II. Le travail des conseils d`administration
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II. Le travail des conseils d`administration
KORN / FERRY INTERNATIONAL Gouvernement d'entreprise 2000 Deux visions de la démocratie d'entreprise, la FRANCE et l'ALLEMAGNE Novembre 2000 KORN / FERRY International EXECUTIVE SUMMARY Depuis plus de 6 ans en France, depuis 27 ans aux USA, Korn/Ferry International analyse et suit l'évolution des pratiques des grandes sociétés en matière de gouvernement d'entreprise. Depuis notre première étude réalisée à la veille de la publication du rapport Viénot I, les progrès réalisés par les dirigeants français sur la façon dont ils rendent compte à leurs actionnaires du fonctionnement de leur conseil d'administration sont incontestables et indéniables. Les conseils d'administration français reprennent progressivement la place dans le fonctionnement des sociétés, qui leur avait été ravie du temps du capitalisme d'Etat, ce qui permet à la France de se situer aujourd'hui dans le peloton de tête des pays aux règles de gouvernement d'entreprise les plus avancées. A cet égard, la comparaison que nous faisons dans cette étude avec l'Allemagne est édifiante. Bien qu'arrivé au niveau de maturité qui est le sien, le marché français a encore une marge de progression significative dans deux domaines : • l'ouverture de la communauté des administrateurs à des profils plus jeunes (la moyenne d'âge des conseils est de 60 ans) et plus diversifiés pour réduire une consanguinité encore trop forte. • la mise en place au sein des conseils de véritables procédures d'évaluation de la performance tant du Président que des administrateurs. Il ne peut pas y avoir de transparence sur les rémunérations sans transparence sur l'évaluation des performances. Korn/Ferry International, au travers de sa "Board Services Division", assiste depuis 1972 les conseils d'administration des sociétés internationales dans ces deux domaines. Notre objectif est aujourd'hui de pouvoir mettre au service des sociétés françaises notre savoir-faire pour leur permettre de continuer à rester aux premiers rangs du gouvernement d'entreprise. Didier VUCHOT Bertrand RICHARD Vice Chairman Europe Managing Vice President 2 KORN / FERRY International Cette étude a été réalisée par Patrick Bourdon sous la supervision de Bertrand Richard. 3 KORN / FERRY International Sommaire Page Executive Summary .......................................................................... 2 Synthèse ............................................................................................. 5 Partie I : La France s'anglo-saxonnise .................................... 6 I - Du Rapport Viénot I au Rapport Viénot II .................... A. Le Rapport Viénot I : une norme établie et reconnue ................................................................... B. La montée en puissance des recommandations du Rapport Viénot II ................................................... 7 9 II - Le travail des conseils d'administration ........................ 1. Le conseil d'administration ......................................... 2. Les comités spécialisés ................................................. 12 12 13 III - La composition des conseils d'administration ............. 1. Présence des grands corps dans les conseils d'administration ........................................................... 2. Classement des conseils d'administration par âge moyen .............................................................. 3. Présence d'étrangers au sein des conseils .................. 4. Les femmes dans les conseils d'administration.......... 5. Représentants des salariés actionnaires .................... 6. Administrateurs indépendants ................................... 7. Concentration des mandats et consanguinité des conseils .................................................................... 19 IV - La transparence des rémunérations des mandataires sociaux ............................................................................. 1. Les salaires et les autres composants ......................... 2. Les jetons de présence ................................................. Partie II : 7 21 22 23 24 24 24 25 27 27 28 L'Allemagne ou la dernière révolution du XXème siècle .............................................................. 30 I - Un système démocratique d'économie sociale ................ 31 II - Un système fortifié teinté de démocratie ....................... 33 III. - Traditionalisme et nationalisme contre ouverture ..... 36 IV - Conclusion ....................................................................... 41 Annexes .............................................................................................. 43 4 KORN / FERRY International SYNTHESE FRANCE USA 97% 70% 0% 74% 56 h 173 h Nombre de sociétés utilisant un cabinet d'Executive Search pour sélectionner ses administrateurs 2% 73% Taille des conseils d'administration 14 11 Rémunération annuelle moyenne d'un administrateur (FF) 160 000 350 000(1) Pourcentage d'administrateurs indépendants dans les conseils 28% 54% Sociétés respectant les recommandations de place en matière de gouvernement d'entreprise. Conseils d'administration évaluant de façon formelle la performance du Président Nombre d'heures consacrées annuellement par les administrateurs à l'exercice de leur mandat ____________________________________________________________ (1) à ce montant peuvent s'ajouter des stock options, ce que la loi n'autorise pas en France. 5 KORN / FERRY International 1ère Partie La France s'anglo-saxonnise 6 KORN / FERRY International I. Du Rapport Viénot I au Rapport Viénot II A. Le Rapport Viénot I : une norme établie et reconnue Un an après la publication du Rapport Viénot II, les recommandations présentées en 1995 dans le premier Rapport Viénot se sont naturellement et progressivement affirmées comme la norme française du gouvernement d'entreprise appliquée par l'ensemble des sociétés du CAC 40. Pour reprendre la classification utilisée depuis 6 ans1, la proportion de sociétés du CAC 40 satisfaisant aux critères du Rapport Viénot I, s'approche des 100% : 1999 - 2000 1998 - 1999 97% 93% 21 3 1997 - 1998 87% 3 5 5 34 34 29 1996 - 1997 1995 - 1996 82% 37% 7 23 15 17 10 8 Sociétés présentant de façon détaillée les actions mises en oeuvre Sociétés commençant à les rendre visibles Sociétés restant muettes sur ce sujet 1 Voir Annexe 1 7 KORN / FERRY International 1. Tout comme en 1999, 34 sociétés ont mis en œuvre, de façon visible, les principales recommandations du Rapport Viénot I Accor AGF Air Liquide Alcatel Alstom Aventis Axa BNP Paribas Bouygues Canal Plus Carrefour Casino CCF Crédit Lyonnais Danone Dexia France Telecom L’Oréal Lafarge Lagardère Legrand LVMH Peugeot PPR Renault Saint Gobain Sanofi Schneider Electric Société Générale Suez-Lyonnaise des Eaux Thomson CSF Total Fina Elf Valéo Vivendi En 2000, ce groupe des sociétés en pointe s'est étoffé par : !"Trois jeunes promus dans l’indice phare de la place de Paris : Alstom, Bouygues, Crédit Lyonnais !"La promotion de Peugeot qui, jusqu’à l’an dernier, ne donnait aucune information sur le sujet du gouvernement d’entreprise !"Le retour de la Société Générale sortie l'année précédente du CAC 40 lors de la bataille boursière avec la BNP Par ailleurs, deux sociétés, malgré des mutations profondes dues à des fusions avec des structures étrangères, restent fidèles aux principes du gouvernement d’entreprise : !"Aventis (anciennement Rhône-Poulenc) !"Dexia (anciennement Dexia France) 2. Deux sociétés, contre trois en 1999, traitent partiellement du thème du gouvernement d’entreprise, mais sans mettre en œuvre toutes les recommandations du rapport Viénot Cap Gémini Sodexho 8 KORN / FERRY International 3. Une seule société en 2000 reste fidèle à son mutisme sur le thème du gouvernement d’entreprise Michelin B. La montée en puissance des recommandations du Rapport Vienot II Suite à la présentation en juillet 1999 du second Rapport Viénot, il nous avait semblé intéressant d’en analyser le contenu afin de mettre en avant les novations et sources de progrès possibles. Nous y avions identifié cinq nouveaux axes de réflexion : #"Séparation des fonctions de Président et de Directeur Général #"Information précise mais globale sur les rémunérations #"Information standardisée et clarifiée sur la pratique du gouvernement d’entreprise #"Présence forte des administrateurs indépendants #"Rappel du rôle et des moyens nécessaires au bon fonctionnement du conseil et des comités Il nous a alors paru instructif, un an après, de savoir quelles sont les sociétés les plus avancées sur le chemin tracé par le Rapport Viénot II. Nous les avons donc étudié suivant les quatre premiers axes, le cinquième étant seulement