K1A 0G4 Tél. : (819) 997-5006 Sa
Transcription
K1A 0G4 Tél. : (819) 997-5006 Sa
DOCUMENT DE TRAVAIL MONDIALISATION ET PROBLÉMATIQUE HOMMES-FEMMES RÉFLEXIONS ET INTERVENTIONS EN MATIÈRE DE DÉVELOPPEMENT Décembre 1996 Préparé pour le compte de la: Direction de l'intégration de la femme au développement et égalité des sexes Direction générale des politiques Agence canadienne de développement international Préparé par: Angela Keller-Herzog Agence canadienne de développement international 200, promenade du Portage Gatineau (Québec) K1A 0G4 Tél. : (819) 997-5006 Sans frais : 1-800-230-6349 Télécopieur : (819) 953-6088 (Pour les malentendants et les personnes atteintes de troubles de la parole (ATS) seulement: (819) 953-5023 Sans frais pour les malentendants et les personnes atteintes de troubles de la parole (ATS) seulement : 1-800-331-5018) Courriel : [email protected] REMERCIEMENTS Il convient que nous exprimions notre reconnaissance au professeur Diane Elson, doyenne de la recherche et des études supérieures à la School of Social Sciences de l'université de Manchester, en Grande-Bretagne. Ses conseils et les observations à propos de plusieurs ébauches du présent document ont été on ne plus précieux. Nos remerciements également à Brian Hunter, économiste en chef de la Direction générale de l'Asie, à l'ACDI, qui nous a fourni des orientations et des contributions d'une importance déterminante. Marc-André Frédette et Carole Houlihan nous ont également aidés en formulant des suggestions. Hélène Paquin a su démontrer son génie pour la mise en page. Rajani Alexander, analyste principale des politiques, Direction de l'intégration de la femme au développement et égalité des sexes, à l'ACDI, a dirigé le projet. 1.0 TABLE DES MATIÈRES Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 2.0 La mondialisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2 Historique: trois phases . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 Caractéristiques distinctives de la mondialisation: la troisième phase . . . . . . . . . . . . 5 Facteurs favorisant la mondialisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 3.0 Disparités: Jouissance et exclusion des retombées de la mondialisation . . . 7 4.0 La mondialisation: ses incidences sur la problématique hommes-femmes . . 10 5.0 Égalité entre les sexes, habilitation et développement des capacités des femmes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17 6.0 Les implications de la mondialisation pour la gestion des affaires publiques 21 Contraintes sur les instruments micro-économiques: facteurs d'incitation, fiscalité et réglementation......................................................................................... 21 Contraintes exercées sur les politiques macro-économiques: conséquences pour les politiques sociales et celles concernant les femmes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22 7.0 Nouveaux risques et vulnérabilités engendrés par la mondialisation . . . . . . . 24 Technologie et nouveaux modes d'organisation de la production . . . . . . . . . . . . . . . . 24 Risques pour l'environnement et l'habitat . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24 Urbanisation, bouleversements régionaux et migration . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25 Mobilité: un risque social . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26 Appropriation du travail . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26 Dépendance à l'égard des caprices du marché et migration de sortie du capital mondial . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26 . . Volatilité des marchés financiers . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27 8.0 Conclusion: l'agence de développement en tant qu'institution médiatrice dans le processus de mondialisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27 Annexe: Les nouveaux aspects structurels de la mondialisation . . . . . . . . . . . . . . . . . 31 Mobilité des capitaux et mondialisation financière . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31 Réseaux de production transnationaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32 Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35 1.0 Introduction L'énoncé officiel de politique étrangère du Canada, Le Canada dans le monde, reconnaît que la mondialisation « a de grandes répercussions économiques ». La mondialisation est devenue le maître-mot des années 90 et désigne une importante tendance structurelle caractérisant la dynamique d'une économie mondiale en évolution. Les responsables de la politique nationale du Canada se doivent de tenir compte de la mondialisation et de ses effets sur les Canadiens, effets qui entravent la politique intérieure et extérieure, et lui ouvrent en même temps des possibilités. Dans le même ordre d'idées, la mondialisation a des incidences pour les décideurs des pays en développement, car elle a des répercussions autant pour ceux qui participent à part entière à l'économie planétaire que pour ceux qui survivent à sa périphérie. Le présent document de travail aborde la mondialisation et ses incidences pour les pays en développement du point de vue du rapport entre les sexes. Cette approche vise à rehausser la capacité de l'ACDI de s'acquitter de son rôle et de ses responsabilités sur le plan du partenariat dans les pays en développement, ce qui comprend: v la formation de partenariats constructifs avec des femmes des pays en développement; v une action efficace à l'égard de la situation des pauvres, particulièrement des femmes pauvres; v l'amorce d'un dialogue avec les décideurs des pays en développement; v la réalisation d'interventions axées sur le développement au sein d'instances multilatérales. L'actuelle période de mondialisation constitue la troisième phase d'un processus amorcé il y a plus d'un siècle. Chacune de ces phases s'est caractérisée par la convergence de nouvelles techniques, par de nouvelles approches de l'organisation industrielle et par un intérêt des pays envers l'expansion du commerce et de l'investissement. Cela dit, la phase actuelle se distingue qualitativement des deux premières. Cette différence qualitative découle en partie de l'émergence de nouveaux types d'organisations qui sont beaucoup plus souples et mobiles. Elle résulte en partie du rôle que joue la technologie de l'information et, phénomène qui lui est étroitement lié, du passage des économies industrielles à des économies fondées sur le savoir. Selon un rapport récent de l'OCDE, la moitié du PIB total des économies riches repose maintenant sur la connaissance. Un des résultats de la mondialisation réside dans le fait que les institutions nationales sont moins à même d'interagir efficacement avec des entreprises de dimension véritablement planétaire. Chaque phase a suscité de nouvelles possibilités pour les gens en mesure d'en profiter et a présenté de grands risques pour ceux qui se trouvent dans la situation contraire. Certes, il est manifeste que les coûts et les retombées de la mondialisation sont répartis de manière très inégale, mais il existe, en puissance, des motifs d'optimisme, en ce sens que la phase actuelle de la mondialisation pourrait offrir des possibilités aux femmes et aux pauvres. Dans le cas des femmes, il est vraisemblable que la création d'emplois se fera dans des domaines qui n'ont pas été traditionnellement l'apanage des hommes. En ce qui concerne tous les groupes vulnérables, il se révélera peut-être plus facile de redistribuer l'accès au savoir et aux aptitudes (qui constituent des atouts de plus en plus importants) que de redistribuer les biens plus traditionnels, comme les terres ou la richesse accumulée. Le défi consiste à examiner les concepts complexes et multidimensionnels de la mondialisation et des rapports hommes-femmes, de comprendre les principaux rapports qui les unissent et leurs incidences, puis de les situer dans le contexte de la coopération pour le développement. Compte tenu de l'ampleur de la mondialisation, le présent document de travail n'aborde que certains aspects de ces dimensions imbriquées les unes dans les autres, plutôt que de traiter en profondeur un de ces concepts. En outre, nous adoptons une approche plus étroite fondée sur l'économie politique et nous ne nous livrerons pas à une interprétation plus large de la 1 mondialisation sur le plan culturel. Nous mettons en relief les aspects de la mondialisation susceptibles d'influer sur les possibilités qui s'ouvriront aux femmes, particulièrement aux femmes pauvres, et sur leur pouvoir de négociation, ainsi que sur les institutions qui agissent en leur nom. L'ACDI, en sa qualité d'organisme oeuvrant dans le domaine de la coopération pour le développement, peut jouer un rôle important en élargissant ces possibilités, en prenant des mesures de prévention des risques, en répartissant les retombées et en s'employant à empêcher l'apparition de nouveaux facteurs de vulnérabilité. Elle peut jouer ce rôle d'organisme médiateur au moyen de l'intervention dans des projets, de la création de milieux favorables au développement économique et humain, en faisant progresser le dialogue sur les politiques et en renforçant d'autres institutions médiatrices, aux échelles à la fois nationale et internationale. Notre document est structuré comme suit. La Section 1 est consacrée à l'introduction. À la Section 2, nous définissons la mondialisation et analysons certains schèmes des changements de portée plus large que ce phénomène suscite. À la section suivante, nous traitons la question de l'inégalité de la répartition des retombées et des facteurs de vulnérabilité découlant de la mondialisation. Ensuite, la Section 4 porte sur quelques effets directs de la mondialisation sur le travail des femmes et sur la génération de revenu dans le cas des femmes et hommes démunies; on peut cerner ces effets en étudiant cet aspect sous l'angle des critères et interventions en matière de développement. Quant à la Section 5, nous y abordons les questions de l'égalité entre les sexes, de l'habilitation et de la mise en valeur des capacités humaines. L'effet indirect de la mondialisation par l'intermédiaire des contraintes qu'elle fait peser sur les politiques publiques fait l'objet de la Section 6. Enfin, aux Sections 7 et 8, nous mettons en relief des risques et des facteurs de vulnérabilités précis résultant du processus de mondialisation, ainsi que le rôle que l'ACDI peut jouer en qualité d'organisation médiatrice intervenant pour atténuer ces risques et ces facteurs de vulnérabilité. En annexe, nous exposons de manière plus détaillée les aspects financiers de la mondialisation de même que les nouveaux réseaux d'organisation des sociétés transnationales qui sous-tendent la mondialisation. À divers endroits dans le document, nous suggérons des applications concrètes et des manières d'aborder la problématique qui font un lien entre les questions examinées, d'une part, et les programmes de l'ACDI et le dialogue qu'elle entretient sur les politiques. Nous les indiquons au moyen du signe # . Quant aux passages qui décrivent une situation particulière et débouchent sur des points d'accès et objectifs de projets précis, nous les mettons en évidence en utilisant le signe ˆ . 