La situation des forces écosocialistes en
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La situation des forces écosocialistes en
La situation des forces écosocialistes en Espagne Une analyse de Pedro González de Molina Soler Pour comprendre la situation de l’écosocialisme dans la politique espagnole, il est nécessaire de faire quelques considérations préalables. En Espagne, l’écologisme se divise en trois facettes : l’écologisme comme mouvement social, l’écologisme comme parti politique strictement écologiste et les forces politiques écosocialistes. L’écologisme comme mouvement social a beaucoup de poids en Espagne non à cause de son nombre d’activistes (qui reste peu important) sinon pour la capacité d’influence qu’il exerce sur la société. Il a été la figure de proue dans la lutte contre le nucléaire comme contre l’activité spéculative centrée sur le secteur de l’immobilier (par exemple dans l’affaire de l’hôtel à El Algarrobico, menacé de destruction), celle contre les activités spéculatives centrées sur les ressources naturelles et leur gestion (ex : la lutte contre la privatisation du Canal Isabel II à Madrid, qui approvisionne la capitale en eau) ou la lutte contre les activités polluantes en général (comme les manifestations de la « bicicritica » ou la lutte contre le projet de mine à ciel ouvert en Galice). Ces luttes diverses ont permis de donner une voix au mouvement écologiste dans les médias, ainsi qu’une capacité de mobilisation et de légitimité au sein de la population. Depuis les années de crise, l’évidence du réchauffement climatique et les diverses actions des mouvements sociaux, une conscience s’est formée progressivement parmi les citoyens concernant la nécessité d’appliquer en Espagne une politique écologique, surtout en matière énergétique ou sur des questions comme le recyclage même si il reste beaucoup de chemin à parcourir. En Espagne, opèrent d’autres mouvements importants comme « Ecologistas en Acción », « Greenpeace », « La Plateforme pour un nouveau modèle énergétique » ceux initiés par quelques membres d’ATTAC, etc ; ils ont développés quelques villages de transition et des groupes de consommation, des potagers urbains et des groupes politiques décroissants revêtant une certaine importance depuis quelques années. Il faut aussi noter la présence en Espagne de chercheurs de renom national et international comme Jorge Reichman, Manuel González de Molina, José Manuel Naredo ou Martínez Alier. L’écologisme comme parti strictement écologiste est passé par de nombreux avatars étant donné son implantation assez inégale au sein du pays, où il a eu peu de succès dans une époque de consumérisme démesuré et de présence d’une bulle immobilière. Le mouvement a dû faire face à un problème de fragmentation très fort après les premières tentatives, ou à des unions difficiles avec d’autres forces qui aboutirent à des ruptures plus au moins traumatisantes (comme avec le PSOE ou IU notamment en Andalousie où ils formèrent un gouvernement qui conserva son nom après la première scission). Le dernier essai de formation d’un parti écologiste pur fut en 2011 quand fut créé EQUO, avec l’appui des verts allemands, qui ne sont pas arrivés à décrocher d’élu(e)s. Les raisons de cet échec sont multiples : le fait que des partis verts ne fusionnèrent pas avec lui, parce qu’il n’a pas réussi à créer un espace dans le pays car « la question sociale » (inégalité, chômage et pauvreté) a empêché la possibilité qu’un parti politique seulement vert arrive à occuper un espace suffisant pour devenir influent. C’est pour cela qu’EQUO fit alliance avec COMPROMÍS (une force nationaliste de gauche avec une composante écosocialiste en son sein). À cela il faut ajouter le fait qu’en Espagne l’écologisme est un phénomène transversal du point de vue programmatique : presque toutes les forces politiques (excepté certaines de droite) reprennent l’écologisme ou des politiques plus ou moins vertes dans leurs programmes (du capitalisme vert jusqu’à la décroissance), ce qui affaiblit la possibilité d’existence d’un parti strictement vert. L’écosocialisme a eu plus de chance. Beaucoup de forces politiques se revendiquant de cette idéologie ont réussi à se consolider en Espagne, en tuant le cliché que l’écologisme n’avait de futur que dans les régions industrielles (le Pays Basque ou la Catalogne surtout), puisqu’il a réussi à s’étendre dans des régions où règne une tradition de lutte paysanne (comme l’Andalousie, Murcie ou la Galice) et où il n’y a presque pas d’industries. L’alliance entre l’écologisme et le socialisme paraît avoir un futur en Espagne grâce à son engagement concernant la résolution de « la question sociale » ou de la transformation du monde en un lieu soutenable. Les forces écologistes et écosocialistes en Espagne et leur situation actuelle EQUO fait partie du parti vert européen, est soutenu par les verts allemands et maintient son alliance avec COMPROMÍS, ce qui lui permettra d’avoir un eurodéputé lors de la seconde moitié de la législature du Parlement Européen (Florent