Mali : les femmes dans la transition Leur regard et leur

Transcription

Mali : les femmes dans la transition Leur regard et leur
Mali : les femmes dans la transition
Leur regard et leur rôle
Rapport d’atelier d’experts
Juillet 2013
_____________________________________________________
Introduction
Le nord du Mali traverse depuis plus d’une année une crise sécuritaire et humanitaire
sans précédent. Cette situation a occasionné un déplacement d’une partie de la
population du nord du Mali vers les pays voisins, notamment l’Algérie, la Mauritanie,
le Burkina Faso, le Niger et aussi vers le sud du Mali. Cependant ce conflit ne se
réduit pas uniquement à un conflit régional entre le nord et le sud, mais on parle
également d’un « état faible » (weak state) qui a subi un coup d’état en 2012.
Les femmes sont affectées différemment par la crise, car elles constituent la majorité
des personnes déplacées et font partie des couches sociales les plus vulnérables de
la population. Bien que la situation de femmes se soit améliorée ces dix dernières
années, les femmes du nord du Mali en général, se retrouvent en marge de la
société et continuent à souffrir de multiples préjugés et d’une mauvaise considération
de la société en général. Ainsi, la crise qu’a connu le pays a renforcé encore ce
fossé par la multiplication des actes de violences sexuelles exercés sur les femmes
et les filles partout dans les zones qui étaient sous l’occupation de groupes de
rebelles, des narcotrafiquants et des djihadistes.
Le Mali, longtemps considéré comme un modèle de démocratie en Afrique, a subi un
coup d’Etat militaire le 22 mars 2012 sous le contrôle du capitaine Amoud Haya
Sanogo ayant précipité l’occupation du Nord par des groupes armés. Pendent cette
période, la liberté de mouvement des femmes était fortement limitée et entraînait des
graves conséquences sur les femmes et les filles. Nombreux cas de viols individuels
et collectifs, mariages forcés à plusieurs hommes, exactions, amputations et
lapidations à mort ont été enregistrés sous prétexte de l’application d’une prétendue
‘Charia’ réduisant les libertés des populations de ces régions.
Les causes profondes du conflit
Différent causes étaient identifiées lors d’une analyse du contexte / analyse de conflit
1
au Mali par une équipe de swisspeace qui correspondent à ceux évoquées pendant
ces 2 jours de discussions en Suisse. Elles sont rapidement présentées ci-dessous
afin de familiariser le lecteur avec le contexte. Différentes catégories de causes
profondes ont été identifiées-toutes avec une forte implication sur la situation des
femmes-notamment les inégalités sociales, la fragilité de l’Etat, et une économie
affaiblie.
Compte tenu de ces causes principales, il est d’autant plus important qu’elles soient
adressées lors de la réconciliation et résolution de conflit afin d’éviter une récurrence
des conflits dans le futur.
1
Gabriel, Sidonia et Diday, Nadina (2013) ‘Analyse de conflit au Mali dans une perspective
de sensibilité au conflit’, KOFF.
Les inégalités sociales : La vie quotidienne, la stabilité et la sécurité reposaient jusqu’à
peu sur l’organisation traditionnelle des relations sociales et des alliances stratégiques
très hiérarchisées, protégées par une riche culture de résolution de conflits traditionnelle
ancrée dans l’islam modéré. La démocratisation, par contre, n’a pas apporté le
changement vers une stabilité basée sur l’égalité, mais a crée un système plutôt
opportuniste où les postes démocratiques sont occupés par l’ancienne classe politique et
les chefs traditionnels, ceci creusant encore plus les inégalités entre les différents groupes
sociaux. Les femmes ont toujours joué un rôle déterminant dans l’organisation de la vie
traditionnelle et la gestion familiale, mais restent soumises dans ce système opportuniste.
La fragilité de l’Etat : La décentralisation, comme introduite au Mali en 1992, contribuait à
un système de gouvernance construit autour des personnalités de l’ancienne classe
politique qui n’était pas adapté aux différentes formes de légitimités locales. La crédibilité
de la décentralisation était donc remise en question par la population malienne. Aussi la
redistribution budgétaire ne se fait pas à l’avantage des structures décentralisées ; les
structures étatiques gardant jusqu’à 95% du budget. Les femmes mais aussi les jeunes
ont été les perdants de cette réorganisation de l’Etat. Par exemple, aujourd’hui, des 703
maires seulement 9 sont des femmes. Mal mis en œuvre, le système démocratique a
donc pour tendance de consolider les anciennes structures de pouvoir, qui ne sont ni
traditionnelles, ni démocratiques, mais plutôt opportunistes. En plus la société civile est
peu indépendante des partis politiques et manque de capacités d’organisation.
L’économie affaiblie : Souffrant d’un manque d’infrastructure en milieu rural et des fortes
variations climatiques, la crise économique s’est même étendue depuis 2009. En plus
l’économie criminelle a gagné en ampleur depuis 2009 avec la prise d’otages, le trafic
d’armes et de drogues qui sont devenus des sources lucratives rapides. Les femmes sont
particulièrement vulnérables dans ce contexte de crise économique, leurs activités étant
