[france] fiche de suivi des progrès par pays
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[FRANCE] FICHE DE SUIVI DES PROGRÈS PAR PAYS 1 TABLE DES MATIÈRES 1. STOP AU TRAFIC DES MINEURS À DES FINS SEXUELLES EN FRANCE : SUIVI DES PROGRÈS p. 3 2. VUE D'ENSEMBLE DES EFFORTS MIS EN PLACE PAR LES ÉTATS POUR LUTTER CONTRE LE TRAFIC DES MINEURS p. 4 3. SITUATION EN FRANCE p. 6 4. APERÇU DÉTAILLÉ DES PROGRÈS EN MATIÈRE DE LUTTE CONTRE LE TRAFIC DES MINEURS EN FRANCE p. 9 A. Mesures de prévention du trafic des mineurs au niveau des communautés p. 9 B. Conformité du cadre légal français avec les normes internationales p. 11 C. Services de soutien spécialisés pour enfants victimes p. 13 5. PÉTITION DE LA CAMPAGNE EN FRANCE p. 16 6. MÉTHODOLOGIE DE RECHERCHE p. 17 7. NOTES DE FIN p. 18 2 1. STOP AU TRAFIC DES MINEURS À DES FINS SEXUELLES EN FRANCE : SUIVI DES PROGRÈS La campagne Stop au Trafic des mineurs à des fins sexuelles, menée par The Body Shop en partenariat avec ECPAT, a pour but d'inspirer un changement durable afin de renforcer et de garantir la protection des mineurs et de leurs droits en luttant contre toutes les formes d'exploitation, notamment le trafic à des fins sexuelles. Partout dans le monde, la campagne de The Body Shop et ECPAT encourage le public à s'engager activement en faveur de la protection des mineurs contre le trafic à des fins sexuelles et à unir leurs forces aux nôtres pour inciter les différents gouvernements à prendre des mesures pour atteindre trois objectifs bien précis en matière de prévention et de protection des enfants contre le trafic à des fins sexuelles et garantir la prise en charge des victimes. Ces objectifs sont considérés comme essentiels à la protection des mineurs à travers le monde. Chaque année, les progrès des différents pays sont évalués grâce à un système d'avant-garde qui nous donne des renseignements sur chaque pays à l'aide d'une « ‘fiche de suivi des progrès » indiquant les avancées des quatre mesures essentielles aux principaux objectifs définis par la campagne. Même si, dans de nombreux pays du monde, la société civile et d'autres acteurs de poids jouent un rôle décisif dans la lutte contre l'exploitation des enfants à des fins sexuelles, la protection des mineurs contre le trafic à des fins sexuelles reste néanmoins essentiellement du ressort des états. Les renseignements de cette fiche de suivi décrivent la situation du trafic des mineurs en France et font état des principales mesures prises par le gouvernement pour faire face à ce problème. Un code couleur distingue les différents niveaux d'action contre le trafic des mineurs à des fins sexuelles. Exemple : Efforts remarquables (le VERT désigne des politiques ou des services spécialisés efficaces en faveur des victimes); Quelques progrès (le JAUNE illustre généralement un certain niveau d'activité de lutte et de prévention du trafic d'êtres humains, tout en indiquant une considération limitée mineurs en tant que groupe cible ou des services mal adaptés à la protection des enfants victimes de trafic); ou encore Progrès insuffisants (le ROUGE met en évidence des politiques ou des services de protection des victimes de trafic peu adaptés, voire inexistants).1 Ces renseignements sont accompagnés de recommandations pertinentes jugées comme essentielles pour dire Stop au trafic des mineurs à des fins sexuelles. 1 Le symbole « étoile » désigne une mesure prise par une ONG sur le terrain. 3 2. VUE D'ENSEMBLE DES EFFORTS MIS EN PLACE PAR LES ÉTATS POUR LUTTER CONTRE LE TRAFIC DES MINEURS Même si les progrès en matière de lutte contre le trafic des mineurs à des fins sexuelles sont contrôlés et évalués pays par pays en fonction d'indicateurs précis2, leur suivi contribue à la mise en place de mesures d'envergure mondiale qui encouragent tous les pays du monde à assurer la protection des droits des enfants contre toutes les formes d'exploitation sexuelle. Plus de 3 000 participants, vivant dans 137 pays du monde, ont d'ailleurs réaffirmé leur engagement en faveur de cette cause lors du troisième congrès mondial contre l'Exploitation Sexuelle des mineurs, organisé au Brésil en 2008. ECPAT International et The Body Shop lancent un appel mondial pour s'assurer que des mesures conjointes rapides seront prises pour honorer leurs engagements actuels en faveur de la prévention et de l'éradication du trafic des mineurs à des fins sexuelles d'ici 2012. Afin de donner un aperçu général des efforts des pays pour lutter contre le trafic des mineurs, la figure 1 donne le pourcentage des pays appartenant à chacune des quatre catégories : ‘Efforts remarquables ; ‘Quelques progrès ; ‘Mesures insuffisantes ; et ‘ Progrès insuffisants. ‘« Efforts remarquables » indique que les pays ont pris des mesures adaptées pour lutter contre le trafic des mineurs. ‘« Quelques progrès » désigne les états ayant pris des mesures et des initiatives contre le trafic d'êtres humains en général, mais que ces dernières sont parfois mal adaptées à la protection des enfants victimes de ces crimes. ‘« Mesures insuffisantes » s'applique aux états ayant pris des mesures mal adaptées à la lutte contre le trafic d'êtres humains et ne fournissant que peu, voire pas d'efforts en faveur de la lutte contre le trafic des mineurs. ‘Enfin, la catégorie « Progrès insuffisants » regroupe les pays ayant pris des initiatives insuffisantes, voire inexistantes, contre le trafic d'êtres humains ou d'enfants. La figure 2 dresse la liste des pays appartenant à chacune des catégories mentionnées ci-dessus, classés en fonction de leurs actions par rapport à chaque indicateur. FIGURE 1. VUE D'ENSEMBLE DES EFFORTS MIS EN PLACE PAR LES ÉTATS POUR LUTTER CONTRE LE TRAFIC DES MINEURS1 2 Vous trouverez de plus amples renseignements sur la méthodologie de recherche à la page 17. 4 FIGURE 2. EFFORTS DES ÉTATS POUR LUTTER CONTRE LE TRAFIC DES MINEURS3 PROGRÈS INSUFFISANTS MESURES INSUFFISANTES QUELQUES PROGRÈS EFFORTS REMARQUABLES CAMBODGE CHYPRE BELGIQUE ROUMANIE MEXIQUE GRÈCE NORVÈGE TAÏWAN PAKISTAN INDONÉSIE AUSTRALIE DANEMARK MALAISIE SUÈDE CANADA R-U SINGAPOUR INDE ESTONIE TURQUIE ESPAGNE RÉPUBLIQUE TCHÈQUE THAÏLANDE HONG KONG AFRIQUE DU SUD RUSSIE FRANCE ÉTATS-UNIS ITALIE JAPON PAYS-BAS PHILIPPINES SUISSE AUTRICHE 3 Ce document présente une mise à jour du classement des efforts des pays contre le trafic des mineurs en juin 2010. 