LES REGISTRES
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LES REGISTRES
LES REGISTRES variété des procédés comiques permet de distinguer diverses tonalités. Les registres désignent les différentes manières de s'exprimer qui traduisent différentes façons de percevoir et de faire percevoir le réel. Chaque registre correspond à une «manière de sentir» du locuteur (ou de l'auteur), et à un certain type d'émotion qu'il cherche à susciter chez son interlocuteur (ou son lecteur) : admiration, pitié, rire, etc. LE BURLESQUE Le burlesque traite dans un style bas de sujets graves et sérieux. • Procédés burlesques : la caricature (peinture ou description qui accentue certains détails, ou révèle les aspects ridicules d'un personnage), la parodie (imitation plaisante d'un modèle à des fins moqueuses ou simplement comiques ). 1. l'épique Issu du genre de l'épopée (long poème narratif, comme l'Iliade d'Homère), il attribue à des personnages ou à des événements une grandeur exceptionnelle. Les héros, qui incarnent les valeurs d'une collectivité, dépassent l'humanité ordinaire. • Émotions suscitées : admiration, effroi, étonnement devant la grandeur des héros et le caractère exceptionnel des faits accomplis. • Procédés épiques : figures d'insistance (répétitions, accumulations, hyperboles`), moyens lexicaux (superlatifs, adverbes d'intensité, lexique du merveilleux) et syntaxiques (amples périodes"). J'eus un rêve : le mur des siècles m'apparut. [...] Cela montait dans l'ombre ; on eût dit une armée Pétrifiée avec le chef qui la conduit Au moment qu'elle osait escalader la Nuit; C'était une muraille et c'était une foule. (Hugo) 2. Le lyrique Issu du genre poétique de l'ode, il correspond à l'exaltation des émotions et des sentiments personnels du moi - amour, nostalgie, sentiment religieux, etc. Lorsque prédominent la tristesse et le regret, on parle de registre élégiaque. • Émotions suscitées : sensations et sentiments du locuteur à partager (joie ou tristesse, communion heureuse avec la nature ou affliction devant la fuite du temps) ; réactions de la sensibilité. • Procédés lyriques : marques de subjectivité (énonciation à la première personne) et d'expressivité (phrases exclamatives et interrogatives), moyens lexicaux (adverbes d'Intensité, métaphores et comparaisons développées, lexique de l'affectivité), moyens rythmiques et mélodiques (allitérations`, assonances`). Que de plaisirs trop tard connus je goûte depuis trois semaines l La douce chose de couler ses jours dans le sein d'une tranquille amitié, à l'abri de l'orage des passions impétueuses ! (Rousseau) 3. Le tragique et le pathétique LE TRAGIQUE insiste sur l'expression de la fatalité et des déterminismes contre lesquels l'homme lutte en vain. II est présent dans le genre de la tragédie depuis l'Antiquité jusqu'au théâtre classique, représente la lutte d'un homme contre un dieu, une passion ou un devoir qui l'écrasent. • Émotions suscitées : la crainte et la pitié, selon l'objectif de la tragédie décrit par Aristote (ive siècle av. J.-C. ; mais aussi, plus généralement, l'angoisse et le désespoir. • Procédés tragiques : insistance sur la souffrance ou la mort liée au destin ou à la fatalité ; emploi possible de figures d'insistance, exclamations, interjections, hyperboles. PHEDRE Les moments me sont chers, écoutez-moi, Thésée. C'est moi qui sur ce fils chaste et respectueux Osai jeter un oeil profane, incestueux. Le ciel mit dans mon sein une flamme funeste.(RACINE) LE PATHÉTIQUE Le pathétique met aussi l'accent sur l'expression de la souffrance (pathétique vient de pathos : « épreuve ", « souffrance subie »), mais sans la relier au poids d'une fatalité. • Émotion suscitée : la compassion, la pitié • Procédés pathétiques : lexique de la souffrance, métaphores et comparaisons à visée émotionnelle. 