LE PATRIMOINE IMMOBILIER DES ANNÉES 50 – 70 : de la

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LE PATRIMOINE IMMOBILIER DES ANNÉES 50 – 70 : de la
LE PATRIMOINE
IMMOBILIER DES ANNÉES 50 – 70 :
de la stratégie à l’action.
SAINT-NAZAIRE, les 6 et 7 octobre 2015
MERCREDI 7 OCTOBRE
ATELIER N°8 « Le choix de l’accompagnement global : du repérage à
l’évaluation post-travaux »
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PRÉSIDENCE NANTES MÉTROPOLE
Jonathan LEFEBVRE Nantes Métropole
Benoît BELLAMY Nantes Métropole
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INTERVENANTS
Soraya DAOU, ANAH
Gladys GRELAUD, Brest métropole océane
Chloé CROUZET, Grenoble métropole
Anne HEOUAIRI Saint-Nazaire agglomération
Jonathan LEFEBVRE
Bonjour à tous. Je vous remercie d’être présents à cet atelier. Je suis Jonathan LEFEBVRE de Nantes Métropole, j’animerai
l’atelier mais j’interviendrai également pour présenter l’expérience de Nantes Métropole.
Nous allons commencer avec Soraya DAOU, de l’ANAH, qui nous fera un retour d’expérience sur le POPAC. Nous entendrons
ensuite Gladys GRELAUX, de Brest Métropole, qui nous parlera de l’Observatoire des copropriétés mis en place en partenariat
avec l’Agence d’urbanisme de Brest Métropole. Puis, interviendra Chloé CROUZET, qui nous présentera le programme « MurMur ». Je prendrai la parole au nom de Nantes Métropole. Enfin, Anne HEOUAIRI, de Saint-Nazaire Agglomération nous
exposera la mise en place de la plateforme de la rénovation énergétique, avec son volet copropriété – ce vers quoi nous nous
orientons tous.
Benoît BELLAMY, mon collègue de la direction de l’habitat, présidera cet atelier, en remplacement de Pascal PRAS, viceprésident urbanisme, foncier, habitat, à Nantes Métropole, et sera chargé de rapporter nos propos en plénière.
Je vous propose de limiter les interventions à un quart d’heure – plus un quart d’heure de questions sur chaque sujet.
Soraya DAOU
Bonjour à tous. Je vais vous présenter les premiers enseignements du POPAC – programme opérationnel de prévention et
d’accompagnement en copropriétés – mis en œuvre à titre expérimental en 2012 par l’ANAH, suite aux préconisations du
rapport Braye « Prévenir et guérir les difficultés des copropriétés ». L’objectif visé est de mettre en place un dispositif qui
permette de traiter très en amont les premières fragilités des copropriétés pour éviter l’émergence d’un processus de
déqualification ; processus qui peut très rapidement s’accélérer et s’aggraver et dont pour lequel les dispositifs curatifs
d’inversement de cette spirale de dégradation sont très lourds et très longs à mettre en œuvre. Pour éviter cette déqualification
et éviter une surenchère de l’intervention publique, dont les coûts deviennent de plus en plus lourds, les dispositifs de
prévention ont été identifiés comme des outils primordiaux à mettre en œuvre, en partenariat avec les collectivités. Un dispositif
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préventif a donc été élaboré par l’Anah en 2012, à titre expérimental. La décision sa pérennisation se prendra en fin d’année,
lors du conseil d’administration de l’Agence.
Après 3 ans d’expérimentation, l’Anah a réalisé un premier recueil de retours d’expérience pour dresser une cartographie des
dispositifs mis en œuvre. La présentation va donc porter sur les différentes typologies de POPAC déployés par les collectivités
et les premiers effets qui ont pu être mesurés – sachant qu’il est difficile de mesurer l’ensemble les impacts de ces dispositifs
de prévention sur une période de 3 ans .
Avant de vous présenter les résultats, il convient de rappeler les principes de l’action préventive. Pour bien fonctionner, une
copropriété doit s’appuyer sur six piliers endogènes et exogènes les piliers endogènes (le fonctionnement, la gestion de la
situation financière, la situation économique des copropriétaires, l’état du bâti, la complexité structurelle de la copropriété) et le
pilier exogène ( l’environnement). . Agir en prévention signifie agir sur ces piliers – pas nécessairement sur tous. La prévention
a été mise en œuvre pour agir en priorité sur le fonctionnement, sur la gestion de la situation financière, sur la situation
économique des copropriétaires et éventuellement sur la question des travaux.
Le POPAC est un dispositif qui doit être mis en place très amont d’un processus de dégradation, afin de pouvoir traiter les
copropriétés dès les premières fragilités. Dans l’échelle de graduation des dispositifs, le POPAC est un dispositif de premier
niveau et intervient donc en amont des OPAH ou des PIG qui, constituent des dispositifs de deuxième niveau et qui ont pour
objectif la réalisation de travaux. Les OPAH copro, les OPAH RU avec volet copro et les plans de sauvegarde sont des
dispositifs de troisième niveau et ont, quant à eux, un objectif de traitement global des copropriétés présentant de graves
difficulté, un objectif de redressement des instances de gestion et de réhabilitation technique et énergétique. Enfin,
l’intervention publique de dernier recours : l’action en recyclage. C’est-à-dire l’appropriation de l’immeuble par la puissance
publique et la sortie du régime de la copropriété lorsque celle-ci ne peut plus être redressée. Pour ce dernier cas, il existe des
opérations spécifiques comme les opérations d’aménagement, mais également les dispositifs de RHI THIRORI, qui permettent
de financer des opérations de recyclage foncier sur des copropriétés en situation d’habitat indigne et qui ne peuvent être
redressées.
Compte tenu du caractère préventif du POPAC, il est nécessaire de repérer les fragilités pour pouvoir agir le plus tôt possible..
L‘enjeu est donc bien de mesurer les fragilités dès leur apparition.
Le POPAC vise 4 objectifs : prévenir ou stopper une spirale de déqualification d’une copropriété montrant des signes de
fragilités ; mieux connaître les fragilités d’une copropriété et la mobilisation des copropriétaires dans la gestion de leur
immeuble ; aider la collectivité à graduer et à prioriser son action avant l’engagement d’un éventuel dispositif opérationnel ;
pérenniser l’action publique, notamment sur des copropriétés qui ont fait l’objet d’un dispositif de traitement de type OPAH
Copro ou plan de sauve garde et pour lesquelles il est nécessaire d’envisager un dispositif de surveillance pour éviter qu’elles
soient de nouveau entrainées dans un processus de déqualification.
Comment ce dispositif a-t-il été construit ? Le caractère expérimental de POPAC nous a conduits à construire un dispositif
souple en termes de périmètre, de maîtrise d’ouvrage et d’objectifs. Il repose sur 5 missions principales assurées pendant 3
ans : des actions de repérage, des actions d’animation, des actions de diagnostic multicritères, des actions d’accompagnement
individualisé pour résoudre les premières difficultés et enfin des missions de suivi et de signalement – notamment aux acteurs
sociaux.
Le financement annuel est de 50 % par l’ANAH dans la limite de 100 000 € par an de dépenses pendant 3 ans. Des
financements spécifiques peuvent également être mobilisés pour aider au redressement de la gestion. Lorsqu’un syndic ou un
administrateur provisoire doit engager des actions qui peuvent avoir un surcoût pour la copropriété, , la copropriété peut
bénéficier de l’aide au redressement versée par l’ANAH ; il s’agit d’un forfait de 150 € par lot et par an. Une aide qui peut être
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mobilisée sur plusieurs années. Un troisième financement a été créé pour mettre en œuvre ces dispositifs préventifs : le
financement du mandataire ad hoc. Il est possible pour les copropriétés de moins de 200 lots qui ont 25 % d’impayés de
charges, ou pour les copropriétés de plus de 200 lots qui ont 15 % d’impayés de charges, de saisir le juge pour missionner un
mandataire ad hoc qui fera une expertise de la copropriété pour identifier ses fragilités financières et établir un rapport avec des
préconisations qui seront présentées en assemblée générale. Ce rapport et cette expertise sont également financés par l’ANAH
à hauteur de 50 % dans la limite de 50 000 € de dépense.
En trois ans, nous avons instruit 24 POPAC. Ces dispositifs préventifs sont corrélés avec la carte de la fragilité des copropriétés
en France. Par ailleurs, trente-sept projets POPAC sont en cours et seront instruits courant 2016.
C’est à partir de ces projets – validés et en cours – que nous avons interrogé les collectivités et les opérateurs et ainsi obtenu
les premiers retours d’expérience – sur les finalités recherchées à travers ces dispositifs, leur organisation, les missions
assurées, et enfin les effets produits.
Le première question portait sur leurs attentes vis à vis du POPAC ? Quatre objectifs émergent : d’abord, prévenir le
phénomène de dégradation ou de déqualification. Ensuite, améliorer la connaissance du parc de copropriétés. En effet, de
nombreuses collectivités s’appuient sur le POPAC pour améliorer leur connaissance des copropriétés, notamment des
collectivités qui ont une expérience très récente des copropriétés. En troisième lieu, le POPAC vise à amorcer une action
publique sur un champ encore mal connu. En ce qui concerne l’ancienneté des collectivités dans le champ de la connaissance :
plus de la moitié des collectivités ont moins de quatre ans de connaissance sur la question des copropriétés – sachant qu’elles
commencent également à intégrer les dispositifs préventifs dans leur PLH.
Quelles sont les typologies des POPAC ? En termes de maîtrise d’ouvrage, les POPAC validés sont pour près de 60% pilotés
par des EPCI, puis par des communes et enfin par des départements, notamment pour agir sur des territoires ruraux – c’est
tout à fait nouveau.
Les POPAC sont déployés sur différents types de copropriétés.. Quatre typologies de POPAC ont pu être identifiées.
Tout d’abord, les POPAC d’amorçage qui permettent une première approche de la thématique « copro ». Il permet une prise de
conscience du tissu de la copropriété et assure une fonction de connaissance du parc et une fonction de pédagogie politique et
technique. Les POPAC ont en effet permis de sensibiliser ou convaincre certains élus qui ne s’étaient pas encore inscrits dans
une intervention sur les copropriétés.
Ensuite, les POPAC d’accompagnement sur un périmètre de projet. De nombreuses collectivités ont engagé des POPAC dans
une logique de projet territorial ou urbain, dans des projets de type QPV ou politique de la ville pour approcher la question de la
copropriété et l’articuler avec les dispositifs de projets urbains ou d’intervention sur le parc HLM.
La troisième typologie de POPAC accompagne la préfiguration d’une nouvelle politique à destination du parc de copropriétés,
notamment chez les collectivités dites « mures » et aux politiques de l’habitat très structurées qui doivent faire face à des
enjeux très importants sur leur territoire et qui se sont inscrites depuis longtemps dans les interventions sur les copropriétés. A
travers ces POPAC, les collectivités sont passées du traitement curatif ciblé à une politique s’adressant à l’ensemble du parc
dans une logique de prévention.
Enfin, les POPAC post-opérationnels, qui ont été déployés pour consolider une approche opérationnelle et surveiller la
dynamique de redressement. Ces POPAC permettent de maintenir une vigilance avant le retour au droit commun.
