Abdallah DELIOUAH - Maison des dialogues
Transcription
Abdallah DELIOUAH - Maison des dialogues
La religion musulmane et la citoyenneté Intervention d’Abdallah DELIOUAH, imam à la mosquée de Valence, enseignant des sciences islamiques à l'ETIC à Villeurbanne et acteur du dialogue inter religieux, lors de la conférence sur la question de l’Islam, moteur ou frein à l’engagement citoyenne? Abdallah DELIOUAH a défendu son point de vue en répondant à plusieurs questions intermédiaires. Qu'est ce que la citoyenneté? Après nous avoir rappelé la définition de la citoyenneté, A.D. Nous explique qu'un citoyen se doit de respecter la juridiction de la cité (État) dont il est citoyen, de respecter le contrat moral avec les autres membres afin que le "vivre ensemble" puisse être possible. Selon lui, ce "vivre ensemble" ne peut exister avec une totale liberté de chaque membre. Un pacte social est donc nécessaire entre les citoyens. La citoyenneté est une responsabilité envers les autres citoyens. Qu’est ce que l'Islam? Pour A.D. l'Islam est un ensemble de valeurs religieuses et de valeurs humaines. Les religions ont la même origine mais elles n’ont pas la même histoire et la même évolution. Chaque religion possède sa propre particularité. S'appuyant sur les enseignements du prophète de l'Islam, A.D. nous explique que l'Islam s’inscrit dans une continuité qui finalise les autres messages apportés par le judaïsme, et le christianisme. L'Islam reconnaît les autres religions, ainsi que les autres prophètes. Dans l'histoire, de nombreux peuples ont vécu sous la bannière de l'Islam tout en conservant leurs croyances. Au delà des valeurs morales, l’imam de Valence ajoute également que l'Islam donne une importance particulière à la raison et les sciences modernes. Cette vision permit aux civilisations musulmanes d’exceller dans ces domaines durant plusieurs siècles et ainsi contribuer considérablement à l'évolution de l'humanité, contribution qui lui est injustement occultée de nos jours. L’Islam a le principe de faire sien toute bonne morale. A.D. nous expose que selon les enseignements du prophète de l’Islam, toutes valeurs convenables ou utiles sur le plan matériel et moral doit être adoptées. Aujourd'hui, dû à certaines visions ou mauvaises compréhensions sectaires, l'Islam se voit attribuer une image de rejet de la société, de rejet des valeurs communes. Un sentiment de supériorité se dégage sur les autres via des visions sectaires. Une sorte de négativité naît à l’égard de la société comme l'interdiction de voter, d'y participer, ou de dénigrer les musulmans qui œuvrent pour le bien de non musulmans. C'est cette mauvaise compréhension de l'Islam, existant au sein de la communauté musulmane qu'il faut à tout prix guérir. L’Islam prône t elle un état théologique ou civil? Selon A.D. la foi est la même quelque soit les religions mais les lois religieuses changent à l'image de l'humanité. Au delà du rôle religieux, A.D. nous rappelle que par le passé, les gouverneurs ("califes") des royaumes islamiques avaient un rôle politique et qu'ils ont été élu d'une certaine manière au suffrage universel par les membres de la communauté musulmane de l'époque. A travers l'exemple des cinq premiers califes, l'imam de Valence nous explique que l'Islam laisse aux individus le choix du mode d'élection des leurs représentants. Rappelant que le Coran mentionne que le gouverneur se doit de consulter son peuple dans les affaires, A.D. nous explique que contrairement aux idées reçues, la démocratie n'est pas contradictoire avec l'Islam, bien au contraire, elle est prescrite par ce dernier. L’Islam est il donc sécularisable? Selon A.D., la religion musulmane par essence, intègre la séparation du pouvoir. Ce principe permit le jugement des califes par des juges totalement indépendants en cas de litige avec d'autres citoyens. Donnant en exemple la charte établi par le prophète de l'Islam à son arrivée à Médine, qui définit des règles afin que musulmans, juifs, chrétiens et autres habitants de la ville puissent cohabiter ensemble, A.D. démontre l'existence d'une certaine forme de citoyenneté dès le début de l'Islam. Cette charte avait pour but de permettre à tout les habitants, quelques soient leurs religions, de vivre en paix et de défendre la ville des attaques extérieures. Elle garantissait le droit à la propriété et le respect des cultes de chacun. L’Islam est il un moteur pour un vivre ensemble? Oui, l’islam est moteur, selon Abdallah DELIOUAH. Même si elle ne partage pas toutes les valeurs actuelles de notre société, la religion pousse ses fidèles à être des citoyens positifs en exerçant pleinement leurs rôles dans la société. Rappelant certains enseignements du prophète de l'Islam, tels que " le meilleur des Hommes est celui le plus utile aux Hommes" ou "le croyant est comparable à la pluie salvatrice, là ou elle tombe, elle est utile" ou encore "celui qui plante un arbre, et qu'un animal ou un humain en bénéficie, Dieu lui récompensera cet acte", A.D. nous démontre que les musulmans doivent jouer un rôle positif dans la société et d’œuvrer pour un monde meilleur et plus juste, tout en faisant abstraction des différences de croyance. Abdallah DELOUIAH soutient donc que l'Islam est un moteur pour promouvoir les droits humains, le vivre ensemble et la pleine citoyenneté, qu'elle véhicule des valeurs positives pour la société et l'avenir de l'humanité. Il ajoute également qu'en tant qu'humain nous n'avons pas à faire un choix entre nos valeurs religieuses et les valeurs civiques. Les adeptes d'une religion peuvent exprimer leur volonté à travers les moyens civiques dont ils disposent et proposer des valeurs, des principes à la société. La laïcité doit être ouverte et bienveillante, permettant à tout les citoyens quelque soit leur religion de s'exprimer et d’être visible, de pratiquer leur religion dans l'espace privé et public sans heurter les autres. Il nous rappelle les propos de son prédécesseur Robert THALVAR, ancien dirigeant d'entreprise engagé dans l'église catholique, "la laïcité est l'expression juridique de la liberté religieuse". Le conseil européen de recherche de la fatwa, à consacrer en 2007 une session complète à la citoyenneté dans la religion musulmane avec une vingtaine de sujets de recherche qui encouragent les musulmans à vivre comme des citoyens à part entière, à participer à la vie politique, à participer via des associations ou autres moyens pour le bien de leur société.