FEUILLE ROUGE
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FEUILLE ROUGE
F EUILLE F E U I L L E La RRO UGE OUGE Juin 2005 514 Département de Recherche Fondamentale sur la Matière Condensée diamant SUPRACONDUCTEUR POUR L’ÉTERNITÉ Christophe Marcenat- - DRFMC - [email protected]@cea.fr En avril 2004, une équipe russo-américaine annonçait la fabrication d’un diamant, connu comme un isolant, dont la résistance électrique s’annulait à basse température (2–4 K). Pour obtenir ce comportement supraconducteur, ces chercheurs ont incorporé une forte concentration de bore (2-3%) dans du diamant polycristallin pendant sa croissance à très forte température et sous très haute pression. Nous avons réussi, en collaboration avec le CNRS, à fabriquer des couches minces supraconductrices de ce matériau. Sans précaution particulière, le carbone déposé forme du graphite; pour obtenir ces couches, il a donc fallu recourir à de l’épitaxie en phase gazeuse assistée par plasma sur des substrats de diamant synthétique orienté. L’état des surfaces ainsi obtenues (faible rugosité, absence de contamination) nous a permis une mesure directe et locale du gap supraconducteur par microscopie tunnel à balayage (STM) (Fig. 1). Sous champ, le flux magnétique pénètre dans le diamant sous forme de lignes de champ quantifiées appelées vortex (supraconductivité de type II) que nous avons visualisées (Fig. 2). Ce matériau non-magnétique et dont la structure est très bien connue constitue un système modèle pour l’étude des transitions électroniques métal-supraconducteur-isolant. En outre, la maîtrise de la géométrie en couches minces permettra d’explorer l’évolution vers des structures à dimensionalité réduite (2D ou moins). Fig. 1 : Mesure de la conductance en fonction de la tension appliquée à la pointe du STM lors d’un balayage à la surface du diamant dopé. La partie bleu foncé illustre le gap supraconducteur. A LA LUEUR DES NANOCRISTAUX Comment augmenter la résolution d’un microscope optique à l’aide de nanocristaux ? Au verso Fig. 2 : Imagerie des vortex par STM: les taches sombres représentent les coeurs des vortex qui s’organisent en un réseau hexagonal déformé. evènement RENCONTRE DRFMC-DRDC Gérard Bidan - DRFMC - [email protected] Le 18 mai 2005, les deux départements de recherche fondamentale du CEA-Grenoble ont fait le point sur des sujets de recherche communs, issus de l’interaction entre chimie, physique et biologie. L’objectif visait, non seulement à renforcer les collaborations actuelles, mais aussi à en faire émerger de nouvelles et à plus vaste échelle. Cinq thèmes de recherche avaient été sélectionnés parmi d’autres: modélisation et méthodes d’analyses, imagerie, biocapteurs et Pascale Delangle (DRFMC) et Isabelle Morin b iotechnologies, (DRDC) (de droite à gauche) présentent métaux, radiobiologie et leurs travaux sur la modélisation des métalstress. loprotéines. Lors de l’ouverture, Jean Therme a délivré un message fort sur la convergence des technologies, le double continuum de recherche d’une discipline à l’autre et du fondamental à l’appliqué, au sein d’un centre d’excellence. De nombreux exposés ont permis aux cent vingt participants de prendre connaissance de l’état d’avancement de cette sélection de recherches communes et ainsi de juger de l’évolution des thématiques. Dans leur intervention de conclusion, les deux chefs de département, Jean Paul Duraud et Marc Fontecave, ont annoncé leur souhait d’étendre la pluridisciplinarité aux nanotechnologies et d’inciter des recherches communes grâce à des moyens supplémentaires. Afin d’alimenter la réflexion sur ce sujet, un document de synthèse est en préparation. Du côté Nanobio, dans le futur, le comité de pilotage associera davantage les chercheurs à sa réflexion sur la relance du projet et son positionnement dans Minatec. Direction des Sciences de la Matière . CEA-GRENOBLE La F EUILLE ROUGE microscopie A LA LUEUR DES NANOCRISTAUX Frédéric Chandezon - SPrAM - [email protected] La résolution d’une image optique obtenue avec un microscope dépend de la taille de la source de lumière utilisée. Les microscopes optiques en champ proche SNOM*, bien qu’ils permettent de descendre en dessous de la limite de diffraction, sont limités par l’ouverture de la pointe, c’est-à-dire l’amincissement final de la fibre optique acheminant la lumière. A l’heure actuelle, il est impossible de fabriquer de manière reproductible des ouvertures inférieures à la centaine de nanomètres. Nous avons mis au point un procédé permettant d’améliorer la résolution des microscopes : il s’agit de l’implantation de nanocristaux fluorescents à l’extrémité de la pointe. Ceux-ci, agissant comme des “nanosources de lumière” permettront