Dans le cadre de cette évaluation, l’Anah a également identifié 6 problématiques territoriales couvertes par les POPAC. . La
première problématique est celle des grands territoires rencontrant une multiplicité de thématiques et d’enjeux liés à la
copropriété, comme en Ile-de-France où l’on trouve du secteur pavillonnaire, du quartier ancien, des grandes copropriétés de
périphérie. Dans ce cas, l’enjeu est la hiérarchisation de l’action face à l’ampleur de la situation. Par quoi faut-il commencer ?
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Par le secteur pavillonnaire qui est en train de se transformer de manière anarchique en copropriétés ou par les grandes
copropriétés qui qui doivent répondre à des enjeux urbains ? Il s’agit là de prioriser.
La deuxième problématique relève, des territoires de la politique de la ville – dans lesquels les copropriétés en difficulté se
caractérisent notamment par une complexité juridique et dont le traitement doit être envisagé en lien avec le projet urbain et en
relation étroite avec les bailleurs HLM.
Une autre problématique territoriale s’illustre par les contextes de déprises immobilières et de vacances. Le POPAC sert à
enrayer une spirale de déqualification en lien avec un projet de revitalisation beaucoup plus global – en territoire rural ou en
territoire de petites ou de moyennes villes. Il s’agit alors de repositionner la copropriété sur le marché.
Une quatrième problématique concerne les territoires très détendus dont les dispositifs sont portés par les conseils généraux.
Les conseils généraux souhaitent pas ce dispositif agir sur les copropriétés diffuses, notamment dans le milieu rural. En
revanche, les périmètres départementaux sont assez difficiles à gérer – cela pose la question de sous-périmètres, notamment
pour éviter le saupoudrage de l’action publique.
N’oublions pas les sites de la Reconstruction et les copropriétés des années 50-70 qui présentent des caractéristiques
spécifiques. Ces journées illustrent bien les enjeux de requalification de ce parc et notamment celui de la restructuration
juridique et requalification patrimoniale.
Enfin, la dernière problématique est celles des territoires qui accueillent des copropriétés récentes ou nouvelles, notamment
des copropriétés récentes issues de la défiscalisation.S’agissant des copropriétés récentes et notamment sur l’aide au bon
démarrage des nouvelles copropriétés, le POPAC est également mis en œuvre pour résoudre des problèmes rencontrés lors
de la livraison des copropriétés, livraison qui suscite parfois quelques contentieux. Dans certaines zones, des nouvelles
constructions ont été réalisées avec des problèmes de malfaçons, des problèmes juridiques, des problèmes sur les systèmes
de chauffage, etc. Il y a tout un travail d’accompagnement à réaliser auprès des copropriétaires.
L’ action préventive peut être déclenchée bien avant la construction des nouvelles copropriétés. Il s’agit alors de travailler en
collaboration avec les promoteurs immobiliers, avec les collectivités, pour éviter la construction d’ensembles immobiliers trop
complexes sur le plan juridique et du fonctionnement. Cela permet de rapprocher les projets ’habitat et ’urbanisme.
Enfin, parmi les copropriétés récentes, figurent les copropriétés issues de la vente des logements HLM ; l’action préventive
consiste alors réaliser une médiation entre bailleurs HLM et futurs copropriétaires.
Je terminerai par les effets des POPAC. D’abord, pour les collectivités.
Premier effet, des coûts évités. Clairement, l’action préventive est une action qui n’est pas très couteuse et qui permet d’éviter
des coûts importants à terme pour la collectivité ou l’Etat. Le deuxième effet est l’amélioration importante de la connaissance du
tissu de copropriétés et de leurs difficultés par les collectivités ; ce qui permet une meilleure action. Troisième effet, celui de
visibilité de la thématique sur le territoire, notamment pour les élus et les collectivités qui ne connaissaient pas encore bien le
sujet. Un autre effet est celui de la structuration de l’action publique autour du champ de la prévention, jusque-là très peu
exploré... Autre effet,, la création et le renforcement du réseau d’acteurs et de leur implication, leur montée en compétence.
Enfin, un accompagnement sur des dimensions qui avaient été peu travaillées sur certaines territoires, notamment sur la
gestion et la formation.
Ensuite, les effets pour les copropriétaires.
Selon les collectivités et les opérateurs, les améliorations portent principalement sur l’amélioration de la gestion financière et de
la copropriété, une meilleure connaissance des règles de fonctionnement des instances de la copropriété (le POPAC a
notamment permis d’engager des démarches collectives en termes d’information), . une meilleure connaissance de la
copropriété (visites de chantiers, etc) et une montée en compétence sur l’ensemble des enjeux de la copropriété.
L’Anah travaille actuellement sur les modalités de pérennisation deces dispositifs à présenter prochain conseil d’administration
qui se tiendra en novembre 2015. .
Jonathan LEFEBVRE
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Merci Soraya. Il nous reste 10 minutes pour les questions.
Marie-Annick LANNOU – Urbaniste à Nantes
Quelles actions ont-elles été développées dans le cadre de déprises immobilières et de vacances ?
Soraya DAOU
S’agissant des déprises immobilières – déprises non pas d’une copropriété mais de tout un territoire –, l’entrée principale est
non pas le POPAC, mais le projet territorial. Le POPAC doit donc d’abord s’inscrire dans un projet global et une action liée au
développement économique pour attirer des ménages. La collectivité doit s’interroger sur le type de ménages qu’elle va attirer ,
et déterminer une offre de logements répondant aux besoins des ménages.
Concernant la remise sur le marché des logements, la question qui sera posée est la suivante : propose-t-on, dans le cadre de
ce dispositif, des mesures incitatives pour favoriser la location des logements par les bailleurs ? Une mesure incitant les
propriétaires occupants à accéder, ou à des mesures aux propriétaires qui souhaitent vendre leurs logements pour attirer de
nouveaux propriétaires.
Ces actions sont davantage liées au PLH. En tout cas, les POPAC ne peuvent pas agir d’eux-mêmes.
Christiane LUC – Urbaniste, cabinet ALAP
Pouvez-vous nous décrire la copropriété en tissu pavillonnaire ?
Soraya DAOU
En Ile-de-France, dans certains territoires, des pavillons sont divisés en lots ; une maison individuelle se transforme en deux ou
trois logements. Il s’agit donc de copropriétés de fait. Tout un travail doit donc être réalisé sur la régularisation de ces situations
sur le plan juridique et technique, notamment pour s’assurer que les logements nouvellement créés répondent bien aux normes
et aux conditions d’habitabilité. Par ailleurs, un travail pédagogique doit être mené auprès des copropriétaires – des ménages
qui achètent des « morceaux » de maison sans savoir comment le régime de la copropriété peut impacter la gestion
patrimoniale de leur bien. Ils ne peuvent pas, par exemple, décider seuls des travaux à réaliser sur le toit.
Cela se développe en Ile-de-France, mais la vente de maisons sous forme de lots n’est pas un phénomène exclusivement
francilien.
Jonathan LEFEBVRE
Le notaire n’a-t-il aucun rôle dans une telle vente ?
Soraya DAOU
La loi ALUR améliore beaucoup de choses ! L’une des principales mesures de la loi ALUR est l’amélioration de l’information
des acquéreurs par le notaire. Une ordonnance du mois d’août fait évoluer les conditions d’information des acquéreurs. Mais
globalement, les notaires doivent informer des conditions du statut du logement, les droits et devoirs du propriétaire mais aussi
sur la composition de la copropriété et sur la situation financière de la copropriété (montant des charges et niveau des
impayés). Mais, parfois, la copropriété ne dispose pas de règlement de copropriété ni d’organes de gestion et de gouvernance
formalisés.
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Jonathan LEFEBVRE
Vous dites qu’aujourd’hui il est possible d’acheter un « bout » de maison sans que la copropriété soit déjà en place ?
Soraya DAOU
Il y a une copropriété de fait dès qu’un bien compte deux lots appartenant à deux propriétaires différents. Mais il n’existe pas
forcément de règlement écrit à ce moment-là. Donc l’un des enjeux est de réglementer le fonctionnement de la copropriété.
Nathalie MARTRAGNY – communauté d’agglomération du Pays de Flers
Vous avez évoqué tout à l’heure l’intervention des départements comme une nouveauté dans la question des copropriétés.
Comment cela se décline-t-il au niveau des collectivités qui dépendent du département, notamment au niveau des EPCI ?
Soraya DAOU
Les départements qui ont mis en œuvre ces dispositifs sont généralement des délégataires des aides à la pierre en territoire à
fort enjeu rural ; ils ont une compétence habitat de fait via la délégation de compétences. Lorsque le dispositif est décidé, une
articulation est réalisée avec les collectivités locales, notamment les communes ; généralement, cela s’organise plutôt bien sur
le plan local. Il s’agit de conseils généraux qui ont une ancienneté et une expérience dans le déploiement des dispositifs au
niveau territorial et de l’articulation avec les autres collectivités.
Le conseil général porte le dispositif et la collectivité peut accompagner sur différents volets en fonction de l’organisation locale
qui a été définie.
Sébastien JEROME – SOLIdaires pour l’habitat (ex PACT habitat et développement)
S’agissant du rôle post-opérationnel des POPAC, pouvons-nous imaginer des actions spécifiques pour faciliter ou développer
les sorties de portage de lots, comme de l’accession sociale par exemple ?
Soraya DAOU
Tout à fait. Nous ne nous sommes pas restreints concernant les missions portant sur les aspects post-opérationnels. Lorsqu’un
plan de sauvegarde ou une OPAH copro prend fin, il reste toujours des choses à faire. Le POPAC va permettre de finaliser,
d’abord, les questions d’organisation et de fonctionnement de la copropriété – par exemple, s’il faut passer d’un administrateur
provisoire à un syndic. Ensuite, la question du traitement des charges ; un dispositif de veille permettra de gérer la maîtrise des
charges.
Si une action de portage a été réalisée sur la copropriété, à savoir l’acquisition de lots par un porteur, et que cette acquisition
s’est faite pendant la durée du dispositif, à la fin du dispositif, il peut y avoir un travail concernant la vente des lots pour
accompagner et permettre de l’acquisition, notamment en accession. Oui, le « post-portage » peut être traité dans le cadre du
POPAC.
Benoît BELLAMY
Une vingtaine de POPAC ont été validés à ce jour. Quel est le profil des équipes constituées pour animer ces POPAC ?
Soraya DAOU
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D’abord, les premières compétences qui ont été missionnées sont les compétences juridiques. Ensuite, les compétences
sociales et enfin les compétences techniques.
S’agissant des prestataires, il en existe plusieurs types. Celui qui revient le plus fréquemment est le bureau d’études privé ou
associatif. Un appel d’offres avec un marché et une sélection d’un bureau d’études privé ou associatif.
Certains POPAC ont été réalisés en régie. Il s’agit alors de collectivités qui veulent monter en compétence et dans lesquelles
des territoires doivent faire face à des déficits d’opérateurs. Ou tout simplement, parce qu’elles ont estimé qu’il s’agissait de
dispositifs peu lourds et qu’elles pouvaient les assurer elles-mêmes.
