le risque de traitement d`un patient étranger
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le risque de traitement d`un patient étranger
EN COUVERTURE doit lui fournir une facture détaillée afin de faciliter sa réclamation personnelle auprès de son assureur. À LA DÉFENSE DES DROITS DES MÉDECINS PAR ME CHRISTINE KARK [email protected] AVOCATE ET MÉDIATRICE Rappelons que s’il vous arrive d’être confronté à ce type de cas, des grilles de tarification des actes médicaux sont mises à votre disposition sur les sites respectifs de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ) et de la Fédération des médecins spécialistes du Québec (FMSQ). AVEC LA COLLABORATION DE MARIE DUSSAULT, STAGIAIRE EN DROIT LE RISQUE DE TRAITEMENT D’UN PATIENT ÉTRANGER La Loi canadienne sur la santé établit les règles applicables aux habitants du Canada afin de leur garantir, notamment, un droit à l'assurance maladie publique et aux services assurés, et ce, selon des modalités uniformes. Au Québec, la détention par un résident québécois de la carte-soleil lui donne droit à l’assurance maladie et, par conséquent, lui donne accès aux services de santé couverts par ce régime. Mais qu’en est-il des étrangers? Ont-ils des droits similaires d’accès aux soins de santé? Un patient étranger vient vous consulter et son état nécessite des soins de santé. Votre premier réflexe est de l’aider. Malheureusement, une complication survient lors du traitement et un préjudice pour le patient en résulte. Vous n’avez pas de nouvelles de ce patient et vous oubliez cet incident. Quelques années plus tard, un huissier se présente à votre cabinet pour vous informer qu’une action en justice a été intentée contre vous. Votre premier réflexe est alors de communiquer avec l’assureur ou l’association qui assure la couverture de votre responsabilité professionnelle pour savoir ce que vous devez faire et pour obtenir de l’assistance juridique afin de défendre vos intérêts. À votre grande surprise, on ne peut pas vous fournir d’assistance juridique puisque les procédures ont été intentées dans le pays d’origine du patient et que les soins que vous lui avez fournis sont considérés comme « non urgents ». De plus, la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ) estime que les soins que vous avez fournis à ce patient ne vous seront pas payés, car ils sont considérés comme « des services non assurés ». Comment 24 Santé inc. juillet / août 2011 Le cas spécifique des immigrants indigents Les immigrants indigents, c’est-à-dire les demandeurs d’asile, les réfugiés, ainsi que les personnes détenues aux fins d’immigration, n’ont souvent pas d’assureur privé. Dans ce cas spécifique, deux options sont alors possibles. D’abord, « le ministre québécois de la Santé peut donner instruction à la RAMQ de permettre la couverture immédiate des ressortissants de pays qui vivent une situation de catastrophe. Cette mesure a été appliquée lors de la reprise de la guerre civile au Liban, de même qu’après le tremblement de terre survenu en Haïti1 ». Il suffira alors au médecin s’informer auprès de la RAMQ pour savoir si ces services sont couverts. éviter ce genre de situation? Faisons une revue des règles applicables pour répondre à cette question. QU’EST-CE QU’UN « PATIENT ÉTRANGER »? Afin de faciliter la compréhension de cet article, il est important de noter que le terme « patient étranger » inclut tant les non-résidents canadiens que les immigrants ou les réfugiés, puisqu’il ne suffit pas de se trouver sur le territoire québécois ou d’y être né pour y être assuré. Au Québec, seules les personnes qui répondent aux conditions d’admissibilité prévues par la Loi sur l’assurance maladie du Québec sont couvertes par le régime d’assurance-maladie. Par ailleurs, l’immigrant indigent peut avoir été admis au Programme fédéral de santé intérimaire (PSFI) lors de son entrée au Canada et détenir une couverture de soins de santé pour un an. Si tel est le cas, il aura en sa possession un formulaire INN-1442. REMBOURSEMENT DES ACTES MÉDICAUX PAR LA RAMQ Il est prudent de toujours vérifier le contenu de ce formulaire avant l’administration de soins, car celui-ci vous indique si le patient est admissible aux soins de santé et vous informe de la date de la fin de sa couverture. Les non-résidents, les touristes et les immigrants Pour qu’un professionnel de la santé puisse être rémunéré par la RAMQ, il faut non seulement qu’il rende des services assurés au sens de la Loi sur l’assurance maladie, mais également qu’il prodigue ces services à une personne assurée, c’est-à-dire une personne qui réside ou qui séjourne au Québec et qui est dûment inscrite à la RAMQ. Les services rendus à un patient qui n’est pas couvert par la RAMQ (qui, autrement, auraient été appelés « services assurés ») deviennent en quelque sorte des services non assurés, car le patient en question n’est pas une personne assurée au sens de la loi. Ainsi, avant de traiter un patient, il importe que le médecin, dans la mesure du possible, s’assure que son patient est couvert par la RAMQ sous peine de ne pas être rémunéré pour ses services. En réalité, cet exercice est difficile, voire parfois impossible à faire, pour le médecin qui voit un patient hospitalisé. Peut-on prétendre que le centre hospitalier, en