plus performants mais les gains seront plus modestes dans l’extra-urbain ou le périurbain. Et nous avons le « full hybrid », qui récupère l’énergie de freinage, ce qui constitue un énorme enjeu. Nous sommes là encore en urbain : en ce qui concerne l’économie de l’énergie, le message important, établi sur le plan scientifique, est qu’il n’y a pas beaucoup de progrès technologique à attendre pour les véhicules de type « grands routiers », les camions et autocars qui font de la route étant d’ores et déjà bien optimisés sur le plan énergétique. Les gros progrès à faire portent sur les véhicules urbains : le potentiel de développement et d’innovation technologique, d’une part, sur le silence avec les systèmes électriques qui se substituent aux systèmes thermiques, et d’autre part sur la récupération d’énergie, est un enjeu important pour la ville. Les techniques de récupération d’énergie sont aussi importantes pour le ferroviaire, et notamment pour les systèmes de tramway ou les systèmes de TER, etc. 64 65 La spécificité du transport de marchandises Le transport de marchandises nécessite des réponses différentes. L’Inrets a réalisé une enquête, « l’enquête Écho ». Je signale au passage que nous sommes en France extrêmement pauvres en système de collecte d’informations, et cette enquête n’avait pas été faite depuis quatorze ans. Et lorsqu’on parle de voyageurs ou de marchandises, on est collectivement dans un déficit de données. La moitié des envois, en transport de marchandises, pèsent moins de 30 kg et ce poids médian a été divisé par 5 entre 1988 et 2004, c’est-à-dire que le transport de marchandises est massivement constitué de tout petits envois qui représentent 97 % des envois. On voit ici la contradiction : on ne peut être intermodal que si on est capable de massifier les flux et pour ce faire, il faut que les problèmes organisationnels soient résolus. En France, si je veux envoyer un colis, je m’adresse à un système de transport, qui le prend du point A et l’amène au point B. Il existe un système dans lequel sont structurés les acteurs de la logistique, à savoir des aménageurs qui vont réfléchir en amont sur la façon d’articuler les flux acheminés, les systèmes productifs et les systèmes logistiques, de telle sorte que, par construction, on puisse distinguer ce qui va donner lieu à des flux massifs et ce qui ne va pas donner des flux massifs. La France est très en retard sur la structuration économique du champ conjoint des transports et de la logistique et elle n’a pas su, pour des raisons historiques, avec les chargeurs maritimes et avec la profession du transport routier, faire ce que des grands pays comme les États-Unis, l’Allemagne, les Pays-Bas ont fait, c’est-à-dire créer des ensembles qui, d’un côté, assurent des prestations logistiques, assistent les sys tèmes productifs dans la fabrication, dans les processus conjoints de fabrication et de transport ; et de l’autre côté, assurent les transports dans les conditions les plus rationnelles. Une des raisons pour lesquelles le transport de marchandises en France n’est pas assez compé titif par rapport aux grands compétiteurs qui sont apparus aux Pays-Bas et en Allemagne notamment, c’est que la profession française ne s’est pas structurée comme il le faudrait. J’attire l’attention de la FNTER sur le risque qu’elle prend de se mettre en retard, non pas à cause de coûts salariaux mais à cause d’un déficit de structuration économique à l’échelle de la compétition internationale. Le transport de marchandises, c’est beaucoup de transports urbains. Un des premiers problèmes est la desserte des lieux de concentration humaine. Et si le transport de marchandises s’est adapté à la ville – on est livré, à temps, comme il faut, par un système de transport adapté –, il est redoutablement consommateur d’espace et d’énergie. Il existait de grandes plates-formes logistiques qu’on a tendance de nos jours à refouler toujours plus loin en dehors des zones urbaines. Le résultat est qu’on multiplie, à défaut d’avoir réglé ce problème, des petits véhicules qui transportent des petits paquets sur de plus longues distances. La réservation dans les villes – au plus proche des centres urbains ou au plus proche des zones les plus adaptées aux plates-formes logistiques – de zones pour ces échanges logistiques urbains constitue un enjeu 66 67 du transport de marchandises et de l’intermodalité. Devant des pratiques qui évoluent très vite, le commerce électronique pose tout ce problème de la réactivité de la livraison en ville, et nous avons des champs d’expérimentations qui se développent. Nous avons par exemple le pousse-pousse électrique, bien adapté et non polluant, pour le transport de petits paquets entre les villes, c’est mieux que la camionnette de quinze ans qui pollue. Ce sont là des terrains d’expérimentation pour les collectivités locales qui souhaitent s’engager et promouvoir ce type de partenariat. Des réflexions sont menées avec de grands acteurs de transport pour mettre au point des véhicules de type expérimental. Pour les voyageurs, par exemple, les bus à plancher bas existent ; mais pour les marchandises, ce problème n’est pas encore réglé, ce qui fait que, pour sortir un conteneur d’un camion, il faut arrêter le camion, baisser le haillon, mettre le conteneur sur une palette, mettre la palette sur le haillon, baisser, etc. Pendant tout ce temps, la circulation est bloquée. Lorsqu’on aura des véhicules électriques, avec plancher bas, avec la possibilité de sortir le conteneur sur le côté, un camion de livraison pourra s’arrêter à côté d’un arrêt d’autobus, sortir sa palette en un instant et repartir aussi vite qu’un passager descend d’un autobus. Sur ce plan, la réflexion sur les technologies de véhicules adaptés à la livraison de marchandises en ville est très importante, notamment pour le transport de palettes et de conteneurs qui est un élément clé de la chaîne de l’intermodalité. Le ferroviaire local constitue, de mon point de vue, un terrain à explorer : les shortlines, c’est le sujet auquel réfléchissent aujourd’hui les Américains, les Canadiens, les Allemands, les Néerlandais, etc. Comment utiliser des lignes de chemin de fer parfois désaffectées, parfois sous-utilisées pour faire du transport de marchandises d’intérêt local ? On imagine les réactions : « Le transport ferroviaire, c’est pour de la longue distance. » Il y a une quinzaine d’années, on avait la même idée pour les voyageurs ; aujourd’hui, on a des TER, et dans toutes les régions de France, la croissance du trafic ferroviaire se fait sur les TER. En changeant les systèmes de responsabilité, on a estimé que c’étaient les régions et autorités organisatrices qui pouvaient définir les besoins de transport de voyageurs, à condition d’établir certaines règles : cadencement, respect des horaires, etc. En Allemagne, la démonstration est faite que les lignes ferroviaires qui déplaçaient 10 000 voyageurs par jour, lorsqu’elles sont réorganisées, restructurées et repensées, sont capables de déplacer 50 000 à 60 000 voyageurs par jour. Et ce n’est pas un hasard si se développe en France le concept de tram-train dans plusieurs régions. Je ne peux qu’inciter à réfléchir à la capacité d’utiliser les systèmes ferroviaires, y compris pour des marchandises de courte distance. Le coût de l’énergie étant un élément décisif dans les stratégies de localisation d’activité, il faudrait inciter les entreprises à s’installer dans des endroits où elles consommeront moins d’énergie et examiner la possibilité d’utiliser les lignes ferroviaires locales au moins pour les marchandises. C’est une réflexion pour laquelle la France est globalement en retard, je l’ai évoquée avec Anne-Marie Idrac, présidente de la SNCF, qui a donné son accord pour qu’on pousse les réflexions sur ce point-là. 68 69 Concernant les voies navigables et les dessertes portuaires, dans une économie mondialisée, le transport maritime et le transport par voie fluviale ont reconquis des lettres de noblesse qu’ils avaient perdues. La croissance du trafic des grands ports asiatiques et européens est importante, avec des effets induits sur les ports comme Le Havre ou Marseille, qui ne sont pas à la hauteur des autres mais malgré tout en forte croissance. Un enjeu pour la France est la desserte de l’arrière-pays de nos zones portuaires. En Allemagne, les conteneurs sont déchargés en bloc sur des trains qui sont envoyés le long du Rhin ou dans les arrière-pays où le dispatching est ensuite effectué. Le couplage de la desserte des ports et des axes ferroviaires est un enjeu majeur pour le développement économique de demain. La Bretagne, qui a des ports, doit réfléchir sur la desserte de ses arrière-pays, notamment par des axes ferroviaires qui permettent de drainer des flux et d’installer des perspectives de développement. Ce n’est pas cela qui en fera un transfert modal massif, mais cela donnera un avantage compétitif aux entreprises qui viendront s’installer à proximité de ces axes. C’est ce qui fera que l’on sera en capacité d’attirer des activités de forte valeur ajoutée parce qu’elles auront accès à des coûts de transport qui seront par ailleurs compétitifs. Les pistes de l’intermodalité La France connaît un grand renouveau des tramways : il s’est ouvert en 2006 plus de lignes et plus de kilomètres de tramway qu’il n’y en avait déjà en France, développement plébiscité par l’opinion publique. Certaines innovations ont été faites également, avec des bonheurs plus ou moins partagés, avec le TVR à Nancy, à Caen, le Translor à Clermont-Ferrand, des systèmes de bus guidé comme le Phileas aux Pays-Bas, qui est en cours d’installation à Douai, ou Civis, qui a donné lieu aussi à des développements en France. Nous avons la possibilité de faire du bus ou du car un objet de haute technologie, avec des capacités de localisation, d’équipements embarqués, de surveillance, etc. Il est vrai le bus et le car ont une image de transport social que plusieurs pays essaient de casser. Dans la Silicon Valley, il existe des transports par autocar haut de gamme dans lesquels on peut faire tout ce qu’on peut faire dans le TGV : connexion haut débit sur portable… Il y a donc un enjeu de modernisation du système bus et notamment dans les sites urbains avec le concept de bus à haut niveau de service. Les coûts comparés des différents systèmes montrent que la façon la plus performante pour assurer, en milieu urbain, du transfert modal de la voiture particulière vers les transports collectifs, est de faire du bus à haut niveau de service. La condition est de le rendre attractif pour une clientèle qui a encore l’idée que le bus est le transport de celui qui ne peut pas se payer une voiture. Nous avons lancé un programme, dans le cadre du Predit, pour inciter les industriels français à concevoir un produit qui n’existait pas, c’est-à-dire un petit véhicule dédié au transport public urbain. On connaît des camionnettes ou les voitures un peu élargies, de type 806 ou Espace ou Estafette, dans lesquels on a remplacé le coffre à bagages par des sièges pour mettre les passagers. Le microbus est un véhicule de transport 70 71 urbain dédié à la ville, à plancher bas intégral ; on y accède par des grandes portes latérales et on y met une dizaine de personnes, mais aussi un service de transport roulant adapté. Ceci est un produit idéal pour faire de la desserte de transport de centre-ville ou de petit quartier piéton, etc. Pour traiter l’intermodalité, il faut s’assurer que la chaîne soit complète. L’intermodalité la plus performante en matière de transfert modal, c’est celle qui combine un axe lourd : un tramway, un TER, etc., et des possibilités de desserte fine avec ce type de véhicule. Pour résumer, une cartographie d’un réseau de bus dans une ville française ou dans une périphérie urbaine ressemble à un plat de nouilles, c’est-à-dire qu’il y a des lignes partout, on a l’impression que c’est bien desservi. Puis on s’aperçoit que l’horaire de cette ligne, c’est un passage le matin et un l’après-midi, que cette autre ne fait pas le détour, qu’elle va passer par l’hôpital ou le collège, etc., et qu’ainsi on met trois quarts d’heure pour faire ce que l’on fait en 20 minutes en voiture. Les tracés paraissent satisfaisants sur le papier mais ils ne sont pas efficaces. En faisant des axes lourds qui vont rapidement d’un point à un autre, et ce que j’appelle « les dessertes à la marguerite » – des systèmes qui desservent rapidement avec des véhicules de cette nature –, on change le concept de transport public local, et on obtient quelque chose de compétitif par rapport à la voiture particulière. C’est ce que la ville de Clermont-Ferrand est en train d’expérimenter avec un axe structurant qui est fait avec le Translor, et une desserte de centre-ville qui est faite avec un système de microbus. Le programme s’appelle « 100 microbus ». 140 v éhicules sont aujourd’hui en circulation, il y a des endroits où cela marche très bien et d’autres où cela marche un peu moins bien. Cela dépend de la façon dont l’opération est pilotée. Nous avons – c’est un résultat de l’industrie française – un véhicule totalement adapté au transport des personnes à mobilité réduite, conçu pour que les personnes âgées et les personnes handicapées soient transportées dans des conditions dignes. L’information concernant l’intermodalité est tout à fait importante, c’est le domaine d’ITS Bretagne. Le système de traitement de l’information est très simple en apparence mais en réalité il est compliqué, parce qu’il faut recueillir des données, les rassembler, les traiter. Pour les traiter, il faut qu’elles soient homogènes. Puis, il faut savoir les délivrer au bon moment et au bon endroit : quand on est à la RATP et qu’on a historiquement un système différent sur le bus et sur le métro, pour en faire un système d’information multimodale, il faut commencer par refaire les sys tèmes de gestion et d’information du bus et du métro. Là aussi, la France est très en retard par rapport à d’autres pays, notamment la Grande-Bretagne, qui ont posé des principes de normalisation de l’information, c’est-à-dire que tout opérateur de transport est prié de rendre publiques, selon des normes techniques, ces données à d’autres opérateurs qui les traitent et qui les rediffusent. En France, nous n’avons jamais réussi à obtenir que les transporteurs se mettent d’accord sur des normes d’échange de coordonnées entre eux, un système homogène de mutualisation des données qui 72 73 Sécurité routière et aides à la conduite Sécurité routière et infrastructures pardonnantes sont des thématiques bien connues des Côtes d’Armor, qui sont fortement engagées sur ces chantiers. Nous avons tout un ensemble de programmes qui se déroulent dans le cadre de grands projets français ou européens tels que Sari, Arcos, Lavia, Safemap, qui visent à développer des technologies de route intelligente. On distingue, dans ce concept, des aides à la conduite : 1) Les systèmes autonomes : par exemple l’ABS, l’ESP, c’est-à-dire que le véhicule est équipé de systèmes d’aide et se suffit à lui-même. 2) Les systèmes distribués, c’est-à-dire que le système nécessite autre chose et notamment une cartographie, à l’exemple du système de navigation TomTomRoute. 