Détails des interventions - Amazonian Museum Network

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Détails des interventions - Amazonian Museum Network
Détails des interventions
Mme Rolande CHALCO-LEFAY a rappelé le fort engagement de la Collectivité Territoriale de Guyane,
par l’action de son Président Rodolphe ALEXANDRE, qui a fait de la coopération et de la dynamisation
des échanges politiques, économiques, culturels et sportifs avec le Plateau des Guyanes, l’une de ses
priorités. Cette volonté est renforcée par le PO Amazonie, programme européen dont la CTG est
autorité de gestion et qui a pour objectif majeur de contribuer à l’insertion de la Guyane dans son
environnement régional, et de favoriser son développement et celui des pays limitrophes grâce à une
coopération transfrontalière efficace et à des moyens de stratégie conjoints. Musées d’Amazonie en
réseau s’inscrit pleinement dans cette démarche et Mme Chalco-Lefay se félicite de la dynamique
mise en place depuis maintenant 5 ans.
M. Paul LEANDRI a salué ce projet exemplaire de coopération entre les musées du plateau des
Guyanes, qui remporte un vif succès depuis 5 ans. Ce programme permet de mieux connaître et de
faire connaître les aspects communs des cultures qui caractérisent nos territoires d’appartenance.
Après avoir rappelé les thématiques des deux dernières rencontres transfrontalières, il présente le
thème de ce nouveau séminaire : la logique participative au cœur de la muséologie contemporaine.
Nos patrimoines sont un formidable vecteur de mobilisation de nos peuples car la culture est au
centre de la construction de nos identités particulières, partagées et spécifiques. Sur le plateau des
Guyanes tout particulièrement, nous sommes invités à penser l’interculturalité et le plurilinguisme.
M. Leandri rappelle que nous ne sommes pas que des conservateurs d’un patrimoine ancien mais
bien des consolidateurs d’un patrimoine vivant. Nous visons l’appropriation de ce patrimoine vivant
par nos publics qui ne sont pas seulement des visiteurs mais aussi des acteurs de nos musées.
Les musées sont bien un lieu du lien social interculturel au service d’une valorisation d’un patrimoine
commun.
Il propose de se doter d’un comité scientifique pour bénéficier du regard externe de scientifiques.
Pour conclure, M .Leandri invite les participants à poursuivre l’effort vers la professionnalisation, la
mutualisation de nos connaissances, la consolidation de nos pratiques à l’échelle du plateau des
Guyanes.
Mme Marie-Paule JEAN-LOUIS a ensuite introduit le séminaire en rappelant l’historique et les
objectifs du programme ainsi que les dernières rencontres. Ce nouveau rendez-vous met l’accent sur
l’interculturalité et les initiatives participatives menées sur le plateau des Guyanes. La notion de
participatif, aujourd’hui largement encouragée pour changer le rapport des musées avec leurs
publics, recouvre un large panel d’actions et d’acteurs que ce séminaire propose de mettre en
lumière. Les projets participatifs permettent-ils de mieux appréhender, de mieux comprendre et
partager la culture de l’autre ? Peuvent-ils devenir un outil de cohésion sociale, de reconnaissance et
de valorisation de l’interculturalité, un moyen efficace de diffusion des cultures et des patrimoines?
A l’heure où les musées cherchent de nouveaux moyens pour fidéliser les publics et en acquérir de
nouveaux, le participatif est devenu un véritable enjeu de médiation. Qu’en est-il pour notre
territoire ?
Art et histoire Wayana et Aparai: projets culturels participatifs aux musées et aux villages.
Mme Alegria BENCHIMOL a commencé en présentant un projet participatif sur la documentation de
la collection aparai du Museu Paraense Emílio Goeldi (1915/1937).
L’objectif de ce projet est l’étude de la documentation d’une collection aparai composée de 206
objets réunis par les allemands Otto Schulz-Kampfhenkel et Curt Nimuendajú. Les collections
ethnographiques du musée constituent des sujets de recherche privilégiés pour les étudiants,
chercheurs, artistes et conservateurs, mais aussi pour les peuples dont elles sont issues.
Elles sont un terrain fertile pour la production de monographies, mémoires, thèses, livres et articles.
Plusieurs disciplines sont également sollicitées pour l’étude de ce fonds : histoire, anthropologie,
ethnologie, sciences de l’information, biologie, zoologie.
Mme Lucia HUSSAK VAN VELTHEM a poursuivi par la présentation de deux programmes : un premier
qui favorise l’accès aux documents et aux collections des musées aux populations amérindiennes et
un second visant l’enregistrement et la documentation des répertoires musicaux de 6 sociétés
amérindiennes.
Ce programme d'inscription, de systématisation et de diffusion des savoirs est mené avec la
participation directe des wayana et aparai, sur le long terme. Le projet rassemble 15 jeunes
chercheurs amerindiens des villages : Suïsuimëne, Jolokoman, Kurupohpano, Bona, Murey,
Maxipurimoh et Parahparah. Les thèmes choisis sont:
• production, transformation et consommation des aliments,
• art graphique et savoir- faire technique: vannerie...
• la mythologie, les rituels,
• l´écriture de la langue.
La formation des jeunes chercheurs wayana et aparai se poursuivra au sein d´un nouveau
programme: Plano de Gestão Territorial (Plan de Gestion du Territoire).
M. Jean-Paul FEREIRA, maire de la ville d’Awala-Yalimapo a présenté la politique culturelle de la
commune d’Awala-Yalimapo. Il a tout d’abord insisté sur le paradoxe que vit la communauté Kali’na
entre la reconnaissance d’une culture millénaire, d’une occupation ancestrale du territoire français et
la non-reconnaissance officielle de l’Etat français.
60% du budget communal est consacré à la politique culturelle, un choix assumé depuis 15 ans, qui
permet de faire valoir leur patrimoine matériel et immatériel.
M.Fereira rappelle certaines dates historiques qui ont forgé la particularité de cette commune,
labellisée en 2013 « territoire d’art et d’histoire » par le Ministère de la culture.
La mise en place d’une commission mixte, réunissant les chefs coutumiers, les représentants de la
communauté et les élus de la municipalité, ainsi que la mise en place du Conseil de la Culture
s’inscrivent dans la continuité de l’engagement à poursuivre cet effort de manière concertée, de
contribuer à la reconnaissance de la culture amérindienne kali’na de Guyane, au travers de
l’expérimentation originale menée sur le territoire de Awala-Yalimapo.
M. Thomas MOUZARD a présenté le programme d’inventaire participatif de la commune d’AwalaYalimapo comme une action collective menée sur 2 ans, qui comprenait plusieurs types d’opérations
interdépendantes :
- la documentation et l’inventaire
- la formation et l’insertion professionnelle
- l’écriture du dossier de candidature pour le label « ville d’art et d’histoire »
- le projet scientifique et culturel d’un futur Centre d’Interprétation
- l’animation culturelle
Ce projet d’inventaire participatif s’inspire de l’Ecomuséologie (née dans les années 1970 et
appliquant un processus de prise en charge de son patrimoine par une communauté sur un territoire
donné). On oppose à la triade « Musée / Collections / Conservateurs », la triade « Territoire /
Patrimoine / Communautés » pour atteindre un idéal de démocratie culturelle.
La méthodologie était de se référencer à l’Inventaire Général mais le partenaire du projet, le service
régional de l’inventaire fonctionne de manière topographique. La commune d’Awala-Yalimapo
n’ayant pas de cadastre, cette méthode topographique n’était pas adaptée.
La volonté de la commune était de faire émerger des compétences locales, d’où le recrutement de 4
jeunes et 2 anciens. Cette équipe de 6 personnes s’est lancée dans son propre réseau social de
parenté pour collecter des informations et travailler sur différentes thématiques (se guérir, se vêtir,
se loger, ses croyances, ses rites funéraires…). Ce processus est long et passe par la communication
et la confiance.
