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Recommandations, référentiels et procédures de « bonnes pratiques » : des balises pour penser l’intervention sociale et médico-sociale ? Pratique et bonnes pratiques… du singulier et du pluriel … L’évaluation des établissements et services sociaux et médico-sociaux consacre une philosophie de la transparence visant à rendre lisible les pratiques et à en apprécier la pertinence et les effets au regard des missions et des services rendus. Les dernières recommandations concernant l’évaluation interne englobent tant ce qui relève des pratiques en direction des usagers, que des organisations internes ou encore des méthodes de gestion et d’animation. C’est donc une approche qui se veut globale, qui doit à la fois pouvoir révéler les processus et les procédures managériales et professionnelles, qui doit par ailleurs servir de catalyseur pour les équipes, qu’il s’agisse des équipes de direction ou bien des professionnels sur le terrain. Plus directement, la démarche procède d’une forme de vérification de la conformité des pratiques au regard d’un cadre validé par les pouvoirs publics articulant évaluation interne et externe généralisé aux différents établissements et services relevant de la loi du 2 janvier 2002. On observe à la fois des similitudes et des différences avec le cadre de la certification hospitalière, mais l’esprit reste bien le même et vise à la fois la rationalisation, la qualité de service sur la forme et l’adaptabilité des organisations concernées. Je ne reprendrai pas ici le cadre tel qu’il a été prescrit pas l’Agence nationale de l’évaluation, cadre qui a d’ailleurs évolué au cours des dernières années, mais je me limite à proposer un regard sur la culture des organisations et des professionnels et à mettre en perspective le concept de « bonnes pratiques » et à suggérer des pistes qui permettent la réflexion et l’action au sein des équipes. Patrick Lefèvre Consultant, formateur Les Cahiers de l’Actif - N°398/401 9 Recommandations, référentiels et procédures de « bonnes pratiques » : des balises pour penser l’intervention sociale et médico-sociale ? Dans le secteur économique de type industriel notamment, la notion vient progressivement s’installer dans les organisations sur fond de démarche et d’assurance qualité. Le but est pluriel : 99 gagner la confiance des clients et des fournisseurs, 99 harmoniser des manières de faire et de produire, 99 permettre d’anticiper sur des effets indésirables et d’éviter les risques, 99 optimiser le management des ressources humaines, 99 modifier les pratiques et généraliser des méthodes de travail. Le cadre légal, mais aussi des chartes ou les guides de bonnes pratiques est à prendre en compte. On peut constater que l’idée a fait son chemin dans une grande diversité de domaines d’activités industrielles, commerciales, dans les hôpitaux et cliniques, au sein de l’état et des collectivités territoriales. Des référentiels qualité sont souvent cités pour témoigner de la spécificité des organisations dans leur rapport à la production de biens ou de services. “Pendant très longtemps, parler des « bonnes pratiques » était quelque peu incompatible avec l’histoire, les principes et les valeurs du travail social” C’est donc dans un environnement concurrentiel, de compétition, de prévention des risques, de contrôle interne et externe que s’installent la culture et les méthodes liées à la qualité et plus largement à l’évaluation. Dans l’action sociale, ce phénomène est d’ailleurs apparu dans ses premières formes en 1977 avec les circulaires relatives à la rationalisation budgétaire, la loi particulière de janvier 1986, puis ensuite avec le développement des politiques sociales, et enfin avec la loi du 2 janvier 2002. Il faut reconnaître que la rationalité budgétaire était en grande partie admise par les responsables des organisations. Le contrôle financier a été mis en place dès que la loi du 30 juin 1975 relative aux institutions sociales et médico-sociales a été mise en œuvre. Il n’existait pas de contrôle sur l’aspect qualitatif des établissements. Pourtant, la loi avait déjà posé le principe de l’évaluation, renvoyant à des sanctions possibles autour de trois dimensions : 1. le coût disproportionné avec la mission, 2. la non utilité sociale, 3. les mauvais traitements en direction des personnes accueillies. L’histoire des établissements montre que la définition ou le contrôle de la pratique professionnelle relevaient de la volonté des équipes. Le savoir, le savoir faire ou le savoir être devaient auparavant être apprécié au sein du milieu professionnel comme le résultat d’un processus tant idéologique que théorique ou éthique ayant sens dans les établissements et services pour les équipes. Parler des pratiques ou encore des « bonnes pratiques » était quelque peu incompatible avec des principes, des valeurs et une histoire particulière du travail et de l’action sociale. 