3) Les systèmes interactifs, avec cartographie qui donne des informations pour établir des systèmes de communication entre véhicules qui se passent les informations des uns aux autres. Les systèmes autonomes sont opérationnels. Les systèmes distribués et les systèmes interactifs sont les grands enjeux technologiques des développements en cours. Un exemple de système interactif : dans le brouillard, il ne faut pas aller trop vite par rapport au véhicule qui précède, le système maintient obligatoirement la distance de sécurité en mesurant la distance et la vitesse entre les véhicules et bloque la vitesse à une vitesse de sécurité. En matière de systèmes autonomes, on peut imaginer être capable de maintenir un véhicule sur sa trajectoire ; de lire les lignes latérales ; d’avertir un véhicule qui va trop vite par rapport à la vitesse de sécurité pour aborder un virage. En matière de système distribué, on a, par exemple, une trajectoire préenregistrée. Dans le domaine du poids-lourd, on est capable, avec un système de cette nature, d’optimiser complètement la consommation d’énergie sur une autoroute avec son profil en long. Le camion rentre sur une autoroute, on lui donne le profil en long de l’autoroute et on lui donne par là même la loi de vitesse qui va lui permettre d’optimiser la consommation de l’énergie dans le jeu des pentes, montées et descentes. Dans les systèmes interactifs, nous avons l’énorme enjeu de la localisation, qui renvoie au débat sur Galileo : couplage télécommunication et localisation. La précision de la localisation constitue un enjeu majeur, notamment pour le péage routier. Je formule une hypothèse. Nous sommes dans un prix d’énergie croissant. Demain, nos concitoyens préféreront payer un péage qui leur garantira qu’ils pourront rouler sur la route qu’ils vont utiliser, c’est-à-dire qu’ils préféreront payer un péage qui leur fera économiser de l’énergie et gagner du temps. Aujourd’hui, ils payent des taxes – la TIPP – pour se retrouver bloqués dans les embouteillages, perdre du temps et gaspiller de l’énergie. Les technologies de localisation de véhicules et de télécommunications portent en elles la capacité de faire la régulation d’infrastructure. Aujourd’hui, avec le téléphone portable, la tarification est plus chère en heures de pointe qu’en heures creuses. Il en est de même pour l’électricité, pour le TGV… Il n’y a que la route pour laquelle nous n’avons pas de tarification qui discrimine selon qu’on est en période de 74 75 nous permettrait, collectivement, d’avoir un meilleur système d’information. saturation ou en période de libre utilisation. La régulation de la congestion par la tarification existe à peu près partout sauf dans le domaine routier. Je fais le pronostic que l’opinion publique d’un pays comme la France, comme probablement celle des pays nordiques, sera mûre pour préférer un péage routier à des taxes qui sont consommées en énergie gaspillée. Dans le domaine du système interactif, je citerai l’exemple du Lavia, parce que je pense qu’un département comme les Côtes d’Armor pourrait être pionnier en la matière. Nous avons expérimenté le Lavia, qui est le limiteur automatique de vitesse en fonction de la réglementation donnée à une infrastructure. C’est-àdire que dans une zone 30, le véhicule ne peut dépasser 30 kilomètres par heure. Sur une autoroute à 130, le véhicule ne peut dépasser 130 kilomètres par heure, sur une route à 110, on ne peut dépasser les 110. La localisation du véhicule couplée avec ce système-là permet de respecter ces vitesses. Aujourd’hui, ce type de dispositif n’est pas envisageable sur toutes les voi tures. Mais un département qui organise un système de transport scolaire pourrait mettre en place un dispositif de cette nature en demandant à ses opérateurs, à travers ce système, d’une part, de garantir aux familles que les vitesses sont strictement respectées, d’autre part, que les profils de vitesse soient faits pour optimiser l’énergie et les coûts. Nous avons là une technologie qui arrive à maturité et qui peut donner, à une instance comme le conseil général des Côtes d’Armor, une occasion de faire un déploiement de type industriel extrêmement démonstratif sur une cause particulièrement intéressante pour la sécurité, l’énergie, etc. À propos de Galileo, on peut dire qu’il va changer deux choses fondamentales : d’une part, le GPS + Galileo, c’est déjà beaucoup mieux que le GPS parce que, plus on a de satellites pour se connecter, plus on est sûr d’être localisé ; d’autre part, le plus important est la notion d’intégrité. Aujourd’hui, le GPS dit : « Je vous dis que vous êtes là, mais je ne suis pas sûr que vous êtes là où je vous dis que vous êtes. Donc prenez l’information que je vous donne avec précaution. » Demain, Galileo dira : « Je vous dis que vous êtes là, et je vous assure que vous êtes bien là où je vous dis que vous êtes. » C’est la notion de l’intégrité. Ou il dira : « Je pense que vous êtes là, mais je ne suis pas tout à fait sûr de ce que je vous dis. » Ou bien : « Je suis désolé, je ne peux pas vous dire où vous êtes. » Dans la situation dite d’intégrité, on peut agir en sécurité : « Puisque je suis sûr que je suis là, je suis sûr que si je fais cela, je vais bien », par exemple une limitation de vitesse, un péage. D’ici quelques années nous verrons des technologies avec Galileo qui permettront de payer sans débourser quoi que ce soit le stationnement payant dans les villes. On garera sa voiture sur une place, on sera localisé par satellite, garé de telle à telle heure et cela coûtera tant, et on le verra sur le compte internet. Lorsqu’on parle de sécurité routière et de route pardonnante, il faut penser à deux catégories de population particulière. Notre système routier a été conçu historiquement avec l’idée que le conducteur de référence était un homme de 40 ans en bonne santé et que celui qui se tuait sur la route, c’était un peu de sa faute. On a depuis abandonné cette idée : se tuer sur la route, ça peut arriver à tout un chacun et il convient d’assurer 76 77 la protection de ceux qui commettent des erreurs. Les populations qui commettent des erreurs, ce sont massivement les jeunes et un peu moins massivement les personnes âgées, les personnes handicapées, les personnes qui ne sont plus l’homme de 40 ans à la force de l’âge. Et il est particulièrement important de protéger ces deux catégories en agissant sur les infrastructures. Les jeunes, ce sont 8 millions d’individus, soit 5 % de la population, 25 % des tués sur les routes et 33 % des blessés graves. Ceci n’est pas propre à la France, c’est une loi générale, une loi de la jeunesse. Cette population évolue comme les autres, c’est-à-dire que, quand on prend la courbe de statistique d’évolution dans le temps, on a la même proportion de jeunes par rapport aux autres. Moins connues sont les différences de sexe. Ce sont les garçons qui se tuent sur les routes, ce ne sont pas les filles. Entre 0 et 14 ans, c’est-à-dire avant la conduite, c’est l’âge où les jeunes traversent les routes sans précaution. Parmi les personnes plus âgées, on retrouve ces différences de sexe, les accidentés de la route, les tués : 60 hommes pour 40 femmes. Dans la population des 15 à 17 ans, 75 hommes pour 25 femmes et dans la population des 18 à 40 ans, 80 hommes pour 20 femmes. Donc, nous avons un vrai problème concernant les jeunes garçons, avec une importance massive du milieu social, de l’environnement, des copains, des amis, des petites amies, etc., et de prise de risque, de transgressions, de drogue, d’alcool, etc. Par ailleurs, les conducteurs âgés et les conducteurs handicapés sont des personnes qui, à la différence des jeunes, se connaissent très bien et sont le plus souvent dans le mécanisme d’autorégulation. Un jeune, s’il sait sauter 2 mètres, essaiera de sauter 2,50 mètres. Une personne de 70 ans, si elle sait sauter 50 centimètres, ne tentera pas de sauter plus. Les personnes âgées et les personnes handicapées sont capables d’autorégulations qui ont comme conséquence qu’il ne faut absolument pas leur interdire de conduire. Il faut être attentif aux maladies de type neurologique qui limitent les facultés et pour lesquelles il y a des précautions particulières à prendre. Mais il est nécessaire aussi d’avoir une réflexion sur les aménagements, sur l’ergonomie des véhicules quand on a une vue qui baisse, quand on est porteur de lunettes, etc. Passer du regard sur le tableau de bord au regard sur la route pose des problèmes et il faut qu’en matière d’ergonomie de véhicule et de conception de signalisation des infrastructures, on ait une pensée toute particulière pour ces populations. 78 79 Questions Joël Le Croisier, conseiller général du canton de MaëlCarhaix Que faire à propos de la surfréquentation des routes, surtout autour des grandes agglomérations ? Vous avez expliqué que dans le futur ce sera encore plus inquiétant. Il faut tenir compte du fait que, même au fin fond du département, au centre Bretagne, il y a une chose qui se développe et qui se développera encore, c’est la desserte à haut débit, c’est-à-dire le télétravail. Les entreprises, de plus en plus, chercheront à donner du travail aux gens qui s’installeront et qui s’équiperont pour travailler chez eux. Est-ce que cela peut, dans le futur, jouer un peu sur la fréquentation des routes ? Guy Bourgeois C’est une question importante qui n’est pas tranchée. Le fait que l’on peut se faire livrer ses bouteilles d’eau à domicile n’empêche pas les gens de déplacer pour aller au marché. Les achats par l’internet n’ont pas eu comme conséquence de limiter les déplacements des personnes ; ils ont pour l’instant comme effet de limiter l’augmentation des livraisons en ville. Ce que vous dites peut avoir des conséquences différentes et notamment celle d’augmenter la productivité du travail. Personnellement, j’ai travaillé en haut débit dans le TGV hier, entre 21 et 22 heures, même si je n’étais pas dans une zone reculée de campagne. En revanche, je pense que le haut débit a certainement des conséquences très importantes sur le choix des moments où l’on se déplace. Par rapport à ce que j’évoquais sur la tarification routière et le prix de l’énergie, je formule l’hypothèse qu’on introduira des mécanismes de régulation de telle sorte que les infrastructures soient mieux utilisées, en évitant qu’elles soient sous-utilisées à certaines heures et saturées à d’autres. On peut imaginer des formes de travail ne modifiant pas forcément la quantité de déplacements mais permettant plus de souplesse sur les moments où l’on fait ces déplacements. En tout état de cause, l’équipement haut débit donne des possibilités de faire des gains de productivité dans les régions qui en sont équipées et est, de ce fait, indissociable des solutions aux problèmes de déplacements. Hervé Le Jeune Je préciserai quelques points à propos du transport de marchandises : 1) Nous transportons de plus en plus, mais de moins en moins lourd, parce que n’importe quel produit est vendu avec l’emballage, le suremballage. Le développement durable passe peut-être aussi par une révision de cette conception. 2) Concernant la logistique et le transport, il est vrai que la France a du retard. Nous n’avons probablement pas pris le tournant au bon moment car nous étions transporteurs avant d’être logisticiens. C’est pour cela que j’ai précisé qu’aujourd’hui, nous faisons du transport et de la logistique. Pour les Bretons que nous sommes, il est important de savoir que le canal de Nantes à Brest est voué à un grand avenir et que nous devons travailler impérativement le transport fluvial en Bretagne. Pour l’instant, nous ne sommes pas en mesure de développer ce type de transport. Mais dans d’autres régions comme l’Alsace, cela marche plutôt bien ; pour Le Havre, il y a d’autres problèmes, et dans tous les cas c’est un autre débat. 3) Concernant les livraisons en ville, on peut comprendre qu’il est agaçant d’attendre derrière un poids-lourd qui fait sa livraison. Mais il suffit de rationaliser les horaires de livraison. Par contre, si on multiplie les véhicules légers, parce qu’on ne veut pas de poids-lourds en ville, je ne suis pas sûr que la notion de développement durable soit complètement satisfaite dans cette affaire. Et une remarque par rapport aux femmes – parce qu’on parle beaucoup de parité, et je m’en félicite : plus on augmentera la manutention et la 80 81 distance de manutention, plus on éloignera les femmes de l’emploi. 