5 FINLANDE ALLEMAGNE IRLANDE LUXEMBOURG NOUVELLE-ZÉLANDE POLOGNE PORTUGAL CORÉE DU SUD 3. SITUATION EN FRANCE La France compte parmi les 53 % de pays qui ont réalisé des progrès pour enfin pouvoir dire stop au trafic des mineurs à des fins sexuelles. Le gouvernement français a fait des progrès et s'efforce de dire stop au trafic des mineurs, notamment grâce à l'adoption d'un cadre légal strict contre le trafic d'êtres humains s'appliquant également au trafic des mineurs. Il reste cependant des efforts à faire en matière de stratégies et de mesures de prévention du trafic, notamment grâce à des campagnes de sensibilisation sur le sujet. Par ailleurs, il est essentiel de garantir une application plus efficace des lois et d'assurer aux victimes une aide et une protection mieux adaptées à leur situation. Trafic des mineurs à des fins sexuelles en France Selon les motifs du trafic, certains pays peuvent être des zones d'‘« expédition » ou d'« ‘origine » (pays d'origine des victimes), de « ‘transit » (pays vers lesquels les mineurs peuvent être envoyés puis gardés avant d'être renvoyés vers leur destination finale), et des zones de « ‘réception » ou de ‘« destination » (pays où ils seront exploités). Il est aussi possible que certains pays soient les trois à la fois. La France est principalement considérée comme un pays de destination du trafic des mineurs. La plupart des enfants sont victimes de trafic à l'intérieur du pays. Même si des cas avérés de trafic de mineurs sur le territoire français ou de transit de 6 victimes en France avant leur envoi vers le Royaume-Uni ou des pays scandinaves ont été dénoncés, ils restent bien moins nombreux que les cas de trafic de mineurs envoyés en France. En France, les mineurs concernés sont principalement victimes d'exploitation sexuelle, mais certains font aussi l'objet de servitude domestique, de travail forcé dans des ateliers de misère ou d'autres types d'exploitation. Leur extrême vulnérabilité expose cependant les enfants victimes d'autres formes de trafic à l'exploitation et aux abus sexuels. En France, comme dans d'autres pays du monde, les enfants sont victimes de trafic en raison de l'instabilité de leurs ressources ou de leur manque d'instruction qui les exposent plus particulièrement aux abus d'autorité et à la manipulation. Ils se sentent également obligés d'aider à subvenir aux besoins de leur famille et peuvent pour cela être vendus ou « expédiés » à l'étranger par des parents ou des proches. Les enfants livrés à euxmêmes ou dont la vie familiale ou sociale est dissolue, les enfants des rues ou des camps de réfugiés sont particulièrement vulnérables face à la traite des êtres humains. La prostitution enfantine touche des filles comme des garçons, souvent envoyés d'Europe de l'Est (principalement de Roumanie), d'Asie (Chine ou Inde) et d'Afrique de l'Ouest (notamment de Sierra Leone, du Libéria, du Ghana et du Nigéria)2. Des petits garçons sont envoyés d'Afrique du Nord, surtout du Maroc, et atterrissent souvent dans les rues de Marseille où la plupart sont victimes d'exploitation sexuelle. Des cas avérés de trafic et de prostitution impliquaient aussi des fillettes d'Angola, du Cameroun ou du Congo3. On a aussi dénoncé des envois à des fins d'exploitation sexuelle de femmes et d'enfants brésiliens en Guyane française 4. Les enfants victimes de trafic transitent généralement par Paris avant d'être envoyés dans des villes de province comme Bordeaux ou Marseille5. Les mineurs non accompagnés sont particulièrement exposés au risque de trafic à des fins sexuelles. Le Conseil de l'Europe estime qu'environ 4 000 à 5 000 mineurs non accompagnés arrivent en France chaque année. En 2005, environ 3 500 enfants isolés ont été confiés aux services d'aide à l'enfance. Il est impossible d'obtenir des chiffres fiables concernant le trafic des mineurs à des fins sexuelles en France. Selon plusieurs ONG, de 5 000 à 8 000 mineurs ont été victimes d'exploitation sexuelle à des fins commerciales en 20026. Cependant, les preuves de prostitution de mineurs étrangers restent anecdotiques en raison de l'insuffisance des moyens de contrôle et de collecte de données. Même si des ONG et le Bureau du Commissaire à l'enfance clament que le phénomène du trafic des mineurs n'est pas suffisamment dénoncé, les autorités policières, notamment l'Office Central pour la Répression de la Traite des Êtres Humains (OCRTEH) et la Brigade de Protection des Mineurs ne sont pas du même avis7. Selon l'OCRTEH, responsable des dossiers liés à l'exploitation sexuelle et à la prostitution, 1 218 victimes d'« incitation à la prostitution » ont été identifiées entre 2003 et 2006, parmi lesquelles on comptait 27 jeunes filles de moins de 18 ans8. Par ailleurs, le gouvernement français estime que le commerce sexuel exploite actuellement 15 000 à 18 000 femmes, dont 10 000 à 12 000 victimes de trafic à des fins sexuelles9. En 2007, les autorités ont recensé 1 002 victimes de trafic, dont 76 % d'étrangers10. Les enfants et les jeunes sont des proies faciles pour les trafiquants, qui les obligent à satisfaire les caprices des clients du marché du sexe, tous susceptibles d'exploiter sexuellement un enfant. Les trafiquants peuvent être des étrangers, des connaissances ou même des proches des enfants victimes. Par ailleurs, ils sont impliqués dans des réseaux criminels qui ‘recrutent les mineurs et leur fournissent des faux papiers. Ces criminels ont des profils variés : Jeunes ou vieux, mariés ou célibataires, ils appartiennent à tous les milieux sociaux, économiques ou professionnels. Les poursuites judiciaires de plus en plus fréquentes en France ont poussé de nombreux membres de réseaux criminels à s'expatrier et à sévir en Belgique et en Allemagne11. 7 À l'heure actuelle, on ne sait pas combien de trafiquants ont été poursuivis et condamnés en France. D'après les derniers chiffres communiqués par le ministère de la Justice, 19 condamnations ont été prononcées en vertu des lois relatives à la lutte contre la traite des êtres humains en 200712. De plus, le ministère de l'Intérieur a annoncé le démantèlement de 30 réseaux de trafic en France13. Pour répondre aux cas de trafic à des fins sexuelles, les cours de justice et les procureurs français préfèrent appliquer des lois anti-proxénétisme plutôt que des lois de lutte contre la traite. En effet, les peines prévues dans les cas de traite et de proxénétisme, notamment en cas de circonstances aggravantes (victime mineure ou particulièrement vulnérable) sont quasiment identiques14. Selon le gouvernement, 745 personnes, parmi lesquelles 283 femmes, ont été poursuivies pour incitation à la prostitution en 2006.Dans la mesure où le gouvernement ne ventile pas les données sur la détermination des peines par crime, il est difficile de déterminer combien de ces cas avérés de trafic et d'exploitation sexuelle impliquaient des mineurs15. Des Français, principalement des hommes, exploitent également des enfants à l'étranger, attirés par des destinations célèbres pour le tourisme sexuel comme Bali, le Cambodge, les Philippines ou la Thaïlande, mais aussi des pays d'Afrique comme le Maroc ou Madagascar, ainsi que de nombreux pays partout dans le monde16. Études de cas : Exploitée par sa tante La tante de Marie, jeune adolescente camerounaise, lui a un jour proposé d'aller travailler et étudier en France. Pensant avoir enfin trouvé une occasion de se construire la vie dont elle rêvait et de subvenir aux besoins de sa famille, Marie l'a crue. Quand elle est arrivée en France, sa tante l'a forcée à se prostituer. En 2004, un homme lui est enfin venu en aide et l'a aidée à s'enfuir en Angleterre. C'était malheureusement