Curieuse. Courageuse. Déterminée. Rencontrez une actuaire

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Curieuse. Courageuse. Déterminée. Rencontrez une actuaire
Curieuse. Courageuse. Déterminée.
Rencontrez une actuaire canadienne – Sharon Giffen
Émilie Bouchard, FSA, FICA
Fellow attitrée à l’effectif canadien de la SOA
[email protected]
« Foresters est bien plus qu’un prestataire de services financiers. Nous sommes une société de secours
mutuel à l’échelle internationale, avec plus d’un million de membres et plus de 140 ans d’histoire à enrichir la
vie des familles et leurs communautés. »
- Foresters, une société de secours mutuel, www.foresters.com
Sharon Giffen, FSA, FICA, cumule plus de 30 ans d’expérience dans l’industrie de l’assurance, au Canada et aux
États-Unis. Elle travaille au sein de Foresters depuis 14 ans. Au cours des neuf dernières années, elle a occupé les
postes d’actuaire en chef, de chef des services financiers et de présidente de la division canadienne. Elle assume
actuellement les fonctions de vice-présidente principale et de chef de la gestion du risque. Lors de notre entrevue,
elle a parlé du défi qu'elle s'impose de sortir de sa zone de confort et d’assumer de nouveaux postes avec courage,
dynamisme et un esprit créatif.
Sharon Giffen, FSA, FICA
Vice-présidente principale et chef de la gestion du risque chez Foresters
[email protected]
Quel conseil donneriez-vous à une femme aspirant à un poste de haute direction?
Mon conseil est sensiblement le même, qu’il s’adresse à un homme ou à une femme :
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Améliorez vos habiletés de communication. Transmettre des idées techniques complexes à des
personnes qui ne sont pas des actuaires est un talent essentiel.
Participez activement aux réunions. Ne soyez pas un simple figurant, écoutez attentivement ce qui se dit
plutôt que de penser à ce que vous voulez dire, et établissez un contact visuel.
Développez votre réseau. Peu nombreux sont les dirigeants qui refuseront d’accorder un entretien de
15 minutes à un employé performant. Assurez-vous toutefois de vous présenter avec des questions ou un
message pertinents.
Développez vos compétences en leadership. Commencez par vous doter de solides capacités de gestion
(accomplir le travail grâce aux efforts d’autres personnes) et efforcez-vous d’inspirer les autres afin de tirer
d’eux les meilleures idées pour servir l’entreprise.
Faites preuve d’humilité, sans tomber dans l’excès! En affaires, les postes de leadership sont moins
nombreux que ceux de subalterne; ce n'est pas parce qu'on ne réussit pas tout de suite que cela n'arrivera
jamais. Faites preuve de l’humilité nécessaire pour accepter la critique, écoutez-la vraiment (même si vous
n’êtes pas d’accord!) et adaptez votre comportement en conséquence. N’oubliez pas qu’il existe une
distinction entre l’intention et la perception; la perception est la plus importante à gérer.
Quelle est votre vision de l’avenir du secteur de l’assurance-vie?
Le processus de vente devrait vraisemblablement évoluer au cours des prochaines années. Je crois que très peu de
ménages de la génération du millénaire se prêteront à un processus de vente basé sur plusieurs visites et dont les
choix reposent entièrement sur les recommandations d'un conseiller professionnel. De plus, les recherches
continuent d'indiquer que les familles de la classe moyenne au Canada et aux États-Unis sont sous-assurées; nous
devons innover afin de pénétrer ce marché de façon rentable.
Notre industrie doit parfaire son habileté à transmettre de l’information à ses futurs consommateurs, à les sensibiliser
au moyen de phrases-chocs afin de leur permettre de prendre des décisions éclairées de la façon et au moment qui
leur conviennent, que ce soit par l'intermédiaire d'un conseiller personnel, d'entretiens téléphoniques, de clavardage
sur un site Web ou de la plus récente application sur leur téléphone intelligent.
Votre carrière a jusqu’à maintenant été remplie de postes divers. Comment vous préparez-vous à
entreprendre les défis qui viennent avec une variété de postes, et particulièrement ceux pour lesquels vous
n’avez pas l’expertise technique?
