Cinématique des fluides

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Cinématique des fluides
Chapitre 3
Cinématique des fluides
La cinématique est la description analytique d’un système en mouvement. Dans ce chapitre, nous allons donc nous intéresser aux mouvements des fluides par rapport au temps,
indépendamment des causes qui les provoquent, c’est-à-dire sans prendre en compte les forces
qui sont à leur source.
Un milieu fluide étant en mouvement, comment l’observer, comment le décrire ?
On introduit pour commencer la notion de « particule fluide » (ou plus généralement, pour
un milieu continu quelconque, de « particule milieu continu »). C’est un tout petit volume de
matière que l’on a « marqué » et que « l’on suit dans son mouvement ».
A cette particule fluide, on attache des grandeurs cinématiques (position,vitesse, accélération)
et des grandeurs thermodynamiques (masse volumique, température, pression, . . . ).
3.1
3.1.1
Description du mouvement
Particule fluide
Au sein d’un fluide occupant le volume D, considérons un très petit volume ∆V de fluide.
On introduit trois longueurs : le diamètre a des molécules, une longueur d caractéristique du
volume ∆V (par exemple, le diamètre de ∆V si ∆V est une sphère, la plus grande distance
entre deux points de ∆V si ∆V est quelconque, . . . ), une longueur L caractéristique du volume
D de fluide. Une particule fluide est le petit volume ∆V si :
adL
Autrement dit, ∆V contient un très grand nombre de molécules, mais est très petit par rapport
au volume D. À titre illustratif, le diamètre d’une molécule d’eau est de l’ordre de a = 2 10−10 m ;
dans un volume d’eau D sphérique de diamètre L = 1 m, un petit volume sphérique ∆V de
diamètre d = 10−6 m, constitue bien une « particule fluide » au sens où nous venons de le définir,
car on a bien : 2 10−10 10−6 1.
Dans la description du milieu fluide, la particule fluide est assimilée à un point au sens
mathématique du terme (c’est-à-dire avec un diamètre nul).
3.1.2
Grandeurs cinématiques attachées à une particule fluide
Position
On considère une particule fluide (appelée brièvement une particule), et on suit cette particule
dans son mouvement par rapport au repère orthonormé direct (O; x, y, z) dont les vecteurs
41
42
CHAPITRE 3. CINÉMATIQUE DES FLUIDES
z
M0
~x0 = ~x0 (t)
M (t)
~x = ~x(t)
Trajectoire de M
~ez
O
~ex
x
~ey
y
Fig. 3.1 – Positions successives d’une particule fluide
unitaires des trois axes sont ~ex , ~ey et ~ez . Le temps est noté t. Une particule M est en mouvement
par rapport à ce repère.
À l’instant t = t0 , la particule fluide occupe la position ~x0 = (x0 , y0 , z0 ). À un instant t
−−→
quelconque, la particule fluide occupe la position ~x(t) = (x, y, z). Par définition : OM 0 = ~x0 et
−−→
OM = ~x(t).
Nous écrirons que la position, à l’instant t, de la particule fluide qui occupait la position ~x0
à l’instant t0 , est donnée par :
~ x0 , t0 , t)
~x(t) = F(~
(3.1)
c’est-à-dire :
x = f (~x0 , t0 , t),
y = g(~x0 , t0 , t),
z = h(~x0 , t0 , t)
(3.2)
où l’on a utilisé la notation condensée ~x0 pour (x0 , y0 , z0 ). Ainsi on a :
f (~x0 , t0 , t) = f (x0 , y0 , z0 , t0 , t)
~ est supposée continue et continûment dérivable autant de fois qu’il est nécessaire.
La fonction F
~ qui à ~x0 fait correspondre ~x est
On suppose en outre, que pour t et t0 fixés, la fonction F
bijective, si bien que :
~ −1 (~x, t0 , t)
~x0 = F
(3.3)
Vitesse
~ qui représente la
À chaque instant t on peut définir, en tout point de l’espace, un vecteur U
vitesse, à l’instant t, de la particule fluide qui occupait la position ~x0 à l’instant t0 . Cette vitesse
est donnée par :
~
~ = ∂ F (~x0 , t0 , t)
(3.4)
U
∂t
c’est-à-dire :
∂f
∂g
∂h
u=
(~x0 , t0 , t),
v=
(~x0 , t0 , t),
w=
(~x0 , t0 , t)
(3.5)
∂t
∂t
∂t
~ = u ~ex + v ~ey + w ~ez .
où l’on a noté : U
Accélération
L’accélération, à l’instant t, de la particule fluide qui occupait la position ~x0 à l’instant t0 ,
est donnée par :
2~
~Γ = ∂ F (~x0 , t0 , t)
(3.6)
∂t2
3.1. DESCRIPTION DU MOUVEMENT
43
avec les notations précédentes.
3.1.3
Exemple
Soit une particule dont la position à l’instant t est :
x = x0 1 + ω (t − t0 ) ,
y = y0 exp ω (t − t0 ) + x0 ω (t − t0 ),
z = z0 + ω 2 (x0 + y0 ) (t − t0 )2
~ a pour
À l’instant t = t0 , la particule occupe la position (x0 , y0 , z0 ). À l’instant t, sa vitesse U
composantes :
v = ω x0 + ω y0 exp(ω (t − t0 )),
u = ω x0 ,
w = 2 ω 2 (x0 + y0 ) (t − t0 )
et son accérération est :
~Γ = 0, ω 2 y0 exp(ω (t − t0 )), 2 ω 2 (x0 + y0 )
3.1.4
Description de Lagrange (description par les trajectoires)
Définition
La courbe, lieu du point M lorsque le temps t varie, le point M0 étant fixé, est la trajectoire
de la particule qui à t = t0 occupait la position M0 (Fig. 3.2).
M (t)
z
M0
Trajectoires
~x = ~x(t)
~x0 = ~x0 (t)
D
~ez
D0
~ex
O
~ey
x
y
Fig. 3.2 – Description par les trajectoires
Une technique de visualisation des trajectoires consiste à marquer une « particule fluide »
par l’utilisation d’un traceur coloré, dans le cas d’un liquide, ou de fumée, dans le cas d’un gaz,
et ensuite de suivre l’évolution de sa position au cours du temps.
Soit à l’instant t0 , un domaine D0 de fluide. Considérons une particule quelconque M0 de D0
et sa trajectoire. À l’instant t, cette particule occupe la position M et l’ensemble de toutes les
particules de D0 occupent le volume D (Fig. 3.2). On peut dire que la connaissance de toutes les
trajectoires (y compris les lois horaires qui donnent la manière dont elles sont décrites au cours
du temps) donne une description complète du mouvement.
Remarquons que la détermination des trajectoires revient, en pratique, à déterminer la fonc~ introduite dans la relation (3.1). La connaissance de F(~
~ x0 , t0 , t) pour ~x0 , t et t0 donnés
tion F
donne une description complète du mouvement.
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CHAPITRE 3. CINÉMATIQUE DES FLUIDES
~ (c’est-à• En terme de terminologie, on appelle x0 , y0 , z0 et t les variables de Lagrange et F
dire f , g et h) les inconnues de Lagrange. Dans la suite, on abandonnera parfois les notations
(f , g, h) pour les remplacer par (x, y, z) (voir le tableau dans le paragraphe 3.1.5).
3.1.5
Description d’Euler (description par le champ de vitesses)
Dans la pratique, il est difficile d’identifier, et donc de suivre, une particule fluide en mouvement. Il apparaı̂t donc judicieux d’introduire une description alternative pour un écoulement.
La connaissance de la vitesse de la particule fluide qui, à un instant t, occupe la position ~x est
une donnée pertinente pour décrire le mouvement d’un fluide. Considérons la vitesse
~
~ = ∂ F (~x0 , t0 , t)
U
∂t
et utilisons l’expression de ~x0 en fonction de ~x donnée par (3.3). On a :
~
~ = ∂F F
~ −1 (~x, t0 , t), t0 , t = fonction de (~x, t0 , t)
U
∂t
(3.7)
~
Dans (3.7), la dérivée partielle ∂ F/∂t
est, comme dans (3.4), la dérivée par rapport au t
~ En d’autres termes, c’est la dérivée de F
~
figurant en dernière position dans les arguments de F.
avec ~x0 = fixé.
~ est une fonction de ~x, t0 et t : U
~ =U
~ (~x, t0 , t). La position initiale
On voit sur (3.7) que U
~.
~x0 ne figure plus. C’est la position ~x occupée par la particule à l’instant t qui figure dans U
Mais il faut bien comprendre que c’est la position à l’instant t de la particule « marquée » par
le vecteur ~x0 .
~ (c’est-à-dire u,
• En terme de terminologie, on appelle x, y, z et t les variables d’Euler et U
v et w) les inconnues d’Euler.
À partir de maintenant, on ne fait plus figurer l’instant initial t0 dans les expressions.
D’ailleurs, quite à changer l’origine des temps, on peut toujours poser t0 = 0.
