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Déclarations officielles de politique étrangère du 28 novembre 2016
1 - Point de presse du porte-parole - Cuba/Décès de Fidel Castro/Rappel de la déclaration de Jean-Marc
Ayrault - Iran/Accident de train/Rappel de la déclaration du porte-parole - Allemagne/Déplacement de
M. Harlem Désir à Berlin - Turquie/Entretien de M. Matthias Fekl avec le ministre turc de l'économie Syrie/Situation à Alep - République démocratique du Congo/Attaque contre un camp de déplacés hutu
- Ouganda/Affrontements à Kasese
Au point de presse de ce jour, le porte-parole a rappelé la déclaration du ministre ainsi que sa déclaration, et fait les
déclarations suivantes :
1 - Cuba - Décès de Fidel Castro - Rappel de la déclaration de Jean-Marc Ayrault (25 novembre 2016)
Fidel Castro vient de s'éteindre à Cuba. J'exprime mes condoléances à ses proches et ma solidarité au peuple cubain.
Avec sa disparition, une page de l'histoire du 20ème siècle se tourne. Elle avait été marquée par l'espoir de
l'émancipation et la déception d'un système qui ne respectait pas les droits de l'Homme.
La reprise récente du dialogue avec les États-Unis a ouvert la voie à une fin de l'embargo américain contre Cuba,
embargo que la France n'a jamais accepté. Je forme le voeu que cette évolution se poursuive, qu'elle s'accompagne
d'une ouverture de ce pays au monde et d'une réponse aux aspirations du peuple cubain à la liberté.
Conformément à ses valeurs, la France est prête à soutenir les progrès en ce sens.
2 - Iran - Accident de train (25 novembre 2016) - Rappel de la déclaration du porte-parole
C'est avec émotion que nous avons pris connaissance du très lourd bilan de l'accident ferroviaire survenu le 25
novembre sur la ligne reliant Téhéran à Machhad, qui a coûté la vie à environ quarante personnes selon les derniers
bilans.
La France présente ses condoléances aux familles des victimes et souhaite un prompt rétablissement aux blessés.
Elle assure l'Iran de sa solidarité dans cette épreuve.
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3 - Allemagne - Déplacement de M. Harlem Désir à Berlin (28 novembre 2016)
M. Harlem Désir, secrétaire d'État chargé des affaires européennes et secrétaire général pour la coopération
franco-allemande, se rend aujourd'hui en Allemagne.
Avec son homologue Michael Roth et en compagnie de M. Louis Gautier, secrétaire général de la défense et de la
sécurité nationale, M. Harlem Désir ouvrira la conférence de Berlin sur la sécurité, dont la France est invitée d'honneur
cette année. Dans la perspective du conseil européen de décembre, il appellera à un renforcement de la politique
européenne de sécurité et de défense, notamment sous l'impulsion franco-allemande.
À l'occasion de son déplacement, M. Harlem Désir aura des réunions de travail au Bundestag avec des parlementaires
allemands. Il rencontrera également à la chancellerie fédérale M. Uwe Corsepius, conseiller chargé de l'Europe auprès
de la chancelière Angela Merkel.
4 - Turquie - Entretien de M. Matthias Fekl avec le ministre turc de l'économie (Paris, 25 novembre 2016)
M. Matthias Fekl, secrétaire d'État chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de
l'étranger a reçu le 25 novembre M. Nihat Zeybekci, ministre turc de l'économie.
Ils ont fait le point sur la relation économique franco-turque et nos principaux projets, alors que notre commerce
bilatéral a connu en 2015 une forte progression (13,8 MdEuros en 2015, + 13% par rapport à 2014).
M. Matthias Fekl a rappelé à son homologue le souhait de la France de voir ses entreprises participer au programme
turc «Objectif 2023», programme de développement et d'investissement national du gouvernement turc.
À la suite du déplacement de Jean-Marc Ayrault à Ankara le mois dernier, Matthias Fekl a rappelé les messages
constants de la France, appelant les autorités turques à donner les garanties nécessaires en matière de respect de
l'État de droit.
5 - Syrie - Situation à Alep
La France est gravement préoccupée par les violences à Alep, consécutives à l'offensive massive du régime et de ses
soutiens. Ces dernières heures, ces violences ont coûté la vie à de nombreux civils et poussé à la fuite des milliers
d'habitants de la ville.
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C'est dans ce contexte que M. Jean-Marc Ayrault, ministre des affaires étrangères et du développement international,
a souhaité organiser début décembre une réunion ministérielle du groupe des États «affinitaires».
M. Brita Hagi Hassan, président élu du conseil local de la ville d'Alep, en visite à Paris, sera reçu au ministère des
affaires étrangères pour évoquer la situation humanitaire dramatique qui prévaut dans la ville.
6 - République démocratique du Congo - Attaque contre un camp de déplacés hutu (27 novembre 2016)
La France condamne l'attaque perpétrée le 27 novembre contre le camp de déplacés de Luhanga au Nord-Kivu et
exprime ses condoléances aux familles des victimes.
Nous appelons à faire toute la lumière sur cette attaque afin d'être en mesure de traduire les responsables devant la
justice.
La France réitère son plein soutien à la MONUSCO et l'encourage à poursuivre avec détermination, en étroite
collaboration avec les forces armées congolaises, la mise en oeuvre de son mandat de protection des civils,
conformément à la résolution 2277 du conseil de sécurité des Nations unies.
7 - Ouganda - affrontements à Kasese (26-27 novembre 2016)
La France déplore les affrontements qui ont eu lieu samedi et dimanche à Kasese, au sud-ouest de l'Ouganda, entre
des militants indépendantistes et les forces de sécurité ougandaises. Selon les autorités le bilan de cette attaque
s'élèverait à au moins à 55 morts parmi les rebelles et les policiers.
Nous suivons avec préoccupation la situation et appelons à l'apaisement./.
(fin de l'article)
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2 - Sommet de la Francophonie - Discours d'ouverture de M. François Hollande, président de la
République
Monsieur le Président de la République, Cher Hery,
Je veux d'abord vous féliciter pour l'organisation de ce Sommet. C'est l'événement le plus important que Madagascar
organise depuis l'indépendance.
Je sais ce que ce défi a pu représenter et je veux ici vous dire toute notre satisfaction de voir ce matin qu'il a été
parfaitement relevé.
Mesdames, Messieurs les chefs d'État et de gouvernement, je me réjouis aussi de votre participation, car notre
organisation ne vit que par les pays qui la constituent.
Je salue la secrétaire générale de l'Organisation internationale de la Francophonie, chère Michaëlle Jean, qui a donné
une nouvelle impulsion à ce que nous sommes.
La Francophonie c'est une force. Ensemble nous formons une communauté humaine de plus de 250 millions
d'habitants - on nous en promet même 750 millions dans 30 ans.
Notre langue, le français, est la deuxième enseignée dans le monde. Nous défendons des valeurs de liberté, nous
portons des ambitions dans tous les domaines - économique, culturel, scientifique, environnemental - et sur tous les
continents car ici, tous les continents sont représentés.
Depuis 2 ans, notre secrétaire générale Michaëlle Jean prépare et élabore de nouveaux projets au service de tous les
francophones et surtout de leur jeunesse, qui doit être la grande priorité de notre organisation.
Et également, nous devons lui donner - et Macky Sall y est revenu - une dimension économique, technologique,
forcément liée à la transition énergétique et écologique.
Mais notre organisation, c'est aussi un espace de solidarité. La première des solidarités, c'est quand un de nos pays
est dans l'épreuve - et plusieurs d'entre nous ici ont été frappés par le terrorisme. Je pense à la France forcément,
mais aussi au Mali, à la Belgique, à la Tunisie, au Tchad, au Burkina-Faso, à la Côte d'Ivoire et à tant d'autres.
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Nous sommes des cibles parce que le français est la langue de la raison, de la liberté, de l'émancipation, parce que
c'est en français que l'universalité des droits de l'Homme et du citoyen a été proclamée ; et c'est ce que les fanatiques
n'acceptent pas et veulent nous combattre parce que nous sommes justement un espace de paix et de liberté.
Ensemble, nous partageons une langue qui est une langue ouverte au monde, comme le dit Daniel Maximin du français
: «le sang de tous les continents coule dans ses veines».
La première priorité donc pour la Francophonie, c'est d'abord de défendre la langue et la culture. Le français est notre
trait d'union, même si ici certains parlent aussi l'arabe, l'anglais, le wolof, l'arménien, le roumain et tant d'autres
langues qui doivent continuer à être préservées, protégées.
Nous revendiquons le droit à la diversité, le refus de l'uniformisation. Nous sommes pour la pluralité des modes
d'expression, des opinions, des croyances, des convictions. Et c'est pourquoi nous devons être exemplaires pour
exprimer toute la créativité du cinéma, de la littérature, de la poésie, de la chanson en français ; et nous devons tous
y veiller dans nos pays, mais également dans les négociations internationales.
Pour ce qui concerne la France, j'ai voulu que l'apprentissage du français, la connaissance du français, la maîtrise du
français soit également renforcée, parce que c‘est en maîtrisant la langue que les individus, que les citoyens peuvent
accéder à des choix en toute conscience et en toute liberté.
De la même manière, j'ai voulu qu'en France la formation linguistique des étrangers constitue également une priorité.
Chaque nouvel arrivant doit avoir l'opportunité de parler le français. Cette ambition, nous devons aussi la porter pour
tous les pays de l'espace francophone et je pense notamment aux pays africains.
D'ici à 2020, il manquera près de 180.000 professeurs de français en Afrique. Et dans nombre de pays, la scolarisation
a parfois régressé depuis une génération. C'est pourquoi la France a décidé d'offrir une coopération éducative :
100.000 professeurs pour l'Afrique gérés par l'Institut français.
Entre 2013 et 2015, j'ai également engagé l'Agence française de développement dans le secteur de l'éducation, de la
formation avec un niveau de participation de 1 milliard d'euros, ce qui était historique. Je le fais parce que je
considère que le français risque de se perdre s'il n'est plus enseigné ou s'il n'est plus véritablement parlé.
Faut-il aussi que dans les négociations internationales, nous puissions veiller à ce que l'exception culturelle soit
reconnue, alors même que la révolution numérique bouleverse la création, la diffusion, le partage de valeurs des
oeuvres. Là aussi, c'est un chantier pour la Francophonie, parce que nous devons protéger les droits d'auteurs et nous
devons faire en sorte que puisse se diffuser les créations francophones dans tous nos pays.
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L'année prochaine, la France lancera le grand tour «Voyages en francophonie», qui proposera dans l'ensemble de
l'espace francophone une centaine d'événements : festivals de musique, de chansons, de littérature, de poésies, de
théâtre, de cinéma pour que nous puissions ensemble partout partager les mêmes émotions.
Défendre le français, la culture, c'est aussi affirmer des valeurs et la première d'entre elles, c'est la démocratie. La
Francophonie doit être au côté des peuples qui se battent pour leurs aspirations à des élections libres et
transparentes, avec des ordres constitutionnels qui soient respectés. C'est très important que nous puissions être, de
ce point de vue, aussi incontestables que possible.
Nous devons faire en sorte que nous puissions soutenir tous les efforts menés par bien des pays ici présents à une
meilleure gouvernance, à une plus grande transparence. Et chacun peut se sentir concerné.
La France accueillera du 7 au 9 décembre le 4ème sommet mondial du partenariat pour un gouvernement ouvert.
C'était Barack Obama qui avait lancé cette initiative et aujourd'hui, c'est la France qui en a la charge et la
responsabilité.
70 pays seront représentés - beaucoup de francophones - et j'invite d'ailleurs ceux qui ne l'ont pas encore décidé de
venir à Paris pour cet événement. Ce sera une façon de montrer comment nous pouvons faire vivre la participation des
citoyens, leur expression. Et avec l'innovation, le numérique, comment nous pouvons mieux partager les expériences
de chacun.
Madame la Secrétaire générale, vous êtes très active et vous avez raison pour lutter contre l'extrémisme violent qui
menace notre mode de vie. La France soutient la mise en place d'un réseau francophone de lutte contre la
radicalisation, pour échanger des informations, partager là encore les pratiques les plus efficaces, proposer de
l'assistance technique et mettre en place des programmes partout où ils sont nécessaires.
Nous n'avons pas le droit d'abandonner des jeunes sans repères, de les laisser ainsi vulnérables, atteints par les
mensonges de mouvements fondamentalistes. C'est le sens de l'initiative que vous avez lancée le 10 mars dernier
«Libres ensemble», pour que les jeunes francophones luttent contre toutes les tentations de repli ; et que nous
puissions aussi promouvoir les thèmes de la liberté et de l'égalité entre les sexes.
Je suis prêt aussi à ce que l'expérience que nous avons acquise, avec l'Office franco-québécois pour la jeunesse, puisse
être généralisée et que nous puissions promouvoir des mobilités et des échanges Nord - Sud des jeunes francophones.
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Nous avons besoin qu'il y ait ces échanges, qu'il y ait cette connaissance et je soutiens pleinement le programme de
volontariat de l'Organisation de la Francophonie. La France est prête à s'y associer de deux manières : en identifiant
avec l'Agence française de développement les projets qui sont labellisés par notre organisation ; et en faisant que les
jeunes qui font leur service civique en France - et ils sont de plus en plus nombreux, plus de 100.000 - puissent le
faire également dans les pays francophones.
La Francophonie c'est également la solidarité, avec les pays qui sont émergents ou en développement. Je pense
notamment aux pays africains - pas seulement - qui peuvent être entravés par le dérèglement climatique. Vous savez
le rôle que la France a pu jouer en accueillant la COP21 à Paris, puis lors du sommet de Marrakech, à l'occasion de la
COP22.
Nous sommes engagés, nous devons être mobilisés parce que l'espace francophone est plus particulièrement concerné.
Sur les 50 pays les plus meurtris par le réchauffement, 36 se situent en Afrique subsaharienne avec toutes les
conséquences : désertification, sécheresse, déforestation.
La priorité c'est donc l'accès à l'énergie et à l'électricité et j'ai confirmé, lors du sommet de Marrakech, que la France
dégagerait 2 milliards d'euros pour soutenir tous les projets qui iraient dans cette direction.
L'Europe peut également y ajouter ses propres fonds et ses investissements, mais nous devons dans l'espace
francophone montrer que des projets existent et qu'ils peuvent trouver leur traduction concrète dans les prochaines
années.
J'ajoute aussi un enjeu de solidarité, c'est celui de l'accès de tous aux soins, c'est-à-dire à la santé. Là encore, la
francophonie doit montrer l'exemple, nous devons faire en sorte qu'il y ait plus de médecins, de personnels soignants
qui puissent être formés. Nous avons multiplié nos réseaux d'experts en santé publique, nous avons abaissé le prix des
médicaments. Il est insupportable que des populations - parce qu'elles sont pauvres et démunies - soient en plus
victimes de fléaux sanitaires, et c'est pourquoi la France est si attachée à l'avenir de l'Organisation mondiale de la
santé.
Mais l'Afrique n'attend pas uniquement de l'aide, elle veut des investissements et des technologies. D'une manière
générale, la Francophonie doit être un espace économique. Nous devons faire en sorte qu'il y ait de plus en plus
d'étudiants francophones. Nous devons favoriser les déplacements des créateurs d'entreprise. Nous devons faciliter les
investissements, nous devons faire que chaque jeune puisse comprendre la Francophonie comme un atout
supplémentaire pour réussir sa vie. Nous devons multiplier les forums économiques, nous devons faire que la
francophonie puisse se conjuguer avec la science, avec la recherche, avec l'innovation, avec la technologie.
C'est un enjeu majeur parce que nous ne sommes pas simplement les héritiers d'un passé linguistique, nous sommes
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les promoteurs d'une conception du monde. C'est cela le sens de la Francophonie, c'est d'être ensemble parce que nous
parlons la même langue, parce que nous avons aussi les mêmes objectifs, les mêmes volontés, les mêmes engagements
; et que nous pouvons même anticiper sur l'évolution du monde.
Ce monde qui est agité aujourd'hui par des menaces que nous connaissons, que nous combattons, ce monde qui est
plein d'incertitudes, qui ne sait pas encore où vont aller les grandes décisions qui sont pourtant attendues. Un monde
où les tensions restent fortes et où les extrémistes partout veulent ressusciter les peurs ; ou utilisent la nostalgie
comme pour fermer la porte à l'avenir.
Nous savons que le repli sur soi c'est l'enfermement, car nous sommes dépositaires d'une langue qui est une langue
universelle, une «langue monde». Et nous savons tous qu'une identité ne se protège pas en érigeant des murs. La
francophonie c'est une volonté, une volonté d'ouverture, de développement, de culture, de solidarité, la Francophonie
c'est un choix, la Francophonie c'est une chance, la Francophonie c'est une promesse qui sera tenue.
Merci./.
(Source : site Internet de la présidence de la République)
(fin de l'article)
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3 - Sommet de la Francophonie - Madagascar - Francophonie - Cuba - Déclaration conjointe de M.
François Hollande, président de la République, avec M. Hery Rajaonarimampianina, président de
Madagascar - Propos de M. Hollande
Monsieur le Président, cher ami,
Je suis très heureux d'être ici, à Madagascar, pour deux raisons. D'abord parce qu'il y a bien longtemps qu'un président
de la République française n'était pas venu à Madagascar - le dernier était Jacques Chirac. Je souhaitais que par ma
visite, il soit bien compris par tous que Madagascar est pleinement réintégré dans la communauté internationale et a
trouvé la stabilité politique qui lui a longtemps fait défaut.
Je voulais appuyer tous vos efforts pour justement permettre à votre pays de connaître le développement qui est
attendu. La France sera à vos côtés. Il y a un certain nombre de coopérations que nous avons engagées, avec l'agence
française de développement qui va augmenter encore ses activités. Ici, il y a des grands projets : barrage
hydroélectrique, grandes infrastructures, aéroport, tourisme : beaucoup peuvent être réalisés grâce à notre
partenariat.