liés dans leur grande majorité au secteur informel. En effet, bien que trouvant à travailler
dans les secteurs agricoles, artisanaux et industriels, les femmes ne sont en général
qu'aides familiales, un emploi davantage précaire. Elles gagnent également moins que
leurs homologues masculins alors qu’elles sont souvent responsables du revenu
économique familial. L’arrêt de la production artisanale au Nord les a, par conséquent,
particulièrement affectées et, avec l’arrivée des nouveaux acteurs au nord du pays, elles
se retrouvent exposées à un risque d’exploitation sexuelle accru, dont la prostitution, pour
compenser la perte de leurs revenus.
Série d’événements organisée par le KOFF
Malgré tout, durant ces périodes troublées, les femmes maliennes ont joué un rôle
crucial dans la vie quotidienne et dans l’absorption des chocs multiples au niveau
familial et communal. Néanmoins, malgré leur fonction primordiale durant la crise,
les femmes risquent d’être oubliées dans la phase de « normalisation » du pays.
Elles restent très peu représentées au sein des mécanismes décisionnels formels et
doivent lutter pour avoir une voix dans les négociations. Malgré ces difficultés, les
activistes pour les droits des femmes perçoivent que la transition actuelle ne
comporte pas que des risques, mais aussi des opportunités pour la situation des
femmes au Mali. Ils sont convaincus que les femmes du Mali sont prêtes à jouer un
rôle primordial dans le futur du pays.
Soutenant ce point de vue, le KOFF (Centre pour la Promotion de la Paix) invitait des
activistes maliens à une série d’événements entre le 1 et le 3 juillet 2013, dont une
table ronde et un atelier d’experts, permettant aux invités maliens de mener un
échange riche avec des experts internationaux. La table ronde a donné un aperçu de
la situation des femmes au Mali et posé des questions clés. L’atelier a rendu
possible une analyse de la dimension genre de la situation actuelle à travers des
thèmes prioritaires (traitement du passé, médiation et résolution de conflits, élections
et transition démocratique) et d’identifier différentes actions possibles,
particulièrement par rapport à la participation des femmes dans les processus de
transition au Mali. Le présent rapport résume dans une première partie les points
clés des discussions menées lors de la table ronde et démontre la situation des
femmes comme présentée par les invités maliens. La deuxième partie récapitule les
discussions clés de l’atelier d’experts et présente des possibles stratégies de
collaboration dans le domaine du genre entre les acteurs suisses et les organisations
sur place, comme ONU Femmes ou des réseaux régionaux et nationaux de femmes.
Les représentatives du Mali :
Aicha Belco Maiga, présidente du Conseil de cercle de Tessalit – une collectivité territorial
du Mali dans la région de - et la seule femme élue dans- la région du Kidal. Elle est très
active dans la promotion et protection des droits des femmes et filles, particulièrement
nomades. Elle s’engage vivement pour mettre fin à la violence contre les femmes et les cas
de viols dans les régions occupées du Nord, en particulier dans la région du Kidal. Elle va
probablement jouer un rôle décisif dans le dialogue et les efforts de réconciliation au niveau
national et communal.
Saran Keïta Diakité est avocate malienne et Présidente du Réseau paix et Sécurité des
Femmes de l’espace de la Communauté des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) de la
section du Mali. Elle était l’une des quatre médiatrices, qui ont participées aux négociations
de paix du 15-17 Avril 2012, à Ouagadougou, Burkina Faso. Saran a récemment pris la
parole lors du débat ouvert du Conseil de sécurité de l’ONU sur la violence sexuelle liée aux
conflits, à New York. Elle a aussi participé à l’élaboration du plan d’action national sur la 1325
et à la traduction de la résolution 1325 dans cinq langues différentes du Mali afin de les
diffuser parmi les femmes maliennes.
Le Réseau Paix et Sécurité des Femmes de l’Espace CEDEAO, section Mali
(REPSFECO/Mali) est un regroupement de plusieurs associations de femmes de notoriété
nationale et internationale mis en place le 27 Décembre 2011 avec l’accompagnement du
Ministère de la Promotion de la Femme, de l’Enfant et de la Famille et soutenu par ONU
Femmes qui vise à aider les survivantes de la violence, à offrir un accès à la justice et à
s’assurer que les femmes puissent participer dans les négociations de paix.
Adama Moussa est Conseiller chargé de programme à ONU Femmes au Mali. En réponse à
cette crise, ONU Femmes assure la mise en œuvre d’un programme d’assistance aux
femmes et filles affectées par la situation de conflit et participation des femmes au processus
de consolidation de la paix. Ce programme vise à apporter une réponse multidimensionnelle,
à savoir la participation des femmes à la résolution du conflit et le retour à la paix, l’accès à
l’information et aux services de prise en charge des violences basées sur le genre. M. Adama
Moussa démontrait les défis, mais aussi les opportunités qui se présentent aux femmes dans
cette crise.
1. Contribution et discussions de la Table Ronde
Organisée en collaboration avec ONU Femmes Mali et Femmes de Paix Autour du