trop tard. Marie a dû être hospitalisée pour recevoir des soins indispensables en raison du traumatisme psychologique et des violences physiques qu'elle avait subis. Elle avait à peine seize ans quand elle est décédée, deux mois plus tard.i. Client français à la recherche d'un jeune prostitué En décembre 2002, la Brigade de Protection des Mineurs a enquêté sur le cas d'un citoyen français arrêté en flagrant délit d'incitation à la prostitution d'un jeune Roumain de 17 ans, contre la somme de 80 euros. Selon l'officier de police chargé de l'enquête, l'apparence physique ‘du jeune garçon ne laissait aucun doute quant à son âge, il était clairement mineur. L'accusé a malgré tout été acquitté, sa défense ayant plaidé la possibilité qu'il ait été induit en erreur quant à l'âge de sa victime. Cette affaire montre clairement qu'il est impératif de mettre en place des programmes de formation spécifiques pour assurer une meilleure application des lois et permettre aux procureurs et aux autorités policières de mieux comprendre les crimes liés à l'exploitation sexuelle des mineurs à des fins commerciales et de faire preuve de plus d'empathie envers les jeunes victimes.ii. Sources : i. McGregor, Mark. “Britain’s hidden children”. BBC News. 19 mars 2007. Accessible à l'adresse : http://news.bbc.co.uk/2/hi/uk_news/england/manchester/6451353.stm ii. ECPAT France Trafficking in Children for Sexual Purposes: Update Country Report–France. Joint East-West Project on Trafficking in Children for Sexual Purposes in Europe. Septembre 2003. 8 4. APERÇU DÉTAILLÉ DES PROGRÈS EN MATIÈRE DE LUTTE CONTRE LE TRAFIC DES MINEURS A. Mesures de prévention du trafic des mineurs au niveau des communautés Empêcher les enfants de tomber dans les filets des trafiquants sexuels est la toute première étape pour garantir leur protection, et elle doit être suivie de la mise en place de plusieurs mesures de prévention concrètes. La prévention englobe un vaste ensemble d'activités à dimensions multiples qui vont de la mobilisation de l'opinion publique à la sensibilisation des familles et du grand public, en passant par des interventions plus ciblées et précises à destination des enfants à risque, que leurs conditions de vie rendent vulnérables. Les programmes de prévention du trafic des mineurs exhaustifs doivent prévoir des mesures prises à différents niveaux pour limiter la vulnérabilité des enfants et renforcer la capacité de leurs familles à prendre soin d'eux et à les protéger. Ils doivent aussi mobiliser les divers intervenants aux niveaux local et national, afin de mettre en place des systèmes de protection des enfants plus solides, notamment en matière de protection sociale et de conseils juridiques. Enfin, ces programmes doivent cibler les trafiquants et permettre de réduire les gains que leur offrent ces activités criminelles. Il est indispensable de mettre en œuvre des stratégies et des politiques de lutte contre le trafic pour s'assurer de prendre des mesures adaptées aux priorités nationales déterminées et pour donner des directives claires 9 aux intervenants engagés dans la prévention du trafic des mineurs dans notre pays. L'adoption d'une politique nationale témoigne également de l'intention de l'état à s'engager à donner la priorité à ce problème et à lui consacrer des efforts et des ressources conséquents, pour garantir enfin le droit des enfants à être protégés contre l'exploitation et le trafic à des fins sexuelles. Programmes de prévention au niveau des communautés en France 1.1. Programmes de prévention du trafic des mineurs 1.2. Collaboration de nombreux intervenants 1.3 Mise en place de programmes de sensibilisation 1.4. Formation des enseignants en matière d'exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales Actuellement, la France ne possède ni politique spécifique, ni plan national, ni stratégie de lutte contre le trafic des mineurs. Bien qu'il n'existe pas de politique spécifique contre le trafic des mineurs en France, des intervenants de différentes ONG, dont certaines sont spécialisées en protection des enfants, ont collaboré avec des organismes gouvernementaux pour lutter contre la traite des êtres humains et celui des enfants en particulier. Il reste néanmoins primordial d'institutionnaliser cette lutte. En dépit des efforts de soutien du gouvernement français aux campagnes de prévention du trafic, menées en collaboration avec des Le ministère de l'Éducation a collaboré avec ECPAT France pour ajouter un module d'information sur l'exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales au programme de formation des enseignants, mais cette formation n'est pas axée sur le trafic des mineurs en particulier. 17 ONG, , ces campagnes ne s'attaquent pas au trafic des mineurs en particulier. L'accent doit être mis sur la communication avec les populations cibles et les efforts déployés pour obtenir des résultats durables à long terme. La mise en place d'une politique nationale sur le trafic des mineurs, établissant les mesures de prévention principales à prendre au niveau local (indicateur 1.1), indique que le pays concerné accorde la priorité à cet enjeu en particulier et formule des directives claires et exhaustives à l'intention des principaux acteurs de la lutte, qui jetteront les bases de projets ou de programmes nationaux fiables et assortis de toutes les ressources nécessaires. Ces programmes de lutte contre le trafic des mineurs en particulier doivent impérativement être conçus et mis en œuvre de manière concertée (indicateur 1.2), afin d'aboutir à des mesures de prévention plus pertinentes, au champ d'action plus étendu. De plus, cette approche collaborative témoignerait d'un partenariat entre deux organismes gouvernementaux et au moins deux autres collaborateurs, parmi lesquels on pourrait trouver des ONG, des organisations intergouvernementales, des entreprises du secteur privé, des mineurs, des universitaires, etc. Pour encourager le public à participer à la lutte contre le trafic des mineurs, il est impératif de l'informer sur ce fléau bien réel et de l'y sensibiliser (indicateur 1.3), en mettant à profit l'ère du multimédia et les outils audiovisuels, notamment grâce à l'utilisation de différentes voies de communication. Cette information exhaustive est le meilleur moyen d'atteindre et de sensibiliser efficacement et durablement la population cible la plus vaste possible. L'école reste la voie de communication la plus directe pour éduquer les enfants et les informer à ce sujet. Des activités de prévention à l'école doivent donc être intégrées aux programmes de renforcement des capacités des enseignants (indicateur 1.4). Une politique spécifique doit assurer que tous les nouveaux professeurs reçoivent la formation nécessaire à la mise en place de ces activités de prévention auprès des élèves. 