Il y a aussi la question de la sécurité. Je ne peux pas ici ne pas l'évoquer, parce qu'il y a eu plusieurs de mes
compatriotes qui ont perdu la vie dans des conditions particulièrement atroces ; et je sais que vous travaillez pour
résoudre cette question et elle est essentielle. Je rappelle qu'il y a 20.000 Français, souvent franco-malgaches
d'ailleurs, qui vivent ici ; et de même nous avons en France une communauté malgache très importante, plus de
100.000 personnes.
Il y a beaucoup de touristes qui viennent ici et qui veulent être éblouis par vos paysages, par votre végétation. Ils
sont également très heureux de l'hospitalité qui leur est faite, mais qui peuvent être inquiets pour leur sécurité. Donc
nous devons tous faire pour agir ensemble.
La France sera également à vos côtés puisque nous allons prendre l'initiative de rassembler des bailleurs, pour que
nous puissions vous apporter les fonds que vous attendez.
Et puis il y a l'histoire et j'aurai l'occasion de l'évoquer pour souligner combien les Malgaches ont participé, durant les
deux guerres mondiales du 20e siècle, à la défense de la France ; et combien aussi il y a à revenir sur un certain
nombre d'épisodes particulièrement douloureux. Ce sera l'occasion pour moi de les exprimer et de dire ma
reconnaissance.
Je viens aussi pour une seconde raison, qui est le sommet de la Francophonie. Et là encore pour vous dire que c'était
un défi considérable d'organiser un événement de cette importance. C'est d'ailleurs la première fois depuis
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l'indépendance de Madagascar qu'il y a un sommet rassemblant des dizaines de chefs d'État et de gouvernement, de
multiples délégations. Et ce succès vous honore et confirme la capacité de Madagascar à pouvoir accueillir une
manifestation internationale aussi élevée.
La francophonie, ce n'est pas simplement un rassemblement de chefs d'État et de gouvernement. C'est l'affirmation
d'un certain nombre de valeurs, de principes et d'engagements. D'abord pour la langue française : nous sommes ici
pour que la langue française puisse avoir toutes les conditions pour permettre - à celles et ceux qui veulent la parler de pouvoir le faire.
Il y a aujourd'hui 250 millions de francophones ; on pense qu'ils pourraient être encore davantage dans les prochaines
années, grâce à la démographie mais aussi grâce à l'effort que nous devons tous faire pour la diversité et la pluralité
linguistique et donc pour le français.
La maîtrise du français commence d'ailleurs en France : c'est la condition pour pouvoir être pleinement citoyen et
pour ceux qui sont étrangers, d'être pleinement intégrés. La francophonie c'est aussi l'affirmation de l'exception
culturelle et, donc, de la reconnaissance de ce que nos sociétés sont capables de produire de singulier. C'est donc une
volonté de pluralisme qui nous anime.
Nous devons défendre les droits d'auteurs, nous devons défendre les créateurs, nous devons défendre tous ceux et
toutes celles qui s'expriment en français, dans tous les domaines de la création artistique.
La francophonie c'est aussi des valeurs politiques, la démocratie et les droits de l'homme, les droits de la femme, ce
sont les conditions pour être pleinement membre de la francophonie. Être francophone ce n'est pas simplement parler
le français, c'est parler les valeurs universelles.
Parmi ces valeurs universelles, il y a la transparence dans les élections, le respect de l'ordre constitutionnel, faire en
sorte que les femmes soient considérées à l'égal des hommes et ne puissent pas être brimées, parfois atteintes dans
leur dignité comme c'est le cas trop souvent. Et nous devons faire là encore la démonstration que la francophonie,
c'est une action et pas simplement une organisation.
Enfin la francophonie doit contribuer à nous rassembler pour lutter contre le fanatisme. C'est en ce sens que tout ce
qui est fait pour lutter contre la radicalisation, pour échanger les expériences, pour faire que les jeunesses puissent
davantage se comprendre et se connaître, c'est aussi un but que je poursuis.
Et la francophonie, c'est également une solidarité dans les épreuves, j'ai évoqué le terrorisme mais également par
rapport à l'enjeu du réchauffement climatique et là encore, l'accord de Paris doit se décliner (j'allais dire) en français
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et dans l'espace francophone.
Je veux aussi insister sur le caractère exceptionnel de cette visite, parce que grâce à vous la France peut parler dans
l'Océan indien sans être regardée comme voulant soumettre cette région à je ne sais quelle influence. Nous sommes
un pays de paix, d'équilibre et de développement. Nous sommes présents dans l'océan indien avec Mayotte et l'île de
La Réunion et nous souhaitons qu'il y ait encore davantage d'échanges.
Je vais terminer cette déclaration en évoquant l'événement qui s'est produit cette nuit, la mort de Fidel Castro. Fidel
Castro a été une grande figure du 20e siècle, il a suscité beaucoup d'espoirs avec la révolution cubaine. À un moment
il a été une référence pour beaucoup de peuples d'Amérique latine. Il y a eu aussi des désillusions. Mais il a toujours
voulu avec fierté défendre Cuba contre toutes les pressions extérieures, notamment l'embargo qui frappait son pays.
Et même si j'ai à plusieurs reprises dénoncé les manquements aux droits de l'homme à Cuba, j'ai toujours considéré
que l'embargo était une décision unilatérale inacceptable. Je me suis rendu, en 2015, à Cuba, j'ai rencontré non
seulement le président Raoul Castro, mais j'avais également eu un entretien avec Fidel Castro. Au-delà de l'histoire,
c'est l'avenir qui compte. Et je veux à l'occasion de la disparition de Fidel Castro encore insister pour que l'embargo qui
pénalise Cuba puisse être levé, définitivement levé, et qu'il puisse y avoir une ouverture, un échange et que Cuba
puisse être pleinement dans la communauté internationale regardée comme un partenaire.
La France regarde toujours Cuba comme un partenaire, c'est ce que j'ai voulu dire en m'y rendant. J'étais le premier
chef d'État occidental à aller en visite à Cuba, je l'ai fait justement dans cet esprit. Faire que nous en terminions avec
la guerre froide - elle était finie depuis longtemps mais elle demeure ou demeurait encore à Cuba. Et puisque je dois
saluer la mémoire de Fidel Castro, je le fais mais en même temps, je veux que ce soit un message d'avenir et d'espoir
pour le peuple cubain. Et bien sûr, j'adresse toutes mes condoléances à Raoul Castro, qui est venu en visite d'État à
Paris, et au peuple cubain pour lui dire qu'il peut avoir la fierté d'avoir été uni face à toutes ces pressions, mais
qu'aujourd'hui c'est de l'ouverture et des échanges dont il faut parler./.
(Source : site Internet de la présidence de la République)
(fin de l'article)
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4 - Sommet de la Francophonie - Réunion acteurs de la santé et Francophonie - Communiqué de la
présidence de la République
En marge du 16e sommet de la Francophonie, le président de la République s'est entretenu avec M. Lelio Marmora,
directeur exécutif d'UNITAID, M. Seth Berkley, directeur exécutif de l'alliance globale pour la vaccination et
l'immunisation GAVI et M. Mark Edington, directeur en charge des subventions du fonds mondial de lutte contre le
Sida, la tuberculose et le paludisme. Le Premier ministre de Côte d'Ivoire, Daniel Kablan Duncan participait également
à cette réunion.
Ils ont évoqué les moyens de renforcer l'action des fonds internationaux en Afrique francophone, où les grandes
pandémies demeurent la principale cause de mortalité. Le président de la République a salué les progrès accomplis
depuis le sommet de Kinshasa en 2012 et la hausse des financements dédiés à la lutte contre le VIH, la tuberculose et
le paludisme à destination des pays africains de la Francophonie.
Afin d'améliorer encore l'accès des populations aux traitements et aux vaccins, le renforcement des systèmes de santé,
la mise en place de couvertures sanitaires universelles et une action déterminée pour faire baisser le prix de
médicaments innovants sont indispensables.
Le président de la République a insisté sur la mobilisation des grands fonds internationaux pour former plus de
personnels de santé, mettre en place des programmes de prévention au plus près du terrain, dans les communautés
locales et auprès des publics vulnérables, et améliorer l'organisation des systèmes de soins.
À la suite de la conférence tenue à Montréal le 16 septembre dernier, il a confirmé que la France tiendrait tous ses
engagements au fonds mondial, avec 385 Meuro dès 2017. Il a annoncé une enveloppe de 95 Meuro pour UNITAID en
2016 et indiqué que la contribution de la France à l'OMS augmenterait de 5Meuro à partir de l'année prochaine, afin
de contribuer au déploiement d'une architecture de sécurité sanitaire internationale plus robuste./.
(Source : site Internet de la présidence de la République)
(fin de l'article)
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5 - Madagascar - Relations bilatérales - Allocution de M. François Hollande, président de la
République, devant la communauté française
Monsieur le Premier ministre de la république de Madagascar,
Vous nous faites grand honneur de venir ici, à la résidence de madame l'ambassadrice, devant la communauté
française rassemblée - que je salue - avec les membres de ma délégation, les ministres, les parlementaires, les chefs
d'entreprise, les artistes, les chercheurs, bref, toute la France qui a voulu venir pour ce sommet de la Francophonie, à
la fois pour porter les valeurs qui sont les nôtres mais en même temps pour défendre l'idée même que porte la langue
française. Il était très important que nous puissions le dire et le faire ici, à Madagascar.
C'est la troisième fois qu'un président de la République française vient à Madagascar depuis l'indépendance du pays. Il
y a eu François Mitterrand et puis Jacques Chirac. Je voulais que ma visite puisse à la fois être une visite comprise
comme étant un signe de l'amitié entre la France et Madagascar et en même temps une visite liée à la responsabilité
qu'a la France dans la francophonie.
Je suis conscient de la place stratégique qui est celle de Madagascar dans l'océan Indien. La France est présente dans
l'océan Indien de multiples façons. Ici par la communauté française, mais aussi à Mayotte, à La Réunion - et je sais
combien les liens sont intenses entre les différentes îles, qui ne sont pas de même taille, nous en sommes conscients,
mais qui participent de la même volonté de développement de la coopération au sein de l'océan Indien.
Je voulais aussi souligner combien la communauté française présente à Madagascar est importante, diverse, riche au
sens de ce qu'elle peut apporter et à Madagascar et à la France. C'est une communauté qui représente près de 20.000
personnes, beaucoup de binationaux et c'est une chance que d'avoir des binationaux ; et une communauté qui est
parfois là depuis longtemps, parfois plus récemment liée à des activités de développement, à des recherches, à de
l'installation d'entreprises, à des initiatives associatives, bref, tout ce qui peut nous rapprocher.
Je sais aussi combien cette communauté est fervente et est capable de se mobiliser. Vous étiez nombreux à la
résidence, c'était quelques jours après les attentats du 13 novembre 2015 à Paris, à Saint-Denis. Et vous aviez éprouvé
spontanément le besoin de vous retrouver ici, pour témoigner de votre solidarité à l'égard de nos compatriotes qui
avaient pu être frappés.
C'était d'autant plus fort que Véronique de Bourgies qui était française, qui travaillait ici à Madagascar, qui avait lancé
une initiative très belle qui se poursuit d'ailleurs pour les enfants, pour les familles, a été assassinée lors de cette nuit
terrible du 13 novembre.
J'ai rencontré les représentants de cette association et je leur ai dit que malgré la douleur qu'ils ressentent, malgré
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cette absence, ils avaient toute l'aide de la France pour continuer cette action. Et eux-mêmes qui sont présents ici ont
comme maintenant devoir - et ils le savent - mais aussi comme passion de pouvoir continuer l'oeuvre de Véronique de
Bourgies.
Je veux saluer aussi - je l'ai fait avant de vous rencontrer - la famille d'une victime malgache de l'attentat de Nice, et
je lui ai témoigné là encore de notre solidarité. Voilà ce qu'est finalement une communauté, à l'échelle du monde. Ici,
à une Française qui a pu être assassinée alors même qu'elle travaillait pour la solidarité avec Madagascar ; et puis une
Malgache qui était en France à Nice et qui a été également victime de la barbarie et du terrorisme.
Je sais aussi combien Monsieur le Premier ministre, vous luttez contre l'insécurité ; c'est une priorité majeure partout.
Notre communauté a été profondément marquée par l'assassinat de deux jeunes français, Magali et Romain au mois
d'août dernier sur l'île de Sainte-Marie. Et je ne veux pas non plus oublier nos autres ressortissants qui ont trouvé la
mort ici, à Madagascar.
Alors j'ai abordé cette question de la protection, de la sécurité avec le président Hery et j'ai voulu que nous puissions
définir les coopérations judiciaires que nous pouvions mettre en place, y compris aussi les coopérations en termes de
sécurité, de façon à ce que les autorités malgaches puissent à la fois assurer leur rôle de protection de l'ensemble des
Malgaches et ici des Français qui y sont installés ; et qu'il puisse y avoir une coopération judiciaire qui permette que
des procès puissent se tenir et qu'il n'y ait aucune impunité. C'est d'ailleurs le cas puisqu'il y a eu le procès des auteurs
du double meurtre de Français à Tuléar en 2014 ; et ceux de nos compatriotes à Nosy Be, c'était en 2013.
Je suis conscient que beaucoup de Français veulent venir ici à Madagascar, parce que c'est une très belle île avec des
paysages magnifiques. Nous sommes ici admiratifs de ce que nous pouvons voir ou entrevoir. Nous savons combien les
plages de Madagascar peuvent recevoir de touristes, mais faut-il encore qu'il y ait de la sécurité. Et autant nos
opérateurs sont mobilisés - je veux les en remercier - autant nous voulons même qu'il y ait des facilités en termes de
transports aériens, autant nous voulons que ces touristes - qui seront sans cesse plus nombreux - puissent avoir
toutes les conditions pour y séjourner avec sérénité.
C'est également votre préoccupation et madame l'ambassadrice et les consuls qui sont ici présents sont à la
disposition de la communauté française pour leur donner toutes les informations et leur permettre de faciliter leurs
mouvements.
Voilà, c'est ce que je voulais d'abord dire au sujet des drames que nous avons pu traverser. Face aux drames, il peut y
avoir de l'abattement - c'est une tentation - il peut y avoir de l'intolérance - c'est un risque - mais il peut y avoir, et il
doit y avoir une cohésion, une force qui se dégage de nous pour non seulement dépasser ce qui a pu à un moment
nous atteindre, mais finalement suivre notre chemin avec encore plus de détermination. Et c'est ce que nous faisons
tous ensemble, tous les Français, qu'ils vivent dans l'Hexagone, en Outre-mer ou qu'ils soient Français à l'étranger.
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Ils sont ensemble et ils ne veulent pas être divisés, ils ne veulent pas être séparés entre les uns et les autres, ils
veulent qu'il n'y ait aucune stigmatisation et en même temps, ils attendent de la fermeté, ils attendent de la sécurité,
ils attendent que les pouvoirs publics prennent leurs responsabilités. C'est ce que nous avons fait depuis 2012. J'ai
avec les gouvernements de Jean-Marc Ayrault de Manuel Valls considérablement renforcé les moyens de la sécurité,
mis aussi les ressources nécessaires pour nos armées.
Je veux saluer ici nos militaires parce que la France est engagée pour lutter contre le terrorisme en Afrique de l'Ouest :
c'est l'opération Barkhane qui a commencé au Mali mais qui se poursuit dans toute la région. La France est engagée
parfois pour séparer un certain nombre de communautés qui risqueraient de s'entretuer, cela a été le cas avec notre
intervention en Centrafrique. La France est engagée aussi au Moyen-Orient, en Irak et en Syrie pour lutter contre
Daech, cette organisation islamiste, fondamentaliste qui nous a fait la guerre, déclaré la guerre avec les attentats.
Il y a beaucoup d'attentats que nous déjouons encore ces derniers jours, ces dernières semaines et je veux en féliciter
ici les forces de sécurité. Oui, nous devons agir et en même temps, nous devons vivre et c'est ce qui compte avant
tout, c'est le sens de ce qu'ici j'ai affirmé au sommet de la Francophonie. Parce que nous sommes conscients que nous
devons répondre à tous les besoins qui nous sont présentés.
La Francophonie représente des pays très différents, il y a des pays pauvres qui veulent assurer leur développement, il
y a des pays très développés qui veulent partager la technologie, il y a des pays émergents, il y a des pays de tous les
continents. L'espace francophone représente la solidarité d'un monde qui parle la même langue et qui veut anticiper
par rapport à ce que doivent être les responsabilités de la communauté internationale.
Ici à Madagascar, Monsieur le Premier ministre, et je l'ai dit au président, nous soutenons le processus de
stabilisation. Il est en cours et c'est un grand succès pour vous que d'avoir pu accueillir le sommet de la Francophonie.
C'est l'événement international plus important qui a eu lieu depuis l'indépendance et qui a pu être parfaitement mené.
Alors soyez-en fiers, que le peuple malgache en soit bien conscient, recevoir une conférence de ce niveau avec
beaucoup de chefs d'État et de gouvernements en toute sécurité, dans des conditions d'hospitalité remarquables, c'est
un succès.
Et ce succès est encourageant, c'est la raison pour laquelle la France veut continuer à vous apporter son aide d'une
autre façon, avec notamment des investissements nouveaux dans le secteur des infrastructures, de l'énergie, de
l'urbanisme. Et l'agence française de développement - je salue ici son directeur - va doubler ses engagements à
Madagascar.
Nous voulons aussi coopérer sur le plan universitaire et scientifique, je rappelle les instituts de recherche : Pasteur,
CIRAD, IRD qui contribuent à l'amélioration des conditions de vie des Malgaches. Et je sais qu'ici, il y a de nombreux
représentants de ces grandes institutions de recherche.