On peut récapituler l’ensemble de ces deux descriptions dans le tableau suivant :
3.1.6
Description de Lagrange
Description d’Euler
Variables
x0 , y0 , z0 , t
x, y, z, t
Inconnues
x = x(x0 , y0 , z0 , t)
y = y(x0 , y0 , z0 , t)
z = z(x0 , y0 , z0 , t)
u = u(x, y, z, t)
v = v(x, y, z, t)
w = w(x, y, z, t)
Remarques sur les descriptions de Lagrange et d’Euler
Dans le domaine de la mécanique, les deux descriptions sont utilisées. En mécanique des
solides, et tout particulièrement du solide rigide, c’est la description de Lagrange qui est prioritairement utilisée. En mécanique des fluides, comme on le verra dans ce cours, c’est la description
d’Euler qui est prioritairement utilisée. Sous un pont, c’est la vitesse du courant de la rivière
qui est importante, et non l’origine de l’eau (nuage, neige fondue, . . . ).
Un exemple, extrait de la vie courante, de l’utilisation des deux descriptions est bien connu.
Pour la circulation des voitures sur une route, « Bison futé » utilise la description d’Euler pour
donner la vitesse de « l’écoulement des voitures », mais le « gendarme » utilise la description de
Lagrange pour viser une voiture particulière afin d’apprécier son excès de vitesse.
On peut passer d’une description de Lagrange à celle d’Euler, et réciproquement. Donnons
un exemple très simple :
3.1. DESCRIPTION DU MOUVEMENT
45
• Soit un écoulement défini en variables de Lagrange :
x = ω y0 t + x0 ,
y = y0 ,
z = ω z0 t + z 0
(a.1)
En t = 0, on a : ~x = (x, y, z) = (x0 , y0 , z0 ) = ~x0 . On peut trouver la fonction inverse F −1
(voir (3.3)) en résolvant les trois équations (a.1) :
x0 = x − ω y t ,
y0 = y ,
z0 =
z
1+ωt
En dérivant (a.1) par rapport à t, puis en utilisant (a.2), il vient :
ωz
(`)
~ (e) (~x, t)
~
~
=U
U = U (~x0 , t) = (ω y0 , 0, ω z0 ) = ω y, 0,
1+ωt
(a.2)
(a.3)
Nous avons mis l’exposant (`) pour « Lagrange » au vecteur vitesse lorsque celui-ci est
exprimé avec les variables (~x0 , t) de Lagrange, et nous avons mis l’exposant (e) pour
« Euler » au vecteur vitesse lorsque celui-ci est exprimé avec les variables (~x, t) d’Euler.
Avec ce dernier résultat (a.3), on a la description d’Euler de l’écoulement.
~ (e) = (ω y, 0, ω z/(1 + ω t)).
• Soit maintenant l’écoulement défini en variables d’Euler par : U
Pour trouver ~x = (x, y, z) en fonction du temps t, on a à résoudre les trois équations
différentielles :
dx
dz
ωz
= ω y,
dy = 0,
=
(a.4)
dt
dt
1+ωt
d’où :
y = b,
x = ω b t + a,
z = c (1 + ω t)
(a.5)
où a, b et c sont trois constantes d’intégration. En effet, l’équation différentielle pour z
s’intègre en ln |z| = ln |1 + ω t| + cste, soit z = c (1 + ω t).
Les trois constantes a, b et c correspondent aux trois valeurs de (x, y, z) pour t = 0. On
retrouve la description de Lagrange (a.1).
3.1.7
Lignes de courant
~ =U
~ (x, y, z, t).
Dans ce paragraphe, l’écoulement est donné par une description d’Euler : U
~
Pour t1 fixé et pour le volume D de fluide, on a un vecteur vitesse U en chaque point M de D.
~ constituent un champ de vitesses (Fig. 3.3).
Les vecteurs U
z
~x
~
U
Ligne de courant
à l’instant t1
~ez
O
~ey
~ex
D
x
Volume D de fluide
à l’instant t1
y
Fig. 3.3 – Champ des vecteurs vitesse et lignes de courant
46
CHAPITRE 3. CINÉMATIQUE DES FLUIDES
Remarque
Supposons que l’on injecte des petites particules dans le fluide en mouvement, et que l’on
prenne un cliché à l’instant t1 et un autre à l’instant t1 + ∆t. Ces deux clichés permettent de
visualiser les deux positions ~x(t1 ) et ~x(t1 + ∆t) pour une même particule, et donc de déterminer
~ en chaque point du volume D de fluide. En chaque point de
la direction du vecteur vitesse U
l’écoulement, on observe ainsi la direction du vecteur vitesse.
Définition : lignes de courant à l’instant t1
À un instant t1 fixé, les lignes de courant sont les courbes tangentes en chacun de leur point
au vecteur vitesse de l’écoulement en ce point (Fig. 3.3).
Pour obtenir les équations différentielles des lignes de courant C, on écrit que le vecteur
−−→
−→
~ . Sachant que −
élémentaire dM tangent à C en M est parallèle au vecteur vitesse U
dM =
~ = u = u(x, y, z, t1 ), v = v(x, y, z, t1 ), w = w(x, y, z, t1 ) , le parallèlisme de
(dx, dy, dz) et que U
−−→
~ implique :
dM et U
dx
dy
dz
=
=
(3.8)
u(x, y, z, t1 )
v(x, y, z, t1 )
w(x, y, z, t1 )
Il faut bien noter qu’ici, on a deux équations différentielles (donnant par exemple x et y en
fonction de z) car t1 est un paramètre fixé. Il faut bien noter aussi que les lignes de courant à
l’instant t1 sont différentes, en général, des lignes de courant à un autre instant t2 .
Tube de courant à l’instant t1
On appelle tube de courant à l’instant t1 , la surface constituée par l’ensemble des lignes
de courant à l’instant t1 s’appuyant sur une courbe fermée (Fig. 3.4).
z
Tube de courant
à l’instant t1
~ez
O
~ex
x
~ey
y
Fig. 3.4 – Tube de courant
Lignes de courant et trajectoires
Il ne faut pas confondre les deux notions. Pour construire une ligne de courant à l’instant
t1 , on considère des particules différentes au même instant t1 alors qu’une trajectoire est
constituée de la succession des positions d’une même particule à des instants différents.
Pour obtenir, en variables d’Euler, les équations différentielles des trajectoires, on écrit que
−−→
−→
~ :−
~ , d’où :
le vecteur vitesse dM /dt est égal au vecteur vitesse U
dM /dt = U
dx
dy
dz
=
=
= dt
u(x, y, z, t)
v(x, y, z, t)
w(x, y, z, t)
(3.9)
3.1. DESCRIPTION DU MOUVEMENT
47
Il faut bien noter qu’ici, on a trois équations différentielles donnant x, y et z en fonction de la
variable t.
3.1.8
Écoulement stationnaire
Définition
Un écoulement est dit stationnaire (ou encore permanent), si la vitesse, étant exprimée en
~ =U
~ (x, y, z),
variables d’Euler, ne dépend pas explicitement du temps t. Autrement dit : U
c’est-à-dire :
u = u(x, y, z),
v = v(x, y, z),
w = w(x, y, z)
(3.10)
Naturellement, un écoulement qui n’est pas stationnaire est dit instationnaire.
Pour un écoulement stationnaire, les lignes de courant à l’instant t1 ne dépendent pas du
temps t1 (voir (3.8) et (3.10)). Les lignes de courant demeurent fixes au cours du temps.
Pour un écoulement stationnaire, on a donc :
dy
dz
dx
=
=
: équations des lignes de courant
u(x, y, z)
v(x, y, z)
w(x, y, z)
dx
dy
dz
=
=
= dt : équations des trajectoires
u(x, y, z)
v(x, y, z)
w(x, y, z)
(3.11)
(3.12)
Les deux premières équations donnant les trajectoires sont identiques aux deux équations
donnant les lignes de courant. Dans (3.12), on a seulement en plus la loi horaire (par le dernier
signe égal).
Nous dirons que dans un écoulement stationnaire, les trajectoires et les lignes de courant
sont confondues.
3.1.9
Exemples
Exemple 1 : On considère l’écoulement défini, en variables d’Euler par : u = ω x, v =
α ω y + ω 2 y t, w = ω x (ω 6= 0, α 6= 0). C’est un écoulement instationnaire. Les lignes de courant
à l’instant t1 sont données par :
dx
dy
dz
=
=
2
ωx
α ω y + ω y t1
ωx
dx
dy
=
x
α y + ω y t1
Ces équations s’intègrent aisément. La première donne z = x + K1 et la seconde donne :
dx = dz,
ln |x| =
1
ln |y| + cste
α + ω t1
y = K2 |x|1/(α+ω t1 )
K1 et K2 sont deux constantes d’intégration. Les lignes de courant sont les courbes d’intersection
des deux surfaces dont les équations sont les solutions des deux équations différentielles données
ci-dessus.