18 Le gouvernement français n'a pas mis en place de plan national, de politique ou de stratégie spécifique pour lutter contre le trafic des mineurs. En décembre 2008, il a néanmoins constitué un groupe de travail polyvalent, chargé d'élaborer un plan d'action visant à assurer la prévention du trafic des mineurs et à protéger, aider et indemniser les victimes. Ce groupe souhaite aussi nommer un rapporteur national sur la traite, dont les fonctions principales seraient d'assurer la prévention du trafic et la protection des victimes et de veiller à l'application stricte du plan d'action national. Ce groupe a aussi mis au point un projet de mission 10 interministérielle visant à coordonner la prévention de l'exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales et la protection des victimes.19 Le collectif « Ensemble contre la traite des êtres humains », plate-forme d'ONG engagées dans cette lutte, a été créé par 24 organismes français conscients de la nécessité de travailler en réseau et engagés directement ou indirectement dans le soutien aux victimes en France et dans leurs pays d'origine ou de transit20. Sa principale activité consiste à sensibiliser le public pour le convaincre de s'engager en faveur de cette cause. La secrétaire d'État à la lutte contre l'exclusion et la précarité en poste en 2002 a aussi créé un collectif semblable à Paris. Dans un souci constant d'identification des enfants victimes de trafic, il coordonne les activités de diverses associations spécialisées et son action s'articule autour d'interventions sur le terrain dans le but de gagner la confiance des mineurs, de les héberger et de leur apporter l'aide dont ils ont besoin21. La plupart des ONG qu'il regroupe ont œuvré avec des organismes gouvernementaux pour lutter contre la traite des êtres humains, notamment des enfants. Aucun accord de coopération n'a cependant été conclu entre les organismes gouvernementaux et non gouvernementaux22. En 2008, l'État a financé une conférence d'envergure nationale pour rassembler les autorités policières et les ONG, afin de renforcer leur collaboration et leur communication dans le cadre de la protection des victimes et la prévention de la traite. Au niveau international, l'accord franco-roumain de 2002 a établi une coopération entre les gouvernements des deux pays pour assurer la protection, le retour dans leur pays et la réinsertion des enfants roumains non accompagnés. En février 2007, ces deux gouvernements ont signé un nouvel accord bilatéral afin de reconduire cette collaboration23. La mise en place de l'accord bilatéral de 2002 présente toutefois plusieurs points faibles, notamment en ce qui concerne les mécanismes de suivi de la situation des enfants rapatriés en Roumanie.24. Ces faiblesses ont poussé certaines ONG à s'opposer à la ratification de l'accord bilatéral de 200725. Même si le gouvernement français a affirmé son soutien aux campagnes de lutte contre l'exploitation sexuelle des enfants d'ECPAT France et Air France, qui s'attaquent plus particulièrement au tourisme sexuel, il semble que les activités de sensibilisation au trafic des mineurs à des fins sexuelles mises en œuvre par le gouvernement ou bénéficiant de son appui restent insuffisantes. Le gouvernement français devrait élaborer une stratégie de sensibilisation à long terme au trafic des mineurs et soutenir de nouvelles campagnes adressées à un large public, notamment aux enfants susceptibles d'êtres victimes de trafic pour la première fois ou à nouveau, dans la communauté Rom, par exemple. L'école occupe une place prépondérante dans l'éducation et la prévention des enfants, et ce dès leur plus jeune âge. Malheureusement, même si le ministère de l'Éducation a travaillé en collaboration avec ECPAT France pour introduire un programme d'information rapide sur l'exploitation sexuelle des enfants à la formation pédagogique des enseignants, le gouvernement français ne s'est pas suffisamment investi pour faire adopter une politique introduisant officiellement un module de sensibilisation et d'information à leur formation. 11 APPEL À UNE ACTION ACCÉLÉRÉE EN FAVEUR DE LA PRÉVENTION DU TRAFIC DES MINEURS EN FRANCE Il est urgent que le gouvernement français élabore un plan d'action national sur le trafic des mineurs. Le gouvernement français doit renforcer et officialiser sa collaboration avec les principaux participants civils, pour garantir une meilleure prévention du trafic des mineurs. Le gouvernement doit mettre au point des campagnes adressées aux enfants à risque et adopter une politique nationale visant à introduire des modules de sensibilisation et d'information aux programmes scolaires et à la formation pédagogique des enseignants. B. Conformité du cadre légal français avec les normes internationales Pour protéger les enfants contre toutes les formes d'exploitation sexuelle, notamment contre le trafic à des fins sexuelles, il est impératif d'élaborer des lois strictes en accord avec les cadres juridiques internationaux et d'assurer qu'elles sont appliquées de manière efficace sans jamais perdre de vue l'essentiel : L'intérêt des enfants. Les progrès dans ce domaine sont évalués par un cadre juridique qui s'articule autour de trois éléments clés : les normes internationales, les lois nationales et leur application dans le cadre d'un processus soucieux de l'intérêt des enfants et tenant compte de leur sexe pour éviter tout traumatisme ou victimisation supplémentaire. Lois ou conventions internationales et régionales Date de ratification en France Convention relative aux droits de l'enfant 1990 Protocole facultatif sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie impliquant des enfants (Convention relative aux droits de l'enfant) 2003 Protocole visant à prévenir, à réprimer et à punir la traite des personnes, en particulier les femmes et les enfants 2002 Convention no182 de l'OIT sur les pires formes de travail des enfants 2001 Convention du Conseil de l'Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains Convention du Conseil de l'Europe sur la protection des enfants contre l'exploitation et les abus sexuels 2008 12 Signée mais pas encore ratifiée Cadre légal en France 2.1 Ratification du Protocole facultatif sur la vente d'enfants 2.2 Ratification du Protocole sur la traite 2.3. Conformité de la législation nationale 2.4. Création d'unités de police spéciales chargées des crimes contre les enfants Ratifié en France en 2003 Ratifié en France en 2002 La législation française criminalise tous les actes liés au trafic des mineurs, conformément aux exigences du Protocole facultatif. Les unités de police spéciales ont été créées pour protéger les enfants contre les activités criminelles. Il reste cependant essentiel d'offrir aux autorités policières une formation spécialisée qui assurera une identification proactive des enfants victimes de trafic et d'exploitation sexuelle. La ratification d'une convention internationale par un pays en fait un instrument juridiquement contraignant. Après ratification du Protocole facultatif sur la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie impliquant des enfants (indicateur 2.1) par un pays, ce dernier est tenu d'assurer la conformité de ses lois pénales et criminelles