Jonathan LEFEBVRE
Je vous remercie. Je laisse maintenant la parole à Gladys GRELAUD.
Gladys GRELAUD
Bonjour à tous. Je devais intervenir avec Pascale CHODZKO, qui n’a pas pu être là aujourd’hui. Mon intervention portera sur la
partie technique de l’observatoire des copropriétés de Brest. Si je ne peux pas répondre à toutes vos questions, je vous
orienterai vers l’Agence.
Je vous expliquerai d’abord pourquoi nous avons décidé de mettre en place cet observatoire. Ensuite, la manière dont nous
avons retravaillé l’outil. Et enfin, je vous dirai ce qu’il en ressort.
Sur Brest, l’observatoire des copropriétés existe depuis 1998 et concerne soit des territoires spécifiques sur lesquels nous
voulions intervenir en OPAH, soit des copropriétés de moins de 10 logements sur lesquels nous voulions intervenir sur une
thématique. Nous avons donc une grande tradition de travail sur la copropriété, sur la connaissance, sur l’aspect bâti, l’aspect
gestion et l’aspect environnemental. Une tradition que nous avons déjà intégrée comme socle de la politique de Brest
Métropole en matière d’habitat privé.
Depuis quelques années, la question de la copropriété est devenue de plus en plus prégnante ; elle concerne 40 % de notre
parc immobilier. Nous avions un outil d’observation qui, finalement, était très ponctuel. Nous intervenions quand nous voulions
mettre en place une opération sur une typologie de copropriétés ; nous souhaitions connaître toutes les copropriétés de Brest,
des récentes aux plus anciennes, sur l’ensemble du territoire de la Métropole.
Donc en 2013, la copropriété est devenue un véritable enjeu. Nous nous interrogions sur la question de la prévention, sur les
copropriétés en très grande difficulté, sur les copropriétés énergie, etc. Mais comment calibrer notre intervention sans connaître
le tissu des copropriétés ? Telle est le fondement de notre commande. Pouvoir hiérarchiser les copropriétés selon leur degré de
difficulté et pouvoir géo-référencer la totalité des copropriétés. Nous voulions également être autorisés par la CNIL à réaliser
des croisements de données personnelles afin d’obtenir un modèle qui soit reproductible sur d’autres collectivités.
Ce sont les raisons pour lesquelles nous avons décidé de créer ce nouvel observatoire 2.0.
Une collaboration de 3 ans était nécessaire entre Brest Métropole et l’ADEUPA, l’Agence d’urbanisme du Pays de Brest. Mais
également avec le référent CNIL de la collectivité, le service SIG et la société Eau du Ponant, la SPL qui s’occupe de l‘eau sur
Brest, ainsi qu’avec les syndics. Un véritable travail a été mené en collaboration avec tous ces partenaires. Nous nous
réunissions environ une fois par trimestre pour résoudre les difficultés que nous rencontrions pour monter cet observatoire.
D’abord, sur la définition du champ et du sujet : les copropriétés, oui, mais s’agit-il de toutes les copropriétés, notamment les
plus récentes ? Ensuite, la récupération des données : avons-nous les autorisations, pouvons-nous les récupérer ? Puis les
tests sur le terrain. Voilà tout ce que nous avons fait à ce jour.
Maintenant, nous souhaitons intégrer l’enjeu énergie. Pérenniser la tradition de collaboration avec les syndics, qui est très
importante sur Brest Métropole. Et travailler sur la gestion des copropriétés, notamment sur la question des charges.
Après trois ans, nous disposons d’un outil intéressant. Notamment concernant la mise en œuvre opérationnelle des politiques
de Brest Métropole.
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J’en viens à l’outil vu de l’intérieur – partie qui devait vous être présentée par ma collègue, je ferai donc de mon mieux.
L’observatoire est conçu à partir des fichiers fonciers fiscaux. Sur Brest Métropole, l’identification des copropriétés est assez
simple. En effet, une copropriété égale une ou plusieurs parcelles ; une parcelle ne peut pas contenir deux copropriétés. Ce qui
nous permet d’identifier chaque copropriété dans les fichiers, de localiser la totalité des copropriétés sur Brest Métropole et de
croiser toutes les autres statistiques.
Au-delà de l’état du bâti, nous avons souhaité également avoir des données sur le marché : comment se positionne la
copropriété par rapport au marché qui l’environne ? Est-elle proche d’un tramway, fait-elle partie d’une politique particulière ?
Est-elle composée de propriétaires occupants, de propriétaires bailleurs ? Y a-t-il des exonérés à la taxe d’habitation ? L’écueil
est que nous pouvons avoir les données des exonérés à la taxe d’habitation uniquement sur les copropriétés de plus de 20
lots ; de sorte que nous ne disposons pas cette information pour les petites copropriétés du centre-ville.
Le partenariat avec la société publique locale Eau du Ponant nous a permis d’identifier les syndics. Pour nous, avoir un syndic
pro dans une copropriété est un indicateur de gestion. Cette société nous a permis d’identifier, en fonction du compteur d’eau,
le nom du syndic – professionnel ou bénévole. Pouvoir joindre ce syndic pour lui proposer de travailler en collaboration est
extrêmement important pour le service habitat.
Comment fonctionnent les indicateurs ? C’est assez simple. Nous avons une dizaine d’indicateurs à qui nous avons donné une
note, de zéro à vingt. Chacun des indicateurs à un coefficient. Nous considérons, par exemple, que la part des ménages
exonérés à la taxe d’habitation est une donnée importante ; plus le nombre d’exonérés est important, moins la copropriété a de
points.
Les indicateurs sont les suivants : l’appréciation du prix ; l’ancienneté du bâti, qui a un coefficient de 2 ; l’appartenance à une
zone de renouvellement urbain ; l’accès à une station de tramway ; la part des propriétaires occupants ; s’il y a un syndic ou
pas ; la question de la vacance ; la part des petits logements, etc.
Une note est donc attribuée à chacune des copropriétés ; nous avons ensuite mis des couleurs : de zéro à 3, elle est noire ; de
3 à 5, elle est rouge, etc.
Au-delà de l’information, l’observatoire est un outil dont nous nous servons au quotidien. Par exemple, quand une copropriété
nous appelle pour nous dire qu’elle souhaiterait bénéficier d’aides de l’ANAH pour réaliser des travaux, nous cliquons et
obtenons tout de suite une identité et toutes les informations utiles.
J’ai oublié de vous dire que nous avons réalisé un test terrain. Sur les six premiers mois de l’année 2015, nous sommes allés
regarder sur les différents territoires si les colorations des copropriétés que nous avions définies étaient en phase avec la
réalité. Globalement, elles le sont.
Nous pouvons par ailleurs additionner les données de l’observatoire avec d’autres données. Par exemple, nous savons quelles
propriétés ont été rénovées et ont donc bénéficié de subventions ANAH. De sorte que nous voyons immédiatement où il y a eu
une intervention publique.
Je vais maintenant vous montrer l’outil sur l’intranet de Brest Métropole.
Le premier enjeu est de voir où se situent les copropriétés. Dans le secteur de Kérinou, par exemple, de nombreuses
copropriétés sont dégradées et un gros travail est à réaliser. Or l’observatoire nous apprend qu’il s’agit surtout de monopropriétés. Là, vous pouvez voir le quartier de Saint-Martin, qui a déjà bénéficié d’une OPAH RU, ainsi que le secteur de Siam,
un quartier un peu plus chic où les copropriétés sont en bonne santé.
Le quartier de Bellevue, un nouveau secteur en RU, compte de nombreux logements sociaux mais également de copropriétés
privées, qui sont noir et rouge, mais sur une logique de décrochage immobilier avec des propriétaires occupants captifs. Nous
ne sommes pas sur les mêmes problématiques.
Enfin, voici ce que nous obtenons quand nous cliquons sur une copropriété : la fiche de la copropriété s’ouvre et nous donne
l’ensemble des indicateurs.
Jonathan LEFEBVRE
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Je vous remercie. Vous dites avoir un partenariat fort avec les syndics ; combien y avait-il de syndics avant la mise en place de
l’observatoire et en avez-vous découvert beaucoup d’autres ?
Gladys GRELAUD
À Brest, nous connaissons tous les syndics professionnels ; il y en a une dizaine. Nous les connaissions tous avant la mise en
place de l’observatoire. Nous avons d’ailleurs pu leur exposer notre projet – concernant l‘observatoire – avant sa mise en place
et obtenir leur avis.
Benoît BELLAMY
Et il a été bien accueilli par les syndics ?
Gladys GRELAUD
Oui complètement. Les syndics ont toujours très bien collaboré avec la collectivité. Ils savent qu’ils sont dans un partenariat
gagnant/gagnant, puisque, lorsqu’ils sont en difficulté, nous les accompagnons grâce à nos dispositifs OPAH RU et aux aides
financières à la copropriété.
Par ailleurs, les syndics sont face à un phénomène nouveau et grandissant dans les copropriétés : celui des impayés,
notamment de la part de propriétaires occupants captifs. Ils ont donc besoin de nous pour les accompagner, mettre en place
des administrations provisoires, etc.
Tifenn QUIGER – Brest Métropole, vice-présidente en charge du logement
Je confirme que traditionnellement, historiquement, les syndics sont impliqués dans la gouvernance et les prises de décision en
comité opérationnel ou en pilotage des OPAH. De fait, nous n’avons pas eu d’effet de blocage.
Loup VANDENBERGUE – DREAL Pays de la Loire
L’observatoire vous a-t-il permis de connaître le pourcentage ou le nombre de copropriétés non gérées – qui ne disposent pas
de syndics ? Ou qui sont gérées par des syndics bénévoles qui ne font pas grand-chose ? Si oui, avez-vous pu améliorer les
choses dans ce domaine ?
Gladys GRELAUD
C’est plus subtil que cela : ce n’est pas parce que le syndic est un professionnel que la gestion est bonne. Et des copropriétés
de trois ou quatre logements sont gérées par des syndics bénévoles en bon père de famille et tout se passe bien.
L’observatoire identifie les copropriétés qui n’ont pas de syndic ainsi que les copropriétés gérées par un syndic professionnel
ou un syndic bénévole ; mais nous ne pouvons pas affirmer qu’un syndic professionnel est une garantie de bonne gestion.
Cependant, le fait d’avoir un syndic est l’un des indicateurs de dégradation.
Prenons l’exemple du secteur de Bellevue, nouveau quartier ANRU, avec des copropriétés des années 50-70. Ces
copropriétés ont des syndics, mais le bâti commence à se dégrader, les propriétaires occupants sont majoritaires et pour la
plupart exonérés de la taxe d’habitation. Par ailleurs, il y a un décrochage du marché immobilier. Ce type de situation nous
interpelle alors que les copropriétés ont des syndics avec lesquels nous travaillons. La question est de savoir comment nous
pouvons intervenir sur ces logements pour que les copropriétés ne décrochent pas totalement par rapport au reste du quartier.