une reprise des recommandations du Rapport Viénot I sans nouvelle ambition. Sur cette nouvelle base, six sociétés se détachent de l'ensemble pour former le peloton de tête dans l'application du Rapport Viénot II : Air Liquide Alcatel Aventis CCF Crédit Lyonnais Schneider 9 KORN / FERRY International 1. Axe 1 : séparation des fonctions de Président et de Directeur Général Huit sociétés recourent à une structure juridique duale (soit 24%) : Accor Aventis Axa Casino Cap Gemini Peugeot PPR Suez-Lyonnaise des Eaux Lagardère et Michelin ne sont pas des SA à conseil de surveillance mais des sociétés en commandite par actions. Etant donné les caractéristiques juridiques de ce type structure, il ne peut être considéré qu’elle représente un pas vers plus de démocratie d’entreprise par rapport à une société anonyme avec conseil d’administration. Cependant, aucune société n'a pu encore procéder à la séparation des fonctions de Président et de Directeur Général au sein du conseil d'administration, le projet de loi le permettant n'étant toujours pas approuvé par le Parlement. A titre de comparaison, les sociétés américaines ne recourent à cette séparation que pour 10% d'entre elles, proportion qui est quasiment inverse au Royaume-Uni. 2. Axe 2 : information sur les rémunérations globales L'objectif, ici, est de présenter de manière structurée la politique de rémunération des dirigeants avec le distingo part fixe, part variable, les jetons de présence et les stocks options. Les chiffres avancés doivent être clairs et la population concernée précisément définie. Cinq sociétés en 2000 apparaissent clairement en avance sur les autres membres du CAC 40, en affichant sans ambiguïté et de façon détaillée les rémunérations du Président Directeur Général, éventuellement d'autres mandataires sociaux membres de l'équipe de Direction Générale. Air Liquide Axa BNP Paribas Crédit Lyonnais Lafarge 10 KORN / FERRY International 3. Axe 3 : information standardisée et clarifiée sur la pratique du gouvernement d’entreprise Le Rapport Viénot II recommandait ici une information précise concernant : !"les administrateurs (âge, fonction principale et autres mandats, nombre d’actions détenues, début / fin de mandat, présence aux comités, indépendance) !"le nombre de réunions du conseil et des comités Six sociétés donnent sur ces thèmes une information claire et complète : Air Liquide Alcatel CCF Crédit Lyonnais Lafarge Schneider 4. Axe 4 : présence plus forte des administrateurs indépendants Des proportions ambitieuses ont été proposées en 1999 : #"1/3 dans le conseil d’administration #"1/3 dans le comité d’audit #"1/3 dans le comité de nomination #"50% dans le comité de rémunération Quatre sociétés satisfont à ce niveau d’indépendance : AGF Aventis Lafarge Saint Gobain Ainsi, que un autre groupe qui n’a toutefois pas mis en place de comité de nomination : Accor 11 KORN / FERRY International II. Le travail des conseils d’administration 1. Le conseil d’administration 2000-1999 1999-1998 1998-1997 1997-1996 1996-1995 1995-1994 Sociétés indiquant le nombre de réunions du conseil 34 34 29 24 14 0 Nombre moyen de réunions annuelles du conseil 6.5 5.6 5.4 5 4 3 Nombre de conseils ayant une charte 16 15 13 7 5 0 nombre de sociétés indiquant le nombre de réunions du conseil 2000 92% 1999 85% 1998 75% 1996 60% 1995 1994 35% 0% 0% 20% 40% 60% 80% 100% 12 KORN / FERRY International Depuis six ans, il apparaît clairement que les conseils sont de plus en plus souvent réunis et se rapprochent des standards anglo-saxons (8 fois). Les dirigeants recherchent visiblement la bénédiction de leur conseil et leur implication accrue dans la vie de l’entreprise. Ceci est d’autant plus vrai lorsque la société est à un moment crucial de sa vie. Ainsi, tant les administrateurs de la BNP que ceux de la Société Générale furent convoqués à 14 reprises lors du dernier exercice, du fait de la bataille boursière que ces deux banques ont mené en 1999 pour conquérir Paribas. 9 sociétés ont innové en 1999 en précisant dans leur rapport annuel le taux d’assiduité des administrateurs aux séances des conseils. Il apparaît que leur présence reste forte, 82% en moyenne, malgré la tâche grandissante qui leur est assignée. Toutefois, étrangement, il ne semble pas encore demandé systématiquement aux membres des conseils d’assister aux assemblées générales d’actionnaires qui les ont pourtant élus. Par ailleurs, il n’est toujours pas fait mention d’un quelconque processus formel d’évaluation de la performance, que cela concerne l’équipe dirigeante ou le conseil luimême. Notre précédente étude nous avait permis de montrer qu’en 1999, 75% des conseils aux Etats-Unis jugeaient leur président à travers une démarche annuelle formelle. Ce refus apparent des conseils français de mettre en œuvre des processus d’évaluation de la performance tend à montrer que le Président et son équipe ont toujours une résistance certaine à l'idée de formellement se faire évaluer et que les administrateurs hésitent toujours à franchir un tel pas. Il est devenu indéniable que les conseils jouent pleinement leur rôle de contrôle de la gestion effectuée par l’équipe dirigeante ou des comptes qui leur sont présentés. Ils sont également souvent consultés pour les nominations de nouveaux membres ou pour la politique de rémunération à travers le travail des comités spécialisés. Cependant, leur indépendance estelle suffisante pour que cette consultation devienne également un contrôle effectif ? 2. Les comités spécialisés a. Une pratique des comités est adoptée de façon quasi unanime par les sociétés du CAC 40 Trois sociétés n’ont toujours pas de comité, contre quatre en 1999 : Bouygues Cap Gemini Michelin 13 KORN / FERRY International nombre de conseils ayant des comités 2000 1999 1998 1997 1996 1995 0% 20% 40% 60% 80% 100% un comité d'audit 2000 1999 1998 1997 1996 0% 20% 40% 60% 80% 100% un comité de rémunération (1) 1999 1998 1997 1996 0% 20% 40% 60% 80% 100% (1) Que celui-ci ne s'occupe que de rémunération ou de rémunération et de sélection 14 KORN / FERRY International un comité de sélection 2000 1999 1998 1997 1996 0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% Le mouvement de transparence sur le travail des comités et leur composition se poursuit. Leurs réunions sont de plus en plus fréquentes et l’explicitation de leurs missions est quasiment systématique, ce qui tend à renforcer l’idée que ces organes jouent un rôle de plus en plus effectif. Pour la deuxième année consécutive, l’ensemble des sociétés du CAC 40 dévoilent le nom des membres des comités. Nombre Le nombre de conseils de réunions ayant des tenues comités (34) et indiquant Leur composition Leur mission 2000-1999 1999-1998 1998-1997 1997-1996 1996-1995 25 (74%) 22 (61%) 20 (59%) 22 (73%) 0 34 (100%) 36 (100%) 30 (88%) 26 (86%) 12 (70%) 33 (97%) 33 (91%) 29 (85%) 24 (80%) 10 (60%) 15 KORN / FERRY International b. Composition des comités La pratique des comités est devenue la règle dans les sociétés du CAC 40. Toutefois, dans l'ensemble, leur composition n'est pas encore en accord avec les règles d'indépendance énoncées par le Rapport Viénot II, soit : #"1/3 d'indépendants au comité d'audit #"1/3 d'indépendants au comité de sélection #"50% d'indépendants au comité des rémunérations Comme nous l'avons montré précédemment dans l'étude, seules quatre sociétés remplissent pleinement ces critères d'indépendance. Niveau d'indépendance des comités Comité des rémunérations Comité de sélection 3 7 9 7 13 17 Comité d'audit Comités satisfaisant au critère d'indépendance 9 14 8 Comités ayant au moins un indépendant mais moins que le minimum préconisé Comités sans indépendant 16 KORN / FERRY International La structure des comités des rémunérations laisse transparaître la réticence des dirigeants français à voir le niveau de leurs émoluments évalué par un comité indépendant, susceptible de le remettre en cause. c. Le travail des comités Les comités n’ont pas véritablement d’existence légale si ce n'est un article du décret de 1967. Ils n’ont aucun pouvoir de décision. Leur rôle est purement consultatif et donne véritablement l’opportunité au conseil de profiter pleinement des compétences de chaque membre en lui assignant des études spécifiques. Le comité d’audit : Traditionnellement, ses attributions sont : - s’assurer de la pertinence, de la permanence et de la fiabilité des méthodes comptables, - vérifier que les procédures internes de collecte et de contrôle des données permettent de garantir la qualité de l’information fournie, et à ce titre, examiner le programme d’audit interne, - se prononcer sur la validité du traitement comptable des opérations significatives. Par ailleurs, il commence à apparaître le souci de qualité de l’information délivrée spécifiquement aux actionnaires. Tout comme l’an dernier, des groupes comme Aventis, Axa, Canal Plus, Lafarge ou PPR, ont élargi le champs de compétence à des missions plus financières axées sur la stratégie ou les opérations en capital. Finalement, un certain nombre de groupes ont donné pour mission à leur comité d’audit de lancer les appels d’offres pour sélectionner les commissaires aux comptes. En moyenne, le comité d'audit se réunit 2 à 3 fois par an, contre 4 fois aux USA. Le comité de rémunération et de sélection : De plus en plus, les comités de rémunération assurent également les missions liées à la sélection. En 2000, ceci est vrai dans plus de 40% des cas, contre 32% en 1999. Les comités de rémunération étudient la politique de rémunération des mandataires sociaux et fixant celle du Président sans qu'aucune publicité ne soit faite pour présenter la synthèse de leurs recommandations. 