avec les obligations nécessaires énoncées dans ledit protocole et de présenter, dans un délai de deux ans, un rapport complet et détaillé sur sa mise en œuvre, examiné par le Comité des NationsUnies sur les droits de l'enfant, qui publiera ses recommandations et ses suggestions sur la manière d'améliorer les conditions de vie des enfants dans le pays. Après ratification du Protocole des Nations-Unies visant à prévenir, à réprimer et à punir la traite des personnes, en particulier les femmes et les enfants(indicateur 2.2), l'état est tenu de criminaliser tous les actes liés au trafic (indicateur 2.3), conformément aux dispositions dudit protocole. Le protocole établit ainsi un terrain d'entente pour définir les activités criminelles liées au trafic dans les pays qui l'ont ratifié et définit un cadre international permettant de lutter contre ce fléau au niveau national. Pour une meilleure application des législations nationales, les pays sont tenus de créer des unités de police ayant reçu une formation spécialisée (indicateur 2.4), qui enquêtent sur les crimes sexuels et liés au trafic des mineurs et les sanctionnent en tenant compte de l'intérêt des victimes, afin de réduire autant que possible le traumatisme causé par les procédures judiciaires. 26 Aux niveaux international et régional, la France a ratifié les principaux instruments juridiques en matière de trafic des mineurs, y compris la Convention du Conseil de l'Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains de 2008. Au niveau national, la France possède un cadre légal complet visant à sanctionner les nombreux crimes et délits liés à l'exploitation sexuelle et au trafic des mineurs. Le gouvernement français s'est mobilisé pour élaborer une législation qui assure une meilleure protection des enfants et des adolescents contre le trafic et l'exploitation sexuelle27. L'article 225-4-1 du Code Pénal interdit la traite des êtres humains, définie comme le recrutement, le transport, le transfert, l'hébergement ou l'accueil d'une personne à des fins d'exploitation. Si la victime est mineure (moins de 18 ans), l'article 225-4-1 n'établit pas que les agresseurs doivent avoir eu recours à des contraintes ou des manœuvres dolosives pour qualifier l'activité criminelle de traite des êtres humains. Il semble important de constater que le consentement de l'enfant n'entre pas en ligne de compte pour établir la responsabilité criminelle. Ce même article stipule qu'un crime lié à la traite des êtres humains est passible 13 d'une peine d'emprisonnement maximale de sept ans et d'une amende de 150 000 €. Cette peine s'élève à 10 ans d'emprisonnement et à une amende de 1 500 000 € lorsque la victime est mineure. Pour enquêter sur les auteurs présumés d'actes de trafic à des fins sexuelles et les sanctionner, la France applique le plus souvent les dispositions du code pénal en matière de proxénétisme et non celles des lois de lutte contre la traite des êtres humains. Ce phénomène peut être expliqué par le fait que ce problème n'est pas suffisamment considéré comme un ‘enjeu français. Cependant, cet état de fait pourrait bien changer. En effet, en 2008, le gouvernement a assuré la formation de quelque 200 procureurs afin de s'assurer de l'application des lois de lutte contre la traite des êtres humains au cas de d'agressions liées au trafic à des fins sexuelles28. Les autorités policières n'ont cependant pas adopté de procédures d'audition des victimes respectueuses de l'intérêt des enfants. La France a mis en place des unités de police spécialisées dans l'intervention auprès d'enfants victimes de trafic. Ces unités spéciales sont : L'Office Central pour la Répression de la Traite des Êtres Humains, chargé de coordonner toutes les activités de lutte contre le trafic à des fins sexuelles29, et la Brigade de protection des mineurs, qui a notamment mis en place la délégation aux victimes. La présence de ces unités spéciales ne garantit pas pour autant que les lois soient correctement appliquées. Par ailleurs, les autorités policières ne sont pas expertes en matière de mesures à prendre et d'attitude à adopter, car elles ne reçoivent à ce jour aucune formation spécialisée en 30 identification, soin et protection des enfants victimes de trafic . En 2008, le gouvernement français a uni ses efforts à ceux des autorités policières belges pour créer une unité commune de lutte contre la traite des êtres humains, démarche inédite dans l'Union européenne31. Le ministère de la Justice affirme qu'en 2007, en France, 19 individus ont été condamnés à des peines de prison supérieures à sept ans. On rapporte qu'en 2008, 30 réseaux liés à la traite des êtres humains ont été démantelés32. Il est malheureusement très difficile d'obtenir des données précises sur les cas de trafic des mineurs. APPEL À UNE ACTION ACCÉLÉRÉE EN FAVEUR DE POURSUITES JUDICIAIRES CONTRE LES COUPABLES DE TRAFIC DES MINEURS Le gouvernement français doit accorder la priorité à la mise en œuvre de lois de lutte contre cette traite. Tous les principaux représentants des forces de l’ordre doivent recevoir une formation adéquate sur le trafic des mineurs et les problèmes liés à leur exploitation à but sexuel et commercial, notamment l’identification d'enfants confrontés au risque de trafic. Les mécanismes de collecte des données sur les affaires judiciaires liées au trafic des mineurs doivent être revus et ces données doivent être plus facilement accessibles. 14 C. Services de soutien spécialisés pour enfants victimes Les enfants victimes de trafic à des fins sexuelles doivent bénéficier de droits particuliers qui assurent leur protection contre l'exploitation sexuelle et leur garantissent de recevoir une aide et des soins adaptés à leurs besoins. Les pays ont l'obligation d'adopter systématiquement une approche concertée, afin de tout mettre en œuvre pour donner aux victimes la possibilité de retrouver tous leurs droits et leur assurer une réadaptation efficace et durable. Les Etats parties prennent toutes les mesures appropriées pour faciliter la réadaptation physique et psychologique et la réinsertion sociale de tout enfant victime de toute forme de négligence, d'exploitation ou de sévices, de torture ou de toute autre forme de peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ou de conflit armé. Cette réadaptation et cette réinsertion se déroulent dans des conditions qui favorisent la santé, le respect de soi et la dignité de l'enfant. Article 39 de la Convention relative aux droits de l'enfant Les enfants victimes de trafic ont subi des violences et ont vu leurs droits bafoués à différents niveaux. Le pays qui les accueille est tenu de leur offrir les soins nécessaires et d'assurer leur protection dans leur meilleur intérêt, en tenant compte des besoins particuliers de chaque enfant et sans discrimination liée à son pays d'origine ou son statut d'immigrant. Services spécialisés pour enfants victimes 3.1. Assistance téléphonique 3.2. Structures d'accueil 3.3 Services médicaux 3.4. Cellules psychologiques