Géraldine MATHIEU

Transcription

Géraldine MATHIEU
L’intérêt supérieur de l’enfant et le
droit de connaître ses origines
Bruxelles
10 décembre 2014
Géraldine Mathieu
[email protected]
Plan de l’exposé
1. Les droits fondamentaux


La CIDE (art. 7 et 8)
La CEDH (art.8)
2. Les différents contextes du secret des origines






L’adoption
L’accouchement secret
La PMA hétérologue
La GPA
L’inceste
Le secret de la paternité
3. Vue synoptique
4. Conclusion
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1. Les droits fondamentaux
Article 7, §
1er,
Quid de l’enfant devenu
majeur?
de la CIDE
L'enfant est enregistré aussitôt sa naissance et a dès celle-ci le droit à un
nom, le droit d'acquérir une nationalité et, dans la mesure du possible, le
droit de connaître ses parents et d'être élevé par eux.
C’est qui ?
C’est quoi ?
Souveraineté
de l’Etat ?
Article 8 de la CIDE
Les Etats parties s'engagent à respecter le droit de l'enfant de préserver son
identité, y compris sa nationalité, son nom et ses relations familiales, tels
qu'ils sont reconnus par la loi, sans ingérence illégale.
Si un enfant est illégalement privé des éléments constitutifs de son identité
ou de certains d’entre eux, les Etats parties doivent lui accorder une
assistance et une protection appropriées, pour que son identité soit rétablie
aussi rapidement que possible.
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1. Les droits fondamentaux
Article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme
1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son
domicile et de sa correspondance.
2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce
droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle
constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la
sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à
la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la
protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et
libertés d'autrui.
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1. Les droits fondamentaux
Jurisprudence de la CEDH :
Le droit au respect de la vie privée inclut le droit à l’identité et à
l’épanouissement personnel. L’établissement des détails de son
identité et l’intérêt vital à obtenir des informations nécessaires à
la découverte de la vérité concernant un aspect important de son
identité personnelle, telle l’identité de ses géniteurs, contribuent
à cet épanouissement.
-
Arrêt Gaskin
-
Arrêts Odièvre et Godelli
-
Arrêt Jäggi
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1. Les droits fondamentaux
Double constat:
CIDE : difficultés d’interprétation
CEDH : concurrence de droits fondamentaux
Enfant
Tiers
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2. Les différents contextes
 L’adoption
 L’accouchement secret
 La PMA avec don
 La GPA
 L’inceste
 Le secret de
« classiques »
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la
paternité
dans
les
filiations
2. Les différents contextes –
L’adoption
Article 30 de la Convention sur la protection des enfants et la coopération
en matière d’adoption internationale, signée à La Haye le 29 mai 1993
Les autorités compétentes veilleront à conserver les informations qu’elles détiennent
sur les origines de l’enfant, notamment celles relatives à l’identité de sa mère et de
son père, ainsi que les données sur le passé médical de l’enfant et de sa famille.
Elles assurent l'accès de l'enfant ou de son représentant à ces informations, avec les
conseils appropriés, dans la mesure permise par la loi de leur Etat.
Article 16 de la même convention
1. Si l'Autorité centrale de l'Etat d'origine considère que l'enfant est adoptable,
a) elle établit un rapport contenant des renseignements sur l'identité de l'enfant, son
adoptabilité, son milieu social, son évolution personnelle et familiale, son passé
médical et celui de sa famille, ainsi que sur ses besoins particuliers ;
(…)
2. Elle transmet à l'Autorité centrale de l'Etat d'accueil son rapport sur l'enfant, la
preuve des consentements requis et les motifs de son constat sur le placement, en
veillant à ne pas révéler l'identité de la mère et du père, si, dans l'Etat
d'origine, cette identité ne peut pas être divulguée.