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Et puis il y a ce que nous voulons faire pour la langue française, pour la culture française. Il y a ici des établissements
scolaires de très grande qualité, je veux ici rendre hommage aux personnels qui s'y dévouent. C'est pour nous non
seulement un devoir mais un grand investissement parce que chaque fois que des jeunes passent dans nos
établissements, non pas simplement pour apprendre le français, mais pour apprendre en français, ils deviennent les
meilleurs ambassadeurs de la culture française ; et surtout ils obtiennent là un passeport qui n'est pas délivré par
quelque autorité administrative que ce soit, mais un passeport pour réussir leur vie. C'est comme cela que nous
concevons aussi la francophonie.
Je veux aussi souligner le rôle des alliances françaises ici. Quand j'ai visité le pavillon de la France, au village de la
francophonie, j'ai été vraiment saisi par l'ampleur de ce que nous pouvions faire pour diffuser la culture française à
travers ce réseau d'Alliances. C'est un très beau succès populaire le village de la francophonie. Il y avait des milliers de
personnes qui s'y pressaient, tout simplement pour accéder à l'information. Les services de l'ambassade ont fait un
travail remarquable que je veux absolument souligner, où l'on obtient toutes les informations sur les administrations
françaises, sur ce qu'elles font. Je me demande s'il ne faudrait pas, monsieur Place qui s'occupe de la simplification,
généraliser ce processus partout, mettre ces bornes dans tous nos villages parce qu'il y a vraiment là une source de
connaissances et d'informations.
J'ai voulu justement que nous puissions partout en France permettre à l'administration de se moderniser, d'accéder
beaucoup plus facilement à nos concitoyens, de leur donner de l'information. Et j'espère qu'ici, nous pouvons être
exemplaires.
Je veux également souligner toutes les formes de coopération décentralisées, il y en a beaucoup : coopération avec
les collectivités locales, coopération avec les organisations non gouvernementales et puis enfin il y a les entreprises.
Les entreprises françaises qui ont mené des partenariats avec des entreprises malgaches, qui sont particulièrement
impliquées dans bon nombre de grands travaux que vous avez lancés ; et qui bien sûr vont demander à des
techniciens, des ingénieurs français de venir ici s'installer. Et je sais que vous leur ferez le meilleur accueil et je salue
ici tous les représentants de la communauté d'affaires.
Là encore il faut simplifier, alors nous le faisons pour ce qui nous concerne, mais vous avez sans doute aussi - les
autorités malgaches - à faire que le droit soit simple et qu'il puisse y avoir autant qu'il est possible le développement
de nos échanges économiques.
J'ai voulu également que cette visite puisse rappeler un certain nombre d'événements historiques, comme pour mieux
nous projeter vers l'avenir. D'abord nous nous sommes rendus ensemble au monument aux morts du lac Anosy pour
rappeler qu'il y a eu de nombreux Malgaches qui, pendant la première et la seconde guerre mondiale se sont sacrifiés
pour la France, c'est-à-dire pour notre liberté, pour notre indépendance. Et ils ne seront jamais oubliés.
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Sur ce monument aux morts, il y avait inscrites les batailles de la première guerre mondiale, celles qui ont décimé
tant d'hommes, et parmi ces hommes des Malgaches. J'ai rappelé aussi les événements de 1947 et ce qu'avait pu être
ce souvenir douloureux ; qui a longtemps séparé la France et Madagascar parce qu'il y avait de l'incompréhension. Et
donc j'ai dit que je voulais rendre hommage aussi aux victimes des événements tragiques de 1947.
L'indépendance en 1960 a permis que la France et Madagascar entretiennent des relations qui ont été, en fonction des
alternances ou en fonction des événements politiques, en France et à Madagascar, parfois bonnes, parfois plus
difficiles, parlons-nous franchement. Aujourd'hui, nous devons tout faire pour qu'elles soient excellentes ces relations
; et pour que nous puissions travailler ensemble et que vous ayez confiance dans la France, et la France confiance
dans Madagascar.
Pour en porter la preuve, je souhaite qu'il y ait plus d'étudiants malgaches qui viennent trouver dans nos universités le
moyen de réussir leur vie. Je souhaite qu'il y ait plus de déplacements, plus d'échanges. J'ai évoqué le tourisme, j'ai
évoqué les rapports économiques, je veux qu'il puisse y avoir des relations qui soient exemplaires parce que nous
sommes voisins, je le rappelais, parce que nous portons des mêmes idéaux dans cet océan Indien et parce que nous
voulons que ce soit une zone de paix.
Nous voulons aussi lutter contre tout ce qui peut être l'extrémisme et la radicalisation, et c'est un devoir que j'ai
rappelé au sein de l'organisation de la francophonie.
Voilà Mesdames et Messieurs ce que je voulais vous dire en cette matinée très belle, dans ce lieu magique et devant
vous, au moment où nous devons montrer ce qu'est la France partout, comment nous devons nous rassembler quelles
que soient les circonstances, quelles que soient les échéances, quelles que soient les épreuves, quels que soient les
choix que nous aurons à faire. Nous rassembler, c'est le plus essentiel, c'est-à-dire que nous puissions tous contribuer
au bien commun et vous le faites ici ; bien commun entre Madagascar et la France, que nul ne soit oublié.
Plusieurs fois, il m'a été rappelé ce qu'était la situation d'un certain nombre de nos ressortissants ; ou de ceux qui
veulent accéder à la nationalité française après de longues démarches. Oui, nul ne doit être oublié. Dans la France
telle que nous la voulons, personne ne doit être écarté au prétexte de sa fragilité, de sa vulnérabilité ou de ses
croyances ou de ses convictions.
Et pour unir, la langue française doit être regardée comme un instrument supplémentaire... même l'élément principal
parce que ce qui nous permet d'être à l'égal des autres, c'est de maîtriser de la même manière la langue française.
C'est pour ça que nous avons créé cette agence pour la langue française, parce que ce que nous devons donner à
chacun de nos enfants, la possibilité non pas de parler français mais de bien maîtriser la langue, parce que c'est avec
la langue que nous communiquons, que nous créons, que nous inventons et que nous pouvons être ensemble.
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Et puis comment ne pas évoquer l'éducation nationale, cette grande force qui ici est représentée à travers ces
établissements ; et qui, en France, doit être regardée comme un atout majeur pour notre pays ; et qui doit donc
disposer des ressources et des moyens indispensables pour permettre la formation de tous nos enfants. La formation,
cela vaut même au-delà de l'éducation nationale... toute la vie que nous devons l'organiser. Et ce service public
essentiel qui est celui de l'éducation doit être à chaque fois conforté et renforcé.
Tous les Français, je le disais, qui contribuent au bien commun, aucun qui ne doit être oublié et tous qui doivent être
reconnus pour ce qu'ils sont, à part entière comme citoyen et tous ensemble.
C'est la raison pour laquelle il était si important de vous retrouver, communauté française, pour vous dire que vous
contribuez au bien commun, qu'aucun de vous n'est oublié et que vous permettez à la France de rayonner ici à
Madagascar.
Vive la République française, vive Madagascar, vive l'amitié entre la France et Madagascar./.
(Source : site Internet de la présidence de la République)
(fin de l'article)
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6 - Madagascar - Mémorial du lac Anosy - Discours de M. François Hollande, président de la République
Monsieur le Premier ministre,
Mesdames, Messieurs les Ministres,
Mesdames, Messieurs les Parlementaires, les Élus, je salue les autorités militaires,
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,
Mesdames, Messieurs,
C'est la première fois depuis l'accession de Madagascar à l'indépendance qu'un président de la République française et
un chef du gouvernement malgache viennent s'incliner ensemble devant le monument aux morts du lac Anosy.
Ce monument a été érigé en 1924. L'endroit était sans doute plus paisible qu'aujourd'hui mais ce monument voulait
rendre hommage aux soldats français et malgaches qui étaient tombés durant la Grande Guerre. En effet, pendant tout
ce conflit, et surtout à partir de 1916, des dizaines de milliers de soldats de Madagascar ont été enrôlés et sont partis
de l'autre côté du globe pour se battre pour la France. Sur plus de 45.000 engagés de la Grande Ile, 2.500 ne sont
jamais revenus et plus de 1.800 ont été blessés.
Au souvenir de la Grande Guerre, et il y a ici sur ce monument le rappel des batailles qui ont eu lieu pendant la
Première Guerre mondiale, s'est ajouté celui des morts de la Seconde Guerre mondiale puisque là encore plus de
10.000 Malgaches ont pris part aux combats dès 1940 et un tiers ne sont jamais revenus. Il y a en France de
nombreux lieux de mémoire qui rappellent ce sacrifice, à Paris dans le bois de Vincennes, à Monthermé dans les
Ardennes ou à Laxou en Meurthe-et-Moselle - et j'en oublie sans doute.
Il y a aussi des noms qui sont restés gravés dans nos mémoires. Je pense notamment à Justin Resokafany qui s'était
engagé dès 1940, avait été fait prisonnier, s'était évadé, avait rejoint à Londres les Forces françaises libres, avait
participé aux campagnes de Tunisie, d'Italie, puis fut à nouveau prisonnier, s'évada et continua le combat pour la
France ! Il fait partie des 11 Malgaches auxquels mon pays a remis la médaille des évadés.
C'est parce qu'il y avait eu cet engagement des Malgaches pour la France mais aussi pour la liberté que beaucoup après
la Seconde Guerre Mondiale ont commencé à songer à l'indépendance, à cette aspiration qui montait du peuple. Ce
mouvement a soulevé l'ile tout entière en 1947 et elle fut brutalement réprimée par la France.
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En 2005, le président Jacques Chirac a dit que rien ni personne ne pouvait effacer le souvenir de toutes celles et de
tous ceux qui perdirent injustement la vie dans ces circonstances. À mon tour, ici même, je rends hommage à toutes
les victimes des événements de 1947, aux milliers de morts et à tous les militants de l'indépendance de Madagascar
qui ont été alors arrêtés et condamnés pour leurs idées.
Il y avait parmi ces grandes voix de la Grande Ile trois députés qui ont été privés de leur immunité parlementaire et
jetés en prison comme le député et poète Jacques Rabemananjara. Il avait lancé ce cri qui est entré dans l'histoire de
la littérature comme d'ailleurs l'un des grands textes de la Francophonie. «Antsa». C'est un poème fleuve, une forme
de lettre d'amour d'un intellectuel engagé pour son île mais aussi un chant d'espoir pour tous les opprimés. Dans la
préface qu'il avait donnée à ce texte majeur, François Mauriac avait écrit «C'est la liberté et non l'oppression que les
peuples apprennent de nous, la France, malgré nous. C'est dans la liberté et non dans l'oppression qu'ils demeureront
fidèles». Bien plus tard, Jacques Rabemananjara est devenu ministre dans le gouvernement de son pays devenu
indépendant et en 1988, l'Académie française lui a décerné le grand prix de la francophonie. Il fut le premier écrivain
de l'hémisphère sud à le recevoir.
Voilà le beau symbole qu'il fallait rappeler ici car ce qui nous rassemble aujourd'hui, c'est bien sûr l'histoire, la
mémoire, le sacrifice mais c'est aussi une langue, une culture, une conception des valeurs pour le monde, une
aspiration à la liberté, et aussi et surtout un engagement : un engagement pour le développement, un engagement
pour la lutte contre les inégalités, contre le réchauffement climatique - qui aboutit, on le sait, à des catastrophes - et
donc la même volonté de pouvoir être utiles ensemble. Et c'est ce que je voulais ici prononcer, un message qui bien
sûr s'inscrivait dans l'histoire, mais qui portait une espérance et rappelait l'amitié entre la France et Madagascar.
Vive Madagascar !
Vive la France !
Vive l'amitié franco-malgache !./.
(Source : site Internet de la présidence de la République)
(fin de l'article)
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7 - Cuba - Disparition de Fidel Castro - Déclaration de M. François Hollande, président de la
République
Fidel Castro était une figure du XXe siècle. Il avait incarné la révolution cubaine, dans les espoirs qu'elle avait suscités
puis dans les désillusions qu'elle avait provoquées. Acteur de la guerre froide, il correspondait à une époque qui s'était
achevée avec l'effondrement de l'Union soviétique. Il avait su représenter pour les cubains la fierté du rejet de la
domination extérieure.
La France qui dénonçait les atteintes aux droits de l'Homme avait toujours contesté l'embargo imposé par les
États-Unis à Cuba. Elle s'était félicitée de son ouverture et du dialogue qui s'était rétabli entre les deux pays.
Je l'avais rencontré le 11 mai 2015 au cours de la première visite d'un chef d'État français à Cuba depuis la révolution.
J'adresse à Raoul Castro son frère, à sa famille et au peuple cubain mes condoléances./.
(Source : site Internet de la présidence de la République)
(fin de l'article)
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8 - Cuba - Disparition de Fidel Castro - Déclaration de M. Jean-Marc Ayrault, ministre des affaires
étrangères et du développement international
Fidel Castro vient de s'éteindre à Cuba. J'exprime mes condoléances à ses proches et ma solidarité au peuple cubain.
Avec sa disparition, une page de l'histoire du 20e siècle se tourne. Elle avait été marquée par l'espoir de
l'émancipation et la déception d'un système qui ne respectait pas les droits de l'Homme.
La reprise récente du dialogue avec les États-Unis a ouvert la voie à une fin de l'embargo américain contre Cuba,
embargo que la France n'a jamais accepté. Je forme le voeu que cette évolution se poursuive, qu'elle s'accompagne
d'une ouverture de ce pays au monde et d'une réponse aux aspirations du peuple cubain à la liberté.
Conformément à ses valeurs, la France est prête à soutenir les progrès en ce sens./.
(fin de l'article)
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9 - Namibie - Climat - Entretien de M. François Hollande, président de la République, avec M. Hage
Geingob, président de la République de Namibie - Communiqué de la présidence de la République
Le président de la République a reçu le 28 novembre 2016, au Palais de l'Élysée, le président de la République de
Namibie, M. Hage Geingob, en visite officielle en France.
Le chef de l'État a félicité son homologue pour son implication dans les négociations internationales sur le
changement climatique, la ratification rapide de l'Accord de Paris par la Namibie et son engagement en faveur de la
transition énergétique. À l'occasion de cette rencontre, une déclaration d'intention relative à la coopération
scientifique dans le domaine de la lutte contre le changement climatique a été signée par Mme Ségolène Royal,
ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, avec son homologue namibien M. Pohamba Shifeta.
Les deux présidents ont échangé sur les perspectives de renforcement des relations économiques entre la France et la
Namibie, saluant notamment l'intérêt des entreprises françaises pour les secteurs des énergies renouvelables, de l'eau,
de l'agriculture, de la pêche ou des transports en Namibie. Dans le domaine du tourisme, les deux États ont affiché
leur ambition de développer leurs échanges institutionnels et en matière de formation professionnelle. Le
renforcement de nos relations passe également par l'engagement en faveur de la culture, avec la signature d'une
déclaration d'intention sur la coopération culturelle.
Les deux présidents ont aussi évoqué divers sujets d'actualité internationale. Le président Geingob a notamment
confirmé sa participation au sommet Afrique-France de Bamako de janvier 2017./.
(Source : site Internet de la présidence de la République)
(fin de l'article)
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10 - Iran - Accident de train - Déclaration du porte-parole du ministère des affaires étrangères et du
développement international
C'est avec émotion que nous avons pris connaissance du très lourd bilan de l'accident ferroviaire survenu le 25
novembre sur la ligne reliant Téhéran à Machhad, qui a coûté la vie à environ quarante personnes selon les derniers
bilans.
La France présente ses condoléances aux familles des victimes et souhaite un prompt rétablissement aux blessés.
Elle assure l'Iran de sa solidarité dans cette épreuve./.
(fin de l'article)
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11 - Nations unies - Mission du conseil de sécurité en République démocratique du Congo et Angola Intervention du représentant permanent de la France auprès des Nations unies
Monsieur le Président,
Permettez-moi tout d'abord d'adresser mes chaleureux remerciements au secrétariat des Nations unies, en particulier
au département des opérations de maintien de la paix et à la MONUSCO, pour avoir rendu possible la mission du
conseil de sécurité, du 11 au 14 novembre derniers. Permettez-moi d'en remercier également la présidence
sénégalaise. Nous souhaitons continuer à travailler avec le secrétariat pour tirer tous les enseignements de cette
importante mission.
Je tiens aussi à remercier vivement l'Angola, avec qui nous avons formé une équipe soudée pour mener cette visite qui
nous a conduits successivement à Kinshasa, Beni et Luanda.
Je centrerai mes remarques sur l'étape en RDC, où le conseil de sécurité était venu pour discuter avec les forces vives
de la nation de la situation politique actuelle, dans le contexte des récentes tensions qui ont agité le pays en raison
du retard du processus électoral, ainsi que des enjeux de sécurité, en particulier de la protection des civils et la lutte
contre les groupes armés dans l'Est du pays. Comme je l'ai dit, le conseil s'est rendu successivement à Kinshasa et à
Beni, dans le Nord Kivu.
À Kinshasa, le conseil de sécurité a rencontré un grand nombre d'acteurs : le conseil a notamment rencontré le
président et le Premier ministre congolais, des représentants de la majorité présidentielle et de l'opposition signataire
et non signataire de l'accord du 18 octobre. Nous avons pu également échanger avec la conférence épiscopale
nationale du Congo, la CENCO, des représentants des mouvements de défense des droits de l'Homme, des associations
de jeunesse et de femmes. Nous avons eu en outre des échanges très utiles avec l'encadrement de la MONUSCO.
À Beni, le conseil a pu s'entretenir avec les différentes composantes de la MONUSCO, les gouverneurs du Nord et Sud
Kivu ainsi que le maire de Béni et le commandement des FARDC. Le conseil s'est également entretenu avec des
représentants des populations locales victimes des récentes exactions.
Cette mission, pour essayer d'en tirer avec vous les principaux enseignements, a permis au Conseil de sécurité de
porter deux messages :
Premier message, la RDC est à un moment charnière de son histoire : pour la première fois, une transmission pacifique
du pouvoir à l'issue du mandat du président Kabila est possible. C'est en soi un motif d'espoir, mais sa réalisation
nécessite que toutes les forces politiques du pays parviennent à s'unir pour répondre au souhait du peuple congolais.