4) Un point également sur le péage autoroutier : ce n’est pas parce que vous payez que vous avez pour autant une assurance de rouler tranquillement. Quand il y a de la neige sur les autoroutes en France, on est bloqué et l’on paye pourtant à la sortie. Je ne suis pas sûr non plus que la fiscalité soit le moyen systématique de régler les problèmes. Il ne faudrait pas que le transport devienne un luxe, dans tous les sens du terme. Guy Bourgeois Sur la fiscalité du péage, je n’hésite pas à dire que le système de la TIPP est un des systèmes les plus idiots qu’on ait inventés en matière de régulation écono mique. C’est-à-dire que, quel que soit l’usage que vous fassiez de l’infrastructure, vous payez la même chose. Ce n’est pas du tout la même chose d’être un agriculteur et de n’avoir pas d’autre choix que d’utiliser son véhicule que d’être un urbain qui utilise son véhicule dans les embouteillages et pollue l’air. Ce système, qui est la combinaison de la fiscalité et du péage, n’a pas été conçu comme un outil de régulation, et il n’est pas performant sur le plan économique. J’appelle de mes vœux, et l’Inrets y contribue, une réflexion plus élaborée sur le financement de tout cela. À Tokyo, les Japonais font 5 000 kilomètres par an en moyenne avec leur voiture. Ils utilisent les transports urbains sans discussion. Ils ne peuvent acheter une voiture que s’ils apportent la preuve qu’ils sont capables de la garer ; ils ont donc tous un petit garage pour garer leur voiture. Ce sont les employeurs qui paient les dépenses de trajets domicile-travail. Ils demandent à leurs employés de prendre les transports publics. La voiture est un objet de loisir, on est heureux de l’avoir, plus belle que celle du voisin, etc., mais on utilise les transports collec tifs. C’est un exemple pour montrer qu’il n’y a pas de contradiction entre le fait d’être propriétaire d’une voiture et le fait de l’utiliser à bon escient. Il faut bien distinguer, dans ce débat, la propriété d’un véhicule et son utilisation. La France n’est pas au bout des outils pertinents de régulation et d’orientation des choix, ceux dont nous disposons ne sont pas particulièrement performants. Après tout, il était cohérent, à l’époque, de considérer qu’une taxe sur l’énergie pétrolière, la TIPP, alimenterait prodigieusement les caisses de l’État. Notre époque nous appelle maintenant à des réflexions différentes. Du poste d’observation où je suis, je vois qu’aujourd’hui les Anglais, les Suédois, les Norvégiens, les Néerlandais, etc., sont dans le débat du péage routier, que le président Bush, dans son discours du 20 janvier 2007, a demandé que l’on baisse de 20 % la consommation d’essence aux États-Unis et a autorisé l’administration américaine à penser au péage routier. Je pense que, par quelque bout que l’on prenne le problème, on arrivera un jour à la conclusion que notre système de TIPP, qui d’ailleurs n’est pas très populaire, est mauvais ; il a vocation à être remplacé par un système plus efficace qui, dans un contexte d’économies croissantes, risque de nous être imposé et pourra d’ailleurs susciter une adhésion de l’opinion publique. 82 83 En matière de transport routier, notamment de concurrence internationale, je pense que la France a tout intérêt à avoir un système de péage routier qui fasse que ses propres transporteurs ne paient pas plus cher, à travers la TIPP, que les transporteurs étrangers qui peuvent venir avec leur plein de gazole qu’ils ont eu moins cher. Lorsqu’on aura rétabli l’égalité de coût de traversée du territoire, on aura probablement rendu service à la profession française. Il est étonnant que la FNTR ne soit pas militante de l’instauration du péage routier, au moins sur les grands axes internationaux. 84 Seconde partie La politique costarmoricaine des transports en Côtes d’Armor 85 IV Infrastructures, modes, activités de transport des hommes et des marchandises Félix Leyzour Nous nous proposons de faire le point sur les transports en termes d’infrastructures, modes, activités des hommes et marchandises avant d’entamer les réunions de travail sur le terrain pour préparer la réactualisation du schéma routier départemental. Dans ce domaine comme dans tous les autres, il est utile et nécessaire de savoir où on en est, d’où on vient et où on va. Les contributions et le débat qui précèdent sont très riches, avec des arguments qui se rejoignent, se recoupent, se complètent et parfois se contredisent. Ces interventions nous apportent des éléments d’information, de réflexion, qui nous interpellent, pas simplement sur les transports en eux-mêmes, mais sur leur place, leur rôle dans le développement de la vie et de la société et sur les contradictions qui apparaissent ici et là et qu’il nous faut chercher à dénouer et à résoudre en faisant prévaloir une vision durable et solidaire du dévelop Vice-président du conseil général et président de la commission de l’aménagement du territoire, des infrastructures et de la mer. 86 87 pement. De tout ce qui précède et de ce qu’il m’arrive par ailleurs de lire et d’étudier, je retiendrai quelques points forts. Premièrement, si les hommes peuvent communi quer et communiquent entre eux aujourd’hui plus que par le passé, dans leurs activités et dans leur vie quotidienne, et cela sans se déplacer, cela ne conduit pas à ce qu’on se déplace moins. Bien au contraire, on communique et on se déplace. Deuxièmement, pour répondre le mieux possible au besoin de se déplacer, de transporter les marchandises, il faut s’efforcer de tirer le meilleur parti de tous les moyens de transport et donc développer toujours davantage l’intermodalité des transports. Troisièmement, à travers tous les modes de transport, l’amélioration de l’efficacité énergétique doit être une préoccupation constante. Le sujet en lui-même pourrait faire l’objet d’un important débat – économies d’énergie, diversification au niveau des sources, énergies renouvelables, gestion des grands secteurs de l’énergie. Quatrièmement, si des possibilités existent du côté de l’intermodalité pour une partie des déplacements des voyageurs, des gens dans leurs activités quotidiennes, pour également les transports de marchandises, pour autant, la route demeure et demeurera un élément de l’aménagement équilibré du territoire, un mode de transport essentiel dont on ne pourra pas se passer. Cinquièmement, si l’existence de routes n’est pas une condition suffisante pour qu’un territoire vive et se développe, elle en est une condition nécessaire quand elle est conçue non seulement pour traverser, transiter, mais aussi pour desservir, irriguer. De tout cela découle, pour une assemblée comme la nôtre et pas seulement pour nous, l’intérêt de nous inscrire dans une démarche d’adaptation, de poursuite de la modernisation de notre réseau routier, en l’articulant avec le réseau des routes d’intérêt régional et celui des routes nationales, et en le situant dans la complémentarité avec le transport ferroviaire, le transport maritime et aérien. À ces considérations de caractère général, pour ce qui est de la route, j’ajouterai quelques autres considérations qui ont un caractère plus régional et qui créent le cadre dans lequel nous mettons en œuvre nos politiques d’aménagement et poursuivons nos réflexions. Première observation : la modernisation du réseau routier national en Bretagne, à partir des années 1960, s’est faite en tenant compte du caractère péninsulaire de notre région qui n’a rien d’une région de transit pour aller d’un pays à un autre dans l’ensemble européen. On n’y a pas réalisé un réseau autoroutier mais un réseau à 2 x 2 voies créé la plupart du temps par aménagement et doublement des routes nationales est-ouest avec des déviations d’agglomération et des rectifications de tracés. Ces axes à 2 x 2 voies raccordent la Bretagne au reste du réseau européen, grâce à l’existence d’échangeurs plus nombreux, plus rapprochés les uns des autres que sur les autoroutes ; ils permettent non pas simplement de transiter, mais aussi de desservir, d’irriguer, de développer les territoires. C’est un point important qu’il ne faut pas, 88 89 aujourd’hui encore, perdre de vue, au moment où il est question, après les contrats de plan, de s’engager dans la préparation des programmes de développement et de modernisation d’itinéraires (PDMI). C’est moins l’aspect autoroutier qui doit retenir notre attention, que la poursuite de la mise à 2 x 2 voies de la RN 164, la réalisation du doublement du pont sur la Rance, qui est devenu un véritable goulot d’étranglement, et la réalisation d’échangeurs comme au droit de Dinan, de Caulnes, du Perray, du Sépulcre, et la sécurisation de ceux qui existent, comme la Chesnaye à Guingamp. Cofinanceurs de travaux avec la région et l’État, nous devons contribuer à faire en sorte que les objectifs à atteindre soient définis en commun en intégrant une approche régionale des choses. Deuxième observation : ces liaisons nationales sont des liaisons est-ouest et ouest-est. Au fil des années, elles ont été croisées par des liaisons nord-sud, sur des axes départementaux retenus au niveau de la région comme routes d’intérêt régional. La région consacrant aujourd’hui davantage d’efforts sur le ferroviaire a cependant maintenu sa participation sur un axe essentiel nord-sud, RN 12 Saint-Brieuc-LoudéacPontivy, avec bifurcation sur Lorient et Vannes, ce qu’on appelle le « Triskel ». On observera que notre département, par sa situation géographique, et par le tracé des grandes liaisons est-ouest, avec notamment sur son territoire la plus grande partie de la RN 164, et avec la liaison nord-sud, la RD 700, occupe une position au cœur des politiques d’aménagement routier de la région. Cela nous crée des obligations, et justifie aussi les démarches faites pour obtenir que la RN 164 reste dans le réseau national et pour que les financements attendus interviennent à la hauteur nécessaire. Ce cadre d’ensemble, qui continue d’inspirer nos politiques d’aménagement routier, avait été, à n’en pas douter, à l’origine de nos réflexions sur la nécessité d’avoir un cadre départemental, un document guide pour orienter, définir et programmer la modernisation du réseau départemental complétant la trame constituée par les réseaux est-ouest, intégrant les réseaux nord-sud puisque c’est nous qui les avons réalisés, et les complétant par un réseau raccordant les principales villes et territoires entre eux et aux axes nationaux. C’était avant la décentralisation, à une époque où le conseil général n’était pas encore une assemblée de plein exercice. Mais c’était une époque où apparaissait déjà la nécessité de prendre et de conduire des initiatives répondant aux besoins d’aménagement et de développement du territoire départemental, et préfigurant déjà ce qu’allait être la décentralisation. Il faut reconnaître que les autorités de l’État, le préfet et la Direction départementale de l’équipement avaient compris la démarche que voulait initier le conseil général sous la présidence de Charles Josselin à l’époque. C’est dans une saine coopération que le schéma d’aménagement routier a été élaboré et adopté en 1978, après un travail au plus près du terrain, dans les arrondissements, au cours de réunions présidées par les sous-préfets (le conseil général n’avait pas à l’époque d’exécutif direct et le préfet en était l’exécutif). Le schéma a été repris sous la seule conduite du conseil général, actualisé en 1982, en 1987, en 1991 et en 2000, sous la présidence de Claudy 90 91 Lebreton. Entre-temps, à mi-parcours, il y a eu des ajustements entre programme de base et programmes complémentaires. Nous le remettons sur le métier pour les périodes de 2008-2013, 2013-2020. Évidemment, avant 1978, on faisait aussi des travaux routiers dans le département mais en relation avec le Plan routier breton sur les nationales. Avec le développement de l’agroalimentaire et d’autres activités, avec le premier transfert de routes nationales au département, il nous était apparu nécessaire de dégager les grandes lignes d’une politique de modernisation d’un réseau d’itinéraires, et de renforcer le budget permettant d’avancer vers les objectifs fixés. Il fallait donc dégager des priorités en définissant un réseau de routes principales, à moderniser d’un bout à l’autre de l’itinéraire, ce qui a été fait. Mais il importait, dans le même temps, pour pouvoir tenir ces objectifs, en consacrant des moyens financiers à leur réalisation, de ne pas négliger le reste du réseau. D’où l’idée, au niveau de l’investissement, d’un programme d’opérations d’intérêt local répondant à des besoins de sécurité, d’aménagement sur l’ensemble du territoire départemental, et répartissant aussi sur tout le territoire des travaux qui font partie de l’activité économique. Ce volet de l’investissement était articulé avec un effort consenti au plan de l’entretien. Le bilan a été établi : de 1978 à 2006, on a réalisé, dans le cadre du seul schéma départemental d’aménagement d’itinéraires, des travaux dont certains sont des mises à 2 x 2 voies, sur 810 kilomètres pour un montant de 420 millions d’euros. On peut observer, au vu des documents établis, que le montant annuel des travaux est allé en augmentant au fil des années. De 1978 à 1981, il était de 6,6 millions d’euros par an. De 1982 à 1986, 13,1 millions d’euros par an. De 1987 à 1991, 14,8 millions d’euros par an. De 1992 à 1999, 16,5 millions d’euros par an. De 2000 à 2006, 17,4 millions d’euros par an. Cette augmentation annuelle des crédits traduit la nécessité qu’il y avait de poursuivre et de renforcer l’effort entrepris en tenant compte de l’augmentation des coûts des travaux, due pour partie aux caractéristiques des aménagements que la technique permet, pour répondre aux attentes sociales et à l’approche environnementale. Interrogés dans le cadre de l’enquête sur Côtes d’Armor en 2020, les Costarmoricains ont indiqué à 57 % qu’ils étaient satisfaits de l’état de leur réseau routier. Bien entendu, il reste encore à faire, à fixer les objectifs et à définir le rythme de la marche. Il serait hasardeux de tirer des conclusions avant que la consultation par pays n’ait eu lieu. Toutefois, comme la discussion ne s’engage pas en partant de zéro, mais des opérations qui ont lieu sur le terrain, d’engagement et de concertations en cours, tant avec l’État qu’avec la région, et des communautés d’agglomération ; aussi voit-on se dessiner quelques grandes lignes qu’il faudra confirmer ou infirmer – le débat le montrera – et préciser. À savoir : 1) notre volonté de voir avancer de manière concertée les travaux sur la RN 164 et de privilégier, sur les autres routes nationales, les opérations comme le pont sur la Rance, les échangeurs, et les opérations de sécurité ; 2) mettre l’accent sur l’axe nord-sud, la RD 700 ; 3) poursuivre les aménagements d’itinéraires, en raccordant les différents secteurs du département, 92 93 et en y intégrant certaines opérations de déviations d’agglomérations ; 4) poursuivre, en termes d’études, et engager, en termes de travaux, des opérations dont la nécessité n’apparaissait pas au début quand nous avons élaboré le schéma départemental, mais qui deviennent d’actua lité pour des raisons de transit, de développement urbain, de fluidité du trafic intérieur et de promotion du transport collectif. C’est le cas pour la rocade de Saint-Brieuc, qui est en la matière le projet le plus avancé et qui va devoir prendre sa place dans le schéma réactualisé ; 5) maintenir un effort pour des travaux localisés sur le réseau B, et pour l’entretien, la signalisation ; croiser nos réflexions avec les communes et communautés de communes, sur d’éventuelles modifications au plan des dessertes locales ; 6) enfin, sur un réseau routier toujours mieux adapté, prolonger la réflexion et les engagements déjà pris concernant le transport public de personnes, Tibus et le covoiturage, le schéma vélo avec des dispositions de sécurisation des parcours ; apporter aussi une réponse à une pratique qui se développe. Tout ce travail, nous allons le conduire en relation avec les recherches