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2. Les différents contextes –
L’adoption
Article 368-6 du Code civil belge (modifié en 2003)
Les autorités compétentes veillent à conserver les informations qu’elles détiennent
sur les origines de l’adopté, notamment celles relatives à l’identité de sa mère et de
son père, ainsi que les données nécessaires au suivi de sa situation de santé, sur le
passé médical de l’adopté et de sa famille, en vue de la réalisation de l’adoption et
aux fins de permettre ultérieurement à l’adopté, s’il le désire, de découvrir ses
origines.
Elles assurent l’accès de l’adopté ou de son représentant à ces informations, avec les
conseils appropriés, dans la mesure permise par la loi belge.
La collecte, la conservation et l’accès à ces informations sont réglés par un arrêté
royal délibéré en conseil des ministres.
Il se fait toujours
attendre!
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2. Les différents contextes –
Quid pour l’adoption
L’adoption
interne??
Communauté flamande
Article 25 du décret du 20 janvier 2012
réglant l’adoption internationale d’enfants
Art. 69 et s. de l’arrêté du
gouvernement flamand du
22 mars 2013 relatif au
droit de consultation et à la
médiation en cas d’adoption
internationale
[...]
§ 3. Dès l'âge de douze ans, l'adopté a le droit de consulter son dossier d'adoption. Lorsqu'un
adopté qui n'a pas encore atteint l'âge de douze ans demande de consulter son dossier, le
fonctionnaire flamand à l'adoption décide en tenant compte de la maturité du demandeur.
Tout demandeur peut se faire assister par une personne de confiance.
§ 4. Le mineur a le droit d'accès aux données qui le concernent.
Sic
Le mineur a le droit d'explication des données auxquelles il a accès.
Au cas où certaines données concernent également un tiers et que la consultation complète des
données par le mineur porterait préjudice au droit du tiers à la protection de sa vie privée,
l'accès à ces données est accordé par le biais d'un entretien, une consultation partielle ou un
rapportage.
§ 5. Toute consultation doit faire l'objet d'une demande écrite adressée au fonctionnaire
flamand à l'adoption. Dans un mois de la réception de la demande, le fonctionnaire flamand à
l'adoption donne accès au dossier ou communique au demandeur son refus motivé. Un enfant
ne peut consulter son dossier d'adoption que sous accompagnement.
[...]
§ 8. Le Gouvernement flamand arrête les modalités de l'exercice du droit de consultation.
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2. Les différents contextes –
L’adoption
Communauté française
Article 49/1 du décret du 5 décembre 2013
modifiant le décret du 31 mars 2004 relatif à l’adoption
§ 1er. A dater de l’entrée en vigueur du présent article, l’A.C.C. et les organismes d’adoption
complètent, pour toute adoption qu’ils encadrent, un formulaire, dont le modèle est fixé par le
Gouvernement , contenant des informations sur l’adopté et des données non-identifiantes
sur ses parents biologiques.
Ce formulaire est communiqué aux adoptants lors de l’apparentement.
Copie du formulaire est envoyée par l’organisme à l’A.C.C.
§ 2. Ce formulaire est communiqué en mains propres à la demande de l’adopté, par
l’A.C.C. ou l’organisme d’adoption.
Si l’adopté est majeur, un accompagnement professionnel lui est proposé.
Si l’adopté est mineur, l’accompagnement professionnel est obligatoire.
Si l’adopté est un mineur de moins de 12 ans, sa demande ne peut être prise en
considération que s’il est accompagné de ses parents adoptifs ou de son représentant légal.
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2. Les différents contextes –
L’adoption
Communauté française
Article 49/2 du décret du 5 décembre 2013
modifiant le décret du 31 mars 2004 relatif à l’adoption
L’A.C.C. et les organismes d’adoption permettent la consultation des dossiers en leur
possession par toute personne adoptée ou par son représentant, dans la mesure permise par les
articles 368-6 et 368-7 du Code civil et par la loi belge.
Le Gouvernement fixe les modalités de consultation des dossiers visés à l’alinéa 1er.
Art. 50 de l’arrêté du Gouvernement de la Communauté française du 8 mai 2014
relatif à l’adoption.