2.0 La mondialisation Le terme « mondialisation » se répand de plus en plus, mais son champ d'application et son sens varient. De toute évidence, il ne désigne pas simplement l'internationalisation de l'économie mondiale. L'internationalisation renvoie simplement à l'expansion croissante, du point de vue géographique, d'activités économiques débordant les frontières nationales; cela dit, le commerce et l'investissement internationaux ne constituent pas des phénomènes nouveaux, et ils ne sont pas non plus qualitativement différents de ce qui se faisait déjà.1 Il se révèle donc 1 Lorsqu'on donne au concept de mondialisation son sens le plus large et le plus « flou », on qualifie d'aspect ou d'exemple de mondialisation toute transaction internationale d'ordre économique, politique, social et culturel que vient faciliter la technologie moderne. Cette conception, que nous pouvons résumer en lui donnant l'appellation de « village planétaire plus technologie », est trop globale et n'est pas bien délimitée. En outre, au sens où nous l'utilisons, la conception de mondialisation ne s'applique pas à l'harmonisation et à l'interdépendance croissante entre pays (la vision de la « communauté mondiale »). Nous reconnaissons que les progrès technologiques favorisent grandement la mondialisation, mais il faut éviter la confusion 2 nécessaire de définir et de caractériser la mondialisation, et d'examiner les changements qualitatifs qu'elle va vraisemblablement entraîner pour les femmes et les démunis, dont la majorité sont justement des femmes. Définition On entend par mondialisation un processus au moyen duquel la finance, l'investissement, la production et le marketing sont de plus en plus dominés par des entreprises (y compris des banques) dont la vision et l'activité ne se confinent pas à l'intérieur de frontières nationales ou ne se limitent pas à la défense d'intérêts nationaux. Ces entreprises réexaminent en permanence, à l'échelle mondiale, les possibilités qui s'offrent à elles de réaliser des bénéfices. Le champ d'application de leur processus décisionnel est mondial et elles adaptent sans cesse leur portefeuille de devises, de clients, d'usines et de bureaux; elles cherchent à déplacer leurs opérations vers des zones « extraterritoriales », pour se soustraire ainsi à la pleine application des compétences nationales chaque fois qu'une décision en ce sens est de nature à accroître leurs bénéfices. Ces personnes morales de dimension planétaire ont commencé à former des réseaux complexes de rapports à l'intérieur des diverses entreprises et d'alliances entre sociétés, lesquels sont structurés en fonction d'une hiérarchie de capacités techniques, d'avantages sur la concurrence et de pratiques de production. Cette évolution s'est traduite par une progression considérable de la vitesse et du volume des échanges commerciaux, ainsi que des mouvements de capitaux et des transferts d'information. La mondialisation désigne donc aussi de nouveaux réseaux de production, de finance et d'information qui ont rehaussé la mobilité sur le plan international des biens, de la prestation de services et des capitaux. Le concept de mondialisation suppose l'apparition de nouvelles possibilités, de nouveaux risques et de retombées jusque-là inconnues; d'où l'émergence de nouveaux ferments éventuels de frictions sociales. Toutes les sociétés se dotent d'institutions (au sein à la fois des pouvoirs publics et de la société civile) qui assurent la médiation entre des intérêts concurrents. La capacité de ces institutions de représenter les intérêts de leurs membres dépend de leur aptitude à l'organisation et du volume des ressources qu'elles peuvent mobiliser. La mondialisation comprend un passage du pouvoir des organisations médiatrices, à l'échelle des États nations, à celles que définit le marché international. Par le passé, les progrès accomplis par des segments plus vulnérables de la population ont souvent été attribuables à la création ou au réalignement d'institutions médiatrices. Historique: trois phases La première phase (parfois désignée sous le nom d'« internationalisation ») a atteint son apogée de 1870 à 1914. La « distance économique » séparant les matières premières, la production et les marchés a considérablement diminué par suite de la mise en place généralisée de chemins de fer, de canaux (Suez, Panama, et intérieurs), de navires à vapeur, du réseau international de télégraphie, de même que de l'émergence de nouveaux mécanismes de la finance internationale, et des migrations. L'investissement et le commerce internationaux commencent à peine à retrouver les niveaux-- du point de vue du pourcentage de la production mondiale -atteints au tournant du siècle. Des innovations en matière de production, particulièrement la mise au point de pièces interchangeables et la chaîne de fabrication, ont fait passer la transformation des corporations de métiers à l'usine, que l'on a exploitée de plus en plus selon les principes de la gestion « scientifique ». La fabrication étant concentrée dans les pays d'origine, et puisque les politiques étaient de type mercantile (au moins pendant les premières étapes) et que le secteur privé avait périodiquement besoin d'un soutien militaire, il existait un degré considérable de chevauchement des intérêts des secteurs public et privé. En dépit des mauvaises conditions de travail de la plupart des ouvriers dans les usines et de l'encombrement des taudis urbains ne disposant guère ou pas de services, les niveaux de vie entre mondialisation et progrès technologique en général, ou entre mondialisation et des réalisations technologiques précises et leurs applications au sens strict. 3 ont, en général, progressés un peu partout en Europe et en Amérique du Nord. Cette évolution tient notamment à la création d'emplois, même s'ils étaient mal payés et dangereux, la plus grande accessibilité aux aliments et aux autres biens de consommation, et la soupape de sécurité qu'ont constitué les migrations. La société a mis en place progressivement de nouvelles institutions médiatrices ayant pour mandat de défendre les droits des travailleurs, d'abord en milieu de travail par l'intermédiaire des syndicats, et, ultérieurement, dans le cadre de parlements nationaux, lorsque l'attribution du droit de vote (aux hommes) a permis aux syndicats d'influer sur les politiques de partis politiques établis et d'en former d'autres afin qu'ils représentent leurs intérêts. La deuxième phase, que l'on peut qualifier de « multinationalisation », s'est déroulée après deux guerres mondiales et la Grande Crise. Étalée sur les années 50 et 60, elle a coïncidé avec une période sans précédent de croissance économique dans les pays industrialisés. Les moteurs de l'investissement étranger (principalement américain) tenaient à la volonté de garantir l'accès à des ressources naturelles et de produire à l'intention de marchés nationaux protégés par des barrières commerciales. Les opérations à l'étranger étaient, dans une large mesure, le fait d'usines affiliées à des entreprises qui conservaient leur siège social dans leur pays d'origine et qu'on considérait comme un prolongement des intérêts de ce même pays d'origine. Ces entreprises constituaient également de grandes organisations intégrées fondées sur la gestion scientifique (qu'on a parfois appelée le « fordisme »). Leur production en masse à bas prix et leur grande productivité expliquent en grande partie la croissance rapide observée pendant cette période. Toutefois, à compter de la décennie des années 70, leurs atouts étaient devenus des faiblesses. Leur trop grande rigidité les empêchait de s'adapter à l'évolution des exigences des consommateurs et à la nouvelle concurrence que leur livraient des entreprises (surtout japonaises) plus souples. Vers 1975, les entreprises fordistes ont commencé à déplacer la production vers des pays moins coûteux à des fins d'exportation vers les pays où les salaires étaient élevés, réagissant ainsi à la baisse de la productivité dans leur pays d'origine. Ce phénomène s'est accompagné d'un renouveau de l'intérêt envers les institutions médiatrices multinationales (les Nations Unies, leurs institutions spécialisées, la Banque mondiale, le FMI et les banques régionales de développement). Dans les pays industrialisés, la croissance économique a ouvert des possibilités qui se sont offertes à de larges segments de la population, dont aux femmes, et elle a financé la croissance rapide de la classe moyenne et la généralisation de services sociaux. 4 Caractéristiques distinctives de la mondialisation: la troisième Deux aspects clés font de la mondialisation une phase nouvelle et distincte de l'organisation de l'économie mondiale.2 Premièrement, soulignons la mobilité mondiale des capitaux, laquelle s'est fortement accrue, en particulier les volumes énormes de capitaux à court terme qui entrent sur les marchés des changes et des valeurs mobilières, et en sortent. Autre aspect qu'on désigne sous le nom de mondialisation financière, les marchés fonctionnent dans le monde entier, 24 heures sur 24, et ils transmettent les attentes économiques très rapidement et d'une façon à laquelle il est plus difficile de résister en raison de déplacements presque instantanés de liquidités par-delà les frontières. Il existe maintenant un système financier monétaire tentaculaire, dont les éléments constitutifs sont étroitement reliés les uns aux autres; dans une large mesure, ils échappent au contrôle des gouvernements nationaux. Un « avantage » qui en découle réside dans la discipline supplémentaire qui s'impose aux gouvernements afin qu'ils assurent l'équilibre budgétaire et suivent une politique monétaire prudente afin d'éviter de se retrouver aux prises avec une dette et un taux d'inflation élevé qu'ils ne peuvent gérer. Ce phénomène présente deux « inconvénients »: le risque que la réaction des marchés soit excessive et fasse dégénérer un problème en crise, et la pression s'exerçant en faveur du maintien d'un équilibre budgétaire à court terme au détriment d'investissements à plus longue échéance dans le capital social et humain. La seconde caractéristique distinctive de la mondialisation réside dans la structure, axée sur des réseaux transnationaux, de l'organisation de la production. Les entreprises n'ont plus d'attaches géographiques et les sociétés transnationales inventent des structures organisationnelles et géographiques complexes. Les rapports entre entreprises se diversifient de plus en plus: elles vont d'alliances stratégiques internationales, en passant par des rapports de sous-traitance, à des relations fondées sur des réseaux plus complexes unissant des sociétés indépendantes et quasi indépendantes. La rationalisation des installations de production à une échelle internationale plus large constitue un élément dynamique sous-tendant la propagation accrue des procédés de production par-delà les frontières; cette évolution a permis une nouvelle efficience et la concurrence internationale, et elle a débouché sur des produits de consommation moins onéreux et de meilleure qualité. La rationalisation géographique de l'emplacement des diverses étapes du processus de production a également supposé la recherche de travailleuses faiblement rémunérées, de paradis fiscaux et, dans certains cas, de normes moins contraignantes en matière de protection de l'environnement. (Le lecteur trouvera en annexe une présentation plus détaillée des réseaux planétaires de production ainsi que de la mondialisation financière.) Parallèlement à l'accroissement des investissements outre-mer dans le secteur de la fabrication, les multinationales ont élargi encore plus rapidement leur gamme de services. Les grandes banques, agences de publicité, chaînes hôtelières, sociétés de location de voiture, les compagnies d'assurance, de services juridiques et de transport de marchandises, ainsi que les sociétés émettrices de cartes de crédits, ont suivi leurs entreprises clientes et ont établi un réseau mondial. Il s'ensuit que, dorénavant, la mondialisation de la production fondée sur la 2 Bien qu'on qualifie fréquemment les statistiques sur les échanges commerciaux et sur l'investissement étranger direct (IED) d'« indicateurs » de la mondialisation, la progression du volume des échanges internationaux ne constitue pas un nouveau phénomène sur le plan qualitatif. En effet, historiquement, le commerce s'est épanoui pendant des périodes de paix prolongée. Le volume de l'investissement étranger direct par rapport à la production nationale était plus élevé dans certain pays à la fin du siècle dernier qu'il ne l'est aujourd'hui. Les innovations sur les plans des transports et des technologies des communications se poursuivent également depuis le dernier siècle. On peut voir dans l'importance des échanges internationaux et de l'IED un « symptôme » de la mondialisation plutôt que la mondialisation elle-même, qui constitue un phénomène structurel sous-tendu par des organismes. 