Un service d'assistance téléphonique a été mis en place par l'état pour offrir une aide personnalisée à tous les enfants victimes de différents types d'abus et de violences. Elle n'est pas uniquement dédiée aux victimes de trafic. Les mineurs non accompagnés peuvent être accueillis dans des centres d'accueil, dont la plupart sont gérés par des ONG et bénéficient du soutien de l'État. Mais le nombre de structures où les victimes, filles comme garçons, peuvent bénéficier d'une aide adaptée à leurs besoins bien particuliers reste insuffisant. Même si les enfants exposés au risque de trafic peuvent bénéficier de services de soins, l'accès à ces soins reste difficile pour les enfants en situation irrégulière. Par ailleurs, le personnel des centres de soins n'a pas reçu la formation nécessaire pour identifier les enfants victimes de trafic et leur offrir le soutien dont ils ont besoin. Il existe des cellules d'aide psychologique, mais elles ne sont généralement pas assez spécialisées pour comprendre les besoins particuliers des victimes d'exploitation sexuelle à des fins commerciales. De plus, les enfants victimes de trafic ne peuvent pas toujours en bénéficier. Il est essentiel que l'état mette gratuitement à la disposition de tous les enfants vulnérables ou victimes un service d'assistance téléphonique (indicateur 3.1) assuré par un personnel compétent et correctement formé, afin de leur offrir de l'aide et de leur donner accès à tous les autres services dont ils ont besoin. Dans l'idéal, cette assistance devrait être assurée dans tout le pays, dans les langues officielles des pays d'origine des victimes de trafic international. Les enfants victimes de trafic devraient être accueillis dans des centres d'hébergement spécialisés (indicateur 3.2) distincts des centres d'accueil pour adultes, pour recevoir tout le soutien nécessaire dans un environnement structuré. En effet, ces enfants ont subi de multiples formes de sévices sexuels et physiques et ils ont tous besoin d'une aide spécialisée, notamment de soins médicaux complets (indicateur 3.3) et gratuits, ainsi que d'assistance psychologique en continu (indicateur 3.4), assurée par un personnel compétent et expérimenté qui aidera l'enfant tout au long de sa réadaptation33. Le gouvernement a mis en service une ligne téléphonique (119) destinée à tous les enfants victimes de mauvais traitements, chargée, en fonction de la situation des victimes, de transmettre les informations aux conseils généraux ou aux tribunaux. Ce service gratuit fonctionne 24 h/2434. Cette assistance téléphonique n'est cependant pas équipée des moyens nécessaires pour répondre aux besoins des enfants victimes de trafic en particulier. 15 L'identification des enfants victimes de trafic reste problématique, principalement à cause de la formation 35 insuffisante des professionnels du domaine en la matière . Beaucoup d'enfants dans cette situation ne reçoivent pas l'aide nécessaire parce que les autorités ne les considèrent pas comme des victimes de trafic. Actuellement, en cas de doute sur l'âge d'un mineur, l'état continue de recourir à l'examen osseux, même s'il a déjà été prouvé que cette technique n'était pas fiable36. Il n'existe pas de structure d'accueil spécialisée pour les victimes de trafic. Ces enfants sont généralement envoyés vers des maisons d'accueil pour mineurs isolés, gérées par l'Aide Sociale à l'Enfance et des ONG comme Hors la Rue ou la Fondation d'Auteuil37. Ils peuvent y bénéficier de soins médicaux et psychiatriques, bien que ces services ne soient pas suffisamment spécialisés pour répondre à leurs besoins. Par ailleurs, il n'existe aucune disposition légale garantissant l'accès à la justice aux enfants victimes. Il est impossible d'obtenir des renseignements fiables au sujet du montant total, du montant moyen et de la fourchette des montants des indemnisations versées chaque année aux mineurs victimes de trafic (2000 2007).38 En 2009 le Comité des droits de l'enfant a déploré le manque d'information au sujet du nombre de mineurs victimes ayant bénéficié d'une aide à la réinsertion et d'une indemnisation. Il a par conséquent recommandé la collecte systématique des données ventilées, notamment par sexe, âge et lieu géographique (y compris les DOM-TOM), sur le nombre d'enfants victimes ayant bénéficié d'une aide à la réinsertion et d'une indemnisation. Il a également demandé à la France de collaborer avec des ONG pour veiller à ce que les enfants victimes aient accès aux services appropriés, en vue notamment de leur rétablissement physique et psychologique et de leur réinsertion sociale39. Le Comité des Nations-Unies sur les droits de l'enfant s'est dit préoccupé par la situation des mineurs isolés placés dans les zones d'attente des aéroports français, notamment par le fait que l'obligation légale de désignation d'un administrateur ad hoc n'est pas systématiquement appliquée et que ces enfants ne bénéficient d'aucun soutien psychologique. 40 Les autorités policières françaises traitent plus souvent les mineurs étrangers exploités comme des immigrés clandestins que comme des victimes. Ces enfants sont donc souvent renvoyés vers leur pays d'origine41. De plus, en vertu du principe d'extraterritorialité établi par la loi française, les zones d'attentes internationales ne sont pas considérées comme faisant partie du territoire français. Les enfants non accompagnés mis en attente dans ces zones ne sont donc pas protégés contre un éventuel renvoi du territoire42. En 2008, la police aéroportuaire a expulsé un tiers des 1 000 enfants immigrants non accompagnés arrivés à l'aéroport Roissy Charles de Gaulle à Paris, n'ayant pas obtenu le droit d'entrer sur le territoire français43. Ces pratiques pourraient cependant reculer, la Cour de Cassation ayant affirmé dans un arrêt de 2009 que les lois françaises étaient applicables à tous les enfants présents sur le territoire français, quelle que soit leur nationalité. Par conséquent, les lois françaises sont applicables à tous les enfants placés en zone d'attente à l'aéroport Roissy Charles de Gaulle, se trouvant de fait sur le territoire français44. 16 APPEL À UNE ACTION ACCÉLÉRÉE EN FAVEUR DU DROIT DES ENFANTS VICTIMES À RECEVOIR DES SOINS ET UN SOUTIEN ADAPTÉS • Le gouvernement français doit mettre en place des structures (centres d'accueil) offrant une assistance et une protection systématiques (soins médicaux, conseil et assistance psychologique, accompagnement juridique, accès aux programmes éducatifs) à tous les mineurs victimes de trafic. Le gouvernement doit impérativement réviser et modifier sans délai les lois, les procédures et les pratiques liées à la prise en charge des enfants étrangers non accompagnés exposés à un risque élevé de devenir ou de redevenir victimes de ce trafic. 