d’obtenir une résolution spatiale de la taille de l’objet nanométrique. Nanosource de lumière En collaboration avec le Laboratoire de Spectrométrie Physique (CNRS/UJF), nous avons implanté à l’extrémité d’une pointe optique conventionnelle un ou plusieurs nanocristaux de séléniure de cadmium (CdSe). Ces nanocristaux, synthétisés au DRFMC, sont particulièrement photostables*. En bout de pointe, ils sont excités par une lumière laser à 458 nm transmise par la fibre. Du fait du confinement des paires électronstrous dans ces nano-objets, ils ré-émettent une lumière de fluorescence qui dépend de leur taille et de leur morphologie. Les nanocristaux jouent donc le rôle de “nanosources de lumière” qui permettent d’illuminer localement l’échantillon analysé. L’ensemble pointe-nanocristaux constitue ce qu’on appelle une sonde active. Comment s’y prendre ? Nous avons dû faire face principalement à deux difficultés. 1 - La moindre impureté fluorescente présente dans la fibre peut également être excitée et réémettre une lumière parasite qui se retrouvera en bout de pointe et peut, le cas échéant, masquer la fluorescence des nanocristaux. Les fibres optiques conventionnelles présentent un tel bruit de fond. Il a donc fallu prendre des fibres en silice habituellement utilisées en UV et développer des techniques spécifiques d’amincissement chimique et de métallisation. Les fibres ainsi obtenues présentent une ouverture optique inférieure à 100 nm, une transmission de l’ordre du % (valeur supérieure de plusieurs ordres de grandeur à celle obtenue pour des fibres préparées par d’autres méthodes) et bien sûr un très faible bruit de fond. 2 - Comment disposer en bout de pointe un ou quelques nanocristaux ? La méthode choisie consiste à “tremper” l’extrémité de la pointe optique dans une solution de polymère (PMMA) dopé avec une très faible concentration de nanocristaux. On forme ainsi un film fin de PMMA (épaisseur < 100 nm) dopé ; seuls les nanocristaux situés dans la partie du film couvrant l’ouverture de la pointe sont excités (Fig. 1). Combien de nanocristaux par pointe ? Pour caractériser la sonde active, l’extrémité de la pointe est placée dans un montage confocal et l’émission de lumière sous excitation est analysée temporellement et spectralement. Les nanocristaux sont connus pour être sujets au “scintillement” ou “clignotement”, c’est-à-dire qu’ils passent de manière apparemment erratique d’un état émissif “on” à un état non émissif “off”, sans échelle de temps caractéristique. Ce phénomène n’est observable que dans le cas d’objets uniques ou d’agrégats de très petite taille ; un ensemble statistique de nanocristaux donnerait en effet un signal moyenné. Les traces temporelles de la lumière émise en bout de la sonde active montrent l’existence d’un “scintillement” (Fig. 2), preuve que nous sommes parvenus à implanter un très petit nombre de nanocristaux (typiquement moins d’une dizaine). Le microscope de demain... La prochaine étape est d’utiliser ces sondes actives en configuration SNOM sur des échantillons tests et de vérifier le gain en résolution attendu. Nous disposerons alors d’une véritable “nanosource de lumière” rapportée sur un support macroscopique, ce qui ouvre de nombreuses perspectives pour le champ proche optique. SNOM Dans les microscopes optiques en champ proche (SNOM: Scanning Near field Optical Microscopy), une pointe optique excitée par une source lumineuse est positionnée à quelques nanomètres d’un échantillon pour l’éclairer en champ proche. La lumière diffusée ou réémise par l’échantillon est ensuite collectée en champ lointain. On obtient une image optique, dont la résolution dépend directement de l’ouverture de la pointe. Les pointes sont obtenues par l’amincissement d’une fibre optique, dont l’extrémité est étirée ou attaquée chimiquement, puis métallisée sur les côtés. Fig. 1 : Schéma de principe de la sonde active et du montage optique utilisé pour la caractériser. Ce dernier permet une analyse temporelle (via la photodiode à avalanche) et spectrale (spectromètre + CCD) de la sonde active. Photostabilité Un objet fluorescent est dit photostable lorsqu’il émet de la lumière par fluorescence sans perte notable d’intensité dans le temps. Fig. 2 : Analyse temporelle d’une sonde active avec des nanocristaux de CdSe. On observe une succession d’états “on” (émissifs) et “off” (éteints), caractéristiques de la présence d’un très faible nombre d’objets en bout de pointe. Comité de rédaction : J.P. Duraud, E. Molva, A. Pesnelle (DIR), P. Dalmas de Réotier (SPSMS), Th. Douki (SCIB), S. Lyonnard (SI3M), L. Prejbeanu (SPINTEC), R. Vallcorba (SBT), P. Warin (SP2M) - Secrétaire de rédaction : C. Bellavia (DIR) tél. 04 38 78 99 68