5 fabrication et la prestation aux entreprises de services liés à la fabrication se renforcent mutuellement. Il en résulte un système mondial, dont les éléments sont de plus en plus imbriqués les uns dans les autres, d'institutions relevant des sociétés transnationales. On a recours à l'investissement étranger direct (IED) pour créer ce qu'on appelle des « plates-formes » de production dans des pays à faibles salaires, ainsi que pour se faire une place sur de nouveaux marchés de consommateurs. En créant des têtes de pont pour de nouveaux biens et services étrangers, la mondialisation est également devenue un facteur ayant une dimension culturelle. En particulier, nombreux sont ceux qui voient dans les sociétés transnationales (STN) américaines, qui forment le réseau le plus important et le plus étendu d'installations internationales de production et de prestation de services dans le monde, des entreprises qui « vendent » la culture et les valeurs américaines. Facteurs favorisant la mondialisation On peut cerner trois facteurs qui favorisent la mondialisation. D'abord, la mondialisation devient possible à cause des nouvelles technologies avancées sur les plans des communications, de l'informatique et, dans une moindre mesure, des transports, mais elle n'est pas synonyme de ces progrès. Les institutions financières et les marchés, les sociétés transnationales, ainsi que leurs fournisseurs et clients, sont reliés par une communication et un échange de données qui se font instantanément par voie électronique. Ces phénomènes ont permis l'apparition de nouvelles formes d'organisations et de structures. De plus en plus, il est possible de situer à des endroits différents les sources de l'épargne et de la finance, les sources de l'innovation, la conception, la technologie et les méthodes de production, l'emplacement de la gestion et de l'administration, la source des biens intermédiaires et des facteurs de production, et, enfin, l'emplacement des installations d'intégration des composantes. Les biens produits, à leur tour, peuvent être destinés à la consommation et à l'utilisation dans le pays, ou être fabriqués exclusivement à des fins d'écoulement sur les marchés d'exportation. La seconde condition qui favorise la mondialisation a trait à la libéralisation des politiques relatives au commerce et à l'investissement dans le contexte d'un marché planétaire plus concurrentiel, et de la déréglementation de plus en plus poussée des marchés financiers internationaux. Les réseaux de production ne correspondent pas aux frontières politiques officielles et ils se sont développés simultanément au système interétatique. On peut dire du système des États et du système de production mondialisé, lequel comprend des réseaux fortement ancrés à l'échelle régionale, qu'ils constituent deux réseaux différents, mais qui s'entrecoupent, d'activité, d'interaction et d'exercice du pouvoir de la part des êtres humains.3 Troisièmement, l'intérêt actuel des entreprises envers l'investissement dans les pays en développement s'explique par le phénomène relativement nouveau que constitue l'augmentation du nombre de travailleurs qualifiés dans bon nombre de ces pays, parallèlement à ce que l'OCDE a récemment qualifié de développement de « sociétés compétentes »4 dans les 3 Bernard et Ravenhill (1995) font remarquer que la tension entre le système interétatique fondé sur des territoires et les réseaux mondialisés de production et d'échanges a fait naître une interaction dynamique entre le politique et l'économique qui exerce une profonde influence sur la structure de l'économie politique de l'Asie de l'Est au fur et à mesure que les déséquilibres des échanges interétatiques font monter les tensions. En guise d'exemple, on peut comprendre, sous cet éclairage, les acrimonieuses négociations commerciales américano-japonaises, et le marchandage politique annuel des États-Unis en ce qui concerne l'attribution à la Chine du statut de nation la plus favorisée (NPF). Les entreprises multinationales d'Europe ont joué un rôle considérable pour ce qui est d'exercer des pressions en faveur du programme d'unification européenne en 1992, car elles souhaitaient exploiter leurs réseaux et atteindre des marchés sans se heurter aux contraintes que représentent les tracés de nombreuses frontières nationales d'Europe occidentale. 4 OCDE, 1996. Les « sociétés compétentes » se caractérisent par des capacités en 6 économies de marché naissantes. Ce facteur contrebalance en partie l'importance décroissante du faible niveau des valeurs comme motif de l'investissement étranger; cela découle du recul du coût de la main-d'oeuvre en proportion du total des coûts. 3.0 Disparités: Jouissance et exclusion des retombées de la mondialisation Le monde a beaucoup changé depuis le milieu des années 70. Trois énormes blocs de population -- la Chine, les républiques de l'ex-Union soviétique, et l'Inde font leur entrée sur le marché planétaire et ils comptent près de la moitié de la population active mondiale. De nombreux autres pays plus petits sont dans la course afin de répondre aux besoins de main-d'oeuvre des nouvelles structures mondiales de production. Cinq des huit millions d'emplois créés par les sociétés multinationales de 1985 à 1992 l'ont été dans les pays en développement. Le nombre de travailleurs du monde en développement au service de sociétés multinationales s'établissait à quelque 12 millions en 1992 et il a connu une progression considérable depuis cette date. Compte tenu de l'importance de la sous-traitance dans la structure par réseaux de l'organisation de la production, le nombre des travailleurs directement touchés atteint vraisemblablement le double de ceux qui occupent un emploi dans ces sociétés (Banque mondiale, 1995-1). La nouvelle mobilité des capitaux qu'incarne l'IED favorise une division internationale du travail dans le cadre de laquelle la fabrication à forte intensité de main-d'oeuvre se déplace vers les pays en développement. En particulier, la production mobile, « libre de toute attache », est attirée vers les endroits où les salaires sont bas, ce qui est généralement le cas de pays où le taux de pauvreté absolue est élevé. Le processus de mondialisation peut déboucher, et a effectivement débouché, sur l'amélioration des conditions de vie et sur une réduction sensible de la pauvreté absolue, dans les cas où il fait se correspondre les capacités productives des pauvres et des personnes sous-employées (généralement, mais pas toujours, des travailleurs peu qualifiés, souvent des femmes) avec l'emplacement physique et les besoins de main-d'oeuvre des industries en cours de mondialisation. Par exemple, au Maroc, le taux de pauvreté a chuté de moitié, passant de 26 à 13 % de la population en seulement cinq ans, après la libéralisation du commerce survenue au milieu des années 80. Les pays qui combinent de faibles salaires et un degré élevé de compétence technologique l'ont emporté, au jeu de la concurrence, sur des pays mieux établis. En l'espace de seulement dix ans, l'Inde a renforcé son secteur industriel de la mise au point de logiciels, concentré dans la région de « Silicon Bangalore », et est devenue le deuxième pays exportateur de logiciels au monde. Toutefois, afin de parvenir à une réduction soutenue et généralisée de la pauvreté absolue, il faut que « la possibilité » fasse l'objet d'une gestion éclairée. La mondialisation peut également avoir pour effet d'aggraver les inégalités (la pauvreté relative) et s'accompagner de conditions de travail « utilisant à fond » les capacités des pauvres, par exemple, en minant leur santé du fait de la mauvaise qualité du milieu de travail. L'investissement attiré uniquement par le bas niveau des salaires peut se déplacer aussi rapidement qu'il est arrivé, laissant dans son sillage des travailleurs mésadaptés et un chômage structurel. Des femmes du Kenya et de l'Afrique du Sud, qui fabriquent de l'artisanat ou des textiles et des vêtements, voient des importations meilleur marché en provenance d'Asie leur enlever leur gagne-pain. Des femmes de Corée du Sud perdent leur emploi dans le secteur du vêtement, parce que des entreprises de leur pays vont s'installer dans des régions d'Asie où les coûts de production sont plus bas. S'il est vrai que la toile d'araignée que forment les réseaux des STN s'étend à la plupart des capitales du monde, la portée de la mondialisation se caractérise par sa nature très inégale, tout comme l'est la répartition de ses retombées. Un des grands sujets de préoccupation qui se pose lorsque qu'on observe « globalement » la tendance à la mondialisation, ainsi que matière de capital humain, des infrastructures bien développées et une saine gestion des affaires publiques. 7 l'intégration croissante de l'économie mondiale, c'est que certaines régions et certains pays sont exclus des retombées de ce processus. Au contraire, s'ils sont reliés à l'économie mondiale, c'est en grande partie par l'intermédiaire de la fuite des capitaux, des paiements qu'ils font au titre du service de leur dette, et de l'aide publique qu'ils reçoivent. Les pays de l'Afrique subsaharienne sont en voie de marginalisation au moment même où certains pays du bassin du Pacifique commencent à menacer la domination économique de l'Amérique du Nord et de l'Europe de l'Ouest. Dans 44 pays en développement, le ratio échanges commerciaux/PIB a reculé au cours de la dernière décennie et les deux tiers du total de l'IED vers les pays en développement sont dirigés vers seulement huit pays. Les courants d'IED vers 43 pays subsahariens en 1992 se sont élevés à seulement 300 millions de dollars américains, l'équivalent de l'IED reçu par le seul Pakistan cette année-là (CNUCED, 1994). Les pays africains ont reconnu que l'intégration dans l'économie mondiale supprime les contraintes découlant de l'étroitesse de leurs marchés intérieurs; ils ont pris des mesures de libéralisation des régimes applicables au commerce et à l'investissement afin de mettre en place un « milieu propice » à l'accès aux avantages que présente l'appartenance à des réseaux mondiaux de production et à un tissu de rapports commerciaux. Toutefois, les coûts sociaux de la libéralisation et de la restructuration économique sont extrêmement lourds et ils ont fortement accru le nombre de gens vivant dans la pauvreté absolue. # Dans les pays de programmation actuellement exclus des réseaux d'accumulation de capital productif, l'aide au développement dans les domaines de la réforme des politiques et du développement des capacités institutionnelles, des infrastructures et du développement du secteur privé cherche à instaurer un contexte propice à l'inclusion et de nature à favoriser la formation de liens en matière de commerce et d'investissement. À cet égard, les politiques de libéralisation sont également directement liées au volet difficile de l'ajustement structurel et de la transition économique.5 Toutefois, l'expérience a montré que le bon gouvernement constitue un facteur important, car même si on ouvre la porte à l'investissement, il peut arriver que personne ne la franchisse. Des facteurs militent donc en faveur d'une conjugaison du soutien à la libéralisation et de l'appui à la mise en place d'un bon gouvernement. Dans de nombreux pays, c'est ce qu'on appelle « l'arrière-pays » (hinterland) qui se voit exclu de l'économie mondiale. L'inégalité des niveaux de développement régional caractérise la plupart des économies et, en règle générale, elle aboutit à la concentration de la pauvreté dans les zones rurales. Les effets de l'exode rural peuvent également laisser dans la pauvreté absolue les autres membres du ménage qui demeurent sur place. Parmi ces ménages, ceux qui sont dirigés par des femmes forment un groupe identifiable. Certes, l'inégalité du développement économique régional est un « vieux » problème, mais on peut estimer que la mondialisation aggrave les disparités et, aussi, présente de nouvelles possibilités en ouvrant de nouvelles portes. # En rehaussant l'accès des pauvres aux services d'infrastructure, et la disponibilité de ces services, on peut aider les producteurs pauvres à commercialiser leurs produits sur les marchés des villes et d'outre-mer. Il faut veiller à ce que les femmes aient accès aux services d'infrastructure. On peut faire la promotion de pratiques commerciales équitables. Une coopération stratégique au développement à plus longue échéance et visant l'intégration des groupes marginalisés peut comporter des investissements dans 5 Les rapports entre l'ajustement structurel et la pauvreté, et, de plus en plus, entre les stratégies de transition économique et la pauvreté, ont fait l'objet d'un examen approfondi. Bien que voisines de notre propos, ces recherches débordent le cadre du présent document, que nous voulons axer sur la mondialisation. 