Monde, la table ronde a présenté une analyse de la situation actuelle par les femmes
maliennes et a abordé des questions concernant le rôle des femmes dans le
processus de transition et le rôle que les acteurs internationaux peuvent jouer pour
soutenir les femmes maliennes.
a.
Le rôle traditionnel de la femme (par Aicha Belco Maiga)
« Les femmes sont les gardiennes de la tradition qui participent le plus à la
transmission de la culture », (Aicha Belco Maiga, 2013)
Selon Mme Aicha Belco Maiga, les femmes du Nord en général et les femmes
nomades en particulier ont traditionnellement occupé une position déterminante dans
le système familial. Elles participent à la gestion familiale, entretiennent et éduquent
les enfants. Ce sont elles préservent la tradition et participent le plus à la
transmission de la culture. La femme malienne joue également un rôle important
dans l’économie familiale et communautaire. Elle s’occupe essentiellement du ‘petit
commerce’ et soutient ainsi une grande partie des besoins quotidiens de ses enfants
et de la famille.
Cependant, les rébellions dans cette partie septentrionale du Mali ont profondément
bouleversé les équilibres jadis existants au sein de la société. La femme a subi les
effets de ces conflits à tous les niveaux (économie, sécurité, culture, exode, droits
humains, etc.). L’application de la charia dans les régions du Nord combiné au climat
d’insécurité et de privations de libertés qui en découlent ont anéanti pour longtemps
les activités économiques des femmes du Nord en les poussant ainsi à l’assistance
et à la mendicité. En imposant une application radicalisée de la charia, les
‘islamistes’ armés ont forcé les femmes et les enfants du Nord à des modes de vies
contraires à leurs coutumes telles que : l’interdiction de mener des activités
économiques, de partir seul dans des lieux publiques, de parler à des hommes,
l’obligation de porter le voile intégral, etc. Cette rupture avec la tradition locale peut
aussi être illustrée par l’exemple de la musique. Dans la tradition touareg la musique
et la poésie sont des moyens pour les femmes de s’exprimer en public. Le chant
pour eux est un instrument de communication. Avec l’interdiction de la musique par
les groupes djihadistes les femmes du Nord étaient ainsi empêchées de s’exprimer
publiquement. Toutes ces pratiques ont aussi amené la lapidation, la flagellation, la
prison et autre sanctions humiliantes.
Avec l’intervention militaire internationale conduite par la France, la reconquête des
régions du Nord et l’installation progressive des forces de défense et de
l’administration malienne notamment à Gao et Tombouctou, les femmes du Nord
déplacées ont commencé leur retour vers leurs localités d’origine.
La présence d’ONU Femmes dans les trois régions du Nord particulièrement à
Tessalit dans la région de Kidal à travers d’ONGs locales dans le cadre de
l’assistance psycho-sociale et économique des femmes et filles déplacées a été
vivement salué et apprécié comme étant un véritable « coup de pouce » vers
l’autonomisation des femmes. En plus, le réseau REPSFECO, en partenariat avec
ONU Femmes et les femmes du Mali, a élaboré un plan d’action. Un axe important
de ce plan d’action est de faire un plaidoyer aux décideurs nationaux pour les
sensibiliser d’avantage sur la situation des femmes avant, pendant et après les
conflits armés. L’exercice de cet atelier s’inscrit dans la ligne droite de ce plan
d’action national et sous-régional.
b.
Violations des droits des femmes et des enfants (par Saran Keïta Diakité)
« Les femmes ont joué un rôle pendant la crise,
il ne faut pas les oublier dans la normalisation »
(Saran Keïta Diakité, 2013)
Depuis le début du conflit armé et notamment au cours des mois d’occupation, les
femmes des régions de Kidal, Tombouctou, Gao et Mopti ont subi des violences et
traitements inhumains de toutes sortes. Les violences physiques, psychologiques,
sexuelles, économiques et culturelles sont devenues le quotidien de ses femmes et
de leurs enfants.
Près de 300'000 personnes, dont 75% sont des femmes et des enfants, ont fui les
régions du Nord, devenant ainsi des déplacés internes et des refugiés dans les pays
voisins. Parmi les populations restées dans les zones occupées, plus de 300 cas de
viols (parfois des viols collectifs) ont été recensés. Ces femmes victimes de violence
sexuelle ont pour la grande majorité d’entre elles perdu toute leur autonomie et leur
dignité. Les cas de violence sexuelle sont en deçà du nombre réel vu que les
femmes, sous la menace d’un rejet social ou de représailles acceptent difficilement
de parler de leurs situations. Ainsi de nombreux cas de violence basée sur le genre,
comme les mariages forcés, les mariages collectifs et l’esclavage sexuel ne sont
encore dévoilés. Pour cette raison les chiffres des viols rapportés ne peuvent servir
que comme indications emblématiques pour les nombreux cas qui vont rester nondocumentés et cachés. Faire des statistiques sur ce sujet va surement rester une
chose impossible.
A titre illustratif, une analyse faite sur un échantillon d’une cinquantaine de cas de
viols recensés entre avril et septembre 2012 dans les communes de Gao et
Ménaka fait ressortir ce qui suit :