Mme Josy JOSEPH a elle présenté la politique culturelle de la commune dans le cadre du label « ville
ou pays d’art et d’Histoire ». En décembre 2013, obtention du label Pays d’Art et d’Histoire attribué
au Pays des estuaires Maroni-Mana, territoire transfrontalier de Guyane et du Suriname, représenté
par la commune d’Awala-Yalimapo en partenariat avec le village de Galibi. En juillet 2014: signature
de la convention Pays d’Art et d’Histoire entre l’Etat et la commune d’Awala-Yalimapo, qui formalise
un partenariat pour 10 ans et un accompagnement financier pendant 5 ans, un soutien scientifique
et technique pour la mise en place des axes structurants du projet culturel du Pays des estuaires
Maroni-Mana.
Mme Jospeh précise que le dispositif de coopération transfrontalière est un moyen de transmission
et de partage. Le pays des Estuaires Maroni-Mana est le 1er Pays d’Art et d’Histoire transfrontalier
extra-européen parmi les 184 VPAH1. Le projet culturel du Pays des estuaires Maroni-Mana est de
prolonger et renforcer les acquis de la politique culturelle, en s’appuyant sur les savoir-faire et
l’oralité qui restent des forces vitales à disposition, de faire connaître un patrimoine culturel encore
trop méconnu pour développer une offre de qualité, de prolonger les partenariats, développer une
coopération avec les institutions culturelles et administratives surinamaises, et surtout d’impliquer
les acteurs associatifs et habitants.
Un service de promotion et de valorisation de l’architecture et du patrimoine est créé en avril 2016
et une étude pour la création du Centre d’Interprétation de l’Architecture et du Patrimoine, la
Maison des Estuaires, est lancée en partenariat avec le CAUE2.
Programmation de promotion et d’animations culturelles: évènements culturels, participation aux
journées nationales, rendez-vous du patrimoine
Préfiguration du 1er projet transfrontalier, le projet pila, qui vise la sauvegarde d’un patrimoine
culturel maritime. L’ambition est aussi de faire découvrir un art de naviguer, propre à un groupe de
population et qui complètera le patrimoine de la Guyane, du Suriname et de la France.
M. Patrick LACAISSE a dressé un inventaire des expériences participatives et collaboratives de
Chercheurs d’art.
Il revient sur l’historique de l’association et du site. Cela fait 30 ans qu’il vit en Guyane. Il a
expérimenté l’immersion complète comme source d’inspiration pour son art. Il a rencontré les
artisans de la région de Mana (tailleurs, sculpteurs, constructeurs de pirogues, production
céramique…) et de cette rencontre est née l’association « Chercheurs d’art ». Composée de 5 artistes
au début, ils sont 150 aujourd’hui : enseignants, chercheurs en sciences humaines, ethnologues,
anthropologues… Les écoles sont les premiers lieux d’exposition. Le Centre d’Art (le Carma) est
inauguré en 1994. La manière « villageoise » d’aborder les choses se retrouve dans la scénographie.
C’est un accrochage « comme à la maison » qui diffère de la muséographie classique. L’association a
mis en place de nombreux ateliers scolaires où les cultures locales sont au cœur de la pédagogie. Les
résidences d’artistes permettent la rencontre artistes / artisans locaux. L’ancrage territorial et social
du Carma est très important.
M. Lacaisse présente de nombreux projets participatifs et interculturels dont celui de « la route de
l’Art » : 150 artistes et artisans, 50 sites, 1 ouvrage publié.
L’objectif du Carma est aussi de désanonymiser ces arts « ethniques », ces arts « premiers »,
d’identifier les artistes locaux.
Plus que le « participatif », M. Lacaisse parle de « collaboratif » pour son travail artistique avec les
communautés.
Centre Kalawachi – Amérindiens de Guyane. M. Jean-Pierre JOSEPH, Association Kalawachi, Kourou
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Villes et Pays d'Art et d'Histoire
Conseil d’Architecture, d’Urbanisme et de l’Environnement
Le projet a pu se faire grâce à des financements européens et à des financements du CNES.
L’association a embauché de jeunes amérindiens Rmistes de Kourou pour les aider à la construction
du carbet. Ils ont d’abord commencé par une offre d’hébergement puis de restauration puis
l’Ecomusée s’est monté et aujourd’hui ils ont même une offre de séjour (à la journée ou sur plusieurs
jours). M. Joseph se positionne en professionnel du tourisme et parle de « produits ». Il évoque son
besoin de clientèle pour obtenir des recettes. En effet, ils sont autonomes dans leur fonctionnement.
Grâce à la proximité du CNES, de nombreux touristes viennent (lors des lancements de fusées).
Ils reçoivent aussi les scolaires qui viennent de toute la Guyane pour découvrir la culture
amérindienne.
Ils manquent de temps et de moyens pour former des médiateurs culturels.
Patrimoine et territoire : retour sur les cartographies en langues teko et wayãpi dans la commune de
Camopi. M. Damien DAVY, Observatoire Hommes/Milieux « Oyapock », CNRS, Cayenne.
Ce projet a été mené en collaboration avec les habitants teko et wayãpi et les agents du PAG3, sur
une durée de 4 ans (2009-2013) en s’appuyant sur 40 ans de travail anthropologique.
On peut parler de « géo-histoire », une histoire inscrite dans le territoire. Les villages amérindiens ont
gardé la mémoire des lieux : ils sont dépositaires de cette mémoire. Quand l’IGN4 décrit une
douzaine de toponymes, les teko eux en ont une trentaine pour le même territoire. L’IGN écrit ses
cartes en français et l’objectif de ce projet est de faire accepter qu’en Guyane il existe des zones où il
n’y a pas de toponymie en français mais uniquement en langues teko ou wayãpi. Ce sont certes des
langues « minoritaires », au même titre que le breton, le créole ou le basque mais elles sont tout de
même reconnues comme « langues de France ».
Une forte demande des populations pour la réécriture des cartes en langues teko ou wayãpi est
constatée. Le projet commence par le recensement puis la correction et la mise à jour des relevés
anciens.
L’équipe effectue des relevés de terrain avec des Teko et Wayãpi permettant un géo-référencement
de tous les toponymes. Des réunions participatives sont organisées sur des cartes intermédiaires
avec les anciens et les chefs coutumiers, avant de concevoir des cartes de travail avec les
géomaticiens du PAG. Puis l’équipe retourne sur le terrain pour des corrections et ultimes ajouts.
On arrive à la production et à la diffusion de ces cartes qui seront régulièrement actualisées (cogestion PAG-CNRS).
L’analyse linguistique des toponymes permet de savoir ce qu’ils disent :
• Criques, sauts, villages, lieux-dits, monts, bassins, anciens villages…
• Témoins d’épisodes mythiques (Caz calé ou Yeloikeae…)
• Mémoire historique (anciens villages amérindiens, mais aussi créoles)
• Des lieux magiques (takulu tsĩng…)
• Témoins d’anecdotes récentes
• Des références à la présence de végétaux et d’animaux
Ces cartes offrent un moyen aux habitants de Camopi de consigner leurs savoirs historiques et
géographiques. Elles permettent la transmission de la mémoire aux jeunes générations.
Elles peuvent également servir d’outils pour faire valoir les droits fonciers et d’usages.
Enfin, ces cartes apportent une meilleure connaissance commune de cette partie de la Guyane et
sont utilisées par le PAG, l’ARS5…
Ces cartes seront suivies d’ouvrages didactiques.
Conclusion de la journée par M. David REDON, modérateur.
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Parc Amazonien de Guyane
Institut National de l’Information Géographique et Forestière
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Agence Régionale de la Santé
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Une question s’est fait jour : un public acteur mais quel bénéfice pour ce public ? Pour l’institution
muséale elle-même ? Pour le territoire ?