8 l'acquisition de compétences et des mesures d'habilitation. Parmi les interventions ambitieuses de développement du secteur privé, on peut mentionner les mesures visant à donner aux producteurs nationaux les moyens de devenir les fournisseurs de réseaux mondiaux (création de liens en aval). Cette intervention pourrait être axée sur des normes de qualité, le contrôle des procédés de production, la formation à la gestion, l'amélioration de l'infrastructure des communications, etc. La réforme des politiques peut également permettre à des régions jusque-là « arriérées » d'accéder à l'économie mondiale en facilitant l'accès aux structures de production des pays voisins. En guise d'exemple, l'intégration économique dans le triangle de la croissance que forment Singapour, l'Indonésie et la Malaisie a débouché sur l'inclusion des travailleurs indonésiens et malaisiens dans une structure de production régionale. Rien ne garantit que la mondialisation sera inévitable, continue et irréversible. L'inversion du rôle de défense et d'impulsion des pays de l'OCDE en matière de libéralisation des échanges a constitué un des changements les plus frappants de ces dernières années. Se situant maintenant aux avant-postes, des pays comme le Mexique et la Pologne ont engagé non seulement des réformes commerciales radicales, mais aussi une politique de libéralisation tous azimuts. En outre, il est instructif de rappeler la réaction d'autres pays de l'OCDE au développement qu'a connu le Japon après la guerre: résistance à l'adaptation et au changement, restrictions visant les importations en provenance de ce pays, limitations volontaires des exportations, imposition de droits antidumping et mesures d'ouverture du marché. De nombreux pays de l'OCDE n'ont pas fait preuve d'une grande capacité de s'adapter, au cours des dernières décennies, ce dont témoignent des taux de chômage élevés. Il se peut qu'on assiste à une remontée des pressions protectionnistes. # Un des plus importants et des plus difficiles rôles des organismes de développement, en leur qualité d'institutions jouant un rôle de médiation auprès de leur propre gouvernement afin qu'on tire parti des possibilités de développement offertes par des rapports et une intégration commerciaux à l'échelle mondiale, consistera à soutenir l'ouverture croissante des marchés de l'OCDE aux exportations des pays en développement. L'évolution des propres priorités de l'ACDI en matière de programmation atteste l'effet des processus de mondialisation sur les politiques de l'Agence, comme l'a montré la récente adoption du développement du secteur privé en qualité d'une des six priorités des programmes de l'ACDI. L'ACDI appuie le développement du secteur privé, particulièrement en favorisant l'instauration d'un « milieu propice » à la croissance économique et à l'entreprise privée par l'entremise du renforcement institutionnel, du développement des capacités, de la prestation de services consultatifs relativement aux politiques, ainsi que de l'assistance technique. Toutes ces activités offrent des points d'accès à la formulation de programmes visant la problématique hommes-femmes, une fois qu'on a reconnu que la plupart des cadres législatifs, des politiques, des réglementations et des pratiques institutionnelles ont des répercussions et des effets qui ne sont pas les mêmes pour les deux sexes. # En outre, dans les cas où l'ACDI fait jouer un rôle de partenaire au secteur privé canadien, y compris au moyen de la coopération industrielle, l'ACDI a la possibilité de favoriser, au sein des entreprises de notre pays, un sentiment de citoyen du monde chez les sociétés privées canadiennes actives à l'étranger en intégrant des volets de perfectionnement des ressources humaines dans les projets, de la réalisation d'analyses comparatives entre les sexes et le respect des exigences canadiennes en matière d'évaluation des incidences environnementales. 9 4.0 La mondialisation: ses incidences sur la problématique hommes-femmes Dans l’analyse présentée ci-dessus, on a vu que les mouvements de capitaux étaient l'une des manifestations de la mondialisation de la production. Les lieux de production, qu'il s'agisse des intrants intermédiaires ou de l'intégration des composantes, sont devenus de plus en plus mobiles. Dans la mesure où le travail et le capital sont liés, il s'ensuit que cette restructuration et ce déplacement de la production doivent avoir des incidences correspondantes sur la main-d'oeuvre, et notamment sur les différents groupes de femmes (par exemple, les femmes scolarisées, les femmes pauvres, les femmes analphabètes, etc.). Pour étudier les répercussions sous cet angle, il faut commencer par examiner les effets de la mondialisation sur le travail des différents groupes de femmes et d'hommes dans les pays en voie de développement. Ces mouvements mondiaux de capitaux mènent à un ajustement et à une restructuration qui touchent les localités de départ autant que les localités d'arrivée, ainsi que les économies régionales et nationales. Dans les localités d'origine ou d'accueil, les changements intervenus dans la répartition de la demande de main-d'oeuvre selon le secteur, la transformation des relations économiques entre les différentes régions et l'urbanisation croissante sont des effets directs de l'entrée de capitaux. En règle générale, il est difficile de séparer ces effets de la restructuration économique des «autres» types de restructuration induits par des tendances nationales à long terme, notamment les contractions économiques et la restructuration induites par les programmes d'ajustement structurel ou par l'expansion économique inégale des économies en croissance. En outre, comme nous l'avons mentionné plus haut, des tensions dynamiques (c'est-à-dire dans certains cas, les rapports de négociation directe) s'expriment dans les rapports économiques entre la mondialisation impulsée par les entreprises et l'élaboration des politiques centrées sur l'État. Dans ce contexte, comment distinguer, en ce qui concerne les femmes, les répercussions de la mondialisation de la production des effets des politiques économiques nationales ou des politiques centrées sur l'État? En outre, il est clair que les avantages, les risques et les possibilités qui découlent de la mondialisation varient selon les groupes de femmes: ce qui est à l'avantage d'un groupe nuit à un autre et n'aura aucun effet sur un troisième. # Pour mieux comprendre la nature de ces répercussions, on peut intégrer une approche « cartographique » à l'analyse économique. La mondialisation entraîne une mobilité des capitaux à grande échelle. Ces mouvements transfrontaliers de capitaux s'accompagnent de mouvements de main-d'oeuvre d'égale ampleur. Ainsi, les phénomènes de migration, de mobilité, de déplacement de la main-d'oeuvre et de suppression d'emplois peuvent se comprendre comme étant directement liés aux mouvements de capitaux. On peut alors étudier les mouvements de main-d'oeuvre afin de déterminer quels groupes de femmes et d'hommes y participent. Il convient de noter également que les départs peuvent être temporaires ou définitifs. Cette cartographie des phénomènes d'implantation, de suppression d'emplois et de migration peut permettre de mieux suivre les tendances du changement social et de déterminer les possibilités et les risques qui existent pour tels ou tels groupes de femmes et d'hommes. Le « caractère particulier » du groupe varie selon le lieu. Les groupes peuvent s'être constitués en fonction de l'origine ethnique, de la non-possession de terres, de l'âge, de l'état civil ou d'autres facteurs (des militaires démobilisés, par exemple).6 6 De ce fait, nous ne pouvons viser à aborder dans le présent document tous les effets de la mondialisation, qui sont inégaux et contradictoires. Nous illustrerons notre argumentation à l'aide d'exemples. Le personnel de l'ACDI disposera de ses propres exemples, à la lumière de son expérience et de l'objet particulier de son travail. 10 L'expansion de l'industrie du prêt-à-porter au Bangladesh, par exemple, a provoqué l'exode vers la ville de milliers de jeunes femmes, généralement célibataires. Malgré la médiocrité des conditions de travail, les sondages effectués auprès des femmes de l'industrie du vêtement démontrent que les femmes considèrent que les conditions sont plus mauvaises encore dans les autres secteurs où elles pourraient être employées, c'est-à-dire, principalement, le service domestique ou le travail agricole (Hay et Keller-Herzog, 1994). Même si les conditions de travail laissent beaucoup à désirer, il ne fait pas de doute pour ces femmes que l'expansion de l'emploi leur offre une possibilité. En étudiant un pays ou une localité donnée, on découvre différentes tendances. Il convient de porter une attention particulière aux femmes et aux hommes les plus défavorisés qui tendent à être géographiquement moins mobiles et qui doivent surmonter de plus grands obstacles à la mobilité professionnelle. Les pauvres, et en particulier les femmes, peuvent aussi être moins visibles et «moins comptabilisés» dans les statistiques couramment accessibles. On peut déterminer les différents obstacles que doivent surmonter les femmes et les hommes pauvres pour obtenir les emplois offerts par les nouveaux centres de croissance économique: analphabétisme, manque de qualification ou de compétences, âge, état civil; manque d'argent ou de temps pour chercher un emploi, manque d'accès au crédit, manque d'information; discrimination en raison de l'origine ethnique, du sexe ou autre discrimination à l'égard d'un groupe, absence de mobilité en raison d'obligations familiales ou de la possession d'une terre. Tous ces obstacles ne résultent pas de la mondialisation, mais ils empêchent les femmes et les hommes démunis de profiter des débouchés créés par la mondialisation et par la croissance économique en général. Dans les pays en voie de développement, on peut observer la tendance au dualisme des marchés du travail: l'expansion urbaine a favorisé une situation dans laquelle on trouve, d'un côté, une augmentation des groupes de travailleurs protégés au sein du secteur officiel et, de l'autre, des masses de travailleurs sous-employés dans le secteur informel. Lorsqu'elles cherchent de la main-d'oeuvre, les industries du secteur officiel urbain recrutent généralement au sein des réseaux étendus de travailleurs déjà employés. Ceux qui viennent de l'extérieur, et en particulier les femmes, ont peu accès à ces emplois. Ainsi, les marchés officiels du travail ont souvent un parti pris pour des raisons qui n'ont rien à voir avec les compétences et les aptitudes des travailleurs. Les mécanismes par lesquels les nouvelles unités de production ont accès à un bassin de main-d'oeuvre peu qualifiée varient selon le pays, selon l'industrie et au cas par cas. Les gens relativement pauvres, notamment les femmes, appartiennent fréquemment au secteur tertiaire, qui tend à être un secteur à forte concentration de main-d'oeuvre. Le défi consiste donc à trouver des moyens qui permettent de « relier » ces services aux opérations d'investissement étranger direct et aux marchés internationaux, de façon à ce que les femmes puissent bénéficier elles aussi des retombées du processus de mondialisation. Certains suggèrent que la faiblesse de ces « liens » avec l'économie sous-capitalisée locale est l'un des freins de la croissance économique locale soutenue par la mondialisation et d'une plus large répartition des retombées. Ce phénomène est plus évident dans les zones franches industrielles, et c'est l'une des raisons pour lesquelles de nombreux gouvernements ont décidé d'ouvrir ces « enclaves » de production et de les redistribuer régionalement. Dans une cartographie à plus vaste échelle, servant par exemple à l'étude des mouvements de main-d'oeuvre ruraux-urbains, il est important de considérer le genre d'emploi et de moyens d'existence obtenus par ceux qui quittent leur région, mais également les incidences de leur départ sur le travail et les moyens de subsistance de ceux qui restent. Lorsqu'on examine les phénomènes de migration (nationale ou internationale) de la main-d'oeuvre, l'envoi de fonds est un des éléments principaux à considérer. # Pour poursuivre l'analyse de la question de la mobilité, mais cette fois sous les angles sectoriel ou sous-sectoriel, on peut examiner la façon dont les différents groupes de 11 femmes et d'hommes passent d'une catégorie professionnelle à une autre et se demander de quelle manière le travail change. Lorsqu'on pense aux industries légères à forte concentration de main-d'oeuvre et axées sur l'exportation, on se représente immédiatement des masses de travailleuses rassemblées dans des usines: cette réalité dominait au Mexique, en Asie du Sud-Est et elle se retrouve de plus en plus partout dans le monde aujourd'hui. Comme Elson et Pearson l'ont noté [Traduction]: « [Les entreprises] pensent non seulement que les femmes ont naturellement les doigts plus agiles, mais encore qu'elles sont aussi