Le viol collectif qui concerne 79% des cas était devenu la norme

Seulement 50% des femmes
circonstances de leur agression

L’âge des femmes violées se situe entre 12 et 60 ans

Les circonstances de ces viols sont les plus variées et les plus dégradantes :
une femme est violée simultanément avec sa fille ; une autre est violée en
présence de sa fille de 7 ans ; une femme de 70 ans est violée par 4
hommes ; une femme est forcée d’assister au viol de sa fille malade mentale
avant de subir le même sort…
violées
ont
rapporté
elles-même
les
De manière générale, les violences faites aux femmes et aux enfants, la destruction
des infrastructures sanitaires et scolaires, la dislocation des familles et le climat
d’insécurité permanente ont fortement perturbé le tissu social.
c.
L’Etat de droit (par Saran Keïta Diakité)
Le Mali dispose aujourd’hui d’un arsenal juridique de promotion et de défense des
droits des femmes et des filles. En effet, il a souscrit à tous les traités internationaux
et régionaux relatifs à la promotion de la défense des droits de la femme et de
l’enfant et respect l’engagement des résolutions 1325 et 1820 du Conseil de Sécurité
des Nations Unies.
L’implémentation de ces traités et résolutions, par contre, reste timide et absente
dans les accords de paix signés (1992, 2006) entrainant ainsi dans les organisations
de femmes un sentiment de désespoir et de frustration. Même si la promotion et la
protection des droits des femmes au Mali ont connu quelques avancées au cours de
ces vingt dernières années, elles restent largement en dessous des espérances,
comme illustrent les nombreuses violations des droits des femmes perpétrées lors du
conflit malien.
d.
Participation des femmes maliennes (par Adam Moussa)
«A society that does not respect its women in times of peace,
will not respect them in times of war and conflict»,
(Adam Moussa, 2013)
Malgré la ratification par le Mali de plusieurs Traités, Accords et Conventions sur
l’égalité entre les hommes et les femmes, la participation égalitaire dans les organes
et instances de prise de décision reste encore un défi à relever. Dans plusieurs
situations, les termes de la résolution 1325 et d’autres instruments sont ignorés.
Les femmes représentent seulement 10% à l’Assemblée Nationale (15/147), 8.66%
des conseillers communaux et seulement 8 communes sont dirigées par des maires
femmes. Le gouvernement de transition comporte 3 femmes sur 25 membres et
dans la commission nationale de dialogue et réconciliation il y a seulement 6 femmes
sur 33 membres. En plus, les femmes restent exclues de différentes rencontres de
prise de décisions et de négociations clés.
Cette faible représentation est due à une inégalité qui existait déjà avant la crise et
s’explique par plusieurs facteurs décrits ci-dessus, ainsi qu’une faible capacité
organisationnelle et proactive de la société civile et d’un manque de gouvernance
démocratique à tous les niveaux. En plus, les femmes, particulièrement affectées par
la crise font face à d’énormes difficultés pour assurer l’alimentation de leurs familles.
Déplacées par la crise, elles ne sont souvent plus capables d’exercer des activités
économiques et sont devenues dépendantes des familles d’accueil. Traumatisées
par les atrocités de guerre et les crimes commis contre elles, les femmes maliennes
ont besoin d’une prise en charge psychosociale avant de pouvoir se battre pour une
participation accrue dans la vie politique.
Dans les différentes tentatives de résolution des différents conflits que le pays a
entrepris jusqu’à ce jour, très peu de femmes ont joué un rôle clé dans les
négociations. Par contre, il est intéressant de noter que la présence des femmes
maliennes peut fonctionner comme élément déclencheur de changements sociaux
au Mali, mais qu’elles sont vite oubliées chaque fois que la situation se normalise.
Cependant, dans la situation actuelle, on constate qu’elles sont très impliquées dans
les différents mouvements de gestion de crise aussi bien du côté des « pro » que
des « contre » du coup d’Etat. Elles y jouent des rôles stratégiques et sont actives
dans la société civile. En plus, cette fois, elles se sont positionnées pour une
participation accrue. Grâce à des organisations de femmes et au soutien de la
communauté internationale et surtout d’ONU Femmes, les femmes maliennes sont
plus conscientes des risques pesant sur les droits des femmes et ont pu acquérir des
capacités dans le domaine de la résolution des conflits. On reconnait plus leur rôle
dans la gestion des crises. Ainsi la Commission de dialogue et réconciliations (CDR)
compte six femmes compétentes. En plus, une délégation de quatre femmes du
réseau REPSFECO/Mali s’est rendue à Ouagadougou, Burkina Faso, pour participer
aux négociations de paix, entre le 15-17 Avril 2012.
2. Atelier d’experts
Recueillir toutes ces informations n’a été possible que grâce à des riches
contributions découlant d’une série d’événement et, en particulier, grâce à
2
l’organisation d’un atelier qui rassemblait plusieurs experts internationaux , qui
pouvaient compléter les discussions dans le domaine du traitement du passé, de la
médiation et des élections. Cela a aussi contribué à l’identification de points
d’entrées pour des potentielles collaborations dans le futur.
Cet atelier, qui a eu lieu le 3 juillet 2013, avait les objectifs suivants :
1)
Analyser la dimension genre et les défis principaux par rapport à la mise en
œuvre de la résolution 1325 sur la femme, la paix et la sécurité au Mali à
travers des thèmes prioritaires (médiation et résolution des conflits, élections