Ces démarches participatives s’inscrivent dans un renouveau des institutions muséales, dans une
volonté générale de mieux redéfinir les politiques culturelles, de mieux associer la société civile aux
projets patrimoniaux.
Les populations du plateau des Guyanes sont dans une situation complexe sur un plan politique : des
appartenances multiples dans un cadre républicain qui a du mal à bouger au regard de la diversité
culturelle. Ce cadre complexe rend cette notion de participatif délicate.
On note un engagement social des musées, un rôle social du Patrimoine. Les lieux de patrimoine
deviennent des outils de développement social. La participation encourage l’émancipation du public.
Celle-ci peut se faire par une autonomisation des publics dans leur rapport au patrimoine. Apparaît
une réappropriation des moyens de transmission et du partage des savoirs dans un principe de
connaissance / reconnaissance.
Le lien participation / patrimoine vivant fait sens : rendre vivant le patrimoine, faire vivre les
collections font partie des missions des musées. Documenter une collection d’hier avec les
populations d’aujourd’hui pour leur donner du sens.
A l’échelle des territoires, on peut parler d’une approche économique: multiplication des
partenaires, multiplication des financements (par exemple le crowfounding), création d’emploi
culturel (art, tourisme, hébergement…) et développement de la formation professionnelle dans le
secteur culturel, association des acteurs locaux aux grands projets patrimoniaux (chantiers-écoles)…
La notion de « contre-culture » a été abordée : on note une inadaptation des normes françaises aux
lieux du patrimoine expérimentaux, l’indivisibilité de la République face à la diversité culturelle. C’est
pour cela que la participation peut engendrer de nouvelles formes de transmission.
Bibliographie recommandée :
- Serge Chaumier : http://sergechaumier.blogspot.com/
- Joëlle Le Marec : http://joellelemarec.fr/
- Hugues de Varine : http://www.hugues-devarine.eu/
Structures ressources :
- La FEMS : http://www.fems.asso.fr/
- L’OCIM : http://ocim.fr/
Visite du Centre d’Archéologie Amérindienne de Kourou Kalapa (CAAK) par Mme Bérénice VALOT.
La visite s’effectue en trois parties :
- Une exposition permanente présente l’origine des civilisations amérindiennes ainsi que leurs
modes de vie liées à l’habitat et à l’artisanat. Découverte de l’art rupestre et des méthodes
de l’archéologie.
- Un espace dédié aux expositions temporaires : lors de notre visite, il s’agissait d’une
exposition sur les chauves-souris.
- Un carbet situé après les bâtiments d’exposition, marque l’entrée dans l’espace protégé au
titre des Monuments Historiques
Le site des roches gravées de la Carapa comprend 5 bancs rocheux émergeant au milieu d’un secteur
marécageux nommé localement « pri-pri ». Trois sortes de tracés rupestres peuvent être
distinguées : les gravures figurées, les cupules et les polissoirs.
Le site est connu dès 1775 – au vu de la date gravée à même la roche – figure ensuite sur un relevé
cadastral en 1904. En 1992, il est localisé par le service régional de l’archéologie de Guyane et classé
aux Monuments Historique en 1993.
Le CAAK a été inauguré en 2014.
Ateliers participatifs, un tremplin pour la transmission intergénérationnelle du patrimoine. Le
Capitaine KAGO et son assistante Mme Nicole WALIKE ont présenté l’association Libi Na Wan et les
ateliers participatifs menés dans son cadre comme des tremplins pour la transmission
intergénérationnelle du patrimoine.
L’association a été créée en 1994 et a pour but de promouvoir l’art bushinenge et de permettre une
transmission des savoir-faire traditionnels.
Libi NaWan comprend 22 stagiaires et 4 formateurs. Ils ont recruté des personnes éloignées de
l’emploi (chômeurs de longue durée, bénéficiaires du RSA, jeunes de la Mission Locale de Kourou…) Il
y a eu des chantiers-écoles permettant à des jeunes de devenir par la suite sculpteurs. Actuellement,
l’association est porteuse de 2 chantiers d’insertion : 1 sur la menuiserie avec 12 salariés et 1 sur les
techniques constructives dans le bâtiment avec 10 salariés.
L’association a également une salle d’exposition, propose des ateliers et a publié un ouvrage sur l’art
bushinenge et leur savoir-faire traditionnel. Une gazette est régulièrement diffusée pour promouvoir
l’association au sein du village et pour valoriser le village saramaka auprès des habitants de Kourou.
Les participants posent la question de la protection et des droits de la propriété intellectuelle. Un
débat s’en suit sur le partage, la transmission d’un côté et la protection, la valorisation de l’autre.
Avec Internet et les réseaux sociaux, les motifs bushinenge peuvent être diffusés très rapidement. Il
faut se méfier de l’exploitation commerciale sans accord ni convention avec l’association. Un artiste
peut s’inspirer d’une œuvre mais pas la copier, d’où l’importance de la protéger.
Une autre vision est proposée : la diffusion, la commercialisation, la réappropriation de l’art tembé
par exemple peuvent être perçues comme positif pour la culture des noirs-marrons. Elle circule, elle
vit, elle se développe : ça évite de la figer, de la perdre. Marcel Pinas donne l’exemple de sa
fondation d’art contemporain : au lieu d’enfermer la culture marron dans un musée où peu de gens
se rendent, il préfère la réutiliser dans la vie quotidienne. Il souligne par ailleurs l’intérêt qu’elle soit
reprise ailleurs dans le monde.
L’association Libi Nawan et la fondation de Marcel Pinas proposent de travailler ensemble,
d’échanger et de s’inspirer l’un de l’autre.
Trop de protection peut aussi être contraignant : risque de figer l’art, d’empêcher la transmission et
le développement. La question des droits d’auteurs se pose : qui va recevoir l’argent ? C’est un art
qui appartient non pas à un artiste mais à toute une communauté.
Activités perles en village amérindien sur le haut Maroni : retour d’expérience sur une démarche
participative autochtone. Mme Rachel MERLET et Mme Janine OUEMPI, Association ADER, Cayenne
L’association Action pour le Développement, l’Education et la Recherche (ADER), créée en 2009,
soutien, développe et coordonne des stratégies de promotion du bien-être, de prévention du suicide
et d’accès aux soins afin d’assurer le vivre mieux des habitants des villages du haut Maroni tout en
respectant la culture et l’identité.
L’association essaye d’être à l’écoute des besoins exprimés et d’adapter les connaissances et les
expertises. Dans ces échanges, est apparu le besoin pour des femmes d’Antécume Pata et de Kayodé
de refaire des activités perles. Il s’agit d’impliquer les femmes dans les différentes étapes et activités
du projet, de favoriser le développement de ressources individuelles et sociales (ex : confiance et
estime de soi et lien social) comme la transmission intergénérationnelle, de valoriser les
connaissances et les compétences individuelles et collectives, de sensibiliser aux problématiques
locales notamment en santé. Cet atelier se veut inter et trans-générationnel et être un lieu
d’échange et de partage des savoirs et savoir-faire ainsi qu’un lieu d’écoute et de parole. Il est avant
tout animé et porté par les femmes qui sont accompagnées par une médiatrice d’ADER et une
personne- ressource du groupe.
Il concerne une vingtaine de femmes de 16 à 30 ans vivant dans les villages amérindiens d'Antécume
Pata et de Kayodé et notamment des femmes en souffrance psychique, mais aussi des femmes
personnes ressources et reconnues comme telles. Ces femmes maîtrisent et/ou s’intéressent entre
autre à l’art du tissage et de la perle et souhaitent échanger et partager autour de ces activités.
Les principes fondamentaux du projet sont :
- La participation
- La démarche ascendante
-
L’entente partenariale : L’objet d’une entente est de clarifier les modalités de collaboration
ainsi que les attentes et les engagements mutuels des deux parties. Elle repose sur 4
principes directeurs fondamentaux que sont les PCAP (Propriété, Contrôle, Accès et
Possession)
- La santé communautaire / le bien-être
- « Empowerment » (Processus qui confère aux populations le moyen d’exercer un plus grand
contrôle sur leur propre santé)
Le groupe de femmes a participé au marché artisanal de Maripasoula en juin 2015 pour exposer et
vendre leurs productions de perles.