Marcellesi). Il a à peu près 1858 militants, avec une certaine force à Madrid et une implantation inégale en Espagne (sans affiliés en Catalogne à cause d’un accord avec ICV). Actuellement, ils travaillent dans les « GANEMOS » (plateformes citoyennes qui ont comme projet de se présenter aux élections locales avec des partis politiques et mouvements sociaux), même si il est possible qu’ils n’aient pas d’espace politique pour gagner des élu(e)s depuis l’apparition de PODEMOS. Iniciativa Per Cataluña les Verts (ICV), est un parti politique écosocialiste implanté en Catalogne qui est fédéraliste et catalaniste. Il est allié à Izquierda Unida (EUIA en Catalogne) issu du vieux PSUC (Parti Socialiste Unifié de Catalogne, parti frère du PCE), et qui, après une débâcle électorale devint écosocialiste. C’est un parti politique qui dispose d’une large représentation institutionnelle, tant au Parlement espagnol qu’au Parlement Européen, au Parlement catalan, dans les mairies et les conseils provinciaux. Il fait partie du Parti Vert Européen et a des très bonnes relations avec SYRIZA et la GUE. Cependant, il se trouve aujourd’hui dans une situation critique étant donné qu’il s’est vu piégé par la situation créée par le mouvement indépendantiste en Catalogne. Cette situation a relégué la « question sociale » au second plan au profit de la « question nationale ». Sur cette question, ICV a joué un jeu d’équilibriste entre ses postures fédéralistes et la défense du « droit à décider » (qui a été utilisé habilement par les indépendantistes pour faire passer l’idée de l’indépendance). Ceci aura comme conséquence une perte d’influence au niveau électoral, si les enquêtes d’opinion ne se trompent pas et surtout depuis l’apparition de PODEMOS (une force politique qui se dit fédérale). Ils disposent de plus ou moins 8000 militant(e)s, participent au Réseau Écosocialiste Européen et au « GUAYEM » à Barcelone, une plateforme à laquelle appartient Ada Colau, une activiste contre les expulsions locatives. Espazo Ecosocialista est un parti implanté en Galice, il est écosocialiste, féministe, galicien et radicalement démocrate. Il provient d’une scission du PSOE gallois qui constitua le parti avec d’autres forces politiques. Il participe actuellement à la Coalition Alternativa Galega de Esquerdas (AGE), formation comptant 9 députés dans le Parlement galicien et une eurodéputée d’ANOVA (un parti nationaliste de gauche qui participe à la coalition). Espazo est en train de travailler avec les forces politiques constituant l’AGE dans les « GAÑEMOS » (Ganemos en galicien) et dans les « MAREES » (une autre plateforme citoyenne). Il a plus ou moins 300 militant(e)s. Les Ecosocialistes de la Région de Murcie, qui fait partie de la coalition de la Gauche Unie (IU), participe au Réseau Écosocialiste Européen et a quelques conseillers municipaux dans la région. Ils participent au « GANEMOS MURCIA » qui a pour ambition de détruire le poids du PP dans la région avec l’aide d’autres forces de gauche. Ils comptent au sein de leurs membres José Coy, un des fondateurs de la Plateforme des Affectés par l’Hypothèque (PAH), des Marches de la Dignité et du Front Civique de Julio Anguita. Il est également membre du Conseil Fédéral d’ Izquierda Unida et est en train d’initier un projet de récupération de terres pour les chômeurs. Initiativa por Andalucía, parti politique fondé récemment, fédéré avec Izquierda Abierta (qui fait partie d’IU), fédéral, féministe, écosocialiste, andalou, etc… se constitua il y a quelques années à partir de l’alliance de gauche Izquierda Abierta Andalucia et Primavera Andaluza » quelques membres de l’ancienne « Il existe plusieurs petits partis écosocialistes participant à des coalitions ou indépendants, qui se déclarent en grande partie autonomistes ou nationalistes (de la Communauté Autonome à laquelle ils appartiennent) comme « Alternativa Sí se Puede » (Tenerife), Iniciativa del Poble Valenciá (qui participe à la coalition Compromís), Construyendo la Izquierda-Alternativa Socialista (CLI-AS),etc. Il y a aussi d’autres petits partis verts moins importants comme « Gira los Verdes-Madrid », Confederación de los Verdes, Los Verdes de Valencia, etc… avec plus ou moins de force qui sont pour la plupart alliés avec IU. La majorité de ces partis participent à Espacio Plural, une plateforme à laquelle appartiennent aussi des formations politiques qui ne sont pas nécessairement écologistes comme la Chunta Aragonesista, el Partido Andalucista ou Nueva Canarias. Espacio Plural est une initiative d’ICV pour construire un front de gauche fédéraliste et écologiste face à la crise mais ne prétend pas être un projet politique mais un espace de rencontre. La Gauche Unie (IU), coalition de partis de gauche appartient à la GUE et participe au Réseau Écosocialiste Européen. IU a une petite section d’écosocialistes en son sein, sans compter les Ecosocialistes de la Région de Murcia, et quelques groupes programmatiques et de débat en Andalousie et dans d’autres Communautés Autonomes. Cependant le poids important du