naturellement plus dociles et plus prêtes à accepter une discipline de travail stricte, et naturellement moins enclines à se joindre à un syndicat que les hommes; et enfin, qu'elles sont naturellement plus adaptées aux tâches plus fastidieuses, plus répétitives et plus monotones. » (Elson, 1981, p. 93). À l'opposé, les hommes tendent à avoir de meilleures chances de promotion en passant par ce qu'on appelle les « chaînes de la mobilité » reliant les différents groupes d'emplois entre eux. Ce serait toutefois une simplification grossière que de considérer les répercussions de la mondialisation sur le travail des femmes en ne tenant compte que du vêtement, de l'électronique et du jouet. L'analyse des économies à croissance rapide (celles qui attirent l'IED ou qui génèrent leur propre processus d'investissement et vendent sur les marchés internationaux), comme la Corée du Sud et le Brésil, durant les années 1970, démontre que les femmes ont été recrutées massivement dans des emplois industriels, et en particulier dans des secteurs industriels non traditionnels. Le taux d'activité des femmes a considérablement augmenté entre 12 1970 et 1990, et ce, dans tous les pays à quelques exceptions près. Graphique 1 Part des femmes dans la population active adulte Océanie Asie de l'Ouest Asie centrale Asie du Sud Asie du Sud-Est Asie de l'Est Antilles Amérique latine Afrique subsaharienn Afrique du Nord Eur. occ. et autres Europe de l'Est 0 10 20 30 40 Pourcentage (15 ans et plus) 1970 1990 50 De 1970 à 1990, la part moyenne des femmes dans la population active a sensiblement progressé dans toutes les régions, sauf en Afrique subsaharienne, où il s'est produit un léger recul, et en Asie de l'Est, où l'augmentation n'a été que d'un point de pourcentage. De nombreux facteurs influent sur l'avancement des femmes dans la population active. Dans les pays où la migration touche de nombreux hommes, il se peut que davantage de possibilités d'emploi s'offrent aux femmes. En outre, le fait que davantage de ménages soient dirigés par des femmes accroît leur besoin de trouver du travail afin de subvenir aux besoins de leur famille. De plus, la baisse de la fécondité indique que les femmes consacrent moins d'années aux grossesses et aux soins à dispenser aux enfants, ce qui entraverait leur participation à la population active. La croissance des économies élargit le marché du travail et augmente l'activité économique des femmes, alors que le ralentissement de l'économie a l'effet opposé. Dans de nombreuses régions en développement et en Europe de l'Est, les programmes d'ajustement économique et la compression des dépenses publiques ont provoqué en général une diminution des possibilités d'emploi, ce qui, dans certains cas, a forcé les femmes à quitter la population active, comme cela s'est produit en Afrique subsaharienne. Source (Graphique et texte): Nations Unies (1995) Ce mode de croissance économique et de création d'emplois a profité en particulier aux jeunes femmes qui avaient au moins commencé des études secondaires. C'est la nature de cette intégration à la main-d'oeuvre industrielle qui pose problème. À cet égard, les difficultés (non uniquement liées à la mondialisation) auxquelles sont confrontées les femmes sont les suivantes: 13 v à travail égal, des salaires inférieurs à ceux que reçoivent les hommes; v le manque de possibilités de promotion et le refus de leur laisser accès à différents types d'emploi (dont la gestion et le travail spécialisé); v les risques professionnels et les mauvaises conditions de travail; v les difficultés importantes que doivent surmonter les femmes mariées ou mères de famille; v la ségrégation professionnelle fondée sur le sexe pour beaucoup d'emplois dans les usines: les règles sociales qui déterminent quel type de travail « convient » aux hommes ou aux femmes, c'est-à-dire, la division sexuelle du travail au sein de l'usine. Cette ségrégation est également un important mécanisme structurel et organisationnel, qui appuie l'écart de salaire entre les hommes et les femmes; v la différenciation des emplois selon le sexe du titulaire: par exemple, lorsqu'une femme, et non un homme, occupe un emploi, le degré de dépendance et de déférence à l'égard du superviseur de service peut être supérieur. Lorsque les femmes accèdent à de nouveaux domaines de travail ou remplacent les hommes dans des anciens, les emplois qu'elles obtiennent deviennent des « emplois pour femmes » dont le prestige est moindre; de la même manière, des emplois anciennement dominés par les femmes repris par les hommes acquièrent du prestige et les femmes s'en retrouvent fréquemment exclues; v l'absence de droits des travailleurs, notamment celui d'agir collectivement; v du côté de l'employeur, l'absence de dispositions, de contribution ou de prise en charge visant à couvrir le coût social de la « production » de la main-d'oeuvre (p. ex., congés de maternité, garde des enfants, etc.). L'augmentation du nombre de femmes dans le secteur de la production manufacturière est le résultat le plus évident de la mondialisation dans les pays en voie de développement qui reçoivent un influx de capitaux étrangers. Cet influx d'IED est également lié à la croissance économique dont les retombées peuvent avoir des effets secondaires ou indirects positifs. (Il ne faut toutefois pas conclure nécessairement à la validité de la théorie de « l'effet de percolation » jusqu'aux plus pauvres, en l'absence d'informations plus précises). Par exemple, la mondialisation peut entraîner une hausse de la demande de main-d'oeuvre féminine dans le secteur tertiaire et dans le secteur informel. Ainsi, il est certain que le phénomène crée de nouveaux risques et de nouveaux facteurs de vulnérabilité. Toutefois, si elle est associée à de nouveaux investissements, à de nouveaux lieux de production manufacturière, à de nouveaux débouchés pour un grand nombre de femmes, à une demande accrue de main-d'oeuvre féminine dans des secteurs connexes, la mondialisation a des retombées directes positives pour les femmes. Les femmes représentent maintenant environ un tiers de la main-d'oeuvre du secteur industriel dans les pays en voie de développement (Joekes, 1995). Ces dernières années, le secteur tertiaire a dépassé celui de la fabrication et se situe à la première place pour ce qui est de la croissance des exportations et de l'activité d'IED. Même si l'information est très lacunaire, certains observateurs sont convaincus que la croissance internationale du secteur tertiaire favorisera aussi l'emploi des femmes (voir l'encadré 1). 14 Encadré 1: mondialisation, problématique hommes-femmes et croissance du secteur des services Les changements sur le plan de l'emploi dans le domaine des services -- dont on peut s'attendre à ce qu'ils aient une place de plus en plus dominante dans l'économie à l'avenir -- sont attribuables aux effets de la mondialisation. Ce phénomène a un double effet sur les possibilités s'offrant aux femmes de trouver un emploi. En premier lieu, on crée des emplois dans des secteurs fondés sur l'information, qui se servent de l'infrastructure des télécommunications pour avoir accès à une main-d'oeuvre féminine instruite et bon marché dans les pays en développement en vue de l'exécution de tâches comme le traitement de données, tout comme l'amélioration des moyens physiques de transport international a facilité, antérieurement, l'expansion de la capacité de production des secteurs du vêtement et de l'électronique des pays en développement. Cette amplification de l'emploi à forte intensité de femmes dans certaines opérations du secteur des services trouve un parallèle dans l'accroissement récent des exportations de fruits, de fleurs et de légumes, reposant là encore en grande partie sur la main-d'oeuvre féminine, en provenance de certains pays en développement. On a constaté ce phémonène d'abord au Mexique, mais il apparaît clairement que dans certains pays d'Afrique de l'Est, notamment au Kenya, cette activité a beaucoup progressé ces dernières années. Elle représente peut-être la principale, voire la seule possibilité, dans l'immédiat, de se tailler de manière viable une place sur les marchés internationaux des produits autres que les produits de base, dans le cas d'un grand nombre des pays les moins avancés, particulièrement en Afrique subsaharienne, où la main-d'oeuvre féminine est mal préparée, en raison de lacunes du système d'éducation, à travailler dans les secteurs industriels modernes. Deuxièmement, la mondialisation facilite l'implantation dans des pays en développement de filiales de sociétés transnationales actives dans le secteur des services, comme les banques et les compagnies d'assurance faisant des ventes aux consommateurs, et de services spécialisés destinés aux producteurs (p. ex., la publicité, la compatibilité, les services juridiques) répondant aux besoins d'autres entreprises. Il arrive fréquemment que ces filiales dispensent des services à d'autres pays de la région. La mondialisation, en outre, encourage le déplacement de certaines anciennes fonctions des bureaux administratifs des STN, pour des raisons de coût. Certains analystes voient dans ce processus une probabilité de fragmentation géographique totale des opérations des STN dans le monde entier et, même, l'effondrement final de l'identité nationale (en qualité d'organisations ayant leur siège au Nord ou au Sud) de certaines STN. 15 Dans tous ces cas, on crée des emplois sur place dans le secteur des services, emplois répartis entre des niveaux faibles et élevés de compétence. Les analyses des conséquences pour la problématique hommes-femmes de la création d'emplois de ce type sont extrêmement rares, mais certains indices (p. ex., en provenance de Malaisie) donnent à penser que la préférence pour une main-d'oeuvre féminine ayant l'expérience de la fabrication se poursuit dans le nouveau domaine des services liés au commerce, aux deux extrémités de la gamme des compétences. Les conditions préalables à cette évolution sont réunies, dès lors que les femmes sont déjà bien représentées dans le secteur des services des pays en développement, et dans les catégories professionnelles et techniques, indépendamment du secteur. Des partis pris sexistes sur le plan de la scolarisation dans les pays en développement, en vertu desquels on concentre les femmes dans les arts et les humanités, et dans des secteurs professionnels comme le droit, viennent étayer les hypothèses selon lesquelles l'expansion des services liés au commerce peut représenter une importante nouvelle source d'emplois relativement bien rémunérés pour les femmes à l'avenir. --extrait de Susan Joekes (1995), p.4 [Traduction libre] C'est lorsque les femmes sont mises à l'écart de la production industrielle et évincées des domaines traditionnels de production à la suite de l'introduction de nouvelles technologies et de nouvelles formes d'utilisation des terres que les effets directs de la mondialisation sur l'emploi sont négatifs pour les femmes. C'est l'exclusion de la production mondialisée et de la production à plus grande valeur ajoutée, comme c'est le cas en Afrique, qui constitue un problème pour les femmes et pour les hommes. Les incidences directes et négatives sur l'emploi, en particulier des femmes, sont aussi visibles dans les cas des implantations et départs successifs des plates-formes de production mondiales. Les taux accrus d'activité des femmes que nous avons attribués à la mondialisation sont à mettre au compte de la « pression de la demande ». De manière générale, il est souhaitable que le nombre de débouchés existant pour les femmes à divers niveaux de compétence augmente. On peut également généralement observer qu'à mesure que l'offre de main-d'oeuvre masculine se fera plus rare dans certains emplois, les femmes pourront entrer dans des catégories professionnelles plus intéressantes. Toutefois, ce n'est pas parce qu'elles entrent plus facilement dans certaines professions et à l'emploi que les femmes accèdent automatiquement à l'égalité. Ensuite, il faut souligner que s'il est positif que les femmes obtiennent de plus en plus à des emplois nouveaux et mieux payés dans l'industrie, les statistiques démontrent que l'augmentation du taux d'activité des femmes ne signifie pas nécessairement qu'elles jouissent d'un plus grand bien-être. Des facteurs liés à la pauvreté peuvent aussi les amener à se joindre à la population active. Par exemple, des données secondaires, comme celles fournies dans les études microsociologiques, donnent