Exemple 2 : On considère maintenant l’écoulement défini, en variables d’Euler par : u = ω x,
v = 0, w = ω x (ω 6= 0). C’est un écoulement stationnaire. Les lignes de courant ne dépendent
pas du temps et sont données par :
dx
dy
dz
=
=
ωx
0
ωx
dx = dz,
dy = 0
48
CHAPITRE 3. CINÉMATIQUE DES FLUIDES
soit : y = K1 et z = x + K2 , où K1 et K2 sont deux constantes d’intégration. Les lignes de
courant sont définies par ces deux équations de plan ; ce sont des droites.
3.2
Dérivée particulaire
Une dérivée particulaire est la dérivée par rapport au temps d’une grandeur définie sur un
ensemble de particules fluides que l’on suit dans leur mouvement.
3.2.1
Dérivée particulaire d’une fonction
Soit une particule fluide que l’on suit dans son mouvement, c’est-à-dire la particule qui
occupait la position ~x0 à l’instant initial, et qui se trouve à la position ~x à l’instant t. Soit une
grandeur θ attachée à cette particule (par exemple, sa position, sa vitesse, sa température, . . . ).
On peut exprimer cette grandeur θ à l’aide des variables de Lagrange (~x0 et t), ou bien à
l’aide des variables d’Euler (~x et t). En variables de Lagrange on écrira θ = θ(`) (~x0 , t) et en
variables d’Euler on écrira θ = θ(e) (~x, t). Nous voulons calculer la dérivée de θ par rapport à t,
quand on suit la particule dans son mouvement, c’est-à-dire pour ~x0 fixé. Pour cette dérivée,
on utilise la terminologie « dérivée particulaire » et on la note avec un D : Dθ/Dt.
Dθ
= dérivée particulaire de θ
Dt
Fonction exprimée en variables de Lagrange
Soit θ(`) (~x0 , t) la fonction θ exprimée en variables de Lagrange. La dérivée particulaire de θ
est la dérivée par rapport à t à ~x0 fixé, et s’écrit donc dans le cas d’une fonction des variables
de Lagrange, comme la dérivée partielle de la fonction par rapport au temps :
Dθ
Dθ`
∂θ(`)
=
(~x0 , t) =
(~x0 , t)
Dt
Dt
∂t
(3.13)
Fonction exprimée en variables d’Euler
Soit θ(e) (~x, t) la fonction θ exprimée en variables d’Euler. Il y a dans θ(e) (~x, t) la variable
« cachée » ~x0 . D’après (3.1) et (3.2) :
~ x0 , t), t) = θ(e) (f (~x0 , t), g(~x0 , t), h(~x0 , t), t) = θ(`) (~x0 , t)
θ(e) (~x, t) = θ(e) (F(~
Nous avons à dériver θ(e) (~x, t) par rapport à t avec ~x0 fixé. Avec les expressions ci-dessus,
on a :
Dθ
∂θ(e)
∂f
∂θ(e)
∂g
∂θ(e)
∂h
=
(~x, t) +
(~x0 , t) +
(~x, t) (~x0 , t) +
(~x, t)
(~x0 , t)
Dt
∂t
∂t
∂y
∂t
∂z
∂t
et donc, en utilisant les relations (3.5), et en les reportant dans l’expression précédente, on
obtient :
Dθ
∂θ(e)
∂θ(e)
∂θ(e)
∂θ(e)
=
(~x, t) + u(~x, t)
(~x, t) + v(~x, t)
(~x, t) + w(~x, t)
(~x, t)
Dt
∂t
∂x
∂y
∂z
On écrira l’expression ci-dessus sous la forme suivante :
−→
Dθ(e)
∂θ(e)
~ (~x, t) · −
(~x, t) =
(~x, t) + U
grad θ(e) (~x, t)
Dt
∂t
(3.14)
3.2. DÉRIVÉE PARTICULAIRE
49
ou plus brièvement :
Dθ
Dθ(e)
∂θ(e) ~ −−→ (e)
=
=
+ U · grad θ
(3.15)
Dt
Dt
∂t
Le terme en gradient qui apparaı̂t au second membre de l’expression (3.14) ou (3.15) est
appelé terme convectif d’où le nom de dérivée convective qui est aussi utilisé pour désigner
la dérivée particulaire.
Propriété
Si, en description d’Euler,
Dθ(e)
(~x, t) = 0, alors θ(e) = cste le long de chaque trajectoire.
Dt
En effet, soit θ(e) (~x, t) tel que
Dθ(e)
(~x, t) = 0. Comme θ(e) (~x, t) = θ(`) (~x0 , t), on a :
Dt
Dθ(e)
∂θ(`) (~x0 , t)
(~x, t) =
=0
Dt
∂t
donc θ(`) (~x0 , t) ne dépend pas de t et par suite : θ(e) (~x, t) = θ(`) (~x0 ) ne dépend que de ~x0 . On
peut donc dire que θ(e) (~x, t) ne dépend que de ~x0 , ce qui signifie que la quantité θ(e) (~x, t) est
constante le long de la trajectoire de la particule située en ~x0 à l’instant initial.
Exemples
~ = (u = α x, v = β y t, w = 0), et soit θ(e) (~x, t) = (1/2) (x2 +
• Soit l’écoulement défini par : U
y 2 + z 2 ). On a :
Dθ(e)
∂θ(e)
∂θ(e)
∂θ(e)
(~x, t) = u
+v
+w
Dt
∂x
∂y
∂z
2
= u x + v y + w z = α x + β y2 t
• Soit la fonction θ(e) (~x, t) = x c’est-à-dire égale à l’abscisse, à l’instant t, de la position de
la particule M . Par application de (3.14), on a Dx/Dt = u. Plus généralement :
θ~(e) (~x, t) = ~x
⇒
D~x
~
=U
Dt
~.
La dérivée particulaire du vecteur position ~x de la particule est sa vitesse U
Cas particulier de l’accélération
Compte-tenu de la définition (3.6), l’accélération ~Γ de la particule située en ~x0 à l’instant
~ avec ~x0 fixé. Si on exprime la vitesse
initial, est la dérivée par rapport au temps t de la vitesse U
~ en fonction des variables d’Euler, U
~ = U
~ (~x, t), les composantes de l’accélération du fluide
U
s’écrivent donc :
~Γ = (Γx , Γy , Γz )
avec
∂u
∂u
∂u
∂u
Du
=
+u
+v
+w
Dt
∂t
∂x
∂y
∂z
Dv
∂v
∂v
∂v
∂v
Γy =
=
+u
+v
+w
Dt
∂t
∂x
∂y
∂z
Dw
∂w
∂w
∂w
∂w
Γz =
=
+u
+v
+w
Dt
∂t
∂x
∂y
∂z
Γx =
50
CHAPITRE 3. CINÉMATIQUE DES FLUIDES
On peut écrire ces formules sous forme vectorielle :
~
~
−→ ~
~Γ = DU = ∂ U + U
~ ·−
grad U
Dt
∂t
(3.16)
Remarque sur les notations
Ci-dessus, nous n’avons pas fait figurer l’exposant (e) de manière systématique. En mécanique
des fluides, la description utilisée est presque toujours celle d’Euler. Aussi, lorsqu’il n’y a aucune
~ (~x, t), u(~x, t), v(~x, t) et w(~x, t).
confusion possible l’exposant (e) est omis. Ainsi on écrit : U
3.2.2
Dérivée particulaire d’une intégrale de volume
On sera amené, dans la suite de cours, à considérer des volumes de fluide que l’on suit dans
leur mouvement. Soit un volume D qui occupe la position D(t) à l’instant t, et la position D(t0 )
à l’instant t0 (Fig. 3.4) ce sont toujours les mêmes particules fluides qui constituent le volume
D(t) ou D(t0 ) quels que soit les instants t et t0 . On dit que l’on suit le volume D(t) dans son
mouvement.
Soit k(~x, t) une fonction de classe C 1 définie sur le domaine Q(t) que l’on suit dans son
mouvement. On considère l’intégrale :
ZZZ
K(t) =
k(~x, t) dV
D(t)
Notre but est de calculer la dérivée par rapport au temps t de K(t). Dans l’intégrale définissant
K(t), le temps t figure dans l’intégrant k(~x, t) et dans le domaine d’intégration D(t). C’est
précisément parce que D(t) « bouge » au cours du temps que le calcul de la dérivée de K(t) est
difficile à calculer. Cette dérivée est appelée dérivée particulaire, et sera notée comme dans le
paragraphe précédent, par DK(t)/Dt.
Théorème 3.1 Soit un fluide en mouvement dont le champ des vitesses en variables d’Euler
~ (~x, t). Soit D(t) un volume que l’on suit dans son mouvement, dont la surface frontière
est U
est S(t). Soit enfin une fonction k(~x, t) définie sur un domaine de l’espace contenant D(t).