qui sont menées dans le cadre de ce qu’on appelle le transport intelligent. Et en continuant de mettre en œuvre la démarche de démocratie participative. À cet égard, je rappelle que pour la rocade de Saint-Brieuc, nous avons tenu vingt-cinq réunions publiques, de secteur et de caractère plus général. Au départ, il y avait des réserves, voire des oppositions ; nous avons intégré des observations, travaillé le dossier. Aujourd’hui, de façon générale, on demande que les travaux se fassent, et rapidement. Des crédits sont inscrits en 2007. Puisqu’il s’agit des modes de déplacements, il n’est pas inutile de rappeler que, parallèlement à l’effort effectué sur les routes, le conseil général s’est préoccupé aussi du ferroviaire. Une des caractéristiques de notre département, au plan ferroviaire, c’est que, outre la liaison principale Paris-Brest, pour laquelle il y a le programme de suppression des passages à niveau que nous cofinançons, et le dossier de financement de la LGV toujours en discussion, nous avons des lignes afférentes, au maintien desquelles nous avons œuvré en direction de la SNCF, de l’État et de la région. La ligne Carhaix-Callac-Guingamp-Paimpol, qui assure la liaison avec le TGV à Guingamp, maintenant une desserte locale avec le TER, a été sauvée. Du nouveau matériel roulant y est prévu. Certains considéraient, il y a quelques années, comme dépassé de conserver de telles lignes. Je pense que ceux qui se sont mobilisés pour la maintenir n’ont pas eu tort. La ligne Plouaret-Lannion a été électrifiée. Elle supporte un trafic TER et permet au TGV d’aller jusqu’à Lannion. La bataille du rail, comme on dit, a été rude et longue. Mais elle a abouti et c’est bien grâce au conseil général. On nous disait, à l’époque, qu’avec la modernisation de la route Guingamp-Lannion, Guingamp pourrait devenir la gare de desserte du Trégor. Nous avons considéré qu’il fallait à la fois la route et l’électrification de la ligne à partir de Plouaret. Personne aujourd’hui ne le regrette. Il y a la ligne Lamballe-Dinan-Dolde-Bretagne pour laquelle notre conseil général milite 94 95 activement auprès de la région, autorité organisatrice, pour améliorer les services, renouveler les matériels et réhabiliter les cantonnements de Plancoët et MiniacMorvan. Par cantonnements, il faut entendre la possibilité de croisement des trains en gare. Ce plan de restructuration, outre une meilleure desserte du MontSaint-Michel et des départements voisins, constituera un maillon intéressant, indispensable, dans l’amélioration de l’offre ferroviaire entre Saint-Brieuc et Dinan. Il reste aussi la ligne Saint-Brieuc-Loudéac, dont le cours a été interrompu dans le Morbihan. Notre souhait et notre engagement tendent à maintenir la section costarmoricainne, y compris en desserte des ports du Légué et de la zone du Châtelet, en vue d’y encourager une politique volontariste en faveur du fret ferroviaire et, au-delà, d’obtenir à terme la réhabilitation de la partie morbihannaise, en l’inscrivant dans la réouverture au transport de marchandises de la totalité de la ligne nord-sud. Puisque chaque mode de transport renvoie à l’intermodalité, et donc aux interconnexions qu’elle suppose, il est indispensable d’avancer dans la recherche de solutions adaptées au stationnement des voitures près des gares. Il serait dommage de perdre, en temps de recherche d’une place de stationnement, une partie du temps gagné sur le trajet. Ce sujet va de pair avec l’amélioration des lieux d’échanges rail-route. Pour ce qui est du transport maritime, qui a été évoqué, il représente plus de 500 000 tonnes, dont 337 000 pour le seul port du Légué pour lequel le conseil général a consenti des efforts importants en réalisant le port d’échouage. On peut sans doute dire que le tonnage espéré au départ n’a pas été atteint, mais on peut aussi affirmer que si ces travaux n’avaient pas été réalisés, il n’y aurait pratiquement plus de trafic au Légué. Sans compter qu’avec le tonnage maintenu, il est désormais possible, en prenant appui sur les travaux déjà réalisés, d’envisager, comme nous l’avons décidé, la construction d’un port à flot, avec le même souci de développer, pas seulement dans les mots mais dans les actes, les différents modes de transport, en ne perdant pas de vue que ce qui sera fait ici dans une optique de transport créera aussi les conditions d’un développement plus général d’activités centrées sur la mer. Les évolutions du trafic aérien conjuguées avec des gains de temps déjà enregistrés au niveau des TGV ont conduit à la fermeture, non pas de l’aéroport de Saint-Brieuc, mais des lignes régulières au départ et à l’arrivée. Pour autant, il continue de jouer son rôle comme site de réparation aéronautique avec l’entreprise AAI qui répare les ATR, et comme site aéroportuaire offrant des vols charters ou accueillant des avions d’entreprise. L’aéroport de Lannion est en cours de modernisation avec une fréquentation qui se stabilise à 90 000 passagers par an grâce aux lignes régulières vers Paris, lignes qui viennent d’être renforcées par des vols supplémentaires le samedi avec une fréquentation à la hausse. Tout en poursuivant la réflexion et les efforts dans tous les secteurs relatifs aux transports, nous allons devoir consacrer du temps à la concertation avec les élus, pour que nous puissions, dans le domaine routier, à travers un travail de synthèse, dégager des objectifs d’aménagement pour les périodes 2008-2013 et 2013-2020. Il y aura des 96 97 choix à faire, mais le projet devra être cohérent, prolongeant ce qui a été déjà réalisé, et creusant les pistes, pour ne pas dire les routes, que la présente réflexion doit nous permettre de mieux baliser. V Les réalisations dans le domaine routier depuis l’adoption du schéma routier en 1978 Raymond Pécheux L’historique d’Armoroute s’établit comme suit : 1) en 1978, adoption du premier schéma routier départemental, 2) en 1982, première actualisation, 3) en 1987, nouvelle actualisation, 4) en 1991, adoption d’Armoroute 92, 5) en 2000, adoption d’Armoroute 2000 qui s’est terminé en 2006. En 1978, lors de l’adoption du premier schéma, il avait été défini un réseau de routes principales de 1 200 kilomètres dont 900 restaient à aménager. Il y avait trois priorités à l’époque pour un budget de 480 millions de francs (73 millions d’euros). Ce qu’on appelle aujourd’hui la RD 700 était la RN 778, et à l’époque, on avait imaginé que GuingampLannion ne serait pas à 4 voies mais à 3 voies, et qu’une partie de la route vers Paimpol serait à 3 voies. La RN 164 avait été envisagée à 3 voies. La déviation Direction des infrastructures et des transports du conseil général. 98 99 de Binic avait été prévue à 2 x 2 voies jusqu’à l’entrée de Binic. Le réseau routier des Côtes d’Armor s’intègre dans le réseau national, avec les axes est-ouest constitués par les routes nationales, et les axes transversaux constitués par les routes structurantes départementales. Cela représente 255 kilomètres de routes nationales, 4 500 kilomètres de routes départementales, réparties en deux réseaux (A et B) et 18 000 kilomètres de voies communales. Le trafic routier a été, en trente-cinq ans, multiplié par trois. L’augmentation moyenne est de 2,3 % par an sur la période 1995-2005, et nous avons des fréquentations très différentes selon les routes départementales : 25 000 véhicules par jour sur la D 786 au droit de Pordic au mois d’août, et pas plus de 300 véhicules par jour sur certaines routes secondaires. • En 1978, la RN 12 est en 2 x 2 voies sur à peu près la moitié de son trajet, plusieurs agglomérations sont déjà déviées, Lamballe, Langueux et Yffiniac, Châtelaudren et Guingamp, mais on passe toujours par Saint-Brieuc. La déviation de Saint-Brieuc est en cours de travaux, puisqu’elle a été mise en service en juin 1980. Les travaux réalisés avant 1978 concernent essentiellement des liaisons sur le réseau départemental, de ville à ville, avec très peu de déviations d’agglomération. Sur la RN 176, il existe quelques créneaux ; Jugon-les-Lacs doit être dévié, mais on traverse toujours Dinan. Sur la RN 164, un aménagement a été fait à 2 voies. Au niveau des axes d’intérêt régional – c’est le premier programme routier – deux axes sont en cours d’aménagement : Caulnes-Dinan, et Guingamp-Callac-Carhaix. • De 1978 à 1981, les opérations engagées continuent de se réaliser : essentiellement la liaison entre Corlay et Quintin. Pour le reste, il s’agit opérations moins importantes, mais la déviation de Trégueux, qui passe devant l’hôpital, est réalisée par le département, ainsi que la traversée du Créac’h : une grosse opération est réalisée sur les Granits-La Bézardais. • De 1982 à 1986, deux événements importants : le déclassement de la RN 778 dans le réseau départemental, qui est devenue la RD 700, et l’engagement de l’opération Saint-Brieuc-Malakoff, dans un premier temps, à 2 voies, et aussi la déviation de la gare d’Uzel. Les axes régionaux continuent d’être aménagés comme Guingamp-Callac-Carhaix et, pour le réseau départemental, un certain nombre de déviations. C’est alors le début de la mise en œuvre des options prises lors de l’élaboration du schéma en 1978. La liaison vers Paimpol est engagée par la réalisation des trois déviations : de Tréméloir, Trégomeur et Lanvollon. Au même moment, une déviation courte, Plouha, est aménagée. C’est à cette époque-là que l’on fait aussi la déviation de Callac, et certaines liaisons entre agglomérations, Lannion-Tréguier, Collinée-Merdrignac, soit 65 millions d’euros de travaux sur cette période. • De 1987 à 1991, 74,2 millions de travaux, dont l’essentiel porte sur les axes d’intérêt régional. C’est le doublement de Saint-Brieuc-Malakoff, la réalisation des travaux sur Plaintel. C’est l’engagement de travaux de L’Hermitage-Lorge et, sur l’axe régional SaintBrieuc-Quimper, plusieurs déviations sont réalisées : Quintin, Saint-Nicolas-du-Pélem, et la liaison entre Glomel et le Morbihan. C’est aussi à cette époque que 100 101 commencent les travaux sur l’axe Guingamp-Lannion par la déviation de Pédernec, puisque l’axe GuingampCallac-Carhaix étant terminé, l’axe GuingampLannion a été inscrit au programme routier d’intérêt régional. • De 1992 à 1999, suite de l’aménagement de l’axe Saint-Brieuc-Loudéac (avec notamment la liaison Uzel-Loudéac) ; suite de l’aménagement de Guingamp-Lannion ; déviation de Bégard ; déviation de Cavan à 2 voies ; mise à 2 x 2 voies de la déviation au droit de Pordic, et autres aménagements de ville à ville, en particulier la desserte de Plestin-les-Grèves, et celle de Plouaret à partir de la RN 12. • De 2000 à 2006, c’est le schéma actuellement en cours : les travaux les plus importants ont été réalisés au cours de cette période et portent toujours sur les axes régionaux de Saint-Brieuc-Loudéac avec en particulier la déviation sud-est de Loudéac et la liaison vers le Morbihan à 2 x 2 voies. La suite et la fin de la liaison de Guingamp-Lannion-Perros, avec le doublement de Bégard, le doublement de Cavan, la mise à 2 x 2 voies de Caouënnec-Buhulien, et la déviation est de Lannion à 2 voies. Engagements aussi au cours de cette période de la liaison Lanvollon-Paimpol, avec plusieurs sections à 2 x 2 voies, et avec les radiales à partir de cette liaison qui desservent Plouézec par la RD 77 et Plouha par la RD 32. Quelques autres liaisons aussi au cours de cette période, toujours au titre des axes régionaux : la déviation de Pleslin-Tréméreuc, et l’allongement du créneau de La Croix-Guessant sur la RD 766. C’est au cours de ces années que la phase de concertation a été conduite pour la rocade de Saint-Brieuc en vue d’aboutir à une déclaration d’utilité publique le 21 juin de l’année 2006. Celà représente 122 millions d’euros au cours de cette période. À l’issue de la période 1978-2006, on voit que l’essentiel du département est aujourd’hui irrigué par les travaux qui ont été réalisés, et qui restent à parfaire : sur l’ensemble de la période, ce sont donc 420 millions d’euros qui ont été consacrés au seul schéma routier départemental, et les montants annuels sont en constante augmentation. Au total, 810 kilomètres de routes ont été aménagés. Pour le schéma Armoroute qui a été adopté en 2000, 88 % du programme de base et 12 % du programme complémentaire ont été réalisés pour un montant de l’ordre de 122 millions d’euros. D’autres crédits ont été mobilisés par le département : 13 millions d’euros pour la participation à l’amélioration du réseau national ; et 83 millions sur le réseau secondaire, pour le gros entretien ; ce qui fait un total de 218 millions d’euros sur la période 2000-2006. Il y a eu sur cette période un effort important sur des axes structurants, tels Guingamp-Lannion, Lanvollon-Paimpol, Saint-Brieuc-Loudéac, mais aussi sur les routes nationales où plusieurs déviations d’agglo mération ont été réalisées ou sont en cours, comme sur la RN 164 : Trémorel, Le Moustoir, Saint-Gelven, Saint-Caradec ; il y a aussi des travaux importants qui ont été faits sur la RN 12, entre Saint-Brieuc et Langueux. Cette période a été caractérisée par un renchérissement général des coûts des opérations, parce que les attentes de nos concitoyens sont de plus en plus fortes pour plus d’ouvrages, plus d’aménagements paysagers, plus de protections phoniques. Pour autant, 102 103 il reste une certaine attente d’aménagements sur des axes circulés, comme la RD 766 Dinan-Caulnes, pour citer les plus importants, la RD 786 vers Saint-QuayPortrieux, puis aussi vers Plerneuf et Erquy, la RD 768 en direction et au droit de Plancoët, ainsi que sur la RD 700 pour ce qui reste à faire sur Saint-Brieuc-Loudéac. À côté de cela, il y a émergence d’une demande forte pour la réalisation de rocades et de déviations d’agglomération. VI Le contexte socio-économique des Côtes-d’Armor Thierry Connan Le schéma Armoroute se situe dans le contexte démographique et économique départemental qui suit. Le premier élément concerne l’évolution de la population. Nous avons des données connues jusqu’en 1999, et des estimations ou des projections de population jusqu’en 2030. Entre 1968 et 1999, donc en trente ans, la population des Côtes d’Armor est passée de 506 000 à 542 000 habitants. Selon la dernière estimation de l’Insee, réalisée en 2005, le département compterait actuellement 575 000 habitants environ. Apparemment donc, depuis 1999, le rythme de croissance démographique s’est accéléré, pour plusieurs raisons : 1) un bilan migratoire positif que l’on sait en augmentation, 2) un solde naturel légèrement négatif, mais qui s’améliore au cours des années du fait de l’augmentation sensible des naissances alors que dans le même temps, ici comme ailleurs, l’espérance de vie augmente. * Côtes d’Armor Développement. 