à penser que la pauvreté est l'un des facteurs importants qui poussent un plus grand nombre de femmes à participer à un travail productif à l'extérieur du foyer ou à entrer sur le marché officiel du travail (Ghosh, ca. 1993). Dans les cas où des femmes ne travaillaient pas auparavant à l'extérieur du foyer, cette entrée forcée sur le marché du travail peut indiquer que la pauvreté les oblige à trouver une autre source de revenu pour la famille, ce qui peut entraîner de nouvelles contraintes de temps pour elles (voir également Moser, 1996) Lorsque la mondialisation favorise l'accès des femmes à l'emploi, mais que la nature du travail empêche les femmes de développer leur potentiel ou ne le leur permet pas, individuellement, 16 celles-ci peuvent tout de même, en l'absence d'autres possibilités d'emploi, en retirer un avantage net. Les activités de coopération pour le développement peuvent alors viser à « élargir » cette « étroite » possibilité que donne la mondialisation à certaines catégories de femmes. En ce qui concerne l'équité, comme moyen empirique de distinguer les effets positifs des effets négatifs, Elson (1992) estime que [Traduction] « la mesure dans laquelle la hausse des taux de participation des femmes à la main-d'oeuvre décompose les formes actuelles de subordination dépend principalement du niveau de rémunération des femmes et des possibilités d'action collective qui leur sont données par l'organisation du travail salarié. » Dans une démarche d'évaluation des incidences de l'évolution économique résultant de la mondialisation, on peut se poser les questions suivantes: ˆ Quels sont les obstacles à la mobilité de tels ou tels groupes de femmes ou d'hommes? ˆ Quels obstacles ces femmes ou ces hommes doivent-ils franchir pour avoir accès à certains segments du marché du travail? ˆ L'alphabétisation est-elle une condition de l'entrée sur le marché du travail et le taux d'alphabétisation des femmes est-il nettement plus bas que celui des hommes? ˆ Les nouveaux emplois contribuent-ils au développement du potentiel et à l'épanouissement de ces travailleurs ou contribuent-ils au contraire à les déqualifier, les appauvrir ou les dégrader? ˆ Les femmes peuvent-elles se recycler, se perfectionner? Leur accès à ces possibilités est-il le même que celui des hommes ou sont-elles confrontées à des obstacles institutionnels de nature sexiste ou à des contraintes liées à leur rôle dans la reproduction sociale? ˆ Quelles sont les conditions de travail, et ces femmes ou ces hommes avaient-ils une information suffisante sur celles-ci avant d'investir dans un tel changement? ˆ Quels cadres réglementaires protègent ces travailleurs sur le plan de la santé et de la sécurité, des normes professionnelles, etc. Sont-ils respectés? 5.0 Égalité entre les sexes, habilitation et développement des capacités des femmes Les marchés tendent à ne pas traiter les femmes comme tant les égales des hommes, mais ils traitent néanmoins les femmes comme des personnes à part entière. La question essentielle qu'il convient de se poser devient alors: ˆ De quelle façon la mondialisation influe-t-elle sur la division du travail entre les sexes dans une société donnée? Si les femmes peuvent vendre leur force de travail ou leurs produits et assurer leur survie7, voire satisfaire d'autres besoins, de manière autonome, elles sont moins dépendantes 7 Maria Mies a mis en évidence les dangers de la semi-prolétarisation des femmes: sur le plan social, elles sont des ménagères mais, en réalité, elles travaillent pour gagner un salaire et sont pleinement intégrées dans un système axé sur le marché mondial. Même si on les considère comme étant des « travailleurs secondaires » et si elles reçoivent un salaire qui ne suffit pas à assurer leur subsistance, il se peut que, dans les faits, elles soient la principale source de revenu du ménage. À son avis, la semi-prolétarisation ne constitue pas une étape de 17 économiquement des hommes et leur pouvoir de négociation au sein du foyer s'accroît. Plus leur revenu rémunéré est susceptible d'augmenter, plus leur valeur économique reconnue (ou « visible ») croît et plus leur statut social tend à s'élever. Selon la nature du travail (et de la valeur socio-culturelle qu'on lui attribue), le fait d'avoir leur propre revenu tend à être très important pour les femmes, car il représente le statut et la dignité. Ce processus s'accompagne d'une modification de la division du travail en fonction du sexe. Ces changements, toutefois, ne signifient pas que les anciennes formes de division asymétrique du travail entre les sexes sont abolies et remplacées par des possibilités économiques égalitaires, exemptes de discrimination fondée sur le sexe et équitables. Le fait qu'elles puissent obtenir des emplois mieux rémunérés et plus qualifiés ne signifie pas forcément qu'elles sont traités avec plus d'équité. Pour parvenir à cet objectif, il faut une transformation des valeurs attribuées aux deux sexes ou de l'idéologie de la société dans son ensemble. Encadré 2: Le défi de l'utilisation de méthodes participatives Robert Chambers, lors du Forum for Poverty Reduction Strategies for Development tenu à Toronto en 1995, a réclamé des mesures concrètes dans deux grands domaines. Sur un premier plan, permettre aux gens occupant des postes subalternes, particulièrement des pauvres, de faire leur propre analyse. L'évaluation participative constitue un moyen de permettre aux collectivités de définir leurs propres besoins et d'exercer vers les échelons supérieurs de la société des pressions en faveur du changement. Sur un deuxième plan, changer les attitudes et les comportements parmi les agents de développement et les élites du Nord et du Sud. Il est difficile de se débarrasser d'anciennes façons de faire: d'apprendre à ne pas interviewer, à être un animateur, à ne pas interrompre. Il se demande si nous sommes capables de trouver des moyens de permettre aux puissants de vivre avec joie une perte d'habilitation, d'apprendre à être des animateurs plutôt que des dominateurs. (Rapport du Forum, 1995) Lorsque les femmes exercent une nouvelle activité en raison de la mondialisation, les principales questions suivantes se posent, entre autres: ˆ Quels sont les droits des femmes dans leur nouveau travail? Ces droits sont-ils supérieurs ou inférieurs à ceux qu'elles avaient auparavant? ˆ Les femmes peuvent-elles s'organiser elles-mêmes en tant que groupe? Le travail comporte-t-il des éléments habilitants ou la discipline est-elle rigide (p. ex. interdiction de converser au travail, limite sur le nombre de visites aux toilettes, surveillance électronique, etc.)? transition (menant à une autre étape où les femmes peuvent choisir entre l'état de salariée prolétaire ou de ménagère); elle peut au contraire constituer une expression permanence de la division du travail fondée sur le sexe qui permet l'exploitation du travail des femmes, aussi bien au foyer que par le capital. Maria Mies attire également l'attention sur le fait qu'en raison de l'intégration croissante dans l'économie mondiale, de nombreuses femmes pauvres du tiers monde ne produisent pas ce dont elles ont besoin, mais ce que d'autres peuvent acheter. 18 ˆ Quelle est l'incidence du travail sur le pouvoir de négociation des femmes au foyer? ˆ De quelle façon la société voit-elle le statut des femmes qui appartiennent à cette catégorie professionnelle? ˆ Quelle est l'incidence du nouveau travail sur le travail social et reproductif? ˆ Comment le travail des femmes est-il rémunéré comparativement à celui des hommes? Pour qu'il y ait développement humain, il faut que le travail contribue au développement du potentiel de l'être humain. À cet égard, voici les questions principales qu'il convient de se poser, entre autres: ˆ Les nouveaux débouchés créés par la mondialisation offrent-ils aux travailleurs des possibilités de se former ou d'acquérir de nouvelles compétences? Le travail est-il si monotone qu'il aboutit au contraire à une déqualification? ˆ Donne-t-on aux travailleurs et aux travailleuses des possibilités de promotion ou d'exécuter des tâches diversifiées? ˆ Le travail est-il organisé de façon à habiliter le travailleur et constitue-t-il une activité saine sur le plan physique ou mental? Est-il au contraire invalidant (p. ex. tension oculaire causée par le travail de montage) ou abrutissant? ˆ Le travail permet-il aux travailleurs d'améliorer leur niveau de vie au fil des années? Ou est-il au contraire si mal rémunéré que les travailleurs restent démunis ou économiquement dépendants d'un autre mécanisme social de survie? L'analyse de la dynamique de la pauvreté doit couvrir non seulement l'accès à un emploi rémunéré et les possibilités de gagner un revenu mais également un autre aspect, à savoir la capacité des défavorisés de développer leurs aptitudes. Les facteurs structurels de la pauvreté sont, entre autres, les mécanismes qui limitent le développement du potentiel des hommes et des femmes pauvres et leur possibilité de l'exploiter. On peut étudier la mondialisation en se demandant dans quelle mesure les nouveaux débouchés permettent aussi aux plus défavorisés d'exploiter leur potentiel et de développer leurs aptitudes. En matière de développement, les approches axées sur la capacité des femmes et des hommes à s'épanouir et les mécanismes utilisés tiennent compte de cet aspect. # Les activités de coopération pour le développement peuvent renforcer les mécanismes d'action publique notamment, y compris celle menée par les plus pauvres. Les institutions de la société civile qui favorisent le changement social, la justice et les droits humains peuvent être appuyées et renforcées. Les mécanismes qui servent à coordonner les actions collectives menées par les travailleurs pour négocier avec les employeurs et améliorer le milieu de travail peuvent être soutenus et renforcés (amélioration et respect des garanties juridiques, des normes de santé et de sécurité, droit à établir des comités de travailleurs, droit de se syndiquer). Cela implique que les femmes et les hommes doivent choisir et agir. Il arrive fréquemment que leur choix soit restreint, qu'il s'agisse de l'activité qu'ils exercent ou du travail qu'ils acceptent. C'est le cas de la majorité des plus vulnérables parmi les pauvres: les filles « soumises » qui travaillent pour leur famille dans des zones franches industrielles, les enfants dont le revenu marginal est nécessaire pour que la famille puisse satisfaire ses besoins les plus élémentaires et les fillettes que l'on prostitue. Par exemple, Heyzer (1994) indique qu'en Thaïlande: L'endettement de nombreux foyers dans les campagnes a mené à l'esclavage et à la vente d'enfants, en particulier de jeunes filles, les familles espérant ainsi 19 payer leurs dettes. Les relations de pouvoir asymétriques au sein de la famille et les liens de parenté font que les fillettes et les jeunes femmes sont les plus vulnérables. La pauvreté a conduit les familles à envoyer leurs filles gagner de l'argent dans les régions urbaines. Les gains de ces jeunes filles sont fréquemment indispensables à la survie du foyer. L'exode des femmes de ces régions dépasse la hausse de la demande de main-d'oeuvre du secteur manufacturier et du marché du travail structuré. Beaucoup de ces jeunes femmes se retrouvent dans le secteur non structuré, dans les réseaux de prostitution, dans l'industrie du loisir ou employées comme domestiques. Lorsque la mondialisation - qui provoque un mouvement des capitaux, mais également celui d'hommes d'affaires qui combinent voyages d'affaires et tourisme sexuel, contribue directement à la demande de main-d'oeuvre pour les emplois les plus dégradants, il est impossible de ne pas conclure que le sort de ces jeunes femmes aurait été meilleur sans la mondialisation. En tant que groupe, ces femmes exploitées sont privées d'une grande partie de leur potentiel et de leurs libertés les plus élémentaires (en particulier les prostituées qui sont également exposées au SIDA). Ces femmes sont les pauvres absolus et les membres les plus vulnérables de leur société. Pauvreté économique et vulnérabilité sociale sont souvent étroitement liées. # Les activités de coopération pour le développement peuvent contribuer à habiliter les hommes et les femmes pauvres et à renforcer leur pouvoir de négociation face au capital multinational et aux effets déshumanisants de la mondialisation sur la main-d'oeuvre peu qualifiée. Cela peut se faire, par exemple, au moyen de la diffusion d'information sur la santé (y compris en matière de prévention des maladies transmissibles sexuellement), sur les effets et les risques des substances chimiques toxiques utilisées au travail et sur les droits des travailleurs. Le soutien et le renforcement des groupes de femmes pauvres (ou les organisations qui représentent véritablement leurs intérêts) dans leurs relations sociales et économiques et leurs négociations avec l'employeur dans des situations d'exploitation constituent d'autres points d'accès d'une importance stratégique. Favoriser la participation des groupes vulnérables à un processus de gestion des affaires publiques qui soit équitable, transparent et responsable, promouvoir la liberté d'expression et d'association ainsi qu'un processus juridique prévoyant des moyens de recours équitables contre l'injustice sont d'autres façons de contribuer à l'habilitation des personnes et les groupes défavorisés. 