17 KORN / FERRY International Leurs travaux se sont légèrement élargis par rapport à 1999 puisque leurs propositions : - ne concernent plus seulement la rémunération du Président, mais aussi celle des principaux cadres dirigeants du groupe, présentent toujours l’enveloppe des jetons de présence et ses conditions d’attribution, font état, tout comme l’an dernier, des caractéristiques des plans d’options de souscription ou d’achat d’actions, s'intéressent maintenant dans certains groupes à l'intéressement des salariés, en particulier sous forme de participation à l’actionnariat. Le comité de sélection se contente toujours de s’exprimer sur : - la succession du Président, la sélection des administrateurs. Il est à noter que certaines sociétés, comme les comités de Axa ou de la Société Générale, ont élaboré des plans de succession pour l’ensemble de leurs mandataires sociaux. Certains thèmes restent, année après année, peu ou pas abordés : - critères de détermination des rémunérations individuelles de l’équipe dirigeante, hors Président, mode de sélection de l’équipe de direction entourant le Président, présentation d’un outil formel d’évaluation des performances du Président et des administrateurs. Les comités de sélection et/ou rémunération ne se réunissent guère qu'une fois par an contre 5 fois pour le comité de rémunération, et 3 fois pour le comité de sélection aux USA. d. Le comité de gouvernement d'entreprise Alors qu'aux USA 60% des conseils d'administration ont un comité spécifiquement dédié au suivi du respect des règles de corporate governance et au fonctionnement du conseil, un tel comité n'existe pas dans les conseils en France. 45% des boards américains procèdent à une évaluation formelle de leur mode de fonctionnement. 18 KORN / FERRY International III. La composition des conseils d'administration Il est de plus en plus aisé d'avoir une vue exhaustive des conseils d'administration grâce au niveau d'information croissant au sujet de leurs administrateurs divulgué par les sociétés françaises qui se rapprochent ainsi, année après année, des standards anglo-saxons. Information sur les profils des administrateurs biographie complète 2000 1999 1998 0% 10% 20% 30% 40% 50% 60% 70% biographie résumée 2000 1999 1998 0% 5% 10% 15% 20% 25% 30% 35% aucune information 2000 1999 1998 0% 5% 10% 15% 20% 25% 19 KORN / FERRY International Le profil des administrateurs 2000-99 60 1999-98 60 45% 47% 45% 55% 19% 17% 18% 21% 1% 1% 1% 1% * Représentant des salariés 7% 8% 8% 7% * Administrateur indépendant 28% 27% 28% 16% * diplomés de Polytechnique ou de l'ENA 43% 46% 44% 45% * provenant d'autres origines 57% 54% 56% 55% * Français 79% 80% 83% 83% * Etrangers 21% 20% 17% 13% * Hommes 94% 95% 96% 97% * Femmes 6% 5% 4% 3% âge moyen des administrateurs (en années) répartition de l'origine des administrateurs : * Lié à un actionnaire ou un partenaire 1998-97 1997-96 62 61 commercial ou financier (administrateurs dépendants au sens du rapport Viénot) * Représentant du management * Représentant d'une catégorie spécifique d'actionnaires (individuel ou minoritaire) Formation des administrateurs français Nationalité des administrateurs Sexe des administrateurs Tout comme l’an dernier, on constate que : #"la part des administrateurs indépendants n’évolue plus, après avoir fortement augmentée entre 1997 et 1998 #"le management et les actionnaires ou partenaires de la société représentent toujours presque deux tiers des sièges #"le nombre d’étrangers admis dans les conseils progresse toujours et représente plus de 20% des sièges à l'aulne du XXI ème siècle Cependant, une nouveauté se fait jour : #"la diminution du nombre d’administrateurs français issus des grands corps (43% contre 50% il y a cinq ans). 20 KORN / FERRY International 1. Présence des grands corps dans les conseils d’administration Même si la présence des grands corps au sein des conseils reste importante avec 43% des sièges des administrateurs français, les premiers signes d’une diminution nette sont visibles. Cette déconcentration relative trouve essentiellement sa source dans les fusions, qu’elles soient : - nationales : BNP - Paribas et Total Fina - Elf - trans-frontalières : Rhône-Poulenc - Hoechst et Dexia France - Dexia Belgium L’avenir nous dira, par conséquent, si cette tendance n’est que ponctuelle et due à des événements exceptionnels ou si le mouvement est durable, ce qui pourrait, peut-être, lever un des freins à l’indépendance des conseils. SOCIETE %X ou ENA siégeant au conseil 2000 Rappel 99 Rappel 98 Rappel 97 71% 64% 57% 57% 55% 52% 50% 72% 60% 53% 60% 63% 52% - 61% 61% 55% 53% 40% 60% 79% 100% 60% 66% 50% - - - LAFARGE THOMSON CSF VALEO ALCATEL plus d'un CANAL PLUS tiers TOTAL FINA ELF AGF LAGARDERE CCF ACCOR AXA-UAP SCHNEIDER SUEZ-LYONNAISE CREDIT LYONNAIS 47% 44% 42% 40% 38% 36% 36% 36% 35% 33% 33% 33% 33% 33% 47% 47% 42% 36% 38% 53% 36% 40% 39% 33% 33% 41% 35% - 47% 47% 50% 53% 33% 34% 40% 44% 40% 43% 67% 73% 36% 42% 38% 40% 39% 40% 33% 33% 33% 36% 47% 47% 40% 58% - - RENAULT AIR LIQUIDE moins LVMH d'un tiers SANOFI-SYNTHELABO CASINO DEXIA 31% 31% 31% 27% 25% 24% 38% 36% 31% 25% 36% 41% 47% 47% 31% 25% 33% 36% 70% 76% - - 44% 47% plus de 50% SOCIETE GENERALE PPR SAINT GOBAIN VIVENDI BNP PARIBAS FRANCE TELECOM ALSTOM 21 KORN / FERRY International 2. Classement des conseils d’administration par âge moyen Age Supérieur à 65 ans Sociétés AXA-UAP PEUGEOT SA VALEO 1999 65 65 65 1998 67 65 64 1997 70 66 62 De 60 à 64 ans LEGRAND SOCIETE GENERALE ACCOR AVENTIS DANONE MICHELIN LAGARDERE SUEZ-LYONNAISE TOTAL FINA ELF L'OREAL AIR LIQUIDE AGF RENAULT CAP GEMINI CASINO SCHNEIDER 64 64 63 63 63 63 62 62 62 62 61 61 61 61 60 60 66 63 61 60 62 62 63 62 59 60 62 60 60 62 57 61 66 62 61 59 62 65 63 64 57 59 65 55 61 60 63 De 55 à 59 ans ALSTOM LVMH SAINT GOBAIN SANOFI-SYNTHE THOMSON CSF VIVENDI ALCATEL CARREFOUR CCF LAFARGE SODEXHO BNP PARIBAS CREDIT LYONNAIS FRANCE TELECOM BOUYGUES DEXIA CANAL+ PPR 59 59 59 59 59 59 58 58 58 58 58 57 57 57 56 56 55 55 58 57 59 58 60 58 59 57 64 57 57 56 55 54 55 61 57 61 59 62 61 52 63 64 56 54 56 59 54 57 22 KORN / FERRY International 3. Présence d'étrangers au sein des conseils Sur 545 postes, 113 sont tenus par des étrangers, soit 21%, alors que la capitalisation boursière détenue par des non-résidents est supérieure à 40%. Mais, le pourcentage augmente doucement année après année, même s'il doit être relativisé du fait des fusions trans-frontalières, Aventis : 50% d'étrangers contre 14% en 1999 Dexia : 48% d'étrangers contre 29% en 1999 Les autres sociétés avec les conseils les plus internationaux ... Société % d'internationalisation du conseil 50% % du CA réalisé à l'étranger 52% TOTAL 50% 80% AIR LIQUIDE 46% 75% SUEZ-LYONNAISE des EAUX 44% 43% LVMH 31% 80% ALSTOM ... réalisent également une part importante de leur chiffre d'affaires à l'étranger. Cependant, il n'est pas possible d'établir un lien direct et systématique entre ces deux composantes, car certaines sociétés très implantées en dehors de nos frontières conservent un conseil très franco-français, Société % d'internationalisation du conseil 8% % du CA réalisé à l'étranger 88% SAINT GOBAIN 7% 65% BOUYGUES 5% 71% LEGRAND 0% 65% MICHELIN 0% 81% PEUGEOT 0% 65% SODEXHO Les conseils français sont aujourd'hui beaucoup plus internationaux que les conseils américains (en moyenne 1 étranger sur 13 membres). 