Le dialogue reste la voie privilégiée pour surmonter les différends qui subsistent.
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Deuxième message que nous avons porté : la tenue d'élections libres, justes, crédibles, ouvertes, transparentes,
pacifiques et dans le délai le plus court possible, conforme à la constitution congolaise, est attendue par tous. Il
revient aujourd'hui à l'ensemble des forces politiques de s'assurer que le pays reste sur la voie de la paix et du
renforcement de ses institutions démocratiques.
Face à ces messages, portés de manière très unie par l'ensemble des membres du conseil de sécurité, tous les
interlocuteurs ont fait part de leur souhait d'éviter un nouvel épisode de violence après les événements tragiques des
19 et 20 septembre 2016. Ils nous ont assuré de leur disponibilité à poursuivre les discussions, après l'accord du 18
octobre, dans un cadre plus large et plus inclusif pour aboutir à une feuille de route claire et précise, fondée sur un
consensus large, permettant de définir un schéma de transition et un calendrier électoral précis.
Le conseil de sécurité a clairement encouragé l'ensemble des acteurs à poursuivre ces discussions pour que le
processus électoral puisse se tenir dans un climat pacifique et dans un esprit de consensus, qui rassemble l'ensemble
des forces politiques congolaises.
Le conseil a aussi encouragé les parties à prendre les mesures de confiances qui s'imposent, telles que la levée des
poursuites judiciaires à des fins politiques, la libération des prisonniers politiques, un engagement clair de tous à
respecter la Constitution et l'ouverture de l'espace politique, afin de permettre à ces discussions de se tenir dans des
conditions sereines et d'aboutir rapidement.
Le conseil a enfin appelé à ce que ce processus puisse s'accompagner d'un débat politique libre et constructif, où la
liberté d'opinion, de réunion, un accès équitable aux médias sont garantis et où la sécurité et la liberté de circulation
de tous sont assurées. Le conseil de sécurité a appelé à ce titre les autorités congolaises à rétablir le signal de Radio
France Internationale et à lever l'interdiction de manifester. Il a par ailleurs appelé les forces de l'opposition, de leur
côté, à faire acte de responsabilité et à s'assurer du caractère pacifique de leurs manifestations.
C'est le message que tous ensemble, les 15 membres du conseil, nous avons fait passer à tous les acteurs politiques
que nous avons rencontrés. Des compromis seront nécessaires de part et d'autre, et nous avons espoir que l'esprit de
responsabilité des responsables politiques prévaudra. La médiation conduite actuellement par la CENCO mérite notre
soutien. Elle a le potentiel de faire venir les parties au compromis nécessaire pour que la RDC connaisse une transition
pacifique après le 19 décembre.
Le conseil reste attentif à la situation des populations civiles dans l'Est du pays. Tout doit être fait pour les protéger.
C'était également un volet essentiel de la visite.
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Le conseil de sécurité s'est rendu pour la première fois à Béni afin d'exprimer sa solidarité avec les victimes des
récentes violences. Nous y tenions tout particulièrement. Les atrocités qui ont été commises dans cette région depuis
deux ans sont un défi pour nous tous, pour la dignité humaine, pour la paix et la stabilité de la RDC et de la région.
Dans l'Est de la RDC, il n'y aura pas de sécurité durable tant que les groupes armés illégaux continueront à sévir dans
la région. Le conseil a pu constater que ce problème doit appeler une réponse globale : militaire, grâce à la MONUSCO
et aux forces armées de RDC qui combattent sur le terrain ; politique et judiciaire aussi, en luttant contre les trafics
illégaux de ressources naturelles et en mettant fin aux circuits de prédation qui permettent à ces groupes de subsister,
et en poursuivant en justice les auteurs de ces exactions. La collaboration entre les pays de la région est par ailleurs
essentielle pour y parvenir.
Le conseil, dans ce cadre, a apporté son soutien résolu à la MONUSCO, qui venait d'être frappée le 8 novembre par une
attaque sans précédent. Nous avons entendu le message des représentants de la société civile de Beni, qui appellent à
une plus grande efficacité de la mission. Elle doit en effet pouvoir s'adapter aux nouveaux enjeux et se montrer
robuste et flexible pour être la plus efficace possible. Ce fut l'objet des discussions du conseil avec le commandement
de la MONUSCO et nous poursuivrons cette tâche en bonne coordination, bien sûr, avec le secrétariat. La MONUSCO a
la confiance du Conseil de sécurité et sait pouvoir compter sur son soutien dans cette phase d'adaptation.
Voilà Monsieur le Président les quelques éléments d'information et enseignements que je tenais à porter à votre
connaissance.
Je vous remercie./.
(fin de l'article)
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12 - Statut de l'Ile de Clipperton - Biodiversité - Intervention de Mme Barbara Pompili, secrétaire
d'État chargée de la biodiversité, à l'Assemblée nationale
Monsieur le Président, Monsieur le Président de la commission des lois, Monsieur le Rapporteur, Mesdames et
Messieurs les Députés, longtemps, Clipperton n'a pas reçu toute l'attention que cette île stratégique méritait. L'île de 8
kilomètres carrés, dont 2 kilomètres carrés de terres émergées, n'est ni un département ou région d'Outre-mer, ni une
collectivité d'Outre-mer et ne compte pas de présence humaine. Pour le dire autrement, Clipperton demeure à certains
égards un «territoire méconnu», pour reprendre le titre du colloque que vous avez organisé à l'Assemblée nationale
l'an passé, Monsieur le Rapporteur.
L'État a pu lui-même sembler quelque peu distant vis-à-vis de cette île dont l'importance ne doit pas être négligée. Ce
temps paraît bien lointain tant le Gouvernement a voulu s'engager à renouveler l'action de l'État à l'égard de
Clipperton. Il s'agit là, je crois, d'une volonté forte de l'exécutif en la matière.
Le Premier ministre Manuel Valls, dont il faut saluer la détermination à cet égard, a en effet nommé Monsieur le
Rapporteur, en qualité de parlementaire en mission pour qu'il établisse un rapport portant sur les voies et moyens de
moderniser les dispositions juridiques ayant trait à Clipperton.
Monsieur le Rapporteur - et nous l'avons entendu - vous vous êtes passionnément investi dans cette mission qui était
un véritable défi, tant la distance géographique était significative et l'objet d'étude singulier. Je souligne en
particulier que vous avez été le premier élu de la République à vous rendre sur l'île en mai 2015. Cette expérience
signale l'engagement très personnel que vous avez pour Clipperton, dont vous venez encore de témoigner, et cela vous
honore.
Votre rapport est unique dans son contenu. Rarement une étude aura été aussi complète au sujet de Clipperton. Le
travail réalisé propose des recommandations originales et ambitieuses. Mais il dresse aussi un triste constat, celui d'un
territoire insuffisamment mis en valeur, où les déchets s'accumulent dans l'indifférence et où la faune et la flore se
dégradent du fait des actions anthropiques.
Nous voulons ici affirmer avec force que Clipperton fait pleinement partie du territoire français et mérite toute notre
attention. Dans la continuité des voeux exprimés par le Premier ministre et le président de la République, ce
Gouvernement entend pleinement investir ce territoire.
Nous tenons donc à vous rassurer : en dépit de son éloignement et de son isolement, l'État entend manifester son
plein intérêt pour Clipperton qui lui confère une position unique dans le Pacifique Nord. Il continue à affirmer la
souveraineté française - notre souveraineté - sur le territoire. L'exercice n'est pas évident. La plus proche des terres
françaises disposant de moyens de surveillance est Tahiti, à 5400 kilomètres et 11 jours de mer. Malgré ces difficultés,
la présence française est assurée par le passage régulier d'une frégate - le Prairial - venue de Polynésie française et
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par des débarquements occasionnels. Pour le dire autrement, Clipperton n'est pas un territoire sans maître et l'État
entend bien le rappeler.
La proposition de loi que nous examinons aujourd'hui participe dès lors au rappel le plus solennel de la pleine
souveraineté de la France sur Clipperton. Elle participe par ailleurs à cette volonté des pouvoirs publics de s'engager
de manière plus directe en faveur de l'île et de la protection des ressources qui y sont attachées. Car, nous le savons,
l'affirmation de notre souveraineté sur Clipperton passe aussi par la défense des ressources de sa zone économique
exclusive ainsi que par la protection de sa formidable biodiversité.
Avec votre permission, Monsieur le Président, je souhaiterais, en tant que secrétaire d'État chargée de la biodiversité,
insister sur l'importance du point de vue écologique, de ce morceau de terre au milieu de l'océan. Une mission
scientifique menée en 2005 par Jean-Louis Étienne avec le concours du muséum national d'histoire naturelle, du CNRS
et d'autres institutions scientifiques, a réalisé un inventaire de la biodiversité de ce territoire qui est un des systèmes
insulaires le moins perturbé au monde. Le résultat est très impressionnant, y compris la découverte de nouvelles
espèces. Jean-Louis Étienne a conclu qu'il était indispensable de «protéger le laboratoire de l'évolution». Je remplace
aujourd'hui la ministre de l'Outre-mer, mais je souhaite partager avec vous l'honneur et le plaisir de défendre un des
joyaux de la biodiversité.
La pêche incontrôlée et la surpêche constituent, vous l'avez dit, une des menaces principales, en particulier celles
constatées aux abords de l'atoll. Si rien n'est fait, il n'y aura plus rien à pêcher autour de Clipperton et cet écosystème
unique au monde, dont la France est responsable, sera détruit.
Hier, au Journal officiel, Mme Ségolène Royal a fait paraître deux arrêtés protégeant cette biodiversité. Une preuve de
plus de l'importance que le Gouvernement accorde à cet atoll corallien.
J'en viens sans plus attendre au texte qui nous est soumis aujourd'hui. Je voudrais d'abord remarquer que cette
proposition de loi révèle à nouveau votre engagement sans faille, Monsieur le Rapporteur puisque vous avez pris
l'initiative de proposer un texte à la suite des recommandations que vous aviez formulées. Du projet à sa
concrétisation, il n'y a qu'un pas qui est aujourd'hui en passe d'être franchi.
En effet, le Gouvernement est favorable à une modification du cadre législatif qui régit Clipperton. Cette modification
doit ouvrir la voie à une meilleure prise en compte de l'île dans notre droit et dans les priorités de notre action
publique. Elle doit poser les bases d'une plus grande valorisation de ce petit territoire et d'une meilleure défense de
ses ressources.
Afin de donner tout son sens à l'engagement de l'État en faveur de Clipperton, le Gouvernement proposera des
amendements à la proposition de loi qui vous est soumise. Il s'agit en effet de rendre les modifications proposées
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cohérentes avec les priorités du Gouvernement et de les coordonner avec l'état du droit existant.
S'agissant du changement de nom de l'île, nous sommes évidemment sensibles à l'idée de redonner à Clipperton son
nom originel. Ce serait la marque de notre attachement à ce territoire. Mais nous avons deux craintes. D'abord, la
dénomination de Clipperton est constitutionnelle et figure à l'article 72, alinéa 3 de notre texte fondamental. Ensuite,
il nous semble que ce changement de nom, si louable soit-il, serait de nature à brouiller le message qui est le nôtre :
le territoire est connu, aux plans national et international, sous le nom de «Clipperton» ; celui-ci fait désormais partie
intégrante de son identité. Lui attribuer un nouveau nom pourrait peut-être nuire à l'appropriation de ce territoire par
nos concitoyens. Mais donnons-nous le temps de la réflexion à ce propos.
Venons-en maintenant à l'idée de créer une collectivité à statut particulier. Nous partageons tous le même objectif :
consacrer un statut de Clipperton et donner les moyens à l'État d'exercer pleinement sa souveraineté sur l'île. Or
l'action administrative tend aujourd'hui à se simplifier, à être plus efficace et plus respectueuse des deniers publics.
Dans ces conditions, si nous partageons sans réserve la finalité de la disposition proposée, nous pensons que les
moyens envisagés ne sont sans doute pas les plus appropriés. Voilà pourquoi nous proposons de nous abstenir de créer
une nouvelle collectivité à Clipperton, création qui induirait des lourdeurs administratives et des surcoûts. Le mot
même de «collectivité», étymologiquement, renvoie à la notion de «collectif», donc à un groupement d'individus ce
qui n'est pas le cas, nous le savons, pour Clipperton. C'est pourquoi Clipperton ne peut pas être qualifiée comme
collectivité territoriale.
Suivant la même logique, le passage du régime d'identité législative au régime de spécialité législative pourrait être à
l'origine d'une complexification de l'action publique : pour chaque texte, cette modification induirait de devoir
s'interroger sur son applicabilité ou non à Clipperton. Compte tenu des enjeux, il nous paraît donc plus simple de s'en
tenir au droit existant qui prévoit que les textes adoptés sur le territoire de la République sont applicables de plein
droit à Clipperton, sauf mention expresse en sens opposé.
En revanche, la proposition de créer un poste d'administrateur supérieur pour le territoire paraît propre à rehausser la
représentation de Clipperton dans la République. Nous y sommes pleinement favorables. Cette même logique nous
conduit à soutenir la proposition d'instaurer un conseil consultatif qui assistera l'administrateur supérieur. Le
rapporteur sait mieux que quiconque que l'administration de Clipperton est une affaire de spécialistes et de
passionnés. Réunir l'expertise disponible sur l'île au sein d'un conseil donnera à l'administrateur supérieur les outils
d'une bonne administration du territoire. Ce conseil consultatif remplacera utilement le comité consultatif que prévoit
le droit actuel.
Nous devons également nous assurer que le niveau de protection, tel qu'il vient d'être relevé par les arrêtés publiés
hier, ne soit pas diminué et un ajustement est nécessaire à cet égard pour ne prendre aucun risque. C'est ce qui
explique que nous ayons procédé à quelques modifications de dernière minute. Je prie la représentation nationale de
nous en excuser, car je sais combien il importe de respecter les délais pour pouvoir travailler.
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Enfin, la défense de notre souveraineté sur Clipperton nécessite assurément la défense des droits de pêche attachés à
cette île. L'instauration de sanctions pour les visites effectuées sur ce territoire sans autorisation préalable doit donc
permettre un meilleur contrôle des prélèvements qui y sont opérés. C'est là un message fort à l'adresse de ceux qui
peuvent être tentés de penser que Clipperton est un bien public ouvert à tous.
Mesdames et Messieurs les Députés, la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui constitue un progrès
significatif dans la modernisation de notre politique à l'égard de Clipperton. Grâce à celle-ci, la France s'investit plus
directement et plus volontairement auprès de cette île stratégique. Ce bout de France du Pacifique fait partie
intégrante de notre territoire national. Cette île proche des Amériques appartient pleinement à la France. Nous
sommes déterminés à le rappeler aujourd'hui de la manière la plus solennelle./.
(Source : site Internet de l'Assemblée nationale)
(fin de l'article)
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13 - Lutte contre le terrorisme - Opérations extérieures - Irak - Syrie - Libye - Sahel - Centrafrique Rwanda - OTAN - Audition de M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense, devant la commission de
la défense nationale et des forces armées de l'Assemblée nationale
Merci, Madame la Présidente : je dois en effet vous quitter avant dix-huit heures, pour me rendre à la réunion
annuelle du conseil franco-britannique de défense, que je copréside avec mon homologue Michael Fallon. En cette
période de Brexit, mieux vaut être ponctuel !
Je voudrais, pour commencer, évoquer la situation au Levant, et d'abord en Irak. L'engagement des forces françaises
s'y manifeste en apportant un soutien aérien, à partir de la base H5 en Jordanie et de la base des Émirats arabes unis.
Douze Rafale interviennent régulièrement, avec beaucoup d'intensité ces temps derniers.
En appui des forces au sol, le groupe aéronaval, doté de vingt-quatre Rafale, interviendra jusqu'à la fin du mois de
décembre, et des batteries d'artillerie à Qayyarah soutiennent l'offensive sur Mossoul. À Erbil et Bagdad, nous formons
une partie des forces irakiennes qui sont aujourd'hui engagées à Mossoul.
Nous sommes les deuxièmes au sein de la coalition en termes d'intervention et de présence. Avec le groupe aéronaval,
ce sont 3.775 aviateurs, marins ou soldats qui participent en ce moment à l'opération Chammal. Le retrait du
porte-avions dans la seconde moitié du mois de décembre réduira sensiblement ce chiffre.
La bataille de Mossoul a commencé : elle sera longue et difficile. Les forces de l'Iraqi Counter Terrorism Service (ICTS)
- la Golden division, «Division d'or» -, qui comptent environ 10.000 hommes, sont très bien formées, en partie par
nous. Elles ont commencé à pénétrer dans Mossoul par l'est et déclarent avoir investi le tiers de la ville, mais les
combats sont rudes. On compte beaucoup de morts de part et d'autre. Daech a subi des neutralisations importantes,
mais l'ICTS enregistre également des pertes significatives. La progression sera lente, parce que Daech utilise pied à
pied tous les moyens connus de barbarie : kamikazes et boucliers humains. Par ailleurs, la ville est truffée de mines,
de pièges et de souterrains. La bataille va donc prendre du temps : même si l'avancée a paru rapide dans les premiers
temps, il faudra quelques semaines, voire quelques mois, pour en finir.
De leur côté, les Peshmergas sont intervenus sans entrer dans la ville, comme convenu. Le principe général est que
l'on ne garde pas ce que l'on conquiert, afin que la gouvernance postérieure se fasse dans le respect de ce qu'est la
ville de Mossoul, à dominante sunnite, mais avec des composantes ethniques très diverses : chiite pour une petite
part, chrétienne, yézidi ou kurde. Il faut être extrêmement précautionneux dans la façon d'intervenir. Jusqu'à présent,
malgré la difficulté des combats que je ne veux pas cacher, l'intervention des forces respecte ce qui a été planifié
initialement.