10 Les Cahiers de l’Actif - N°398/401 Préambule Le terme de pratique s’entendait tant du point de vue du rapport à la personne accompagnée que du point de vue des conceptions liées aux pratiques sociales dans une perspective visant non seulement à intervenir auprès de populations cibles, mais à exprimer une pensée politique ou militante sur la question du changement social. Changer la société, prendre part aux transformations sont des perspectives qui ont structuré les discours et les actions des acteurs sur le terrain, qu’il s’agisse des associations et établissements, mais aussi des organisations professionnelles, des organismes de formation… L’analyse des pratiques est un bon exemple. Une équipe travaille à observer, analyser et ajuster des pratiques, mais entre pairs, avec ou non la présence d’un superviseur. Dans ce cas de figure, c’est le groupe qui fait acte de contrôle de la pratique individuelle et collective. Plus largement, la pratique ou les pratiques sont la résultante de l’activité des acteurs au sein de l’équipe. Dans cette démarche, la pratique part toujours de l’acteur et de sa démarche professionnelle. Au delà, le terme « d’analyse » n’est pas neutre, il se réfère souvent à une dimension d’ordre psychanalytique, visant à analyser l’implication de l’acteur, le cadre des résonances émotionnelles ou les attitudes projectives, dont les transferts dans la relation aux personnes accompagnées. La pratique, terme culturellement intégré par les travailleurs sociaux vient justifier d’un professionnalisme de type artisanal, lié au charisme et au savoir faire de l’acteur, ou à un professionnalisme institutionnel lié au patrimoine, aux conceptions et à la philosophie d’action d’un établissement ou d’un service. On peut évoquer les courants de pensées qui, dans le secteur tendent à fonder des théories, des concepts et des méthodes ou des manières de penser le travail et l’action sociale. Ainsi, on pourrait citer « pratiques sociales » ou encore les mouvements nationaux de représentation du secteur d’activité. La question était avant tout pour les professionnels, techniciens, cadres et représentants du secteur de sauvegarder l’idée et la réalité d’un domaine particulier ne répondant pas aux mêmes logiques que les autres secteurs d’activité professionnelle… C’est la conception même du travail éducatif et social qui est en jeu au regard de l’histoire et des tensions ou ruptures dans les différentes logiques. Il en est de même pour la marge de liberté des organisations sociales, notamment des associations, à un degré moindre aujourd’hui, du fait de l’instrumentalisation grandissante des opérateurs privés et publics, renforcée par l’harmonisation des politiques sociales européennes et la généralisation d’un discours managérial mêlant dimension politique, administrative et entrepreneuriale. En effet, on peut constater que les grandes associations ont intégré complètement le fait de « l’organisation formelle » répondant à une typologie de l’entreprise sociale marquée par une organisation interne structurée visant des perspectives de développement, de qualité et d’évaluation. Plus encore, le champ interne de ces associations tend à se fondre dans le champ externe, notamment celui des Les Cahiers de l’Actif - N°398/401 11 Recommandations, référentiels et procédures de « bonnes pratiques » : des balises pour penser l’intervention sociale et médico-sociale ? pouvoirs publics, par le biais des logiques d’appels d’offre, mais aussi des CPOM, ou encore tout simplement par l’introduction de l’évaluation interne, préalable à l’évaluation externe, traduite dans le cadre d’exigences et de méthodologies généralisées. Plus largement, et j’ai eu l’occasion de l’évoquer à plusieurs moments dans mes ouvrages et dans le cadre d’interventions, c’est la notion même de l’institution qui disparaît au profit de l’organisation rationnelle légale répondant à la fois à des obligations et des contraintes, comme à des principes et des procédures qualité définis par les politiques sociales ou par extension par les associations gestionnaires ou les collectivités chargées de gérer des établissements et services sociaux et médico-sociaux. “La notion même Concrètement, c’est l’environnement qui dicte la conduite ou qui de l’institution disparaît au profit impose des évolutions dans un secteur en forte recomposition. de l’organisation Progressivement, la question de l’autonomie des associations rationnelle légale” dans leur fonction