~ (~x, t) et k(~x, t) sont de classe C 1 , et la surface S(t) est régulière par morceaux
Les fonctions U
(c’est-à-dire de classe C 1 par morceaux). Alors on a :
DK
(t) =
Dt
ZZZ
D(t)
∂k
(~x, t) dV +
∂t
ZZ
~ (~x, t) · ~n dS
k(~x, t) U
(3.17)
S(t)
ou encore, en utilisant le théorème de la divergence :
ZZ Z
∂k
DK
~
(t) =
v
(~x, t) + div k(~x, t) U (~x, t)
dV
Dt
∂t
D(t)
(3.18)
Une démonstration rigoureuse de ces résultats peut être obtenue dans l’ouvrage de P. Germain et P. Muller (Mécanique des milieux continus, Masson et Cie, 1993). Nous ne donnons ici
qu’une simple justification de ce résultat. Considérons donc le domaine matériel D matériel en
mouvement et soient t et t0 deux instants voisins. La particule fluide qui est en M (t) sur S(t) se
déplace au cours du temps et coı̈ncide avec le point M (t0 ) de S(t0 ) à l’instant t0 (Fig. 3.5-b). Les
instants t et t0 étant très proches, on peut considérer que la trajectoire de la particule fluide est
−−−−−−−→
~ (~x, t).
quasi-rectiligne et que son déplacement est : M (t) M (t0 ) = (t0 − t) U
3.2. DÉRIVÉE PARTICULAIRE
51
S(t)
z
~ez
D(t)
D(t0 )
~ex
O
~n
x
~ey
y
(a)
(c)
(b)
I
II
~ (t0 − t)
U
dS
III
M (t)
D(t)
III
II
S(t)
~n
M (t0 )
D(t0 )
I
~n
~ (t0 − t)
U
II
dS
Fig. 3.5 – Dérivée particulaire d’une intégrale de volume
Par définition de la dérivée, on peut écrire :
DK
K(t0 ) − K(t)
(t) = lim
t0 →t
Dt
t0 − t
"Z Z Z
#)
(
ZZZ
1
0
k(~x, t ) dV −
k(~x, t) dV
= lim
t0 →t
t0 − t
V(t0 )
V(t)
Z Z Z
ZZZ
ZZZ
1
0
0
= lim
k(~x, t ) dV +
k(~x, t ) − k(~x, t) dV −
k(~x, t) dV
t0 →t
t0 − t
III
II
I
ZZZ
ZZZ
k(~x, t0 ) − k(~x, t)
1
0
= lim
dV
+
lim
k(~
x
,
t
)
dV
t0 →t
t0 →t t0 − t
t0 − t
II
III
ZZZ
1
− lim
k(~x, t) dV
t0 →t t0 − t
I
Les régions I, II et III sont indiquées sur la figure 3.5-b. Nous examinons successivement les
trois intégrales figurant dans la dernière égalité. Pour la première, en remarquant que limt0 →t II =
limt0 →t (D(t0 ) ∩ D(t)) = D(t), on a :
ZZZ
ZZZ
k(~x, t0 ) − k(~x, t)
∂k
lim
dV =
(~x, t) dV
0
0
t →t
t −t
II
D(t) ∂t
Considérons maintenant, l’intégrale sur III. Nous pouvons écrire, en utilisant la figure 3.5-c, que
~ · ~n dS
dV = (t0 − t) U
En effet, sur la figure 3.5-c, dS désigne un élément de surface de la portion de S(t) séparant
0
les
régions
II et III. Le petit volume dV balayé par dS entre les instants t et t a pour valeur
0
~
U (t − t ) · ~n dS. Ceci nous permet de transformer l’intégrale sur le volume III en une intégrale
de surface sur la portion de S(t) séparant les régions II et III, d’où :
ZZ
ZZZ
1
0
~ (~x, t) · ~n dS
lim
k(~x, t ) dV =
k(~x, t) U
t0 →t
t0 − t
+
S (t)
III
52
CHAPITRE 3. CINÉMATIQUE DES FLUIDES
~ · ~n est positif.
où S + (t) désigne la portion de S(t) sur laquelle U
De la même manière, concernant l’intégrale sur I, nous écrivons en utilisant la figure 3.5-c :
~ · ~n dS
dV = −(t0 − t) U
~ · ~n est négatif. On transforme l’intégrale de volume en une intégrale de
en remarquant qu’ici U
surface et on écrit :
ZZ
ZZZ
1
~ (~x, t) · ~n dS
lim
k(~x, t) dV =
−k(~x, t) U
t0 →t
t0 − t
−
I
S (t)
~ · ~n est négatif.
où S − (t) désigne la portion de S(t) sur laquelle U
En rassemblant les trois résultats que nous venons d’écrire on obtient :
ZZ
ZZZ
ZZ
DK
∂k
~ (~x, t) · ~n dS
~
−k(~x, t) U
k(~x, t) U (~x, t) · ~n dS −
(t) =
(~x, t) dV +
Dt
S − (t)
D(t) ∂t
S + (t)
soit :
DK
(t) =
Dt
ZZZ
D(t)
∂k
(~x, t) dV +
∂t
ZZ
~ (~x, t) · ~n dS
k(~x, t) U
S(t)
La relation (3.17) donnée dans l’énoncé du théorème est ainsi établie.
Remarque
Très souvent, dans les intégrales figurant au second membre de (3.17) et (3.18), on ne fait
pas figurer la dépendance en (t), et on écrit S et D pour S(t) et D(t). S et D sont les surface et
volume qui coı̈ncident avec S(t) et D(t) à l’instant t considéré.
3.2.3
Exemple d’application
Si dans les formules (3.17) et (3.18), nous faisons k(~x, t) = 1, alors K(t) = volume de D(t).
Pour tout D contenu dans D0 , on a :
ZZ
ZZZ
D
~
~ dV
(volume de D(t)) =
U · ~n dS =
div U
(3.19)
Dt
S(t)
D(t)
Définition
~ (~x, t) est dit
Un écoulement défini sur D0 en variables d’Euler par le champ de vitesse U
isovolume ou incompressible si et seulement si le volume de D(t) est constant, et ceci, pour
tout D contenu dans D0 .
Propriété
~ (~x, t) est isovoUn écoulement défini sur D0 en variables d’Euler par le champ de vitesse U
~ = 0 sur D0 .
lume ou incompressible si et seulement si : div U
~ = 0 sur D0 , l’écoulement est isovolume d’après (3.19). Réciproquement,
En effet, si div U
considérons (3.19) et prenons D(t) très petit. En raisonnant comme dans le paragraphe 3.3.3,
on obtient que le terme sous le signe intégrale est égal à zéro en tout point de D0 , c’est-à-dire
~ = 0 en tout point de D0 .
div U
Nous reviendrons sur la terminologie utilisée ici à la fin du paragraphe 3.3.2.
3.3. LOI DE LA CONSERVATION DE LA MASSE
3.3
53
Loi de la conservation de la masse
Soit D0 (t) un volume de fluide que l’on suit dans son mouvement et une partie D(t) de D0 que
l’on suit également dans son mouvement (voir paragraphe 3.2.2). Dans le chapitre 2 (Statique
des fluides), nous avons introduit la masse volumique ρ d’un fluide. Il est clair que la masse de
D(t) est donnée par :
ZZZ
m(D) =
ρ(~x, t) dV
D(t)
3.3.1
Loi de conservation de la masse
Soit un domaine fluide D(t) que l’on suit dans son mouvement. En l’absence de processus
permettant la création ou la destruction de matière, la masse de D(t) est constante. On a donc :
ZZZ
D
D
ρ(~x, t) dV = 0
(3.20)
m(D) =
Dt
Dt
D(t)
pour toute partie D de D0 .
En utilisant les formules (3.17) et (3.18) de dérivation particulaire d’une intégrale de volume,
il vient :
ZZZ
ZZ
∂ρ
~ · ~n dS = 0
dV +
ρU
(3.21)
D(t) ∂t
S(t)
ZZZ
∂ρ
~
+ div ρ U
dV = 0
(3.22)
∂t
D(t)
toujours pour toute partie D de D0 .
Les équations (3.20), (3.21) et (3.22) correspondent à la loi de conservation de la masse sous
forme globale.