Il faut ajouter deux éléments pour la bonne compréhension de la situation. Les PMF (Popular Mobilization Front),
milices populaires à dominante chiite, font mouvement. Ils sont moins bien armés et moins aguerris que l'ICTS, mais
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redoutables. Le principe est que la ville de Tall Afar, toujours tenue par Daech, ne doit pas être reprise par les chiites,
mais ils doivent pouvoir couper l'articulation entre, d'une part, Mossoul et, d'autre part, Deir ez-Zor et Raqqa. Jusqu'à
présent, tout se déroule conformément à la planification, ce dont nous ne pouvons que nous réjouir, et nous
souhaitons que ce processus puisse continuer dans le même sens.
Nous nous demandions quel serait le comportement de Daech, si ses combattants fuyaient de Mossoul vers Raqqa. Ce
n'est pas le cas, et, manifestement, le choix tactique de Daech est de combattre, voire de mourir, sur place : Daech
préfère un bain de sang plutôt que d'abandonner sa capitale irakienne. En tout cas, le chef al-Baghdadi a exprimé par
divers messages sa volonté d'engager une bataille décisive à Mossoul.
En Syrie, la situation est différente. Il est très important que la bataille de Raqqa ait été engagée. C'était notre
souhait, qui a été validé lors de la réunion des ministres de la défense des pays les plus importants de la coalition, y
compris le secrétaire à la défense des États-Unis, qui s'est tenue à Paris le 25 octobre. Cette bataille sera longue. La
première phase consiste à isoler Raqqa. Les forces démocratiques syriennes (FDS), constituées de Kurdes et d'Arabes en nombre significatif - regroupés au sein de la Syrian Arab Coalition, sont aujourd'hui en mouvement. Là encore, le
principe «on ne garde pas ce que l'on conquiert » est à l'ordre du jour, mais l'isolement de Raqqa devra aboutir à la
prise de la ville, ce qui sera plus long. Toutefois, la volonté d'engager la bataille de Raqqa en même temps que celle
de Mossoul est nette - même si la seconde est en décalage par rapport à la première.
Dans cette zone, Daech a souffert des nombreux bombardements. L'organisation est financièrement affaiblie. Au nord,
elle a perdu une part majeure de son accès vers l'extérieur, notamment via la Turquie. C'est le résultat de l'action de
l'Armée syrienne libre (ASL), soutenue par la Turquie, au nord d'al-Bab. C'est aussi la conséquence de la chute de
Manbij, à la suite de l'offensive des FDS, qui bloque les capacités de sortie vers la Turquie par le nord de la Syrie, ce
qui est positif pour nous. Mais la situation dans cette zone est d'une très grande complexité, en raison de luttes
d'influence entre Kurdes - il y a plusieurs obédiences parmi les Kurdes, qui ne sont pas les mêmes qu'en Irak -, entre
les forces du régime, les différentes oppositions, les Russes, les Turcs, Daech et les tribus arabes. Toutefois, la
présence des FDS et de l'ASL permet d'éviter les transferts de combattants de Daech vers la Turquie et l'Europe.
Si les choses sont solidifiées de ce côté, la complexité géographique varie de jour en jour un peu plus au sud de cette
zone. En Syrie «utile», la population est écrasée depuis des mois sous les bombes russes et syriennes. Nous serions
bien en peine d'y discerner une action contre Daech. La présence de Jabhat al-Nosra est résiduelle. Sur les 5.000 à
8.000 combattants de la résistance syrienne contre le régime dans la partie est d'Alep, quelques centaines se
réclament de Jabhat al-Nosra, le reste faisant partie de la résistance historique au régime de Bachar al-Assad. Les
trêves humanitaires unilatérales, régulièrement annoncées par les Russes pour une dizaine d'heures, n'ont d'autre
utilité que d'offrir un répit aux troupes du régime et de ses alliés. Cette situation est inacceptable, et nous avons eu
l'occasion de le dire à plusieurs reprises.
Le rapport des Nations unies sur les attaques chimiques en Syrie ne laisse pas de place au doute : le régime est
responsable d'au minimum trois attaques chimiques en 2014 et en 2015. Daech est également visé par ces
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conclusions. La France a demandé des sanctions au Conseil de sécurité.
J'en viens maintenant au Liban, où vous le savez nous sommes présents dans le cadre de la FINUL. La nouveauté est la
désignation d'un président, Michel Aoun, et d'un Premier ministre, M. Hariri. Cette situation est positive, le blocage
politique qui existait depuis de nombreux mois est enfin levé. Le principe politique qui continue à présider aux
orientations libanaises est celui de dissociation : la situation dans les États voisins doit rester dissociée de celle qui
prévaut au Liban. Nous souhaitons que ce principe reste appliqué, même si le Hezbollah ne l'applique pas toujours,
puisque ses éléments interviennent en soutien du régime de Bachar al-Assad.
Nous sommes engagés au Liban dans le cadre de la FINUL depuis 1978, et nous y resterons au triple motif de notre
soutien à ce pays ami, de notre engagement au sein des Nations unies et de notre lutte globale contre le terrorisme.
C'est un élément de sécurisation important. Je rappelle que le Liban accueille 1,5 million de réfugiés, ce qui
représente un fardeau pour ce pays qui a besoin de sécurité, de reconnaissance et de moyens pour assurer la politique
d'accueil des réfugiés de Syrie.
Je poursuis ce tour d'horizon avec la Libye. Dans les deux villes où Daech était implanté, notre action a permis de
réduire sa présence. Syrte était le bastion de Daech depuis juin 2015 : il a tenté d'y créer un califat territorial, comme
au Levant. Aujourd'hui, Syrte est en passe d'être libérée : seule une poignée de djihadistes se réclamant de Daech
résiste encore, acculés dans un des quartiers de la ville. Des bombardements américains ciblés, doublés de l'action des
milices de Misrata, ont permis de réduire considérablement leur nombre.
À Benghazi, les djihadistes ont été considérablement affaiblis, mais ils résistent vigoureusement. Dans l'ensemble, la
présence de Daech diminue sensiblement, même si un certain nombre de combattants se sont exfiltrés, en particulier
de Syrte.
Face à cette situation, notre action se résume en trois points. Il faut tout d'abord contenir la menace terroriste. Cet
endiguement se fait à l'ouest, par un soutien à la Tunisie. Nous avons affecté un financement de 20 millions d'euros
pour aider les Tunisiens à assurer leur sécurité. Ce cycle est bien engagé.
L'endiguement se fait aussi à l'est par un soutien à l'Égypte, au sud par l'action Barkhane et au nord par l'opération
européenne Sophia qui, outre la lutte contre les trafics de migrants, contrôle depuis septembre le respect de l'embargo
sur les armes à destination de la Libye décrété par les Nations unies.
Nous continuons ensuite à amasser du renseignement pour pouvoir, si besoin est, agir contre des groupes terroristes.
Enfin, nous soutenons le processus politique en cours et la formation d'un gouvernement d'union nationale, sous
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l'autorité du Premier ministre Fayyez al-Sarraj, reconnu par la communauté internationale. La tâche du Premier
ministre libyen est difficile, car il doit faire face à l'hostilité des durs de chaque camp : l'ancien chef du gouvernement
de salut national Khalifa al-Ghowel, qui cherche, malgré les sanctions internationales à son encontre, à se maintenir
au pouvoir ; les durs au Parlement à Tobrouk, qui a rejeté la composition de l'actuel gouvernement de M. Sarraj ; le
général Haftar, soutenu par les populations de l'est et qui s'est emparé au mois de septembre des installations
pétrolières autour d'Ajdabiya. Il convient donc à nos yeux de continuer à oeuvrer pour un rapprochement de Sarraj et
de Haftar, les deux personnages clés du pays, et de favoriser la formation d'un nouveau gouvernement d'entente
nationale qui soit accepté par le Parlement. C'est à quoi s'emploie notre diplomatie.
J'en viens maintenant au Sahel, où nous déployons 4.000 hommes dans le cadre de l'opération Barkhane. Nous
sommes confrontés à un nouveau type d'actions. L'opération Serval visait à empêcher l'effondrement du Mali et à y
empêcher la formation d'un état terroriste. L'opération Barkhane a pour objectif d'éviter qu'une telle situation ne se
reproduise, et de lutter contre un terrorisme asymétrique plus classique - des groupes essaient de faire des coups
spectaculaires pour valider leur présence et déstabiliser l'ensemble des forces. Je rappelle que nous avons perdu un
homme la semaine dernière : j'ai présidé les obsèques de l'adjudant Fabien Jacq il y a quelques jours. Les risques sont
toujours présents, et ces opérations terroristes visent aussi la MINUSMA.
Nous constatons un regain de tension et une recrudescence des incidents depuis deux semaines, dus à la persistance
de la menace terroriste, en particulier d'Ansar Eddine autour d'Iyad Ag Ghali. Il semble bien qu'un regroupement
s'opère autour de ce groupe, lié à AQMI. Il est rejoint par des éléments provenant du groupe Al-Mourabitoune plus au
sud, et agit en complicité avec le Front de libération du Macina, composé majoritairement de Peuls. Ces groupes sont
plutôt liés à Al-Qaïda qu'à Daech, et leurs effectifs se comptent plutôt en centaines qu'en milliers. Ils sont néanmoins
dangereux du fait de leur capacité d'intervention spécifique, notamment les attentats-suicides. La situation est
préoccupante, même si l'action de Barkhane s'est renforcée vers le nord pour enrayer la recrudescence que nous
constatons depuis deux semaines.
Au Mali, les groupes armés dits «signataires» connaissent également des tensions entre ceux qui se retrouvent autour
de la coordination (CMA) et ceux qui se retrouvent autour de la plateforme, en particulier le groupe autodéfense
touareg Imghad et alliés (GATIA). Ces deux ensembles sont signataires des accords d'Alger, mais se disputent des
représentations, et surtout la maîtrise de certains territoires. Ces tensions se cristallisent souvent autour de Kidal.
Par ailleurs, la mise en oeuvre des accords signés, notamment la mise en place des autorités intérimaires dans le Nord
et les mesures de décentralisation prévues dans les accords d'Alger, tarde à aboutir.
Quelques éléments positifs sont apparus au cours des quinze derniers jours. Les premières patrouilles mixtes ont été
mises en place par les autorités intérimaires, qui commencent à s'installer, même s'il existe des désaccords sur leur
composition et des retards dans la mise en oeuvre. Les choses évoluent positivement, après une période d'inquiétude
qui s'est traduite par la mort d'un soldat français et des victimes au sein de la MINUSMA.
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Le Niger se fragilise, du fait des incursions de groupes liés à Ansar Eddine et Al-Mourabitoune dans le Nord du pays, et
de la pénétration d'éléments liés à Boko Haram venus du Nigeria. Je me suis entretenu samedi avec le président
Issoufou pour proposer des moyens d'action complémentaires que nous allons mettre en oeuvre au nord, pour aider les
forces nigériennes, et au sud, autour de Diffa, pour consolider leur présence. Tout cela se fait dans le cadre de
l'opération Barkhane.
Concernant nos opérations de contre-terrorisme en Afrique, je termine par Boko Haram. J'ai déjà évoqué la scission
qui a eu lieu entre la branche historique, dirigée par Abubakar Shekau et une branche affiliée à Daech, sous le
commandement d'Abu Musab al-Barnawi. Les deux branches se livrent une concurrence meurtrière. Il y a tout de même
quelques bonnes nouvelles : ainsi, certaines des lycéennes de Chibok ont été libérées.
Notre préoccupation est permanente et nous intervenons avec le Royaume-Uni et les États-Unis dans le cadre d'une
cellule de renseignement et de coordination que nous mettons à disposition de la force multinationale mixte
composée des quatre pays riverains du lac Tchad, avec lesquels nous collaborons étroitement. Nous constatons un
effort significatif de ces pays, et le gouvernement britannique a annoncé sa volonté de renforcer ses moyens engagés
dans la zone. C'est une bonne nouvelle, même si elle est tardive. Nous faisons des efforts pour cloisonner les théâtres
et agir sur chacun d'eux selon des modalités spécifiques. Le siège de la force multinationale mixte est à N'Djamena,
ainsi que l'état-major de la force Barkhane, ce qui permet des relations plus étroites.
Il y a quelques jours, je suis allé marquer la fin de l'opération Sangaris, estimant que notre mission était remplie.
Cette mission était triple. Il fallait tout d'abord empêcher des massacres de masse qui se seraient inévitablement
produits sans notre intervention. Il fallait ensuite faire en sorte qu'un processus électoral se mette en oeuvre, c'est ce
qui s'est passé avec l'élection du président Touadéra, que personne n'a contestée. Le président Touadéra est un
personnage éminemment respectable : il est malheureusement sans doute un peu isolé, mais c'est un homme intègre
qui veut sincèrement sortir son pays de cette situation d'insécurité. La troisième mission de Sangaris était de mettre
en oeuvre la présence internationale de la MINUSCA et de EUTM (European union training mission) RCA. La MINUSCA
regroupe aujourd'hui 11.000 hommes, et nous allons y participer de manière plus significative dans les semaines qui
viennent en mettant à la disposition de son commandement une unité de drones tactiques, avec une petite centaine
d'hommes.
EUTM RCA a été créée à notre demande par l'Union européenne pour former l'armée centrafricaine, qui en a bien
besoin. Cette mission est pour le moment commandée par un général français, qui, dans quelques semaines, sera
relayé par un général belge. La réunion des ministres de la défense de l'Union européenne qui s'est tenue hier a
permis d'entériner à l'unanimité toute une série de propositions franco-allemandes, dont un dispositif financier
permettant de fournir des équipements non létaux - uniformes, chaussures, jumelles et gilets pare-balles - aux
bataillons formés lors des opérations de type EUTM RCA.
Dans ce cadre, la Centrafrique est considérée comme un territoire pilote. Il importe que les Centrafricains prennent en
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charge leur sécurité. C'est le message que j'ai délivré à l'Assemblée nationale de la République centrafricaine. Les
parlementaires ne souhaitaient pas notre départ, mais je leur ai dit qu'ils devaient assurer leur propre sécurité. Les
moyens ont été mis en place pour cela, avec la MINUSCA et EUTM RCA. Nous garderons une présence minimale sur
l'aéroport M'Poko, afin d'avoir la possibilité de déployer rapidement des moyens depuis Libreville ou N'Djamena si cela
était nécessaire. Cela a permis de rassurer les autorités, même s'il faudra du temps pour un pays qui n'a jamais
vraiment connu la tranquillité depuis sa création.
Nous savons depuis avant-hier que la sécurisation de la MINUSCA sera assurée par les forces spéciales portugaises. Ce
sera le premier déploiement des Portugais sur ce théâtre, et cette solidarité des pays européens dans les théâtres
d'opérations où nous étions extrêmement présents est une bonne nouvelle.
S'agissant de l'opération Sentinelle, je suis satisfait que la mobilité, la flexibilité et la surveillance dynamique soient
généralisées. C'est une action de longue haleine, mais j'ai pu me rendre compte, à l'occasion d'une visite que j'ai
effectuée la semaine dernière, que les capacités de réactivité, de planification, de maîtrise de la force par nos propres
soldats, sont au rendez-vous. Cette évolution positive est acceptée et validée par l'ensemble des acteurs, alors que
c'était loin d'être le cas au départ.
Enfin, une réunion des ministres de la défense des pays de l'OTAN s'est tenue la semaine dernière. Nous avons validé
les dispositifs de «présence avancée rehaussée» et de «présence avancée adaptée». Ce sont des innovations du plan
d'action pour la réactivité. La présence avancée rehaussée concerne quatre pays : les trois États baltes et la Pologne,
dans lesquels quatre bataillons multinationaux seront déployés, trois dans les États baltes et un en Pologne.
L'état-major de division sera situé en Pologne, qui sera la nation-cadre. La France va déployer un sous-groupement
tactique interarmes de 300 hommes, d'abord en Estonie avec nos alliés britanniques et danois, puis en Lituanie en
2018, avec nos alliés allemands.
Cette présence est l'application des engagements qui ont été pris dans le cadre des conclusions du sommet de l'OTAN
à Varsovie en juillet dernier. Mais nous ne serons pas nation-cadre, car nous estimons que nous faisons déjà beaucoup
de choses par ailleurs. Notre présence viendra en appoint, mais elle sera visible et significative dès le printemps
prochain. Nous serons aux côtés de nos alliés britanniques. Le Royaume-Uni sera nation-cadre pour l'Estonie et
l'Allemagne le sera pour la Lituanie en 2018. Il reste des sujets à régler, notamment en ce qui concerne le
commandement des bataillons en temps de paix et en temps de guerre. Ce sont des sujets de discussion sur lesquels
nous maintenons nos positions, mais je pense que nous aboutirons à un accord à ce sujet avec nos alliés.
La présence avancée adaptée est l'extension du concept de présence avancée vers le sud, en Bulgarie et en Roumanie.
La France y participera par le biais d'escales de navires français plus nombreuses en mer Noire en 2017. Notre
proposition convient parfaitement aux autorités roumaines, que j'ai rencontrées dernièrement. C'est un signe de
solidarité qui n'est pas excessif, mais qui donne un sens politique à notre présence.
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(Interventions des parlementaires)
Madame la Députée, il me paraît important que votre commission sache bien de quoi l'on parle sur le Rwanda. La
dépêche du 1er novembre dernier, qui relate l'accusation portée par la Commission nationale de lutte contre le
génocide mise en place par le gouvernement rwandais contre les militaires français engagés dans l'opération
Turquoise, n'apporte, sur le fond, rien de nouveau. En effet, plusieurs membres de cette commission faisaient déjà
partie de la commission dite «Mucyo», du nom de son président, dont l'objectif était de «rassembler des éléments de
preuve montrant l'implication de l'État français dans la préparation et l'exécution du génocide perpétré au Rwanda en
1994». Rien de neuf non plus, dès lors que, dès le mois d'août 2008, la commission Mucyo publiait un rapport qui
soulignait la responsabilité de vingt militaires français appartenant à la chaîne de commandement de l'opération
Turquoise, de chefs d'état-major et de responsables militaires entre 1990 et 1994. Cette récente publication s'inscrit
donc dans la droite ligne des thèses précédentes, affirmant la responsabilité de vingt-deux militaires français, dont la
liste est à peu près identique à celle de 2008.
