Cour d`appel de Toulouse

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Cour d`appel de Toulouse
Cour d'appel
de
Toulouse
Chambre sociale 4, section 1
26 Juin 2014
Confirmation
N° 12/02886
ETABLISSEMENT PUBLIC LOCAL D'ENSEIGNEMENT (EPLE) LYCEE PROFESSIONNEL CLEMENT DE
PEMILLE
C/ Madame C
Résumé
Le lycée professionnel qui a conclu un contrat d'accompagnement dans l'emploi avec la salariée n'a respecté
qu'une partie de ses obligations en matière de formation professionnelle et n'a pu pour le surplus, par manque de
moyens financiers et humains, qu'inviter ses salariés sous contrat aidés, dont l'intéressée, à prendre en charge
leur plan de formation et à prendre l'initiative de faire acte de candidature pour bénéficier de stages de formation
dans des organismes spcécialisés. Sa bonne foi et l'insuffisance de ses moyens ne sont pas une cause exonératoire de l'obligation de formation s'imposant à lui. Le contrat de travail à durée déterminée conclu doit être requalifié en un contrat de travail à durée indéterminée.
26/06/2014
ARRÊT N°
N° RG : 12/02886
Décision déférée du 16 Mai 2012 - Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'ALBI - F11/00061
ETABLISSEMENT PUBLIC LOCAL D'ENSEIGNEMENT (EPLE) LYCEE PROFESSIONNEL CLEMENT DE
PEMILLE
C/
Mme C
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D'APPEL DE TOULOUSE
4eme Chambre Section 1 - Chambre sociale
***
ARRÊT DU VINGT SIX JUIN DEUX MILLE QUATORZE
***
APPELANT(S)
ETABLISSEMENT PUBLIC LOCAL D'ENSEIGNEMENT (EPLE) LYCEE PROFESSIONNEL CLEMENT DE
PEMILLE
représentée par Me Mathilde ENSLEN GUIBILATO, avocat au barreau d'ALBI
INTIME(S)
Madame C
comparante en personne, assistée de Me Thibault TERRIE de la SCP SCP PAMPONNEAU F.& E. TERRIE PERROUIN, avocat au barreau d'ALBI
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l'article 945.1 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Février 2014,
en audience publique, devant Bernard BRUNET, magistrat chargé d'instruire l'affaire, les parties ne s'y étant pas opposées.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
B. BRUNET, président
C. KHAZNADAR, conseiller
N. BERGOUNIOU, conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : H. ANDUZE-ACHER
ARRET :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement
avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile
- signé par B. BRUNET, président, et par N. EL ALAOUI, greffier de chambre.
FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Mme C a été embauchée par l'EPLE CLÉMENT DE PÉMILLE en qualité d'aide administrative dans le cadre du contrat
aidé suivant : contrat d'accompagnement dans l'emploi le 8 octobre 2009 ; il s'est agi de contrats à durée déterminée.
Mme C a saisi le 22 mars 2011 le conseil de prud'hommes d'Albi qui par jugement du 16 mai 2012 a ordonné la jonction avec l'instance introduite par Mme V et a statué de manière similaire dans les deux affaires. Il ne sera fait état dans
la présente décision que de l'instance de Mme C dans la mesure où notre cour, comme il a été décidé ci- après a ordonné
la disjonction des deux procédures.
Par jugement du 16 mai 2012le conseil de prud'hommes a:
- requalifié le contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée,
- dit que la rupture s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- dit que la procédure de licenciement n'a pas été mise en oeuvre,
- condamné l'EPLE CLÉMENT DE PÉMILLE à payer:
- 1500euro à titre d'indemnité de requalification de son contrat de travail en contrat de travail à durée indéterminée,
- 767,28euro pour irrégularité de la procédure de licenciement,
- 4000euro à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
-153,46euro à titre d'indemnité de licenciement,
- 500euro sur le fondement de l'article 700code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire de la décision.
Le conseil de prud'hommes a débouté Mme C de sa demande de dommages et intérêts pour non respect de l'obligation
de formation.
L'EPLE CLÉMENT DE PÉMILLE a relevé appel de cette décision le 14 juin 2012.