Pour moi, il est extrêmement motivant d’entreprendre des fonctions dans une nouvelle branche du domaine de
l’assurance, même lorsque m’incombe la responsabilité de pratiques dans lesquelles je ne possède aucune expertise.
Une fois qu’on a le courage de relever un nouveau défi, on doit trouver la meilleure façon d’amener une contribution.
Ma méthode est de déterminer ce que je sais, ce que je dois savoir, et ce qui n’est pas nécessaire pour moi de savoir,
étant donné le support que je reçois des membres de mon équipe, pour avoir du succès dans ce poste.
Lorsque je me suis vu confier de nouveaux services ou de nouveaux employés hautement fonctionnels, j’ai toujours
cru que j’avais quelque chose à apporter à la table. Je ne me suis jamais croisé les bras en m’attendant à ce que tout
se passe rondement. J’ai vite appris que poser beaucoup de questions est primordial. Cela me permet d’évaluer la
quantité et la qualité du travail de mon équipe, ainsi que d’identifier les réussites et les améliorations possibles qui
permettraient d’atteindre de façon plus efficace les objectifs de l'entreprise.
Il y a quelques années, j’ai accepté un court mandat pour lequel je n’avais aucune expertise technique. En cette
occasion, j’ai constaté qu’il était extrêmement efficace d’assurer la direction de l’équipe en mettant en pratique ma
compréhension des principes du travail et en appliquant mes compétences générales en matière de gestion de projet
et du temps.
Plus récemment, alors que j’assumais la fonction de chef des services financiers, je savais que je ne pourrais jamais
posséder une expertise technique dans tous les domaines relevant de ma responsabilité (finances, vérification
interne et placements) et j'ai donc dû adopter une tout autre approche. Dans ce cas, j’avais l’avantage de pouvoir
compter sur des professionnels hautement compétents dans chacun des nouveaux services dont j'étais responsable.
Ils connaissaient bien leur travail et il n’était donc pas nécessaire que j’en connaisse tous les détails. Il me fallait tout
de même comprendre l’essentiel et être en mesure d'assurer le chef de la direction et le conseil d'administration que
les détails techniques étaient pris en charge. Afin d’y parvenir, j’ai passé le temps nécessaire auprès de chacun des
services afin de m'assurer de bien comprendre les processus et mécanismes de contrôle, ainsi que les résultats
présentés. Ma valeur ajoutée fut d’amener une meilleure intégration des services pour une efficacité accrue, de sorte
que chaque service dans mon groupe sentait faire partie d’une plus grande équipe.
Avez-vous déjà fait un choix professionnel qui a eu pour effet de vous sortir de votre zone de confort?
Qu’avez-vous appris de cette expérience?
La plupart des nouveaux défis m'ont amenée hors de ma zone de confort. J’ai donc dû puiser dans mes
compétences de gestion ainsi qu’établir des relations.
Par exemple, lorsque j’ai intégré le poste de chef de la division canadienne, je n’étais pas très à l'aise de diriger une
équipe de vente, étant donné la différence manifeste entre les membres de ce groupe et mes collègues habituels
possédant une expertise plus technique. Il a fallu du temps pour développer une confiance véritable et un degré plus
profond de communication bidirectionnelle. Ces relations se construisent non pas sur une compréhension commune
de l’expertise et du professionnalisme, mais plutôt sur la cohérence du leadership en vue de l’atteinte d’un but
commun. La différence est subtile, mais bien réelle.
Je me suis rendu compte que pour être un dirigeant efficace et pour obtenir la collaboration des dirigeants d’autres
disciplines, l’équipe doit comprendre les motifs et les intentions du dirigeant. C’est en faisant preuve d’authenticité
que j’ai obtenu les meilleurs résultats. Je raconte mon histoire (tout en étant consciente des limites saines à ne pas
dépasser) afin que chacun comprenne mes objectifs et mes motivations. Je veux qu’ils sachent que je ne vise pas la
gloire personnelle, mais plutôt l’amélioration de nos façons de faire afin que nous soyons tous gagnants. Je partage
ma conviction profonde en la valeur de l'assurance-vie, je remercie chacune de mes équipes pour leur rôle crucial et
je leur demande de quoi ils ont besoin de ma part.