~ est
Considérons maintenant un volume de fluide D0 et supposons que ∂ρ/∂t + div ρ U
continu sur D0 . Considérons la loi (3.22) et appliquons-la à un domaine D très petit et égal à
∆V contenant un point, noté M0 , en son intérieur. Comme ∆V est très petit, et en raisonnant
comme dans le paragraphe 2.3.3, on peut écrire :
∂ρ
~
+ div ρ U
∆V dV = 0
∂t
M0
où la valeur de la parenthèse est prise en M0 . Comme ∆V n’est pas nul, c’est la parenthèse qui
est nulle. Le point M0 est quelconque, donc la parenthèse est nulle en tout point M0 de D0 , d’où
la loi de la conservation de la masse sous forme locale :
∂ρ
~ =0
+ div ρ U
(3.23)
∂t
3.3.2
Remarques
L’égalité (3.23) qui est la forme locale de la loi de la conservation de la masse est aussi
appelée « équation de continuité ». L’expression de cette loi peut être écrite différemment. En
effet, on peut montrer que :
−→
~ = ρ div U
~ +U
~ ·−
div ρ U
grad ρ
L’étudiant est encouragé à démontrer cette formule. Par suite, l’équation (3.23) se met sous la
forme :
∂ρ ~ −−→
~ =0
+ U · grad ρ + ρ div U
∂t
54
CHAPITRE 3. CINÉMATIQUE DES FLUIDES
soit, en introduisant la dérivée particulaire de la fonction ρ :
Dρ
~ =0
+ ρ div U
Dt
Cas particuliers
• Écoulement dans lequel la masse volumique ρ(~x, t) exprimée en variables d’Euler ne dépend
pas explicitement de t (ρ = ρ(~x)) : d’après (3.23) la conservation de la masse se réduit à :
~ =0
div ρ U
• Fluide incompressible (ρ = constante) : la conservation de la masse se réduit à :
~ =0
div U
Remarque sur la terminologie « incompressible »
Nous avons introduit (paragraphe 3.2.3) la définition d’écoulement isovolume ou incompressible. Ici, nous venons de montrer que l’écoulement d’un fluide incompressible (au sens de ρ
~ = 0. On a donc par définition :
constant) est tel que sa vitesse vérifie la propriété div U
• Fluide incompressible : la masse volumique ρ est constante
~ =0
• Écoulement isovolume ou Écoulement incompressible : on a div U
On a :
~ = 0 c’est-à-dire implique Écoulement isovolume ou
• Fluide incompressible implique div U
Écoulement incompressible
• Attention, la réciproque est fausse : il existe des écoulements isovolumes (ou incompressibles) de fluides compressibles.
Remarque importante
Dans certains ouvrages, la distinction entre « écoulements isovolumes » et « fluides incompressibles » n’est pas toujours très claire. Dans ce cours, afin d’utiliser la terminologie « incompressible » souvent employée dans les ouvrages de Mécanique et de Physique, nous rappelons
que :
Fluide incompressible signifie fluide ayant une masse volumique ρ constante,
~ = 0.
Écoulement incompressible signifie écoulement vérifiant div U
3.3.3
Débit massique, débit volumique
Soit S un morceau de surface au repos, et notons ~n un vecteur unitaire normal à S (Fig.
3.6-a).
Le débit massique Qm , à travers la surface S orientée par le vecteur ~n, est la quantité :
ZZ
~ · ~n dS
Qm =
ρU
(3.24)
S
La quantité Qm est la quantité de fluide qui traverse la surface S, par unité de temps, dans la
direction ~n. Ceci est illustré sur la figure 3.6-a, où le petit volume indiqué correspond au volume
~ · ~n dS. On peut dire aussi que Qm est le flux du vecteur ρ U
~ à travers S orientée par le vecteur
U
~n.
Le débit volumique Qv , à travers la surface S orientée par le vecteur ~n, est la quantité :
ZZ
~ · ~n dS
Qv =
U
(3.25)
S
3.4. QUELQUES CLASSES D’ÉCOULEMENTS
55
~n
~n
~
U
S
~ −W
~
U
S
(a) La surface S est au repos.
~.
(b) La surface S à la vitesse W
~n
D
S
(c) La surface S fermée et est au repos.
Fig. 3.6 – Débit massique à travers une surface S
La quantité Qv correspond à un volume de fluide qui traverse la surface S, par unité de
~ à travers S
temps, dans la direction ~n. On peut dire aussi que Qv est le flux du vecteur U
orientée par le vecteur ~n.
Si ρ est constant, alors :
Qm = ρ Qv
~ . Les déSoit S un morceau de surface en mouvement, et se déplaçant avec la vitesse W
finitions de Qm et Qv sont légèrement modifiées pour tenir compte du mouvement de S (Fig.
3.6-b) :
ZZ
ZZ
~
~
~ −W
~ · ~n dS
Qm =
ρ U − W · ~n dS,
Qv =
U
S
S
Cas particulier
Supposons que la masse volumique exprimée en variables d’Euler ne dépende pas explicitement de t (ρ = ρ(~x)), et que la surface S soit au repos et fermée (Fig. 3.6-c). Avec le vecteur
~n dirigé vers l’extérieur de S, le flux de matière sortant de S est nul. En effet :
ZZ
ZZZ
~ · ~n dS =
~ dV = 0
Qm =
ρU
div ρ U
S
D
où D désigne le volume intérieur à S, et où ont été utilisés, d’une part le théorème de la divergence
(voir Annexe A), et d’autre part la loi de conservation de la masse sous forme locale (3.23).
3.4
3.4.1
Quelques classes d’écoulements
Écoulements plans
Dans l’espace rapporté au repère orthonormé direct (O; x, y, z), l’écoulement considéré est
~ exprimé en variables
dit écoulement plan parallèle au plan (O; x, y) si le vecteur vitesse U
d’Euler est tel que :
u = u(x, y, t) , v = v(x, y, t) , w = 0
En tout point d’une même droite parallèle à l’axe (O, z), passant par le point de coordonnées
~ (Fig. 3.7-a). Ceci signifie que dans tous les plans
(x, y, z = 0), on a le même vecteur vitesse U
z = cste, on a le même écoulement.
56
CHAPITRE 3. CINÉMATIQUE DES FLUIDES
(a)
(b)
z
~
U
y
~
U
y
O
~
U
y
x
x
O
x
(x, y, 0)
z
(c)
(d)
L
y
+
~ν
~τ
S
~n
C
O
x
y
C
~ν
O
x
Fig. 3.7 – Écoulement plan
Pour un tel écoulement plan, on fera une représention dans le plan (O; x, y) (Fig. 3.7-b). En
particulier, on ne fait plus intervenir la composante w. D’après (3.8), (3.9), (3.11) et (3.12) on
a:
• Lignes de courant à l’instant t1
dx
dy
=
u(x, y, t1 )
v(x, y, t1 )
• Trajectoires
dx
dy
=
= dt
u(x, y, t)
v(x, y, t)
• Cas d’un écoulement stationnaire
dx
dy
=
: équations des lignes de courant
u(x, y)
v(x, y)
dy
dx
=
= dt : équations des trajectoires
u(x, y)
v(x, y)
Dans le cas d’un écoulement plan, on étudie le débit au travers d’une surface S cylindrique
de génératrice parallèle à (O, z), de trace C dans le plan (O; x, y) et limitée par les deux plans
z = 0 et z = L. Le vecteur ~n unitaire et normal à S le long d’une génératrice est constant et
égal au vecteur ~ν unitaire et normal à C dans le plan (O; x, y) (Fig. 3.7-c). Il est facile de voir
que les flux au travers de la surface S orientée par ~n s’expriment de la façon suivante :
ZZ
Z
~
~ · ~ν ds
Qm =
ρ U · ~n dS = L
ρU
ZZ S
ZC
~ · ~n dS = L
~ · ~ν ds
Qv =
ρU
U
S
C
où s est l’abscisse curviligne le long de C. Le calcul des flux au travers de S se ramènent donc à
des calculs d’intégrales curvilignes (voir Annexe A).
Considérons une courbe C dans le plan orienté (O; x, y) (Fig. 3.7-d). L’abscisse curviligne
le long de C est s, si bien C a pour équations paramétriques : x = x(s), y = y(s). On oriente
3.4. QUELQUES CLASSES D’ÉCOULEMENTS
57
C dans le sens des s croissants. Le vecteur unitaire tangent à C, orienté aussi dans le sens des
s croissants, est ~τ et il a pour composantes : (dx/ds, dy/ds). Introduisons le vecteur ~ν tel que
l’angle (~ν , ~τ ) soit égal à +π/2, alors ~ν = (dy/ds, −dx/ds). Il vient :
Z
Z
Z
dx
dy
~ · ~ν ds = L
ρ u
ρU
ρ (u dy − v dx)
Qm = L
ds = L
−v
(3.26)
ds
ds
C
C
C
Z
Qv = L (u dy − v dx)
(3.27)
C
3.4.2
Classes d’écoulements dans l’espace et dans le plan
~ =
Dans tout ce paragraphe, l’écoulement est donné par sa description d’Euler : U
~
U (~x, t). On a déjà vu la définition des écoulements stationnaires (voir paragraphe 3.1.8) et des
écoulements incompressibles (voir paragraphes 3.2.3 et 3.3.2). Ici, on introduit deux nouvelles
définitions : les écoulements potentiels et les écoulements irrotationnels.
Écoulement potentiel
~ vérifie
Un écoulement dans lequel il existe une fonction φ(~x, t) tel que le vecteur vitesse U
−
−
→
~ = grad φ est appelé écoulement potentiel. La fonction φ(~x, t) est le potentiel des vitesses. La
U
définition vaut aussi bien pour les écoulements dans l’espace que dans le plan.