Karnacampus ou la transmission du patrimoine carnavalesque guyanais à l’université. Mme Monique
BLERALD, Laboratoire MINEA, Université de la Guyane, Cayenne
L’association a été créée en 2015 et a pour but l’inscription au patrimoine immatériel de l’UNESCO
du personnage du Touloulou.
Le concept du carnaval présent sur le campus de l’université existe depuis 1996. Il s’inscrit
officiellement dans la programmation annuelle de l’université, participe aux enseignements sous la
forme de travaux pratiques dispensés dans le cadre du département des Lettres Modernes. Il
s’appuie sur le programme de recherche « Mémoire vivante des cultures guyanaises » développé au
sein du laboratoire CADEG. Cette pratique avant-gardiste n’est pas toujours bien perçue : perception
des collègues enseignants, regards des étudiants pas toujours en phase avec le carnaval, réticences
sur la musique, refus par rapport à certaines conceptions religieuses, contraintes administratives,
juridiques et financières… Il y a un travail de transmission à faire.
L’approche méthodologique est pluridisciplinaire : littéraire, historique, artistique, anthropologique,
géographique… Une réflexion est menée avec l’Ecole Supérieure de Professorat et de l’Education
(ESPE) sur la pratique didactique ou ethno-éducationnelle. Des questionnements se font sur le
fondement historique du carnaval, la disparition des chants de rue, l’évolution des costumes, la perte
de l’anonymat, l’apparition du Tololo, les enjeux économiques et touristiques…
Karnacampus permet de multiplier les partenariats avec d’autres institutions culturelles : le Musée
des cultures guyanaises, la DAC, la CTG, le MUCEM de Marseille et d’autres musées, d’autres
universités travaillant sur le carnaval (au Canada, en Louisiane…)…
Dans le cadre de l’Observatoire Régional du Carnaval, la caravane Karnacampus est passée dans
toutes les communes pendant le carnaval et a recueilli 6700 signatures. Tout doit être terminé fin
2017-début 2018.
Les voix de la ville, la mémoire orale au cœur du projet du Centre d'Interprétation de l'Architecture et
du Patrimoine. Mme Léa CASTIEAU, Service patrimoine-CIAP, Saint-Laurent-du-Maroni
Le CIAP a ouvert en janvier 2015 et a pour objectif de valoriser et restaurer le patrimoine, initier et
sensibiliser les habitants. Il diffère d’un musée, c’est plus une porte vers la ville, un outil de médiation
vers les habitants.
Pour bien comprendre le contexte de création du CIAP, Mme Léa Castieau fait une présentation
historique de la ville :
- L’avant-période coloniale : implantation de villages semi-sédentaires ;
- La période carcérale (1854-1953) : l’administration pénitentiaire va construire la ville et la
diviser en quartiers (le quartier officiel, le quartier carcéral et le village colonial pour la
réinsertion des forçats). En parallèle à cette période du Bagne, on a la ruée vers l’or : SaintLaurent devient une base avancée pour atteindre les placers du Maroni. Cette ruée vers l’or
amène une vie civile avec différents corps de métiers qui s’installent.
- Fin du Bagne : en 1953 la commune pénitentiaire devient une commune comme les autres
avec un maire et des élus. Le départ des forçats rassure les populations autochtones et
entraîne l’installation des amérindiens et des noirs-marrons.
La guerre civile au Suriname entraîne un exode massif de réfugiés : 12 000 personnes
s’installent dans la ville et dans des camps de réfugiés. La ville s’étend à la périphérie mais ces
quartiers initialement pensés provisoires n’ont pas accès à l’eau ou à l’électricité. La ville est difficile
à maîtriser et connaît un retard de développement urbain dans les années 1990.
La population ne cesse de croître : 3019 en 1962, 13 616 en 1990, 34 149 en 2007, 55 000 en 2016 et
plus de 140 000 en 2035. Le centre-ville est peuplé de créoles, asiatiques, métropolitains. Il
concentre les services, les commerces et l’administration. L’aménagement urbain est dégradé.
La population est très jeune (50% a moins de 25 ans), en grande précarité (50% des plus de 15 ans est
sans emploi). Aucune usine ou entreprise ne s’est installée : la ville est dépendante de Cayenne pour
l’approvisionnement et l’administration. De plus, une économie informelle voit le jour avec le
Suriname (à Albina). La précarité engendre un sentiment de repli et d’exclusion.
C’est dans ce contexte particulier qu’il a fallu créer le CIAP.
C’est en 2007 qu’une collecte d’archives orales est mise en place. Le but est de connaître le passé des
Saint-Laurentais, de se souvenir, de valoriser les langues locales et la parole de ceux qui n’ont pas
accès à l’écrit.
70 entretiens sont menés par 17 bénévoles qui ont été formés pendant une semaine par David
Redon de la DAC6. Le CIAP a réussi à avoir un panel de témoins variés (âge, communauté, sexe,
histoire…)
Cette collecte de témoignages étant très chronophage, l’idée de l’habitant enquêteur est arrêtée. Le
CIAP fait finalement appel à des professionnels pour la captation, la traduction, la transcription,
l’archivage, le montage…
L’exposition se tient dans la case 11 qui est une ancienne cellule collective où dormaient 70 forçats et
qui a été transformée en 1863 en cellules individuelles : dans chaque cellule on trouve un témoin. Les
cellules se composent de portraits photos fait par David Damoison, de captation sonore, d’objets
données par les témoins. Les témoins ont tous été d’accord pour donner leur témoignage comme
participation à la mémoire collective mais se mettre en scène a été plus compliqué pour eux.
Les autres cellules inoccupées sont réservées à la restitution des artistes en résidence. Cela permet
de faire du lien entre le patrimoine et l’art contemporain.
Dans les outils pédagogiques, le CIAP propose des audio-guides fait par « les Voix de la Ville » dans
lesquels les habitants racontent leur ville.
Depuis 2013, un service éducatif en partenariat avec le Rectorat, propose au jeune public la collecte
orale comme outil de médiation.
Plusieurs projets sont présentés : « Faisons parler notre histoire », « Femmes de Guyane »…
La fréquentation du CIAP pour cette 1ère année a été de 15 000 personnes.
Le défi est de s’assurer que le lien créé avec les habitants perdure et d’adapter le projet à l’évolution
de la ville. Un programme de recherche sur l’histoire contemporaine (par exemple sur la guerre civile
du Suriname) est mis en place dans cette optique.
Présentation de la Fédération des écomusées et des musées de société (FEMS), M. Benoît POITEVIN.
La FEMS est un réseau d’établissements innovants à but non lucratif impliqués dans l’économie
sociale et solidaire et le développement local. Ce réseau fédère des structures existantes ou en
préfiguration plaçant l’homme et le territoire au centre de leur projet et s’intéressant aux faits de
société tels que l’évolution du monde rural, les cultures urbaines, la recomposition des territoires, le
développement durable …
L’écomusée allie trois composantes (Population - Territoire - Temps) et sa mission est d’être le reflet
de leurs interactions passées, présentes et futures. Ses collections sont composées de biens
immobiliers, mobiliers, fongibles et immatériels.
L’objet est un témoignage des pratiques et des modes de vies. Il est le témoin d’une culture, d’une
activité - industrielle ou artisanale.
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Direction des Affaires Culturelles
Les musées dits de société sont apparus au cours des années 1990 dans la terminologie culturelle. Ils
ne se veulent alors ni de nouveaux musées ni les conservatoires de ce qui serait un nouveau
patrimoine. Ils désignent l'ensemble de ce qui s'intitule, en France, écomusées, musées d'Arts et
Traditions Populaires, musées d'Ethnographie, d'Histoire, d'Industrie ou musées de plein air. Plus que
centenaires pour certains (Musée breton, Quimper) ou en préfiguration (Maison des Cultures et des
Mémoires de la Guyane), ces lieux composent un panorama infiniment varié de la mémoire
collective.