Vous avez été nommée au poste de chef de la gestion du risque, un nouveau poste au sein de votre
organisation. Parlez-moi de la façon dont votre bagage actuariel vous a préparée à assumer cette fonction.
En qualité de chef de la gestion du risque chez Foresters, mon mandat consiste à assurer une surveillance efficace
des activités à risque à l’échelle internationale. Nous nous dirigeons vers un modèle de gestion comportant trois
lignes de défense clairement définies, la deuxième ligne étant constituée des risques et de la conformité. Cette
deuxième ligne fournit aux gestionnaires de première ligne les conseils et les outils leur permettant d’assurer une
surveillance efficace des risques inhérents à leur travail, les incite à s'assurer d’avoir pris en compte tous les risques
liés à leurs activités, puis rend des comptes au conseil d’administration. J’ai constaté la nécessité de développer une
connaissance approfondie des principaux enjeux et des principales possibilités que présente chaque unité
opérationnelle.
En ce qui concerne les risques financiers, dont le point culminant réside habituellement dans la répartition du capital,
la formation d'actuaire présente un avantage vu la nécessité de maîtriser certains concepts plutôt techniques. À
l’égard des risques opérationnels qui découlent des méthodes de travail, mes tendances actuarielles me poussent à
vouloir tout mesurer et surveiller, depuis le fonctionnement quotidien jusqu’à l’incidence financière de celui-ci.
Mon rôle n'est pas d'empêcher les décisions à risque, mais plutôt de veiller à ce que les faits et les hypothèses qui
soutiennent les décisions soient explicites, et qu’il existe une méthodologie permettant de surveiller l’expérience et
d’apporter les ajustements qui s'imposent.
Selon vous, quels éléments sont nécessaires pour modifier la culture du risque d'une organisation?
Tout commence par le « ton utilisé aux échelons supérieurs ». Lorsqu’une équipe de direction travaille dans la
collaboration en tirant profit des forces de chacun et en établissant clairement auprès des employés que les
décisions sont prises en fonction des meilleures données disponibles et compte tenu des risques et des
récompenses, cette attitude s’infiltre à l’échelle de l’organisation.
Il est également essentiel de considérer les erreurs comme des occasions d'apprentissage; le fait de punir pour les
erreurs commises peut donner lieu à une culture d'aversion au risque susceptible d’avoir sur la réussite un effet tout
aussi inhibiteur que la prise de risques excessifs.
Bien entendu, le système de récompense doit être conçu de manière à inciter les employés à agir en harmonie avec
la culture de l'entreprise.
Vous avez travaillé au sein de divers genres d'organisations au cours de votre carrière. Qu’appréciez-vous le
plus du travail au sein d’un organisme composé de membres?
Foresters est une organisation non seulement composée de membres, mais aussi axée sur des buts concrets. En
tant que professionnels, les employés de Foresters font face aux mêmes défis que ceux de toute autre entreprise.
Pour moi, la différence réside dans le fait que tout ce que nous faisons vise à faire une différence dans la vie de nos
membres et de leurs collectivités. J’en retire un facteur de bien-être qui est très important pour moi à cette étape de
ma carrière, et j’aime avoir comme défi de veiller consciencieusement dans tout ce que je fais à ce que toutes nos
décisions, toutes nos dépenses et tous les produits et services que nous offrons s’harmonisent à notre but
fondamental.
Quelles sont les qualités qui vous ont été les plus utiles jusqu’ici dans votre carrière?
Les qualités qui m’ont le plus servi jusqu'ici sont les suivantes :
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Ma curiosité de comprendre le portrait global. Dès le début de ma carrière, je voulais comprendre la
synergie qui existe entre tous les éléments de l'entreprise, à la fois du point de vue opérationnel—de la
vente à la souscription à la gestion des demandes de règlement—et du point de vue financier—depuis la
tarification jusqu’aux études sur l’expérience et aux répercussions sur les états financiers.
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Mon courage. Je crois que les gens sont façonnés par la somme de leurs expériences de vie et que
chaque nouvelle initiative donne le courage de tenter d'autres expériences. Étant donné que la plupart des
apprentissages importants de l’histoire sont issus d’insuccès, je ne crains pas l'échec. Je sais mettre
l’accent sur l’apprentissage qui me sert à relever le défi suivant, plutôt que de me concentrer sur l'échec si et
lorsqu'il survient.