1er. Le droit de consultation visé à l’article 49/2 du décret porte sur les données relatives aux
origines de l’adopté, à l’exclusion des données relatives aux aptitudes psychologiques et
sociales des adoptants, et aux suivis post-adoptifs.
Ce droit n’est pas ouvert à la famille d’origine ou à la fratrie de l’adopté.
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2. Les différents contextes –
L’adoption
Art. 50 de l’arrêté du Gouvernement de la Communauté française du 8
mai 2014 relatif à l’adoption.
§ 2. Toute personne majeure peut demander à consulter son dossier d’adoption. Cette
consultation est obligatoirement encadrée par un professionnel.
Dans le respect des dispositions du § 1er, et selon la demande de l’adopté, ce dernier réalise soit
un entretien, soit une consultation du dossier, soit un compte-rendu des éléments de celui-ci.
Lorsque l’adoption a été encadrée par un O.A.A. encore agréé, l’adopté s’adresse à ce dernier. S’il
ne souhaite pas de contact avec celui-ci, ou si l’adoption a été encadrée par un O.A.A. qui n’est
plus agréé, l’adopté s’adresse à l’A.C.C., qui soit encadre elle-même la demande, soit l’oriente
vers un O.A.A. ou vers un autre service d’accompagnement post-adoptif.
§ 3. Lorsque l’adoption n’a pas été encadrée par un O.A.A. ou par l’A.C.C., l’adopté s’adresse à
l’A.C.C., qui vérifie si elle dispose d’éléments relatifs à cette adoption. Si c’est le cas, la
consultation est organisée conformément aux dispositions des §§ 1er et 2. Dans le cas
contraire, l’A.C.C. peut donner des conseils généraux sur les démarches à suivre pour les
recherches d’origine.
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2. Les différents contextes –
Le secret de la maternité
Art. 312 du Code civil
§ 1er. L'enfant a pour mère la personne qui est désignée comme telle dans l'acte de naissance.
[…]
Art. 57 du Code civil
L'acte de naissance énonce :
[…]
2°[…] le nom, les prénoms et le domicile de la mère et du père, si la filiation paternelle est
établie ou de la coparente, si la filiation à l'égard de la coparente est établie ;
Art. 56, § 4, du Code civil
§ 4. L'officier de l'état civil s'assure de la naissance par une attestation d'un médecin ou d'une
accoucheuse.
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2. Les différents contextes –
Le secret de la maternité

L’accouchement "sous X" est inconnu en Belgique (mais pas en
France, au GD Luxembourg et en Italie).

CEDH :
• Odièvre c. France, 13 février 2003 : l'accouchement sous X est
conforme aux articles 8 et 14 de la Convention (proportionné au
regard des intérêts à protéger).
• Godelli c. Italie, 25 septembre 2012 : violation de l’article 8 de
la Convention dans la mesure où la législation italienne ne donne
aucune possibilité à l’enfant adopté et non reconnu à la naissance
de demander soit la réversibilité du secret, soit à tout le moins
l’accès à des informations non identifiantes sur ses origines.
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2. Les différents contextes –
Le secret de la maternité
 Accouchement sous X
« confidentiel »
accouchement
 Exemple : loi allemande adoptée le 5 juillet
2013, entrée en vigueur le 1er mai 2014, qui
met en place un système d’accouchement
confidentiel.
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2. Les différents contextes –
La PMA hétérologue
 Le principe en Belgique : les règles de la filiation jouent en
faveur des « auteurs du projet parental » (art. 27 et 56 de la loi du
6 juillet 2007 relative à la procréation médicalement assistée et à
la destination des embryons surnuméraires et des gamètes).
 « Auteur du projet parental » : toute personne ayant pris la
décision de devenir parent par le biais d'une procréation
médicalement assistée, qu'elle soit effectuée ou non au départ de
ses propres gamètes ou embryons.
 Impossibilité d’établir un lien de filiation entre l’enfant né
grâce à un don et les donneurs de gamètes ou d’embryons.