23 KORN / FERRY International 4. Les femmes dans les conseils d'administration Leur nombre augmente encore cette année pour passer à 34, soit un peu plus de 6% des administrateurs. Il y a donc une légère progression mais il ne se dessine en aucun cas une tendance véritablement haussière signifiant une ère nouvelle plus anglo-saxonne puisqu'en la matière les conseils outre Atlantique accueillent plus de 10% de femmes. Tout comme l'an dernier, 55% des conseils du CAC 40 ont au moins une femme en leur sein, alors que cette proportion est de 73% aux USA. La moyenne s'établit à moins d'une femme par conseil. Néanmoins, deux exceptions très marquées par la part de femmes siégeant à leur conseil : Total (32 %) Sodexho (33%) 5. Représentants des salariés actionnaires Les sociétés du CAC 40 détenues, dont une part significative du capital est détenue par les salariés, se refusent toujours à leur accorder des sièges d'administrateurs. Il est à noter que la présence de représentants du personnel actionnaire n'est obligatoire que dans les sociétés privatisées et ceci depuis 1994. Avec l'étude en première lecture du projet de loi sur l'épargne salariale par les députés de l'Assemblée Nationale en octobre dernier, la question de la représentation des "salariésactionnaires" revient sur le devant de la scène. En effet, ceci soulève de nouvelles interrogations comme le comportement de ce nouveau type de propriétaire : va-t-on assister à l'émergence d'un salarié entrepreneur, rentier ? 6. Administrateurs indépendants Le Rapport Viénot II a simplifié la définition : « Un administrateur est indépendant de la direction de la société, lorsqu’il n’entretient aucune relation de quelle que nature que ce soit avec la société ou son groupe qui puisse compromettre l’exercice de sa liberté de jugement. » En soulignant le nécessaire accroissement du nombre d’indépendants dans les conseils, le rapport a participé au mouvement de transparence dans lequel se sont engagées les sociétés du CAC 40 depuis quelques années. En 2000, plus de 50% mentionnent la présence d’indépendants en les identifiant précisément contre 40% en 1999 et 22% en 1998. 24 KORN / FERRY International Pourtant, cette évolution n’est pas suivie par une présence accrue de cette catégorie d’administrateurs au sein des conseils. Leur nombre se stabilise autour de 150 , soit 28% en 2000 contre 27% en 1999. Les conseils les plus ouverts aux indépendants sont : - Total, avec 59% - Lagardère, avec 57% - Air Liquide, avec 54% - Lafarge et Schneider, avec 53% - Aventis et Valéo, avec 50% Seul Legrand n’a toujours pas d’indépendant. Bouygues, Cap Gemini, Crédit Lyonnais, France Telecom, L’Oréal, Renault, Société Générale et Sodexho en ont moins de 10%. Au sein des comités, certaines sociétés sont allées au delà de ce que préconise le rapport Viénot II en part d’indépendants : - plus de 1/3 dans les comités d’audit : Accor, Air Liquide, Alstom, Aventis, Lafarge, Lagardère, Saint Gobain, Vivendi - plus de 50% dans les comités de rémunération : Accor, AGF, CCF, Lafarge Les critères d'indépendance d'un administrateur sont aux USA : - Volonté de "challenger" le management - Expertise particulièrement utile au conseil - Disponibilité pour conseiller la direction générale en dehors des réunions du conseil - Expérience réussie de management - Apport de contacts extérieurs 96% 68% 60% 47% 30% 7. Concentration des mandats et consanguinité des conseils Tout comme en 1999, la concentration reste très forte malgré une diminution sensible puisque l'an dernier 2% des administrateurs détenaient 12% des mandats : 1% des administrateurs (4) détient 5% des mandats. 2% des administrateurs (9) détient 9% des mandats. 6% des administrateurs (30) détient 22% des mandats. 14% des administrateurs (78) détient 40% des mandats. 25 KORN / FERRY International Le hit parade des administrateurs les plus recherchés évolue peu : - 4 administrateurs sont particulièrement recherchés : Jean Peyrelevade, Jean-Marie Messier, Michel Pébereau, Serge Tchuruk - Certains voient leur rôle s'accroître au sein de la communauté du CAC 40 : Daniel Bernard - D'autres mènent toujours avec succès leur société mais restent toujours en marge de ce microcosme : Bernard Arnault, François Pinault, Vincent Bolloré - Certaines figures du capitalisme français s'éloignent progressivement : Olivier Lecerf, Jean Gandois, Noël Goutard, André Lévy Lang Par ailleurs, plus de 8% des sièges correspondent à des participations croisées. Deux administrateurs en particulier, personnalités phares de la place de Paris, cumulent, outre les mandats, ces relations croisées : - Jean-Marie Messier : Alcatel, BNP, LVMH, Saint Gobain (en 1999, quatre croisements) - Michel Pébereau : Axa, Saint Gobain, Renault (en 1999, cinq croisements) Cette consanguinité représente dans certaines sociétés une part des sièges non négligeable : - Vivendi : 29% des sièges correspondent à des représentations croisées - BNP : 20% des sièges correspondent à des représentations croisées - Schneider : 20% des sièges correspondent à des représentations croisées - Axa : 17% des sièges correspondent à des représentations croisées - Air Liquide : 15% des sièges correspondent à des représentations croisées Finalement, il est à noter que 70% de ces participations croisées sont le fait d’administrateurs issus des grands corps, que ce soit l’X, l’ENA ou les deux. A titre de comparaison, on notera qu'aux Etats-Unis les CEO ou Chairman de sociétés de plus de $ 20 Mds ont en moyenne 2 autres mandats d'administrateurs et pas plus, et les outside directors siègent dans maximum 4 conseils. 26 KORN / FERRY International IV. La transparence des rémunérations des mandataires sociaux 1. Les salaires et les autres composants Sous la pression d'un texte de loi préparé par la Chancellerie, le Rapport Viénot II avait fait de timides recommandations de transparence en matière de rémunération. Ensuite, le MEDEF et l'AFEP-AGREF ont finalement recommandé la transparence des rémunérations pour le Président à compter des rapports 2001 traitant de l'exercice 2000. Ainsi, cette année encore, le minimum requis est dévoilé, sauf quelques exceptions, qui font toute la clarté en la matière resté tabou. Six présidents ont ainsi décidé de publier leurs rémunérations 1999 (part fixe + variable, hors stock options) : Société Air Liquide Axa Lafarge BNP Crédit Lyonnais PPR Président Alain Joly Claude Bebear Bertrand Collomb Michel Pébereau Jean Peyrelevade Serge Weinberg Rémunération arrondie Fixe + variable en Euro hors stock options 1.700.000 3.000.000 1.430.000 1.700.000 640.000 1.400.000 Deux commentaires s'imposent : - La publication de ces rémunérations n'a pas provoquée les troubles annoncés. - Les rémunérations des dirigeants français sont en deçà de leurs homologues américains sur deux plans : • au niveau de la rémunération cash (fixe + bonus) car le niveau moyen américain (hors banques d'affaires) est d'environ $ 5 millions. • au niveau de la rémunération globale, si l'on intègre les gains sur actions et stock options car alors le niveau moyen des 50 premiers CFO américains est d'environ $ 15 millions. Aujourd’hui, 70% des sociétés du CAC 40 définissent clairement la population concernée avec des données chiffrées précises et sans ambiguïté. Par contre, seules 19% d’entre elles explicitent le nombre de stock options détenu par l’équipe dirigeante, avec le détail pour le président, assorti d’informations exhaustives précisant la date limite de levée de ces options, le rabais consenti, le prix d’exercice et la quantité déjà exercée. 27 KORN / FERRY International L'objectif est, aujourd'hui, de pouvoir présenter chaque année les rémunérations individuelles des mandataires sociaux, ainsi que les options qui leur ont été consenties, et non pas, comme le souhaitait à tort la Chancellerie, la même information pour les 10 premiers salariés. Les actionnaires ont le droit de connaître les salaires de leurs mandataires, les salaires de leurs collaborateurs ne sont du ressort que du management. Leur publication n'a pas de raison d'être. Maintenant que la rémunération des mandataires sociaux des entreprises du secteur privé est accessible en toute transparence, il conviendrait que les hommes politiques, qui sont les mandants des électeurs et que les grands serviteurs de l'Etat aient le courage d'en faire de même. 2. Les jetons de présence ➤ L’information sur les jetons de présence est de plus en plus précise et de plus en plus accessible. Le niveau moyen des jetons de présence retrouve son niveau de 1998 avec 24 000 euros, soit la moitié du niveau équivalent aux USA. L’attribution des jetons prend de plus en plus compte la participation effective aux conseils et aux comités. La règle standard de répartition de l’enveloppe votée par l’assemblée générale est : - 50% répartie par administrateur - 50% en fonction de l’assiduité et de la participation éventuelle à des comités, qui est comptabilisée comme des présences supplémentaires à des conseils. Dans certaines sociétés, les administrateurs faisant partie du management ne souhaitent pas recevoir leurs jetons de présence comme c’est le cas chez Saint Gobain ou Aventis. Dans d’autres sociétés, le président du conseil et parfois les présidents de comité reçoivent une allocation de jetons plus importante que les autres membres. Enfin, il est à relever qu'à la différence de beaucoup d'autres pays, les administrateurs français n'ont pas le droit de bénéficier de stock options. ➤ Aux USA, la rémunération des boards members est : - dans 77% des cas fait d'une partie fixe et d'une partie variable suivant la participation aux réunions des comités et du conseil. - dans 17% des cas, elle est indépendante de la participation aux réunions. - dans 4% des cas, elle est uniquement fonction de la participation aux réunions. - dans 2% des cas, elle est payée en actions. Suivant la taille des entreprises, la rémunération globale des administrateurs est comprise entre $ 36.000 (273.000 FF) et $ 59.000 (450.000 FF). La participation à une réunion est valorisée en moyenne à $ 1.100 (8.360 FF). 