Le conseil de prud'hommes a ordonné la réouverture des débats et par jugement du 4 juillet 2012 a alloué à Mme C la
somme de 767,28euro à titre d'indemnité compensatrice de préavis et la somme de 76,72euro à titre d'indemnité de
congés payés sur préavis.
L'EPLE CLÉMENT DE PÉMILLE a relevé appel de cette décision notifiée le 6 juillet 2012 par lettre du 6 août 2012.
A l'audience, après avoir fait rapport, le président a demandé à l'EPLE CLÉMENT DE PEMILLE de préciser sa position relative à ses effectifs et a invité les parties à s'expliquer sur les effets de la décision de la CJUE du 15 janvier 2014,
de celle du 29 avril 2011 du conseil constitutionnel sur l'application de l'article L1111-3 du code du travail.
L'EPLE CLÉMENT DE PEMILLE s'en est rapporté sur ce point et a déclaré que si les contrats aidés étaient pris en
compte dans les effectifs, il devait employer à l'époque environ 300 salariés, alors que s'ils ne l'étaient pas ses effectifs
étaient de 10. Ces chiffres n'ont pas été contestés.
Dans ses explications orales reprenant et précisant ses conclusions écrites l'EPLE CLÉMENT DE PÉMILLE expose:
- que la demande de requalification en contrat à durée indéterminée est irrecevable au regard de la personnalité de droit
public de l'employeur dans la mesure où un établissement public d'éducation, service public administratif ne peut être lié
par un contrat de travail de droit privé à durée indéterminée et qu'elle se heurte à la décision du 24 octobre 2012 du
conseil constitutionnel;
- que désigné établissement mutualisateur, il a assuré la gestion administrative des contrats aidés du département, a
appliqué les directives de l'Inspection Académique en tenant compte des moyens mis en place par l'Education Nationale
pour le financement des formations des contrats aidés; qu'il a appliqué les directives de l'Inspection Académique en
tenant compte des moyens mis en place par l'Education Nationale pour le financement des formations des contrats aidés;
- que les conventions tripartites répondent aux exigences légales telles que prévues par les imprimés CERFA;
- qu'aucune disposition légale ne lui imposait de mettre en place une action de formation externe en plus de la formation
interne ; qu'il n'a commis aucune faute dans l'exécution de ses obligations contractuels ;
- qu'il a mis en place des formations et des accompagnements ; que Mme C a été prise en charge par un référent (généralement le directeur ou le proviseur) ; que lors de la signature du contrat Mme C a été informée du contenu du contrat
de travail et de la nécessité de s'engager dans une formation professionnelle dont le plan était à présenter à l'employeur
et dont le coût pouvait être pris en charge; que tous les salariés dont Mme C ont été informés de la nécessité de s'engager dans une démarche active de recherche de formation et de participation aux formations proposées ;
- que Mme C a bénéficié d'une formation interne permettant d'utiliser les logiciels Education Nationale, de prendre
connaissance des procédures de l'établissement d'éducation, d'effectuer des tâches d'une grande diversité et d'acquérir
des compétences et une expérience professionnelle ;
- que Mme C, tout comme les autres salariés, a été informée de la nécessité de s'engager dans une formation liée à un
projet professionnel et de s'inscrire dans une 'démarche active de recherche de formation et de participation aux formations proposées' ; que dans le cadre d'un partenariat mis en place avec Pôle Emploi a été remis à tous les salariés un
formulaire d'inscription à une formation dans le cadre d'une stratégie de recherche d'emploi dont les salariés ayant fait
acte de candidature ont bénéficié ; que Mme C, qui a pu bénéficier des prestations de Pôle Emploi de droit commun
ainsi que des prestations de l'AFPA et du réseau GRETA , n'a pas eu la volonté de s'insérer dans un processus de formation, n'a pas souhaité bénéficié d'un bilan de compétence et a tardivement exprimé son souhait de bénéficier d'une formation ;
- qu'il n'a commis aucune faute en ne renouvelant pas le contrat de Mme C n'ayant pu que s'adapter aux contraintes
réglementaires, financières, administratives ;
- que, par application de l'article L 1111-3CT, les contrats aidés ne doivent pas être pris en compte dans les effectifs à
l'occasion de tous les textes dont l'application dépend de cette élément, notamment l'article L1235-3 du code du travail ;
- que Mme C, qui ne justifie pas de ses préjudices, sera déboutée de l'ensemble de ses demandes ;
- que le jugement déféré sera réformé et Mme C condamnée aux entiers dépens et sur le fondement de l'article 700 du
code de procédure civile.