et transition démocratique, traitement du passé)
2)
Mener un processus d'apprentissage commun entre expert-e-s et échanger
des expériences dans les différentes régions
3)
Identifier des points d'entrées pour renforcer l'agenda 'femme, paix et
sécurité', particulièrement par rapport à la participation des femmes dans les
processus de transition au Mali.
a. Traitement du passé (obstacles, opportunités, points d’entrée)
Elisabeth Baumgartner, Directrice du programme « Traitement du Passé » chez
swisspeace, a présenté les divers processus et mécanismes (judicaires et nonjudicaires), qui peuvent être mis en œuvre par une société pour faire face à des
atrocités et crimes de guerre dans le passé en vue d’établir les responsabilités, de
rendre justice et de permettre la réconciliation. En particulier, elle a présenté des
expériences faites avec des mécanismes, pas seulement punitifs mais aussi
reconstituants (« restoratives ») qui se basent sur l’importance sociale de la
réconciliation d’une société. Elle a présenté une approche holistique du traitement du
passé qui adresse le droit de savoir, le droit à la justice, le droit à la réparation et la
garantie de non récurrence et des mécanismes utilisés dans d’autres contextes pour
atteindre ces buts (commissions de vérité, tribunaux nationaux, mixtes et
internationaux, programmes de réparation, projets de mémoire, musées,
monuments, réformes de la justice, DDR, SSR etc.).
La dimension du genre, s’inscrit tout au long de ces quatre axes principaux, c’est-àdire, le droit de savoir, le droit à la justice, le droit à la réparation et la garantie de
non-récurrence.
2
Nous remercions Elisabeth Baumgartner, Rachel Gasser, Stephan Ziegler, Sanam Naraghi
Anderlini, Meike Sahling, Barbro Svedberg et tous les autres participants à l’atelier du 3 juillet
2013 pour avoir échangé leurs points de vue et enrichi l’atelier avec leurs expériences
précieuses.
La situation au Mali, obstacles
Comme déjà mentionné, des violations graves des droits des femmes témoignent de
la non-application des résolutions des Nations Unies (Res1325, Res1820, Res1889)
lors de l’occupation des trois régions du Nord. En vue d’une transition durable et pour
éviter la récurrence des violences, il est nécessaire de trouver d’avantage des
mécanismes de justice (autres que seulement punitifs) et des services d’appui aux
victimes de violations.
Comme il a été démontré dans d’autres contextes, il est important que l’Etat
reconnaisse sa responsabilité et son obligation de rendre justice à la population
malienne en soutenant des processus d’investigation et de documentation de la
vérité, pour éviter des manipulations et la récurrence des violences, mais aussi pour
donner satisfaction aux besoins des victimes et
restaurer la paix sociale
(reconnaissance de la souffrance des victimes, réparation du mal qui leur a été fait
et la restauration de leur dignité).
Des questions se sont posées surtout autour des réparations au niveau
communautaire et en particulier envers les femmes, victimes des viols et d’autres
violences basées sur le genre, qui n’osent pas en parler et pour qui la justice risque
de rester loin. Des expériences dans le domaine du traitement du passé montrent
que des réparations collectives et/ou symboliques pourraient jouer un rôle important.
Des formations spécifiques pour les autorités d’investigations et les juges dans le
domaine du genre et de comment traiter les victimes de violence sexuelle ainsi que
des programmes spécifiques pour protéger les victimes devraient être envisagés.
D’autres questions ont été abordées concernant la réintégration des combattants et
le désarmement. Dans son histoire, le Mali n’a pas vraiment connu de processus de
désarmement ou de réintégration qui ont bien marché et on assiste ainsi aujourd’hui
à un phénomène de récurrence. Les touaregs au nord du Mali n’ont pas vraiment eu
d’incitations à échanger leurs armes contre de l’argent, vu qu’ils ne font, de manière
générale, pas d’échange de marchandises contre de l’argent. D’ailleurs, l’aspect
genre est souvent mis de côté dans les programmes de réintégration. L’expérience a
démontré que les programmes de DDR ont souvent mis leur focus sur les personnes
engagées dans le combat de façon active et ceci étroitement défini et ont exclu les
femmes et filles qui ont joué un rôle important durant cette période en tant que
cuisinières, gardiennes de la maison et esclaves sexuelles par exemple. Au nord du
Mali, par exemple, les programmes d’insertion mis en place ne s’adressaient qu’aux
jeunes garçons et aux hommes détenant des armes, laissant de côté les femmes qui
sont pourtant responsables de la subsistance des familles dans cette zone. Ainsi des
programmes de support psychosocial devraient être offerts à tous ceux qui sont
affectés par la violence et ne peuvent pas rentrer dans leur village ou leurs familles.
Compte tenu de leurs rôles différents avant, durant et après le conflit, femmes et
hommes ont de différents besoins psychologiques, économiques et sociaux. Vu que
les violences que les femmes ont subies durant ces conflits entrent souvent dans le
domaine privé, elles risquent d’être oubliées dans la phase de réparation. C’est donc
important de prendre en considération les aspects genre quand on prépare un
programme de réparation (faire des interviews avec des femmes ; penser à la
manière dont les réparations sont distribuées et à qui etc.).
Opportunités, points d’entrée et stratégies à aborder :
Plusieurs actions prioritaires ont été identifiées, notamment:

Identifier et documenter les cas de violences faites aux femmes, aux enfants
et à la population en garantissant la sécurité physique des victimes ayant
porté plainte. La documentation des violations des droits humains / du DIH
doit être faite soigneusement en respectant des standards de preuve et la
protection des témoins.

Explorer les options de réparations collectives, ainsi que :
o
la mise en place de structures de prise en charge holistique des
victimes de viols et d’autres formes de violences basées sur le genre,
aussi bien dans les zones occupées que dans les zones non
occupées et la prise en charge des enfants.
o
Le rôle que la Commission de Démocratie et de Réconciliation
pourrait jouer dans la question de réparation aux victimes féminines.
o
Amener l’Etat à la reconnaissance de ce qui a été fait, par exemple
par un acte symbolique (une excuse, un mémorial etc.)
o
Assistance à l’association de juristes maliens et au ministère de la
justice qui sont en charge de ces tâches.

Assurer la réintégration socioéconomique des populations déplacées du fait
de la crise.

Exploration des possibilités de moyens de justice (civile et pénale ;
internationale, nationale, cas à l’étranger selon le principe de la justice
universelle).

Il est aussi important que les questions de l’égalité et du genre soient
ancrées dans les documents officiels qui vont être produits dans les
prochains mois de transitions afin d’augmenter leur représentation et
influence dans les organes de transition et au sein du gouvernement posttransition.
b. Genre et Médiation
« Si aujourd’hui les femmes ne sont pas inclues,
demain elles ne vont pas l’être non plus »,
(Rachel Gasser, 2013)
Rachel Gasser, spécialiste en médiation chez swisspeace, présentait des leçons de
leur engagement au Myanmar, où elle accompagne une ONG birmane qui s’engage
dans le domaine de la médiation et du genre. Avec un fort focus sur les aspects de la
résolution 1325, l’organisation partenaire s’était mis pour objectif, à la demande des
femmes birmanes, de renforcer les connaissances des femmes sur la 1325 et le
genre, ainsi que leurs capacités de communication et de négociations. Différentes
méthodes ont prouvé leur utilité pour atteindre ces buts. Des trainings spécifiques
pour les femmes à / proches de la table de négociation, l’identification et coaching de
femmes clés, des réunions publiques, autant dans les différents régions qu’au centre
du pays, pour promouvoir la participation publique dans les efforts de paix et
d’autres techniques ont été explorées.
Situation au Mali, obstacles
Les femmes du Mali restent encore très peu impliquées dans les sphères de prise de
décision aux niveaux stratégiques et dans la résolution des différents conflits que le
Mali a connu depuis 1962, date de la première rébellion touareg dans le pays. D’où
le fait que très peu de femmes ont joué un rôle clé de médiation / négociation jusqu’à
maintenant. Cela a entrainé le fait que les accords signés jusqu’à ce jour ne
contiennent pas de dispositions spécifiques pour adresser les questions en lien avec
la prise en compte des droits et la protection des femmes en situation post-conflit.
Dans la récente crise, les femmes restent exclues des négociations et des grandes
décisions, mais des efforts pour leur intégration sont en cours avec l’appui de la
CEDEAO et de l’ONU Femmes. Ainsi, Saran Keïta Diakité était une des quatre
médiatrices, qui a participé aux négociations de paix du 15-17 Avril 2012, à
Ouagadougou, Burkina Faso. Selon elle, l’événement ouvrait la voie à une
participation accrue des femmes aux négociations de paix et à encourager à mettre
fin à la violence contre la population, en particulier les femmes et les enfants.
Opportunités, Points d’entrée et stratégies à aborder :
La présentation d’expériences positives au Myanmar a déclenché plusieurs
questions sur le processus d’intégration des femmes dans les processus de paix,
l’identification des femmes clés et des techniques spécifiques qui ont été identifiées
comme utiles dans d’autres contextes.
Différents points d’entrées et possibles stratégies ont été développées, notamment :

Dans un premier temps il faut identifier les thèmes centraux que la
Commission de Dialogue et Réconciliation (CDR) traitera dans son agenda
(le plan d’action de la CDR n’est pas publié pour l’instant). Une fois ces
thèmes identifiés, une lecture genre doit être assurée pour développer une
vision holistique. Ceci pourrait être fait par exemple en échange avec des
experts thématiques, qui puissent nourrir la réflexion et aider à trouver des
solutions. Il faudrait que les femmes et quelques hommes sensibles au thème
de la commission arrivent par exemple à avoir un agenda sensible au genre
sur la gestion des réparations.

Identifier les différentes besoin de coaching des femmes qui sont à / proche
de la table de négociation. Par contre, soutenir les femmes ne signifie pas
avoir uniquement un focus sur la participation des femmes aux négociations
de paix, mais aussi renforcer tous les aspects du domaine du genre qui sont
pertinents pour le processus de paix, comme par exemple le retour des
femmes déplacées. Mais on ne doit pas uniquement faire travailler les
femmes sur les thèmes « femmes »: elles doivent aussi s’occuper des autres
thèmes qui concernent toute la population.