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2. Les différents contextes –
La PMA hétérologue
 Anonymat obligatoire pour le don d’embryon (art. 22, al. 2).
 Possibilité d’un don non anonyme pour le don de gamètes, si
accord donneur-receveur (art. 57).
 Il n'est pas prévu que l'enfant, à compter d’un certain âge, puisse
connaître l’identité du ou des donneurs.
 A l’étranger, levée de l’anonymat : Suède, Pays-Bas, Norvège,
Autriche, Suisse, Royaume-Uni, Etat de Victoria en Australie,
Finlande, Nouvelle-Zélande, Allemagne (de manière indirecte).
 Jurisprudence de la CEDH : S.H. et autres c. Autriche, 1er avril
2010 et 3 novembre 2011 (arrêt de grande chambre).
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2. Les différents contextes –
La gestation pour autrui
 Le principe en Belgique : nullité de la convention de gestation pour
autrui (illicéité de son objet et de sa cause).
 Jurisprudence favorable à la reconnaissance d’un lien de filiation à
l’égard du ou des parents d’intention.
 // Jurisprudence de la CEDH (arrêts Mennesson et Labassee c. France,
26 juin 2014).
 PL : choix de la logique « déclarative » ou « complétive » conditionnant le
lien entre l’enfant et la MP.
 A l’étranger?
• Logique déclarative (avec ou sans contrôle du processus) :
Ukraine et Etat de l’Illinois ; Grèce, Afrique du Sud, Virginie, Utah,
Texas, New Hampshire, Californie.
• Logique « complétive » : Israël , Nouvelle-Zélande et Royaume-Uni.
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2. Les différents contextes –
L’inceste
La question du secret des origines au regard de l’inceste
peut se situer à deux niveaux :
 sur le plan vertical, du point de vue de l’enfant issu
d’une relation incestueuse : l’interdiction d’établir la
double filiation sert-elle l’intérêt de l’enfant? (arrêt
C.Const., 9 août 2012).
 sur le plan horizontal, du point de vue de l’union de
deux personnes partageant, sans le savoir, une origine
commune.
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2. Les différents contextes –
Le secret de la paternité dans la filiation
« classique »
 Deux cas de figure : soit l’enfant n’a pas de filiation paternelle établie,
soit la paternité est établie mais elle s’avère ne pas correspondre à la
vérité biologique.
 Différence fondamentale avec les situations décrites ci-avant :
l’éventuel secret sur les origines de l’enfant n’est dans ce cas
organisé ni par la science ni par le droit.
 Rôle du droit : permettre ou non une totale transparence sur
les origines.
Contrainte de la mère
Expertise génétique
 Droit comparé : exemple des droits suisse et allemand.
Ob
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2. Les différents contextes –
Le secret de la paternité
 L’intérêt de l’enfant à la connaissance de ses origines ne doit pas
se confondre avec un droit à voir sa filiation établie à l’égard de
son géniteur.
 Droit belge de la filiation : équilibre entre vérité socioaffective et
vérité biologique, et désormais : prise en compte de l’intérêt de
l’enfant.
 Deux situations différentes :
•
Etablissement de la paternité en l’absence d’un père juridique
•
Contestation de la paternité, à l’initiative de l’enfant, de la mère,
du père juridique ou du père biologique
Ob
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2. Les différents contextes –
Le secret de la paternité
 Etablissement de la paternité : « présomption » que l’intérêt
de l’enfant est de voir sa filiation paternelle établie à l’égard de
son géniteur si lui ou sa mère le souhaite. Si la demande émane
du père biologique et refus de l’enfant et/ou de la mère : contrôle
de l’intérêt de l’enfant.
Jurisprudence de la Cour constitutionnelle :
[…] il peut exister des cas dans lesquels l’établissement juridique de
la filiation paternelle d’un enfant cause à celui-ci un préjudice. Si, en
règle générale, on peut estimer qu’il est de l’intérêt de l’enfant de voir
établie sa double filiation, on ne peut présumer de manière
irréfragable que tel soit toujours le cas.
