La gestion des prix

Transcription

La gestion des prix
La gestion des prix à l’intérieur des
réseaux de magasins
MÉMOIRE
Présenté par
SOBEYS Inc.
à
La Commission sur l’avenir de l’agriculture
et de l’agroalimentaire québécois
Le 6 juin 2007
Monsieur le président,
Madame et Monsieur les commissaires,
C’est avec plaisir que nous participons à cette consultation régionale. Permettez-moi
dans un premier temps de vous présenter brièvement l’entreprise que je représente.
Sobeys Inc., dont le siège social est situé à Stellarton en Nouvelle-Écosse, est un chef de
file de la vente au détail et de la distribution de produits alimentaires à l’échelle
nationale. Sobeys exploite dans les 10 provinces canadiennes un réseau de plus de
1 300 magasins corporatifs et affiliés.
SOBEYS QUÉBEC
Sobeys Québec est une division de Sobeys Inc. Elle compte plus de 4 200 employés et
son siège social est situé au 11281, boulevard Albert-Hudon à Montréal-Nord.
Au Québec, l’entreprise approvisionne en biens et services environ 1 500 marchands
indépendants. La majorité de ces marchands sont affiliés à l'une des bannières
suivantes : IGA, IGA extra, Les marchés Tradition, Marché Bonichoix et Rachelle-Béry.
De plus, près de 500 dépanneurs arborent diverses autres bannières.
Sobeys Québec exploite également sept centres de distribution dans les villes de
Montréal-Nord, Longueuil, Québec, Rivière-du-Loup, Anjou, Abitibi-Témiscamingue et
Cap-aux-Meules.
Par l’entremise de ses centres de distribution et de ses bureaux de Montréal-Nord et de
Québec, Sobeys Québec offre à ses détaillants une gamme complète de services à
valeur ajoutée dans les domaines du marketing, de la modernisation des magasins, des
technologies, de l’exploitation de détail, de la formation, du développement commercial,
de la publicité de même que de la supervision en magasin. Elle crée ainsi de la valeur de
façon durable pour ses magasins corporatifs, ses marchands affiliés, ses fournisseurs et
ses employés.
Dernièrement, Sobeys Québec a fait l’acquisition du distributeur alimentaire Achille de la
Chevrotière (ADL) desservant l’Abitibi-Témiscamingue et le nord de l’Ontario. Sobeys
Québec est fière de pouvoir dire qu’elle est présente à travers tout le Québec et que
cette acquisition lui permet d’occuper la deuxième place du marché québécois du
secteur de l’alimentation.
BANNIÈRE IGA
IGA a fait son apparition sur le marché québécois en 1953, à une époque où le nombre
d’épiceries
indépendantes
connaissait
une
forte
croissance
dans
la
province.
Exclusivement axée sur l’alimentation, la bannière IGA répond aujourd’hui aux besoins
des consommateurs dont le mode de vie actif ne permet aucun compromis en matière
de qualité, de fraîcheur et de commodité. La forte acceptation du concept IGA extra par
les consommateurs a fait d’IGA la première bannière en importance au Québec.
Les 256 magasins de la bannière IGA au Québec se répartissent de la façon suivante :
220 affiliés, 16 corporatifs et 20 coopératives. Les supermarchés IGA comptent près de
23 000 employés au Québec.
RÉSEAU DE DÉTAILLANTS AFFILIÉS
Sobeys Québec regroupe majoritairement un réseau de marchands indépendants.
Constamment à la recherche de nouvelles façons de mieux servir leur clientèle, ceux-ci
sont également très impliqués au sein de leur collectivité. Les diverses campagnes de
financement, les initiatives locales ainsi que leur participation dans divers organismes le
prouvent d’année en année.
Le succès de Sobeys Québec est intimement lié à celui de ses marchands affiliés, lequel
repose sur l’attention constante qu’ils portent au service et à l’écoute du consommateur.