−→
~ =−
U
grad φ
(3.28)
Soit une courbe C orientée. L’abscisse curviligne est s et le vecteur unitaire tangent orienté
dans le sens des s croissants est ~τ . Soient deux points A1 et A2 sur C. Cherchons à calculer la
~ le long de C entre A1 et A2 . D’après l’Annexe A, elle vaut :
circulation du vecteur U
Z A2
Z A2 Z A2
dx
dy
dz
~
U · ~τ ds =
u
+v
+w
ds =
(u dx + v dy + w dz)
ds
ds
ds
A1
A1
A1
Z A2
=
dφ = φ(A2 ) − φ(A1 )
A1
Écoulement irrotationnel
~ = ~0 est appelé écoulement irrotationnel.
Un écoulement dans lequel rot U
~ = ~0
rot U
(3.29)
Naturellement, un écoulement qui n’est pas irrotationnel est dit rotationnel.
Quelques remarques
• Un écoulement potentiel est un écoulement irrotationnel. En effet, on a :
−−→
∂φ ∂φ ∂φ
~
U = grad φ =
,
,
∂x ∂y ∂z
∂ ∂φ
∂ ∂φ
∂ ∂φ
∂ ∂φ
∂ ∂φ
∂ ∂φ
~
−
,
−
,
−
= ~0
rot U =
∂y ∂z
∂z ∂y
∂z ∂x
∂x ∂z
∂x ∂y
∂y ∂x
• Un écoulement plan est irrotationnel si et seulement si :
∂v
∂u
~
rot U =
−
~ez = ~0
∂x ∂z
58
CHAPITRE 3. CINÉMATIQUE DES FLUIDES
3.4.3
Écoulements plans stationnaires et incompressibles
Compte-tenu des définitions introduites précédemment, le champ de vitesse de l’écoulement
est de la forme :
~ = u(x, y) ~ex + v(x, y) ~ey
U
et vérifie, en outre, la propriété :
~ = 0 ⇐⇒
div U
∂u ∂v
+
=0
∂x ∂y
Conséquence
Il existe une fonction ψ(x, y) appelée fonction de courant telle que :
dψ = u dy − v dx
∂ψ
∂ψ
,
v=−
u=
∂y
∂x
(3.30)
Démonstration
Posons :
Z
y
Z
x
u(x, η) dη −
ψ=
y0
v(ξ, y0 ) dξ
x0
En dérivant les intégrants, les intégrales par rapport à leurs bornes et en utilisant la propriété
d’incompressibilité, on vérifie, que :
∂ψ
(x, y) = u(x, y)
∂y
Z y
Z y
∂ψ
∂u
∂v
(x, y) =
(x, η) dη − v(x, y0 ) = −
(x, η) dη − v(x, y0 )
∂x
y0 ∂x
y0 ∂η
= −v(x, y) + v(x, y0 ) − v(x, y0 ) = v(x, y)
La fonction ψ(x, y) introduite vérifie bien les deux relations (3.30).
Les lignes de courant sont les lignes telles que (voir paragraphe 3.4.1) :
dx
dy
=
⇐⇒ u dy − v dx = 0 ⇐⇒ dψ = 0
u
v
c’est-à-dire ψ = cste. Ceci justifie la terminologie « fonction de courant » pour la fonction ψ.
Remarques
• Soient deux lignes de courant d’équations ψ1 = cste et ψ2 = cste (Fig. 3.8-a). Soit C une
ligne allant de l’une à l’autre et joignant les deux points A1 et A2 . D’après (3.27), le débit
volumique à travers C est :
Z
Z
Qv = L (u dy − v dx) = L
dψ = ψ(A2 ) − ψ(A1 ) = ψ2 − ψ1
C
C
• L’équation ∂u/∂x + ∂v/∂y = 0 exprime que la différentielle u dy − v dx est une forme
différentielle exacte et que, par suite, il existe une fonction ψ, telle que dψ = u dy − v dx.
Ceci est démontré dans les cours de mathématiques de Licence.
3.4. QUELQUES CLASSES D’ÉCOULEMENTS
(a)
y
ψ2 = cste
~τ
A2
C
O
59
ψ1 = cste
~ν
A1
x
−−→
grad ψ
(b)
Ligne de courant
y
−−→
grad φ
Ligne équipotentielle
O
x
Fig. 3.8 – Lignes de courant et lignes équipotentielles
3.4.4
Écoulements plans stationnaires et irrotationnels
Compte-tenu des définitions introduites précédemment, le champ de vitesse de l’écoulement
est de la forme :
~ = u(x, y) ~ex + v(x, y) ~ey
U
et vérifie, en outre, la propriété :
~ = ~0 ⇐⇒
rot U
∂v
∂u
−
=0
∂x ∂y
Conséquence
Il existe un potentiel des vitesses que l’on note, comme précèdemment φ(x, y) et qui est tel
que :
∂φ
∂φ
,
v=
(3.31)
u=
∂x
∂y
dφ = u dx + v dy
Démonstration
La démonstration est semblable à celle faite pour la fonction de courant. Posons :
Z y
Z x
φ=
v(x, η) dη +
u(ξ, y0 ) dξ
y0
x0
En dérivant les intégrants, les intégrales par rapport à leur bornes et en utilisant la propriété du
rotationnel nul, on vérifie, que :
∂φ
(x, y) = v(x, y)
∂y
Z y
Z y
∂φ
∂v
∂u
(x, y) =
(x, η) dη + u(x, y0 ) =
(x, η) dη + u(x, y0 )
∂x
∂x
y0
y0 ∂η
= u(x, y) − u(x, y0 ) + u(x, y0 ) = u(x, y)
La fonction φ(x, y) introduite vérifie bien les deux relations (3.31).
60
3.4.5
CHAPITRE 3. CINÉMATIQUE DES FLUIDES
Écoulements plans stationnaires, incompressibles et irrotationnels
Compte-tenu des définitions introduites dans les deux paragraphes qui précèdent, le champ
de vitesse de l’écoulement est de la forme :
~ = u(x, y) ~ex + v(x, y) ~ey
U
avec :
~ = 0 ⇐⇒
div U
∂u ∂v
+
=0
∂x ∂y
~ = ~0 ⇐⇒
rot U
∂u
∂v
−
=0
∂x ∂y
D’après ce qui précède, il existe un potentiel des vitesses φ(x, y) et une fonction de courant
ψ(x, y) :
∂φ
∂φ
= u,
=v
∂x
∂y
∂ψ
= −v,
∂x
∂ψ
=u
∂y
On en déduit, par un calcul très simple, que :
∆φ ≡
∂2φ ∂2φ
+ 2 = 0,
∂x2
∂y
∆ψ ≡
∂2ψ ∂2ψ
+
=0
∂x2
∂y 2
Le Laplacien ∆ des fonctions φ(x, y) et ψ(x, y) est nul : on dit ces fonctions sont des fonctions
harmoniques. Comme de plus, elles sont associées au même écoulement, on dit que φ(x, y) et
ψ(x, y) sont des fonctions harmoniques conjuguées.
Les lignes φ = cste sont les lignes équipotentielles, et les lignes ψ = cste sont les lignes
−−→
de courant. Les lignes équipotentielles sont orthogonales aux lignes de courant. En effet grad φ
−−→
est orthogonal à la ligne équipotentielle, tandis que grad ψ est orthogonal à la ligne de courant : ces deux vecteurs sont bien orthogonaux, car ils ont respectivement (u, v) et (−v, u) pour
composantes (Fig. 3.8-b)
3.5
Exemples d’écoulements plans stationnaires
On présente dans ce paragraphe quelques exemples d’écoulements plans, stationnaires, et
très simples. Tous sont décrits avec la description d’Euler. Le repère (O; x, y) dans le plan est
orthonormé, et les vecteurs unitaires des axes sont ~ex et ~ey . Les composantes du vecteur vitesse
~ sont u(x, y) et v(x, y).
U
3.5.1
Écoulement plan rectiligne uniforme
~ = U0 ~ex avec U0 constant. Il est facile de
Soit l’écoulement dont le champ de vitesse est U
vérifier qu’il existe un potentiel des vitesses φ et une fonction de courant ψ. En effet :
−→
~ =−
U
grad (U0 x),
u dy − v dx = d(U0 y)
Le potentiel des vitesses est φ = U0 x et la fonction de courant est ψ = U0 y. Les lignes φ = cste,
ou x = cste, sont les lignes équipotentielles, et les lignes ψ = cste, ou y = cste, sont les
lignes de courant. Ces deux réseaux de courbes se coupent à angle droit : on dit qu’ils sont
orthogonaux (Fig. 3.9-a).
3.5. EXEMPLES D’ÉCOULEMENTS PLANS STATIONNAIRES
(a)
φ = cste
y
~ = (U0 , 0)
U
61
Écoulement
uniforme
ψ = cste
O
x
(b)
Source
ou puits
~er
φ = cste
θ
ψ = cste
O
Fig. 3.9 – Exemples d’écoulements plans
3.5.2
Écoulement plan source ou puits
On introduit les coordonnées polaires (r, θ) (Fig. 3.9-b), et le vecteur unitaire ~er d’angle
~ = (h/r) U0 ~er avec U0 et h constants.
polaire θ. Soit l’écoulement dont le champ de vitesse est U
Remarquons qu’en un point de l’écoulement près de O la vitesse a un très grand module, et que
loin du point O elle a un petit module.