104 105 Si on prolonge cette estimation de l’Insee réalisée en 2005, sur un rythme de croissance démographique équivalent à celui constaté ces dernières années, on peut supposer que la population des Côtes d’Armor en 2030 serait alors supérieure à 690 000 habitants. Si l’on retient plutôt les projections effectuées par l’Insee en 2002, le département, d’ici à vingt-cinq ans, comptera 590 000 habitants. Comme souvent, dans de pareils cas, la réalité se situe sans doute entre ces deux extrêmes. Schématiquement, l’évolution démographique des Côtes d’Armor est différente de part et d’autre d’un axe matérialisé grosso modo par la RN 12. Les trois quarts des Costarmoricains résident le long ou au nord de cette ligne. Et cette part de la population augmente. Pour la moitié sud du département, la tendance est différente. On constate une baisse globale de population, avec une proportion plus importante de communes, qui cumulent des soldes migratoires et naturels déficitaires. Cette répartition schématique met en évidence plusieurs types de territoires : – Les régions à forte proportion de nouveaux arrivants : ce sont évidemment les zones littorales et on pense tout de suite aux populations retraitées. Mais rappelons que majoritairement, à plus de 60 %, les nouveaux arrivants en Côtes d’Armor ont moins de 40 ans, que les trois quarts sont constitués d’actifs et de leur famille dont l’implantation, il est vrai, est essentiellement urbaine ou périurbaine. – Les ensembles de communes où l’on constate une diminution de la population où le taux des personnes âgées de plus de 60 ans est supérieur à 30 %. Ces deux types de territoires concernent tout autant la moitié sud des Côtes d’Armor et une partie de l’espace littoral, la moitié sud se distinguant toutefois par une densité plus faible, souvent inférieure à 35 voire 25 habitants au kilomètre carré. Les premiers résultats du recensement en cours qui concerne pour l’instant 224 des 373 communes du département tendent globalement à confirmer cette tendance. La dynamique démographique paraît s’étendre dans la partie nord à un nombre important de communes qui sont à leur tour entrées dans une phase de croissance, ce qui est particulièrement notable sur le pays de Dinan. Pour autant, dans la moitié sud, on observe également des évolutions démographiques favorables dans des communes ou ensembles de communes jusque-là marqués par des baisses de population, notamment à proximité de certains axes routiers, qui ont une capacité à attirer de nouveaux habitants, avec le cas très illustratif de l’axe Saint-Brieuc-Loudéac. Depuis 1975, au cours des trois dernières décennies, le nombre de Costarmoricains qui résident et travaillent dans la même commune a diminué de 40 %. Pratiquement 7 actifs sur 10 occupent un emploi en dehors de leur commune de résidence. Les déplacements domicile-travail se multiplient, et tendent à s’allonger progressivement : ils s’établissent en moyenne à 15,4 kilomètres. Parallèlement, la durée des trajets diminue, notamment du fait de la modernisation des voies routières. Cet accroissement de la mobilité des actifs et de la population en général s’explique, entre autres raisons, par une concentration croissante des emplois dans et autour des agglomérations du département, ainsi que 106 107 par le coût élevé d’acquisition des terrains et logements, au sein ou à proximité des villes, qui oblige beaucoup d’actifs à accroître la distance domicile-travail. La carte de localisation des entreprises agro alimentaires de plus de 50 salariés confirme, s’il en était besoin, à la fois la relative concentration des industries ainsi que la forte corrélation entre la proximité d’une agglomération, l’existence d’un axe routier structurant et la présence des entreprises les plus importantes. La carte des entreprises industrielles non agroalimentaires conduit au même constat. On sait que la valorisation des atouts économiques du département est conditionnée par la qualité des infrastructures qui permettent aux entreprises de se développer et d’échanger par la route, par la mer, par le fer, éventuellement par voie aérienne, et bien sûr aujourd’hui par le haut débit. Le transport routier occupe une place dominante dans le transport régional et interrégional de marchandises. 775 entreprises de transport sont recensées en Côtes d’Armor, ce qui représente plus de 5 000 emplois. 410 concernent le seul secteur du transport routier de marchandises. Leur concentration est très forte à proximité des principaux donneurs d’ordres, industrie et logistique, mais aussi et surtout le long des axes majeurs que sont les RN 12, 164, et 176. Le département représente 15 % des tonnages transportés de la Bretagne vers le reste du territoire national, contre 50 % pour l’Ille-et-Vilaine qui constitue une plate-forme logistique en plein développement à l’est de la péninsule bretonne. Enfin, 330 espaces d’activités sont recensés en Côtes d’Armor, répartis sur l’ensemble du département, pour une superficie globale d’environ 4 000 hectares. Les sites de plus de 20 hectares se sont développés principalement autour des pôles urbains, et le long des principaux axes de circulation, avec un impact important sur l’environnement et les paysages les plus visibles du département. Leur niveau d’équipement répond globalement aux besoins des entreprises, à l’exception toutefois des capacités épuratoires qui tendent à se réduire. Cela complique souvent le développement des entreprises endogènes et hypothèque parfois l’arrivée de nouvelles industries. Chaque année, ce n’est pas négligeable, ce sont en moyenne 140 hectares supplémentaires qui sont aménagés, et une centaine qui sont commercialisés aux entreprises. Le volume actuellement disponible à la vente est de l’ordre de 900 hectares ; 900 autres hectares sont d’ores et déjà programmés pour être aménagés dans les prochaines années. Plusieurs communes auront alors une offre foncière supérieure à 50 voire 100 hec tares, dont par exemple Loudéac, Ploufragan, Aucaleuc, Lamballe, Lannion, pour ne citer que les principales. Évidemment, les conditions de raccordement de ces équipements aux infrastructures routières, mais aussi dans certains cas ferroviaires, seront déterminantes quant à leur capacité à intéresser les entreprises. En conclusion, le schéma Armoroute doit sans doute poursuivre au moins trois objectifs d’un point de vue démographique et économique : 1) accompagner ces dynamiques, 2) participer, autant que possible, à la disparition des inégalités territoriales, 3) enfin, et surtout, participer à l’émergence des conditions nécessaires à la préservation de l’environnement et des paysages costarmoricains. 108 109 VII Le schéma de déplacements Patrick Leweurs Je ferai une transition pour évoquer les déplacements dans le département, et rappeler que, dans ce domaine, il existe un certain nombre de schémas qui sont en vigueur et qui offrent aussi des services, notamment autour de l’activité maritime : le port du Légué représentera très prochainement 340 000 tonnes, grâce aux décisions qui ont été prises en termes d’activités de commerce ; le port de Tréguier, c’est pratiquement 100 000 tonnes, une activité de pêche ainsi qu’une activité de plaisance qui sont florissantes. Dans le domaine du transport ferroviaire, les liaisons affichent une activité intense au niveau des gares de Saint-Brieuc et de Guingamp, et les chiffres vont vraisemblablement évoluer de façon extrêmement importante lors de la réalisation de la future LGV. La politique départementale en matière de déplacements s’inscrit dans un cadre global qui privilégie aussi l’agenda 21, le transport public routier de personnes avec le réseau Tibus, Directeur des infrastructures et des transports du conseil général des Côtes d’Armor. 110 le transport ferroviaire pour lequel le conseil général est investi au titre de l’investissement concernant la suppression des passages à niveau. Des politiques particulières s’exercent pour la création d’un schéma d’aires de covoiturage, la mise en place d’un service internet : « ticoto.fr », qui propose aujourd’hui plus de 400 déplacements quotidiens aux adhérents, un plan de déplacement des administrations en cours de réalisation au sein de l’agglomération briochine, un schéma vélo, tout en étant cohérents avec la mise en place de l’innovation au service des routes et des déplacements. Le réseau de transports publics de voyageurs Tibus, ce sont 20 lignes de transport de voyageurs, une centrale de mobilité (le 0 810 22 22 22), qui est maintenant connue de tous les Costarmoricains, avec en moyenne 350 appels par jour pour de l’information sur les transports publics, un tarif unique à 2 euros, la mise en place d’un transport à la demande sur l’ensemble des lignes régulières, ce qui a permis une augmentation de 100 000 voyageurs en un an, puisque nous transportons 405 000 voyageurs payants annuellement pour un coût total de 8 millions d’euros. Mais ce sont aussi des perspectives qui visent à améliorer les relations domiciletravail avec des horaires adaptés, une meilleure offre pour les jeunes, y compris au centre Bretagne, une meilleure interconnexion avec le réseau de transports urbains (réflexion qui menée au sein du comité d’agglomération) avec la création de parkings de dissuasion et une billettique unique au niveau de la région Bretagne, et le transport des personnes à mobilité réduite. Les déplacements alternatifs concernant le covoiturage font l’objet d’un schéma directeur des aires de covoiturage 111 qui prévoit la création de 15 aires de stationnement, la création du site « ticoto.fr », le plan de déplacement des administrations pour l’agglomération briochine. Enfin, un schéma de déplacements intègre la politique des déplacements que l’on dit doux, autour d’un schéma vélo, qui s’articule avec les schémas régional et national, autour de liaisons structurantes et itinéraires de substitution, permettant la circulation sur des voies dédiées que l’on appelle voies vertes ou voies partagées : Véloroute. L’objectif est de favoriser, avec un maillage en cohérence avec les décisions régionales ou nationales, la pratique du vélo, qui devient de plus en plus prégnante et qui favorise notamment le développement du tourisme. Cet ensemble de réflexions s’inscrit dans la réflexion globale du conseil général sur ce qu’on appelle les ITS. VIII ITS, systèmes de transports intelligents Isabelle Dussutour Je présenterai les tenants et aboutissants du dossier ITS – systèmes de transports intelligents – initiative remarquable et remarquée du conseil général des Côtes d’Armor. À partir des constats qu’on ne se déplacera pas demain comme hier ; qu’on ne se déplacera pas avec sa voiture à cause des problèmes de parking ; que, pour le transport des marchandises, il y a des goulots d’étranglement ; que de plus en plus de personnes voudraient faire appel aux transports en commun, mais qu’il est difficile de couvrir le territoire… ; à partir de ces constats, les transports doivent mieux appréhender leur environnement, et être capables d’interagir avec leur environnement, donc, d’intégrer les technologies nouvelles, les technologies de télécommunications, l’usage du wifi, du wimax, etc. Le conseil général s’est investi dans des systèmes de transports intelligents autour de quatre enjeux principaux : Chargée de mission ITS au conseil général des Côtes d’Armor. 112 113 1) Le transfert de compétences : du fait de la décentralisation, le conseil général doit gérer son réseau routier et une bonne part des transports en commun. Il s’agit de les adapter et de les doter de toutes les technologies modernes qui permettent de les rendre sûrs. 2) La sécurité routière : il y a des initiatives de l’État, mais aussi une demande citoyenne forte et exprimée. Là aussi, les systèmes de transports intelligents permettent, en informant mieux l’usager, de garantir une meilleure sécurité et un usage plus rationnel de la route. 3) L’accessibilité pour tous : de nombreux usagers – on a parlé de démographie – vieillissent et ont donc besoin de pouvoir se déplacer même s’ils n’utilisent pas la voiture et les catégories défavorisées qui n’ont pas accès à l’automobile doivent pouvoir se déplacer ; les transports doivent de plus en plus réagir à la demande, donc là aussi de nouvelles technologies sont à intégrer. 4) Le développement durable : les problèmes de carburant, mais aussi toutes les pressions par rapport à la qualité de l’air, du bruit, nécessitent d’intégrer dans les systèmes de transports de nouvelles technologies tout en assurant ce que l’on appelle un service public de mobilité. Puisqu’on ne peut pas interdire l’usage de l’automobile dans notre département, on doit utiliser les technologies pour gérer et utiliser plus intelligemment les véhicules automobiles et les transports en commun. Si on veut faire du transport intelligent, on doit intégrer des technologies que l’on trouve en Allemagne ou en Grande-Bretagne. Mais, en analysant le tissu économique et universitaire costarmoricain, on se rend compte que nous avons un important fonds de commerce en termes d’élaboration de ces nouvelles technologies tournées vers les transports. Lannion évidemment, autour des télécoms, a suscité le développement d’un grand nombre d’entreprises qui travaillent dans le domaine des ITS. Nous avons une bonne dizaine de laboratoires qui travaillent en Bretagne dans ces domaines-là. Mais c’est une filière qui est très éparpillée, où travaillent séparément les télécoms, les industriels de l’automobile – Peugeot à Rennes et des sous-traitants dans le département – et les travaux publics qui construisent les routes. Il fallait faire travailler ensemble tous ces secteurs pour essayer de donner un dynamisme économique autour de la filière ITS qui était à construire. Il y avait besoin d’une structure de coopération et de gouvernance : l’association ITS Bretagne, créée en 2005, rassemble les acteurs, c’est-àdire les chercheurs, les entreprises et les collectivités, pour agir à plusieurs niveaux : – Le niveau de l’expérimentation : nous avons des compétences dans nos entreprises costarmoricaines, et nous avons en parallèle des besoins et une stratégie politique en termes de déplacements. Ce sont des opérations qui sont menées par la DIT au sein du conseil général : Tibus, le covoiturage, les itinéraires vélo. Nous avons en place un projet d’information routière pour que les usagers des routes des Côtes d’Armor, lorsqu’ils sortent de l’autoroute, trouvent un service qui soit de même niveau qu’un service autoroutier. Nous travaillons également avec la FNTR pour mieux intégrer les ITS dans le quotidien des transporteurs, pour qu’ils gèrent mieux leurs itinéraires, consomment moins de carburant, et rentabilisent un peu plus leurs véhicules. On utilise les compétences locales pour répondre à des besoins politiques. 