Si j'en viens au point de situation judiciaire, une trentaine de procédures sont actuellement conduites par des
magistrats instructeurs du tribunal de grande instance de Paris, la plupart au pôle «Crimes contre l'humanité et crimes
de guerre», et, à ce jour, seules deux procédures sont susceptibles de mettre en cause la responsabilité des militaires
français. Il s'agit, tout d'abord, du dossier dit «Turquoise-Bisesero», dans lequel une dizaine de demandes de
déclassification de documents ont été traitées avec la plus grande diligence par le ministère de la défense. J'ai en
effet toujours suivi les avis de la Commission consultative du secret de la défense nationale. Nous avons ainsi
déclassifié, au total, 1.100 documents, qui ont été communiqués aux magistrats. Je tenais à apporter cette précision,
car j'entends et je lis parfois, y compris en France, des choses contradictoires à ce sujet. Aucun militaire français n'a
été mis en examen dans ce dossier. J'ajoute, pour être complet, que quatre d'entre eux bénéficient, en raison des
mises en cause dont ils font l'objet, du statut de témoin assisté par nos soins. Dans le second dossier, qui concerne
des accusations de viol au préjudice de femmes rwandaises, aucune mise en examen de militaires français n'est
intervenue - je le précise, car, là aussi, j'ai lu ou entendu des déclarations qui ne vont pas en ce sens.
Enfin, une nouvelle affaire est en cours d'instruction, qui concerne l'attentat contre le Falcon du président
Habyarimana, dans lequel deux pilotes français ont également perdu la vie. C'est dans le cadre de cette affaire que les
magistrats ont sollicité l'audition du général Nyamwasa.
Puisque vous abordez ce sujet, je saisis l'occasion pour réaffirmer à votre commission que j'entends défendre sans
concession l'honneur des militaires français lorsqu'ils sont injustement accusés. La vérité ne se découpe pas selon les
voeux de tel ou tel, ni au gré des circonstances qui déplaisent à l'un ou à l'autre.
Affirmer que l'armée française a pris part au génocide est un mensonge indigne, que je ne tolérerai jamais. Faut-il
rappeler que, seule parmi les membres de la communauté internationale, la France a pris toutes ses responsabilités et
engagé avec courage ses forces sur le terrain contre la barbarie ? C'est le devoir de vérité, et lui seul, qui nous
permettra de panser les blessures du passé.
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Monsieur le Député, en Libye, la situation s'améliore, dans la mesure où ne subsistent de Daech que quelques noyaux
durs, restreints, mais composés de personnes capables de tout. Cependant, la stabilisation politique est un impératif
de sécurité pour l'ensemble de la région. À l'est, on peut penser ce que l'on veut du général Haftar, mais la stabilité
est assurée. Tel n'est pas le cas à l'ouest, car Sarraj tarde à s'imposer, y compris à Tripoli, et c'est inquiétant, en
particulier pour la Tunisie. Notre rôle est de faire en sorte qu'un accord soit conclu entre Sarraj, dont l'autorité est
reconnue au plan international, et le général Haftar, afin que puisse être formé un gouvernement validé par le
parlement. J'ajoute qu'il faut être extrêmement vigilant quant à la situation qui prévaut au sud ; c'est la raison pour
laquelle nous y menons des opérations de renseignement. Les déploiements de la force Barkhane nous permettent, du
reste, d'exercer une vigilance accrue. Par ailleurs, l'opération Sophia peut maintenant prendre un tour meilleur puisque
nous avons désormais le droit d'interpeller les trafiquants d'armes. Un problème reste néanmoins à régler puisque le
port de Marseille, dont nous avons proposé qu'il soit le port de déroutement, est éloigné ; il faudrait donc disposer
d'un autre port de déroutement pour pouvoir mener à bien les opérations. Cependant, le dispositif est à l'oeuvre, et
nous avons en permanence un bateau sur zone.
En ce qui concerne le transport tactique et l'A400M, nous avons rencontré des difficultés liées notamment aux
capacités tactiques, puisque, contrairement aux engagements qui avaient été pris, les premiers avions que nous avons
reçus n'étaient pas équipés pour l'autoprotection, le largage de charges et de parachutistes et le posé sur des terrains
sommaires. S'y est ajouté le problème des boîtiers transmetteurs de puissance, les PGB (Propeller gear box), que
plusieurs d'entre vous ont évoqué, à juste titre, lors du débat budgétaire. Je vous avais alors fait part de mon
irritation, pour ne pas dire plus, face à cette situation.
Au cours de l'année 2015, j'avais demandé à Tom Enders que nous soient livrés, avant la fin de l'année 2016, six
A400M parfaitement aux normes en matière de capacités tactiques et - je le lui ai indiqué plus tard - équipés de PGB
ne présentant pas de difficultés techniques, car ces boîtiers imposaient une immobilisation des A400M au bout d'une
vingtaine d'heures de vol, ce qui est catastrophique. Cette situation invraisemblable avait donc provoqué une crise.
J'ai rencontré Tom Enders ce matin avec mes collaborateurs, et cette réunion nous permet de penser que les
engagements pris par Airbus seront tenus, de sorte que nous pourrions disposer, à la fin de cette année, de six A400M
dotés des capacités tactiques que j'ai évoquées et d'un transmetteur de puissance de nouvelle génération, ou rénové.
Celui-ci permettrait d'éviter des immobilisations aussi fréquentes qu'auparavant, puisqu'elles interviendront après 650
heures de vol. Quant au reste de la flotte, il devrait nous être livré, selon les engagements pris par M. Enders ce
matin, dans le courant du premier semestre 2017. L'expression de mon mécontentement a donc payé, mais je suis
comme saint Thomas. Pour l'instant, nous avons deux avions sur six, et le troisième va arriver. M. Enders a fait preuve
d'une grande détermination et je veux croire en sa totale bonne foi.
La réunion qui s'est tenue ces deux derniers jours à Bruxelles a été positive de notre point de vue, puisque quasiment
toutes les propositions de la France et de l'Allemagne - soutenues par l'Italie et l'Espagne, puis par la République
tchèque et la Finlande, notamment - ont été validées à l'unanimité, y compris, donc, par les Britanniques et les
Polonais. Parmi ces propositions figurent une série de mesures que nous souhaitions pouvoir appliquer rapidement,
notamment dans le domaine opérationnel. Je pense à la modularité des groupements tactiques de l'Union européenne,
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destinée à renforcer leur souplesse de déploiement, à la planification européenne des opérations liées à la politique
de sécurité et de défense commune (PSDC), et à la mise en oeuvre de deux systèmes de financement. La rénovation du
système Athena, que je réclame depuis quatre ans et demi, a ainsi été validée ; elle nous permettra d'être plus rapides
en cas de crise. Grâce à l'ensemble du dispositif adopté, nous pourrons accélérer la génération de forces et inciter les
acteurs à y participer rapidement. Nous avons également obtenu une préfiguration des unités susceptibles d'être
engagées dans une opération rapide. Dans cette perspective, nous avons mis en avant l'Eurocorps, avec les pays qui en
font partie, notamment l'Allemagne, l'Espagne, le Luxembourg et la Belgique, ainsi que ceux qui veulent y participer.
Toutes ces mesures ont été validées, y compris, donc, la rénovation du dispositif Athena et le financement
supplémentaire des opérations que nous menons dans le cadre de la PSDC. Seraient concernées, aujourd'hui, les
opérations EUTM RCA et EUTM Mali, par exemple.
Ont également été validées, dans le domaine des capacités, l'extension des investissements de la Banque européenne
d'investissement (BEI) à l'industrie de défense, la mise en oeuvre de ce que l'on appelle l'action préparatoire,
c'est-à-dire le financement par le budget européen de programmes de recherche liés uniquement à la défense - il est
vraisemblable que le programme retenu sera l'hélicoptère «dronisé» - et l'inscription, dans le programme européen
2021-2027, d'un dispositif spécifique de recherche dans le domaine de la défense, qui sera anticipé par l'action
préparatoire décidée dans le cadre du plan d'action que je viens d'évoquer. J'ajoute que le principe du fonds européen
de défense annoncé par le président Juncker, repris par le président de la République et, d'une autre manière, par
Thierry Breton, a également été validé par les Vingt-huit ; il faut maintenant en définir le contenu, mais tout un
ensemble de dispositions financières a été décidé, qu'il n'était pas évident d'obtenir.
Ces décisions seront reprises par le Conseil européen de décembre. Il s'agit d'une avancée qualitative d'autant plus
significative que le concept d'autonomie stratégique de l'Union européenne a été affirmé et constitue la ligne de force
de l'ensemble du document. Celui-ci a été validé, je le précise, en présence du secrétaire général de l'OTAN, qui a
souligné la complémentarité de l'action de l'Europe de la défense en cours de constitution et des conclusions du
sommet de Varsovie. Je tiens à votre disposition les documents qui vous permettront de comprendre comment tout
cela s'est passé. Du reste, le Parlement européen devra valider quelques points, mais c'est en bonne voie. Une
véritable volonté a été affirmée et les réserves qui ont pu se manifester ont été gommées.
Monsieur le Député, la première question qui se pose, à propos du jour d'après, est de savoir qui gardera la ville
lorsque ses occupants se seront retirés. À Mossoul, ce seront les forces de police irakiennes, formées à cet effet,
comme ce fut le cas également à Ramadi. Ensuite, les diplomaties qui sont intervenues, notamment les diplomaties
française et américaine, ont convenu - conformément, je crois, à la volonté du Premier ministre irakien et sans doute
aux bons accords qui ont fini par être conclus entre ce dernier et le président Barzani - que sera constitué une
gouvernance de l'ensemble de la région de Ninive qui permettra d'assurer le respect des différentes communautés.
Jusqu'à présent, je n'ai aucune raison de mettre en doute le processus. Certes, je pourrai mieux apprécier la situation
lorsque je me rendrai sur place mais, miraculeusement peut-être, ce processus se déroule conformément à nos
souhaits. Je précise cependant que cela implique toute une série de lignes rouges à ne pas franchir doit être tracée
pour éviter des perturbations secondaires. La vigilance s'impose donc, mais tout se déroule bien, y compris la
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planification, même si - les images de télévision montrent parfois un peu d'euphorie - les combats sont très durs : on
dénombre plusieurs centaines de morts de chaque côté.
(Interventions des parlementaires)
Monsieur le Député, je peux vous indiquer que l'opération EUTM Mali ne compte plus que 5% à 6% de Français. Le
total des effectifs, soit 500 personnes, reste le même ; les Français ont donc été remplacés. Ces effectifs proviennent,
du reste, de très nombreux pays. En ce qui concerne les opérations un peu plus «vigoureuses», l'Allemagne - et c'est
une bonne nouvelle - va déployer, dans le cadre de la MINUSMA, des NH90 et des Tigre, en remplacement des
hélicoptères des Néerlandais. Les hélicoptères sont en effet tout à fait essentiels dans cette opération. Participent
également à cette force la Suède, l'Italie, l'Espagne - je ne peux tous les citer. La situation s'améliore de jour en jour.
À ce propos, je tiens à citer l'exemple de l'Allemagne, qui jusqu'à présent participait plutôt à des opérations de
formation et qui contribue désormais à la MINUSMA - c'est un élément très important - avec des hélicoptères de
combat. Quant au Portugal, il fournit les forces spéciales destinées à assurer la sécurité de la MINUSCA. Il s'agit donc
d'une posture dure.
Le texte de l'Europe de la défense que j'évoquais tout à l'heure est l'aboutissement de quatre ans de bataille, pour moi.
En ce qui concerne la vidéo que vous avez évoquée, les missiles Milan ne font pas partie du déploiement de canons
CAESAR... Pour le reste, vous comprendrez que je ne fasse pas de commentaires. Il y a des vidéos qui circulent sur
plein de sujets...
En ce qui concerne la participation de la réserve à l'opération Sentinelle, la moyenne s'établit à 726 hommes par jour
pour l'année 2016, sachant que, pendant l'été, nous avons atteint 1.000 hommes par jour, pour des raisons de
disponibilité compréhensibles. Notre objectif est d'atteindre 1.500 hommes par jour à la fin de 2018.
Monsieur le Député, la présence italienne en Libye s'explique à ma connaissance par l'existence d'un hôpital italien où
sont soignés les combattants des milices qui attaquent Syrte. Et, à ma connaissance, il n'y pas de missiles déployés
par les italiens.
Et, pour que nous intervenions dans les eaux territoriales libyennes, il faut que la demande nous en soit faite par le
gouvernement légitime et reconnu de la Libye. La mission Sophia comporte néanmoins un volet consacré à la
formation des garde-côtes. Ce pays est indépendant et autonome, mais je partage entièrement votre préoccupation.
La MINUSMA est présente au nord du Mali : à Gao, Tombouctou, Tessalit et en partie à Kidal. Elle souffre beaucoup
actuellement, car certains de ses hommes sont morts et elle compte de nombreux blessés. Toutefois, même si les
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Européens ont pu apporter, grâce à leurs hélicoptères, une aide précieuse, son principal problème réside dans
l'insuffisance de soutien logistique et de véhicules blindés, tout à fait indispensables pour couvrir le périmètre
concerné et assurer sa présence et l'approvisionnement au nord. La MINUSMA entretient des liens étroits avec
Barkhane ; des rencontres ont lieu chaque semaine.
S'agissant des OPEX, je suis ravi que nous soyons d'accord, Monsieur le Député. Évidemment, dans son rapport, la Cour
des comptes suit une logique, la même, du reste, que certains parlementaires qui estiment que la dotation des OPEX
est insuffisante. Mais si nous suivions leurs conseils, ce sont, au bout du compte, les crédits consacrés aux
équipements qui en pâtiraient. S'achève actuellement la négociation sur la fin de gestion, qui est toujours un moment
très sportif ; les clignotants sont passés de l'orange au vert. Or, si l'on suivait la Cour des comptes, nous n'aurions pas
obtenu les 830 millions de compléments OPEX.
Monsieur le Député, je vais examiner la question du différentiel d'indemnisation, mais j'ai senti le moral des troupes
s'améliorer dès lors que des unités ont été renforcées. Par ailleurs, je rappelle que j'ai créé l'indemnité d'absence
cumulée (IAC), qui augmente en fonction du nombre de jours d'absence : cette indemnité est versée à partir de 150
jours, et elle augmente à partir de 200 jours, puis à partir de 250 jours. Cela peut représenter plusieurs milliers d'euros
par an pour les intéressés. En outre, le Parlement a voté la défiscalisation de certaines indemnités.
En ce qui concerne le Brexit, les accords de Lancaster House ne sont en aucun cas remis en cause. Par ailleurs, je
constate que, dans les débats entre ministres de la défense de l'Union européenne, le Royaume-Uni adopte une
attitude plus coopérative, estimant, dès lors qu'elle va se retirer de l'Union, qu'elle n'est pas en mesure d'entraver le
processus. Quoi qu'il en soit, cette relation restera singulière : elle est marquée par le bilatéralisme, et elle est
positive. Pour être franc, je souhaiterais que le Royaume-Uni soit davantage présent dans un certain nombre
d'opérations. À cet égard, il est opportun qu'il ait annoncé, la semaine dernière, son intention de renforcer sa
présence au Nigeria. Il était temps ! Mais il est vrai que j'ai constaté, au cours des derniers mois, une certaine fatigue
des forces armées britanniques, liée à la sortie d'Afghanistan et d'Irak, qui a beaucoup joué dans les décisions qu'a
prises - ou que n'a pas prises - le Premier ministre britannique concernant la Syrie. En tout cas, la volonté britannique
est claire.
Mais l'événement le plus frappant, au cours des derniers jours, c'est le renforcement de la coopération
franco-allemande. Avec mon homologue allemande, nous nous adressons, l'une et l'autre, à nos amis respectifs, selon
les affinités historiques et géographiques de nos pays, pour solliciter leur soutien. Si, en septembre, nous n'avions pas
rédigé ce document commun que nous avons soumis à Mme Mogherini, puis aux Italiens, aux Espagnols et aux
Tchèques, nous n'aurions pas obtenu ce résultat. Maintenant, il va falloir le mettre en oeuvre, mais les principes
politiques ont été validés et des décisions ont été prises, dont je pourrais d'ailleurs vous communiquer la liste. En tout
cas, cela commence à devenir intéressant.
Et cette évolution a été favorisée par la sortie du Royaume-Uni. Lorsqu'ils se sont rencontrés après le Brexit, la
chancelière allemande et le président de la République nous ont demandé explicitement, à mon homologue allemande
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et à moi-même, de préparer un dispositif destiné à accélérer l'Europe de la défense. C'est ce que nous avons fait, et
nous en voyons les résultats aujourd'hui. Et, encore une fois, le Royaume-Uni n'a pas voté contre./.
(Source : site Internet de l'Assemblée nationale)
(fin de l'article)
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14 - Diplomatie culturelle - Contrat d'objectifs et de moyens 2016 - 2020 - Audition de la
présidente-directrice générale de France Médias Monde devant la commission des affaires étrangères
de l'Assemblée nationale
Je commencerai par rappeler le contexte dans lequel a été négocié ce contrat d'objectifs et de moyens (COM) entre
l'État et France Médias Monde. C'est le deuxième depuis 2008, année de création de l'audiovisuel extérieur de la France
; le premier est venu à échéance en décembre 2015. Les dernières années ont marqué une rupture, caractérisée par le
terrorisme qui a frappé la France et de nombreux autres pays, la montée du populisme, la difficulté à résoudre la
question de l'arrivée des migrants et la crainte pour l'avenir de la construction de l'Union européenne après le vote en
faveur du Brexit. La montée des périls, loin de nous décourager, nous fait penser que, plus que jamais, nous avons
besoin de médias internationaux porteurs de sens. La bataille qu'il nous faut livrer est aussi celle des idées et, dans
cette bataille, la France et France Médias Monde ont une position singulière.