sociétale et d’interpellation sociale disparaît au profit d’organisations para publiques ayant intégré un discours et des pratiques de direction sur fond de libéralisme ou de service public. Certains tentent encore de résister, mais la question est toujours d’actualité au sein des associations : qu’est ce qui justifie leur existence comme Personnes Morales de Droit Privé ? C’est le projet d’une association qui vient témoigner de sa dimension d’utilité sociale englobant dans un même mouvement les établissements et services. Certains responsables politiques et administratifs, acteurs directs et indirects sont même allés jusqu’à envisager la nécessaire disparition du statut des associations d’action sociale ou leur encadrement massif par des lois et règles. Les politiques sociales, l’action territoriale, et plus récemment les CPOM ont structuré des recompositions et modifié les pouvoirs des uns et des autres, engendrant d’ailleurs, et il convient de le souligner de réelles évolutions et des recompositions institutionnelles. Des changements significatifs ont été révélés dans les organisations, les projets, la culture professionnelle et les manières de concevoir l’action sur le terrain. Ces politiques ont constitué des systèmes de contrôle ou de contractualisation par objectifs sur des éléments quantitatifs et qualitatifs liés à la mission des établissements et services et plus largement à l’activité sociale et médico-sociale des associations. Il convient de souligner par ailleurs, l’arrivée des opérateurs du secteur privé lucratif dans le champ et l’affirmation d’un social concurrentiel et de marché, mettant en compétition les différents acteurs, au delà d’une politique affirmée de partenariat et de réseau. En fait, le secteur social et médico-social est depuis bientôt trois décennies confronté à plusieurs logiques d’actions qui sont complémentaires ou antagonistes. Je les ai largement développées dans mes différents guides de direction, d’encadrement et de management des organisations sociales. 12 Les Cahiers de l’Actif - N°398/401 Préambule Logique du don et du lien : l’engagement de l’acteur, humanisme et utopie. Cette approche constitue l’origine et le lieu de l’élaboration des mythes fondateurs et des croyances sur le terrain. Bien que souvent contestée, elle reste active et mobilisatrice ou justificatrice et étayée par les valeurs des acteurs. Logique de la théorisation : la référence à des courants de pensée au sein des professions sociales a contribué à structurer des paradigmes professionnels. L’action est justifiée par la théorisation et la croyance en des concepts et des méthodes : la psychanalyse, la sociologie, la psychologie cognitive, l’analyse systémique. Globalement, deux philosophies d’action continuent à s’opposer, celle du constructivisme et celle du positivisme. La théorie ou la théorisation reste pour les travailleurs sociaux, un gage de la pensée comme préalable ou catalyseur de l’action professionnelle. Le secteur s’est fortement mobilisé sur la recherche action et sur la réflexion collective par le biais des congrès, colloques et journées d’études ou encore par la présence importante de revues spécialisées, lesquelles ont évolué avec le temps et les changements externes. Logique du militantisme : le changement social comme démarche et la force du fait associatif. Les associations agissent dans leur mission d’utilité sociale et elles participent à la régulation et à la prévention des exclusions ou la marginalisation des populations et des personnes. Elles s’engagent dans le débat et elles défendent souvent des causes spécifiques dans le cadre d’organisations fondées sur la démocratie et l’articulation bénévolat/salariat. Plus fondamentalement, c’est la philosophie de l’économie sociale qui inspire les discours et les pratiques. Logique de l’administration publique : les lois et les règlementations comme guides traduites dans les politiques sociales spécialisées, les schémas d’action sociale, les lois cadres. Il s’agit de faire valoir l’action publique, les politiques qui la soutiennent et de positionner les pouvoirs publics dans leur pouvoir de définition, d’animation et de contrôle de l’action sociale et médico-sociale. Logique consumériste : le social est un marché concurrentiel et la régulation se fait par les appels d’offre et la croissance des organisations. Les usagers détiennent des pouvoirs nouveaux de représentation et d’influence. Beaucoup ont tenté de voir dans le social un marché quelque peu dérégulé soumis aux influences de groupes à dominante commerciale validant par là l’idée de « marché du social ». Cette logique s’est effectivement largement développée notamment avec l’arrivée de grands groupes, mais