28 KORN / FERRY International Jetons de présence en K Euro Supérieur à 30.000 EUR Sociétés 2000 1999 1998 1997 ACCOR L'OREAL CAP GEMINI CARREFOUR AVENTIS PPR AXA-UAP 70 50 45 38 36 36 31 21 47 19 38 32 41 31 15 59 10 26 20 4 59 23 23 26 15.000 à 30.000 EUR LAFARGE BOUYGUES SUEZ-LYONNAISE AIR LIQUIDE ALCATEL BNP PARIBAS PEUGEOT SA VIVENDI SOCIETE GENERALE AGF ALSTOM LAGARDERE SCHNEIDER TOTAL FINA ELF SAINT GOBAIN CASINO DEXIA LVMH CCF RENAULT THOMSON CSF CREDIT LYONNAIS DANONE 29 29 28 28 27 27 27 27 26 25 25 23 23 21 20 19 19 19 18 18 16 15 15 21 28 28 27 22 29 24 22 22 2 22 15 20 19 14 26 17 19 7 0 5 21 27 29 27 22 31 21 19 2 22 15 20 14 28 17 0 9 6 4 29 27 20 29 29 20 2 23 28 20 16 24 12 0 0 7 Inférieur à 14.000 EUR CANAL PLUS SANOFI-SYNTHE VALEO SODEXHO LEGRAND FRANCE TELECOM 13 12 11 7 2 0 13 15 11 7 47 0 9 15 6 59 0 9 0 59 - MICHELIN n'indique pas si des jetons de présence sont versés. 29 KORN / FERRY International 2ème Partie L'Allemagne ou la dernière révolution du XXème siècle 30 KORN / FERRY International L'Allemagne est aujourd'hui le premier partenaire économique de la France. Ces deux Nations auront eu depuis deux siècles des destins étroitement liés, par le sang de trois guerres tout d'abord, mais aussi, ensuite, par une amitié qui devint le moteur de la construction européenne. Depuis, un an, leurs entreprises à leur tour se rapprochent avec la fusion de Rhône-Poulenc et de Hoescht, les rumeurs d'alliance entre Suez-Lyonnaise des Eaux et Eon, les agitations de certaines institutions financières Outre-Rhin autour du Crédit Lyonnais. Pourtant, leurs structures capitalistiques sont très différentes. Les principes de gouvernance issus du passé divergent. L'appréhension du gouvernement d'entreprise doit donc être adaptée pour tenter de bâtir une comparaison entre deux systèmes aussi proches géographiquement qu'éloignés philosophiquement. I. Un système démocratique d’économie sociale → Le partage des pouvoirs comme règle de fonctionnement La loi allemande relative aux sociétés par actions consacre le système dualiste d'administration des sociétés consistant d'une part en un conseil de surveillance désigné par l'assemblée générale, et d'autre part en un directoire désigné par le conseil de surveillance. Dans ce modèle, la gestion de la société est confiée au directoire tandis que le contrôle de la gestion par le directoire relève de la compétence du conseil de surveillance. Le directoire est désigné et révoqué par le conseil de surveillance pour un maximum de cinq ans ; il est révocable ad nutum. La révocation ne peut avoir lieu que pour motif grave. Il peut être composé d'une ou plusieurs personnes. Seule une personne physique peut être membre du directoire. Le conseil de surveillance est constitué par l'assemblée générale et il n'est pas un organe social permanent. Il est composé d'au moins trois membres. Le nombre de membres du conseil dépend d'une part, de la taille de la société et d'autre part, du régime de la cogestion des salariés qui lui est applicable. Ne peut être membre d'un conseil de surveillance qu'une personne physique. L'un des piliers de ce modèle réside dans le mode de gestion de l'entreprise basé sur le principe de la co-gestion au niveau du conseil de surveillance. Appliqué aux sociétés de plus de deux mille salariés, il implique une représentation syndicale à l'Aufsichtrat (conseil de surveillance). L'une des conséquence directes est que les représentants syndicaux peuvent connaître les contrats de travail de l'équipe dirigeante et éventuellement même leurs conditions de révocation (parachute doré, ...), éventualité inimaginable en France. 31 KORN / FERRY International L'entreprise allemande est en fait basée sur un système dual, directoire - conseil de surveillance, comme le montre les 28 sociétés de l'indice DAX 30 que nous avons étudié2. → Le directoire, organe collégial sans véritable grand patron Dans un tel univers un Président ne peut prendre une importance excessive et devenir, sauf exception, le visage de la société vis-à-vis du monde extérieur, comme ce peut être le cas en France ou dans les pays anglo-saxons. En Allemagne, il n'est que le Primus Inter Pares faisant parti d'un groupe, le Vorstand (directoire), dont il est le porte-parole, et ne pouvant pas, à l'image de ses pairs, siéger au conseil de surveillance. Le plus souvent, il est issu du groupe où il a fait toute sa carrière. Il n'y a que peu de parachutage de "grand patron" venant de l'extérieur comme on le voit régulièrement aux EtatsUnis ou en France. La culture d'Entreprise reste très forte, même si, de plus en plus, les actionnaires et la communauté financière commencent à demander des comptes au Président en cas d'erreur stratégique : - Bernhard Walter, Président de Dresdner Bank : démission suite á l'échec de la fusion avec Deutsche Bank Walter Deuss, Président de Karstadt Quelle : démission pour résultats médiocres Bernd Pischetsrieder, Président de BMW : démission suite à l'échec de Rover Le directoire doit présenter des rapports au moins une fois par an sur la politique économique et financière de la société et au moins une fois par trimestre en ce qui concerne sa rentabilité et la marche des affaires, ce qui est comparable au système français. Ce travail de communication est véritablement collectif comme le précise la loi qui fixe comme principe directeur la gestion et la représentation conjointe. Chaque membre du directoire est donc capable de donner une vision d'ensemble exhaustive du groupe et d'en décrire sa stratégie. Ils sont, par ailleurs, tous habilités à agir, l'opposition d'un seul ayant pouvoir de veto. Cette collégialité donne indéniablement une très grande légitimité au directoire et à son Président ainsi qu'aux décisions prises. L'inconvénient est bien sûr la lourdeur et la lenteur de ce type de fonctionnement. La règle de la délégation de pouvoir est donc essentielle dans un tel univers. Ceci n'est possible que si l'équipe dirigeante a pleine et entière confiance en ses collaborateurs, confiance qui ne peut se bâtir que sur la durée. 2 Liste présentée en annexe 32 KORN / FERRY International Or, nous avons dit précédemment que le Président est souvent issu du groupe. Il a ainsi eu tout le temps de maîtriser son environnement et de s'entourer de personnes parfaitement connues. Cette capacité de l'entreprise allemande à capitaliser ses savoir-faire grâce à une gestion du capital humain s'inscrivant dans la durée, génère ce sens de l'intérêt général, les équipes dirigeantes privilégiant ainsi le long terme et préparant leur succession, pérennisant alors leurs stratégies. II. Un système fortifié teinté de démocratie → Un univers gardé par ses banques et ses compagnies d'assurance Cet attachement à la société se voit également chez les actionnaires allemands qui éprouvent une sorte de sentiment patriotique d'entreprise du fait même du développement de ce système capitalistique. Il est basé sur l'héritage du modèle de la banque industrie qui a pris son essor lors de la seconde révolution industrielle. Ce modèle allemand fonctionnant au plus près des limites technologiques de son époque et prenant rapidement des positions hégémoniques dans des domaines comme la chimie ou la mécanique se retrouve dans la République Fédérale de Konrad Adenauer après la guerre comme si la première moitié de siècle n'avait été qu'un aparté. Tout comme au siècle de Bismarck et Guillaume I, les sociétés allemandes d'après guerre ont pour clefs de voûte la cohésion du capital familial et le soutien inconditionnel des banques naissant en même temps que les géants industriels (1870 : création de la Deutsche Bank par un cousin de Werner Siemens). Dans cet environnement où propriétaires, travailleurs et dirigeants se sentent appartenir à une même famille, l'entrée en bourse ne peut être perçue comme une fin en soi. Alors, pour éviter tout risque pour le financement de la croissance, les banques, qui ont obtenu contrairement aux Etats-Unis le statut de banque universelle, prennent le relai. Elles drainent des capitaux et se comportent en bailleur de fonds pour l'industrie sous forme de crédits ou de souscription d'Actions entrant par la même dans le capital des groupes industriels. Participations des institutions financières allemandes : - Allianz : plus de 40 milliards d'euros - Deutsche Bank : plus de 20 milliards d'euros - Dresdner Bank : plus de 10 milliards d'euros - Commerzbank : plus de 2 milliards d'euros 33 KORN / FERRY International Les participations sont parfois très importantes comme la Deutsche Bank détenant 12% de Daimler Chrysler. Ainsi protégée, la société allemande s'abstrait de la financiarisation de l'économie, synonyme de volatilité et de fléau inflationniste, pour ne se concentrer que sur l'économie réelle et la réalité industrielle. → La loi comme cadre du gouvernement d'entreprise. Cette impossible pression du marché n'a pourtant pas interdit tout développement de certains principes du gouvernement d'entreprise. Le conseil de surveillance … Le discours des présidents du conseil sont ainsi très détaillés dans les rapports annuels. Ils précisent en règle générale les thèmes de discussion de chaque réunion, mettant l'accent sur les relations étroites qui existent avec le directoire et le contrôle qui est exercé. 