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2. Les différents contextes –
Le secret de la paternité
Si l’âge d’un an constitue un critère objectif, il ne saurait être
considéré comme pertinent au regard de la mesure en cause. Rien ne
peut justifier que le juge saisi d’une demande de reconnaissance de
paternité prenne en considération l’intérêt de l’enfant lorsqu’il est âgé
de plus d’un an mais ne puisse en tenir compte lorsque l’enfant a
moins d’un an. En outre, en ce qu’elle a pour conséquence que
l’intérêt d’un enfant âgé de moins d’un an n’est jamais pris en compte
lors de l’établissement de sa filiation paternelle par reconnaissance,
cette mesure porte une atteinte disproportionnée aux droits des
enfants concernés.
C.C., 16 décembre 2010, arrêt n°144/2010
Ob
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2. Les différents contextes –
Le secret de la paternité
Lorsqu’il élabore un régime en matière de filiation, le législateur doit
certes permettre en principe aux autorités compétentes de ménager in
concreto un équilibre entre les intérêts des différentes personnes
concernées, sous peine de prendre une mesure qui ne serait pas
proportionnée aux objectifs légitimes poursuivis […] mais ce principe
ne revêt pas un caractère absolu. Il ne s’applique notamment pas à la
présente situation, pour laquelle le législateur a raisonnablement pu
considérer, dans les limites de la marge d’appréciation précitée, que,
dans une procédure judiciaire d’établissement de la filiation, le
droit de chacun à l’établissement de sa filiation doit
l’emporter, de façon générale, sur l’intérêt de la paix des
familles et de la sécurité juridique des liens familiaux et, en
particulier, sur le droit des personnes apparentées au père
biologique à ce qu’il ne soit pas porté atteinte à leur vie
privée et familiale.
C.C., 20 mars 2014, arrêt n°46/2014.
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2. Les différents contextes –
Le secret de la paternité
 Contestation de paternité
-
Exit la possession d’état comme fin de non-recevoir absolue
-
Délais d’action
Père, mère, homme qui revendique la paternité
Enfant, même devenu majeur
Ob
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2. Les différents contextes –
Le secret de la paternité
 Jurisprudence de la CEDH
Arrêt Konstantinidis c. Grèce, 3 avril 2014
La Cour considère [...] que l’établissement d’une filiation peut avoir des
répercussions considérables non seulement sur la vie privée et familiale des
proches parents de l’intéressé et des tiers, mais aussi sur leur situation
patrimoniale. Dans ce contexte, le législateur a tout intérêt à réglementer les
questions liées à la filiation, dont celles relatives à la recherche de paternité.
[…]
Selon la Cour, le délai d’un an institué au bénéfice de l’enfant par l’article
1483 n’est pas déraisonnable. Ce délai ménage un équilibre entre la
protection de l’enfant, en lui permettant de pallier à l’absence d’action
entreprise durant sa minorité, et celle du père présumé et évite de laisser
planer pendant longtemps une incertitude quant à leur situation familiale
ainsi qu’à leur situation patrimoniale et notamment les droits successoraux.
[…]
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2. Les différents contextes –
Le secret de la paternité
La Cour relève ensuite que le système prévu en la matière par le droit grec
n’est pas inflexible. En effet, le délai prévu par l’article 1483 peut être
suspendu : l’article 255 du code civil prévoit notamment la possibilité de
suspendre ce délai lorsque le titulaire du droit d’agir a été empêché en raison
d’un événement de force majeure ou a été dissuadé de manière dolosive, par
la personne qui lui est redevable, de faire valoir ses prétentions. En outre, la
jurisprudence des tribunaux grecs admet que l’ignorance des faits
permettant l’introduction d’une action en reconnaissance de paternité
constitue pour l’enfant un cas de force majeure justifiant la suspension du
délai prévu à l’article 1483 du code civil (paragraphes 22-25 ci-dessus). Or,
dans son action, le requérant ne s’est fondé que sur un prétendu
comportement dolosif de son père pour appuyer sa demande de suspension
du délai de prescription. Il n’a pas fait état d’une quelconque force majeure
qui l’aurait empêché d’agir plus tôt.