Entre les coordonnées
cartésiennes et les coordonnées polaires on a, x = r cos(θ), y = r sin(θ)
p
2
d’une part, et r = x + y 2 , tan(θ) = y/x, d’autre part.
En coordonnées cartésiennes, les composantes du vecteur vitesse sont :
x
y
~ = U0 h
U
,
x2 + y 2 x2 + y 2
Il est facile de vérifier que (l’étudiant est invité à faire les calculs) :
−→ p
~ = U0 h −
U
grad ln x2 + y 2
x dy − y dx
y
=
U
h
d
arctan
0
x2 + y 2
x
p
√
Le potentiel des vitesses est φ = U0 h ln x2 + y 2 = U0 h ln r : les lignes φ = cste sont les lignes
r = cste, et sont donc des cercles de centre O. La fonction de courant est ψ = U0 h arctan(y/x) :
les lignes ψ = cste, sont les lignes θ = cste, et sont donc des demi-droites issues de O. Les lignes
équipotentielles sont donc des cercles et les lignes de courant sont des demi-droites. Ces
deux réseaux de courbes se coupent à angle droit et sont orthogonaux (Fig. 3.9-b).
Soit C un cercle centré en O de rayon a. Le débit volumique à travers C dans la direction ~er
est (voir (3.27)) :
Z
Z 2π
Z 2π
Z
1
1
~
ds = h U0
a dθ = h U0
dθ
Qv = U · ~er ds = h U0
a
C
0
0
C a
Qv = 2 π h U0
u dy − v dx = U0 h
Le débit est constant : il est indépendant du rayon a. Si U0 h > 0, on dira que O est une source.
Si U0 h < 0, on dira que O est un puits.
62
CHAPITRE 3. CINÉMATIQUE DES FLUIDES
Si a est petit le module de la vitesse est grand, et si a est grand le module de la vitesse
est petit, mais le produit de a par le module de la vitesse est constant (ce qui correspond à Qv
constant).
Il est à remarquer que la vitesse n’est pas définie au point O. En particulier, on ne peut pas
appliquer la formule de Green–Riemann (voir (A.13) dans l’Annexe) sur un domaine contenant
le point O.
Il est à remarquer aussi, que les calculs peuvent être faits en coordonnées polaires en utilisant
−−→
un formulaire pour les expressions de grad, de rot, . . .
3.5.3
Écoulement plan autour d’un cylindre
On introduit les coordonnées polaires (r, θ) (Fig. 3.10), et les deux vecteurs unitaires ~er et
~ = ur ~er + uθ ~eθ
~eθ d’angles polaire θ et θ + π/2. Soit l’écoulement dont le champ de vitesse est U
avec :
a2
a2
ur = U0 1 − 2 cos(θ),
uθ = −U0 1 + 2 sin(θ)
r
r
où U0 et a sont deux constantes positives. Remarquons qu’en tout point du cercle de rayon a,
~ est tangent au cercle : en effet ur = 0. Sachant que ~er = cos(θ) ~ex + sin(θ) ~ey et
le vecteur U
~eθ = − sin(θ) ~ex + cos(θ) ~ey , et aussi ~ex = cos(θ) ~er − sin(θ) ~eθ et ~ey = − sin(θ) ~er + cos(θ) ~eθ , on
~ sont (l’étudiant est invité à faire le
peut écrire que les composantes cartésiennes du vecteur U
calcul) :
a2 (y 2 − x2 ) −2 a2 x y
~
U = U0 1 +
,
(x2 + y 2 )2 (x2 + y 2 )2
Cherchons s’il existe un potentiel des vitesses φ. On doit avoir :
∂φ
∂φ
a2 (y 2 − x2 )
−2 a2 x y
= U0 1 +
,
= U0
∂x
(x2 + y 2 )2
∂y
(x2 + y 2 )2
On intègre en y la seconde équation :
φ = U0
a2 x
+ F (x)
x2 + y 2
où F (x) est une fonction arbitraire de x. Dérivons maintenant cette expression trouvée pour φ
par rapport à x et identifions l’expression obtenue à celle déjà écrite pour ∂φ/∂x. Il vient :
a2
−2 a2 x2
a2 (x2 − y 2 )
0
U0
+
+ F (x) ≡ U0 1 +
x2 + y 2 (x2 + y 2 )2
(y 2 + x2 )2
On trouve F 0 (x) = 1, donc F (x) = x + cste. Ainsi le potentiel des vitesses existe et vaut :
2
a x
φ = U0
+x
x2 + y 2
Il est défini à une constante additive près.
Cherchons de même s’il existe une fonction de courant ψ. On doit avoir : dψ = u dy − v dx,
d’où :
∂ψ
a2 (y 2 − x2 )
∂ψ
2 a2 x y
= U0 1 +
,
= U0
∂y
(x2 + y 2 )2
∂x
(x2 + y 2 )2
On intègre en x la seconde équation :
ψ = U0
−a2 y
+ G(y)
x2 + y 2
3.5. EXEMPLES D’ÉCOULEMENTS PLANS STATIONNAIRES
~eθ
63
ψ = cste
y
A0
~er
x
A
θ
O
x
Point d’arrêt
Y
ψ = cste
A0
A
x0
X
Fig. 3.10 – Écoulement autour d’un cylindre
où G(y) est une fonction arbitraire de y. Dérivons maintenant cette expression trouvée pour ψ
par rapport à y et identifions l’expression obtenue à celle déjà écrite pour ∂ψ/∂y. Il vient :
U0
−a2
2 a2 y 2
a2 (y 2 − x2 )
0
+
+ G (y) ≡ U0 1 +
x2 + y 2 (x2 + y 2 )2
(x2 + y 2 )2
On trouve G0 (y) = 1, donc G(y) = y + cste. Ainsi la fonction de courant existe et vaut :
ψ = U0
−a2 y
+y
x2 + y 2
Elle est définie à une constante additive près.
Les lignes ψ = cste sont les équations des lignes de courant. La ligne particulière ψ = 0
correspond au cercle de rayon a et aux demi-droites x0 A0 et Ax (Fig. 3.10) si on se limite à
l’écoulement autour du cylindre. Sur cette même figure, on a tracé quelques lignes ψ = cste.
Point d’arrêt
On appelle « point d’arrêt » un point en lequel la vitesse de l’écoulement est nulle. Il est
facile de vérifier que les deux points A et A0 de coordonnées (x = a, y = 0) et (x = −a, y = 0)
sont des points d’arrêt. Plaçons-nous au voisinage de A et posons x = a + X, y = Y avec X/a
et Y /a très petits. La fonction de courant s’écrit :
ψ = U0 Y
−a2
2 a X + X2 + Y 2
+
1
=
U
Y
0
(a + X)2 + Y 2
a2 + 2 a X + X 2 + Y 2
soit, comme X/a et Y /a sont très petits :
ψ ≈ U0 Y
2aX
U0
=
XY
2
a
a
Au voisinage de A, les lignes de courant ont pour équations X Y = cste : ce sont des hyperboles
équilatères (Fig. 3.10). Naturellement une étude analogue peut être faite au voisinage de A0 .
64
CHAPITRE 3. CINÉMATIQUE DES FLUIDES
Remarque sur les écoulements réels autour d’un cylindre
La description de l’écoulement autour d’un cylindre que nous venons de présenter correspond
à celle d’un fluide n’ayant aucun frottement sur le cylindre, ni dans son intérieur, fluide qui est
dit « parfait » (nous en verrons la définition dans le chapitre 4). Dans la réalité, l’écoulement
autour d’un cylindre est plus complexe. Il y a des forces de frottement visqueux, qui peuvent
être très importantes quand la vitesse de l’écoulement est grande. L’importance de ces forces
visqueuses est « mesurée » avec un nombre appelé nombre de Reynolds, et noté Re . Nous
introduirons ce nombre dans le chapitre d’introduction sur les fluides visqueux (chapitre 5). Sur
les figures 3.11 à 3.15 (extraites du livre « An Album of Fluid Motion », Van Dyke, 1982) placées
à la fin de ce chapitre, nous montrons quelques exemples d’écoulements autour d’un cylindre.
L’étudiant peut observer lui même quelques uns de ces écoulements, par exemple derrière la pile
d’un pont, derrière un batonnet se déplaçant dans récipent rempli d’huile, . . .
En particulier, il apparaı̂t des « tourbillons » derrière le cylindre. Quand la vitesse augmente
(figures 3.11 à 3.14), ceux-ci sont de plus en plus importants, et peuvent se détacher pour former
des « allées de von Karman » (Fig. 3.15). Pour des vitesses encore plus grandes, la structure
relativement organisée de l’écoulement disparaı̂t et l’écoulement devient turbulent. Dans les
cours avancés de Mécanique des Fluides, tous ces aspects, dont certains sont l’objet de recherches
actuelles, sont présentés.