En 2004, le réseau s’ouvre aux musées de synthèse, centres d’interprétation et toute autre
institution de valorisation patrimoniale à but non lucratif ayant l’homme et le territoire pour objet
quel que soit leur statut ou leur situation (existants ou en préfiguration).
Aujourd’hui, 123 membres soit 169 structures (écomusées, musées de société, centres
d’interprétation) composent le réseau.
La FEMS se positionne aussi comme :
- un organe de représentation ;
- une plateforme de travail collaboratif ;
- un organisme de formation agréé ;
- un centre d’expertise.
La FEMS est le premier et seul réseau national qui a été missionné et agréé par un Etat pour mettre
en place et gérer un processus de qualité pour les lieux de visite.
La FEMS en Guyane comprend aujourd’hui l’Ecomusée Municipal d’Approuague Kaw et le Musée
Alexandre-Franconie. Elle espère pouvoir mettre en place un réseau de sites dans toute la Guyane.
Collaboration with the community, M. Marcel PINAS, Contemporary Art Museum Moengo, Moengo
M. Marcel Pinas présente son Musée d’Art Contemporain de Moengo, la manière dont il utilise l’art
et la culture pour le développement de sa communauté et les projets collaboratifs réalisés.
Il insiste sur l’importance de la collaboration entre les partenaires à niveau égal et sur la participation
de la communauté.
Dans la communauté où vous travaillez, il faut obtenir les bonnes informations pour comprendre les
besoins de la communauté. Avant de lancer un projet, on se pose ces deux questions :
- Quel est l’objectif du projet ?
- Est-ce que le résultat correspond à des besoins de la communauté ?
En dehors de la communauté, les répercussions des projets touchent les finances, l’éducation et le
réseau.
Marcel Pinas présente plusieurs projets participatifs : le projet Marowijne qui a commencé en 2001
et le projet Moiwana.
Les artistes travaillant à Moengo sont inspirés par la culture marron, retournent à la source pour la
collecte d’informations, travaillent avec les habitants, conservent les traditions et vivent eux-mêmes
dans la communauté.
Le Centre essaye d’identifier les besoins de la communauté qui a souffert de la guerre civile :
- la criminalité a augmenté ;
- crise d'identité ;
- chômage ;
- discriminations ;
- stigmatisations.
En travaillant sur les besoins de la communauté, on a rencontré des difficultés :
- les habitants ne savent pas ce qu'ils veulent ;
- ils ne savent pas qu'il y a un problème.
La situation est très complexe et nécessite de travailler avec la communauté en utilisant sa propre
histoire.
D’autres projets participatifs sont présentés :
- Le TAS (Tembe Art Studio) ;
- Une installation de chaussures ;
- Des installations d'art dont des œuvres d’art en plein air.
Le centre d’Art Contemporain de Moengo a aménagé un restaurant (le Masanga) et des centres de
formation (Moengotapoe, Olivia-Olo, Ricanau-Mofo). Il propose également du mobilier design à la
vente et essaye de développer une offre touristique.
Les difficultés rencontrées sont essentiellement dûes :
- aux influences politiques (les politiques ne comprennent pas l’intérêt de collaborer) ;
aux influences de l'Église (les disciples ne sont pas autorisés à participer à des activités) ;
- au manque d’intérêt dû à la méconnaissance.
Le Centre a initié plusieurs festivals : le Festival de musique de Moengo, le Festival de Théâtre et
Danse de Moengo et le Festival des arts visuels de Moengo. Ce dernier a permis de former 750
enfants et 20 artisans. Il proposait 80 ateliers avec la participation de 12 artistes locaux, une peinture
de rue de 600 mètres, 4 lieux d’exposition, 52 artistes internationaux, 2 jours de séminaire, 30 stands
de nourriture et 35 représentations.
Ce festival a accueilli 12 000 visiteurs.
Les projets collaboratifs et participatifs entre la communauté et le centre ont des effets positifs sur
les habitants :
- la reprise de confiance en soi ;
- la réappropriation de la culture ;
- l’apprentissage de l’organisation ;
- le goût du succès ;
- le partage ;
- le fait de gagner de l'argent avec la culture.
La communauté peut s’exprimer à travers le centre d’art contemporain qui participe au
développement de celle-ci, à son bonheur et à sa durabilité.
Les objectifs futurs du Centre sont la création d’un studio d’enregistrement, la formation et le
recrutement de techniciens locaux, l’enregistrement de la musique et des spectacles sur le festival,
l’aménagement d'un espace de répétition extérieur pour le théâtre et la danse, permettre l’accès aux
répétitions et développer des compétences locales.
Le prochain Festival de musique de Moengo (en 2016) durera 3 jours et aura plus de 50% de
musiciens locaux.
Grâce aux fonds Prince Claus, le Centre va pouvoir améliorer la formation des employés, développer
le programme du musée et la gestion des collections, proposer un programme de résidence et
anticiper le prochain Festival de Moengo.
Le centre de recherche a pour but la conservation et le transfert des connaissances de la
communauté.
Le centre de recherche Kibii wi Koni ou comment la participation favorise la transmission, M.
Donovan PRAMY, Fondation Kibii
Pourquoi ce centre de recherche existe ? C’est la partie la mieux préservée de l'Afrique en dehors de
l'Afrique. Il permet d’éviter la perte de connaissance des traditions authentiques et de promouvoir
l’auto-identité noir-marron.
Kibii wi Koni préserve les traditions culturelles authentiques des Marrons, en augmentant la prise de
conscience de leur valeur auprès des jeunes générations et en rendant leur culture plus accessible à
un plus large public. L’objectif est de devenir un centre d'excellence dans le domaine de la
conservation du patrimoine matériel et immatériel de la culture marron grâce à la recherche, la
formation et l’expertise.
Le centre va développer la recherche, les archives et va s’engager dans le conseil et l’éducation.
L’impact de ses actions se traduit par :
- le développement d’une culture qui symbolise la survie ;
- la capacité de transmettre cette culture aux nombreuses générations suivantes ;
- des études pourraient être utilisées en tant que références ;
- se poser en exemple pour les autres pays ;
- Contribuer au plan stratégique de l'UNESCO.
Plusieurs partenaires (Prins Claus Fonds (Hollande), le ministère de la Culture au Suriname, Celos
(Suriname), Suralco (Suriname), VUB) soutiennent le centre. L’équipe est composée de
professionnels :
- Alex van Stipriaan (historien et restaurateur) ;
- Thomas Polime (anthropologue noir-marron) ;
- Olivia Cuncha (anthropologue au Brésil) ;
- Tom Vanwing (Professeur à Vrije Universiteit Brussel).
Le centre a pour projet de monter des Programmes d'échanges et une Université de Moengo.
“Foo na wataa fu dingi, fa sa gi dokisie wataa fu wasi sikin?”
Objets de musées - objets partagés : retours d’expérience. Mme Florence FOURY, Centre Régional de
Ressources Kaleda et Mme Lydie JOANNY, Musée des cultures guyanaises, Cayenne.
Le projet « Objets de musées-objets partagés » est né de la rencontre du centre de ressources Kaleda
avec le musée des cultures guyanaises et le musée Alexandre-Franconie lors du précédent séminaire
organisé dans le cadre de Musées d’Amazonie en réseau. Ces trois acteurs ont collaboré avec quatre
groupes d’adultes en formation de base à Apatou, Saint-Laurent-du-Maroni, Kourou et Cayenne dans
le but de les former à travers un projet patrimonial. Les participants ont reçu en parallèle une
formation en français valorisant leurs savoirs et leurs langues et une initiation à la muséologie. Il a
s’agit lors du premier semestre d’identifier des objets patrimoniaux, de composer une collection,
d’apprendre à l’inventorier à la manière d’un professionnel de musée et lors du second semestre de
documenter des objets de collections appartenant aux musées pour finalement réaliser une
exposition itinérante.