PCE au sein de la coalition fait que la défense du productivisme y reste prédominante même si leur programme contient quelques éléments écosocialistes. Ils ont plus au moins 30000 militants. PODEMOS, nouvelle formation politique, qui appartient aussi à la GUE et au Réseau Écosocialiste Européen, dit défendre un programme « vert » même si la première version de leur programme économique fut élaborée par deux spécialistes considérés keynésiens : Juan Torres, économiste d’ATTAC et Vincence Navarro, professeur de Politiques Publiques. Izquierda Anticapitalista (IA) participe à PODEMOS qui même si elle compte en son sein plusieurs intellectuels écosocialistes comme Jorge Reichman ou Esther Vivas, entre autres, ne peut avoir une influence réelle à cause du poids du secteur dirigé par Pablo Iglesias. Podemos a plus au moins 318000 inscrits sur sa page web (ils ne payent pas de cotisation et ne sont pas nécessairement actifs et ne se donc pas des militants au sens propre du terme) tandis que IA peut compter sur quelques 800 militants. La survie, disparition ou ascension de ces partis dépendra des résultats des différents scrutins de cette année 2015. Élections au Royaume-Uni: l’arbre des élus cache la forêt des électeurs Une analyse de Thierry Bingen La plupart des commentateurs ont paresseusement qualifié le résultat des dernières élections britanniques de triomphe conservateur et de lourde défaite travailliste. Ce n’est vrai que lorsqu’on traduit la volonté populaire en sièges à la Chambre des Communes. Cependant, en termes démocratiques, le système électoral britannique (uninominal à un tour) est le pire qui soit, à part l’états-unien (qui, lui, a atteint l’objectif final, c’est à dire empêcher qu’il n’y ait pratiquement jamais plus que deux partis ou candidats en lice); ce système crée une distorsion énorme entre l’expression de la volonté des électeurs et leur représentation. Intéressons-nous donc au vote populaire, le seul qui vaille la peine pour les petites formations; d’abord une vue globale: En termes absolus, mais surtout en termes d’évolution, on voit que, hormis les falots Lib Dems qui se sont pris une casquette après leur lamentable collaboration au gouvernement Cameron, les mouvements de voix sont fort différents des rodomontades des Conservateurs. La « victoire » à droite va clairement à la droite la plus rétrograde (UKIP). Les conservateurs ne progressent que de 0,8%, MOINS BIEN que les travaillistes (+1,4). Les verts, qui font mieux avec +2,8%, ne sont devancés que par les nationalistes écossais (+3,1%). Ceux-ci ont clairement profité de l’attitude déplorable des travaillistes lors du référendum d’indépendance mais de nouveau durant cette campagne-ci (notamment à propos du caractère inaliénable de la base de missiles balistiques du programme Triton, comme si les chômeurs de Leeds ou Sheffield en avaient à cirer de la puissance nucléaire militaire de la Grande-Bretagne); les travaillistes ont perdu de nombreuses voix et la quasitotalité de leurs sièges en Écosse (ce qui explique leur -48 en sièges); ils mettront du temps avant de pouvoir refaire surface à Glasgow et Edimbourg, probablement pas avant l’indépendance de l’Écosse (qui, sauf deus ex machina, est inéluctable; juste une question de temps…) On voit aussi que la débâcle travailliste en Écosse masque leurs petits progrès en Angleterre. Est-ce que l’autre fils Milliband aura plus de sens politique? Voyons les détails, classés par vote populaire décroissant: On voit clairement la montée inquiétante des proto-fascistes UKIP. On voit aussi que les Greens (dont pas mal de membres se sentiraient bien chez VEGA…) sont le sixième (et dernier…) parti à récolter des voix qui se comptent en million(s). Après, on tombe dans le folklore… Si l’on regarde les mouvements massifs de voix, on n’en voit donc que depuis les Lib Dems et vers l’UKIP; il est cependant peu vraisemblable que ce transfert soit direct, notamment vu leurs divergences irréconciliables quant à l’Europe. Une analyse plus fine permettra sans doute de mieux mesurer ces transferts via les conservateurs et les travaillistes. Un glissement, puisqu’il n’y a pas d’accroissement significatif des voix pour les conservateurs, du centre-droit Lib Dem vers la droite conservatrice puis de celle-ci vers la droite xénophobe est « normal ». Un glissement semblable du centredroit vers le centre travailliste compensé par un transfert de ce centre vers l’UKIP est vraisemblable et inquiétant; c’est une situation semblable à la désertion des électeurs ouvriers et chômeurs depuis le PS et le PCF vers le FN en France. Pour être complet, il faut ajouter que, vu ce système électoral inique, nombre d’électeurs se sentent obligés de voter « utile » dès le premier et seul tour: espérant bloquer les conservateurs, ils votent Labour, alors qu’ils voudraient vraiment voter Green. Il faut être courageux pour se rendre au bureau de vote en étant absolument certain que son bulletin terminera sa carrière dans les poubelles de l’Histoire. f
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