INTRODUCTION
Dans le cadre des présentations régionales de la Commission, nous avons décidé de
vous entretenir d’un sujet qui suscite énormément de questionnement autant de la part
des consommateurs que de nos partenaires d’affaires, c’est-à-dire la gestion des prix.
Nous sommes heureux d’avoir l’occasion aujourd’hui de démythifier le sujet de la gestion
des prix à l’intérieur des réseaux de magasins de détail à partir de modèles couramment
utilisés dans l’industrie. Au moyen de notre mémoire et de notre présentation, nous vous
brosserons un portrait réel de la situation.
CONSIDÉRATIONS COMMERCIALES ET FINANCIÈRES
Les prix des produits sont sans contredit un des éléments les plus importants de la
gestion d’une entreprise, qu’il s’agisse d’un commerce de détail ou non. Les prix offerts
dans nos réseaux de magasins représentent des éléments critiques pour des
considérations à la fois commerciales et financières.
D’une part, les considérations commerciales nous contraignent à établir une politique de
prix qui doit répondre à deux critères : être en mesure de générer une perception
positive de nos prix auprès des consommateurs et ce, face à notre concurrence et
positionner la personnalité propre de chacune de nos bannières.
D’autre part, les considérations financières nous obligent à mettre en place une politique
de prix qui doit générer des marges de profit suffisantes pour couvrir les coûts
d’exploitation d’une unité commerciale tout en permettant un revenu d’investissement
raisonnable au détaillant.
Il est à noter qu’une politique de prix efficace doit constamment réussir à satisfaire
simultanément ces deux considérations. Prioriser la rentabilité risque de nuire à la
concurrence du magasin et ainsi faire fuir la clientèle. Baisser les prix risque de nuire à
la rentabilité du magasin et peut en menacer sa survie. C’est un équilibre fragile et
incontournable.
STRATÉGIE DE PRIX
Il est essentiel de considérer les facteurs et les principes suivants quand on parle de la
dimension commerciale :
Le gestionnaire, selon la nature de son réseau, doit se positionner en fonction de deux
grandes stratégies de prix :
ƒ
La stratégie du « HIGH & LOW »
Cette stratégie consiste à offrir au consommateur des prix de tablettes
avantageux avec des réseaux concurrentiels comparables, accompagnés de prix
promotionnels, la plupart du temps hebdomadaires, à des marges très faibles,
voire même négatives pour les produits d’appel (loss leaders).
On trouve cette approche dans les réseaux avec service qui offrent toute une
gamme des spécialités, incluant une variété de produits élargie dans tous les
rayons du magasin.
ƒ
La stratégie des bas prix de tous les jours.
Cette stratégie consiste à transmettre au consommateur l’économie réalisée en
éliminant ou en minimisant le service, les spécialités et la variété sous forme de
bas prix de tous les jours. On trouve cette approche dans les réseaux à
escompte.
Chez Sobeys, nous privilégions la stratégie du « HIGH & LOW » étant donné que notre
réseau ne comprend pas de bannière à escompte. Nous comptons exclusivement des
bannières de service et de spécialités. Notre stratégie de prix s’accompagne pour nos
bannières à grande surface du Programme de récompense AIR MILESmd qui vise la
clientèle.
À partir des choix stratégiques de son réseau, le gestionnaire déterminera de façon
spécifique pour chaque catégorie de produits et chaque unité de vente à l’intérieur d’une
catégorie (UGS- Unité de gestion de stock), la marge et le prix qui seront fixés à partir
des nombreux éléments (facteurs) qui viendront influencer les décisions.
UN SEUIL MINIMAL
Un supermarché, comme toute autre entreprise, doit jongler avec de nombreuses
dépenses qui servent à appuyer son offre commerciale. Bien que la main-d’œuvre
(salaires et avantages sociaux) représente un élément important, on ne pourrait passer
sous silence l’importance des dépenses liées aux frais d’occupation (loyer, frais
communs, services publiques), aux frais d’équipement, aux frais d’exploitation (publicité,
fournitures), aux frais d’administration (comptabilité, téléphone, assurances) et, bien
entendu, aux frais financiers.