20 6.0 Les implications de la mondialisation pour la gestion des affaires publiques La mondialisation des économies impose des contraintes aux décideurs nationaux tant des pays développés qu'en développement. La mondialisation est essentiellement le produit des décisions prises par les entreprises, et les principaux acteurs sont les sociétés transnationales, les banques, ainsi que leurs réseaux et leurs alliances. La mondialisation croissante a entraîné un recentrage du pouvoir et de l'influence, auparavant détenus par les organisations publiques, au profit des organisations privées et donc le risque de voir celles-ci imposer leurs diktats. De plus en plus, la logique financière, plutôt que sociale, sous-tend les décisions d'importance majeure pour la société, et l'accent est mis sur le court terme plutôt que sur le long terme. Dans la mesure où la mondialisation met davantage l'accent sur le rendement financier à court terme, des pressions seront exercées sur tous les gouvernements pour qu'ils réduisent les investissements sociaux qui ne sont rentables qu'à plus long terme. Contraintes sur les instruments micro-économiques: facteurs d'incitation, fiscalité et réglementation Avec la mondialisation, le volume des investissements intérieurs et étrangers directs, tous deux extrêmement mobiles, a enregistré une hausse spectaculaire. Les états, les régions et même les municipalités se font donc concurrence pour offrir les conditions les plus susceptibles d'attirer les emplois et les investissements directs générateurs de revenus. Parmi ces conditions, mentionnons la libéralisation des politiques fiscales et commerciales, des politiques industrielles préférentielles, ainsi que des politiques laxistes dans le domaine de l'environnement et du travail. Les questions de principe soulevées par la mondialisation des économies ne sont donc pas uniquement traitées dans le cadre de négociations commerciales et de sommets internationales. La mondialisation se répercute sur presque tous les domaines de politique générale. Les thèmes communs aux politiques néo-libérales modernes favorables à l'investissement sont la stabilité, la libéralisation et la déréglementation. Alors que l'on reconnaissait à l'état libéral un rôle de régulateur de l'économie et de garant d'une certaine équité sociale, la fonction de l'état néo-libéral est d'adapter l'économie nationale à la dynamique d'une économie mondiale essentiellement anarchique. Un dilemme se fait jour: la contradiction entre les mesures susceptibles d'attirer les capitaux (p. ex., la déréglementation et la baisse des taxes) et celles propices au mieux-être à plus long terme, y compris les investissements essentiels à la productivité des entreprises à plus long terme. Il ne peut y avoir de stabilité sans cohésion sociale. Pour avoir une main-d'oeuvre productive et souple, il faut investir dans l'éducation et le perfectionnement professionnel, ainsi que dans la santé (dans ce secteur, la prévention est l'approche la moins coûteuse). Pour assurer la durabilité, des mesures et des garanties environnementales s'imposent. De nombreux obstacles commerciaux et réglementaires qui protègent les intérêts d'industries locales inefficaces, lesquelles se sont rendues maîtres des organes qui les réglementent, doivent être abaissés. Cette réglementation sert souvent les intérêts des élites locales, et les pressions mondiales bénéficieront au public en général. D'autre part, la surenchère en matière de déréglementation des secteurs social et environnemental est une dynamique alimentée par la mondialisation et elle va clairement à l'encontre des objectifs de développement humain et durable. Les limites imposées à la capacité des états à intervenir dans les sphères sociale et environnementale et le rôle accru des entreprises privées ont affaibli les instances habilitées à légiférer et à assurer le respect des normes entre autres en matière de travail, de sécurité sociale, d'égalité des sexes et de droits de la personne. # L'ACDI peut intervenir activement dans les instances internationales et multilatérales, plus précisément contribuer à la conception d'instruments, comme des conventions, des accords et des ententes, ayant pour objet de relever les normes sociales et environnementales, ainsi que de prévenir la surenchère à la déréglementation. L'ACDI 21 peut apporter son appui aux groupes de femmes, aux groupes d'intérêt public et aux ONG des pays en développement pour qu'ils fassent entendre leur voix au sein des instances internationales et multilatérales. Il y a une différence subtile entre d'une part insister sur l'adoption de normes sociales et environnementales pour favoriser l'atteinte d'objectifs dans ces deux secteurs et d'autre part concevoir des normes sociales et environnementales afin de protéger une économie nationale contre les importations de pays en développement. # L'ACDI peut maintenir une base de connaissances adéquate à l'égard de ces questions litigieuses, particulièrement dans le contexte des discussions et des négociations avec l'Organisation mondiale du commerce. Elle peut appuyer la réalisation d'études sur les coûts et avantages sociaux et de recherches concertées mettant à contribution des femmes de pays en développement pour rehausser le niveau de discussion (p. ex., les clauses sociales et le dumping écologique). L'ACDI peut contribuer aux débats en qualité d'institution médiatrice, et ce, dans la perspective du développement durable et de la prise en compte des intérêts des femmes, particulièrement des femmes démunies. Contraintes exercées sur les politiques macro-économiques: conséquences pour les politiques sociales et celles concernant les femmes Même si la concurrence pour attirer les investisseurs est plus évidente, c'est la mondialisation financière et l'invisibilité accrue de la localisation du capital financier qui imposent les contraintes les plus immédiates et les plus cinglantes aux décideurs nationaux, particulièrement dans le domaine des politiques macro-économiques. Le capital financier étant de plus en plus mobile et le volume des échanges sur les marchés monétaires internationaux liquides, de plus en plus élevé, l'argent se déplace instantanément au premier signe d'incertitude politique ou d'une réorientation de la politique économique défavorable aux opérateurs financiers. Les mouvements financiers internationaux ont pesé sur l'annonce de la dévaluation du peso mexicain en 1994, les résultats du sondage pré-référendaire au Québec et les annonces des ministres des Finances relativement à la création d'emplois et à des budgets entraînant une baisse des taux d'intérêt. Les gouvernements attendent probablement avec plus d'impatience les annonces des agences de cotation des titres que les résultats des sondages d'opinion, sauf si des élections sont imminentes. Une hausse d'un quart de point des taux d'intérêt, provoquée par les craintes des milieux financiers internationaux, peut être lourde de conséquences pour un pays 8; une fuite massive de capitaux, comme celle qui a frappé le Mexique, peut être dévastatrice. Les contraintes qui pèsent sur les politiques peuvent avoir des conséquences variables. D'une part, lorsque des politiques prudentes favorables au marché débouchent sur une plus grande stabilité macro-économique, des niveaux d'inflation raisonnables, la croissance économique, des progrès techniques et la création d'emplois, elles constituent manifestement un progrès. Les pressions exercées sur les gouvernements par le capital « saute-frontières » peuvent donc être considérées comme un frein à la mauvaise gestion économique et à la corruption locale. Et il importe de ne pas oublier que ce sont généralement les pauvres et les citoyens les plus désavantagés, dont les femmes, qui paient le prix de la contraction des dépenses, laquelle vise à compenser les précédents déficits publics insoutenables, qui ne trouvent pas leur compte dans les intérêts spéciaux des industries protégées, propriété des élites locales, et qui sont le plus durement touchés par l'inflation. L'impact disproportionnée sur les femmes et les pauvres des politiques de stabilisation liées à l'ajustement structurel a été bien documentée. 8 Dans un système de marchés financiers déréglementés, les taux d'intérêt grimpent lorsque le capital financier quitte un pays. Les taux d'intérêt plus élevés sont habituellement associés à des taux d'investissement et de croissance plus faibles. Ils ont également une incidence négative sur le service de la dette et influent sur la balance commerciale par le biais des taux de change. 22 D'autre part, les marchés de capitaux internationaux récompensent les pays qui ont des politiques économiques restrictives. C'est-à-dire que la réduction des déficits, la contraction des dépenses publiques, la baisse des impôts et le resserrement des politiques monétaires débouchant sur un faible taux d'inflation sont autant de mesures qui peuvent être prises aux dépens de la relance de l'emploi et qui sont susceptibles d'être associées à des coupes plus sévères dans les dépenses sociales. Les marchés financiers mondialisés limitent la capacité des gouvernements à lever des impôts, particulièrement sur le capital. De même, les emprunts publics (qui accentuent le déficit) ou la création de monnaie (génératrice d'inflation) sont pénalisés par les marchés financiers, les capitaux quittant le pays, les taux d'intérêt accusant une hausse, les investissements, un recul, et la valeur de la devise chutant. La mondialisation déclenche une dynamique caractérisée par la diminution des ressources gouvernementales, ainsi que de la capacité de l'état à affecter des fonds à la poursuite d'objectifs liés à sa politique budgétaire. Par conséquent, de plus en plus, en raison de la mondialisation, tant les gouvernements des pays développés qu'en développement réduisent les fonds affectés aux objectifs fondamentaux du développement humain, par exemple la santé, l'éducation et la sécurité sociale. Les contraintes imposées aux politiques sociales par la mondialisation des marchés financiers ont des conséquences très claires pour les femmes. Les dépenses publiques ont un rôle important à jouer dans le soutien à la reproduction sociale et à l'égalité des sexes. Lorsque ce soutien est absent ou retiré, le fardeau imposé aux femmes -- qualifié de « taxe sur la procréation » -- est disproportionné. La mondialisation, en entraînant le désengagement de l'état face à l'économie de reproduction et en faisant assumer aux femmes une part démesurée des coûts de la reproduction, a un effet dégressif sur la répartition des revenus selon le sexe. Les femmes vivant dans la pauvreté absolue, par exemple celles qui sont incapables de payer les frais modérateurs pour les soins de santé, seront en position de vulnérabilité absolue. En général, le transfert de la responsabilité en matière de prestation des services sociaux du secteur public au secteur privé tend à fragiliser davantage les pauvres 9. L'abandon de la politique fiscale comme outil de réduction de la pauvreté à l'échelle internationale a des effets prévisibles et semble déjà affaiblir l'infrastructure sociale ou « les équipements collectifs » dans de nombreuses régions, y compris celles dont la croissance économique est peut-être positive. En fait, l'économie fondée sur la fiscalité et les dépenses publiques est de nouveau subordonnée à l'économie commerciale lucrative, dans un contexte où les familles et les collectivités sont de moins en moins en mesure d'absorber les chocs. Dans les pays en transition, et plus particulièrement en Russie, les politiques fiscales restrictives ont pour effet de détruire les contrats existant entre l'état et la société. 