Assurer l’établissement de liens entre les différents niveaux de dialogue
(différents « tracks »), national versus communautaire, afin que la CRD
puisse faire en sorte que des perspectives genres soient intégrées dans le
dialogue / la médiation communautaire. Une possibilité serait à l’aide de
« cases de la paix » (Peace huts).
c. Elections démocratiques et la dimension genre
Stéphan Ziegler, spécialiste des questions électorales dans les situations fragiles et
conflictuelles, présentait quelques aspects clé du genre dans ce domaine, tirant
leçons de ses expériences dans différents pays de l’Afrique de l’ouest.
La situation au Mali, obstacles
Les préparations des élections présidentielles du 28 juillet et du 11 aout 2013 ont été
marquées par plusieurs défis d’ordres politiques, techniques et opérationnels.
Politiquement il était important de permettre à tous les Maliens de participer aux
élections, notamment dans les régions au nord du pays, où l’Etat était absent
pendant presque 18 mois, mais également aux nombreux refugiés et déplacés, dont
beaucoup de femmes. Un accord provisoire entre le gouvernement central et
plusieurs groupes armés touaregs a permis un retour timide de l’administration
centrale dans la région de Kidal à deux semaines du premier tour des élections. Pour
des élections dans ce contexte de crise, il était également important d’atteindre un
taux de participation acceptable, alors que le Mali connait en général des taux de
participation relativement faibles. La sensibilisation et la mobilisation des électeurs
étaient un point prioritaire pour les acteurs externes en appui du processus électoral.
D’un point de vue technique et opérationnel l’établissement d’un fichier électoral
biométrique3 y compris la distribution des nouvelles cartes électorales NINA posait
un énorme défi pour les autorités en charge de l’organisation des élections, ceci
encore accentué par un calendrier électoral très serré.
En ce qui concerne la participation politiques des femmes, le processus électoral en
cours n’a pas permis d’intégrer certaines mesures pour augmenter l’inclusion des
femmes dans les sphère de décisions politiques, tel qu’un quota de 30%. Faisant
parti d’un avant-projet d’amendement constitutionnel, élaboré sous la présidence d’
Amadou Toumani Touré et intégré au plan d’action national du Ministère de la
Famille, de la Femme et l’Enfant, ces dispositions faciliteront sans doute l’accès des
femmes aux postes électifs, mais leur mise en œuvre efficace est souvent entravée
par d’autres facteurs d’ordre institutionnel, socio-économique et culturelle comme
dans d’autres pays de la sous-région tel que le Sénégal et le Burkina Faso. La
3
sur la base des donnés d’un recensement de la population à vocation d’état civil
(RAVEC Le „Recensement à vocation d’état civil, a été mené entre 2009 et 2011 a
servi comme base de donnes pour le nouveau fichier électoral.
première candidature féminine à la présidence de Aidara Aichata Cisse a une valeur
symbolique pour la cause des femmes, mais a démontré les difficultés structurelles
pour les candidates féminines. Les partis politiques maliens, traditionnellement
construit autour d’une personnalité, très hiérarchique et avec peu d’alternance,
constitue le moyen principal pour augmenter la représentation et participation
politique des femmes. L’introduction d’un quota devrait être accompagnée par des
sanctions en cas de non-respect des dispositions. Des exemples dans d’autres pays
de démocraties en développement ou consolidées ont démontré que mêmes les
sanctions ne permettent pas toujours de surmonter les réticences de certains partis à
présenter des femmes candidates. Ceci est interdependant avec la faible
institutionnalisation du système des partis politiques et de la culture politique
de « parrainage » et des pratiques de ventes de places sur les listes des partis
politiques.
Bien que ces payments soient illicites, il semble impossible de les éviter afin d’avoir
une chance réaliste d’etre élu. De même, il ne suffit pas seulement de figurer sur
une liste électorale, mais les femmes n’ont souvent pas accès à des moyens
financiers pour mener une campagne électorale. Ce problème se pose surtout dans
les zones rurales, où les femmes sont financièrement dépendantes et les réseaux et
associations de femmes sont moins développés qu’en milieu urbain. L’appui aux
femmes candidates des organisations internationales dans ce domaine se manifeste
plus dans des activités de renforcement de capacités, visites d’étude et de
sensibilisation, parce qu’un appui matériel direct à une campagne électorale, par
exemple, n’est pas sans problèmes pour des acteurs internationaux. Ceci pourrait
également avoir des effets contre-productifs pour les femmes candidates.
A ceci s’ajoute que les organisations internationales ne peuvent bien évidemment
pas financer directement les candidatures des femmes.
Même si les élections se sont généralement bien déroulées et aucun incident majeur
sécuritaire n’a été rapporté, cette course électorale avec le vainqueur, Ibrahim
Boubacar Keita, a fait preuve de la pérennité du système traditionnel, mais aussi
faible des partis politiques maliens. Mais se basant sur les discussions de l’atelier, on
peut voir cette phase de transition comme
une opportunité de mettre la
problématique de l’exclusion des femmes dans tous ces aspects sur l’agenda
politique tant au niveau national que local.
Points d’entrées et stratégies à aborder :
Court-terme :

En vue des élections législatives et municipales réclamer des corrections du
fichier électoral biométrique sur la base des déficits techniques constatés
dans l’établissement de ce fichier ou au moins avoir des instructions
transitoires pour inclure des électeurs omis ou sans cartes NINA, notamment
les refugiés, déplacés internes, mais également la diaspora.

Campagne de sensibilisation et information électorale qui vise les femmes et
les hommes avec un focus particulier sur la problématique de la
représentation et de la participation politique des femmes (en sensibilisant
par exemple sur les pratiques d’exclusion)
Moyen-terme :

Appuyer le plaidoyer, la promotion et le networking pour l’introduction d’un
quota féminin dans la constitution / loi électorale

Prendre des mesures de promotion de la représentativité des femmes dans
l’administration au plan national. Sur ce plan on devrait mettre un accent
particulier sur les fonctionnaires des autorités électorales (MATDAT, DGE,
CENI)

Explorer les possibilités d’apporter un appui plus direct et efficace aux
femmes candidates autre que le financement, afin de compenser les
difficultés structurelles.

Assistance au rétablissement des structures et des institutions étatiques au
Nord de sorte qu'elles soient capables de fournir des services de base de
qualité, aussi bien pour les populations nomades que pour les populations
sédentaires et ainsi, être approuvées et acceptées par l'ensemble de la
population.
d. Le rôle des organisations internationales en faveur des femmes au Mali
Les acteurs externes, qui s’engagent chacun avec des intérêts et des objectifs
propres, risquent vite d’être perçu par la population malienne en fonction de ses
relations et alliances avec les acteurs locaux. Ils exercent donc une influence sur les
relations de pouvoir existantes parfois sans en être conscients. Ainsi, ils risquent vite
d’un côté d’être instrumentalisés ou de l’autre de renforcer involontairement la
fragmentation déjà existante de la société malienne. Il est donc important que
l’engagement de la communauté internationale intègre tous les éléments de cette
situation complexe, soit transparente en matière de communication mais aussi quant
à la distribution des ressources à la population locale.
Pour les organisations de femmes, l’engagement de la communauté internationale
est encore plus important que pour les autres acteurs car elles ne peuvent que
difficilement trouver du soutien ailleurs. Le rôle des organisations internationales tel
qu’identifié lors de l’atelier d’experts et souhaité par les femmes du Mali serait autour
des idées centrales de renforcement des capacités des femmes leaders, la prise en
charge des victimes du conflit et l’appui aux organisations féminines dans la mise en
œuvre d’activités de sensibilisation. Ceci doit être basé sur les conventions
internationales des droits des femmes, qui constituent la seule manière de faire face
à des structures patriarcales et les lois basées sur la religion.
Possible engagement de la communauté internationale
Dans le domaine du traitement du passé :