Cette intervention a montré le lien entre l’alphabétisation et le patrimoine culturel, la base commune
de leur démarche envers et avec les publics puis comment s’est déroulé le projet jusqu’à la
présentation des résultats.
Problématique de réappropriation du patrimoine archéologique amérindien autour du projet de
valorisation du site de Montravel. Mme Evelyne SAGNE, Service de l’environnement, de la recherche
et de l’éco-tourisme, Collectivité territoriale de Guyane, Cayenne.
Le législateur a dévolu aux Départements et donc maintenant à la CTG plusieurs compétences
stratégiques dans le domaine de l’environnement : la valorisation des espaces naturels et des
sentiers de randonnée.
Bien des sites "naturels" en Guyane témoignent de la dynamique présence de peuples amérindiens ,
comme par exemple à Rémire-Montjoly :
- Le Mont Mahury-Montagne à colin (Roches Gravées, hâches, poteries et peut être montagne
couronnée) ;
- Le sentier Mondélice-Vidal : histoire de l'esclavage et passé colonial : traces archéologiques
d'un village amérindien et vestiges de 2 à 3 habitations coloniales.
De nombreux sites patrimoniaux sont également présents à Rémire-Montjoly :
- 51 vestiges amérindiens :
31 sites d'habitats amérindiens ;
11 roches gravées ;
9 polissoirs ;
- 20 habitations coloniales.
Dans certains villages importants, on a retrouvé des tessons de céramiques, des ateliers de polissage
et des pétroglyphes. Une montagne couronnée a également été localisée à Rémire. Les sites
d’habitat des populations amérindiennes sont localisés dans divers lieux :
- Les cordons dunaires côtiers : par exemple l’Anse de Chemin, les Ames Claires, la Plage de
Montravel … ;
- Les berges du Mahury : par exemple les rives près du Dégrad des Cannes … ;
- Les sommets des collines ou monts en position stratégique défensive ou dominante : par exemple
la Montagne à Colin, le Mont Cabassou, la Montagne de Mahury, le Morne Coco, le Mont Caïa, le Site
à fossé du Mahury,.....
Des zones funéraires ont également été mises au jour.
La plus ancienne datation au radiocarbone relevée sur la commune de Rémire date autour de 1000
ans avant notre ère. Pour le territoire de Rémire-Montjoly, les résultats d’analyse radiocarbone
attestent d’une importante occupation de cette zone littorale du début de notre ère jusqu’à la
Conquête française (1664-1672). Les amérindiens ont longtemps résisté à l’invasion des français dans
ce secteur.
Des résistances amérindiennes à la disparition de la présence amérindienne sur Rémire-Montjoly : les
spécialistes ont dénombrés plus 74 ethnonymes en Guyane. Selon les estimations de 20 000 à 50 000
amérindiens vivaient là avant l'arrivée des colons. Plusieurs batailles ont eu lieu de mai à juillet 1653
et le départ des français date du 14 décembre 1653.
Les résistances à Rémire-Montjoly (1643/1653) se sont concentrées à Bimon, Taoua, Apoto,
Trompette, Noury...
Le site Mondelice-Vidal est un exemple de réappropriation par le public. Le service environnement
souhaiterait en faire un concept de “site mémoriel”. Aujourd’hui, malgré les 200 ans d’histoire de
l’esclavage, il n’existe aucun site mémoriel sur l’esclavage en Guyane.
Le parcours du site Mondelice-Vidal est né d’une élaboration participative et a été inauguré en juin
2015.
Le projet de Montravel comporte :
- des enjeux écologiques (espèces endémiques, paysage extraordinaire, géologie inédite) ;
- des enjeux patrimoniaux (archéologie amérindienne avec les polissoirs et poteries, les
vestiges de la période coloniale avec un projet de maison des gouverneurs) ;
- des enjeux sociaux : valorisation de la présence amérindienne.
Ce site accueille 7000 à 8000 visiteurs par an (site actuellement fermé).
Le projet consisterait à construire un chalet d’accueil, des espaces d’exposition (archéologie
amérindienne /histoire coloniale), une terrasse couverte, une boutique, un bureau, un local gardien,
une buvette et des équipements d’interprétation pédagogiques comme des panneaux, des bornes ou
des expositions ( sur la flore, faune, géologie, archéologie amérindienne, histoire coloniale,…), des
passerelles dans les arbres, une aire de pique-nique, un mini-accrobranche, un espace ludique et un
parking.
Pour animer le site, des ateliers seraient proposés au public, comme par exemple un atelier vannerie
animé par un amérindien.
Ce projet demande une dynamique de réappropriation. Pour cela, un travail autour de
représentations positives est en cours. La valorisation des sites est un atout pour la participation du
public et la préservation. L’appui des partenaires institutionnels est nécessaire.
Les espaces naturels et les sentiers de randonnées sont propices à une réappropriation dynamique et
ludique, complémentaire aux musées.
Approche participative sur la question de la gestion de la chasse au sein du Parc Amazonien de
Guyane. M. Bertrand GOGUILLON, Parc Amazonien de Guyane (PAG), Rémire-Montjoly.
La Guyane est un territoire multiculturel avec une interpénétration entre le périmètre du PAG et les
territoires de vie des habitants. Cette particularité amène tout naturellement à faire du participatif.
La charte du PAG met au cœur de son dispositif la prise en compte et l’implication des populations
locales pour adapter les politiques publiques. C’est une co-contruction avec deux mondes différents
qui se rencontrent : un mode occidental avec un outil de gestion étatique (même si une gouvernance
locale) et sa vision de la protection de la nature face à des populations locales qui ont une toute
autre perception de la nature. Le défi est donc de réussir à protéger la nature tout en veillant au
respect du mode de vie des habitants et à la sauvegarde d’un patrimoine naturel.
Le projet a débuté en 2009 en s’appuyant sur différents partenaires (OHM-CNRS7, ONCFS8 et les
communautés d’habitants) avec pour objectifs de connaître:
- les besoins en gibier (nourriture, culture, cultes) ;
- les pratiques de chasse (saisonnalité, effort de chasse…) ;
- les modes de gestion coutumiers des types de chasse ;
- l’état des populations de gibier.
Il faut conjuguer les réalités et les attentes du territoire avec les missions du PAG.
La chasse est une pratique nécessaire pour se nourrir (subsistance) mais est aussi une pratique liée à
la culture et aux rites cultuels pour les communautés locales.
Les missions du PAG sont d’assurer la préservation de l’environnement, la conservation des espèces,
de faire appliquer la réglementation, tout en préservant et valorisant les pratiques culturelles.
Le PAG recherche des solutions garantissant la préservation des espèces et l’équilibre écologique en
respectant les modes de vies des populations et assurant la durabilité des pratiques de chasse.
L’approche participative s’avère fondamentale pour ce projet.
Un vaste dispositif basé sur des enquêtes et des groupes de travail est mis en place, avec un objectif
de connaissances partagées et de sensibilisation des acteurs en présence (scientifiques,
gestionnaires, populations) à leurs attentes réciproques. Des agents du PAG issus des communautés,
ainsi que 22 enquêteurs recrutés sur l’ensemble du territoire ont pu recenser plus de 650 chasseurs
et plus de 5000 chasses. C’est la plus grosse base de données sur la chasse dans toute l’Amérique du
Sud. Cette participation s’est faite grâce à la confiance acquise en étant dans une animation
constante et dans une transparence totale avec les populations.
C’est pour cela que des temps de restitution intermédiaires ont été faits dans chaque village
permettant d’assurer une dynamique d’animation et de rendre plus concrets pour les habitants les
résultats attendus et leur utilité pour les prochaines étapes et la finalité du programme.