L’attention que je porte à la contribution de mon équipe à l’organisation. Assumer une responsabilité
directe à l’égard d’autres employés et partager mes connaissances et mon expertise est un cadeau. En tant
que dirigeante, mon objectif consiste à maximiser l'apport de mon équipe à l’organisation, même si cela
m’oblige parfois à prendre des décisions très difficiles.
Quelles sont certaines de vos activités bénévoles qui se sont avérées profitables pour votre carrière?
J’aime m’impliquer et j’ai trouvé de nombreuses occasions de le faire au fil des ans dans les cercles actuariels. Au
début, je corrigeais bénévolement des examens de la SOA. J’ai aussi œuvré au sein de la section des actuaires du
National Fraternal Congress of America (maintenant l’American Fraternal Alliance), de l’Actuaries Club of Toronto, de
la Smaller Insurance Company Section de la SOA et du conseil d’administration de l’Institut canadien des actuaires.
J’ai aussi pris part aux activités de groupes axés sur l’assurance-vie à l’extérieur de la profession actuarielle, par
exemple l’ACCAP, la LOMA et l’Institut d’assurance-vie du Canada.
Chacune de ces activités m'a été profitable dans ma carrière. L’avantage tiré réside tantôt dans la capacité
d'approfondir un problème en l’examinant avec des professionnels qui ont des préoccupations similaires ou tantôt
dans la possibilité de changer d’air en mettant de côté mes problèmes professionnels pour me pencher sur les
problèmes de quelqu’un d’autre. Les occasions de réseautage ont toujours été précieuses pour moi. Je connais
beaucoup de gens qui possèdent des connaissances qui pourraient m’être utiles un jour. Si je n’ai pas la réponse à
une question, je connais quelqu’un qui pourrait l’avoir.
Apprendre la discipline d’être un bon membre de conseil d’administration est très pertinent à mes interactions avec le
conseil d'administration de Foresters. Mes activités sur le conseil d’administration d’une compagnie d’opéra appelée
Opera Atelier m'ont aussi permis de faire connaissance avec d'autres dirigeants d'entreprises de Toronto dans des
domaines autres que celui de l’assurance. Et qui sait, un jour ces contacts se révéleront peut-être utiles!
Parlez-moi de quelques-unes des initiatives de votre organisation qui ont un impact positif sur la
communauté.
Nous avons des relations permanentes avec deux grands organismes, soit le Miracle Network (hôpitaux pour enfants
des quatre coins de l’Amérique du Nord) et KaBoom! (un terrain de jeux à distance de marche pour chaque enfant),
qui accomplissent tous deux un travail extraordinaire et que nous sommes fiers d’appuyer. Nous prenons également
part à d’autres activités de bénévolat, par exemple la préparation de repas à la Maison Ronald McDonald,
l’assemblage de trousses de soins personnels d’urgence pour les mamans et les enfants des refuges pour femmes,
la distribution de sacs à dos remplis de fournitures scolaires aux enfants déplacés en raison de catastrophes
naturelles ou la confection d’oursons en peluche pour réconforter les enfants hospitalisés.
L’une de mes initiatives préférées a eu lieu peu après les inondations sévères récentes à Calgary, alors que nous
étions sur place lors d’une vente que nous avions organisée à l’occasion du Calgary Stampede. Pratiquement sans
préavis, j’ai communiqué avec notre coordonnateur local afin de savoir s’il y avait un organisme en particulier auquel
il serait utile que les membres de notre équipe et leurs conjoints donnent des heures de travail. On nous a
rapidement aiguillés vers un organisme appelé le Children’s Cottage—un refuge d’urgence pour les enfants retirés
d'un milieu familial malsain—qui avait été inondé et qui peinait à gérer les obligations du quotidien. Mon équipe et
moi sommes allés donner un coup de main pendant quelques heures pour préparer plusieurs plateaux de lasagne
qui pourraient être consommés le jour même ou congelés pour un usage ultérieur. Il s’agissait d’un geste bien simple,
mais nous avons tous trouvé agréable de travailler ensemble dans un contexte différent. Nous avons aidé des gens
dans le besoin et ce fut une expérience extraordinaire pour favoriser l’esprit d’équipe.