2000 - 1999 Sociétés indiquant le nombre de réunions du conseil Nombre moyen de réunions 96% 5 La loi sur le contrôle et la transparence dans le gouvernement d'entreprise du 1er janvier 1999 demande un minimum de quatre réunions par an. Dans le passé, il était préconisé un minimum de deux rencontres annuelles. En 1999, le conseil de Deutsche Telekom se sera réuni huit fois alors que ceux de Epcos et Thyssen Krupp n'auront organisé que deux réunions. Les administrateurs allemands se réunissent en moyenne moins souvent que leurs homologues français (cinq fois contre six). Par ailleurs, tout comme en France, il ne semble pas y avoir dans les sociétés allemandes de processus formel d'évaluation de la performance. 34 KORN / FERRY International … Et ses comités spécialisés Tout comme elle a fixé le fonctionnement du conseil de surveillance, la loi a souligné la nécessité de commissions spécialisées. Selon la Cour fédérale de justice, c'est cette construction, associée à une discussion permanente avec le directoire, qui permet d'exercer véritablement un contrôle effectif et efficace. 2000-1999 Sociétés ayant un ou plusieurs comités 96% Sociétés indiquant le nombre de réunions du/des comités 86% Sociétés indiquant les missions du/des comités 64% 4 sociétés du DAX 30 n'ont pas de comité : - Bayer Hypo- und Vereinsbank - Henkel - Preussag - Veba Cependant, il est très difficile de se faire une idée exacte du travail effectif des comités, de leurs prérogatives et de leur indépendance, car il n'y a pas de partie spécifique du rapport annuel explicitant leur fonctionnement comme en France. Quelques lignes, dans le propos du Président, ne suffisent pas à donner une vue claire et juste de la réalité, d'autant plus que les noms les plus divers sont donnés à ces entités (Finance & Investment Committee chez Volkswagen, Executive Committee chez Veba, Business development and Credit Committee ou Negociating Committee chez Hypo-und Vereinsbank) La loi impose certaines commissions comme le Mediation Committee (art 27 du Codetermination Act) qui ne s'est par ailleurs réuni dans aucune des sociétés du DAX30 lors du dernier exercice. Ce comité ne se réunit que pour résoudre des conflits internes à l'entreprise. Il est ardu de savoir quels sont les comités véritablement créés par souci de transparence des procédures de gouvernement d'entreprise, et ceux mis en place pour des questions législatives. Ainsi, chez BASF, il y a un Personal Affairs Committtee créé en accord avec le German Stock Corporation Act (son rôle: ressources humaines et accès au crédit). Leurs prérogatives semblent également très vastes, un peu comme si la loi avait exigé la mise en place d'une telle entité, et que ensuite, la société lui avait délégué une grande variété de tâches. 35 KORN / FERRY International A la Commerzbank, le Presiding Committee doit étudier les états financiers, discuter les questions relatives au directoire en terme de politique de ressources humaines et donner son avis sur les enjeux stratégiques, les performances des différents business ou la planification. La loi de janvier 1999 sur le contrôle et la transparence dans le gouvernement d'entreprise a recommandé la création de plus de comités avec la communication de leurs prérogatives et du nombre de réunions tenues. III. Traditionalisme et nationalisme contre ouverture ? →Composition des conseils : une structure des conseils difficile à appréhender Le conseil de surveillance type rassemble 18 membres (contre 14 en France et 11 aux USA), mais ceci est le fait de la représentation patronat - salarié. Chez Adidas Salomon, ils ne sont que 12 contre 21 chez Bayer, Hypo-und Vereinsbank et Preussag. Les membres du conseil de surveillance comme en France ne peuvent pas, par ailleurs, cumuler leur poste avec un siège au directoire, car ils ne seraient alors plus en mesure d'exercer véritablement leur mission de contrôle de l'équipe dirigeante. Par contre, la limite au cumul des mandats est assez peu dissuasive car il est possible d'avoir 10 mandats de conseiller. Théoriquement, chaque conseil doit être composé paritairement de représentants des actionnaires élus par l'assemblée générale et de représentants des salariés élus par le personnel. Nombre total d'administrateurs dans les sociétés du DAX 30* Membres faisant anciennement parti du management Représentants des actionnaires personnalités extérieures ou 2000-1999 515 7% 46% Représentants des petits porteurs 1% Représentants des salariés internes à la société 46% Dont syndicalistes externes * soit 28 sociétés - ne sont pas pris en compte BMW et Viag 10% Note : le classement fut réalisé sur 473 administrateurs, les autres membres n'ayant pu être affectés à une catégorie du fait du manque d'informations disponibles. 36 KORN / FERRY International La catégorie "Représentants des actionnaires" regroupe les administrateurs, élus par les propriétaires ou les salariés, qui sont partenaires, actionnaires ou indépendants. En fait, les membres élus par le personnel qui ne sont ni responsables syndicaux, ni salariés, représentent 4% dans ce chiffre. Il est très difficile de déterminer la qualité d'indépendance des membres dans ce groupe, car sa définition reste imprécise. Aucun rapport annuel ne donne une telle qualification à certains membres du conseil. Toutefois, dans un système de banque - industrie comme l'Allemagne, il est difficilement concevable que les administrateurs issus de la banque ou de l'assurance puissent être véritablement indépendants. Plus de 10% des membres des conseils de surveillance travaillent dans ces deux secteurs, et on atteint plus de 25% si l'on exclut du total les 50% représentant les salariés qui sont issus du personnel de la société ou des syndicats extérieurs. Etre actionnaire n'implique néanmoins pas obligatoirement soutien au management. Au printemps de l'année 2000, le fonds d'investissements Cobra, lors de la dernière assemblée générale, a ainsi remis en cause la valorisation boursière de la Commerzbank, banque dans laquelle il est le premier actionnaire avec 17% du capital. De plus, les responsables du fonds avaient émis l'idée de s'opposer à la possible fusion entre Commerzbank et Dresdner Bank. Cependant, cet activisme actionnarial fut muselé par le Service fédéral allemand de contrôle en matière de crédits et de banques en interdisant à Cobra l'usage de ses droits de vote. Pour cela, elle s'est appuyée sur une réglementation de 1998 selon laquelle tout actionnaire "non digne de confiance" ou "susceptible de troubler une saine et prudente gestion de l'institution dont il est actionnaire" doit se voir confisquer ses droits de participation aux décisions. → Une forteresse fermée aux étrangers Historiquement, l'Allemagne a très vite eu une vision mondialiste malgré un empire colonial réduit. Dès le XIXème siècle, les Prussiens, convertis aux idées libre échangistes de Adam Smith, ont marqué cette Allemagne qu'ils dominaient. L'économie dans son ensemble est tournée hors des frontières. A la veille de la première guerre mondiale, les colonies n'absorbent que 0,25% des exportations et les entreprises allemandes détiennent déjà plus de 300 filiales en France. Cette vision internationale des marchés ne s'est pourtant jamais accompagnée d'une ouverture des conseils aux autres nationalités, qui aurait pu être vue comme une aide à la compréhension de ce monde extérieur. 