Le tétanos néonatal : aspects épidémiologiques, cliniques et

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Le tétanos néonatal : aspects épidémiologiques, cliniques et
Journal de pédiatrie et de puériculture 18 (2005) 38–43
http://france.elsevier.com/direct/PEDPUE/
ARTICLE ORIGINAL
Le tétanos néonatal : aspects épidémiologiques,
cliniques et thérapeutiques. À propos de 34 cas
Neonatal tetanus: epidemiological, clinical
and therapeutic aspects. Concerning 34 cases
N. Oulahiane *, A. Laboudi, M. Kabiri, S. Ech-cherif El Kettani,
M. El Haddoury, I. Alaoui
Service d’anesthésie–réanimation polyvalente néonatale et pédiatrique, hôpital d’enfants,
CHU Ibn-Sina, Rabat, Maroc
MOTS CLÉS
Tétanos néonatal ;
Vaccination
antitétanique ;
Curare ;
Ventilation
artificielle ;
Pneumopathie
nosocomiale
Résumé Introduction : malgré les progrès réalisés, le tétanos néonatal persiste dans les
pays du tiers-monde. Le but de notre étude est de rapporter les caractéristiques
épidémiologiques, cliniques, thérapeutiques et évolutives de cette affection dans notre
contexte. Matériels et méthodes : étude rétrospective de 34 cas de tétanos néonatal
colligés entre janvier 1990 et janvier 2003 au service de réanimation néonatale de
l’hôpital d’enfants de Rabat. Nous avons analysé le déroulement de la grossesse et la
vaccination antitétanique de la mère, les conditions de l’accouchement et de la contamination du nouveau-né, le tableau clinique, le traitement et l’évolution. Résultats : les
grossesses ne sont pas suivies dans 70 % des cas. Neuf pour cent des femmes ont reçu deux
injections de vaccination antitétanique. L’accouchement s’est déroulé à domicile dans
56 % des cas. La section septique du cordon a été notée dans 56 % des cas et l’application
de substances étrangères dans 35 % des cas. Le délai de consultation a été en moyenne de
trois jours (1–10 jours). Le score moyen de Rhéa a été de 4,3 et le score moyen de Patel
et Jocq a été de 3,5. Le traitement a reposé essentiellement sur la sédation et la
ventilation artificielle. La complication principale a été la pneumopathie nosocomiale
(53 %). Le taux de décès a été de 62 %. Conclusion : Les mauvaises conditions d’hygiène et
le manque d’éducation sanitaire favorisent la survenue du tétanos néonatal. Cette
maladie reste mortelle. Actuellement, seule la prévention est efficace.
© 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés.
KEYWORDS
Neonatal tetanus;
Anti-tetanus
vaccination;
Curare;
Artificial ventilation;
Nosocomial
pneumopathy
Abstract Background: In spite of progress in science of medicine, the tetanus neonatal
still exists in third world countries. Objective: to describe epidemiological, clinical
features, treatment and evolution of the tetanus at new-borns in our experience.
Materials and Methods: retrospective survey of 34 cases of tetanus neonatal in neonate
intensive care of the children’s hospital in Rabat (Morocco) between 1990 and 2003. We
analysed: the progress of pregnancy and the mother’s antitetanus vaccination, the
conditions of delivery and the newborn’s contamination, the clinical picture, the treatment and the evolution. Results: pregnancies are not controlled in 70%. Nine percent of
the women received two injections of antitetanus vaccination. The delivery produced
* Auteur correspondant.
Adresse e-mail : [email protected] (N. Oulahiane).
0987-7983/$ - see front matter © 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés.
doi: 10.1016/j.jpp.2004.12.003
Le tétanos néonatal : aspects épidémiologiques, cliniques et thérapeutiques. À propos de 34 cas
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at home in 56% of the cases. The septic section of the cord has been observed in 56% of the
cases and the application of substances on the cord in 35% of the cases. The delay of
consultation was on average of three days (1-10 days). The mean score of “Rhéa” was
4,3 and the mean score of “Patel and Jocq” was 3,5. The treatment was essentially
sedation and mechanical ventilation. The main complication was the nosocomial pneumopathy (53%). The rate of death was 62%. Conclusion: the sanitary education lack
increases the tetanus neonatal. This affection remains fatal. Currently, only the prevention is efficient.