Sans oublier tous les coûts reliés aux diverses réglementations gouvernementales
(salubrité des aliments, environnement, etc.). La plupart du temps, ces coûts évoluent
plus rapidement que les revenus et nous devons en tenir compte. Vraisemblablement,
cette tendance se maintiendra et nous devrons nous y adapter.
L’ensemble de ces dépenses constitue le défi réel de l’entrepreneur. L’objectif est bien
évidemment de produire un profit supérieur à toutes ces dépenses. Nous aimerions
attirer votre attention sur le fait que ces entrepreneurs ne jouissent d’aucun programme
leur permettant d’être protégés contre les fluctuations du marché.
PETITES ENTREPRISES
Afin d’atteindre l’objectif de rentabilité, le magasin est géré comme un ensemble de
petites entreprises, appelées rayons. Ces rayons (épicerie, viande, fruits et légumes,
boulangerie, poissonnerie, etc.) doivent contribuer à la santé financière de l’ensemble de
l’entreprise. Ainsi, chaque rayon a ses objectifs financiers propres. Un de ces objectifs
est la gestion des prix, l’élément qui permet de couvrir les frais inhérents aux opérations
de chaque rayon.
En plus de l’influence des facteurs internes tels que les dépenses d’exploitation, le rayon
doit tenir compte des facteurs externes qui lui sont propres pour établir une structure de
prix appropriée.
Le rayon de l’épicerie d’un magasin d’alimentation est un rayon qui couvre une large
superficie. Les produits qui y sont offerts sont en majeur partie des produits que l’on
trouve à travers plusieurs canaux de distribution : pharmacies, grandes surfaces,
dépanneurs et bien d’autres. La concurrence est forte et le prix du produit devient « le
nerf de la guerre ». Cet élément, ajouté à ceux opérationnels (haute vélocité, faible
manipulation, pertes réduites), crée une structure de prix à faible marge.
Ainsi, une fois que le calcul du pourcentage requis pour s’assurer de la rentabilité du
rayon a été déterminé, une structure de prix hautement concurrentielle doit être mise en
place. Comme nous l’avons vu précédemment dans la stratégie « HIGH & LOW », une
marge de profit ordinaire est utilisée pour une gamme de produits, et certains produits
voient leur marge réduite afin d’attirer les consommateurs.
Par exemple, si une gamme de produits comporte une marge de 20 %, la marge des
produits en promotion peut être réduite, par exemple à 5 %. Dans la mesure où 70 %
des ventes sont au prix courant et 30 % au prix promotionnel, la gamme de produits se
trouverait donc avec une marge réelle de 15,5 %. Ce pourcentage doit être logiquement
supérieur aux coûts réels de gestion de cette gamme de produits. Il faut savoir que les
augmentations ou diminutions fréquentes du prix des produits, à l'exception des
promotions, sont reliées, principalement, aux variations du prix coûtant.
Les rayons de produits frais demandent une attention particulière dans la gestion des
opérations jour après jour. Cette catégorie de produits est communément appelée
produits périssables, et qui dit périssables, dit pertes. En effet, on ne peut négliger le
fait que les aliments qui appartiennent à cette catégorie requièrent une certaine
manipulation. Que se soit un boucher ou encore un poissonnier, le personnel spécialisé
de ces rayons doit manipuler, transformer et préparer les produits. Toutes ces
opérations exigent d’être vigilants puisque le risque de pertes est très élevé. De plus,
nous devons nous conformer aux exigences qu’entraînent toutes ces manipulations,
c’est-à-dire l’innocuité des aliments. L’ensemble de ces étapes lors de la manipulation
d’un produit est effectué pour répondre à la demande des consommateurs : des produits
de qualité et un service hors pair. Tout cela doit être pris en considération lors de
l’établissement du prix d’un produit.