Cathy LESPERT – Lorient Agglomération
Le patrimoine immobilier des années 50 à 70 – Saint-Nazaire les 6 et 7 octobre 2015
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Je travaille à l’espace info habitat et nous avons actuellement un programme d’intérêt général habitat que nous menons sans
régie. Nous sommes donc amenés à rencontrer de nombreux copropriétaires et nous avons des relations régulières avec les
syndics. Nous allons mettre en place un observatoire de la copropriété, même si nous connaissons déjà un peu l’état des
copropriétés qui ne sont pas dégradées, mais pour lesquelles nous avons des demandes croissantes. Beaucoup de syndics
conseillent aux copropriétaires de s’adresser à nous pour les aides aux travaux, quand il n’y a pas de volet copropriété. À
Lorient, les propriétaires sont des gens modestes. Et si, par exemple, il y a un problème de fissure, plutôt que d’opter pour un
ravalement, ils préfèrent choisir une ITE – isolation thermique par l’extérieur. Étant donné le coût des travaux, à part leur
conseiller de faire un audit énergétique, quelle est la réponse que nous pouvons donner à ces copropriétaires ?
Les syndics ont des connaissances en gestion, certes, mais ils pèchent au niveau technique. Si une entreprise leur fait un devis
d’ITE à 90 000 €, ils se contentent de calculer les quotes-parts, c’est tout. Les propriétaires sont totalement désarmés face à de
telles situations.
Gladys GRELAUD
Votre question dépasse celle de l’observatoire, elle touche à la mise en œuvre de la politique publique. À Brest, les élus nous
ont dit qu’ils voulaient travailler sur la question de la copropriété, essentielle pour savoir de quelle manière ils peuvent au mieux
adapter les outils d’action publique pour pouvoir les accompagner.
Aujourd’hui, nous identifions les copropriétés de manière globale et nous nous servons des outils dont nous disposons. S’il
s’agit de faire de la prévention, par exemple, nous allons mettre en place un POPAC. S’il s’agit d’un problème lié à l’énergie, la
plateforme Tinergie permettra de donner des réponses et d’orienter les copropriétaires. Pour les copropriétés très dégradées,
nous allons mettre en place notre OPAH RU multisites. Bref, nous utilisons les outils que nous avons à notre disposition en
fonction de la réalité qui nous est présentée.
Cathy LESPERT
C’est une question de calendrier, mais que faire des copropriétés qui ont un choix à faire ?
Jonathan LEFEBVRE
Je vous propose de prendre les autres questions. Nous reviendrons ensuite sur ce sujet ; le POPAC est l’une des réponses et
nous allons voir maintenant les autres types d’accompagnement.
Benoît BELLAMY
Parmi les indicateurs que vous nous avez cités, je ne vois rien sur la situation financière des copropriétés.
Gladys GRELAUD
Non, effectivement, il n’y a rien sur les charges.
Benoît BELLAMY
Le patrimoine immobilier des années 50 à 70 – Saint-Nazaire les 6 et 7 octobre 2015
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Avoir connaissance de la situation financière des syndics est un indicateur, notamment de fragilité, qui peut être intéressant.
S’agit-il d’un manque de collaboration avec les syndics ?
Gladys GRELAUD
Non pas du tout. Nous étions sur une première phase de trois ans sur laquelle nous souhaitions avoir une vision globale. Et
pour que cela ne soit pas trop chronophage, nous souhaitions avoir, pour les 3 375 copropriétés de Brest, un croisement
statistique qui nous permette de connaître l’état d’une copropriété en un clic.
Maintenant, nous entrons dans une seconde phase pour laquelle nous souhaitons approfondir notre collaboration avec les
syndics, notamment sur les questions des charges, de l’énergie, de la valeur verte de la copropriété.
Jonathan LEFEBVRE
S’agissant des indicateurs et des données, il n’y a pas trop d’erreurs ? Sur les dates de construction, par exemple ?
Gladys GRELAUD
L’Agence a nettoyé les données – ce qui a pris un temps fou – et globalement elles sont bonnes. S’il y a des écueils, ils
concernent non pas la ville de Brest, mais plutôt les communes alentour où on se rend compte que des choses ne fonctionnent
pas si bien.
Laurent CORBEL – Lorient Agglomération
Prenez-vous en compte la problématique de la salubrité et du péril ?
Gladys GRELAUD
Non, nous n’avons pas rentré les procédures d’arrêtés de péril dans le cadre de l’observatoire. En revanche, nous travaillons
de manière opérationnelle avec le service d’hygiène dans le cadre des procédures – nous disposons d’une cellule « habitat
indigne ».
Mais nous souhaitons établir la fiche d’identité de la copropriété, avec des données plus qualitatives ; ce type d’information sera
donc entré de manière un peu historique.
Jonathan LEFEBVRE
Je vous remercie. La parole est à Chloé CROUZET.
Chloé CROUZET
Bonjour à tous. Je suis responsable du pôle qui traite des questions d’amélioration des parcs existants, publics et privés, à
Grenoble Métropole – un bassin de 450 000 habitants.
Pourquoi ce projet ? Nous nous interrogions sur l’avenir du parc des logements collectifs privés construit entre 1945 et 1975,
composé de 75 000 logements – sur 229 000 logements, soit une part significative –, un parc énergivore qui concentre des
populations à faibles ressources ; on parle de parc social de fait. Nous avons décidé de mener une action d’incitation à la
réhabilitation de ce patrimoine.
Le patrimoine immobilier des années 50 à 70 – Saint-Nazaire les 6 et 7 octobre 2015
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L’idée était de passer d’un projet de démonstration à un projet de massification, sachant que ce type de projet se construit dans
le temps et commence petit. Nous avons déjà fait l’expérience d’un projet d’incitation à la réhabilitation sur la ville Grenoble, via
un OPATB, qui nous a permis d’expérimenter une approche en matière d’amélioration thermique et énergétique sur de l’habitat,
des petits commerces, du tertiaire, etc. Un tel projet se structure dans le temps, il convient de tester une approche et d’avoir
des acteurs locaux formés et structurés.
Le projet « Mur-Mur », qui concerne tout le territoire de la Métropole, s’est appuyé sur les premiers enseignements et la
première structuration d’acteurs.
S’agissant des partenariats, les partenariats techniques sont très importants dans ce type d’opération, notamment avec la filière
du bâtiment – la qualité des travaux doit être assurée.
Le dispositif prévoit à la fois de l’accompagnement et des aides financières. Le contexte de copropriétés est particulier, car les
logiques d’entretien du patrimoine sont assez inexistantes et la plupart des copropriétaires sont méfiants. Il convient donc de
les rassurer, de prouver que nous sommes un tiers de confiance pour les accompagner dans leurs démarches de projet de
travaux, que nous pouvons leur apporter l’information nécessaire et utile et qu’il est indispensable qu’ils soient dans un dialogue
pertinent avec les professionnels du bâtiment. Pour cela, un guichet unique d’informations a été ouvert – le tiers de confiance –,
porté par l’Agence locale de l’énergie et du climat, afin d’avoir une visibilité en termes de points d’entrée et pour qu’il puisse
assurer le rôle de conseil technique tout au long de la démarche.
Cette intervention d’accompagnement technique a été couplée avec l’intervention d’un opérateur de suivi-animation, afin
d’accompagner la copropriété dans toutes ses démarches administratives et financières et assurer un rôle d’aide à la
mobilisation.
Nous avons élaboré un référentiel de travaux, axé notamment sur des obligations de moyens, poste par poste. Nous avons
travaillé sur le patrimoine, qui comporte une homogénéité technique et structurelle, ce qui nous a permis de construire un
référentiel adapté.
La seconde partie du dispositif concerne l’accompagnement financier. Nous avons mis en place plusieurs bouquets de travaux
qui nécessitent des interventions plus ou moins lourdes, avec des aides qui sont de plus de plus incitatives en fonction du
bouquet de travaux retenu. Cette partie financière est essentielle, car nous savons qu’il est difficile pour une copropriété de
s’appuyer exclusivement sur des aides de droit commun. Il y a donc un couplage « aide à copropriété et aide à la personne » :
un point fort que nous avons testé et que nous souhaitons reconduire dans un futur dispositif. C’est-à-dire une aide qui fait un
peu levier dans la prise de décision en assemblée générale, couplée à une aide renforcée pour les propriétaires sous le plafond
de ressources de l’ANAH.
En termes de bilan, ce dispositif nous a permis d’embarquer 84 copropriétés – aujourd’hui, les travaux sont en cours de
réalisation pour la plupart. Nous avons donc réussi à tenir notre objectif de massification. Le résultat en termes de taux de
chute est plutôt bon, puisqu’il a fallu mobiliser deux copropriétés pour en faire voter une.
S’agissant de la mobilisation, nous avons mis en place un conseil personnalisé qui s’apparente à un diagnostic thermique
simplifié, proposé gratuitement par l’Agence locale d’énergie et du climat. Il a permis d’apporter une aide à la décision à la
copropriété, en contextualisant les données de la copropriété par rapport à la capacité à s’inscrire dans le référentiel de
travaux. Nous avons réalisé 170 conseils personnalisés et 84 copropriétés ont voté des travaux. Sachant que nous avons mis
en place une phase de présélection, pour nous assurer de la motivation des copropriétés ; pour entrer dans le dispositif, elles
devaient signer une charte d’engagement et collaborer – nous fournir des données de consommation, nous ouvrir les portes de
la copropriété, etc.
Les copropriétés étaient assez différentes, mais si nous devons décrire le profil moyen, je dirai qu’il s’agit d’une copropriété de
56 logements, construite dans les années 60 et avec des niveaux de consommation pas si élevés que cela.
Je n’entrerai pas dans le détail du bilan financier de l’opération, mais il convient de noter que nous avons engagé 60 M€ de
travaux et que le reste à charge pour les copropriétaires est très significatif. En effet, même si le niveau de cofinancement est
très élevé, le reste à charge moyen s’élève à 12 000 € par logement.
Le patrimoine immobilier des années 50 à 70 – Saint-Nazaire les 6 et 7 octobre 2015
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Concernant l’entrée sociale du dispositif, la moitié des occupants sont rentrés dans les plafonds de ressources de l’ANAH.
Donc même en massifiant, nous avons eu une entrée sociale forte et nous avons pu embarquer des copropriétés à profil social
en solvabilisant fortement les ménages les plus fragiles.
La structuration des acteurs terrain a été un élément très important pour lancer une action de ce type. Tout comme l’information
des acteurs professionnels.
Nous avons assisté, du fait de la crise, à une réorientation d’activités ; ce dispositif a joué un rôle d’amortisseur. Il est donc
intéressant de se dire que nous avons accompagné des changements professionnels.
Voyons maintenant les points que nous souhaitons améliorer pour une prochaine campagne. Nous devons mieux
présélectionner les copropriétés, notamment en les faisant passer par une phase d’autodiagnostic afin qu’elles puissent nous
fournir des données plus précises. Elles attesteront ainsi de leur motivation.
Nous devrons essayer de renforcer certains temps d’accompagnement, notamment au moment de la mobilisation dans les
copropriétés. Des stratégies différentes devront être déployées selon le profil de copropriétés.
L’information des propriétaires, des conseillers syndicaux, est également un élément important.
L’instruction et la mobilisation des financements pour les particuliers sont des points compliqués et difficiles. Je pense
notamment au problème de la volatilité des aides, en particulier nationales.