admettant le patient, a pris la responsabilité des honoraires professionnels du médecin? C’est une question intéressante qui pourrait faire l’objet d’un prochain ar- ticle. Généralement, le patient étranger n’est pas couvert par la RAMQ et il est alors personnellement responsable du paiement des honoraires du médecin. S’il détient une assurance privée, le médecin pourra facturer ses services à son assureur et décider d'en accepter les modalités, notamment des tarifs maximaux. Sinon, il pourra réclamer directement ses honoraires au patient. Dans ses démarches auprès de l’assureur du patient, le médecin doit obtenir l’approbation du patient, s’assurer que les soins prodigués à ce dernier sont couverts et lui préciser que la facturation par l’établissement hospitalier ne comprend pas ses honoraires professionnels. D’un autre côté, si le médecin opte plutôt pour une réclamation directe au patient, il Dans tous les cas, bien qu’un patient bénéficie de ce programme, il n’est couvert que pour les soins de santé essentiels et urgents pour le traitement et la prévention de problèmes médicaux sérieux, la contraception, les soins prénataux et obstétricaux, les médicaments sur ordonnance essentiels, les immunisations essentielles au Canada, les soins psychiatriques en milieu hospitalier prodigués par un psychiatre et les services de transport en ambulance pour soins urgents. 1 DESROSIERS, Michel, Le Médecin du Québec, volume 45, n° 5, mai 2010, p.2. juillet / août 2011 Santé inc. 25 EN COUVERTURE QUOI FAIRE EN CAS DE POURSUITE INTENTÉE À L’ÉTRANGER Il faut d’abord contacter l’assureur qui protège votre responsabilité professionnelle pour vérifier si vous recevrez de l’aide dans le cas où vous êtes visé par une poursuite intentée à l’étranger. Lors d’une poursuite intentée au Canada, les assureurs fournissent généralement de l’assistance aux médecins, tandis qu’ils refusent souvent d’assurer votre défense si le recours est intenté à l’extérieur du Canada. La logique derrière ce refus est la suivante : une poursuite à l’étranger peut impliquer des coûts de représentation exorbitants (par exemple, retenir un avocat pour faire des représentations dans le pays d’origine du patient). Pour les membres de l’ACPM, selon un document publié sur son site Internet, il semble exister tout de même deux exceptions à cette règle générale. Dans des circonstances d’urgence ou d’extrême urgence où les soins sont administrés au Canada à des non-résidents, un médecin membre peut recevoir l’aide de l’ACPM. De même, l’ACPM assistera normalement le médecin qui fournit des soins non urgents au patient, si ceux-ci ne sont raisonnablement pas disponibles dans le pays d’origine de ce dernier. Or, si le recours est intenté à l’extérieur du Canada et que les soins ne sont pas jugés urgents et qu’ils sont d’ailleurs disponibles dans le pays d’origine, vous ne serez probablement pas admissible à l’assistance de l’ACPM pour assurer la défense de vos intérêts. 26 Santé inc. juillet / août 2011 MIEUX VAUT PRÉVENIR QUE GUÉRIR. Dans tous les cas, tout médecin ou organisme de soins de santé devrait, avant de fournir des soins de la santé, demander au patient non-résident de signer une convention dans laquelle ce dernier accepte l’application des lois canadienne et québécoise et la compétence judiciaire territoriale du Québec en cas de litige. Un conseiller juridique peut vous aider à préparer ce document et un modèle de convention qui peut être adaptée à votre situation est également disponible sur le site internet de l’ACPM. Un organisme ou un médecin qui prévoit fournir des soins de santé non urgents d’une manière régulière ou plus qu’occasionnelle à un patient étranger devrait souscrire à une assurance responsabilité qui le protège spécifiquement contre les poursuites à l’étranger. La raison en est simple : même si vous faites signer au patient une convention dans laquelle il reconnaît que tout conflit, mésentente ou litige résultant des soins de santé sera décidé par les tribunaux québécois, cela peut décourager le patient de vous poursuivre depuis son pays d’origine, mais n’élimine pas cette possibilité. De plus, il est loin d’être certain que le pays d’origine du patient étranger reconnaisse, en vertu de sa législation, la validité de ce genre de convention. L’évaluation de « disponibilité ou non » des soins de santé dans le pays d’origine du patient peut aussi être difficile à effectuer, de même que celle « d’urgence » ou de « non-urgence » de l’intervention. Si vous prévoyez fournir des soins de santé à un patient étranger, vous devez garder à l’esprit que vous n’êtes en aucun cas à l’abri d’une poursuite éventuelle. De plus, vous devriez également vous assurer que vous serez bel et bien rémunéré pour votre service par le patient ou par son assureur. Aussi, pourquoi ne pas vérifier dès maintenant quelle est la protection offerte par votre assureur pour que vous puissiez mieux évaluer le risque relié au traitement des non-résidents canadiens? ⌧ Ce texte n’engage aucunement la responsabilité de l’auteure ni celle de l’ACPM, car les informations concernant l’assistance fournie aux membres de cette association ont uniquement été obtenues à partir des documents publiés sur son site Internet. Autre texte à la page suivante