Question Le texte de Laforgue est de registre comique, du fait des

Transcription

Question Le texte de Laforgue est de registre comique, du fait des
Proposition de correction pour le bac blanc Poésie
Question (4 points)
Ces textes abordent la maladie avec des registres différents. Identifiez ces registres et justifiez-les en
repérant quelques procédés utilisés.
Travail d’écriture (16 points)
1. Commentaire littéraire. Vous proposerez un commentaire littéraire du texte de Claude Roy (texte 4).
2. Dissertation : « La matière première de la poésie est la vie humaine – ses accidents et ses incidents, ses
victoires et ses désastres –, filtrée par la mémoire et l’imagination. », écrit Octavio Paz dans la préface à
l’édition du recueil de Claude Roy, A la lisière du temps. Vous discuterez cette affirmation en vous
référant aux textes du corpus et à vos connaissances personnelles.
3. Invention. Vous êtes chargé d’écrire la préface d'une anthologie poétique consacrée au thème de la
maladie. Vous justifierez l’intérêt du thème et du choix des poèmes en vous appuyant notamment sur les
textes du corpus.
Question
Le texte de Laforgue est de registre comique, du fait des apocopes et de sa forme « langage oral
familier », du fait d’une certaine autodérision due à la complainte d’un malade qui se sait condamné
mais ne le prend pas au tragique.
Le niveau de langue est familier, « faire dodo » est un euphémisme pour mourir, les liaisons mal à
propos (des cuirs ou des pataquès) sont comiques, comme les élisions qui marquent visuellement la
prononciation relâchée.
La forme chanson du poème est également un procédé qui concourt à rendre la maladie et la mort
plus acceptables.
Les images du cœur, par leur côté burlesque ou bizarre, sont également comiques : un « cœur qui
ruisselle » en parallèle aux sanglots, par exemple.
Le titre enfin, avec l’adjectif petit, laisse entendre soit une complainte d’enfant, soit une complainte
d’un homme de petite taille, soit une connotation affective.
La chanson des frères Jacques est aussi comique, d’abord par l’abondance des jeux de mots et parce
que le thème même de la chanson est celui d’une chanson malade. Toutes les images sont
empruntées à un vocabulaire médical ou paramédical, sont détournées de leur contexte.
De plus, dans le contenu de ladite chanson, l’histoire de la « pauvre infirmière » est également un
détournement du tragique. Et le fait que la chanson soit destinée à des malades la rend d’autant plus
invraisemblable, tout comme la pirouette finale à propos de la vignette de remboursement.
On a donc une sorte de déclinaison sur un thème sérieux, dans un mode comique.
Le niveau de langue, son aspect oral, la rapprochent du poème de Laforgue.
Le texte de Michaux est tragique, d’abor par son titre qui laisse une alternative entre deux solutions
de plus en plus graves, et laisse comprendre que la seconde solution est toujours valable.
L’invocation aux seigneurs de la Mort, Mort majuscule, fait paraître l’homme comme tout petit face
à des forces qu’il ne contrôle pas, l’interpellation à sa propre âme et à son propre cœur montre le
poète tentant un effort désespéré pour se comprendre.
Cet aveu d’impuissance, dans les premiers vers, est déjà une acceptation de la mort, l’évocation de
la lutte est aussi un élément du tragique : l’homme fait des tentatives, parce qu’il est homme, puis se
rend : le combat est tragédie.
Le texte de Lubin est également tragique, par la description d’un temps qui s’écoule et disparaît,
par les images symboliques de la lumière qui baisse.
La sécheresse du propos, la brièveté des phrases sont aussi un élément qui permet de parler de
tragique, parce que le présent des verbes marque un mouvement inéluctable et un refus du
bavardage.
L’omission de toute référence explicite à la maladie ou à la mort n’empêche pas cet aspect tragique,
car limage des heures qui s’avancent avec de l’essence et un briquet est un symbole de la
destruction à venir, tout comme la comparaison du temps qui passe à une lumière qui s’éteint et à
un arrêt de tout mouvement sur terre (dans une rue symboliquement qualifiée de « rue des tristesses
infécondes » : cela ne sert à rien.
Par rapport au texte de Michaux, il n’y a même plus de lutte, on dirait que l’auteur a dépassé ce
stade de la plainte.
Le poème de Claude Roy est plutôt lyrique, parce qu’il évoque clairement et explicitement une
expérience personnelle, à la première personne et au passé : l’auteur est narrateur et personnage, il
est son propre thème.
Mais surtout il constitue une tentative de retrouver un fil perdu de la mémoire, par une chaîne
d’images qui se reprennent avec des variantes.
Il n’y a aucune impression de soumission à un destin trop fort, mais au contraire une sorte
d’émerveillement dans les images, qui assimilent le réveil au sortir d’une anesthésie à une
découverte d’éléments de la nature, qui rapprochent des éléments de la chambre d’hôpital à des
éléments de la réalité extérieure.
Le fait même que le sujet du texte soit une tentative de ressaisir des souvenirs constitue un indice
supplémentaire de ce lyrisme, comme la forme découpée et morcelée du vers, qui se suspend avec
des espaces blancs, comme une respiration qui reprend, ou une conscience qui fonctionne par
éclairs ou intermittences, une phrase qui n’avance pas mais fait des pauses : le poète harmonise la
forme de son texte avec le sens de son contenu.