© 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Introduction
Résultats
Au début du XXIe siècle, malgré les progrès réalisés
dans la santé, le tétanos néonatal (TNN) sévit encore dans les pays du tiers-monde où la morbidité
varie entre cinq et 100 cas/1000 naissances. En
1991, l’Organisation mondiale de la santé a estimé
le nombre de décès par TNN à 433 000. Quatrevingt pour cent de ces nouveau-nés provenaient
d’Asie du sud-est et d’Afrique [1]. Le but de notre
travail est de tracer les profils épidémiologique,
clinique, thérapeutique et évolutif de cette affection dans notre contexte.
Parmi nos 34 malades, 22 étaient des garçons (G) et
12 des filles (F) (sex-ratio G/F : 1,8). L’âge moyen
des nouveau-nés était de 11 jours avec des extrêmes de 3 et 20 jours. Au cours de notre période
d’étude, la répartition annuelle des malades s’est
déroulée comme suit (Fig. 1).
Chez les mères, la grossesse n’était pas suivie
dans 24 cas (70 %). Pour les autres, le suivi a été fait
dans les centres de santé les plus proches de leur
lieu d’habitat. Deux femmes ont reçu deux injections de VAT, dont la dernière lors du 8e mois de
grossesse et deux autres ont eu une seule injection
de VAT. Pour dix mères, l’information sur la vaccination n’a pas été précisée. L’accouchement a été
médicalisé dans 15 cas et s’est déroulé à domicile
dans 19 cas (56 %). Dans cette dernière catégorie,
le cordon ombilical des nouveau-nés a été sectionné par une lame de rasoir (15 cas), avec un
couteau (deux cas) et par des ciseaux (deux cas).
De plus, divers produits ont été appliqués dessus :
khôl (six cas), khôl et henné (deux cas), henné
(trois cas) et terre (un cas). La durée d’incubation
de la maladie a été en moyenne de sept jours. Elle
n’a pas été précisée dans un cas (Fig. 2). Le délai
d’hospitalisation moyen par rapport à la date d’apparition des premiers symptômes a été de trois
jours avec des extrêmes de un et dix jours. Ce délai
n’a pas été précisé dans un cas (Fig. 3).
Parmi les symptômes cliniques, le refus de téter
a été présent dans tous les cas. Les autres signes
étaient une fièvre (huit cas), des cris incessants
Matériels et méthodes
Notre étude est rétrospective. Elle a porté sur
34 cas de TNN hospitalisés au service d’anesthésieréanimation polyvalente néonatale de l’hôpital
d’enfants de Rabat entre janvier 1990 et janvier
2003. Le diagnostic de TNN a été retenu selon la
définition du ministère de la Santé publique d’un
cas de TNN : « Tout nouveau-né qui a normalement
crié et tété pendant les deux premiers jours de vie,
ayant présenté entre le 3e et le 28e jour une incapacité de téter avec raideur et convulsions [2] ».
Nous nous sommes intéressés à étudier chez ces
malades le déroulement de la grossesse et la vaccination antitétanique (VAT) de la mère, les conditions de l’accouchement et de la contamination du
nouveau-né, le tableau clinique, le traitement institué et l’évolution.
Figure 1 Nombre de cas/année dans notre série.
40
N. Oulahiane et al.
(Tableaux 1 et 2). Le score de Patel et Jocq apprécie la gravité de la maladie à l’admission du
nouveau-né. Le score de Rhéa permet la surveillance et l’adaptation du traitement, il est calculé toutes les quatre heures pour apprécier l’efficacité de la sédation. À l’admission, le score de
Rhéa a été établi chez 29 de nos malades et le score
de Patel et Jocq chez 24 d’entre eux. En moyenne,
le score de Rhéa a été de 4,3 sur 7 (Fig. 4) et le
score de Patel et Jocq de 3,5 sur 5 (Fig. 5).
Figure 2 Durée d’incubation de la maladie.
En plus du TNN, certains nouveau-nés présentaient une infection néonatale affirmée ou probable dans 14 cas (41 %). Le germe a été identifié dans
trois cas : staphylocoque doré, streptocoque D et
Klebsiella. Une souffrance anoxo-ischémique était
associée dans quatre cas.