La constitution d’un fond de réparation de préjudices physiques, psychologiques
et économiques (aussi de caractère symbolique) infligés aux victimes et particulièrement
les femmes et les enfants

La lutte contre l’impunité par la facilitation et le soutien des poursuites engagées
contre les acteurs de la violences et autres violations du droit des femmes et des enfants
Dans le domaine de la médiation :

La formation des femmes leaders des villes et des campagnes dans le cadre de la
médiation, du leadership en vue de leur participation active dans le processus électoral en
cours, la réconciliation nationale et la reconstruction du pays

L’information et la sensibilisation des femmes quand à leurs droits et rôles dans la
gestion du conflit tel que recommandé par la résolution 1325.
Dans le domaine d’élections :

Sensibilisation des femmes, des jeunes et de la population toute entière pour des
élections apaisées. (sensibilisation sur quoi ?)
--> En plus d’agir de l’interne, la communauté internationale peut aussi faire pression de
l’externe pour une inclusion plus active de la femme dans ces processus.
Conclusion et Recommandations
Les femmes du Nord et les femmes nomades ont plus que jamais besoin d’appui
pour rehausser leur image de femmes battantes, de restaurer leur dignité bafouée et
perdue pendant ces dernier mois et de pouvoir gagner une participation accrue dans
la formation d’un Mali post-transition.
Le Mali regorge de femmes courageuses du milieu urbain comme rural qui sont
capables de valablement conduire le processus de dialogue, de réconciliation, de
participer à la construction du pays à long terme et promouvoir des actions de
développement durable.
L’expertise suisse dans l’élaboration des plans d’action sur la résolution 1325, dans
le traitement du passé et de la médiation peut être très utile dans le contexte malien.
En effet, elle peut ’accompagner les femmes maliennes dans la conception,
l’élaboration et l’exécution d’actions afin de rendre justice aux personnes ayant
subies des violences pendant les conflits, d’accroitre leur participation aux
négociations et de garantir leur inclusion dans les mécanismes de prise de décision.
Recommandations concrètes pour les acteurs suisses :
Basées sur les discussions et les échanges avec divers experts internationaux (voir
liste ci-dessus), les recommandations et suggestions suivantes ont été élaborées et
sont destinées à servir de base pour un débriefing avec les acteurs suisses sur la
continuité de leur engagement en matière de politique du genre au Mali. Il s’entend
que toutes ses recommandations s’inscrivent dans les objectifs de la Suisse,
consciente de son histoire passée au Mali, de rester engagé et doivent se présenter
d’une manière transparente et sensible au conflit.
Pour des recommandations plus spécifiques voir section 2 a), b) et c)
Plan d’action national :

Assistance à l’actualisation du plan d’action national de la résolution 1325 pour
l’adapter au contexte de crise actuelle.

Assistance à l’implémentation des droits des femmes conformément avec la
CEDAW et la résolution 1325.

Assistance à l’intégration d’une perspective genre dans le plan d’action national,
qui est en train d’être élaboré par la Commission de Dialogue et Réconciliation,
sur tous les points traités.
Médiation :

Assistance à la participation des femmes au processus de réconciliation, de
médiation et résolution des conflits, correspondant à leurs différents besoins de
coaching.

Promouvoir l’implication et la participation accrue des femmes du nord dans les
instances de décision tant au niveau communautaire, local, régional que national
et soutenir l’établissement de liens entre les différents niveaux de dialogue.

Faire de sorte que la CDR arrive à avoir un agenda sensible au genre.
Traitement du passé :

Soutien à la mise en place des mécanismes de réparation (individuels ou
collectifs) des victimes de viols et d’autres formes de violences basées sur le
genre.
Elections :

Campagne de sensibilisation et information électorale qui vise les femmes et les
hommes avec un focus particulier sur la problématique de la représentation et
de la participation politique des femmes (en sensibilisant par exemple sur les
pratiques d’exclusion)

Appuyer le plaidoyer, la promotion et le networking pour l’introduction d’un quota
féminin dans la constitution / loi électorale

Prendre des mesures de promotion de la représentativité des femmes
l’administration au plan national.

Explorer les possibilités d’apporter un appui plus direct et efficace aux femmes
candidates autre que le financement,
afin de compenser les difficultés
structurelles.

Assistance au rétablissement des structures et des institutions étatiques au Nord
de sorte qu'elles soient capables de fournir des services de base de qualité.
dans
Autres :

Assistance économique aux femmes restées sur place en vue de leur
autonomisation par la création d’activités génératrices de revenu (AGR) en
tenant compte de leurs besoins et des créneaux porteurs dans la zone.

Facilitation du retour des femmes déplacées et refugiées et les réinsérer
économiquement et socialement en vue d’atténuer leur souffrance

Initiation de projets / programmes adaptés aux besoins spécifiques des femmes
du nord sédentaires et nomades.

Mettre un accent particulier sur la scolarisation des filles et créer des mesures
incitatives pour leur rétention à l’école surtout en milieu nomade.
Alexandra Pfefferle, KOFF