4. Le comique Ce mot, qui vient de comédie (genre théâtral né dans l'Antiquité), s'applique à toutes les formes d'expression qui visent à provoquer le rire ou le sourire. • Émotions suscitées : le rire, sous tous ses aspects (léger, gai, libérateur, moqueur). • Procédés comiques : décalage entre la situation attendue et celle qui est donnée à lire ; aspect mécanique des situations ou personnages ; écart entre un sens apparent sérieux et un sens implicite qui tourne le sérieux en ridicule ; jeux de mots, figures d'exagération (hyperboles) ou d'atténuation (litotes, périphrases). La L’HUMOUR L'humour se définit par une mise à distance du réel par rapport à l'idéal : l'auteur laisse poindre, derrière un sérieux apparent, les aspects ridicules d'une réalité, et peut se tourner lui-même en ridicule. L'humour noir mêle le registre comique au registre tragique pour faire rire des situations les plus graves (souffrance ou mort). • Procédés humoristiques : expression de la mise à distance (litotes, changements de ton, autodérision. L'IRONIE L'ironie, contrairement à l'humour, porte en elle une visée insolente ou agressive, et cherche à disqualifier la pensée ou le personnage contre lesquels elle est orientée. Elle sous-tend le registre satirique ( voir les registres de l'argumentation). Comme l'humour, l'ironie joue sur l'implicite et n'est pas toujours apparente. • Procédés ironiques : figures d'insistance, antiphrases', naiveté feinte, mise en relief de contradictions ou d'incohérences. 5. Les registres réaliste et fantastique LE REGISTRE RÉALISTE Le registre réaliste consiste à présenter l'univers de la fiction comme le plus proche possible du monde réel. • Effet provoqué : illusion du vrai. • Procédés réalistes : notations de détails favorisant « l'effet de réel », précisions spatio-temporelles, paroles des personnages, représentation des milieux sociaux, allusion à des personnages historiques et des événements réels. LE REGISTRE FANTASTIQUE Le registre fantastique correspond à l'irruption d'éléments invraisemblables dans un univers réaliste. II est fondé sur une troublante indétermination entre le nor mal et l'anormal. On le distingue du merveilleux, qui suppose l'acceptation d'un univers totalement différent du monde réel. • Émotions suscitées : angoisse, peur entretenue par l'hésitation entre explications naturelle et surnaturelle d'un phénomène. • Procédés fantastiques : intrusion brutale du mystère dans la vie réelle, ruptures de la narration, champs lexicaux de l'étrange et de la peur. 6. Les registres de l'argumentation A la différence des précédents, ces registres sont initialement liés aux formes oratoires du discours. Ils se rencontrent cependant dans les textes les plus divers. LE DIDACTIQUE consiste à exposer un thème comme objet d'enseignement : il vise à transmettre un savoir (moral, philosophique, scientifique) LE DÉLIBÉRATIF correspond à la confrontation d'arguments et d'idées, à partir d'une situation d'incertitude, . en vue de parvenir après discussion à l'énoncé d'un jugement. II caractérise l'exercice de la dissertation, mais aussi certains dialogues théâtraux ou romanesques, ou des essais philosophiques. ' L ÉPIDICTIOUE consiste à célébrer des qualités (par l'éloge) ou à dénoncer des défauts (par le blâme) d'une personne, d'une institution, d'une idée, etc. II se rencontre dans la poésie classique, mais aussi dans le discours politique ou publicitaire. LE POLÉMIQUE (du grec polémos : « guerre ») correspond à des situations argumentatives conflictuelles :un auteur cherche à poser sa thèse en s'opposant à une autre qu'il dénonce énergiquement. En cas d'échange de discours opposés, on assiste à une polémique (débat vif et engagé) entre deux camps. • Effets recherchés : discrédit de l'adversaire, contre lequel on cherche à s'allier le public. • Procédés polémiques : marques d'engagement personnel (énonciation à la première personne), marques d'émotion (indignation, surprise), procédés de dévalorisation de l'adversaire (antiphrases, euphémismes, litotes), oppositions renforcées par des figures d'insistance (parallélismes, anaphores, accumulations).Le registre polémique se fait satirique lorsqu'il recourt à la moquerie ou à l'ironie pour discréditer l'adversaire. II donne libre cours dans le genre du pamphlet.