Le projet de COM 2016-2020 s'inscrit dans la continuité du précédent sur lequel je reviens un instant : il était
fondateur, puisque nous construisions un groupe rebaptisé France Médias Monde. Je me rappelle mon arrivée à la tête
de ce groupe, en octobre 2012. Depuis lors, toutes les équipes ont déménagé en un seul lieu ; nous avons procédé à
une réorganisation opérationnelle des équipes, avec un organigramme respectueux des identités éditoriales de chaque
média et soucieux de transversalité ; nous avons rétabli un groupe qui avait souffert en 2012 ; enfin, nous avons
signé en décembre 2015 un accord d'entreprise qui est le socle nécessaire à la construction d'un groupe audiovisuel
international efficace.
Il convenait d'abord de marquer la spécificité de l'offre éditoriale française dans le paysage audiovisuel mondial.
C'était l'axe déterminant du COM précédent et ce sera celui du COM à venir. Nous avons pour cela fait beaucoup : nous
avons refondu nos grilles de programme, cassé le strict parallélisme des antennes de France 24, augmenté le nombre
d'émissions en direct, créé de nouvelles émissions, délocalisé nos programmes pour être au plus près du terrain, et
nettement développé l'interactivité participative. Nous avons aussi fait une plus grande place à la culture indubitable signature française.
Et puis nous avons réaffirmé nos valeurs, comme en témoigne la devise - «Liberté, égalité, actualité» - de France 24.
Groupe français, nous avons, tout au long des très douloureuses années 2015 et 2016, porté dans nos émissions, en
quinze langues, les valeurs françaises, au nombre desquelles l'universalité et la laïcité, cette dernière notion étant une
notion qui n'est pas toujours parfaitement comprise à l'étranger. Nous avons osé, et parfois nous étions les seuls - en
langue arabe sûrement, en langue anglaise souvent -, à traiter de la liberté d'expression, de Charlie Hebdo et des
survivants des attentats, même si nos journalistes, qui sont de 66 nationalités, ont souvent été menacés sur les
réseaux sociaux et font, pour certains, l'objet d'une protection policière.
Nous nous sommes engagés, avec l'émission Info/Intox, en faveur de l'éducation aux médias ; il est nécessaire que le
service public apprenne aux jeunes gens à se protéger des manipulations sur internet et à distinguer l'information de
la propagande. Nous avons beaucoup défendu la langue française en utilisant des méthodes d'apprentissage à partir
des langues africaines ; c'est un enjeu essentiel pour la francophonie et la place de la France en Afrique. Nous avons
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bien sûr défendu la parité, la diversité dans toutes ses composantes et l'accessibilité des programmes aux personnes
handicapées.
Nous avons aussi réformé l'ensemble de nos rédactions en langues étrangères. Que serait un groupe international
français sans langues étrangères, au moment où la diffusion de BBC World passe de 37 à 48 langues ? Nous avons
relancé notre offre en Roumanie et au Cambodge, et beaucoup augmenté l'offre de RFI en anglais grâce à la synergie
avec France 24 ; nous avons aussi lancé la diffusion en mandingue.
Nous avons fondu tous nos sites internet. Notre stratégie relative aux nouveaux médias, aux réseaux sociaux et aux
accès mobiles a intéressé le groupe d'information américain Mashable, qui nous a proposé de lancer en partenariat la
version française de son site.
Cette stratégie a permis d'obtenir les résultats que je vais rappeler. Avec 51 millions de téléspectateurs, l'audience
mondiale de France 24 a augmenté de 22% en trois ans ; la hausse a été de 16% pour RFI avec 40 millions
d'auditeurs, et de 9% en deux ans pour Monte Carlo Doualiya (MCD), avec 7,3 millions d'auditeurs. Globalement, en
linéaire, nous avons une centaine de millions de téléspectateurs ou d'auditeurs chaque semaine dans le monde. Sur
internet, la hausse de fréquentation de nos médias est considérable ; le nombre de visites de RFI est ainsi en hausse
de 94%. Nous avons atteint le nombre record de 50 millions de fidèles sur Facebook et Twitter avec, chaque semaine,
135 millions de contacts pour l'ensemble de nos médias - étant précisé qu'il ne s'agit pas d'extrapolations mais de
contacts mesurés.
Ces progressions marquantes ont été rendues possibles parce que nous avons renforcé notre présence mondiale, avec
une distribution en croissance supérieure à 50% pour France 24 et cinq nouvelles fréquences FM pour nos radios. C'est
en France seulement que l'audience de nos radios n'a pas progressé.
Le précédent COM tendait aussi à optimiser la gestion de l'entreprise. Notre bilan a toujours été à l'équilibre, bien que
nous agissions avec un budget qui est encore inférieur cette année à ce qu'il était en 2011 mais qui a cependant
progressé. L'État ayant fait des efforts qu'il faut saluer, l'augmentation des crédits en glissement a été de 0,85%
chaque année. Pour l'essentiel, les mesures prises ont donc été financées par redéploiement.
J'ai tenu à faire ce rappel parce que le prochain COM a été pensé dans la continuité du précédent. Le contexte
international est celui que j'ai dit, et la concurrence est très rude. Ainsi, après la vague d'attentats, la BBC s'est vue
doter de 47 millions d'euros supplémentaires en 2015, de 47 millions d'euros encore en 2016, et elle disposera de 120
millions dans les années à venir. Dans le même temps, la révolution numérique ne cesse de produire ses effets et,
dans un double mouvement, de nous contraindre et de nous stimuler en nous poussant en permanence à nous
adapter.
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Le projet de COM prévoit qu'entre 2016 et 2020 les ressources publiques qui nous sont allouées augmenteront de 23,1
millions d'euros, soit 9,5% sur la période et 1,9% par an - plus du double de ce que nous avons connu pendant la
période couverte par le COM précédent. Est également prévue l'augmentation de 15% de nos ressources propres, ce
que nous avons réalisé au cours de la période précédente. Nous poursuivrons bien sûr la maîtrise de nos charges. Ces
éléments conjugués devront permettre un résultat net annuel à l'équilibre ; nous en faisons un principe, puisqu'il
s'agit de deniers publics. Tel est le cadre budgétaire qui nous a été fixé ; sachant les contraintes qui pèsent sur le
budget de l'État, je le salue. Cette trajectoire financière est un témoignage de confiance - même si, évidemment, nous
saurions dépenser le double !
Pour remplir ce contrat, nous comptons mettre en oeuvre une stratégie en trois axes : continuer plus que jamais
d'affirmer notre singularité, renforcer notre présence mondiale et maintenir une gestion rigoureuse.
Nous entendons consolider ce qui a déjà été fait en matière de contenus et pérenniser notre exigence de qualité, dans
toutes nos langues. Nous voulons aussi développer de nouveaux contenus éditoriaux. Cela se traduira notamment par
le lancement, en septembre 2017, de France 24 en langue espagnole. Je remercie les nombreux membres de cette
commission qui, en appuyant ce projet, l'ont rendu possible. C'était indispensable. Tous les grands médias ont un
canal en espagnol, langue de 500 millions de locuteurs et deuxième langue utilisée sur les réseaux sociaux. Nous
émettrons, depuis Bogota, six heures chaque jour. L'appel d'offres a été lancé pour trouver les prestataires et une
filiale a été créée ; 28 personnes seront affectées à la chaîne sur place, et six en France qui appartiennent aux
rédactions de RFI en espagnol et de France 24. L'engouement que suscite ce projet est si fort que j'ai reçu 700
candidatures ! Nous avons un comité de parrainage, et les Latino-américains nous attendent avec impatience ; c'est
très stimulant.
Nous sommes d'autre part le plus gros pourvoyeur de contenus de France Info, la nouvelle chaîne d'information
publique nationale. Nous lui fournissons des journaux internationaux et des duplex quotidiens et nous intervenons
aussi en cas d'éditions spéciales.
Nous poursuivrons la conquête du numérique et passerons au stade industriel en mettant l'accent sur l'animation des
réseaux sociaux et leur modération. Les réseaux sociaux charrient, on le sait, le meilleur et le pire - et souvent le pire
quand l'actualité internationale est douloureuse. Ce qu'il nous est arrivé de lire en ces occasions est intolérable pour
un groupe de médias qui revendique une mission de service public. Nous devons donc renforcer nos moyens de
contrôle des débordements pour ne pas être obligés de fermer nos pages Facebook et nos comptes Twitter quand se
produit une catastrophe.
Nous réaffirmons qu'il existe une mission de service public dans l'univers numérique comme dans la diffusion linéaire,
en particulier en direction de la jeune génération. Pour cette raison, nous avons lancé cette année RFI Savoirs et nous
nous apprêtons à lancer RFI Musique. Mashable France, qui vise les jeunes gens âgés de moins de 35 ans, fonctionne
bien : nous avons franchi, plus vite que prévu, le cap du million de visiteurs uniques.
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Parce que nous pensons qu'il existe un internet «citoyen», nous avons lancé, en 2016, RFI Challenge App Afrique ; 655
projets nous ont été soumis par de jeunes Africains, qui visaient à améliorer la qualité des soins en Afrique par le
biais d'applications numériques permettant de développer l'accès à l'information et aux services de santé. Nous allons
poursuivre dans cette voie : on peut envisager des appels à projets dans le domaine de l'éducation et de l'agriculture,
et les aider ainsi à prospérer. Nous avons également investi dans le domaine du développement durable avec Les
Observateurs du climat. Enfin, nous nous apprêtons à lancer, en coopération avec la Deutsche Welle et l'agence de
presse italienne ANSA, un portail destiné aux migrants pour les informer, en particulier, sur les modes de vie des pays
d'accueil. Le site mettra notamment à leur disposition des outils d'apprentissage des langues. Ce projet de service
public est financé par l'Union européenne.
Nous amplifierons les mutualisations de notre offre éditoriale ; ainsi en sera-t-il pour notre future chaîne en espagnol,
qui est un projet commun France 24-RFI. De nombreux annonceurs souhaitant sponsoriser nos émissions pour l'Afrique
seulement, nous entendons d'autre part régionaliser le signal «monde» en français. Cela permettra des décrochages de
contenus à destination des pays africains et la multiplication des coproductions RFI-France 24 pour cette zone, avec
un signal spécifique.
Nous comptons aussi renforcer notre présence mondiale en nous appuyant sur les supports numériques. Cela se fera en
Europe par le passage à la haute définition et par des fréquences de télévision numérique terrestre (TNT) en Afrique.
En Amérique latine, nous améliorerons notre taux de pénétration avec le développement de France 24 en espagnol. En
Asie, nous avons commencé une percée en Inde et en Indonésie et nous signons aujourd'hui deux accords au Vietnam
où, pour la première fois, nous diffuserons dans 1,5 million de foyers. Nous avons également signé un accord avec la
Corée où il nous faut maintenant développer notre présence, et nous travaillons avec le Japon. En revanche, il est
illusoire d'espérer un développement en Chine : nous l'avons demandé cinq fois, en vain. En Europe, nous aurons
vraisemblablement de nouvelles opportunités en Allemagne avant la fin de l'année et nous venons de reconduire la
présence de France 24 sur la TNT nationale italienne. La France reste une priorité pour RFI et MCD, de manière ciblée.
Nous voulons aussi renforcer notre marketing et de nouveaux moyens sont prévus dans le projet de COM à cette fin.
Enfin, Canal France international (CFI) nous sera rattaché ; ce rapprochement fera l'objet d'un avenant spécifique à
notre COM. Une mission est en cours à ce sujet et nous avons déjà prévu d'accueillir CFI dans des locaux situés à côté
des nôtres.
Nous entendons aussi poursuivre l'optimisation de notre organisation et la maîtrise de l'équilibre budgétaire. Étant
donné la recrudescence des risques, nous continuerons de renforcer la sécurité des équipes envoyées sur le terrain
ainsi que celle de nos bâtiments - qui, comme ceux d'autres médias, font partie de listes de cibles - et de nos
systèmes d'information et de diffusion. TV5, vous le savez, a failli mourir d'une cyberattaque terroriste. Nous
subissons, en moyenne, un million d'attaques de ce type chaque mois. Nous les repoussons, mais nous devons
continuer de nous armer contre ce risque.
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Nous avons commencé de mettre en oeuvre l'accord d'entreprise signé le 31 décembre dernier et continuerons de le
faire. Nous avons aussi pour objectifs de résorber les disparités salariales résiduelles et de continuer à maîtriser la
masse salariale.
Nous poursuivrons notre stratégie d'investissement dans le passage à la haute définition, et nous continuerons, par
souci d'une gestion rigoureuse, à nous intéresser de plus près à nos marchés en renforçant notre expertise en matière
de marchés publics. Nos ressources propres, je vous l'ai dit, devraient croître. Enfin, nous continuerons à renforcer
notre coopération transverse, avec TV5 notamment. En ce moment même, à Marrakech où s'est ouverte la COP22, TV5,
France 24 et RFI sont sur le point d'interviewer conjointement le président de la République, qui nous a accordé son
premier entretien depuis l'élection de M. Donald Trump à la présidence des États-Unis. Nous continuerons de travailler
la main dans la main avec TV5 car nous sommes complémentaires. Les audiences de France Médias Monde et de TV5
montent ensemble, et quand, malheureusement, nous sommes attaqués, nous le sommes ensemble. Je me réjouis
d'une collaboration fructueuse, qui fait l'objet d'un accord avec TV5.
(Interventions des parlementaires)
Vos deux rapporteurs pour avis ont abordé la question des moyens que nous accorde ce nouveau COM. Certes, nous
saurions dès demain comment dépenser 50 millions d'euros supplémentaires ! Mais la progression de nos ressources
sera deux fois supérieure à ce qu'elle était, même si notre budget en 2016 sera encore inférieur à celui de 2011 - ce
qui montre à quel point nos efforts ont été importants. Vous avez raison, Monsieur le Député, nous n'avons plus de
marges de manoeuvre financières.
Cette progression nous paraît donc formidable, même si, par rapport à nos concurrents, nous ne sommes pas très bien
lotis. Mais l'influence de la France dans le monde est bien supérieure à celle que devraient lui donner sa démographie
et son économie. Nous appeler «France», c'est un mot parfois presque magique, c'est une aide considérable. Notre
créneau éditorial est sans équivalent : nous avons beaucoup en commun avec la BBC ou avec CNN, mais nous
présentons de vraies spécificités, et c'est pour cela que les gens nous écoutent et nous regardent. Je suis souvent
frappée par l'image incroyable que projette notre pays. C'est pourquoi, avec moins de moyens que la Deutsche Welle,
notre résultat est supérieur. Notre audience est moins forte que celle de la BBC, mais celle-ci diffuse en trente-sept
langues, et nous en quinze ; l'anglais est en outre plus parlé que le français. Mais je ressens un intérêt très fort et je
suis renversée, je le répète, des réactions que nous avons rencontrées en Amérique latine.
Nous avons signé un accord en Inde en 2014. L'année dernière, une mesure d'audience dans deux villes nous accordait
déjà plus d'un demi-million de téléspectateurs CSP+. L'attractivité est donc bien réelle.
Mais, c'est vrai, les téléspectateurs indiens nous regardent en anglais. Ce n'est pas nous qui décidons de la diffusion.
Nous proposons un signal en français, mais nous dépendons d'intermédiaires. Ainsi, dans les hôtels, le choix est le
plus souvent confié à un ensemblier qui, à son tour, choisit - en Europe, il y a 1.500 chaînes satellitaires, et les hôtels
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s'en remettent donc à des gens dont c'est le boulot.
En ce moment, en Amérique latine, nous faisons la tournée des trente gros câblo-opérateurs - nous ne pouvons pas
disposer d'un satellite de diffusion directe, et nous avons besoin d'une intermédiation locale. Ces opérateurs vont
nous demander si nous souhaitons diffuser nos six heures d'espagnol avec l'anglais ou avec le français ; ce sont eux
qui risquent de nous dire que, si nous couplons l'espagnol avec le français plutôt qu'avec l'anglais, nous ne figurerons
pas dans le bouquet de base... Or, mon but, c'est aussi de nous rendre accessibles au plus grand nombre. Le signal
français sera toujours là ; mais ce sera peut-être une option payante. Et l'équation diffère selon les pays.
J'aimerais moi aussi que le français soit toujours diffusé parallèlement à l'anglais ; mais nous donnons déjà l'anglais,
nous ne sommes pas payés. Ce sont les opérateurs qui ne veulent pas diffuser nos programmes en français.
Ce qui compte, c'est la clientèle : si des députés, des gens importants, se plaignent de l'absence de France 24 en
français, si les ambassades - qui ont souvent des liens avec les hôtels - refusent de faire descendre leurs invités dans
les hôtels où ni France 24 ni TV5 ne sont diffusées en français, alors peut-être que cette situation changera. J'en suis
réduite à vous proposer cette solution ! Mais c'est un point, croyez-moi, auquel je suis extrêmement sensible.
Il faut néanmoins souligner que nous avons signé un accord avec YouTube, dont nous sommes le principal partenaire
français. Nous y sommes diffusés en haute définition, dans toutes nos langues, ce qui nous rend au moins accessibles
sur les nouveaux médias.
Et nous avons un accord avec les hôtels du groupe Accor; c'est en général pour nous un très bon partenaire.
Je note pour conclure sur ce point que nous sommes présents dans 2 millions de chambres d'hôtel - nous venons tout
juste de franchir ce cap important. Nous nous battons mais, je le redis, ce sont des questions de commerce : il faut
montrer que notre présence est commercialement intéressante, et donc protester et dire que l'on ne reviendra pas si le
français n'est pas présent. Peut-être faudrait-il d'ailleurs mettre en place une stratégie plus générale avec les touristes
français.