Le suivi des consommations d’énergie est une action que nous souhaitons amorcer ; nous sommes en train de le faire sur les
chantiers.
Nous devons communiquer davantage sur les réalisations des opérations. Nous l’avons fait en instituant des temps d’échange,
ce que l’on appelle la mobilisation par les pairs. À savoir faire se rencontrer et dialoguer les propriétaires qui ont réalisé des
travaux avec ceux qui s’apprêtent à se lancer dans un projet – avec des visites de chantier, des échanges avec des
copropriétaires, des professionnels, etc.
Enfin, il est évident que la grosse difficulté, par rapport aux ménages, est le financement du reste à charge et notamment
l’accès au prêt. Seuls 15 % des ménages qui ont demandé le prêt bonifié l’ont obtenu. Il est donc nécessaire d’améliorer
l’accès à ce prêt pour les plus fragiles, d’autant que ceux qui l’ont obtenu sont ceux qui en avaient le moins besoin.
Nous nous apprêtons, pour 2016, à lancer une nouvelle campagne un peu sur le même état d’esprit : proposer un
accompagnement important et en même temps des aides aux travaux – notamment à des copropriétés des années 45-75.
Nous allons également mener une campagne, dans le cadre de la mise en place d’une plateforme de rénovation énergétique
locale, auprès des autres copropriétés plus anciennes et des maisons individuelles. Il s’agira davantage d’un accompagnement
technique ou d’une mobilisation au groupement d’entreprises.
Dernière remarque : nous souhaitons vraiment positionner le propriétaire comme le premier acteur du projet, un acteur qui
produit des données et porte la mobilisation au sein de la copropriété. Pour cela, il devra être formé et sensibilisé. Notre rôle se
limitant à celui de coach accompagnateur. Nous souhaitons vraiment arriver à faire porter les projets futurs par les
propriétaires.
Jonathan LEFEBVRE
Je vous remercie.
Anne HEOUAIRI – CARENE
Comment pouvez-vous être à la fois sur un objectif chiffré – 96 KWh par m2 par an – et sur une obligation de moyens – et non
de résultat ?
Concernant l’ITE, vous êtes-vous fait accompagner par des architectes, notamment concernant l’impact que pouvaient avoir
des campagnes d’ITE sur des immeubles possédant des caractéristiques architecturales intéressantes ?
Chloé CROUZET
Le patrimoine immobilier des années 50 à 70 – Saint-Nazaire les 6 et 7 octobre 2015
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S’agissant du référentiel de travaux, je ne l’ai pas expliqué, mais nous avons d’abord mené une phase d’études proopérationnelle. Nous avons choisi des bâtiments test sur lesquels nous avons fait des simulations thermodynamiques afin de
tester le référentiel travaux. Et nous en avons déduit que si la copropriété réalise tous les travaux du référentiel, elle arrivera à
ce niveau de consommation. Alors bien entendu ce niveau de consommation est une moyenne et sur tout un parc, nous savons
bien que certains immeubles ne seront pas au même niveau.
Cela dit, nous sommes dans une phase d’évaluation des consommations énergétiques pour les premiers chantiers qui ont été
réalisés et nous avons été rassurés : pour les immeubles qui ont déjà eu des saisons de chauffe, nous arrivons au niveau de
gain énergétique que nous avions estimé.
Par ailleurs, cette approche n’a pas été construite par hasard. Nous avons en effet tenu compte des résultats des diagnostics
énergétiques approfondis que nous avons systématiquement réalisés pour les OPATB. Et au lieu de procéder à de nouveaux
diagnostics, qui auraient abouti aux mêmes résultats – de l’argent public dépensé pour rien –, nous avons pensé qu’il valait
mieux construire un référentiel de travaux. Sachant par ailleurs que nous travaillions sur un patrimoine qui avait une certaine
homogénéité technique. En revanche, il est vrai que l’approche devrait être différente pour un parc ancien.
Jonathan LEFEBVRE
De mémoire, l’ANAH a accepté ce mode de pensée et les 25 % d’économie d’énergie ont été validés sur le principe… Alors je
ne sais pas si tous les bouquets…
Chloé CROUZET
Non, c’est à partir de l’offre complète que nous pouvons assurer à un propriétaire qu’il fera au minimum à 25 % d’économie
d’énergie et qu’il pourra s’inscrire dans le programme « Habiter mieux ».
Pour l’offre progressive, nous devons le prouver plus précisément pour chaque projet.
Soraya DAOU
Pour obtenir les aides de l’ANAH, il est nécessaire de procéder à un diagnostic bâtiment par bâtiment, copropriété par
copropriété.
S’agissant du programme de Grenoble, l’intérêt était que les caractéristiques physiques du parc étaient similaires pour chacune
des copropriétés. Il a donc été possible de modéliser le diagnostic et ensuite les préconisations. Il est plus compliqué d’agir de
la sorte pour un parc très différent sur le plan technique ou des équipements.
Chloé CROUZET
Concernant l’entrée architecturale, nous avons systématiquement exigé que les équipes de maîtrise d’œuvre aient un
architecte qui puisse proposer une intervention sur l’immeuble. Et qu’un dialogue se noue entre l’architecte de la copropriété et
l’architecte conseil des villes.
Pour la prochaine campagne, nous irons encore plus loin en mettant en place un cahier de prescriptions architecturales certaines approches devant être prises en compte dès le départ – à destination des professionnels et ainsi poser quelques
garde-fous par rapport au traitement architectural attendu.
Cependant, l’objectif n’est pas d’être dans la conservation à tout prix, mais de raisonner au projet et d’inciter les architectes à
faire preuve de créativité. Il faut en effet bien penser la qualité des villes que nous souhaitons bâtir pour demain – ne pas
construire des boîtes isolées. Requalifier un bâti, le revaloriser est important car nous avons pu souvent observer, sur ce type
Le patrimoine immobilier des années 50 à 70 – Saint-Nazaire les 6 et 7 octobre 2015
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de copropriétés, une première déqualification – même si nous ne sommes pas dans des profils d’OPAH copro, nous ne
sommes pas loin d’un basculement.
Cette entrée architecturale va donc revaloriser le patrimoine et permettre de retrouver les prix de marché.
Nous pensons également à instaurer un comité technique de validation des projets avec les architectes conseils des villes, afin
de garantir une certaine cohérence sur tout le territoire.
Cathy LESPERT, Lorient Agglomération
S’agissant du plan de financement, vous avez parlé de la contribution des fournisseurs d’énergie. Cette contribution est-elle
compatible avec l’aide du programme « Habiter mieux » ?
Concernant les propriétaires bénéficiaires de l’ANAH, celle-ci est-elle aussi intervenue pour les propriétaires modestes – et non
pas uniquement pour les très modestes ?
Enfin, pour bénéficier d’une aide, les bailleurs ont-ils dû passer par la signature d’une convention à loyer social ?
Jonathan LEFEBVRE
Je vais me permettre de compléter la question en vous demandant si vous n’avez pas saturé les budgets ANAH ? Tout le
monde a-t-il pu bénéficier d’une aide effective ?
Chloé CROUZET
Concernant les CEE – certificats d’économie d’énergie –, nous les avons répartis entre le dispositif « Mur-Mur » et le
programme « Habiter mieux ». Nous avons demandé aux copropriétés de nous céder l’exclusivité des CEE afin de les
réinjecter dans l’aide aux syndicats que nous mettions en place. Nous voulions notamment assurer, à l’égard des
copropriétaires, la visibilité d’un taux d’aide, afin de sécuriser le plan de financement des copropriétaires ; porter le risque par
rapport à cette négociation financière autour des CEE.
Ensuite, il y a des règles de répartition : une partie va aux ménages qui ont bénéficié du programme « Habiter mieux » et une
autre revient à la collectivité.
Pour cette première campagne, nous avions négocié un partenariat avec des fournisseurs d’énergie locaux et nationaux, afin
de nous sécuriser sur des niveaux de financement, des règles d’appels de fonds, etc.
S’agissant des propriétaires occupants modestes, nous avons réussi, en accord avec l’ANAH, à leur assurer un financement
jusqu’à la fin du dispositif. Ce qui a été difficile l’année dernière quand l’ANAH a réorienté ses priorités vers les propriétaires
occupants très modestes. Cela fait partie des difficultés rencontrées dans la problématique de la volatilité des aides, c’est-à-dire
que même si nous avons un programme d’intérêt général, des choses peuvent changer en cours de route. Mais nous avons pu
sécuriser les aides accordées aux ménages qui avaient déjà voté des travaux. Sinon, c’est toute notre action qui perdait sa
crédibilité.
Par ailleurs, nous avions la volonté de croiser ce dispositif avec d’autres dispositifs d’intervention que nous pouvons réaliser sur
le parc privé. Nous avons un PIG – programme d’intérêt général – « Loyers maîtrisés » par lequel nous incitons au
conventionnement, avec ou sans travaux. Nous avons croisé ce dispositif avec le conventionnement des logements, afin qu’un
certain nombre de conventionnements se réalisent dans ces copropriétés ; pour l’instant, une quarantaine de propriétaires
bailleurs ont conventionné et nous en compterons d’avantage dans quelque temps.
Et pour répondre à Cathy LESPERT, non il n’y avait pas d’obligation de conventionnement pour les bailleurs.
Cathy LESPERT
Le patrimoine immobilier des années 50 à 70 – Saint-Nazaire les 6 et 7 octobre 2015
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Quel est le taux de l’aide aux syndicats ?
Chloé CROUZET
Les taux vont de 15 % à 50 % du coût des travaux hors taxes ; 15 % pour uniquement l’isolation des façades jusqu’à 50 % pour
un haut niveau de BBC rénovation. Et un niveau d’aide aux syndicats assez important.
Jonathan LEFEBVRE
S’agissant du budget de l’ANAH, vous avez a priori réussi à le tenir pour ce programme, cela veut-il dire que d’autres cibles,
accompagnées par la direction de l’habitat, en ont fait les frais ? Par exemple, vous n’avez pas pu aller sur de l’habitat indigne
ou des maisons individuelles ?
Chloé CROUZET
C’est une vraie question en termes d’égalité de traitement des propriétaires d’un territoire, notamment de ceux qui souhaitent
réaliser des travaux dans le diffus sur leur immeuble.
Sur des opérations de ce type, l’impact financier se voit très peu en début d’opération, mais explose les budgets en fin
d’opération. L’année 2015 a été une année de tension s’agissant de l’enveloppe déléguée de l’ANAH. Nous avons dû faire des
choix et notamment de n’intervenir que partiellement dans le diffus.
Jonathan LEFEBVRE
Et avec potentiellement un impact économique dans le diffus sur d’autres types d’entreprises – puisque des dossiers sont
bloqués.
Chloé CROUZET
Tout à fait, mais surtout on pénalise des ménages qui déposent un dossier à l’ANAH espérant obtenir une aide. Des ménages
qui ont peut-être déjà commencé les travaux alors qu’ils ne bénéficieront pas de l’aide ou seulement un an après.
Philippe MORICE – Habitat Loire Atlantique
Vous n’avez pas évoqué le système de gestion de trésorerie des travaux et la mise en place éventuelle de fonds d’avance ; y
avez-vous eu recours ?