Fig. 3.11 – Visualisation d’écoulements réels autour d’un cylindre (Taneda, 1956)
Fig. 3.12 – Visualisation d’écoulements réels autour d’un cylindre (Taneda, 1956)
3.5. EXEMPLES D’ÉCOULEMENTS PLANS STATIONNAIRES
Fig. 3.13 – Visualisation d’écoulements réels autour d’un cylindre (ONERA, Werlé, 1972)
Fig. 3.14 – Visualisation d’écoulements réels autour d’un cylindre (Corke and Nagib)
Fig. 3.15 – Tourbillons alternés de Bénard-Karman (ONERA, Werlé, 1974)
65
66
CHAPITRE 3. CINÉMATIQUE DES FLUIDES
3.6
Exercices avec corrections
3.6.1
Exercice I
On considère l’écoulement défini en variables de Lagrange par :
y = b + β t2 ,
x = a + α t,
z = c + γ t3 + c α t
(I.1)
~ de cet écoulement en variables d’Euler.
Donner la vitesse U
Corrigé
On vérifie qu’en t = 0 on a : x = a, y = b, z = c : les variables (a, b, c, t) sont les variables de
Lagrange. Calculons la vitesse en variables de Lagrange :
u = α,
w = 3 γ t2 + c α
v = 2 β t,
(I.2)
À partir des expressions (I.1), on exprime (a, b, c) en fonction de (x, y, z) :
a = x − α t,
b = y − β t2 ,
c=
z − γ t3
1 + αt
(I.3)
On porte ces expressions (I.3) dans (I.2) et on trouve les expressions de (u, v, w) en variables
d’Euler, celles-ci étant (x, y, z, t) :
u = α,
3.6.2
v = 2 β t,
w = 3 γ t2 +
α (z − γ t3 )
1 + αt
(I.4)
Exercice II
On considère l’écoulement défini en variables d’Euler par :
u = ω x,
v = ω y,
w = −ω x + α t
(II.1)
où ω est non nul.
1. Cet écoulement est-il stationnaire, incompressible ?
2. Déterminer les trajectoires.
3. Déterminer les lignes de courant à l’instant t1 .
Corrigé
1. Si α 6= 0, l’écoulement n’est pas stationnaire, car t figure dans w. Mais si α = 0,
l’écoulement est stationnaire.
~ : div U
~ = ∂u/∂x + ∂v/∂y + ∂w/∂z = 2 ω. Donc l’écoulement n’est pas
On calcule div U
~
incompressible car div U est non nul.
2. Les équations différentielles des trajectoires sont les suivantes :
dx
dy
dz
=
=
= dt
ωx
ωy
−ω x + α t
(II.2)
On obtient :
x = x0 exp(ω t),
y = y0 exp(ω t)
(II.3)
3.6. EXERCICES AVEC CORRECTIONS
67
si x = x0 et y = y0 en t = 0. Pour z, on écrit :
dz = (−ω x0 exp(ω t) + α t) dt
⇒
z = −x0 exp(ω t) + α
t2
+K
2
Si z = z0 en t = 0, alors K = x0 + z0 . Donc on a :
z = x0 (1 − exp(ω t)) + α
t2
+ z0
2
(II.4)
Les trois résultats donnés dans (II.3) et (II.4) définissent les trajectoires, lesquelles sont
définies paramétriquement en fonction du temps t.
3. Soit t1 fixé. Les équations définissant les lignes de courant sont les suivantes :
dx
dy
dz
=
=
ωx
ωy
−ω x + α t1
(II.5)
dx
dy
=
x
y
(II.6)
On obtient sucessivement :
dz
dx
=
ωx
−ω x + α t1
⇒
y = K1 x
⇒ dz =
α t1
−1 +
ωx
dx
Cette équation différentielle est à variables séparées, d’où :
z = −x +
α t1
ln |x| + K2
ωx
(II.7)
Chaque équation (II.6) et (II.7) définit une surface dans l’espace à trois dimensions. La
ligne de courant définie par (II.6) et (II.7) est l’intersection de ces deux surfaces.
3.6.3
Exercice III
On considère l’écoulement défini en variables d’Euler par :
u = ω 2 y t,
v = ω 2 x t,
w = ωz
(III.1)
où ω est non nul.
1. Cet écoulement est-il stationnaire, incompressible, irrotationnel ?
2. Existe-il un potentiel des vitesses φ ? Si oui, le déterminer.
Corrigé
1. L’écoulement n’est pas stationnaire, car t figure dans u et v.
~ : div U
~ = ∂u/∂x + ∂v/∂y + ∂w/∂z = ω. Donc l’écoulement n’est pas
On calcule div U
~
incompressible car div U est non nul.
~ :
On calcule rot U
∂u ∂w
∂v
∂u
∂w ∂v
~
−
~ex +
−
~ey +
−
~ez = ~0
rot U =
∂y
∂z
∂z
∂x
∂x ∂y
L’écoulement est irrotationnel.
68
CHAPITRE 3. CINÉMATIQUE DES FLUIDES
2. On cherche s’il existe une fonction φ = φ(x, y, z, t) telle que :
∂φ
= ω 2 y t,
∂x
∂φ
= ω 2 x t,
∂y
∂φ
= ωz
∂z
On peut vérifier que φ = ω 2 x y t + ω z 2 /2 + h(t) avec h(t) fonction arbitraire de t est le
potentiel cherché.
On peut aussi construire la fonction φ de la manière suivante. On intègre la première
équation en x d’où : φ = ω 2 x y t + F (y, z, t) avec F (y, z, t) fonction arbitraire de y, z, t.
On dérive ce résultat par rapport à y et on l’identifie avec la seconde équation : ω 2 x t +
(∂/∂y)F (y, z, t) = ω 2 x t, d’où l’on déduit que F (y, z, t) ne dépend pas de y. On pose
F (y, z, t) = G(z, t), on dérive φ par rapport à z et on identifie le résultat avec la troisième
équation : (∂/∂z)G(z, t) = ω z. On obtient ainsi : G(z, t) = ω z 2 /2 + h(t) avec h(t) fonction
arbitraire de t.
3.6.4
Exercice IV
On considère l’écoulement plan défini en variables d’Euler par :
v = −ω x
u = ω y, v
(IV.1)
où ω est non nul.
1. Cet écoulement est-il plan, stationnaire, incompressible, irrotationnel ?
2. Existe-il une fonction de courant ψ ? Si oui la déterminer et construire les lignes de courant.
3. Existe-il un potentiel des vitesses φ ? Si oui le déterminer et construire les lignes équipotentielles
y
ψ = cste
O
x
Fig. 3.16 – Exercice IV : Exemple d’écoulement stationnaire, incompressible et irrotationnel
Corrigé
1. L’écoulement est plan (voir la définition dans le paragraphe 3.4.1). Il est stationnaire, car
~ = ∂u/∂x + ∂v/∂y = 0.
t ne figure pas dans u ni dans v. Il est incompressible car div U
Enfin il n’est pas irrotationnel car :
∂v
∂u
~
rot U =
−
~ez = −2 ω ~ez 6= ~0
∂x ∂x
3.6. EXERCICES AVEC CORRECTIONS
69
2. D’après le cours (paragraphe 3.4.3), il existe une fonction de courant ψ telle que : dψ =
u dy − v dx.
∂ψ
∂ψ
= −v = ω x,
= u = ωy
∂x
∂y
On intègre la première équation en x d’où : ψ = ω x2 /2+F (y) avec F (y) fonction arbitraire
de y. On dérive ce résultat par rapport à y et on l’identifie avec la seconde équation :
F 0 (y) = ω y, d’où F (y) = ω y 2 /2 + K1 , avec K1 constante arbitraire. La fonction de
courant est donc telle que :
ω
ψ = (x2 + y 2 ) + K1
(IV.2)
2
Les lignes de courant sont les courbes d’équations : ψ = cste, soit : (x2 + y 2 ) = cste. Ce
sont des cercles. Sur chaque cercle, on peut indiquer le sens du courant (sens du vecteur
vitesse). Sur la figure 3.16, nous avons reporté ce sens dans le cas ω > 0.
3. D’après le cours (paragraphe 3.4.4), il existe un potentiel des vitesses φ telle que : dφ =
u dx + v dy.
∂φ
∂φ
= u = ω y,
= v = −ω x
∂x
∂y
On intègre la première équation en x d’où : ψ = ω x y + G(y) avec G(y) fonction arbitraire
de y. On dérive ce résultat par rapport à y et on l’identifie avec la seconde équation :
ω x + G0 (y) = ω x, d’où G0 (y) = 0 et G(y) = K2 , avec K2 constante arbitraire. Le potentiel
des vitesses est donc tel que :
φ = ω x y + K2
(IV.3)
Les lignes équipotentielles sont les courbes d’équations : φ = cste, soit : x y = cste. Ce
sont des hyperboles équilatères. On peut vérifier que les lignes équipotentielles coupent
orthogonalement les lignes de courant (voir le paragraphe 3.4.5).
70
CHAPITRE 3. CINÉMATIQUE DES FLUIDES