aussi par l’intégration de dirigeants venus du secteur économique ou sortis des « grandes écoles », et aussi par l’extension du conseil et de la formation à des acteurs du secteur économique traditionnel. Il faut souligner que le secteur a toujours été, au delà des restrictions budgétaires, un domaine créateur d’emplois, gérant des budgets importants, faisant face aux contextes de crises politiques, économiques et financières. Les Cahiers de l’Actif - N°398/401 13 Recommandations, référentiels et procédures de « bonnes pratiques » : des balises pour penser l’intervention sociale et médico-sociale ? Logique territoriale et des réseaux : fondée sur une démarche mêlant la géographie, la culture, l’économie et la régulation sociale en lien avec les habitants et les acteurs de terrain. Une démarche fondée sur le décloisonnement des légitimités et des compétences. C’est sur cette conception que vont se fortifier les approches réseaux et le partenariat inter institutionnel. C’est aussi par le management territorial que vont se structurer les collectivités territoriales, mais aussi certaines grandes associations d’action sociale. On peut illustrer l’évolution de la démarche d’expression et de définition du professionnalisme à partir de trois éléments qui ponctuent l’histoire du travail social : 99 le temps de l’humanité, 99 le temps de la technicité, 99 le temps de la rationalité. Un professionnalisme de tradition va peu à peu se prolonger, voire s’opposer avec un professionnalisme de normalisation. C’est d’ailleurs en cela que la problématique qualification/compétence ou encore emploi/poste se trouve posée et qu’elle met en tension les professionnels et les représentants des organisations du secteur. La « pratique » recevait antérieurement une définition liée à une référence aux professions sociales. La profession relève traditionnellement d’un art libéral et codifié par des principes éthiques, déontologiques et techniques et renvoie à l’idée d’un corps professionnel, de discours et de principes garants pour les acteurs concernés. C’est pourquoi il est nécessaire de faire la distinction entre métier, profession, emploi, poste de travail. Il convient de dépasser les confusions ou les incompréhensions… les mots traduisent la pensée ou ce qui contribue à la fonder. C’est ainsi par exemple que le terme « profil de poste » s’est progressivement substitué à celui de l’emploi et plus encore de la profession… on a donc assisté à une entrée progressive de la logique industrielle et mécanique des organisations rationnelles à forte standardisation du travail. Les évolutions se sont également opérées par le renouvellement du discours directionnel ou managérial avec l’introduction de stratégies et méthodes de gestion des ressources humaines ou encore de la qualité dans les organisations. C’est également autour la notion de liberté de l’acteur et de sa propre autonomie lui permettant de forger sa créativité sur le terrain que des tensions se sont peu à peu développées au regard de l’apparition puis de l’extension des contraintes légales et réglementaires. On assiste progressivement à l’expression d’une philosophie de la transparence et de l’explicitation du professionnalisme. En d’autres termes, la qualité ne se décrète pas, elle n’est pas non plus du côté du secret ou de l’intimité des équipes, 14 Les Cahiers de l’Actif - N°398/401 Préambule mais elle procède de la pensée et de son élaboration comme de la nécessaire restitution et du rendre compte. C’est ce mouvement d’ouverture et de mise en visibilité des pratiques et des organisations qui est déterminant. Comme je l’ai évoqué plus haut, les raisons sont plurielles, mais elles sont d’abord celles liées au principe de précaution, à la prévention des risques de mauvais traitement des personnes, et bien évidemment à la bonne utilisation des enveloppes budgétaires. Bonnes Pratiques… Le terme est hérité du Taylorisme et de la rationalité bureaucratique de Max Weber ajusté aux organisations publiques et sociales. La démarche qualité constituera le prolongement “On assiste de conceptions fonctionnelles et procédurales. La à la substitution de bonne manière d’exécuter un acte ou une tâche, dans la pratique professionnelle une division du travail et au sein d’une organisation par les « bonnes pratiques »” susceptible de garantir les cadres institués et de contrôler les acteurs par des références qui s’imposent à tous. L’acte professionnel dépend de la définition qui lui en est donnée par l’organisation, de lois et de règles établies et contrôlées. On assiste à un détachement entre l’activité professionnelle et l’acteur qui peut alors être interchangeable : de fait les bonnes pratiques se substituent à