Chloé CROUZET
Nous avons fait en sorte de décaisser rapidement une bonne partie de nos aides : 50 % pour l’aide aux syndicats et 75 % pour
les aides individuelles complémentaires.
Nous avons par ailleurs travaillé avec les syndics pour qu’ils appellent les quotes-parts, déduction faite des subventions.
Mais nous avons rencontré des problèmes, par exemple, par rapport au couplage entre l’aide de l’ANAH et celle du FART –
fonds d’aide à la rénovation thermique –, notamment dans le montage des dossiers. Parfois, il n’a pas été possible de réaliser
les avances de subventions.
Le patrimoine immobilier des années 50 à 70 – Saint-Nazaire les 6 et 7 octobre 2015
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Dans nos prochaines campagnes, nous allons faire en sorte que notre opérateur pose avec la copropriété un plan de trésorerie
que l’on puisse étudier de manière approfondie, et, le cas échéant, réajuster. Nous tentons également de mettre en place un
prêt copropriété local, un prêt spécifique avec décaissement des fonds au démarrage. Nous voulons que, très tôt dans le projet,
les propriétaires bénéficient de l’ensemble du montant du prêt – subventions comprises – afin qu’ils puissent optimiser au
mieux leur projet et les appels de fonds.
Philippe MORICE
Votre partenaire était une banque classique ?
Chloé CROUZET
Oui, il s’agit de la Banque populaire des Alpes.
Point intéressant : nous allons nous adosser à des financements européens – les fonds ELENA – qui permettront à la banque
de nous proposer un prêt bonifié à des conditions très souples. L’idée étant d’ouvrir ce prêt à un plus grand nombre de
ménages.
Par ailleurs, grâce à notre casquette de maître d’ouvrage, ce fonds européen va pouvoir nous faire bénéficier de lignes de
financement sur l’ingénierie.
Jonathan LEFEBVRE
Je vous remercie.
Je vais maintenant vous présenter le dispositif que nous avons mis en place à Nantes Métropole, pour lequel nous nous
sommes pas mal inspirés des exemples de différents territoires, dont celui de Grenoble.
D’abord, s’agissant du contexte, ce dispositif a été mis en place dans le cadre du plan Climat. Nous avons, à Nantes, un grand
parc privé qui émet 24 % des émissions de gaz à effet de serre et dont 40 % des appartements privés ont été construits
entre 1945 et 1980. Ce parc a été intégré dans le plan local de l’habitat avec la décision de lancer une expérimentation sur le
territoire pour définir comment nous pourrions commencer à travailler sur ce sujet qui était, en dehors des OPAH, assez peu
traité – en tout cas pas sur le volet énergétique.
L’idée était donc de mettre en place un dispositif d’accompagnement pérenne et non pas un financement ponctuel. Les
premiers retours de « Mur-Mur » démontraient que les taux d’engagement financiers pour un bon accompagnement allaient
être importants ; or il n’était pas possible, au niveau des finances locales, d’accompagner en fonds propres les copropriétés.
Nous avons donc choisi de faire de l’accompagnement humain et mis en place une équipe de six personnes – appelées
conseillers climat –, des agents de Nantes Métropole, chargée d’accompagner les copropriétés dans la rénovation énergétique.
Mon rôle est de coordonner le dispositif avec l’objectif d’intervenir sur la partie accompagnement et non technique.
Nous avons d’abord été accompagnés par un cabinet d’urbanisme pendant trois ans qui a formé les conseillers climat sur une
quinzaine de copropriétés et qui nous a fourni des outils que nous nous sommes appropriés pour les développer.
Fin 2012, nous avons pu tirer un premier bilan et élargir l’expérimentation à 30 000 logements. Nous avons ciblé les
copropriétés qui avaient déjà un projet au moins partiel de rénovation dans les tuyaux et un conseil syndical – ou une personne
– suffisamment motivé pour avancer. Ce qui n’a pas toujours été le cas parmi les premiers dossiers que nous avons reçus, car
certains s’étaient présentés sur recommandation des syndics. Nous avions au début, en effet, fait appel aux syndics qui nous
ont envoyé des copropriétés avec lesquelles ils rencontraient des problèmes.
Le conseiller climat intervient de l’audit jusqu’au vote des travaux – et parfois réalise un accompagnement post-travaux –
sachant que les choses peuvent changer en cours d’accompagnement. Il fournit au conseil syndical et au syndic à la fois des
éléments de méthodologie, de pédagogie et des outils pour avancer. Il aide les copropriétaires à se fédérer, afin notamment
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d’éviter qu’un seul propriétaire avance seul, il intervient en assemblée générale, en réunion de conseil syndical et communique
au sein de la copropriété. Il rappelle quelques règles, notamment le rôle du syndic. Il joue vraiment le rôle de tiers de confiance.
L’accompagnement financier est le cœur de mission du conseiller climat. Il aide à comprendre et à mobiliser les aides
financières – ce qui n’est pas la partie la plus simple. Il informe sur ce qui existe aujourd’hui – mais peut-être pas demain – et
réalise des simulations financières. D’abord, de façon grossière en ce qui concerne la partie audit – pour expliquer ces grosses
sommes qui peuvent faire peur –, et ensuite de façon plus fine afin que les personnes soient en mesure d’imaginer un plan de
financement. Il participe par ailleurs au montage du dossier de subventions et effectue une veille sur les dispositifs de
financement car les réglementations et les critères d’éligibilité aux aides sont en constante évolution. Par exemple, nous avons
été obligés d’intervenir en urgence et aider des copropriétés à sortir leur dossier de demande de financement avant le
31 décembre 2013, quand nous avons appris que la prime de rénovation énergétique exceptionnelle allait être supprimée en fin
d’année 2013 – alors que François Hollande avait instauré cette prime jusqu’en 2014.
Nous avons eu la chance de bénéficier d’une aide financière de la région : un financement de projets qui visent à réaliser 40 %
d’économie d’énergie – ce qui sauve le dispositif. Les aides de l’ANAH, conditionnés à 25 % d’économie d’énergie, n’incitent
pas à une rénovation globale et des copropriétés se cantonnent à effectuer les travaux pour lesquels elles peuvent recevoir des
aides.
Le conseiller climat intervient à différentes étapes de l’audit énergétique qui identifie les travaux nécessaires pour atteindre, soit
les 25 % de l’ANAH, soit les 40 % de la région, étudie le BBC et diagnostic le THEIX. La grille des analyses des audits nous
sert également de grille de consultations que l’on fournit aux copropriétaires pour qu’ils sachent ce qu’il convient de demander
au bureau d’études pour être en conformité avec la loi. Nous demandons systématiquement de tenir des réunions avec les
conseils syndicaux – initiale, intermédiaire, finale et en assemblée générale – pour qu’ils puissent s’approprier le projet. Ils ont
maturé le projet, et nous avons, en complément des bureaux d’études, réalisé des simulations financières pour connaître les
aides dont ils peuvent bénéficier selon les scénarios ; ils sont ensuite allés sur de la maîtrise d’œuvre. À ce niveau, notre rôle
est léger, nous considérons que le syndic est compétent pour construire un cahier des charges de maîtrise d’œuvre et nous ne
voulons certainement pas être qualifiés de maître d’œuvre de fait. Quand tout va bien, il vote en année 2 une mission de
maîtrise d’œuvre pour étudier un ou plusieurs scénarios. Nous nous contentons d’identifier les différents écueils possibles,
notamment par rapport à l’urbanisme. Mais nous n’intervenons pas dans les consultations avec les entreprises ; il s’agit là du
travail du maître d’œuvre. Nous nous contentons de rappeler ce qui est important, comme les dispositifs d’aide financière, les
niveaux d’isolant pour bénéficier du crédit d’impôt, etc. Nous avons par exemple sauvé une copropriété qui a dû rajouter les 2
ou 5 centimètres qui manquaient pour obtenir le crédit d’impôt.
Si le conseil syndical le souhaite, nous intervenons en assemblée générale au moment du vote des travaux pour rappeler les
dispositifs d’aide ; nous faisons là une estimation financière poussée, puisque nous allons jusqu’à préciser, typologie par
typologie de logement, le reste à charge, nous établissons le calcul des aides, y compris ANAH, etc.
Le problème est que nous leur tenons un discours relativement anxiogène puisque nous sommes obligés de mettre des « si »
partout – « si vous obtenez telle aide… ».
L’Agence parisienne du climat nous a proposé de mettre en place un outil complémentaire : CoachCopro, la plateforme de la
rénovation énergétique pour les copropriétés. La copropriété a son espace propre – elle s’inscrit par l’intermédiaire du référent
énergie ou du président – qui lui permet de suivre toutes les étapes de son projet. Cela lui permet aussi d’accéder à tous les
documents dont elle besoin, de partager des documents avec le syndic ou d’autres copropriétés, de leur envoyer des
messages, d’avoir accès à la FAQ – foire aux questions, etc. Et bien entendu, elle peut, par cette plateforme, entrer en contact
avec un conseiller climat.
Cette plateforme permet également de fournir de l’information aux petites copropriétés que nous n’accompagnons pas.
Autre outil : les aides BBC. Nous avons eu la chance, sur la première phase de l’appel à projet EcoCités, « Ville de demain »,
de toucher 5,9 M€ pour aider des copropriétés qui vont sur des BBC, à 35 % du montant hors taxes des travaux et 50 % sur de
l’ingénierie – à la fois sur des audits architecturaux et énergétiques et des audits de maîtrise d’œuvre BBC.
Le 14 octobre, la journée sera consacrée à des échanges entre copropriétaires qui présenteront leur projet.
Le patrimoine immobilier des années 50 à 70 – Saint-Nazaire les 6 et 7 octobre 2015
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Nous avons intégré la question du potentiel de valorisation foncière dans tous les audits et maîtrises d’œuvre au niveau du
BBC ; nous obligeons les bureaux d’études à déterminer s’il y a ou pas un potentiel. Car si à Paris, du fait du prix élevé du
mètre carré, il y a un réel potentiel, dans la réalité, sur nos territoires, ce n’est pas forcément si simple. Si par exemple, il faut
rajouter un ascenseur pour les handicapés ou respecter les normes sismiques, il n’est pas certain que l’on puisse dégager une
manne financière.
Par ailleurs, nous sommes en train de créer des fiches de retour d’expérience.
Voici les résultats. Nous avons suivi 52 copropriétés en accompagnement complet depuis 2011 ; 31 sont encore en cours, alors
que les autres ont choisi de faire une pause ou ont refusé le projet ; 21 copropriétés ont bénéficié d’une information détaillée ;
28 audits énergétiques ont été réalisés ; et 11 programmes de travaux ont été votés – tous ne contiennent pas des mesures
énergétiques, mais certains sont à 25 %, 40 % ou en BBC. Au total, ce sont quand même 5 GWH d’économie et 1 000 tonnes
de CO2 évités, 6 M€ de travaux ont été votés.
Il faut préciser qu’il s’agit de copropriétés pas très énergivores – autour de la note D dans l’étiquette énergie – et que le gain
moyen est d’environ 100 KWH.