Dans ses explications orales reprenant et précisant ses conclusions écrites Mme C expose:
- que le tribunal des conflits dans sa décision du 17 décembre 2012 a dit que la juridiction judiciaire est compétente pour
connaître d'un litige entre un salarié qui a été embauché selon un contrat aidé et un établissement public local d'enseignement ; que la sanction du défaut de formation dispensée par l'employeur réside dans la requalification du contrat de
travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée ; que l'exception d'irrecevabilité sera rejetée ;
- que les modalités d'accompagnement et d'action de formation ou de validation de Mme C n'ont pas été mentionnées
dans les différents contrats ; qu'aucun parcours d'insertion n'a été finalisé lors de la signature du contrat ;
- qu'aucun avenant ultérieur n'est venu préciser les actions de formation et d'accompagnement ; que le jugement déféré
sur la question de la requalification sera confirmé ; qu'aucun parcours d'insertion n'a été finalisé ;
- que l'EPLE CLÉMENT DE PÉMILLE ne prouve pas 'l'exécution complète et loyale de l'obligation de formation',
d'accompagnement, de validation des acquis et le refus de Mme C d'effectuer une formation ; que la preuve d'une quelconque formation en interne n'est pas rapportée ; que la seule utilisation de logiciels n'est pas l'équivalent d'une formation ; qu'elle n'a jamais refusé d'effectuer une quelconque formation, alors qu'elle n'a pas été informée des initiatives que
l'EPLE CLÉMENT DE PÉMILLE a soutenu avoir mis en place avec Pôle Emploi ;
- que le jugement déféré qui a requalifié le contrat de travail sera confirmé ; que la requalification en contrat de travail à
durée indéterminée a pour conséquence la rupture du contrat de travail aux torts de employeur ;
- qu'il est sollicité:
- la somme de 4500euro au titre du non respect de l'obligation de formation;
- la confirmation de la décision déférée sur les autres points ;
- la somme de 767,2euro titre de l'irrégularité de la procédure de licenciement;
- la somme de 4000euro au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse, la somme de 153,46euro au titre de
l'indemnité de licenciement, la somme de 767,28euro au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre la somme
de 76,72euro à titre de l'indemnité compensatrice de congés payés y afférents et celle de 3000euro sur le fondement de
l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIVATION DE LA DÉCISION :
Il y a lieu, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, d'ordonner la jonction des instances N°12/04148 et
N°12/02886 et de statuer par une même décision sous le N° 12/02886.
Les exceptions doivent être présentées in lemine litis avant toute défense au fond (article 74 du code de procédure civile). L'exception d'irrecevabilité soulevée par l'EPLE CLÉMENT DE PÉMILLE n'a pas été présentée en première
instance. L'exception est, donc, irrecevable, ceci alors même que les règles de compétence sont d'ordre public.
Toutefois, par application de l'article 92 du code de procédure civile, l'incompétence pouvant être prononcée d'office en
cas de violation d'un règle de compétence d'ordre public, la cour estime devoir examiner si le présent litige relève de la
compétence des juridictions de l'ordre judiciaire.
Il résulte des dispositions alors en vigueur des articles L 5134-24 du code du travail et L 5134-41du code du travail que
les contrats d'accompagnement dans l'emploi et les contrats d'avenir sont des contrats de travail de droit privé ; en conséquence, les litiges nés à propos de la conclusion, de l'exécution, de la rupture ou de l'échéance de ces contrats relèvent
en principe de la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire. Toutefois, d'une part, dans le cas où la contestation
met en cause la légalité de la convention passée, notamment, entre l'État et l'employeur, la juridiction administrative est
seule compétente pour se prononcer sur la question préjudicielle ainsi soulevée ; d'autre part, le juge administratif est
également seul compétent pour tirer les conséquences d'une éventuelle requalification d'un contrat, soit lorsque celui-ci
n'entre en réalité pas dans le champ des catégories d'emplois , d'employeurs ou de salariés visés par les dispositions du
code du travail fixant l'origine de ces contrats, soit lorsque la requalification effectuée par le juge judiciaire, pour un
autre motif, a pour conséquence non la réparation du préjudice résultant de la rupture du contrat mais la poursuite d'une
relation contractuelle entre le salarié et la personne morale de droit public gérant un service public administratif, au-delà
du terme du ou des contrats relevant de la compétence du juge judiciaire .