Tableau 1 Score de Rhéa.
Figure 3 Délai d’hospitalisation par rapport au début des symptômes.
(sept cas), une cyanose (quatre cas), un ictère
(quatre cas), des vomissements (trois cas), une
hypothermie (deux cas), une diarrhée (un cas), une
constipation (un cas), une dyspnée (un cas).
À l’admission, l’examen clinique a retrouvé :
• le trismus : présent dans tous les cas sauf un ;
• l’hypertonie : une contracture généralisée a été
retrouvée dans 32 cas, absente dans deux ;
• les paroxysmes : présents dans 31 cas (provoqués dans 11, spontanés dans 6, caractère non
précisé dans 14) et absents dans trois cas.
On a apprécié également :
• l’état respiratoire du nouveau-né : on a noté une
respiration normale dans neuf cas, des pauses
dans 14 cas, une polypnée dans neuf cas, et une
respiration irrégulière dans deux cas ;
• l’état de l’ombilic n’a pas été précisé dans
18 cas, il était propre dans sept cas, infecté dans
quatre et souillé dans cinq autres ;
• la température : 16 nouveau-nés étaient apyrétiques, 15 présentaient une hyperthermie et
deux avaient une hypothermie ;
• les autres signes associés étaient un ictère (six
cas), des sclérèmes des membres (deux cas),
une cyanose (deux cas), un état de choc (deux
cas), une déshydratation (un cas), une pneumopathie (un cas), une hépatomégalie (un cas) et
une paralysie du plexus brachial (un cas).
On a utilisé les scores de Rhéa (SR) et de Patel et
Jocq (SP) pour évaluer la gravité de la maladie
Critères
Température
Intensité des crises
Durée des crises
Déclenchement
0
Normale
–
–
–
1
Élevée
Modérée
< 30 secondes
Provoqué
2
–
Intense
> 30 secondes
spontané
Tableau 2 Score de Patel et Jocq.
Critères
Incubation
Invasion
Température
Trismus
Spasmes
0
> 5 jours
> 3 jours
< 39 °C
Absent
Absents
1
< 5 jours
< 3 jours
> 39 °C
Présent
Présents
Figure 4 Score de Rhéa à l’admission.
Figure 5 Score de Patel et Jocq à l’admission.
Le tétanos néonatal : aspects épidémiologiques, cliniques et thérapeutiques. À propos de 34 cas
Le diagnostic du TNN étant clinique, les explorations avaient peu d’intérêt. Cependant, trois diagnostics différentiels devaient être éliminés :
• une hypocalcémie ; ainsi une calcémie a été
dosée dans 21 cas (62 %). Le résultat a été
normal dans tous les cas ;
• une méningite ; une ponction lombaire a été
réalisée chez 14 nouveau-nés (41 %). Un seul cas
de méningite a été retrouvé ;
• une hémorragie méningée, aucun cas n’a été
retrouvé.
Le diagnostic de TNN étant retenu, la prise en
charge thérapeutique a été fondée sur les méthodes classiques : sédation–curarisation et ventilation
artificielle, associées à une antibiothérapie à base
de pénicilline G 100 000 UI kg–1/24 heures ou d’ampicilline 100 mg kg–1/24 heures en intraveineuse
directe associée à la gentamicine 3 à 5 mg
kg–1/24 heures en intraveineuse lente, des soins de
l’ombilic par de l’eau oxygénée et de la pénicilline
G et les soins de nursing. Aucun malade n’a reçu le
sérum antitétanique. La sédation a reposé sur le
diazépam associé au phénobarbital. Ils ont été administrés par voie parentérale puis par voie entérale. La dose des benzodiazépines administrée aux
nouveau-nés a atteint 30 mg kg–1/jour. Le phénobarbital a été administré sous la forme d’une dose
de charge de 20 mg kg–1/24 heures en intraveineuse
directe puis par voie digestive à la dose de
5 mg kg–1/24 heures. Cette sédation a été complétée par le curare dans tous les cas, sauf dans un cas
chez qui les crises paroxystiques étaient de faible
intensité et rapidement résolutives sous diazépam.