17 5. PÉTITION DE LA CAMPAGNE EN FRANCE Depuis le début de la campagne Stop au trafic des mineurs à des fins sexuelles, en août 2009, des milliers de clients ont prouvé leur engagement en faveur de l'appel au changement pour offrir à ces enfants un monde meilleur, dans lequel ils pourront enfin vivre en toute sécurité. Sur la base des résultats de la fiche de suivi des progrès en France, nous lançons un appel à une action immédiate en France, afin de protéger les mineurs comme il se doit. En France, nous réclamons une meilleure protection des mineurs face au trafic à but sexuel, par la mise en place et l’application, de manière urgente, de mesures de protection. Nous demandons : - la création et la mise en œuvre de programmes de sensibilisation afin de prévenir le trafic de mineurs, notamment à destination des mineurs victimes ou victimes potentielles ; - une formation adéquate auprès des acteurs clés de la police et de la justice sur le trafic des mineurs et les problèmes liés à l’exploitation sexuelle, notamment l’identification d’enfants confrontés au risque de trafic ; - la mise en place de structures apportant une assistance et une protection systématiques (soins médicaux, conseil, assistance psychologique, accompagnement juridique, accès aux programmes éducatifs) à tous les mineurs victimes de trafic ; - la révision et la modification, sans délai, des procédures de prise en charge d’enfants étrangers non accompagnés qui risquent d’être ou d’être à nouveau victimes de ce trafic. Note : Même si notre campagne nationale se concentre plus particulièrement sur les priorités et les besoins de la France, elle participe à l'appel mondial lancé par ECPAT et The Body Shop pour s'assurer que des mesures conjointes rapides seront prises pour honorer leur engagement en faveur de la prévention et de l'éradication du trafic des mineurs à des fins sexuelles d'ici 2012. 18 6. MÉTHODOLOGIE DE RECHERCHE Notre campagne est le fruit d'une méthode innovante permettant d'analyser, au fil de sa progression, les efforts de 42 pays en faveur de la lutte contre le trafic des mineurs, en assurant le suivi de trois objectifs principaux, assortis de quatre indicateurs clés. Les données utilisées dans les brochures des fiches de suivi des progrès ont été recueillies de diverses manières, en accordant une attention particulière aux résultats de ECPAT en matière de suivi des progrès de la mise en œuvre de l'Agenda pour l'action contre l'exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales45. Nous avons également utilisé des données provenant d'organismes des Nations-Unies, d'ONG et d'autres acteurs engagés dans la mise en place de mesures de lutte contre la traite. Il est important de préciser que la quantité et la qualité des données mises à notre disposition par les 42 pays participant à la campagne n'étaient pas uniformes. Dans de nombreux pays, les données relatives à l'exploitation sexuelle et à la traite des mineurs ne sont pas systématiquement recueillies. De plus, elles sont la plupart du temps destinées à des projets locaux et ne sont pas utilisées à l'échelle nationale. Enfin, elle peuvent manquer d'uniformité si elles ne sont pas traitées par le système de gestion de l'information des pays concernés. Nous avons cependant tout mis en œuvre pour définir des paramètres de recherche précis et réduire les différences autant que possible. Par ailleurs, ECPAT travaille en étroite collaboration avec ses partenaires de tous les pays pour repérer les sources de données les plus fiables possible. Tout en tenant compte de ces facteurs déterminants, nous avons choisi des indicateurs en fonction de la disponibilité et de l'accessibilité des renseignements, ainsi que du niveau de pertinence des mesures prises pour atteindre les objectifs. Précisons aussi que ces indicateurs évaluent en réalité les mesures prises directement par les pays ou bénéficiant de leur soutien. Par conséquent, ils ne témoignent pas forcément de l'ampleur du travail des nombreuses ONG qui s'efforcent souvent, partout dans le monde, de compenser l'insuffisance des mesures prises par les gouvernements. La décision d'évaluer uniquement les mesures financées par les états est le fruit d'un principe fondamental selon lequel, même si la protection des enfants dépend de l'engagement de divers acteurs sociaux, l'état a l'obligation de garantir le respect des droits fondamentaux de l'enfant. En raison de l'insuffisance de la collecte et de la ventilation des données concernant le trafic des mineurs à des fins sexuelles, il est impossible d'estimer précisément le nombre d'enfants victimes de ce fléau dans le monde. L'évaluation des progrès du pays présentée dans cette brochure se limite donc à certaines politiques mises en place par le gouvernement et n'est pas fondée sur une estimation de l'ampleur du problème. Le classement du pays en tant que lieu d'origine, de transit ou de destination du trafic des mineurs à des fins sexuelles n'entre pas en ligne de compte. On considère que la mise en place de politiques de lutte contre le trafic des mineurs dans tous les pays concernés est la première étape indispensable pour parvenir à consacrer des ressources humaines et financières à des mesures concrètes. De plus, ces politiques doivent répondre à la demande du public qui souhaite que l'état rende des comptes dans ce domaine. Les initiatives en ce sens sont des indicateurs de progrès très fiables. Le chapitre 3 du rapport officiel de la campagne ‘Their Protection is in Our Hands – The State of Global Child Trafficking for Sexual Purposes’ (« Leur protection est entre nos Mains –Etat des lieux Global sur le Trafic des enfants à des fins sexuelles »), propose des descriptions plus détaillées de chaque objectif et des indicateurs correspondants. Cette brochure a été rédigée par ECPAT International et ECPAT France. 19 7. NOTES DE FIN 1 ECPAT International/The Body Shop, Global Progress Cards, septembre 2009. Accessibles à l'adresse : http://www.ecpat.net/TBS/fr/Campaign_Resources.html 2 ECPAT International. Rapport global de suivi de la mise en œuvre des actions de lutte contre l'exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales : France. Bangkok. 2006. Accessible à l'adresse : http://www.ecpat.net/A4A_2005/PDF/Europe/Global_Monitoring_Report-FRANCE.pdf 3 ECPAT France Trafficking in Children for Sexual Purposes: Update Country Report–France. Joint East-West Project on Trafficking in Children for Sexual Purposes in Europe. Septembre 2003. 4 U.S. Department of State, Trafficking in Persons Report 2009 - France, 16 juin 2009. Accessible à l'adresse : http://www.unhcr.org/refworld/docid/4a4214bbc.html [consulté le 2 octobre 2009] 5 ECPAT International. Rapport global de suivi de la mise en œuvre des actions de lutte contre l'exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales : France. Bangkok. 2006. Accessible à l'adresse : http://www.ecpat.net/A4A_2005/PDF/Europe/Global_Monitoring_Report-FRANCE.pdf 6 Daguerre, Anne. Whose problem? Addressing child trafficking in France and Britain. Étude présentée lors de la Rencontre annuelle de l'Association américaine des sciences politiques de 2008. Accessible à l'adresse : http://www.allacademic.com/meta/p_mla_apa_research_citation/2/8/0/3/5/p280351_index.html 7 Ibid. 8 ONUDC. Global Report on Trafficking in Persons. 