Les demandes de Mme Cne mettent pas en cause la légalité des conventions de droit public ayant servi de cadre à la
passation de son contrat, ne tendent pas à la poursuite d'une relation contractuelle entre le salarié et la personne morale
de droit public gérant un service public administratif , au-delà du terme du ou des contrats à durée déterminée, mais
seulement à obtenir l'indemnisation des conséquences de la requalification et de la rupture du contrat avec l'EPLE
CLÉMENT DE PÉMILLE.
A cet égard, si la décision du conseil constitutionnel du 24 octobre 2012, dit que les collectivités territoriales et les
autres personnes publiques ne peuvent recourir au contrat d'accompagnement dans l'emploi que dans le cadre de contrats de travail à durée déterminée, cette réserve 19 est applicable seulement aux contrats conclus postérieurement à sa
publication, ce qui l'exclue du présent litige. Par ailleurs, cette même décision qui déclare conforme à la Constitution les
contrats aidés à durée déterminée conclus par une personne publique n'aborde nullement le cas où la nature initiale du
contrat à durée déterminée n'est pas contestée et où la requalification est demandée, non pour voir dire que dans l'avenir
le contrat se poursuit pour une durée indéterminée ( et porte ainsi atteinte au principe d'égal accès à la fonction publique), mais pour voir constater que l'employeur, personne morale de droit public, n'a pas respecté les obligations mises
à sa charge par les dispositions dérogatoires aux conditions générales de recours aux contrats de travail à durée déterminée, contrats de droit privé, et pour obtenir l'indemnisation des conséquences de la requalification prononcée à titre de
sanction en raison de la rupture du contrat avec l'EPLE CLÉMENT DE PÉMILLE.
Notre Cour est bien compétente pour statuer dans le présent litige et le principe de l'indemnisation du préjudice né des
conséquences de la rupture après requalification-sanction ne se heurte pas à la décision du conseil constitutionnel du 24
octobre 2012. Les demandes de Mme C sont, donc, recevables.
Il résulte des articles L. 1242-3 et L. 1245-1 du code du travail que l'obligation pour l'employeur d'assurer des actions de
formation, d'orientation professionnelle et de validation des acquis nécessaires à la réalisation du projet professionnel du
salarié et destinées à le réinsérer durablement constituent une des conditions d'existence des
contrats d'accompagnement dans l'emploi à durée déterminée. L'obligation de formation étant un élément essentiel du
contrat aidé, par application de l' article L 1245-1du code du travail qui prévoit que tout contrat de travail conclu en
méconnaissance des dispositions de l'article L 1242-3 du code du travail est réputé à durée indéterminée, la violation de
cette obligation est de nature à justifier la requalification par réputation.
Par application combinée des dispositions des articles L 1243-3 et L 1245-1 du code du travail, tout contrat aidé à durée
déterminée devant prévoir des actions de formation et d'accompagnement au profit de son titulaire, c'est à l'employeur,
débiteur de l'obligation de formation, d'apporter la preuve qu'il a satisfait à ses obligations.
Les attestations des inspecteurs de l'Education Nationale produites par l'EPLE CLÉMENT DE PÉMILLE établissent
que les personnes embauchées en contrats aidés en qualité d' aide administrative ont reçu une formation interne et un
accompagnement par les personnes en place dans les écoles lors de leur prise de fonction et lors de toute nouvelle mission qui leur était confiée: tri du courrier et réponse, gestion du courrier électronique, frappe des compte rendus de réunions, la frappe et la distribution des mots aux parents, l'affichage et la distribution des mots aux parents, l'affichage et
la distribution des mots aux personnels, l'aide administrative au niveau de la comptabilité, la gestion du fonctionnement
de la BCD, l'accueil des parents, la gestion des communications téléphoniques, la commande des repas de la cantine.