Ob
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2. Les différents contextes –
Le secret de la paternité
Par ailleurs, aux yeux de la Cour, le requérant a fait preuve d’un manque de diligence
non justifié par la connaissance tardive de l’identité de son père biologique.
[…]
La Cour observe que l’intérêt vital pour le requérant de découvrir la vérité
sur son ascendance, et donc sur un aspect important de son identité
personnelle, ne le dispensait pas de se conformer aux conditions prévues par
le droit interne en la matière et de faire preuve de diligence afin que les
juridictions internes pussent procéder à une juste appréciation des intérêts
concurrents en présence, indépendamment des contraintes juridiques liées à
l’existence du délai litigieux.
Compte tenu de la marge d’appréciation des Etats en matière de législation sur
l’action en reconnaissance de paternité, du caractère non absolu du délai de
prescription de l’article 1483 et de la jurisprudence des juridictions grecques y
relative, la Cour considère que l’application de ce délai dans les circonstances de
l’espèce n’a pas porté atteinte à la substance même du droit au respect de la vie privé
du requérant garanti par l’article 8 de la Convention.
En conséquence, la Cour conclut à la non-violation de l’article 8 de la Convention pris
isolément.
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2. Les différents contextes –
Le secret de la paternité
Opinion concordante des juges LAFFRANQUE et TURKOVIĆ :
[…] nous estimons que le droit de chacun de connaître son identité
biologique garanti par l’article 8 de la Convention confère à l’enfant un droit
imprescriptible à faire établir son identité biologique par des tests
génétiques.
La Cour a maintes fois souligné que l’expression « toute personne » employée
dans l’article 8 s’applique à la fois à l’enfant et au père putatif de celui-ci.
Elle a déjà admis que la fixation d’un délai de prescription pour
l’introduction d’une action en recherche de paternité se justifiait par le souci
de garantir la sécurité juridique et un caractère définitif aux relations
familiales, notamment en matière de droits successoraux […]
Toutefois, en l’espèce, le requérant souhaitait simplement établir ses liens
biologiques avec son père et ne formulait aucune autre revendication d’ordre
financier ou juridique. Le déni absolu de ce droit ne ménage pas un juste
équilibre entre les droits et intérêts concurrents.
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2. Les différents contextes –
Le secret de la paternité
La Cour a jugé que les personnes ont un intérêt vital,
défendu par la Convention, à obtenir les informations qui
leur sont indispensables pour découvrir la vérité sur un
aspect important de leur identité personnelle et à dissiper
leur incertitude à cet égard (Mikulić c. Croatie, requête no
53116/99, arrêt du 7 février 2002, §§ 64, 65).
Le simple établissement du lien biologique devrait
être autorisé sans limitation de durée, à titre de
remède subsidiaire, lorsque l’action en recherche
de paternité est prescrite.
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3. Vue synoptique
Modèle normatif de résolution des conflits
 Différents contextes du secret
 L’objet et le but de la recherche
 L’intérêt supérieur de l’enfant
 Une source d’inspiration : le modèle suisse
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3. Vue synoptique
Législateur
prise directe
Mode de conception
Inciter
Suppléer?
Adoption GPA PMA
L’enfant sait et après?
prise indirecte
La contrainte de la mère
Eléments non identifiants
Identité
Rencontre
Etablissement de la filiation
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Preuve scientifique
4. Conclusion
 L’incohérence du droit contemporain de la
filiation.
 Le droit d’accéder à ses origines :
• De la nécessité de ne pas se tromper de débat ;
• De la nécessité de ne pas réduire le débat.
 Il était une fois tes origines : l’importance de la
narration dans la construction de l’identité.
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Merci pour votre attention!
Des questions?
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