Le curare utilisé est le pancuronium (Pavulon®)
administré d’abord sous forme d’une dose de
charge de 0,2 mg kg–1 en intraveineuse directe,
ensuite la dose d’entretien a été ajustée de façon à
arrêter les paroxysmes. La dose d’entretien a varié
entre 0,05 mg kg–1/heure et 0,3 mg kg–1/heure. La
voie sous-cutanée a été utilisée dès que le contrôle
des paroxysmes a été obtenu. Tous les malades ont
été intubés et ventilés sauf celui qui n’a pas reçu de
41
Tableau 3 Délai par rapport à l’intubation et durée de la
trachéotomie.
Cas
1
2
3
4
5
6
Délai par rapport à
l’intubation (jours)
38
30
28
30
3
10
Durée de la
trachéotomie (jours)
15
7
14
32
49
32
Figure 6 Les complications survenues chez les malades.
curare. L’intubation et la ventilation ont été effectuées après un intervalle de 30 minutes à quatre
jours de l’admission. La trachéotomie a été réalisée chez six malades (Tableau 3). La durée totale
de la ventilation artificielle a été en moyenne de
27 jours avec des extrêmes de 2 et 64 jours. Les
complications survenues étaient essentiellement
de type iatrogène (Fig. 6). L’évolution a été marquée par le décès des malades dans 21 cas soit 62 %.
Les causes de décès sont représentées dans la
Fig. 7. La durée d’hospitalisation a été en moyenne
de 31 jours avec des extrêmes de 2 et 65 jours
(Fig. 8). Les survivants, ainsi que leurs mères, ont
reçu le VAT à la fin de leur hospitalisation.
Discussion
L’incidence du TNN a certes diminué dans les pays
en voie de développement durant la dernière décennie, mais les objectifs de l’Organisation mon-
Figure 7 La répartition des causes de décès.
42
N. Oulahiane et al.
Figure 8 Répartition des malades en fonction de la durée de
séjour hospitalier.
Figure 9 Évolution du nombre de cas de tétanos néonatal
(TNN)/an au Maroc.
diale de la santé de réduire son incidence à un
cas/1000 naissances en 1991 et à 0 cas en
1995 n’ont pas été atteints [1]. Au Maroc, depuis
1995, l’objectif de réduire le TNN à une incidence < 1
cas/1000
naissances
vivantes/
circonscription/an a été atteint (Fig. 9) [2]. Dans
notre unité, le nombre de cas par année est en
nette diminution. En comparant nos chiffres avec
ceux d’autres séries durant la dernière décennie,
on trouve que des fréquences plus importantes sont
observées (Tableau 4) [3–6].
Le TNN est en rapport avec l’absence de vaccination antitétanique des femmes en âge de procréer et
durant la grossesse et les mauvaises conditions d’hygiène à l’accouchement. Chez le nouveau-né, la
porte d’entrée est, dans la majorité des cas, ombilicale par l’usage de matériel ou par l’application de
substances souillées. Dans notre série, parmi les
femmes dont la grossesse a été suivie, uniquement
9 % d’entre elles ont reçu chacune deux doses de
vaccin. Cela montre que les femmes ont consulté de
façon très irrégulière (une visite à deux durant toute
la grossesse), et ignoraient la nécessité de ce vaccin. Plusieurs facteurs expliquent cette situation :
l’analphabétisme, le bas niveau socioéconomique,
l’éloignement des centres de santé dans les régions
rurales. L’administration de deux doses de vaccin ne
protège que dans 80 à 90 % des cas le nouveau-né.
Cette protection est encore plus importante si la
première dose est administrée au moins 90 jours
avant la naissance, et la seconde au moins 20 jours
avant l’accouchement et parfois, lorsque la contamination de l’ombilic est massive, l’excès de toxine
dépasse largement le taux d’anticorps produits chez
la mère par le vaccin et transmis au nouveau-né [5].
La proportion des accouchements à domicile est
moindre par rapport aux autres séries. La survenue
du TNN chez les nouveau-nés nés dans une structure
médicalisée est largement expliquée par l’application de substance étrangère (64 %). Dans les autres
cas, l’asepsie du matériel reste à soulever. Concernant l’âge, le sexe des nouveau-nés et les signes
cliniques, ceux-ci concordent avec les données de la
littérature (Tableau 5).