114 115 – Plus en amont, au niveau de la recherche, nous travaillons dans des projets de recherche appliquée autour des compétences des laboratoires, de l’Enssat à Lannion ou d’autres laboratoires locaux. Et nous participons également à des grands programmes nationaux et européens. Nous avons en particulier le programme Sari (Surveillance automatisée des routes pour l’information) qui est un programme appliqué aux routes départementales permettant d’analyser les trajectoires de véhicules, la dangerosité de la route et de proposer un service d’informations soit en bord de route, soit embarqué dans le véhicule, destiné aux conducteurs pour limiter les risques d’accidents mais aussi fluidifier le trafic. Plusieurs itinéraires ont été identifiés comme sites test dans les Côtes d’Armor, avec analyse des trajectoires, analyse des comportements des usagers, qui aboutiront à des tests de signalisation et de prévention d’accidents. Le programme européen Safespot est un programme équivalent, cofinancé par la Commission européenne, et qui porte aussi sur l’analyse des points noirs et des difficultés sur les routes départementales. Nous avons aussi des projets d’aménagement et de modernisation du système de détection des contresens, sur l’axe Guingamp-Lannion, qui devient un axe d’expé rimentation reconnu puisqu’il y a eu une émission de M6 qui a décrit ce qu’on faisait sur cet axe-là et ailleurs dans le département. Dix collectivités bretonnes participent à cette association autour des ITS. L’idée est de soutenir les expérimentations. Nous sommes en négociation à la fois avec l’État et la Commission européenne pour obtenir des cofinancements pour déployer des expérimentations de grande ampleur à la fois autour des pôles les plus flagrants et sur les routes départementales. Cette association a également pour but de développer la sensibilisation aux usages des ITS à destination des élus, des directeurs départementaux. Quinze projets sont lancés autour de la signalisation intelligente, des transports en commun et de la sécurité routière. Nous allons participer au congrès mondial des ITS à Pékin où nous ferons une communication pour expliquer aux communautés chinoises la bonne manière d’intégrer les transports intelligents dans une stratégie politique. Nous sommes, une fois de plus, cités en exemple. 116 117 Questions Claudy Lebreton, président du conseil général Le calendrier d’actualisation du schéma départemental d’aménagement routier consiste, pour Félix Leyzour et la Direction des routes, à faire le tour des territoires-pays où nous rassemblerons les élus, avec la collaboration de l’Association des maires de France et son président René Régnault, qui accepte de participer à ces réunions de concertation, d’échange, où un représentant de l’assemblée des maires s’exprimera dans chaque pays au côté du représentant du conseil général. Les conseillers généraux peuvent organiser des réunions. Je crois qu’il faut laisser libre cours à l’imagination, à la responsabilité, à la liberté. Nous publierons des rapports d’étape sur l’évolution du schéma épartemental et, si tout se passe bien, nous serons en d mesure d’adopter un schéma lors du vote du budget primitif de l’année 2008. Il s’agit d’un gros travail, étant donné que tout cela vient en même temps : le transfert des compétences voulu par les lois de décentralisation, l’accueil du personnel de l’Équipement dans la Direction des routes, le PDMI que nous allons négocier au cours de l’année 2007 mais qui vaudra pour les années 2009 et au-delà, le grand chantier de la RN 164, qui est une de nos priorités, même si nous n’en avons pas la responsabilité pleine et entière, la RD 700, plus communément appelée le Triskell, et la rocade de l’agglomération de Saint-Brieuc, sans oublier les autres axes routiers. Plus précisément, sur le territoire du sud de Goëlo, j’ai eu l’occasion d’intervenir sur la nécessité d’imaginer la desserte du sud-Goëlo et notamment la déviation de ce point noir qu’est Binic à des moments forts. Et si, par le passé, ces moments forts étaient concentrés pendant les périodes estivales et de grands week-ends, aujourd’hui, avec le développement de ce secteur côtier en termes d’habitat, de résidences secondaires mais aussi principales, le trafic est important toute l’année. Il est donc impératif de nous donner les moyens pour résoudre ce problème de desserte du sud-Goëlo, de Pordic à Saint-Quay-Portrieux et Tréveneuc. Loïc Raoult, conseiller général du canton d’Étables Nous allons donc débattre, avant son adoption en janvier 2008, du schéma Armoroute : routes et modalités de transport. On voit bien que, même si la route doit rester très importante dans l’avenir, les modalités de déplacement autres que la route peuvent être fortement incitées. Par exemple, le mode plus doux de déplacement qu’est la bicyclette peut être favorisé dans les liaisons départementales de commune à commune. Dans le secteur de Plélo et Châtelaudren, des aménagements relativement modestes permettent déjà de se déplacer en toute sécurité et nous devons y être sensibles. Il faut imaginer les aménagements de nos routes départementales, lorsque nous avons la possibilité d’y faire des travaux de réfection, pour faire au moins sur l’un des côtés un dégagement mixte qui puisse recevoir à la fois des piétons et des vélos. Charles Josselin À l’origine de cette planification, nous croyions beaucoup à la planification et à la décentralisation. Mais c’était avant la décentralisation. Il est intéressant d’imaginer l’originalité de la démarche alors que nous n’avions pas de services, pas d’administration rattachée. Il fallait presque quotidiennement négocier avec le préfet pour qu’il accepte de laisser ses services à notre disposition pour faire ce travail. Nous avons, de ce point de vue, bien travaillé. La difficulté était surtout d’organiser, dans la durée, la pérennité de l’effort et nous pouvons nous flatter d’avoir un réseau routier que beaucoup d’autres départements nous envient. C’était aussi la période où nous avions besoin de financer les politiques, parce qu’elles étaient préalablement inexistantes. L’idée nous était venue qu’un kilomètre de route permet de faire beaucoup de choses sur le plan de la culture ou de l’aide aux associations sportives. Cela nous avait amenés à aller un peu moins vite que 118 119 ce qu’on aurait voulu sur le plan des investissements, parce qu’il fallait bien trouver le moyen de financer d’autres politiques qui nous paraissaient importantes. Aujourd’hui, le niveau d’exigence, les normes, la demande sociale, c’est-à-dire l’exigence en termes de sécurité, font que la dépense au kilomètre est incontestablement plus élevée. Ces nouvelles normes nous coûtent évidemment plus cher. L’ossature, en matière d’infrastructures, est aboutie : il reste désormais à parfaire certains itinéraires. Je ne pense pas que nous ayons à envisager, hormis quelques rocades, des travaux aussi considérables que ceux que nous avons réalisés. Mais il est vrai qu’il nous faut tenir compte de quelques évolutions, y compris démographiques. En ce qui concerne l’aménagement, je rappellerai que nous avons besoin de réfléchir à la liaison Plancoët-Saint-Malo parce qu’il nous faudra certainement, à moyen et long termes, nous donner les moyens d’éviter la paralysie d’un secteur qui connaît aujourd’hui une augmentation très importante de population, sans oublier la vocation touristique évidente qui est la sienne. Sur les ITS, il est vrai que j’ai toujours regardé avec un peu de circonspection le lancement de cette aventure technologique. Je ne suis pas convaincu par toutes les implications possibles de la technologie. L’idée d’être localisé partout et en permanence me fait peur. De la même manière qu’on nous a vendu des ordinateurs capables de tout faire, pour s’apercevoir qu’on n’a pas besoin de toutes leurs capacités, je voudrais être sûr, s’agissant des ITS, que nous sommes capables, en continu, de suivre la montée en puissance des applications des ITS d’une part, et que d’autre part on sache trouver des financements extérieurs au département. J’entends bien qu’il s’agit de favoriser la matière grise locale mais pas seulement costarmoricaine. Les applications sont censées aller très au-delà des Côtes d’Armor et, s’il est bon d’aider la recherche, il n’est pas indispensable que les contribuables costarmoricains soient les seuls à financer une recherche qui est encore loin d’avoir atteint ses objectifs en matière de production et donc d’emploi. La démarche est intéressante, et bonne pour notre image, mais je souhaite que nous ayons un bon suivi et que nous trouvions des financements qui permettent de partager en quelque sorte la charge du fardeau, qui risque de nous coûter cher. 120 121 Michel Brémont, vice-président du conseil général, conseiller général du canton de Saint-Brieuc-ouest Ce schéma nous pose plusieurs défis : – Nous devons assurer la continuité du déplacement en véhicules individuels, mais nos axes de circulation doivent permettre aussi le déplacement de transports alternatifs, transports collectifs, vélos, piétons. Il faut que nos assises de voiries permettent à terme des aménagements adaptés à une multimodalité future et sans avoir à racheter et à refaire des travaux d’investissements lourds : zones de stationnement, parkings de covoiturage, etc. Il faut que tout cela soit d’emblée prévu dans notre schéma. – Nous avons fait des itinéraires de longue distance comme Guingamp-Lannion, par exemple. Est-ce qu’il faut encore faire des grandes distances plutôt que d’améliorer la qualité et la sécurité des déplacements, donc des parcours, sans forcément intervenir sur la totalité de la longueur de l’itinéraire ? C’est une question lourde parce que, selon la réponse qu’on y apporte, tel ou tel territoire peut se sentir lésé par rapport à ce qui a été fait par le passé. – La question du poids-lourd est importante dans notre département agricole parce que l’assise routière pour une charge à l’essieu d’un 44 tonnes qui va à la ferme n’est pas du tout la même, en termes d’investissement, que pour des 38 tonnes. C’est une question économique non seulement pour les transporteurs mais aussi pour les investissements du département. – Une autre question se pose, c’est le remodelage de l’appartenance des routes. Nous avons des voiries d’intérêt intercommunal de 5 000 ou 6 000 véhicules par jour et des voiries départementales de 300 véhicules par jour. Nous devrons avoir une réflexion sur des échanges de voiries ou des participations d’entretien croisées. – À propos des revêtements de routes, on nous reproche de ne pas faire que de l’enrobé sur nos routes. Faut-il faire de l’enrobé sur toutes les routes, sachant qu’il faudra non seulement faire des casse-vitesse parce que les voitures iront trop vite, mais encore les refaire plus souvent puisque c’est moins résistant ? Par ailleurs, on nous dit que quand on ne fait pas de l’enrobé, c’est beaucoup moins confortable. Je n’entrerai pas dans la querelle mais ce n’est certainement pas neutre, et financièrement et techniquement. – Enfin, sur le plan du développement durable, qu’en est-il des revêtements ? Doit-on ou non généraliser des Vincent Le Meaux, conseiller général du canton de Pontrieux La voirie départementale fait partie de ces infrastructures qui sont visibles par la population et lorsqu’on investit dans un collège, dans un port ou sur une route, c’est tout de suite visible. Mais c’est aussi visible lorsque les choses ne vont pas bien, lorsque des voiries se dégradent, que les problèmes de sécurité restent sans solution. Notre mobilisation en tant qu’élus locaux, en tant que conseil général, est très importante sur cette question qui fait partie du quotidien de la population, sur laquelle nous sommes sollicités. En matière de sécurité, il y a des choses à faire sur l’ensemble du réseau pour améliorer la circulation. Un recensement des signalisations doit pouvoir être fait par nos services, par les conseillers généraux. Cela peut aller du panneau jusqu’au rond-point, les petits points noirs, l’existence de difficultés à certains endroits. En ce qui concerne la pertinence des réseaux A et B, on constate que le réseau A est performant : on n’a pas de difficulté à aller d’un point à un autre. Par contre, le réseau B va de 300 véhicules par jour, voire 50 véhicules par jour jusqu’à 4 000 véhicules par jour. Il faut réexaminer la pertinence de la propriété du département concernant ces routes qui sont très longues et très coûteuses à remettre en état pour un flux de circulation qui ne sera pas amélioré. Nous avons là aussi un recen- 122 123 revêtements d’origine non pétrolière ? Doit-on s’orienter vers des revêtements d’origine biologique, agro, etc., si nous voulons être un département phare dans les ITS et/ou peut-être aussi un département pilote dans notre politique de durabilité de l’environnement routier ? sement à faire. Cela peut être mis en lien avec le fonds de solidarité aux communes qui a été mis en place. Concernant l’impact des flux touristiques sur certains chefs-lieux de cantons : ils ont de gros soucis de circulation qui vont en s’intensifiant. Il faudra regarder de près les questions de l’intermodalité puisque nous avons une ligne de chemin de fer, un port : nous avons des vocations à donner aux cantons, et la voirie départementale doit aussi s’y inscrire. Pontrieux fait partie des communes qui n’ont pas vu d’aménagement routier depuis quelques années ; le contournement a été pris en charge par la commune de Quimper-Guézennec. Il faudra améliorer le contournement d’une partie de ce territoire. Et nous avions imaginé aussi la mise en réseau de nos pôles touristiques sur le secteur du Goëlo et du Trégor, La Roche-Jagu, l’Abbaye de Beauport…, par une boucle de vélo. Le département peut être moteur sur ce point, ce qui permet d’allier l’économique et le tourisme. Marie-Reine Tillon, conseillère générale du canton de Matignon Je reviens sur la proposition des pistes cyclables à côté de nos routes départementales. Il faudrait qu’elles soient clairement matérialisées, c’est-à-dire non pas une bande de goudron avec une ligne blanche, cela ne sécurise pas les cyclistes et les