37 KORN / FERRY International Les membres étrangers représentent cette année un peu plus de 6% des administrateurs contre 21% en France. Deux sociétés font exception : - Daimler Chrysler réalise 81% de son chiffre d'affaires à l'étranger et 35% de ses administrateurs sont de nationalité étrangère, mais uniquement du fait de la fusion récente. Schering réalise 81% de son chiffre d'affaires à l'étranger et 19% de ses administrateurs sont de nationalité étrangère. Cependant, la moitié des sociétés du DAX 30 n'ont accueilli aucune personnalité autre qu’allemande, malgré des chiffres d'affaires réalisés à plus de 70% à l'étranger : Sociétés avec 0 administrateur étranger % du chiffre d'affaires réalisé à l'étranger SAP 79% VOLKSWAGEN 78% EPCOS 77% PREUSSAG 76% MÜNCHENER RÜCKVERSICHERUNG 70% Comme nous l'avons déjà précisé, la France et l'Allemagne entretiennent aujourd'hui des liens économiques étroits. Les conseils d'administration des sociétés du CAC 40 font apparaître cet état de fait en attribuant cette année 16 sièges à des allemands, soit plus de 15% des postes détenus par des étrangers. Néanmoins, 35% seulement de ces administrateurs sont indépendants, les autres étant actionnaires ou partenaires. Outre-Rhin, le départ de Michel Bon du conseil de Deutsche Telekom a ramené à 3 le nombre de français présents au sein de conseil de sociétés du DAX 30 : - Bertrand Collomb chez Allianz Jean Gandois chez Siemens Michel Pébereau chez Dresdner Bank 38 KORN / FERRY International → Un sénacle excluant les femmes Tout comme en France, les sociétés allemandes restent un milieu très masculin puisque les femmes n’occupent que 5% des sièges. Une seule d'entre elles cumulent deux mandats, Margret Mönig-Raane, syndicaliste, à la Deutsche Bank et chez Veba. →Cumul des mandats et consanguinité La concentration du pouvoir entre quelques mains est également très forte en Allemagne : 1% des administrateurs (5) occupent un peu moins de 6% des sièges. 2% des administrateurs (11) occupent plus de 10% des sièges. 10% des administrateurs (51) occupent 28% des sièges. Sur ces 2%, plus de 63% (7) sont banquiers ou assureurs, confirmant un peu plus que le système est basé sur le soutien massif des banques qui, présentes dans les conseils, participent à la gestion de l'entreprise, donnent des conseils dans les questions de succession, mais ne cherchent en aucun cas à prendre le pouvoir. Par ailleurs, 5% des sièges environ correspondent à des participations croisées. Tous ces chiffres sont en réalité biaisés et ne peuvent pas véritablement être comparés avec la France car il ne faut pas perdre de vue que 46% des sièges environ sont détenus par des représentants salariés qui, par définition, ne cumulent pas de mandat. 39 KORN / FERRY International → Les jetons de présence, au dessus de la moyenne française La moyenne des jetons de présence distribués s'établit à 56 KEUR, ce qui est près du double des 24 KEUR français. Jetons de présence Plus de 69 KEUR De 30 à 69 KEUR Moins de 30 KEUR Sociétés SCHERING BAYER AG DEUTSCHE BANK BASF AG ALLIANZ 2000 128 91 84 80 70 VOLKSWAGEN THYSSEN KRUPP DRESDNER BANK DAIMLER CHRYSLER COMMERZBANK MAN RWE DEGUSSA-HUELS DEUTSCHE LUFTHANSA METRO BAYER HYPO-UND VEREINSBANK SAP MUNICH RE SIEMENS KARSTADT QUELLE FRESENIUS MEDICAL CARE DEUTSCHE TELEKOM 66 65 63 60 54 54 51 50 50 49 48 47 45 43 42 38 31 HENKEL ADIDAS SALOMON 26 18 EPCOS, LINDE, PREUSSAG et VEBA ne donnent aucune information sur le montant des jetons de présence versés. 40 KORN / FERRY International IV. Conclusion : un système condamné à évoluer : entre modernisation et disparition → Une inéluctable révolution En 1986, Mintzberg voyait encore deux systèmes s'opposer, "le modèle anglo-saxon tourné vers l'actionnaire et le modèle allemand - japonais privilégiant le management". Depuis deux - trois ans, ce modèle allemand évolue, devient plus mouvant avec l'éviction de certains Présidents, avec un nombre croissant d’O.P.A., contraires à la culture germanique de croissance interne même si, malgré tout, partenariats et rapprochements ne sont pas exclus. Le temps où Gerhard Cromme avait dû reculer dans son O.P.A. hostile pour absorber Thyssen Krupp est derrière nous ; c'était il y a moins de quatre ans. La défaite de Mannesmann est le symbole de ce changement, même s'il est vrai que ce groupe à l'actionnariat international sans actionnaire de référence n'entrait pas tout à fait dans le modèle germanique. Le système allemand a montré ces dernières années ses limites : - un nombre excessif de mandats par conseiller, des conseils de surveillance trop lourds, ne se réunissant pas assez et n'exerçant pas en fait leur mission. - une représentation excessive des banques dans les conseils de surveillance. - une cooptation inter-entreprise développant le modèle du "je te tiens - tu me tiens". - une inefficacité de la cogestion. - une insuffisante responsabilité des conseillers. - la déficience de l'information fournie au conseil de surveillance. Les journaux économiques Outre-Rhin annoncent déjà que la révolution est en marche, poussée par la réforme fiscale du gouvernement Schröder. En juillet dernier, le chancelier a même annoncé, après l'adoption du texte par le Bundesrat (chambre haute), la "fin du conservatisme qui figeait l'Allemagne". La baisse des impôts décidée par Schröder et Heichel est un événement sans précédent dans ce pays. Ainsi, dès 2002, l'impôt sur les plus values issues de la vente de participations industrielles allemandes, qui se monte aujourd'hui à 40-50%, sera supprimé, comme c'est déjà le cas pour les plus values réalisées sur la cession de participations industrielles dans des entreprises étrangères. L'annonce de cette décision a été ressentie comme un tremblement de terre car cela signifie, ni plus ni moins, l'inéluctable explosion de la répartition actuelle du capital dans un futur plus ou moins proche. C'est potentiellement 80 milliards d'euros qui pourraient changer de mains. Les banques et assurances, clef de voûte de ce système très stable dit de la Hausbank, pourraient vendre toute participation ne répondant pas à l'exigence de rentabilité de leurs actionnaires qui seraient, eux aussi, libres de se désengager. 41 KORN / FERRY International Un certain nombre de sociétés du DAX 30, comme la Commerzbank ou la Dresdner Bank, pourraient alors devenir des proies faciles pour des institutions financières étrangères ayant opéré des fusions beaucoup plus vites que leurs homologues allemands prônant encore des idées d'indépendance arrière gardistes. L'approche allemande du gouvernement d'entreprise est donc condamnée à évoluer vite même si les syndicats puissants peuvent encore, dans une certaine mesure, s'opposer au marché. → Moins de lois, plus d’initiatives privées Le modèle germanique s'est construit autour d'une pierre angulaire, la loi. Elle définit le rôle de l'entreprise dans la société, son fonctionnement interne, en précisant par exemple le nombre de réunions minimum que doit tenir le conseil ou alors le rôle des comités spécialisés. Elle essaie également de combler les insuffisances. Un projet de loi prévoit l'élargissement des pouvoirs du dit conseil et l'abaissement du nombre maximum de membres, qui est aujourd'hui de 21. Cependant, aucun texte législatif ne sera jamais suffisant, s'il n'est pas relayé par un changement de comportement des Présidents. En Allemagne, le premier pas est assurément l'amélioration de la transparence de l'information délivrée à l'actionnaire au sujet des administrateurs, des comités ou des rémunérations. De plus, avec la loi fiscale et sa très prochaine mise en vigueur la question du comportement des salariés deviendra l'une des questions clefs à se poser. Cette représentation paritaire donne assurément l'opportunité au personnel d'être impliqué dans la gestion de la société mais est-il possible de concilier les intérêts des salariés et des propriétaires. A ce sujet, la Cour Constitutionnelle s'est prononcée dans le sens de l'actionnaire car il n'est pas possible que la co-gestion conduise à des décisions concernant le capital qui puissent être en contradiction avec la volonté des actionnaires tout comme il n'est pas imaginable qu'un tel système engendre leur perte de contrôle sur la société. L'Allemagne se trouve donc à un croisement de son histoire économique avec des décisions rapides à prendre dans un monde globalisé où les concurrents étrangers regardent déjà avec les yeux de Chimène les joyaux de ce marché qui, selon Wyser Pratte, est " le plus prometteur pour investir s'il réussit à sortir de son carcan familial dirigé par des patrons faisant passer camaraderie et esprit de corps avant l'intérêt de l'actionnaire. " 42 KORN / FERRY International ANNEXES sur les sociétés du CAC 40 43 KORN / FERRY International 44 KORN / FERRY International Mandats par administrateur Administrateurs ayant 7 mandats de sociétés du CAC 40 Jean Peyrelevade - AGF - Air Liquide - Bouygues - Crédit Lyonnais - Lagardère - LVMH - Suez-Lyonnaise des Eaux Administrateurs ayant 6 mandats de sociétés du CAC 40 Jean-Marie Messier - Alcatel Michel Pébereau - BNP - Canal Plus - LVMH - Saint Gobain - Vivendi Serge Tchuruk - Axa - BNP - Lafarge - Renault - Saint Gobain - Total Fina Elf - Alcatel - Alstom - Société Générale - Thomson CSF - Total Fina Elf - Vivendi Administrateurs ayant 5 mandats de sociétés du CAC 40 Bruno Roger - Axa Edouard de Royère - Cap Gemini - PPR - Saint Gobain - Thomson CSF Jacques Friedman - Alcatel - Axa - BNP - Total Fina Elf - Vivendi Michel François-Poncet - Axa - BNP - LVMH - Schneider - Total Fina Elf Lindsay Owen Jones - Air liquide - Danone - L'Oréal - Michelin - Sodexho - Air Liquide - BNP - Lafarge - L'Oréal - Sanofi-Synthélabo 45 KORN / FERRY International Administrateurs ayant 4 mandats de sociétés du CAC 40 Daniel Bernard - Alcatel Daniel Bouton - Carrefour - Dexia - Saint Gobain - Canal Plus - Schneider - Société Générale - Total Fina Elf Didier Pineau-Valencienne - Aventis - Axa - Lagardère - Schneider Ernest-Antoine Seillière - Cap Gemini - Peugeot - Société Générale - Valéo François Grappotte - BNP - France Télécom - Legrand - Michelin Marc Viénot - Alcatel - Aventis - Société Générale - Vivendi Pierre Faurre - Peugeot - Saint Gobain - Société Générale - Suez-Lyonnaise des Eaux Administrateurs ayant 3 mandats de sociétés du CAC 40 Alain Joly - Air Liquide Antoine - BNP Jeancourt Galignani - Lafarge - Société Génrérale - AGF - Total Fina Elf Baudoin Prot - Accor - BNP - PPR Bertrand Collomb - CCF - Lafarge - Total Fina Elf Claude Bébéar - Axa - BNP - Schneider Gérard Mestrallet - Axa - Casino - Saint Gobain Jean-Charles Naouri - AGF - Casino - CCF Jean-Louis Beffa - BNP - Saint Gobain - Vivendi Jérome Monod - Crédit Lyonnais - Suez-Lyonnaise des Eaux - Total Fina Elf Marc Ladreit de la Charrière - Canal Plus - Casino - L'Oréal 46 KORN / FERRY International Michel Bon Thierry Desmarest - Air Liquide - France Télécom - Lafarge - Air Liquide - Sanofi-Synthelabo - Total Fina Elf Pierre Bilger Yves Cannac Administrateurs ayant 2 mandats de sociétés du CAC 40 Alin Minc - PPR Albert Frère - Valéo - Alstom - Société Générale - Total Fina Elf - AGF - Danone - Société Générale - LVMH - Suez-Lyonnaise des Eaux André Lévy-Lang - AGF - Dexia Antoine Bernheim - Axa - LVMH Antoine Riboud - Danone - Renault Bernard Arnault - LVMH - Vivendi Bernard Esambert - Lagardère - Saint Gobain Christian Blanc - Cap Gemini - Carrefour Daniel Lebègue - Dexia - Thomson CSF David Dautresme - Axa - Casino Denis Kessler - BNP - Dexia Diethart Breipohl - AGF - Crédit Lyonnais Eric Licoys - Canal Plus - Vivendi Etienne Davignon - Accor - Suez-Lyonnaise des Eaux Francois Henrot - Carrefour - PPR Gerhard Cromme - Suez-Lyonnaise des Eaux - Thomson CSF Guy de Wouters - Cap Gemini - Valéo Guy Dejouany - Canal Plus - Société Générale Henri Lachman - Axa - Schneider Isabelle Bouillot - Accor - Saint Gobain Jacques Calvet - Axa - Société Générale Jean Gandois - Danone - Suez-Lyonnaise des Eaux 47 KORN / FERRY International Jean-René Fourtou - Axa - Schneider Jérome Seydoux - Accor - Danone Louis Schweitzer - BNP - Renault Lucien Douroux - Bouygues - Suez-Lyonnaise des Eaux Marcel Roulet - CCF - Thomson CSF Michel Rouger - Bouygues - Lagardère Michel Somnolet - L'Oréal - Sanofi-Synthelabo Nicolas Jachiet - France Telecom - Renault Noël Goutard - Alcatel - Valéo Patricia Barbizet - Bouygues - PPR Patrick Duverger - Accor - PPR Paul Dubrule - Accor - CCF Paul-Louis Halley - BNP - Carrefour Philippe Bourguignon - Canal Plus - Dexia Philippe Foriel-Destezet - Carrefour - Vivendi Philippe Houzé - Casino - CCF Philippe Jaffré - BNP - Suez-Lonnaise des Eaux Pierre Bellon - Air Liquide - Sodhexo Pierre Lescure - Canal Plus - Lagardère Pierre-Gilles de Gennes - Air Liquide - Sanofi-Synthelabo René Barbier de la Serre - Crédit Lyonnais - PPR René Thomas - BNP - Vivendi Robert Studer - Renault - Total Fina Elf Serge Kampf - Aventis - Cap Gemini Willy Stricker - Accor - Canal Plus Yves Barsalou - Crédit Lyonnais - Total Fina Elf 48 KORN / FERRY International Participations croisées LVMH et Vivendi : Bernard Arnault et Jean-Marie Messier Axa et BNP : Claude Bébéar, Jacques Friedman et Michel Pébereau Axa et Schneider : Claude Bébéar, Gérard de la Martinière et Henri Lachman, Didier Pineau-Valencienne Air Liquide et L'Oréal : Edouard de Royère et Lindsay Owen Jones Air Liquide et Sodexho : Edouard de Royère et Pierre Bellon BNP et St Gobain : Michel Pébereau et Jean-Louis Beffa St Gobain et Vivendi : Jean-Louis Beffa et Jean-Marie Messier Alcatel et Vivendi : Serge Tchuruk et Jean-Marie Messier BNP et Vivendi : René Thomas et Jean-Marie Messier BNP et Renault : Michel Pébereau et Louis Schweitzer Alcatel et Société Générale : Serge Tchuruk et Marc Viénot 49 KORN / FERRY International ANNEXES sur les sociétés du DAX 30 50 KORN / FERRY International Un exemple : participations en capital de Allianz (d'après le rapport annuel) Dans les sociétés du DAX 30 BASF BAYER Bayerische Hypo-und Vereinsbank BMW Commerzbank Daimler Deutsche Bank Deutsche Telekom Karstadt-Quelle Linde RWE SAP Schering Siemens Veba Viag Volkswagen 11.3% 5.5% 17.3% 1.3% 0.7% 1.6% 5.6% 0.2% 9.4% 12.5% 11.2% 1.4% 11.1% 3.4% 11.1% 8.7% 1.4% Dans les sociétés du CAC 40 Alcatel Aventis Axa BNP Paribas Carrefour Crédit Lyonnais France Télécom L’Oréal LVMH Renault Schneider Société Générale Suez-Lyonnaise des Eaux Total Fina Elf Vivendi 0.6% 1.9% 0.3% 2.8% 0.7% 6% 0.3% 0.3% 0.5% 1% 2.1% 2.9% 0.7% 0.6% 0.9% 51 KORN / FERRY International Mandats par administrateur Administrateurs ayant 8 mandats de sociétés du DAX 30 Henning SCHULTE-NOELLE BASF (Pr directoire Allianz) Dresdner Bank Linde Man Munich Ré Siemens Thyssen Krupp Veba Administrateurs ayant 6 mandats de sociétés du DAX 30 Karl-Hermann BAUMANN Allianz (Pr conseil Siemens) Deutsche Bank Linde Schering Siemens Thyssen Krupp Bernhard WALTER (Pr directoire Dresdner Bank) Daimler Chrysler Degussa-Hüls Deutsche Telekom Henkel Lufthansa Thyssen Krupp Administrateurs ayant 5 mandats de sociétés du DAX 30 Klaus LIESEN Allianz (Pr conseil Ruhrgas) Deutsche Bank Preussag Veba Volkswagen Hermann Josef STRENGER (ex-management Bayer) Bayer Commerzbank Degussa-Hüls Linde Veba 52 KORN / FERRY International Administrateurs ayant 4 mandats de sociétés du DAX 30 Diethart BREIPOHL Allianz (ancien management Allianz) Hypo- und Vereinsbank Karstadt Quelle RWE Rolf BREUER (Pr directoire Deutsche Bank) Lufthansa Munich Ré Siemens Veba Martin KOHLHAUSSEN (Pr directoire Commerzbank) Bayer Karstadt Quelle Linde Schering Manfred SCHNEIDER (Pr directoire Bayer) Allianz Daimler Chrysler Metro RWE Alfons TITZRATH (Pr conseil Dresdner Bank) Allianz Dresdner Bank Munich Ré RWE Bernd VOSS (membre directoire Dresdner Bank) Karstadt Quelle Preussag Veba Volkswagen 53 KORN / FERRY International Participations croisées Allianz et Hypo-Vereinsbank : Diethart Breipohl et Albrecht Schmidt Allianz et Dresdner Bank : Henning Schulte-Noelle et Alfons Titzrath Allianz et Siemens : Henning Schulte-Noelle et Karl-Hermann Baumann, Heinz-Joachim Neubürger Bayer et Commerzbank : Hermann-Josef Strenger et Martin Kohlhaussen Degussa-Huels et Veba : Peter Weber et Hans-Michael Gaul, Helmut Mamasch, Ralf Blauth, Ulrich Hartmann Dresdner bank et Munich Ré : Alfons Titzrath et Hans-Jürgen Schinzler Dresdner Bank et RWE : Alfons Titzrath et Dietmar Kuhnt Dresdner Bank et Thyssen Krupp : Bernhard Walter et Heinz Kriwet Man et Thyssen Krupp : Klaus Götte et Ekkerhard Schulz Siemens et Thyssen Krupp : Karl-Hermann Baumann et Heinz Kriwet Administrateurs français siégeant dans les sociétés allemandes du DAX 30 Bertrand COLLOMB (Lafarge) Allianz Jean GANDOIS Siemens Michel PEBEREAU Dresdner Bank 54 KORN / FERRY International Administrateurs allemands siégeant au sein des conseils des sociétés du CAC 40 Manfred BISCHOFF (Pr du directoire de Daimler Chrysler Aérospace) Lagardère Rolf BREUER (Pr du directoire de Deutsche Bank) Saint Gobain Diethart BREIPOHL (ex-management de Allianz) AGF Crédit Lyonais Gerhard CROMME (Pr directoire de Thyssen Krupp) Suez-Lyonnaise des Eaux Thomson CSF Hans FRIDERICHS (administrateur de sociétés - ancien de Dresdner Bank) Schneider Martin FRUHAUF (Vice Pr du conseil de Aventis) Aventis Hubert MARKL (Pr de Max Planck-Gesellschaft) Aventis Günter METZ Aventis Thomas MIDDELHOF (Pr de Bertelsmann) Vivendi Axel von RUEDORFFER (membre du directoire de Commerzbank) Crédit Lyonnais Jürgen SARRAZIN (ancien Dresdner Bank) Total Fina Elf Henning SCHULTE-NOELLE (Pr du directoire de Allianz) AGF Hans-Jürgen SCHINZLER (Pr du conseil de Ergo Versicherungsgruppe) Aventis Ron SOMMER (Pr du directoire de Deutsche Telekom) France Télécom Bernhard WALTER (Pr du directoire de DRESDNER BANK) BNP Paribas 55