Il y a eu un véritable partage des interprétations et une co-construction des conclusions qui ont
ensuite fait l’objet d’une restitution finale plus large auprès des populations locales.
A la demande des autorités coutumières aluku et wayana, le PAG a été sollicité pour
l’accompagnement dans l’élaboration de propositions de mode de gestion prenant en compte leurs
modes de vie, leurs savoirs ancestraux et leurs règles coutumières.
Ce travail s’appuie sur les résultats des enquêtes relatives aux pratiques de chasse ; ceux-ci venant
illustrer des situations et nourrir ainsi les réflexions et discussions.
Ce n’est pas un rapport du PAG mais bien une contribution de la population locale pour bien prendre
en compte ses modes de vie et adapter les politiques publiques à celles-ci.
Un groupe de travail constitué d’une dizaine de personnes (chefs & chasseurs, hommes & femmes,
anciens & jeunes…) dans chaque village, a suivi des réunions mensuelles thématiques. Il y a ensuite
eu un partage des discussions inter-villages, une mise en commun des résultats par 2 à 3 grandes
réunions intercommunautaires puis une validation des propositions communes de gestion par les
autorités coutumières.
Les communautés sont acteurs et moteurs et les agents PAG mettent leurs compétences au service
des populations locales : médiateurs culturels issus des villages, équipe scientifique (écologie et
sciences humaines) et responsable de la protection des patrimoines. Ils interviennent comme
facilitateurs : préparation des réunions, animation et traduction, restitution, rédaction des
documents de référence…
Ce caractère participatif s’impose de lui-même et doit être considéré comme un facteur de réussite.
Il vient permettre une convergence de conceptions « différentes » et la co-construction de règles
d’usage de la nature.
En retour d’expériences :
7
Observatoire Hommes-Milieux – Centre National de la Recherche Scientifique
8
Office National de la Chasse et de la Faune Sauvage
- Compréhension/Confiance/ Appropriation ;
- Animations régulières ;
- Restitution / Transparence ;
- Partage des interprétations ;
- et co-construction des conclusions.
Cela demande du temps, de se former aux méthodes participatives, de s’entourer de compétences
en sciences sociales, d’adapter les méthodes de travail et de se mettre au service de la population.
Co-construction et réalisation de rencontres thématiques amérindiennes : l’exemple des rencontres
transfrontalières wayãpi (Guyane/Brésil). Mme Claire COULY, Parc Amazonien de Guyane, RémireMontjoly.
La terre indigène wayãpi, peuplée d’amérindiens de l’ethnie homonyme, de nationalité brésilienne,
se situe au sud du parc national brésilien montanhas tumucumaque, dans l’état de l’Amapa. Elle a
été délimitée en 1980 mais homologuée en 1996 (FUNAI9). Elle se compose d’environ 100 villages
(non fixes pour la majorité) et de 1200 habitants en 2014 (150 en 1973). Le territoire mesure environ
6000 km2 (600 000 hectares soit 1/5ème du PAG). Des liens historiques de parenté existaient déjà
entre le wayãpi de Guyane (vivant le long de l’Oyapock et de la Camopi) et du Brésil. Ce projet de
rencontre transfrontalière est une demande locale. Le PAG s’est positionné en appui et en relai, sous
réserve d’un projet entre associations amérindiennes et d’une co-construction de projet. Ce travail
de médiation et de co-construction s’est fait sur 6-8 mois : des réunions sur Camopi, recherche de
financement, contact avec les partenaires brésiliens, l’envoi du projet aux associations brésiliennes,
démarches pour obtenir les passeports…
Pendant les réunions de préparation, on détermine les thématiques qui seront abordées aux
rencontres transfrontalières :
- Culture: transmission de la culture entre générations/artisanat et savoirs associés/ kusiwa/ histoire
des Wayãpi/ danses, chants et musique/école et culture
- Renforcement politique : autonomie et gouvernance/associations culturelles
amérindiennes/chercheurs amérindiens
- Santé: maladies/ pollution de l’eau/orpaillage/problèmes liés à l’alcool /rapport à la ville
- Terre et environnement: situation foncière et accès aux ressources naturelles/cartographie
participative/abattis et savoirs associés.
Le voyage s’est déroulé du 17 novembre au 2 décembre 2015. Pendant ces 8 jours en terre indigène
wayampi, ils ont visité 3 villages. Les journées se composaient de réunions thématiques pour un
échange d’expérience en matinée et des activités dans l’après-midi. Tout a été capté et filmé. Les
wayampis ont joué le jeu.
L’équipe a reçu un très bon accueil des Wayãpi, de la Funai et des associations.
Les Wayãpi ont apprécié la diversité des thématiques abordées et les gens rencontrés, plus
largement que le cercle familial habituel. Il y a une forte demande par les 2 groupes de pérenniser
ces échanges pour la conservation de la culture. Ils souhaitent se réunir à nouveau pour pérenniser
ce genre de rencontres en alternant des visites en Guyane et au Brésil. L’outil vidéo s’est révélé très
efficace : les films ont été diffusés au sein de chaque village pour rediscuter des rencontres.
Les difficultés rencontrées :
- difficulté à identifier les bons contacts (dans les associations amérindiennes au Brésil et dûes
au turn over de la Funai)
- problèmes liés aux moyens de communication (Macapá/TIW) et à la langue écrite différente
- besoin d’accompagnement des acteurs locaux pour le montage du projet
- nombreux changements dans les participants de Camopi et Trois Sauts, désistements au
dernier moment.
- Problème de la participation des femmes (en raison des gardes de bébés)
- Difficulté à mobiliser les gens pour refaire leur passeport
9
Fondation nationale de l'Indien
- Organisation de terrain chronophage (PAG)
- Gestion compliquée des dépenses au Brésil (régie du PAG)
Les perspectives :
- Prévision de la venue d’une délégation Wayãpi sur Oyapock en février 2017 autour des
thématiques ciblées (invitation)
- Intérêt des wayana, voire des Teko de participer à ces rencontres thématiques
(danses/chants)
- Quel partenariat pour appuyer ce type de rencontres de façon pérenne et alternée?
Perspectives et politiques participatives pour la Maison des Cultures et des Mémoires de Guyane10.
Mme Isabel NOTTARIS, Maison des Cultures et des Mémoires de Guyane, Collectivité territoriale de
Guyane, Cayenne
La MCMG est un musée du XXIème siècle, actuellement encore en gestation, mais qui se projette dans
l'avenir. Les principes fondamentaux de la MCMG qui sont inscrits dans le PSC11 et dans sa charte
déontologique sont : un public cible qui est le public jeune de la Guyane et ancrer la MCMG dans une
réalité territoriale complexe qui est celle des publics éloignés et empêchés.
Par muséologie participative, nous parlons à la fois d'interactivité et d'appropriation des contenus par
différents publics et plus particulièrement ceux qui en sont les plus éloignés (pour des raisons
diverses). Il s'agit donc de créer du lien entre le contenu du musée et ses publics : oser, inviter à créer
la rencontre.
La MCMG compte s’inspirer de la mission « Vivre ensemble », créée en 2004 et pilotée par le
ministère de la Culture et de la Communication. L'objectif est d'aller à la rencontre des publics peu
familiers des institutions culturelles et d'amplifier la synergie entre les établissements culturels afin
d'établir une politique commune d'élargissement des publics et ainsi lutter contre les discriminations
dans le domaine de la culture. Par le biais de la mutualisation des ressources et des contacts, les
établissements travaillent avec des personnes–relais intervenant dans le champ social. En se
penchant sur les difficultés de publics très variés et en adaptant leur offre pour mieux les accueillir.
Le numérique avec les réseaux sociaux et les plateformes de partage de contenus constituent autant
d'outils potentiel d’appropriation du contenu de l’exposition par les visiteurs. C'est aussi la possibilité
pour eux de s’exprimer, de communiquer, de créer des contenus qui viennent compléter le propos
de l’exposition. Ils participent ainsi à la médiation en créant eux-mêmes des contenus.