Les principales difficultés rencontrées sont les suivantes : l’argumentaire est parfois fragile – en l’absence d’observatoire il est
plus difficile de prouver la valeur verte ; une absence de garantie du niveau de la réduction de la facture énergétique ; des
interrogations sur le confort acoustique ; un problème de solvabilité ; l’absence d’aides propres à Nantes Métropole ; la
copropriété peut avoir une autre priorité que la rénovation énergétique ; des syndics qu’il n’est pas toujours facile de mobiliser –
y compris la FNAIM ; le problème de visibilité des aides. Nous avons dans ce domaine mobilisé les aides du Crédit foncier, les
prêts Copro 1 et Copro 100 : ils peuvent être attribués à tous les propriétaires dès lors qu’ils sont à jour de leurs charges.
Soraya DAOU
S’agissant des opérations BBC dont vous disiez que de nouveaux acteurs intervenaient, je vois là le logo de la Caisse des
Dépôts. Quelle aide apporte-t-elle ?
Jonathan LEFEBVRE
Nantes Métropole a postulé à l’appel à projet national « Rénovation énergétique » dans le cadre du programme « Ville de
Demain », géré par la Caisse des Dépôts et Consignations pour le compte de l’État. C'est dans ce cadre qu'est mis en place ce
dispositif de soutien à la rénovation BBC financé sur des fonds du Programme Investissements d'Avenir.
Soraya DAOU
Et cela se traduit en financement ingénierie ?
Jonathan LEFEBVRE
Oui, 50 % en ingénierie, audit et maîtrise d’œuvre – études uniquement – et 35 % du montant hors taxes des travaux ensuite.
Mais pas d’ingénierie de Nantes Métropole en direct.
Gladys GRELAUD
C’est donc le programme « Ville de demain » qui finance le dispositif que vous mettez en place, en ingénierie et en travaux.
Jonathan LEFEBVRE
Le patrimoine immobilier des années 50 à 70 – Saint-Nazaire les 6 et 7 octobre 2015
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En 2011, quand nous avons commencé, la région et l’ADEME finançaient une partie des audits. Quand les financements ont
cessé, nous avons continué à procéder à des audits pour les copropriétés, puisqu’ils étaient devenus obligatoires.
S’agissant des travaux, les aides de la région, conditionnées à 40 % d’économie d’énergie, nous permettaient d’avoir des
programmes relativement ambitieux. Cette aide peut aller jusqu’à 100 000 € par copropriété. Ce qui est important pour une
petite copropriété, mais très peu pour une copropriété qui engage 1,5 M€ de travaux. Maintenant, comme vous le savez, des
élections ont lieu en décembre et nous ne savons pas si cette aide sera maintenue.
Le dispositif « Ville de demain » nous permet de continuer et de redynamiser le territoire.
La Caisse des Dépôts nous a autorisés à procéder à des appels à projets. Nous avons identifié un panel de copropriétés qui
étaient potentiellement éligibles et qui pouvaient voter pour un scénario BBC. Ensuite, nous avons redistribué la somme que
nous avions mobilisée, par appels à projets.
Maintenant, j’ai l’impression que la Caisse des Dépôts a changé de logique et nous oriente vers des copropriétés qui sont déjà
engagées dans un projet. Ce qui ne nous convient pas vraiment, car cela nous oblige à aller chercher des copropriétés ciblées.
Allons-nous pouvoir consommer les 5,9 M€ d’aides d’ici à mars 2016 en décision de travaux ? Ce n’est pas certain. Mais au
moins, il s’agit d’un véritable moteur pour les deux ans qui viennent.
Sébastien JEROME
S’agissant des copropriétés qui n’ont pas voté les travaux, mais qui ont bénéficié d’un accompagnement, connaissez-vous les
raisons précises du non-aboutissement ? Le fait d’avoir laissé les copropriétés agir de façon autonome ne vous a-t-il pas causé
de mauvaises surprises ?
Jonathan LEFEBVRE
En effet, nous nous sommes positionnés en externe et parfois nous sentons que nous atteignons nos limites par rapport à
l’accompagnement. C’est-à-dire que si nous étions en mesure d’apporter tel ou tel conseil en plus, cela permettrait de faciliter
certaines choses. Cela dit, nous restons neutres et nous responsabilisons le territoire.
Parmi les copropriétés dont le projet n’a pas abouti, il y a d’abord celles que l’on nous avait imposées – en fait, elles n’avaient
pas de potentiel. D’autres avaient plutôt bien commencé, elles étaient accompagnées par des bureaux d’études thermiques,
des maîtrises d’œuvre très compétentes, mais le coût des travaux était trop élevé. Certaines ont eu des problèmes avec le
syndic, qui ne joue pas toujours le jeu.
Chloé CROUZET
J’aimerais savoir ce qui est proposé en termes d’accompagnement autour de l’étude du potentiel de valorisation foncière.
Doivent-ils regarder tout ce qui est possible en termes de surélévation par exemple, de droit à construire en annexe à la
copropriété ? Et quelle ingénierie d’accompagnement êtes-vous capables de proposer derrière si les copropriétés veulent
poursuivre ?
Jonathan LEFEBVRE
Nous l’avons fait de manière très ponctuelle pour ne pas augmenter les coûts d’ingénierie pour les copropriétaires. Nous
demandons, en face d’audit ou en maîtrise d’œuvre, dans le cadre d’un BBC, s’il y a un potentiel réglementaire – en
surélévation – ou un potentiel sur le terrain et quid de la réglementation ? Et si potentiel il y a, comment pourrait-il être
valorisé ? Notre rôle s’arrête là. Et si la copropriété est intéressée, nous leur conseillons de missionner la maîtrise d’œuvre pour
creuser un peu plus et voir comment cela peut être intégré dans le projet à un coût qui soit économiquement pertinent.
Le patrimoine immobilier des années 50 à 70 – Saint-Nazaire les 6 et 7 octobre 2015
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Christiane LUC
Avez-vous eu des demandes d’installation d’ascenseur pour des immeubles qui n’en avaient pas ?
Jonathan LEFEBVRE,
Oui, la question s’est posée, mais dans une seule une copropriété. Nous essayons globalement d’être vigilants sur la question
de l’accessibilité, mais surtout pour les entrées d’immeubles. Nous avons conseillé certaines copropriétés, par exemple, pour
un accès à un cabinet d’orthophoniste ou de médecin, en les mettant en relation avec le dispositif adéquat. Nous travaillons en
lien avec les opérateurs ANAH pour essayer de coupler les dispositifs.
Bien puisqu’il n’y a plus de questions, je laisse la parole à Anne HEOUAIRI, de Saint-Nazaire Agglomération.
Anne HEOUAIRI
Bonjour à tous. Je vous parlerai de la plateforme EcoRénove. Contrairement aux interventions précédentes, nous sommes
dans une phase de développement de l’accompagnement des copropriétés et pour cela nous allons nous appuyer sur cette
plateforme en devenir. En 2015, nous avons réfléchi à sa structuration et à la manière dont nous allions pouvoir accompagner
nos propriétaires sur les questions de rénovation énergétique.
La CARENE propose des opérations depuis presque 10 ans. Nous lançons, pour 2015-2018, un PIG multithématique sur les
questions de la précarité énergétique, du maintien à domicile, de l’habitat indigne et du locatif conventionné. Des thématiques
qui ont depuis très longtemps été abordées sur notre territoire. Nous sommes opérateur en régie, nous travaillons donc sur nos
propres dispositifs.
L’enjeu est double : la rénovation énergétique de notre parc – de la reconstruction pour une grosse partie – et son articulation
avec le travail qui est en cours – nous avons un POPAC depuis 2013 sur la CARENE. Comment allons-nous articuler cet
accompagnement sur les copropriétés – qui sont pour la plupart des petites copropriétés – que nous avons choisi
d’accompagner sur le secteur du centre-ville de Saint-Nazaire ?
Notre service est structuré depuis longtemps, nous sommes PRIS depuis 2013. Notre service est structuré autour du service
Amélioration de l’habitat de la CARENE, qui accompagne les propriétaires, les bailleurs et les copropriétaires, de manière
individuelle, depuis longtemps sur ces questions de rénovation de leur habitat. Nous travaillons avec un espace Info-énergie qui
dispose également d’un bureau à la CARENE en lien avec l’ADIL.
Nous avons répondu à l’appel à projets du CLER pour la mise en place d’un SLIME pour travailler de manière un peu plus
formelle au repérage et à l’orientation des ménages en précarité énergétique sur le territoire de la CARENE.
Le dispositif préexiste donc, et il s’agit de le structurer de manière plus globale pour sensibiliser les propriétaires aux questions
de rénovation énergétique et pour pouvoir les accompagner jusqu’à la fin des travaux – et même de les évaluer.
Les copropriétés du centre-ville de Saint-Nazaire viennent s’ajouter à ce dispositif, de manière un peu différente ; un syndic de
copropriété, ce n’est pas la même chose qu’un propriétaire.
Nous mobiliserons tous nos partenaires institutionnels ou privés sur la plateforme ; l’objectif de cette plateforme étant de se
positionner comme un accompagnateur d’un projet et non pas de se substituer aux propriétaires.
Concernant la première phase, c’est le SLIME qui nous permettra de sensibiliser, d’informer et de conseiller les ménages les
plus fragiles sur les questions de précarité énergétique. Nous allons également mobiliser les acteurs de l’aide à domicile ; un
travail que nous allons réaliser dès 2016, à la fois sur le maintien à domicile et sur les questions de rénovation énergétique.
Une mission est en cours avec La Poste : une expérimentation à la sensibilisation énergétique, que nous avons démarrée en
avril 2015, sur l’initiative de la région. Nous expérimentons, avec les facteurs et les postiers, une campagne de sensibilisation à
la rénovation énergétique. Et nous envisageons par ailleurs des prêts de caméras thermiques pour pouvoir sensibiliser les
propriétaires à toutes ces questions.
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Par ailleurs, nous allons lancer un appel à manifestation d’intérêt sur cette rénovation des copropriétés – ce que j’appelle « le
plus copro ». Je ne pourrai pas aujourd’hui entrer dans le détail de ce projet, car nous allons travailler dessus durant les mois
qui viennent. Nous n’allons rien inventer, nous allons nous inspirer de ce qui a déjà été fait, à Nantes, à Grenoble et ailleurs.
Cet appel sera lancé pour des copropriétés qui sont déjà en cours de réflexion ou qui sont un peu perdues, afin de les
accompagner.
Nous organisons, dans le cadre du POPAC, véritable outil de sensibilisation, des cafés Copro, des ateliers animés par SOLIHA
ou par la CLCV sur différents thèmes : l’acoustique, le syndic bénévole, l’accompagnement aux travaux, etc.
Un dispositif Thermo-Copro est en cours, avec l’association Alisée. Nous avons choisi de commencer par faire trois ThermoCopro qui nous serviront de support pour inciter d’autres copropriétés à choisir de bénéficier de ce dispositif ; l’objectif est de
réaliser 50 Thermo-Copro dans les trois ans et de présenter le bilan en assemblée générale.
Nous envisageons par ailleurs, avec Unis-Cité, un projet Médiateur-Copro qui s’appuiera sur un dispositif qui fonctionne assez
bien chez nous, qui est le défi « familles à énergie positive », un dispositif d’animation autour des éco gestes. Unis-Cité nous
propose d’utiliser ce support pour créer une équipe de copropriétaires et de les sensibiliser aux économies d’énergie.