la pratique professionnelle. C’est la fin d’une démarche fondée sur des utopies sociales ou encore sur l’idée selon laquelle le professionnel agit à partir de sa responsabilité et de son éthique. Le travail social touche là ses hésitations et contradictions permanentes entre l’acte libéral et l’acte institué par des formes de régulations externes ou encore internes aux organisations. Quel regard et quelles propositions peut on aujourd’hui formuler autour de ces notions et dans une perspective d’avenir ? En ce qui me concerne, j’ai, en tant que directeur, consultant et formateur toujours pensé que le secteur social et médico-social n’avait pas une légitimité historique acquise, transférable ou transposable. Les évolutions sociétales et le temps allaient contribuer à reconfigurer des organisations engagées dans le changement social, parfois en incapacité de l’intérieur de penser leur propre changement et conduisant à l’expression de forces d’inertie, ou alors d’expression de conflits internes bloquant une dynamique d’innovation et de transformation. Le social n’est pas indépendant du champ politique ou économique. Il est une des formes d’expression de la régulation sociale, de la pondération ou limitation de la souffrance et de l’exclusion des personnes et des groupes. Les politiques sociales irriguent des démarches et des pratiques sur le terrain qui doivent nécessairement être en partie encadrées, contrôlées et remises en question avec le temps. Les Cahiers de l’Actif - N°398/401 15 Recommandations, référentiels et procédures de « bonnes pratiques » : des balises pour penser l’intervention sociale et médico-sociale ? A contrario, le social ne peut être la résultante de démarches fondées sur des justifications économico-administratives, faisant l’impasse de la qualité des acteurs, de leur positionnement ou de leur raison d’être. Pour être clair, la réforme hospitalière, parfois contestable, mais justifiée dans certains cas, ne peut être transposée au secteur social et médico-social. Les Agences régionales de santé seront t-elles demain en mesure de répondre à la complexité d’un monde pluriel où doivent pouvoir communiquer pouvoirs publics, associations et professionnels dans des lieux qui ne soient pas exclusivement de type administratif voire bureaucratique. C’est sur de nouvelles conceptions de la contractualisation que doit s’installer le social de demain et que devront se concevoir et se valider de nouvelles pratiques sociales sur le terrain. Les associations et les établissements doivent pouvoir conserver ou retrouver une place et une attitude d’innovateurs sociaux, bénéficiant de libertés d’action et de marges de manœuvre dans le respect des politiques sociales et des cadres légaux et réglementaires, sans faire l’impasse de leur rôle critique pour éviter de se perdre définitivement dans une instrumentation massive. “Il convient de passer d’une logique de conformité à une logique de professionnalité” Les équipes soutenues par leurs directions ont à esquisser, comme cela ce fait dans certains établissements aujourd’hui, une démarche de progrès social et managérial, permettant d’utiliser au mieux les motivations et les compétences des acteurs. Le risque professionnel, à tout le moins l’initiative doit être remise au goût du jour. Il convient de passer d’une logique de la conformité à une logique de la professionnalité. Les référentiels qualité et les processus d’évaluation devront s’appuyer sur des organisations vivantes, susceptibles d’apprendre et de vivre la question du changement dans les organisations du secteur. La pratique ou les pratiques ne pourront se satisfaire de principes et de procédures harmonisées et transférables d’un établissement à l’autre. Au delà, il est nécessaire que les organisations puissent ne pas perdre leur capacité à réfléchir, à proposer et à faire preuve de créativité pour lutter contre le risque du conformisme ou de la morosité ambiante. Les bonnes pratiques, seront bonnes si elles sont susceptibles de faire rêver des équipes et des professionnels et de les mobiliser sur des projets et des innovations dans des organisations où le sens et la finalité seront considérés comme plus importants que les seules modalités organisationnelles ou fonctionnelles. Cela implique que les responsables de tous bords ne confondent pas gestion du social et animation du social… Les utopies doivent pouvoir se conjuguer avec les compétences professionnelles et leur évaluation par des méthodes mettant les équipes et les usagers au cœur de la dynamique, dans des lieux ouverts, porteurs d’espoir et de projets humains, techniques et sociaux. Il s’agit de créer 16 Les Cahiers de l’Actif - N°398/401 Préambule les conditions de