automobilistes s’y étalent largement. Il faut clairement séparer les deux et prévoir, pour toutes nos nouvelles routes départementales, cette piste cyclable à côté. Par ailleurs, il me semble qu’il faut raisonner en fonction des besoins liés aux infrastructures nouvelles et des augmentations de population. Par exemple, sur notre secteur, nous avons une augmentation de population importante, les flux touristiques s’étalent maintenant sur toute l’année. Et nous avons un gros secteur d’engorgement entre Saint-Cast-le-Guildo et Saint-Malo, sur toute la route de la côte qui fait le lien entre Cap-Fréhel et Saint-Malo. Il faut imaginer quelque chose de nouveau, de plus fluidifiant. Nous allons avoir notre port départemental de Saint-Castle-Guildo qui entre en service en 2009 ; cela va induire davantage de circulation et avec des véhicules et des bateaux derrière. Il faut revoir cette entrée de SaintCast-le-Guildo via Ploubalay. J’aimerais savoir ce qui est inscrit au programme complémentaire, concernant la RD 768. La RD 768 et la RD 13, toujours en direction de Saint-Cast-le-Guildo, sont dans ce programme de même que la RD 794. Dans les infrastructures nouvelles, je pense aux équipements nouveaux que nous mettons en place nous-mêmes ou en lien avec les communes : par exemple la caserne de sapeurs-pompiers de Matignon ; si nous devons faire un rond-point à cet endroit, il faut l’imaginer avec déjà la prévision de revoir cette portion de RD 13. La signalétique, tant verticale qu’horizontale, ne représente pas de gros travaux. Il faut que ce soit l’une de nos priorités. Pour le classement, dans la mesure où on veut fluidifier le trafic, on peut faire valoir qu’il y a des voies qui ne méritent pas d’être dans le classement départemental et cela peut être fait au moment de la négociation du schéma. Sur les déplacements, il est difficile de changer les habitudes, de sensibiliser aux transports collectifs, 124 125 mais il y a un vrai problème d’information : dans les mairies, c’est tout juste si les dépliants sont à la disposition du public. Les réunions de pays que nous organisons pourraient être l’occasion de faire aussi la promotion de Tibus, de Ticoto. Dans ce cas, il faut aussi inviter les secrétaires de mairie, qui sont en contact avec le public. Yves-Jean Le Coqu, conseiller général du canton de Châtelaudren L’opération de Châtelaudren consiste à doubler une voie départementale par un cheminement qualifié de mixte : piétons-cyclistes. Elle n’est pas à mettre au crédit du département. Il ne faut pas que ce soit le conseil général qui ait la responsabilité et la charge totale de telles infrastructures. Il faut travailler en partenariat avec la commune qui accueille le tracé, que ce soit pour les acquisitions nécessaires ou pour l’entretien, qui se résume pour l’instant à un itinéraire sablé. Je pense qu’on ne pourra déployer des linéaires assez importants de voies sécurisées de ce style que si tout le monde s’y met. Je dirai qu’il faut aussi savoir profiter de l’opportunité de réaménagements de réseau. La voirie départementale a vocation à transporter des personnes et des marchandises, mais c’est aussi une voie de communication. À l’avenir, qui paiera ? Les nouvelles techniques de communication entraînent l’abandon progressif du fil de cuivre ; à d’autres endroits, on nous parle du wifi. Et le département s’intéresse aussi à la desserte en fibre optique pour son territoire. Est-ce que, dans le cadre de voiries départementales, il ne serait pas nécessaire de prévoir 126 obligatoirement la pose des fourreaux, même inutilisés ? Lorsqu’on est en train de faire les travaux, cela coûte moins cher de dérouler du plastique sous une chaussée ou en accotement de chaussée que de redéfoncer par des engins parce que telle collectivité ou tel syndicat n’a pas pensé à réaliser certains travaux, que ce soit au niveau d’adduction d’eaux pluviales ou de réseaux téléphoniques. Monique Le Clézio, conseillère générale du canton de Mur-de-Bretagne Nous avons vu l’intérêt de réfléchir sur la mobilité et non pas que sur les aménagements d’infrastructure. Cela nous permet de voir que nous devrons croiser la réflexion sur les infrastructures avec les évolutions économiques, les évolutions touristiques, mais aussi notre volonté d’aménagement équilibré du territoire. Cela nous amène à réfléchir sur les axes de communication sur lesquels non seulement les véhicules individuels vont circuler pour des déplacements individuels, mais également du transport en commun. Parallèlement, l’apport des nouvelles techniques d’information devra être intégré dans la réflexion. Nous aurons ensuite des réflexions qui seront déclinées à l’échelle du pays. En tant que conseillers généraux, aurons-nous la capacité d’intégrer les éléments d’information pour alimenter notre réflexion sur ce débat autour des voies routières ? Lorsque nous serons à l’échelle des pays, saurons-nous apporter des éléments d’informations complémentaires pour chacun des acteurs qui seront nos partenaires dans ces réflexions ? Il serait intéressant que nous puissions avoir le même niveau d’information sur nos territoires-pays pour pouvoir 127 réfléchir dans de bonnes conditions avec l’ensemble des collectivités locales qui seront associées à nos réflexions. Par exemple, lorsque nous voudrons réfléchir sur la sécurité, sur des technologies d’aide à la conduite, si les collectivités locales n’ont pas le niveau d’information qui est le nôtre sur les ITS, nous risquons d’avoir de grandes difficultés à l’échelle des pays. Il faudra également intégrer la fréquentation des itinéraires au regard des pôles d’activités économiques et touristiques. Certaines voies qui sont dans le réseau B et qui ont des fréquentations importantes devraient passer dans le réseau A et inversement : comment les clés de répartition financière se feront ? Sur le développement touristique, qui est un enjeu important puisque nous sommes parmi les dix premiers départements touristiques, la fréquentation s’effectue essentiellement sur les 10 à 15 kilomètres de frange de côte. Nous savons bien que nous ne pourrons pas continuer à augmenter la fréquentation avec les mêmes moyens de communication. Il y a un enjeu important à inciter aux autres modes de déplacement, vélo notamment, mais peut-être inciter plus significativement vers du déplacement en transport souple à la demande ou en transport collectif. L’intermodalité est un sujet à approfondir sur plusieurs secteurs du département où on ne pourra pas continuer à augmenter les voies pour les désengorger. Il y a des liens à trouver entre développement touristique, aménagement du territoire, développement économique et introduction des nouvelles techniques de communication : la recherche nous permettra, dans les années à venir, d’envisager les choses de façon significativement différente, d’autant plus que les aspects environnementaux sont des aspects essentiels. Notre département est fréquenté pour la qualité de ses paysages et donc l’impact des véhicules et des infrastructures joue également. 128 129 Prosper Besnard, conseiller général du canton de Plélanle-Petit Concernant la technique innovante mise en œuvre rue de Brest à Dinan : la pollution est-elle piégée ou est-elle détruite ? Par ailleurs, je tiens à rappeler les difficultés du côté nord de la RN 176 face à Dinan, sur les sorties de Quévert et de Corseul. Jean-Pierre Legoux, conseiller général du canton de Plouagat Nous irons dans les réunions dans les pays, avec les propositions d’aménagement dans les secteurs qui nous paraissent les plus difficiles. Je voudrais me faire l’avocat du réseau B. Dans beaucoup de secteurs, il est relativement long et très hétérogène. Il est quelquefois dangereux, parce que peut-être pas assez large, avec souvent une insuffisance de visibilité et de marquage ; il arrive même, quand la voie n’était pas assez large, qu’on ne puisse pas la marquer. Il faut travailler ce côté sécuritaire sur ce réseau B en signalétique horizontale et verticale. Il y a des aménagements qui peuvent être relativement modestes à faire. Michel Lesage, vice-président du conseil général, conseiller général du canton de Langueux On voit que le développement routier, notre schéma, l’aménagement des routes sont à la fois des enjeux de développement économique et touristique, des enjeux d’aménagement du territoire, mais aussi des enjeux de sécurité, de fluidité, de temps de circulation d’un espace à un autre, bref, de maillage. Le conseil général, quand il est maître d’ouvrage, fait des travaux importants, mais il y a des secteurs qui posent problème et qui sont sous structures juridiques différentes. Le conseil général, dans ces cas, n’est pas maître d’ouvrage. Par exemple, l’agglomération briochine et en particulier la rocade urbaine, le carrefour SBDA, le rond-point de Brézillet autour de Cinéland. Nous ne sommes pas maître d’ouvrage, les montages financiers se font à hauteur de 70 % pour la Cabri et la ville et 30 % pour le conseil général. Celui qui a la responsabilité de financer les 70 % ne bougeant pas, nous avons là des secteurs extrêmement dangereux de circulation où il passe des milliers de voitures et rien ne se fait. Dans mon canton, nous avons fait d’importants travaux intéressants à la gare d’Yffiniac mais il y a d’autres endroits, comme le carrefour de HyperU, très dangereux. Comment faire en sorte que, sur les secteurs identifiés comme dangereux, nous puissions, même si nous ne sommes pas maître d’ouvrage, débloquer ce genre de situations ? Gérard Quilin, conseiller général de Plouaret Je m’inscris dans ce débat à propos du canton de Plouaret et la liaison Lannion-Bégar’ha en passant par Plouaret. Beaucoup de camions passaient depuis quelques mois sur Plestin-Saint-Michel-en-Grèves. Depuis la déviation, ils viennent de plus en plus sur Plouaret. Il faudrait donc prévoir la déviation de Plouaret d’ici quelques années parce que cela devient 130 un bouchon. De plus, à Bégar’ha, nous avons la plus grande entreprise de transport du département qui diffuse aussi tous ses camions. Bien sûr, quand ils passent de Bégar’ha vers Lannion, ils passent aussi sur Plouaret, ce qui fait un flux important. À propos du débat sur l’enrobé, nous avons des cantons où les routes communales sont faites en enrobé, mais on voit encore des bicouches et des tricouches sur la voirie départementale qui est dans un autre état que la voirie communale. Certaines communes ont pratiquement fini leur voirie communale, et on voit que les tracteurs ou les vélos ne circulent pas de la même façon sur un bicouche que sur un enrobé. En ce qui concerne le réseau B, on découvre que certaines voies sont départementales, alors qu’elles ne devraient pas l’être : il faut aussi mettre de l’ordre dans notre réseau B. Yvon Garrec, conseiller général du canton de Bégard Je voudrais aborder les problèmes d’acoustique : je suis intervenu à propos de la 767 et des nuisances sonores que subissent les riverains. Il faut intégrer ces problèmes et les solutions dans le projet de schéma. C’est une question de qualité de la vie. Yves Leroux, conseiller général du canton de Lézardrieux Notre réseau routier départemental est reconnu de qualité en tant que facteur de désenclavement mais également de développement économique. L’aide départementale à la voirie appuie les communes pour des travaux de rénovation de voirie structurante, reliant des communes entre elles, ou allant sur des sites touristiques 131 très fréquentés. À notre niveau, nous avons des difficultés du fait de l’activité de la zone légumière : matin et soir, nous avons des ralentissements très importants du fait de convois agricoles qui fréquentent les RD 786 et RD 7. Ne serait-il pas possible de mettre en place des voies lentes à certains endroits (la largeur des accotements le permet) ? Cela fluidifierait le trafic et éviterait des imprudences dans les dépassements de véhicules. Félix Leyzour Nous avons eu beaucoup d’interventions, cela indique tout l’intérêt porté aux infrastructures rou tières, et on voit bien qu’il arrive même d’entendre que ce n’est pas nécessaire de faire des travaux sur les routes. Chacun a soulevé des problèmes, d’ordre général ou d’ordre sectoriel, auxquels il faudra évidemment répondre. J’en évoquerai plusieurs : – La déviation de Binic : elle faisait partie du programme complémentaire et s’inscrit dans le schéma qui va venir. Mais il faudra que les élus de ce secteur soient d’accord sur le tracé. Nous avons expliqué notre démarche pour le secteur du Goëlo. Je crois que les choses ont avancé. De toute façon, il n’y a que par le débat qu’on peut faire avancer les projets. Le secteur Plancoët-Saint-Malo viendra aussi en débat. – Les ITS : je suis d’accord sur l’intérêt qu’il y a à trouver des moyens pour les applications, de façon à ce que cela prenne toute la place que cela devrait prendre. – Les revêtements : il y a un débat puisque sur notre réseau B, nous avons pas mal de kilomètres qui sont traités autrement qu’avec de l’enrobé, alors que dans les communes, on traite également les voies communales. C’est sur la durée que nous verrons ce qui est le plus intéressant, notamment du point de vue de la sécurité quelquefois. Il faut dire aussi que les revêtements que nous faisons sont généralement faits par le parc. Le parc aujourd’hui ne pratique pas de l’enrobé. – Les travaux routiers, comme certains grands équipements, sont ce qui est visible pour le conseil général dans un secteur. Il fut un temps où il n’y avait que les routes départementales dans les différents cantons ; aujourd’hui, nous avons également les collèges, mais pendant très longtemps c’était en fonction du réseau routier qu’on jugeait la présence du département. On peut dire qu’avec les actions qui ont été faites au titre de la sécurité, nous n’avons plus dans notre département ce qu’on peut appeler des points noirs. Par contre, nous avons encore des points plus difficiles et des opérations de sécurité à réaliser. – Les routes du secteur de Matignon : les études ont avancé parce qu’elles figuraient également au programme complémentaire. Elles doivent parvenir en terme de programmation mais nous allons rentrer dans les discussions un peu partout : il y a de fortes 132 133 Christian Provostt, conseiller général du canton de SaintBrieuc-sud Je ferai la proposition d’expérimenter un Tibus spécial qui partirait de la ville chef-lieu du conseil général tous les dimanches d’été pour aller à la Roche-Jagu. On réclame aussi, dans l’agglomération briochine, de tenter un car, par exemple le matin : les gens pique-niquent, visitent, vont au