Concernant le deuxième volet, qui est l’aide à la définition et à la conception du projet, nous avons, sur les copropriétés que
nous accompagnons, des diagnostics thermiques – gratuits pour les propriétaires modestes et très modestes – qui sont portés
suivant des conditions de ressources ; les fameux diagnostics qui nous permettent de savoir si l’on atteint les 25 % d’économie
d’énergie ou les 40 % pour les aides régionales. Demain, dans le cadre de la plateforme, les propriétaires bénéficieront d’un
accompagnement gratuit par un conseiller rénovation énergétique.
Dans l’étape 2 de l’appel à projets nous accompagnerons des copropriétés qui auront été identifiées dans l’étape 1, sur la base
d’un questionnaire, pour vérifier leur volonté de se lancer dans ces projets. Une visite préalable et une évaluation du besoin
seront proposées, ainsi que des aides financières pour la réalisation de diagnostics – la CARENE dispose actuellement d’un
dispositif expérimental d’accompagnement financier sur ces visites et de diagnostic que nous allons faire évoluer afin de
proposer des aides financières pour les 5 ou 10 copropriétés identifiées.
Concernant l’aide à la consultation des entreprises, la plateforme internet EcoRénove de la CARENE permettra une mise en
relation des propriétaires et des entreprises s’engageant sur une charte de qualité. Nous travaillons également avec les
fédérations et la chambre de métiers pour inciter au groupement d’entreprises. Nous sommes là toujours dans
l’accompagnement, l’analyse des devis et des solutions techniques, soit par l’espace Info-énergie, soit par le conseiller
rénovation énergétique, en fonction des profils des propriétaires.
Nous serons là dans l’étape 3 pour les copropriétés accompagnées : les faire participer sur cette partie, jusqu’à leur faire voter
les travaux en assemblée générale.
Quant à l’aide à la mobilisation et au montage des financements, il s’agit du cœur de notre métier. Nous allons donc continuer à
accompagner, gratuitement, les propriétaires sur ces questions de mobilisation et de montage de financement. Sur la
plateforme internet, ils peuvent savoir s’ils sont éligibles aux aides ou pas ; demain, ils pourront simuler des aides locales et
nationales. Par ailleurs, la CARENE a ses propres aides qui sont vraiment intéressantes – notamment pour les propriétaires
modestes qui ne sont plus éligibles à certaines aides. Des aides spécifiques aux travaux qui seront proposées aux lauréats
d’appel à projets « rénovation des copropriétés ». Il s’agit d’aides sur les parties communes, pour l’isolation des combles et une
aide à l’embellissement des façades, sans conditions de ressources pour tous les propriétaires des centres-villes et centre
bourg dont les périmètres ont été validés par les conseils municipaux, et avec conditions de ressources pour les autres. Un
conseil gratuit par un architecte conseil qui se déplace et élabore une fiche avec une proposition de coloration sur un nuancier.
L’accompagnement pendant les travaux et le suivi post-travaux est quasiment le même pour le propriétaire et le syndic d’une
copropriété. Il y aura toujours un accompagnement gratuit pendant les travaux, nous laisserons au conseiller rénovation
énergétique, suivant la complexité du dossier, la possibilité d’intervenir au cours d’une réunion.
Nous souhaitons également mettre en place un accompagnement davantage collaboratif ; de passer de l’individuel à un travail
de groupe, d’utiliser l’exemple d’autres propriétaires et de pouvoir échanger. S’agissant du suivi post-travaux, nous souhaitons
former les utilisateurs à vivre dans un bâtiment réhabilité, à prendre de nouvelles habitudes. Nous travaillerons également sur
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les suivis de consommation, nous leur proposerons un contrat moral, selon lequel nous les accompagnerons gratuitement mais
ils devront, durant quelque temps, nous fournir les relevés de consommation. Enfin, nous travaillerons également sur la mise en
place d’un carnet de santé du bâtiment, avec la possibilité de présenter les résultats des consommations en assemblée
générale pour les copropriétés qui sont accompagnées dans le cadre de l’appel à projets.
L’objectif de cette plateforme est d’avoir un interlocuteur unique, du début à la fin du projet, qui puisse mobiliser et encadrer les
partenaires à chaque étape. Nous allons faire un gros travail de recensement pour renvoyer les propriétaires vers les
professionnels – maîtres d’œuvre, bureaux d’études, partenaires bancaires, etc. Nous souhaitons ainsi sécuriser au mieux le
parcours du porteur de projet – sachant que cela sécurise également les entreprises et les banques, contentes de savoir que la
collectivité est derrière, en soutien.
Jonathan LEFEBVRE
Je vous remercie.
Chloé CROUZET
Je souhaiterais avoir plus de détails sur l’entrée précarité énergétique ; comment est prévu l’accompagnement ?
Anne HEOUAIRI
Il y a deux ans, une étude a été réalisée sur une géolocalisation de la précarité énergétique sur le territoire de la CARENE ;
nous avons donc pu identifier des quartiers où la précarité énergétique est plus importante qu’ailleurs.
Historiquement nous animons un pôle « mal logement » avec les CCAS, l’ARS, EDF, GDF et le service hygiène et santé de la
ville de Saint-Nazaire. Au départ, nous sommes plutôt sur une entrée « logement indigne » ou « péril », nous suivons
nominativement les dossiers et faisons le point régulièrement pour voir comment l’accompagnement se met en place. Nous
avons décidé d’ajouter l’entrée précarité énergétique dans cet accompagnement.
Nous recevons des fiches des travailleurs sociaux, de l’ARS, des fiches « habiter mieux ». Demain, nous aimerions avoir un
ambassadeur pour se rendre dans les secteurs que nous avons repérés, aller voir les familles pour les sensibiliser aux
questions énergétiques, mais surtout pour pouvoir les orienter vers tous les partenaires du territoire – assistante sociale,
service amélioration de l’habitat, etc. Car la solution n’est pas forcément de faire des travaux.
Jonathan LEFEBVRE
Concernant l’accompagnement post-travaux, vous envisagez une formation à l’utilisation de l’habitat réhabilité. Avez-vous déjà
testé ce type de formation ?
Nous l’avons testé à Nantes Métropole et au bout de trois ou quatre ans de travaux, les gens en ont assez. Il était très difficile
d’arriver à les mobiliser pour se rendre à des réunions, pour se former à des éco-gestes, etc.
Anne HEOUAIRI
Non, nous ne l’avons pas encore testé. Mais de notre expérience tirée de l’espace Info-énergie et de l’association Alisée, qui
propose des ateliers et notamment des réunions « tu perds watt », nous nous sommes rendu compte que les propriétaires
étaient sensibles aux éco-gestes.
Sur nos OPAH, 85 % des propriétaires accompagnés sont très modestes et s’ils ne consomment pas beaucoup, c’est parce
qu’ils ne chauffent pas. Il est donc important de les former, en cas d’isolation de leur appartement, par exemple, pour qu’ils ne
pensent pas qu’ils peuvent, du fait des travaux, surchauffer leur appartement.
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Cathy LESPERT
Le processus que vous expliquez est le processus idéal. À Lorient Agglomération, nous avons un processus à peu près
identique et depuis trois ans, nous avons même un travailleur social qui accompagne les ménages en situation de précarité
énergétique. Mon inquiétude concerne le volet « aide à la consultation et à la sélection des entreprises ». Car il est de notre
mission d’aider au choix des entreprises.
Anne HEOUAIRI
Les propriétaires peuvent trouver sur notre site EcoRénove CARENE toutes les entreprises RGE et Handibat – la liste nous est
transmise par les fédérations. Aujourd’hui, nous nous contentons de les mettre sur notre site, nous ne voulons pas les
référencer ; ce serait trop compliqué. Le propriétaire reste maître de son choix et c’est lui qui signe le devis avec l’entreprise.
S’agissant de nos propres aides CARENE, nous imposons deux devis, une responsabilité civile et une garantie décennale. De
sorte que les propriétaires comparent les prix. Nous travaillons avec la FFB, la CAPEB et la chambre des métiers et de
l’artisanat sur la manière de mettre en relation les entreprises avec les propriétaires. L’entreprise pourra répondre à une offre
qu’il trouvera sur la plateforme, à condition de respecter une charte – une charte assez souple.
Emmanuelle BUORD – Brest Métropole
Ce que vous décrivez là reprend exactement ce que vous pouvez trouver sur la plateforme Tinergie Copro qui fonctionne à
Brest depuis 2012 : un partenariat en amont avec la FFB et surtout avec la chambre des métiers ; n’accepter sur la plateforme
que les entreprises qualifiées ; et un droit de regard de notre agence locale de l’énergie sur ce que proposent les entreprises
aux particuliers. Une sécurisation complète du propriétaire. Et la plateforme doit également servir à faire monter en
compétences les entreprises locales.
Marie-Pierre KEREMBELLEC - Morbihan
Je voudrais revenir sur cette question car un point me paraît crucial : l’assurance. Vous parliez de la garantie décennale, mais
je crois que, avoir la certitude que l’entreprise est assurée n’est pas suffisant, elle doit l’être pour les travaux qu’elle va réaliser.
Depuis la loi sur la transition énergétique, le volet énergie rentre dans la garantie décennale.
Anne HEOUAIRI
Mais la difficulté est que l’entreprise peut être assurée pour certains travaux et pas pour d’autres.
Je vous l’ai dit, nous sommes opérateur en interne et, de fait, le travail des conseillers a beaucoup évolué. L’obligation pour les
aides CARENE de fournir deux devis et de vérifier avec le propriétaire la responsabilité civile et la garantie décennale est
exigeante : il faut vérifier que les travaux sont soumis à la garantie décennale ; vérifier que la garantie décennale de l’entreprise
porte bien sur les travaux qui vont être réalisés, etc. Cela leur demande plus de travail. Mais cela nous paraît primordial, dans
la mesure où depuis deux ans beaucoup d’entreprises ont été mises en liquidation, d’autres ne sont pas correctes dans leur
manière de finir leur chantier. Les propriétaires sont très démunis et doivent être sécurisés.
Gladys GRELAUD
Cela pose la question du type d’accompagnement que fournit la collectivité. Le propriétaire doit aussi être acteur de son projet ;
la collectivité n’est pas un tuteur.
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ANNE HEOUAIRI
Oui, nous n’imposons rien. Nous avons beaucoup de personnes âgées parmi les propriétaires que nous accompagnons qui,
par exemple, font appel au même plombier depuis 20 ans. Nous leur conseillons juste de comparer les prix, ils restent maîtres
de leur choix.
Jonathan LEFEBVRE
Et la question de l’assurance est évidemment cruciale en copropriété, y compris pour les questions de liquidation. Dans une
copropriété, par exemple, deux entreprises se sont succédé pour l’isolation ; ce qui nous a permis de nous rendre compte que
la qualité n’était pas la même.
Par ailleurs, il ne faut pas oublier la responsabilité du maître d’œuvre ; il doit être responsabilisé. C’est aussi la raison pour
laquelle nous avons fait le choix de nous mettre en retrait – à chacun son métier.
Je vous remercie toutes et tous.
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