L'attestation de Mme RAMOND, intendante, chargée par délégation du directeur du l'EPLE CLÉMENT DE PEMILLE
de l'encadrement du personnel administratif , établit qu'elle recevait personnellement chaque personne recrutée qu'elle
informait du contenu de sa mission, de ses conditions de travail et à qui elle soulignait que ce type de contrat aidé 'ne
peut être qu'une passerelle, que le temps de ce contrat doit être propice à une immersion dans une entreprise du secteur
privé, doit permettre une réflexion sur son projet professionnel et le besoin de formation ou d'accompagnement à rechercher'. Cette même attestation établit que chaque nouveau salarié était informé de ce qu'il serait accompagné au sein
de l'école par les enseignants et directeurs assurant l'autorité fonctionnelle, la prise en main étant faite par l'enseignant
référent. Cette attestation est confirmée par celle de Mme ESCRIBE, secrétaire au sein du l'EPLE CLÉMENT DE
PEMILLE.
La convention régionale intervenue entre le Directeur Régional du travail, le recteur d'Académie, le directeur de Pôle
Emploi définit les objectifs en matière de formation des salariés en contrats aidés. L'article 3 de cette convention stipule
que les salariés en contrats aidés doivent accéder aux dispositifs de formation existants afin de se professionnaliser dans
l'exercice de leurs fonctions dans les EPLE, d'acquérir des compétences de nature à favoriser leur insertion professionnelle à l'issue de leur contrat (remise à niveau, préparation à un concours, obtention d'une certification). L'article 4 de la
convention stipule que serait établi annuellement un rapport portant, notamment, sur les actions de formation (actions
mises en place, nombre et profil des bénéficiaires des actions réalisées) et qu'en cas de non atteinte des objectifs fixés
par la convention, le rapport préciserait les actions envisagées pour améliorer les résultats.
Il en ressort que si les salariés en contrats aidés ont bien été informés de leur statut et de leur place au sein de l'Education Nationale, s'ils ont bien été accompagnés dans le cadre de l'adaptation à leur poste de travail, ils n'ont bénéficié
concrètement d'aucune démarche de définition d'un plan mettant en place de manière rationnelle et personnalisée un vrai
programme de formation leur permettant d'acquérir des compétences de nature à favoriser leur insertion professionnelle
à l'issue de leur contrat. Or, l'adaptation au poste de travail qui est une obligation générale de l'employeur dans tous les
types de contrats de travail ne recouvre pas l'étendue des actions nées de l'obligation de formation spécifique des contrats aidés.
Il apparaît, en l'espèce, que l'EPLE CLÉMENT DE PEMILLE, par manque de moyens financiers et humains, n'a pas été
en mesure de proposer un parcours et un plan de formation à chacun de ses salariés en contrat aidé et n'a pu que leur
proposer de choisir eux mêmes les formations qui leur apparaîtraient utiles dans leur parcours professionnel.
Il y a lieu de constater également qu'il n'est pas justifié sur un plan général par l'EPLE CLÉMENT DE PEMILLE du
nombre total des actions mises en place, du nombre et des profils des bénéficiaires des actions réalisées, des objectifs
atteints au regard de ceux qui étaient fixés par la convention régionale précitée, renseignements qui auraient pu renseigner sur l'effectivité de la formation proposée.
En l'espèce, donc, l'EPLE CLÉMENT DE PEMILLE ne justifie nullement avoir mis en place et proposé à Mme C un
plan concret, personnalisé et effectif de formation.
Il apparaît, en conséquence, que l'EPLE CLÉMENT DE PEMILLE, en raison de l'absence des moyens dont il disposait ,
n'a respecté qu'une partie de ses obligations en matière de formation, et n'a pu, pour le surplus, qu'inviter les salariés
sous contrat aidés, dont Mme C, à prendre en charge leur plan de formation, à prendre l'initiative de faire acte de candidature pour bénéficier de telle ou telle formation du GRETA, du PAF, de l'AFPA qu'ils jugeraient intéressantes. L'EPLE
CLÉMENT DE PEMILLE, dont la bonne foi et l'insuffisance des moyens , ne sont pas une cause exonératoire de l'
obligation de formation s'imposant à lui, ne justifie, donc, pas avoir exécuté complètement celle-ci et ne peut utilement
soutenir qu'il appartenait à Mme Cde combler par ses initiatives ses propres carences ainsi mises en évidence.