Ces rayons requièrent une marge de profit plus élevée que le rayon de l’épicerie, car le
risque de pertes ainsi que les coûts de main-d’œuvre y sont plus élevés.
Lorsque la politique de prix est établie, le gestionnaire doit s’ajuster à un environnement
continuellement en mouvance. Les facteurs internes ainsi que les facteurs externes
peuvent eux aussi influencer le prix. Il est difficile d’avoir le contrôle sur ces facteurs.
LES FACTEURS INTERNES
Comme nous l’avons indiqué précédemment, de nombreux facteurs internes viennent
moduler l’établissement de la structure de prix de détail : les ressources utilisées, la
vélocité du produit, sa durée de conservation, etc. Bien que l’objectif ultime soit de
couvrir les frais d’exploitation du commerce, de permettre une marge supplémentaire au
détaillant et de chercher à rentabiliser chaque produit, chaque gamme de produits et
chaque rayon, la structure est elle aussi fortement influencée par des stratégies
commerciales. À titre d’exemple, chez IGA la catégorie de la viande d’agneau est
exclusivement québécoise, et ce, dans le but d’offrir un prix très concurrentiel dans cette
catégorie. Par conséquent, certaines autres catégories devront « subventionner » celleci.
LES FACTEURS EXTERNES
Les caprices de Mère nature sont en partie la cause de bien des maux de tête dans le
secteur des fruits et légumes. Gels, tornades ou autres… nous sommes à la merci des
intempéries lorsque de telles catastrophes naturelles surgissent. Nous devons donc
diriger nos achats dans des directions opposées au plan initial, ce qui engendre bien sûr
un changement dans la structure de prix. Autres facteurs non négligeables : les crises
pétrolières, les changements dans la politique de prix des fournisseurs, les crises
ponctuelles ou encore la révision des prix à la Régie des marchés agricoles et
alimentaires du Québec. Ce sont là autant de facteurs qui peuvent influencer le prix sans
préavis et qui échappent à notre contrôle.
CONCLUSION
La gestion des prix est sans aucun doute l’élément le plus important dans le commerce
en général et nous ne pouvons y faire abstraction. Nous devons prendre en
considération une panoplie de facteurs qui peuvent changer la donne.
L’établissement des coûts résulte en grande partie de la dimension commerciale et
financière de notre industrie. La dimension commerciale déterminera si vous devez opter
pour une stratégie « HIGH & LOW », comme c’est le cas de Sobeys Québec, ou encore
pour une stratégie des bas prix de tous les jours. La dimension financière est elle aussi
cruciale étant donné qu’elle inclut tous les coûts et tous les frais inhérents aux
opérations. Ces deux grands principes permettront d’établir le pourcentage requis pour
établir la structure de prix pour les différents rayons, mais d’abord et avant tout, pour
l’ensemble de l’entreprise. Il a été démontré que lorsque ces coûts sont établis, nous
devons également faire face aux facteurs internes et externes. C’est une réalité difficile
à gérer parce qu’elle peut faire surface à tout moment.
Il faut être conscient que la gestion des prix représente un enjeu fondamental dans le
succès et le développement d’une entreprise et de son réseau. Dans le secteur de
l’alimentation de détail, les marges de profit sont minces et la marge de manœuvre qui
en découle l’est tout aussi, d’où l’importance du volume pour compenser l’étroitesse du
corridor de rentabilité.
Dans un secteur aussi concurrentiel que le commerce de détail alimentaire, des
investissements doivent être faits dans les magasins afin de combler les besoins des
consommateurs. Cette mince marge de manœuvre représente bien souvent des sommes
qui doivent être réinvesties dans le magasin.
L’établissement d’une structure de prix de détail est un travail complexe qui demande à
la fois rectitude et souplesse.