Le moyen d'allier les deux outils précédent : la mission vivre ensemble et le numérique est l’un des
objectifs possible de la narration transmedia. Il s'agit de créer une expérience coordonnée et unifiée
pour le visiteur. Ces dispositifs permettent un engagement qualifié et important de la part des publics
visés.
Ces trois dispositifs participatifs (Vivre Ensemble, réseaux sociaux et le transmedia) s'appuient sur
une forte composante sociale : la possibilité de commenter, de partager son expérience. C’est une
première porte pour entrer dans le musée.
L'interculturalité comme facteur d'inclusion scolaire : l'exemple des arts amérindien, bushinenge et
hmong. Mme Isabelle HIDAIR, ESPE12 de Guyane, Cayenne.
Une quinzaine d’universitaires en sciences humaines et lettres se sont réunis pour créer un
laboratoire de recherche : MINEA (Migration – Interculturalité – Education en Amazonie) qui devrait
voir le jour le 1er janvier 2017.
Ils ont identifié 3 axes de recherche, voués à évoluer avec le temps :
- Education, inégalités, exclusion
- Construction identitaire, interaction
10
Ci-après dénommée MCMG
Projet scientifique et culturel
12
Ecole supérieure du professorat et de l'éducation
11
- Représentation, préjugés, émergence de discriminations
Dans le cadre de ce laboratoire en cours de création, Mme Isabelle Hidair présente un projet de
recherche mené avec des étudiants du Master II sur le thème de l’interculturalité comme facteur
d’inclusion scolaire. Elle rappelle tout d’abord que l’Education Artistique et Culturel (EAC) fait
l’unanimité et cite une phrase d’Emmanuel Fraisse de 2008 : « l’art à l’école modifie les perceptions
et les comportements face aux savoirs, aide à construire une méthode différente des méthodes
d’apprentissage et contribue à l’acte d’apprendre à penser ». Les 3 piliers fondamentaux de l’EAC
sont la rencontre avec un artiste, la pratique artistique et culturelle, la connaissance de l’histoire des
arts. L’EAC a une influence positive sur les aptitudes rédactionnelles, la compréhension d’un texte et
même sur le dossier scolaire global. Un rapport de 2013 sur l’EAC met en évidence que malgré la
richesse et la diversité des propositions EAC, il y a un manque de moyens financiers, un manque de
motivation des professeurs, peu de jeunes qui se sentent concernés et une difficile coordination sur
le terrain. En Guyane, en plus de ces contraintes générales, il faut aussi faire face aux inégalités
d’accès à la culture et aux représentations négatives sur les apports culturels (perçus comme une
simple distraction).
Le projet s’est déroulé dans une école de Cayenne avec une classe de 22 élèves dont 4 en situation
de handicap. Les élèves ont travaillé sur les arts amérindiens, bushinenge et hmong en respectant à
chaque fois les 3 étapes liées à l’EAC : l’histoire (re-contextualiser), des exercices pratiques (faire le
lien entre les arts et les autres matières enseignées) et la pratique culturelle et artistique. Le but est
de se réapproprier les techniques, les savoir-faire, de créer par soi-même. C’est cette situation
d’apprentissage qui permet à l’enfant de rencontrer la culture à travers une discipline scolaire.
Le constat de cette expérience en classe : une émotion esthétique palpable, une baisse des
moqueries, une amélioration des échanges et une hausse de curiosité. L’Art est porteur d’histoire et
d’identités. Il permet de mieux comprendre les différences culturelles.
Les outils mis en place et expérimentés par les Intervenants en Langue Maternelle13. Mme Patricia
Prost- Tabournel, ESPE de la Guyane et M. Didier Maurel, Académie de la Guyane, Cayenne
Ces deux intervenants travaillent sur la formation des ILM pour la partie didactique, pédagogique et
les outils en classe.
Le patrimoine s’insère souvent dans les classes des ILM.
Un rappel historique est fait : le dispositif est né en 1998 grâce au partenariat entre le rectorat de
Guyane et le centre d’étude des langues indigènes d’Amérique. La loi Aubry sur les contrats emplois
jeunes a permis à l’époque de recruter des médiateurs bilingues.
Depuis, le dispositif a évolué : on est passé de 16 à 41 classes. 9 langues et 2500 élèves ont été pris
en charge par les ILM. 25 écoles sont concernées, réparties sur tout le territoire.
Les ILM pour être bien identifiés doivent marquer leur porte (panneaux en langue maternelle ou
travaux des élèves affichés) et doivent utiliser des objets de culture intégrés dans le quotidien des
élèves (calebasse, pirogues, poupons noirs…).
La maîtrise d’ouvrage de ce projet de 1998 à 2007 a été confiée à l’IRD14 puis un audit a démontré
que les ILM avaient des lacunes en pédagogie. Le rectorat a ensuite récupéré la maîtrise d’ouvrage et
a travaillé sur la méthodologie à appliquer, en s’inspirant d’un ouvrage méthodologique des années
1980 imprimé au Chili et écrit par des auteurs colombiens. Les habitudes alimentaires et les
représentations du monde des élèves sont différentes. Le stock lexical mis à disposition des élèves
est corrélé à l’expérience de vie qui diffère selon sa culture.
3 exemples sont présentés :
- La méthode de l’énumération
Les ILM à la place de l’énumération traditionnelle, utilise le principe d’itération de l‘unité et le
principe « décomposition-composition ». Par exemple, l’énumération palikur désigne le chiffre 8
comme « 7 et 1 », le chiffre 9 comme « 7 et 2 ». L’énumération teko utilise le principe d’énumération
13
14
Ci-après écrits ILM
Institut de recherche pour le développement
d’unité (chaque mot dit « le précédent plus un »). Souvent à l’école classique, les élèves de
maternelle récitent les nombres par cœur sans comprendre l’énumération. Cette méthode permet
de mieux comprendre. L’accès au contrôle sémantique du nombre est facilité.
- Les représentations dans le temps
Les calendriers des différentes communautés ne sont pas tous les mêmes que notre calendrier
occidental. Par exemple, les wayanas ont des repères visuels ou auditifs pour rythmer la vie agricole
(le cri de la cigale va annoncer la coupe de certains arbres). Les ILM vont utiliser des repères
pertinents pour les élèves (saison des pluies, saison sèche, repères agricoles. De même, le découpage
des jours est différent : il y a 9 périodes sur une journée.
- L’utilisation des entités graphiques
En utilisant des graphiques palikur par exemple (à base d’arabesques), les élèves apprennent les
gestes de l’écriture. Cette motricité fine permet de travailler les gestes scripteurs.
Les outils pédagogiques créés pour les ILM sont accessibles sur le site du rectorat et bientôt sur le
site de Canopé15 (ex CNDP16).
Synthèse, conclusion par M. David REDON, Direction des Affaires Culturelles de Guyane et M. Michel
DISPAGNE, laboratoire MINEA, Université de la Guyane
Les deux modérateurs ont choisi de proposer une conclusion collective, en invitant Benoît Poitevin
de la FEMS à nous livrer son regard extérieur et en invitant tous les participants à réagir autour de
cette notion de participation.
P : Partage, partenariat, potentialité, pratique, passeur
A : Action, apprentissage
R : Retour, réunion, RDV, réactivité
T : Territoire, temporalité, transmission
I : Implication, identité
C : Construction, compréhension, communication, création
I : Intérêt
P : Passage, pédagogie, patience
A : Association, adaptabilité, accueil
T : Tension, temporalité, transmedia, transfrontalier, transmission
I : Illusion, invitation, ingéniosité
O : Opportunité, offrir
N : Narration, numérique
S : Savoir-faire, savoir-être, séduction
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https://www.reseau-canope.fr/
Centre national de documentation pédagogique