Pour les raisons ci-dessus il y a lieu de confirmer la décision déférée qui a requalifié en contrat à durée indéterminée le
contrat à durée déterminée liant les parties.
Il y a, également de confirmer la décision déférée qui a dit que le contrat de travail à durée déterminée qui a été requalifié en contrat à durée indéterminée a été rompu de manière abusive par L'EPLE CLÉMENT DE PEMILLE, avec
comme conséquence l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement et le non respect de la procédure.
Par ailleurs, l'article L 1245-2 du code du travail dispose : 'lorsque le conseil de prud'hommes (saisi d'une demande de
requalification) fait droit à la demande du salarié, il lui accorde une indemnité à la charge de l'employeur, ne pouvant
être inférieure à un mois de salaire'. Par application des dispositions de cet article, tenant compte des circonstances de la
cause, il y a lieu de confirmer la décision déférée qui a alloué à Mme C la somme de 1500euro .
De l'importance des effectifs dépendent le mode de calcul et le montant de l' indemnité pour licenciement sans cause
réelle et sérieuse, ainsi que la possibilité de cumuler avec celle-ci l'indemnité pour irrégularité de la procédure.
L'Etablissement Public d'Enseignement Public (EPLE) CLÉMENT PEMILLE dans ses écritures a soutenu avoir moins
de 11 salariés et a déclaré à l'audience avoir 10 salariés mais n'a également pas contesté à l'audience que si les salariés à
contrats aidés étaient pris en compte , il avait à l'époque un effectif de 300 salariés environ.
L'article L 1111-3 du code du travail dispose que les titulaires d'un contrat initiative emploi, d'un contrat accompagnement dans l'emploi, d'un contrat de professionnalisation à durée déterminée ne sont pas pris en compte dans les effectifs.
Cette disposition a été déclarée conforme à la Constitution sur QPC par le conseil constitutionnel (Décision du 29 avril
2011). La CJUE (CJUE, gr. ch., 15 janv. 2014, aff. C-176/12, Assoc. de médiation sociale c/ Union locale des syndicats
CGT ) répondant à deux questions préjudicielles soulevées par la Cour de cassation a dit que l'article 27 de la charte et
les dispositions de la directive 2002/14/CE du Parlement européen et du Conseil, du 11 mars 2002, établissant un cadre
général relatif à l'information et la consultation des travailleurs dans la Communauté européenne , ne pouvaient être
invoqués entre particuliers afin de laisser inappliqué l'article L. 1111-3 du Code du travail français.
Ainsi, par application de l'article L 1111-3 du code du travail, compte tenu des explications non contestées de l' Etablissement Public d 'Enseignement Public (EPLE) CLÉMENT PEMILLE, il y a lieu de dire que les effectifs habituels au
moment du licenciement étaient inférieurs à 11 salariés avec les conséquences qui s'y attachent. Il en résulte qu'il peut y
avoir cumul entre indemnité pour irrégularité de la procédure de licenciement et indemnité pour licenciement sans cause
réelle et sérieuse, d'une part, et que le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse doit être
évalué en fonction du préjudice subi.
L'indemnisation prévue par l'article L1235-2 du code du travail, en cas de licenciement irrégulier pour inobservation de
la procédure ne peut se cumuler avec l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse que si le salarié a moins
de deux ans d'ancienneté ou travaille dans une entreprise de moins de onze salariés. En l'espèce , il apparaît qu'au moment de la rupture du contrat de travail l'EPLE CLÉMENT DE PEMILLE employait moins de 11 salariés ; il y a, donc,
lieu en l'absence de procédure de licenciement de confirmer la décision du premier juge qui a , à juste titre, évalué à la
somme de 767,28euro la somme due à Mme C.
Aux termes de l'article L.1235-5 du code du travail, les dispositions précitées de l'article L.1235-3 du code du travail
n'étant pas applicables au licenciement opéré dans une entreprise employant habituellement moins de onze salariés
(comme c'est le cas en l'espèce), l'indemnisation du licenciement est appréciée sans somme plancher au vu des éléments
justificatifs produits.