Avec les méthodes classiques du traitement, les
résultats sont décevants, c’est pour cela que
d’autres moyens thérapeutiques ont été recher-
Tableau 4 Nombre de cas dans différentes séries.
Auteurs
Badiane et al. [3]
Yalçin et al. [4]
Mayanda et al.[5]
Surjono [6]
Notre série
Nombre de cas
1159
43
12
20
34
Durée d’étude
10 ans
7 ans
10 ans
1 an
12 ans
Ville de l’étude
Dakar
Istanbul
Brazzaville
Yogyakarta
Rabat
Tableau 5 Caractéristiques épidémiologiques et cliniques du TNN dans différentes séries.
Suivi de la grossesse
VAT (2 doses)
Accouchement à domicile
Section septique du cordon
Âge
Sex-ratio G/F
Durée d’incubation
Délai de consultation
Brazzaville
(n = 12 cas
/10 ans)
8,3 %
16,5 %
83 %
75 %
10 ± 6 jours
Dakar
(n = 1159
/10 ans)
58,4 %
26,3 %
1,25
Istanbul
(n = 43/7 ans)
Yogyakarta
(n = 20/1 an)
Notre série
(n = 34/12 ans)
90,7 %
73 %
72,5 %
91,5 %
23,5 %
9%
56 %
56 %
11 jours
1,8
7 jours
3 jours
7,4 ± 2,4 jours
2,9
6,1 ± 2 jours
Le tétanos néonatal : aspects épidémiologiques, cliniques et thérapeutiques. À propos de 34 cas
Tableau 6 Taux de mortalité dans différentes séries.
Série
Badiane et al. [3]
Mayanda et al. [5]
Notre série
Taux de mortalité (%)
62,5 %
91,6 %
62 %
chés. L’adjonction au traitement classique de la
pyridoxine à la dose de 100 mg en injectable le 1er
jour, puis relais par la voie orale à la dose de
25 mg/jour à un groupe de patients, a permis de
diminuer la mortalité au sein de ce groupe par
rapport au groupe de patients traités sans pyridoxine de 60 à 37,5 % dans une série indonésienne
(p < 0,05) [7]. Cependant, cette donnée n’est pas
confirmée par de larges études. Dans une étude
menée par Mongi (Tanzanie), la sérothérapie par
voie intrathécale a permis, par rapport à la sérothérapie par voie intramusculaire, de réduire le
taux de décès entre deux groupes de 82 à 45 %
(p ≈ 0,002), de diminuer le taux de complications
(p < 0,01) et la durée d’hospitalisation de
28,7 jours à 19,3 jours (p < 0,05) [8]. D’autres
auteurs rapportent que la sérothérapie intrathécale n’a pas fait la preuve de son efficacité sur la
mortalité néonatale, et nécessite pour cela un essai
randomisé multicentrique avec analyse stratifiée.
Différentes classifications pronostiques du TNN ont
été proposées : Dakar, [5] Rhéa et Patel Jocq. Les
éléments péjoratifs de ces classifications concordent et incluent une durée d’incubation inférieure
à 1 semaine, une atteinte des fonctions végétatives, une fréquence des accès paroxystiques, et la
réaction du patient aux sédatifs. Le TNN reste une
maladie mortelle. Les taux de décès sont élevés
(Tableau 6). Les causes de décès rapportées dans la
littérature sont nombreuses : spasmes incontrôlés
au-delà de 48 heures, une défaillance respiratoire
entre le 3e et le 14e jour, un marasme ou une
43
broncho-pneumonie terminale entre la 3e et la 6e
semaine. Dans notre série, la pneumopathie nosocomiale représente la principale cause de décès.
Conclusion
Actuellement, la couverture vaccinale antitétanique des femmes en âge de procréer a dépassé 90 %
au Maroc. L’éducation sanitaire reste l’arme essentielle pour lutter contre le TNN, à l’instar de l’Inde
où les accoucheurs éduquent les femmes dans les
villages et leur distribuent des kits de soin de
l’ombilic [9].
Références
[1]
[2]
[3]
[4]
[5]
[6]
[7]
[8]
[9]
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