2009. Accessible à l'adresse : http://www.unodc.org/unodc/en/humantrafficking/global-report-on-trafficking-in-persons.html 9 U.S. Department of State, Trafficking in Persons Report 2009 - France, 16 juin 2009. Accessible à l'adresse : http://www.unhcr.org/refworld/docid/4a4214bbc.html 10 Ibid. 11 ECPAT International. Rapport global de suivi de la mise en œuvre des actions de lutte contre l'exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales : France. Bangkok, 2006 2006. Accessible à l'adresse : http://www.ecpat.net/A4A_2005/PDF/Europe/Global_Monitoring_Report-FRANCE.pdf 12 U.S. Department of State, Trafficking in Persons Report 2009 - France, 16 juin 2009. Accessible à l'adresse : http://www.unhcr.org/refworld/docid/4a4214bbc.html 13 Ibid. 14 Daguerre, Anne. Whose problem? Addressing child trafficking in France and Britain. Étude présentée lors de la Rencontre annuelle de l'Association américaine des sciences politiques de 2008. Accessible à l'adresse : http://www.allacademic.com/meta/p_mla_apa_research_citation/2/8/0/3/5/p280351_index.html 15 ONUDC. Global Report on Trafficking in Persons. 2009. Accessible à l'adresse : http://www.unodc.org/unodc/en/human-trafficking/globalreport-on-trafficking-in-persons.html 16 ECPAT International. Rapport global de suivi de la mise en œuvre des actions de lutte contre l'exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales : France. Bangkok, 2006 2006. Accessible à l'adresse : http://www.ecpat.net/A4A_2005/PDF/Europe/Global_Monitoring_Report-FRANCE.pdf 17 U.S. Department of State, Trafficking in Persons Report 2009 - France, 16 juin 2009. Accessible à l'adresse : http://www.unhcr.org/refworld/docid/4a4214bbc.html 18 ECPAT International/ The Body Shop, Their Protection is in our Hands – The State of Global Child Trafficking for Sexual Purposes, Bangkok, août 2009. Accessible à l'adresse : http://www.ecpat.net/EI/Publications/Trafficking/Full_Report_Global_Child_Trafficking_for_Sexual_Purposes.pdf 20 19 Discours de J. M. Bockel, secrétaire d'État à la justice « Vers l’Action globale de l’UE contre la traite des Etres Humains », 19 octobre 2009. Accessible à l'adresse : http://www.presse.justice.gouv.fr/index.php?rubrique=11578&ssrubrique=11607&article=18111 20 Site Web du Collectif « Contre la Traite des Etres Humains » Accessible à l'adresse : http://www.contrelatraite.org. 21 F. Benoit-Rohmer, S. Bernhard, F. Laurin, Thematic study on child trafficking – France, 2007/2008. Accessible à l'adresse : fra.europa.eu/fraWebsite/attachments/Child-trafficking-09-country-fr.pdf 22 Ibid. 23 Ibid. 24 Bigot R., Légaut J.P., Retours au pays de mineurs isolés roumains…avant un nouveau départ ? Septembre 2009. Hors la Rue. Accessible à l'adresse : http://www.horslarue.org/files/file_1267014911.pdf 25 Ibid. ECPAT International/ The Body Shop, Their Protection is in our Hands – The State of Global Child Trafficking for Sexual Purposes, Bangkok, août 2009. Accessible à l'adresse : http://www.ecpat.net/EI/Publications/Trafficking/Full_Report_Global_Child_Trafficking_for_Sexual_Purposes.pdf 26 27 UNICEF-France, Application de la Convention relative aux Droits de l‘Enfant en France, p. 17, 2009. Accessible à l'adresse : http://www.unicef.fr/userfiles/RapportUNICEFFrance2009CRC.pdf 28 U.S. Department of State. Trafficking in Persons Report 2009 – France. Juin 2009. Accessible à l'adresse : http://www.unhcr.org/refworld/docid/4a4214bbc.html 29 F. Benoit-Rohmer, S. Bernhard, F. Laurin, Thematic study on child trafficking – France, 2007/2008. Accessible à l'adresse : fra.europa.eu/fraWebsite/attachments/Child-trafficking-09-country-fr.pdf 30 Ibid. 31 U.S. Department of State. Trafficking in Persons Report 2009 – France. Juin 2009. Accessible à l'adresse : http://www.unhcr.org/refworld/docid/4a4214bbc.html 32 Discours de J. M. Bockel, secrétaire d'État à la justice « Vers l’Action globale de l’UE contre la traite des Etres Humains », 19 octobre 2009. Accessible à l'adresse : http://www.presse.justice.gouv.fr/index.php?rubrique=11578&ssrubrique=11607&article=18111 33 ECPAT International/ The Body Shop, Their Protection is in our Hands – The State of Global Child Trafficking for Sexual Purposes, Bangkok, août 2009. Accessible à l'adresse : http://www.ecpat.net/EI/Publications/Trafficking/Full_Report_Global_Child_Trafficking_for_Sexual_Purposes.pdf 34 Site Web d'Âllo enfance en danger : http://www.allo119.gouv.fr/119/index.html 35 F. Benoit-Rohmer, S. Bernhard, F. Laurin, Thematic study on child trafficking – France, 2007/2008. Accessible à l'adresse : fra.europa.eu/fraWebsite/attachments/Child-trafficking-09-country-fr.pdf 36 Conseil de l'Europe, Rapport de M. Alvaro Gil-Robles, commissaire aux droits de l’homme, sur le respect effectif des droits de l’homme en France suite à sa visite du 5 au 21 septembre 2005. Février 2006. Accessible à l'adresse : https://wcd.coe.int/ViewDoc.jsp?Ref=CommDH%282006%292&Language=lanFrench&Ver=final&Site=CommDH&BackColorInternet=FE C65B&BackColorIntranet=FEC65B&BackColorLogged=FFC679 37 F. Benoit-Rohmer, S. Bernhard, F. Laurin, Thematic study on child trafficking – France, 2007/2008. Accessible à l'adresse : fra.europa.eu/fraWebsite/attachments/Child-trafficking-09-country-fr.pdf 38 Ibid. 39 Comité des droits de l'enfant, Examen des rapports soumis par les États parties en application de l'article 44 de la Convention Observations finales du Comité des droits de l'enfant : France, Juin 2009. Accessible à l'adresse : http://www2.ohchr.org/english/bodies/crc/docs/co/CRC-C-FRA-CO-4.pdf 40 Comité des droits de l'enfant, Examen des rapports présentés par les États parties conformément au paragraphe 1 de l’'article 12 du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'’enfant, concernant la vente d'’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants - Observations finales : France, 15 Octobre 2007. Accessible à l'adresse : 21 http://www2.ohchr.org/english/bodies/crc/docs/co/CRC.C.OPSC.FRA.CO.1.pdf 41 Human Rights Watch, Perdus en zone d’attente – Protection insuffisante des mineurs étrangers isolés à l'aéroport de Roissy Charles de Gaulle 29 octobre 2009. Accessible à l'adresse : http://www.hrw.org/fr/node/86249 42 F. Benoit-Rohmer, S. Bernhard, F. Laurin, Thematic study on child trafficking – France, 2007/2008. Accessible à l'adresse : fra.europa.eu/fraWebsite/attachments/Child-trafficking-09-country-fr.pdf 43 Human Rights Watch, Perdus en zone d’attente – Protection insuffisante des mineurs étrangers isolés à l'aéroport de Roissy Charles de Gaulle 29 octobre 2009. Accessible à l'adresse : http://www.hrw.org/fr/node/86249 44 Cour de Cassation, Chambre Civile 1, N° de pourvoi: 08-14125, 25 mars 2009. Accessible à l'adresse : http://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000020453300&fastReqId=247656 45 ECPAT International Global Monitoring Reports on Status of Action against Commercial Sexual Exploitation of Children. 75 country reports. 2006, 2007, 2008. www.ecpat.net 22