Compte tenu notamment des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à Mme C, de son âge, de
son ancienneté, de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et
des conséquences du licenciement à son égard, tels qu'ils résultent des pièces et des explications fournies, il y a lieu,
pour les considérations ci-dessus, de lui allouer, en application de l'article L.1235-5 du code du travail, une somme de
3000euro à titre d'indemnité pour licenciement abusif.
Aux termes de l'article L.1234-1 du code du travail, lorsque le licenciement n'est pas motivé par une faute grave, le
salarié a droit à un préavis dont la durée est calculée en fonction de l'ancienneté de services continus dont il justifie chez
le même employeur. Le montant des sommes allouées n'a pas été contesté.
Il y a, donc, lieu de confirmer la décision déférée et d'allouer à Mme C la somme de767,28euro à titre d'indemnité
compensatrice de préavis outre celle de76,72euroà titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis.
Mme Ca formé une demande indemnitaire au titre du préjudice subi du fait du manquement de employeur à son obligation de formation.
Il ressort des considérations ci-dessus que la preuve du manquement de l'EPLE CLÉMENT DE PEMILLE à son obligation de formation est établie, alors que le manque de moyens financiers mis à disposition de l'EPLE CLÉMENT DE
PEMILLE ne constitue pas une cause d'exonération.
Si l'indemnité de requalification (qui est la sanction de l'article L1245-1du code du travail du fait que le manquement de
l'employeur à son obligation de formation ne lui permet plus de se prévaloir des dispositions dérogatoires de l'article L
1242-3 du code du travail aux cas de recours à un contrat à durée déterminée de l'article L 1245-1du code du travail) a
la nature d'une sanction civile et peut se cumuler avec la demande indemnitaire fondée sur le manquement à l'obligation
de formation, il y a lieu d'observer que le préjudice subi du fait du licenciement abusif a été réparé et qu'il a été tenu
compte expressément à cette occasion dans son évaluation de la difficulté prévisible de Mme Cà retrouver un emploi
compte tenu de son degré de formation. La cour, donc, expressément réparé le préjudice né de l'inexécution partiellement fautive de l' Etablissement Public d 'Enseignement Public (EPLE) CLÉMENT PEMILLE de son obligation de
formation dans ses conséquences au moment de la rupture dans la démarche de recherche d'emploi. Par contre, notre
cour n'a pas réparé le préjudice résultant de ce que Mme C, du fait du manquement de l'employeur, a été privée de la
chance d'acquérir une formation et un degré de performance supérieur lui permettant d'espérer un meilleur déroulement
de carrière et un positionnement social plus valorisant. Ce chef de préjudice, distinct de celui existant au moment du
licenciement, doit être réparé par l'allocation de la somme de 1000euro.
Il y a lieu de confirmer la décision des premiers juges qui a condamné l'EPLE CLÉMENT DE PEMILLE aux dépens et
a fait application de l'article 700CPC.
L'EPLE CLÉMENT DE PEMILLE qui succombe en appel supportera les dépens.
Il y a lieu de condamner l'EPLE CLÉMENT DE PEMILLE à payer à Mme C la somme de 1200euro en cause d'appel
sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La Cour, statuant comme il est dit ci dessus,
Ordonne la jonction des instances N°12/04148 et N°12/02886 dit qu'il sera statué par une même décision sous le
N°12/02886.
Dit que l'exception de compétence soulevée pour la première fois en cause d'appel est irrecevable ;
En tout état de cause, dit que la cour est compétente pour statuer sur les demandes de Mme Cet que ses demandes sont
recevables ;
Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions à l'exception des dispositions suivantes :
- condamne l'EPLE CLÉMENT DE PEMILLE à payer à Mme C
- la somme de 3.000euro (trois mille euros) à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- la somme de 800euro (huit cent euros) à titre d'indemnité de requalification ;
- la somme de 1.000euro (mille euros) à titre de réparation du préjudice subi du fait du manquement à l'obligation de
formation ;
Condamne l'EPLE CLÉMENT DE PEMILLE aux dépens d'appel et à payer à Mme C la somme de 1.200euro (mille
deux cent euros) sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE
LE PRÉSIDENT
Mlle Nadia EL ALAOUI
M. Bernard BRUNET