Monsieur le Député, vous évoquiez la contribution à l'audiovisuel public, dont nos ressources publiques proviennent en
effet. Il y aurait vraiment une réforme à faire, je me permets de le dire devant la représentation nationale : nous ne
nous en sortirons pas avec une assiette archaïque - datant de la diffusion d'un signal hertzien analogique - et les taux
les plus bas d'Europe.
Je ne prétends pas qu'il est impossible de faire des efforts de productivité ; nous en avons consenti beaucoup, et je
suis très heureuse que vous les ayez salués. Mais le coût de la BBC, c'est 6,7 milliards ; le coût du service public
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allemand, c'est 9 milliards ; le coût du service public français, c'est 3,7 milliards. Nous sommes très certainement
perfectibles, mais nous ne coûtons pas grand-chose aux contribuables par rapport à nos voisins. Vous connaissez les
taux de redevance audiovisuelle en Allemagne et au Royaume-Uni... En France, une réforme de l'assiette - qui
permettrait peut-être de baisser le taux, d'ailleurs - est indispensable. Nous pouvons aussi renoncer à être une
démocratie disposant de services publics solides. Moi qui voyage beaucoup, je suis convaincue que notre pays a au
contraire besoin d'être très fort de ce point de vue-là.
J'ai un respect infini pour les gens qui se financent sur le marché ; c'est très dur. Mais le service public donne le la de
l'audiovisuel en général, et il finance aussi une grande partie de la production. Or nous sommes aujourd'hui envahis
par les productions extérieures - il n'est que de citer Netflix. Si la création française n'est pas financée par le service
public, et nul n'ignore les difficultés rencontrées par Canal Plus, c'est notre culture qui est mise en danger. Il y a donc
une vraie réflexion à mener, mais qui dépasse de très loin mes compétences.
Monsieur le Député, vous demandez si France 24 sera bientôt diffusée sur l'ensemble de notre territoire. J'en ai rêvé,
France Info l'a fait - ou presque, puisque nous ne sommes pas diffusés toute la journée. Je continue de trouver utile
d'établir des partenariats entre France 24 et RFI et d'autres télévisions et radios ; mais, à mon sens, RFI comme MCD
auraient aussi un rôle essentiel à jouer dans ce pays. Nous savons parler à l'autre qui n'est pas accessible par les
médias nationaux ; nous savons parler à certains jeunes.
Cela rejoint la question de Madame la Députée sur l'éducation. Nous avons en effet signé un accord avec l'éducation
nationale ; nous sommes réservistes, et nous en sommes très fiers : sur la base du volontariat, plus de trente
journalistes se sont mobilisés, en France et à l'étranger. C'est une expérience formidable, ces rencontres sont
bouleversantes. Nous avons sciemment envoyé des journalistes portant des noms à consonance juive ou arabe dans
des classes de Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne, parfois dans des lycées considérés comme difficiles - ce n'est pas
nous qui choisissons les établissements.
De ces moments très forts est née une émission intitulée «Pas 2 quartier». Les jeunes nous accusaient de ne venir les
voir que pour montrer des voitures brûlées, de ne présenter les quartiers difficiles que de manière négative : c'est
pourquoi nous avons créé cette émission, à laquelle les jeunes envoient des propositions. Nous tournons les sujets,
mais ce sont eux qui sont rédacteurs en chef : ils ont envie de raconter quelque chose. Ainsi, nous avons été guidés
dans Marseille-Nord par des musiciens. Ces émissions font naître beaucoup d'espoir et montrent l'incroyable richesse
de notre pays.
S'agissant de l'égalité salariale, il demeure aujourd'hui un écart de 7%. Selon l'expert du comité d'entreprise (CE), c'est
lié aux recrutements les plus anciens. Nous assurons la parité en termes de responsabilités, de comité exécutif,
d'encadrement, d'effectifs. Le COM prévoit la disparition des inégalités résiduelles. Cette année, les mesures
individuelles concernent les femmes à 53%, et ce n'est pas la première fois. Cela ne correspond pas à 53% de la masse
salariale. Mais nous rattrapons, et l'expert du CE nous a plutôt accordé un satisfecit. Nous visons un écart nul.
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En ce qui concerne la sécurité de nos journalistes, vous n'avez pas oublié l'assassinat de Ghislaine Dupont et Claude
Verlon au nord du Mali, le 2 novembre 2013. C'est un traumatisme dont nous ne nous remettons pas. Nous avons créé
une bourse qui porte leur nom ; nous étions au Bénin pour la remettre le 2 novembre dernier. Ce jour a été désigné
par l'ONU journée internationale pour la fin de l'impunité des crimes commis contre les journalistes, en l'honneur de
nos journalistes et à la suite d'une initiative française.
Une génération de jeunes journalistes et de jeunes techniciens africains est en train de se lever : nous participons à
leur formation, avec Sciences Po et l'Institut national de l'audiovisuel (INA). Ils relèvent le flambeau d'un journalisme
de terrain rigoureux et équilibré. Grâce à la participation de nombreux médias comme Europe 1, Canal Plus, RTL, Le
Monde..., nous les formons au journalisme en zone de crise - ce qui peut d'ailleurs vouloir dire une simple
manifestation.
Nous disposons de procédures d'arrimage très strictes, avec une cartographie des risques. Un officier placé auprès de
moi est chargé de la sécurité ; il valide toutes les procédures, gère l'arrimage au quotidien, le matériel... Nous
continuons d'envoyer des journalistes dans des zones à risques ; en ce moment, nous avons du monde à Mossoul. C'est
un enjeu démocratique majeur ; le silence est dangereux. En ce moment, vous le savez, le signal de RFI est coupé en
République démocratique du Congo. Nous ne voulons pas nous taire, et nous savons que le risque zéro n'existe pas ;
nous savons aussi qu'aucun reportage ne vaut une vie. La formation et les procédures doivent nous permettre de
réduire le risque autant que possible. Mais nous ne vivons pas détendus.
Quant au principe de réciprocité avec la Chine, il est excellent et je l'avais d'ailleurs utilisé à l'époque où je dirigeais
TV5 Monde : la chaîne française est présente sur le bouquet autorisé dans les résidences étrangères et les hôtels
quatre étoiles et plus en Chine ; en échange, CCTV est diffusée en France. Les Chinois semblent vouloir s'en tenir là.
Nous leur expliquons que TV5 Monde est une chaîne généraliste, dédiée à toute la francophonie, mais ils n'ont pas
donné suite aux demandes que nous avons formulées à cinq reprises. Nous pouvons peut-être revenir à la charge
d'autant que des chaînes locales chinoises sont diffusées en France, et pas seulement CCTV.
Monsieur le Député, nous ne sommes effectivement pas les premiers dans le domaine du numérique au Proche et
Moyen-Orient : je n'ai pas les moyens d'Al Jazeera ni d'Al Arabiya, mais nous sommes dans le peloton de tête et même
numéro un en Tunisie.
Et en Algérie, nous sommes en troisième position, derrière Al Jazeera et Al Arabiya. Nous avons un rapport complexe
avec ce pays : quand on s'appelle France, ce n'est pas toujours simple d'être en Algérie ; toutes nos paroles pèsent très
lourd. Nous avons néanmoins le projet d'y ouvrir un bureau en trois langues pour nous y implanter très solidement.
L'Arabie saoudite arrive en tête des clients de l'offre numérique en arabe de France 24, ce qui n'est pas inintéressant
compte tenu de la situation de cette zone géographique et du fait que le numérique est en pleine expansion. Nous
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devons continuer à nous adapter aux nouvelles écritures pour être à la pointe en permanence.
Venons-en aux ressources propres. Si l'idée est d'engranger beaucoup de ressources commerciales, France Médias
Monde n'est pas la mieux outillée. Dans les grandes démocraties, ce sont des services publics qui développent des
chaînes internationales et non pas des groupes privés. Pour financer de tels projets, il faut avoir des pétrodollars ou
un marché national de la taille de celui de CNN. S'appuyant sur un énorme marché national, CNN peut financer son
développement international à un coût marginal. On observe d'ailleurs le même phénomène dans le domaine du
cinéma où l'exportation de films américains se fait à un coût marginal. En France, à part Canal+ qui va un peu en
Afrique, aucun groupe privé ne se développe à l'international.
France Médias Monde est tenue de respecter aussi des règles qui limitent sa capacité à générer des ressources
commerciales. Nous n'allons pas faire du publireportage sur nos antennes en vendant les espaces au plus offrant ; il y
va de notre crédibilité. Il est interdit de parrainer des journaux ou des magazines d'information. On ne peut pas faire
parrainer une émission sur le développement durable par des groupes pétroliers ou des émissions médicales par des
laboratoires pharmaceutiques.
Cependant, nous allons prendre diverses mesures pour accroître nos ressources. Nous allons monétiser le numérique,
ce que nous n'avons pas fait jusqu'à présent. Le décrochage élargi aux programmes de France 24 à destination de
l'Afrique peut être une source de revenus publicitaires, si nous parvenons à régionaliser le signal. Nous développons
aussi nos réponses aux appels d'offres européens, et CFI nous y aidera. L'Académie, qui fait de la formation, apporte
des ressources propres. Enfin, nous sommes un opérateur et un éditeur de musique, et nous touchons beaucoup de
droits musicaux. Compte tenu de tout cela, nous pensons pouvoir augmenter nos recettes propres de 15% pendant la
durée du COM, ce que nous avons fait précédemment. Hors appels d'offres européens, leur montant devrait donc
représenter un peu moins de 10 millions d'euros. Rappelons que les recettes publicitaires de BBC World sont de l'ordre
de 10 millions d'euros.
(Interventions des parlementaires)
L'interdiction en RDC concerne Kinshasa mais nous conservons nos huit autres émetteurs.
En effet, Monsieur le Député, vos questions sont un peu délicates. France Médias Monde s'est constituée partie civile
dans la plainte concernant l'assassinat de Ghislaine Dupont et de Claude Verlon. Nous sommes aux côtés des familles
et nos avocats sont en contact avec les magistrats. Le nouveau juge, en charge du dossier, n'a pas encore réuni les
parties civiles mais il travaille d'arrache-pied.
Le 2 novembre dernier, c'est-à-dire trois ans jour pour jour après ce double assassinat, les familles et les amis ont
manifesté leur exaspération parce que le temps de la justice semble bien lent pour ceux qui sont dans la douleur et
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veulent comprendre. Aux amis je pourrais ajouter les collègues et moi-même. Il n'y a pas de jour sans que l'on pense à
cette histoire, à un moment ou à un autre.
La déclassification de certains documents a été tardive ; les avocats ont été déçus quand ils ont constaté que
certaines pièces n'avaient pas été déclassifiées et que d'autres avaient été caviardées. Kidal se situe en zone de
guerre, ce qui rend l'enquête très difficile. Le juge malien, qui a été désigné, ne fait pas partie de l'équipe des juges
antiterroristes ; il ne bénéficie pas de facilités particulières ; il n'a pas pu se rendre à Kidal et aucun juge français n'y
est allé non plus.
Nous faisons des suppositions. Ghislaine et Claude ont été assassinés quelques jours après la libération des cinq
otages français enlevés à Arlit, sur le site d'Areva au Niger. On sait que Serge Lazarevic n'était pas très loin. Y a-t-il
des liens entre ces katibas ? Les familles et les amis font des hypothèses. Trois ans plus tard, la vérité ne jaillit pas.
Plus le temps passe, plus cela devient insupportable. Les mamans de Ghislaine et de Claude sont âgées, elles sont
dans une course contre la montre. C'est très douloureux. Personne ne lâche l'affaire. Le juge d'instruction et nos
avocats travaillent. Peut-être faudrait-il que nous ayons un avocat au Mali pour suivre le dossier ? On ne lâche rien et
on peut faire confiance à la rédaction Afrique de RFI pour être au courant de tout.
En mars dernier, Jean-Yves Le Drian, le ministre de la défense, a pris la peine de rencontrer l'association qui regroupe
les amis de Ghislaine et de Claude. «Ils ont été trahis», nous a-t-il dit, sans plus de précisions. On se pose
évidemment des questions : par qui ? Pour quoi ?
Pour vous répondre sur la censure et les interdictions, je dirais que cela arrive. À Kinshasa, en RDC, nous sommes
actuellement dans une position un peu délicate car nous avons beaucoup de poids dans ce pays où la situation est
tendue. On ne mesure pas ici l'influence que peut avoir RFI en Afrique, sans même compter France 24 et TV5. Aucun
média n'occupe en France une telle position. Comment qualifier RFI en Afrique ? C'est une institution, une référence
absolue. Ce que dit RFI peut avoir une portée extrêmement importante. Nous continuons à avoir un dialogue avec le
gouvernement de RDC où je vais envoyer une mission. Je fais toujours confiance à la raison et j'espère que nous allons
trouver un accord. Pour la RDC, il est important que RFI soit là car notre radio fait un travail rigoureux. Peut-être
faudra-t-il être plus vigilant encore dans les semaines et les mois à venir parce que la situation est difficile. Chaque
chose doit être pesée et nous devons respecter une égalité de traitement absolue.
Monsieur le Député a rendu hommage aux grands reporters et je l'en remercie. Ils ont besoin du soutien de tout le
monde. Ce n'est pas simple de couvrir le terrorisme. On fait des erreurs. Des progrès ont été accomplis. Le CSA a fait
un travail avec nous tous et a élaboré un bon texte. C'est bien de dire de temps en temps que les journalistes font un
travail difficile.
En Roumanie, RFI a été décorée pour sa contribution à la démocratie roumaine. L'équipe était bouleversée parce
qu'elle est la référence dans ce pays. Le président de la République a prononcé un discours. Je n'aurais pas osé dire
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des choses aussi belles. Nous sommes très fiers de cette reconnaissance.
Monsieur le Député, vous m'interrogez sur la ligne éditoriale. Sur France 24 en arabe, par exemple, nous avons une
émission qui s'appelle «Pas de tabous». Nous y abordons des sujets tels que les mariages interreligieux, la liberté des
femmes, le mariage pour tous. Des homosexuels arabophones viennent sur notre plateau, ce qui n'est pas très courant.
On parle de laïcité, un concept très complexe. En 2012, la traduction que l'on m'avait proposée signifiait «athéisme»
en arabe. Si le monde arable comprend que la France laïque est athée, on va au-devant de graves ennuis. Quant aux
anglophones, ils traduisent laïcité par secularism. Or la France n'est pas plus sécularisée que la Belgique qui n'est pas
laïque. Il est très important d'expliciter ces termes. Nous faisons attention à ces mots et nous les expliquons dans
toutes nos langues, y compris celles de RFI.
J'ai aussi lancé des émissions sur les femmes, comme ActuElles qui s'appelle Fifty-one percent en anglais. On donne la
parole à des gens qui ne l'ont pas forcément ; on adore la contradiction ; on organise des débats. On montre le Charlie
des survivants. La question n'est pas de se définir comme «Je suis Charlie» ou «Je ne suis pas Charlie». Nous avons
montré le Charlie des survivants sur la chaîne en arabe, en contextualisant parce que notre but n'est pas de faire de la
provocation. Nous allons continuer à défendre ces valeurs.
Monsieur le Député, vous avez raison : il est fondamental de développer des partenariats. Nous le faisons partout et
nous avons même signé un partenariat France 24 en espagnol avec le Mexique ! Des représentants de la radio et de la
télévision mexicaine sont venus me voir, en exprimant un engouement incroyable. Au terme d'une réunion formidable,
ils ont proposé de reprendre tout ce que nous allons produire en espagnol. Ils commencent avec RFI, sans plus
attendre. Nous avons donc de nouvelles radios partenaires pour RFI et nous sommes très contents.
Vous me demandez aussi ce qu'il en est de la diffusion de France 24 dans l'Hexagone. J'insiste sur les radios. Je sais
que la télévision domine mais la radio est un média de proximité qui vous parle tout doucement dans le creux de
l'oreille. Je pense que RFI et MCD peuvent répondre au sentiment d'abandon que peuvent ressentir certaines
personnes, ou à des gens qui ne se sentent pas concernés par les autres médias nationaux. Nous avons un vrai rôle à
jouer dans les zones que vous décrivez et auprès de populations qui, sinon, iront chercher des médias venus d'ailleurs.
En outre, nous nous entendons très bien avec les radios associatives qui oeuvrent dans ces environnements et y font
un travail formidable. Elles seraient très contentes que nous soyons avec elles en RNT dans certains endroits. Lorsque
nous sommes allés à Marseille, nous avons été approchés par ces radios pour coproduire avec elles, faire des
formations pour elles. Le service public, RFI, pourrait jouer un rôle fédérateur pour tout le tissu associatif de radios
dans des quartiers qui sont parfois qualifiés de difficiles. France 24 joue un peu ce rôle avec Pas de quartier.
France 24 doit-elle être disponible en TNT ? France Info vient d'être lancée sur un canal de la TNT et la place n'est pas
infinie. Déjà présente sur le câble et le satellite, France 24 est accessible partout en France. Elle dispose d'une fenêtre
en TNT, ce qui peut donner envie à certains téléspectateurs d'aller en découvrir un peu plus sur le câble et le satellite.
Pour le moment, nous nous concentrons sur la chaîne France Info qui est une aventure intéressante et fructueuse, y
compris dans le domaine du numérique. Les équipes sont très contentes et elles peuvent travailler ensemble sur le
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numérique./.
(Source : site Internet de l'Assemblée nationale)
(fin de l'article)
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15 - Nomination - Liechtenstein
Le Journal officiel du 27 novembre 2016 publie la nomination de Mme Anne Paugam, en qualité d'ambassadrice
extraordinaire et plénipotentiaire de la République française auprès de la principauté du Liechtenstein, en résidence à
Berne, en remplacement de M. René Roudaut, appelé à d'autres fonctions./.
(fin de l'article)
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