spectacle, et rentrent dans l’après-midi. Je crois que ce serait gagnant pour tout le monde. chances pour que les opérations qui étaient déjà dans le programme complémentaire, qui sont prêtes en termes d’étude, viennent plus rapidement ; nous devrons en décider. Par rapport au casernement des pompiers, ce n’est pas simplement le conseil général qui a décidé, cela a été fait également en accord avec la commune. On doit pouvoir signaler la sortie des véhicules du casernement des pompiers. – La voie piétons/vélos de Châtelaudren à Plélo : il s’agit d’une particularité, puisque le conseil général a acheté le terrain et la commune a réalisé les travaux avec une subvention du conseil général sur le produit des amendes. La topographie permettait de le faire : la commune de Plélo est très proche de Châtelaudren, qui n’a pas beaucoup de territoire. Il s’ensuit un vaet-vient permanent entre les deux bourgs, et je pense que la réponse qui a été trouvée là était bonne. Est-ce qu’il faut la généraliser ? C’est une autre question, mais il faut toujours trouver des réponses adaptées aux pro blèmes tels qu’ils se posent dans les différents secteurs. – Le problème des fourreaux : la communication c’est le transport, mais il n’y a pas que le transport. Malgré tout, ce n’est pas parce qu’on communique plus qu’on se déplace moins. L’expérience montre qu’on communique plus mais on se déplace également plus. Est-ce qu’il faut mettre des gaines partout ? Dans des endroits spécifiques où nous vous avons fait des travaux importants, comme autour de Lannion, autour de Loudéac, tout est en place. Sur les autres routes, lorsqu’il y a des accotements qui permettent ensuite de faire passer les fourreaux, si on décide de faire par exemple de la fibre optique, le problème sera réglé le moment venu et on ne cassera pas les routes. Là aussi, il y a eu une démarche qui a permis de répondre aux caractéristiques de la voie et en même temps une réflexion qui permet de répondre aux problèmes quand ils se poseront. – La réflexion concernant les itinéraires, l’économie, l’aménagement du territoire, le tourisme : il est vrai que nous avons intérêt à bien croiser nos informations en vue des aménagements avec celles des communes. Les conseillers généraux seront présents mais également les maires, qui nous apporteront leurs informations. – Le transfert des routes : nous allons discuter avec les maires ; certains transferts s’effectuent déjà, mais jusqu’à présent, c’est un transfert qui correspond au classement et reclassement. Est-ce qu’il faudra transférer les routes communales dans le réseau départemental sans qu’il y ait de mouvement en sens inverse ? Il ne faut pas oublier que généralement, quand on transfère, il faut faire des travaux tout de suite sinon les maires ne les acceptent pas. Mais il est vrai qu’il faut revoir un peu le réseau dans certains endroits. – L’innovation dans le secteur de Dinan : le dispositif qui a été fait n’est pas simplement pour récolter de la pollution mais également pour qu’elle soit détruite, ce qui répond au problème soulevé par les écologistes. – Le réseau B : nous avons ici la caractéristique d’être un département de production agricole avec beaucoup de transport, en amont et en aval des élevages. Ces routes du réseau B sont très fréquentées par des véhicules très lourds, ce qui pose des problèmes spécifiques. – Aménagements et sécurité : autour de Saint-Brieuc, nous avons ce qu’on appelle la rocade d’agglomération sur laquelle nous allons démarrer des travaux cette 134 135 année. Nous en sommes maître d’ouvrage, à 70 %, et les collectivités participent, pour 30 %. Pour ce qui est de la rocade urbaine, qui est beaucoup plus intérieure à l’agglomération, c’est le prolongement d’une route départementale. Les études qui ont été faites, comme sur le secteur qui a déjà été aménagé, sont conduites avec un financement de 50 % pour le conseil général et 50 % pour les agglomérations. Les travaux seront à 70 % pour l’agglomération et 30 % pour le conseil général. C’est vrai que nous en avons beaucoup parlé mais nous n’avons pas beaucoup avancé : la Cabri a la compétence en matière économique, mais les communes gardent une compétence en matière d’urbanisme et sont nécessairement impliquées. Nous faisons en sorte que les communes soient présentes de telle sorte que ce qui a été envisagé ne soit pas repoussé et qu’on puisse déjà faire ce qui avait été décidé. Ensuite, nous avancerons concrètement en commençant peut-être par les carrefours principaux et l’isolation phonique. – La RD 11, qui va de la RN 12 pour aller jusqu’à Lannion en passant par Plouaret : la route a été aménagée au-delà de Plouaret et en deçà de Plouaret. Il reste le problème du contournement de l’agglomération parce qu’elle n’est pas facile à franchir pour un trafic qui est de plus en plus important. Nous étudierons ce problème conjointement avec les questions du côté de Plestin-les-Grèves pour aller également vers Lannion. – Les problèmes d’acoustique : il est vrai que les travaux que nous faisions ne prenaient pas en compte cette dimension concernant les attentes sociales. Ce que nous avons fait par exemple du côté de Buhulien est d’une autre qualité que ce qui avait été fait au droit de Bégard. Mais nous réservons, dans la mesure où nous terminons les travaux sur la totalité de l’itinéraire, une part de requalification. Cela ne veut pas dire que nous allons refaire mais, pour donner une certaine continuité, il y aura sûrement certains réajustements. – La zone légumière : c’est un des problèmes que nous avons à résoudre dans ce secteur, puisque nous avons une circulation relativement lourde et lente par rapport à la circulation générale. Est-ce qu’il faut prévoir des voies lentes ? Est-ce qu’il ne faut pas faire des essais par des créneaux de dépassement à certains endroits qui apporteraient plus de sécurité ? Ce sont ces interventions qui permettent d’y réfléchir. – Le transport collectif et les travaux routiers impliquent fortement l’activité économique du département. Il ne s’agit pas seulement de faire des travaux routiers, mais de répondre aux besoins du transport et à ceux du transport collectif. Tibus a largement été cité, également pour des expérimentations. Les réunions qui vont se tenir ne manqueront pas de faire remonter beaucoup de choses. Les élus auront certainement à appuyer des demandes qui seront faites et aussi à défendre la stratégie qui sera celle du conseil général. Je ne doute pas que ces réunions soient intéressantes : nous en aurons dégagé les conclusions dans quelque temps également. 136 137 Michel Brémont Pour réaliser une caserne de sapeurs-pompiers, c’est le GIS qui est le maître d’ouvrage. Les communes qui les paient indiquent à quel endroit il faut la faire. Les conditions pour la localiser sont nombreuses et complexes. On a le sentiment que lorsqu’on construit une caserne des sapeurs-pompiers, on va générer un trafic extraordinaire : il faut relativiser les choses, que ce soit pour Étables ou Matignon. Si on rassemble les deux casernes de Saint-Cast-Matignon et les trois de sud-Goëlo, on arrive dans les deux cas à moins de trois interventions par jour en moyenne. Bien sûr, il y a les entrées et sorties de véhicules personnels de sapeurspompiers ou de service, mais cela ne justifie pas des aménagements majeurs. Pour autant que je sache, il y a une seule caserne dans le département qui a besoin d’aménagement de sécurité, c’est celle de Lannion, où l’on coupe un axe rapide extrêmement fréquenté. Pour le reste, il faut des aménagements sûrement routiers ou de circulation, mais pas autre chose. Patrick Leweurs, directeur des Infrastructures et des Transports au conseil général À propos du problème de pollution, il s’agit d’une technique qui fonctionne en laboratoire et à l’état d’expé rimentation en site naturel, suivie par un laboratoire indépendant des Ponts et Chaussées. La technique mise en œuvre est la même que celle utilisée pour les écrans anti-bruit qui ont été installés à Buhulien ou à Bégard sur l’itinéraire de Guingamp-Lannion. Elle consiste à transformer les oxydes d’azote qui produisent les brouillards au-dessus des grandes villes lorsqu’il fait très chaud, par un effet catalyseur sur l’oxyde de titane qui se trouve dans les revêtements et par la combinaison des ultraviolets avec l’oxygène de l’eau pour obtenir un produit stable qui est ensuite lessivé par l’eau. 138 Conclusion par Claudy Lebreton Arrivés au terme de cette session extraordinaire, nous pouvons tirer quelques conclusions. Les interventions des uns et des autres ont constamment été faites dans le souci d’une dimension départementale et de transversalité des problèmes rencontrés dans tous les territoires costarmoricains. Cette dimension départementale était constamment éclairée par une approche locale et une parfaite connaissance du réseau routier communal et départemental. Pour aborder la question du schéma départemental, nous disposons aujourd’hui d’outils que nous n’avions pas il y a trente ans, et cela peut être important en matière de travaux à faire. Nous avons, sur les axes les plus circulés, la connaissance exacte de l’évaluation du trafic : les jours, les heures, les mois, les poidslourds, les véhicules légers, et sur une segmentation précise des itinéraires. Par exemple, sur un itinéraire de Saint-Brieuc à Paimpol, nous savons bien que sur certaines parties, le trafic peut être de 3 000, 4 000 ou 5 000 véhicules par jour, et sur d’autres de 10 000 véhicules par jour. Nous avons des trafics à certains moments de l’année avec des flux touristiques plus 139 importants qu’à d’autres. Cette possibilité de bien connaître l’état et la composition du trafic me paraît extrêmement importante pour les choix que nous serons amenés à opérer. Dans le cadre du schéma départemental, les trois termes essentiels sont : fluidité, sécurité et responsabilité. Nous devons renforcer cette approche d’itinéraire que nous avions déjà dans le passé. Nous avions adopté notre classification en réseau A et réseau B, il est temps de modifier un peu cette classification. On voit bien qu’il y a désormais le niveau départemental, des routes départementales structurantes interurbaines, mais nous avons également des dessertes routières d’agglomération. Les finalités de ces axes sont différentes selon qu’elles portent des migrations alternantes quoti diennes, parfois des migrations touristiques, de weekend ou sur certaines périodes de l’année. Entre des routes départementales comme celle entre Langouhèdre sur la RN 12 pour aller à Collinée ou à Plémet, entre deux routes nationales, la fonctionnalité et les objectifs du réseau routier ne sont pas les mêmes que sur l’axe Saint-Brieuc-Saint-Quay-Plouha, ou de l’autre côté de la baie, entre l’axe qui part de Saint-René pour aller via Planguenoual sur Pléneuf-Val-André. Ce sont, de chaque côté de la baie de Saint-Brieuc, des itinéraires d’agglomération élargie, du même ordre que lorsqu’on va de Saint-Brieuc à Malakoff pour desservir Plaintel, et même désormais jusqu’à L’Hermitage-Lorge qui est complètement dans l’orbite proche de l’agglomération briochine. Le cas se retrouve sur Lannion, Dinan, les plus grandes agglomérations départementales. Cette classification des axes routiers en fonction de leur objectif et de leur finalité me paraît un travail que nous devrons finaliser de façon encore plus pointue que dans le passé. Enfin, l’organisation de notre administration d’entre tien de la voirie départementale n’a pas été abordée. Nous avions une organisation dans un partenariat entre la direction des infrastructures et des transports et des services de l’Équipement. Il faut que nous ayons le souci de pouvoir calquer cette administration départementale, pour la partie entretien de la voirie et de la voirie au quotidien. Mieux le réseau routier est entretenu chaque jour, moins on aura des gros travaux. Il faudrait que nous mettions en place cette adéquation entre, d’un côté, l’investissement et, de l’autre côté, l’entretien et le fonctionnement de nos routes départementales. Sur les aspects environnementaux, il faut regarder de très près le service du fauchage des routes départementales et accotements. L’expérience de fauchage tardif a donné des résultats positifs : c’est source d’économie, et il y a un réel impact sur les écoulements des eaux au bord des routes. C’est tout cet ensemble que nous devrons aborder au cours de cette actualisation du schéma départemental. 140 141 Nous avons initié cette idée de sessions extra ordinaires, en commençant par celle consacrée à l’agriculture. C’était un travail préalable à l’actualisation d’Armoroute. Les élus ont été nombreux à la suivre. Nous veillerons à continuer dans ce sens. Table des matières Avant-propos, Claudy Lebreton............................. 5 Première partie Les transports : perspectives, évolution et innovations I – Une prospective des transports 2050, Jean-Noël Chapulut........................................ 13 II – Évolution des transports et de la logistique à l’échelle des territoires français, breton et costarmoricain, Hervé Le Jeune, Philippe Plantard................. 36 III –Innovation en matière de transports, de déplacements et de sécurité routière, Guy Bourgeois................................................. 60 Seconde partie La politique costarmoricaine des transports Cette session extraordinaire du conseil général des Côtes d’Armor et le présent ouvrage ont été préparés par la Direction des infrastructures et des transports, sous la direction de Patrick Leweurs, avec la collaboration de Raymond Pécheux et Martine Leblanc. 142 IV –Infrastructures, modes, activités de transport des hommes et des marchandises, Félix Leyzour................................................. 87 V – Les réalisations dans le domaine routier depuis l’adoption du schéma routier en 1978, Raymond Pécheux............................ 99 143 VI –Le contexte socio-économique, Thierry Connan.................................................. 105 VII – Le schéma de déplacements, Patrick Leweurs.............................................. 110 VIII –ITS, systèmes de transports intelligents, Isabelle Dussutour........................................... 113 Conclusion, Claudy Lebreton................................. 139 Achevé d’imprimer en février 2008 sur les presses de Corlet Imprimeur, 14110 Condé-sur-Noireau pour le compte des éditions de l’Aube Le Moulin du Château, F-84240 La Tour d’Aigues Conception éditoriale : Sonja Boué Numéro d’édition : 1331 Dépôt légal : février 2008 N° d’impression : Imprimé en France 144