la réflexion partagée, accepter d’interroger les évidences au quotidien, en ne négligeant pas les nécessaires repères structurés que peuvent apporter les guides, référentiels et les processus d’évaluation dynamique conduits par les équipes de direction. Les associations et les pouvoirs publics ont aujourd’hui à accompagner le changement. Celui-ci est à la fois de nature politique, éthique et technique et il ne pourra suffire d’administrer et de gérer des enveloppes ou des ratios d’emploi. C’est bien la ou les pratiques institutionnelles et professionnelles qui sont en jeu et qui sont la cible de l’évaluation dans les établissements et services. Le projet des établissements doit guider un management où la stratégie et l’intuition des acteurs pourront ouvrir les chemins du futur… dans des Organisations où humanité et compétence pourront ensemble assurer les conditions de l’épanouissement des personnes, des familles et des groupes concernés par l’intervention sociale. à lire Guide de la fonction Cadre dans l’action sociale et médico-sociale, 2008, Dunod. Guide de la fonction Directeur d’établissement dans les organisations sociales et médico-sociales, 2003, Dunod. Guide du Management stratégique des OSMS, 2006, Dunod. Revue Les Cahiers de l’Actif : Contribution au n°388/389 « à propos des Directions intenables »... Réflexions à l’usage des dirigeants, 2008. Les Cahiers de l’Actif - N°398/401 17 Recommandations, référentiels et procédures de « bonnes pratiques » : des balises pour penser l’intervention sociale et médico-sociale ? guide de la fonction cadre et responsable de service en action sociale et médico sociale Longtemps considérée comme une étape dans un parcours professionnel, la fonction cadre responsable de service a désormais acquis une légitimité reconnue par la création en 2004 du Certificat d’aptitude aux fonctions d’encadrement et de responsable d’unité d’intervention sociale (CAFERUIS). La seconde édition enrichie et adaptée de ce guide intègre toutes les évolutions institutionnelles, politiques et culturelles qui ont marqué ce secteur et cette fonction en terme de logique de métier et de compétences. Conçu comme un ouvrage stratégique et pratique, ce guide éclaire les enjeux aux plans humain, technique et social. Il structure les méthodologies liées à la responsabilité ainsi qu’aux outils. Il est organisé en trois parties : • une analyse du métier, de son environnement et de son évolution ; • une élaboration des notions fondamentales : service, responsabilité, délégation, identité, compétence ; • une présentation des outils et des méthodes : management du changement, conduite de projets, animation de service, travail en équipe, enjeux et pratique de l’évaluation. Un glossaire des mots clés facilite la compréhension des termes essentiels d’une fonction qui attire de plus en plus de professionnels. Une référence pour tous les cadres du secteur social et médicosocial, du privé comme du public. DUNOD, 278 pages, 2e édition, 2008 18 Les Cahiers de l’Actif - N°398/401 Préambule guide du management stratégique des organisations sociales et médico-sociales Cet ouvrage propose une alternative à la confrontation entre gestion néo-libérale (où ne régnerait que la loi du marché) et utopie (avec son quotidien bureaucratique). Car on assiste de fait depuis quelques années à l’émergence d’un «management de l’action sociale». Ce management puise dans des sciences de l’homme et de la société, mais également dans des constructions plus rationnelles et repérables, qui visent une valorisation et une évolution de la direction et des stratégies de gestion et d’animation des organisations. Toutes les parties du livre seront traitées à partir d’une même organisation méthodologique : des concepts et théories, des problématiques, des stratégies, des méthodes, des exemples, une synthèse générale, une bibliographie et des références. DUNOD, 576 pages, 2006 guide de la fonction directeur d’établissements dans les organisations sociales et médico-sociales Organisé autour de cinq grands axes (pouvoir, projet, stratégies d’action, animation, ressources humaines), cet ouvrage constituer un guide pour l’ensemble des directeurs et des cadres de direction des établissement et associations du secteur social et médico-social, en formation initiale ou en poste (CAFDES). Chacune des cinq sections obéit à un plan rigoureux : définition des enjeux, identification du contexte et des évolutions, appréhension des stratégies, conception des outils). L’ensemble constitue un outil de référence au quotidien apte à répondre aux diverses questions du directeur d’établissement et de ses adjoints. DUNOD, 416 pages, 2e édition, 2003 Les Cahiers de l’Actif - N°398/401 19