7.0 Nouveaux risques et vulnérabilités engendrés par la mondialisation Les processus de changement structurel associés à la mondialisation de l'économie engendrent de nouveaux risques. À chaque risque correspond généralement un groupe de personnes particulièrement exposé et un autre groupe relativement bien protégé contre ce risque. Une caractéristique prédominante de la pauvreté est la vulnérabilité aux risques. Bien que la pauvreté se transmette de génération en génération, la pauvreté absolue est souvent le résultat d'une catastrophe, du bouleversement des conditions régissant le travail et les moyens de subsistance et d'un dénuement imprévu. Pour comprendre la dynamique de la pauvreté, de la problématique hommes-femmes et de la mondialisation, il faut donc déterminer les différentes catégories de risques associés à la mondialisation. 9 Moser (1996) utilise le terme vulnérabilité pour saisir les nombreux aspects du bien-être socio-économique, qui est variable. Vulnérabilité s'entend de la précarité du bien-être des individus, des ménages ou des collectivités dans un environnement en pleine évolution. 23 # Si nous considérons la réduction de la pauvreté comme un processus permettant de s'attaquer aux causes du dénuement et de l'iniquité, il est important de déterminer les risques inhérents à la mondialisation. Les catastrophes et le dénuement soudain, qu'ils soient causés par des sécheresses périodiques ou un déclin du marché, peuvent être prévus, et des dispositions peuvent être prises pour y parer. Un certain nombre de risques associés à la mondialisation sont indiqués ci-dessous, et le rôle des institutions médiatrices au regard de la gestion de la mondialisation et de la protection contre certains de ces risques est examiné. Technologie et nouveaux modes d'organisation de la production La technologie étant le vecteur de la mondialisation, celle-ci modifie les modes d'organisation de la production. Cette conséquence est essentiellement considérée comme bénéfique. Les pays en développement apprécie l'investissement étranger direct en raison des possibilités de transfert de la technologie, et de nombreux gouvernements du tiers monde ont commencé à adopter une position plus pragmatique face aux investisseurs étrangers en ce qui touche le transfert de la technologie, ainsi que le transfert des compétences opérationnelles, techniques et gestionnaires. Par ailleurs, les nouvelles technologies ou nouveaux modes de production peuvent supplanter les méthodes de production classiques et les régimes habituels d'utilisation des terres et des ressources, appauvrissant ainsi les producteurs traditionnels, comme les tisserandes autochtones d'Amérique latine. Généralement, il est stérile de lutter contre l'introduction de nouvelles technologies et de vouloir préserver les rapports de production « pré-mondialisation ». Toutefois, le processus de changement peut être géré de manière à donner aux populations touchées le temps et les moyens de s'ajuster et à influer sur les nouveaux rapports de production pour qu'ils favorisent une plus grande équité. Lorsque les biens fabriqués dans des installations étrangères de production ne sont pas destinés uniquement aux marchés d'exportation, mais aussi aux marchés intérieurs, les producteurs nationaux « inefficaces » ou utilisant des méthodes dépassées peuvent se voir supplanter. Lorsque les ouvriers mis à pied par ces producteurs nationaux ne trouvent pas d'emploi dans les nouvelles installations de production, ils doivent se recycler. Risques pour l'environnement et l'habitat La production industrielle et agro-alimentaire moderne crée non seulement des produits de consommation et des produits intermédiaires, mais aussi des sous-produits comme des polluants, des pesticides, des produits dangereux et des déchets toxiques. La mondialisation ne provoque donc pas uniquement un changement dans la division du travail à l'échelle internationale, mais aussi une modification de la distribution des dépôts de polluants, ainsi que des cas de dégradation environnementale et d'empoisonnement. Les gens vivant dans la pauvreté absolue et les petits salariés sont généralement concentrés dans des zones résidentielles surpeuplées et souvent très polluées, ainsi que dans des lieux de travail le plus souvent non contrôlés et dangereux pour la santé. Par exemple, les ouvrières du textile dans les maquiladoras au Mexique signalent des taux élevés de maladies causées par la poussière des ateliers de pressurage non ventilés et celles de l'industrie électronique, la présence à leurs côtés de plateaux découverts contenant des substances cancérigènes. Les dépotoirs de produits toxiques sont nombreux dans les régions rurales éloignées et les quartiers pauvres des villes. Au Costa Rica, les ouvriers travaillant dans les bananeraies et leurs familles souffrent d'une multitude de problèmes médicaux allant du cancer à des malformations congénitales (dont l'incidence est anormalement élevée). Les spécialistes de la santé font valoir que ces problèmes sont causés par les puissants pesticides utilisés sur les plantations. L'Organisation mondiale de la santé estime que plus d'un million de travailleurs agricoles sont victimes d'empoissonnement chaque année en Amérique latine et que 10 000 personnes 24 meurent parce qu'elles ont été en contact avec des produits chimiques (Banque mondiale, 1995:1). Les organismes de coopération au développement peuvent travailler en collaboration avec ces travailleurs, utiliser le savoir-faire scientifique et les connaissances techniques en matière de production pour s'attaquer aux problèmes susmentionnés, ainsi qu'examiner les questions du double point de vue des producteurs et des consommateurs. En outre, alors que les pays pris individuellement peuvent craindre de prendre des mesures sévères de peur de déclencher une fuite des capitaux étrangers, les organismes de coopération au développement peuvent, grâce à des partenariats transnationaux réunissant les travailleurs, les spécialistes indépendants et les consommateurs, examiner séparément les questions. Même si cette vision de la coopération au développement peut être qualifiée par certains de trop optimiste, compte tenu de la réticence des sociétés multinationales à accepter les normes environnementales, l'utilisation proactive et novatrice des fonds d'aide au développement permet de mener des actions uniques, ce que ne peuvent faire ceux qui n'ont pas les moyens de jouer ce rôle de médiateur des intérêts sociaux internationaux. Tout comme la mondialisation du secteur privé nécessite des alliances transnationales stratégiques et de nouvelles structures de réseau fonctionnel, les initiatives de développement peuvent favoriser les alliances stratégiques et les accords de coopération mutuellement avantageux. Dans certains cas, ces initiatives peuvent viser à faire participer les entreprises privées prêtes à agir en bon citoyen du monde. Dans d'autres cas, elles peuvent viser à fournir des ressources aux organisations des sociétés civiles pour jeter ces ponts planétaires que certains appellent « stratégies de contre-mondialisation ». Urbanisation, bouleversements régionaux et migration Les capitaux mondiaux tendent à se concentrer dans les grandes villes, ainsi que dans les régions urbaines et les zones portuaires. Cette concentration influe à son tour sur la mobilité interne de la main-d'oeuvre dans de nombreux pays. La planification urbaine intégrant les besoins des pauvres et l'accès de ces pauvres à l'infrastructure urbaine sont deux moyens fondamentaux susceptibles de diminuer les risques courus par cette tranche de la population. La migration vers les zones où existent des possibilités d'emploi est un élément de solution, mais cette migration comporte des risques. Ceux laissés derrière n'ont peut-être plus de moyens de subsistance, et les migrants eux-mêmes peuvent courir un danger s'ils sont isolés des réseaux sociaux d'aide. Mobilité: un risque social La mobilité des travailleurs, géographique et intersectorielle, est un facteur important de la lutte contre la pauvreté. L'immobilité relative et les obstacles à la mobilité nuisent considérablement aux pauvres. Toutefois, dans une perspective sociale plus vaste, la mobilité est un processus qui intrinsèquement mine la stabilité sociale. La pauvreté absolue survient lorsqu'il n'existe aucun filet de sécurité sociale, et la paupérisation croissante a été directement associée à la dissolution de la famille, des liens de parenté et des liens ethniques, ainsi qu'à l'affaiblissement des systèmes de soutien collectif dans de nombreux pays en développement. Bien que cette situation ne soit pas due uniquement à la mondialisation, mais aussi à l'industrialisation et à la modernisation, en Asie, ou à une profonde détresse économique, en Afrique, de nouveaux contrats sociaux, des nouveaux régimes d'assurance, de crédit et de responsabilité doivent être mis en place. Appropriation du travail Ceux qui prennent les décisions en matière d'investissement, y compris leur point de chute, décisions qui commandent la mondialisation, considèrent les travailleurs et les gens en général comme des éléments d'actif mobiles et aliénables. La mondialisation non contrôlée ou anarchique présente des risques, à savoir la déqualification, la déshumanisation et le non respect du droit des travailleurs au développement humain. C'est un fait qu'en l'absence de tout 25 contrôle, le capital exploitera les plus vulnérables, y compris les enfants. Cette situation ne doit pas être considérée comme une conséquence inévitable de la mondialisation financière. Du point de vue de la coopération au développement, cette question est au coeur de la relation entre la mondialisation et les programmes en matière de droits de la personne et de bon gouvernement. Dépendance à l'égard des caprices du marché et migration de sortie du capital mondial Le marché ne garantit nullement que les possibilités d'emploi et les prix permettront de répondre aux besoins à moyen et à long terme. Les relations commerciales sont tributaires des cycles conjoncturels, même dans les meilleures conditions. Par conséquent, des périodes d'augmentation du chômage sont à prévoir. Pendant les périodes de repli, les travailleurs moins qualifiés - ceux dans lesquels on investit le moins - sont mis à pied, et on assiste à la création de nouveaux pauvres ou à un appauvrissement accru. L'existence de régimes de sécurité sociale bien administrés peuvent présenter de grands avantages sur le plan de la stabilité sociale et politique. En outre, tout comme un apport important d'investissements étrangers directs peut procurer des avantages importants aux pauvres, grâce aux emplois qui en découlent, ces avantages peuvent disparaître rapidement s'il y a relocalisation des installations. En Asie, il y a eu une relocalisation à l'extérieur des pays nouvellement industrialisés parce que la rareté croissante de la main-d'oeuvre a entraîné une hausse des salaires tant pour les travailleurs qualifiés que non qualifiés. Le risque que présente la migration de sortie des capitaux peut être anticipé, et on peut y parer grâce au perfectionnement professionnel de la main-d'oeuvre, afin de réaliser un équilibre entre la hausse des salaires et l'augmentation de leur productivité potentielle. Les politiques gouvernementales et l'investissement public dans l'éducation, ainsi que l'acquisition de compétences peuvent considérablement faciliter l'ajustement structurel qui s'impose lorsqu'une migration de sortie des capitaux entraîne une restructuration économique sectorielle des économies régionales ou nationales. Une économie concurrentielle ne doit pas reposer sur des salaires plus faibles; cette stratégie ne permet pas de relever le niveau de vie d'une façon durable. L'objectif doit être d'offrir des salaires concurrentiels par rapport à la productivité des travailleurs. Des compétences accrues et un niveau de scolarisation plus élevé laissent supposer une plus grande productivité; ces « atouts nationaux » peuvent également servir à attirer des investissements étrangers directs de meilleure qualité, c.-à-d. des industries à plus grande valeur ajoutée. Bien que les organismes donateurs ne peuvent assurer l'éducation et la formation, des approches prospectives axées sur les sexospécificités peuvent permettre d'anticiper les pénuries de compétences et y parer. Volatilité des marchés financiers La mobilité accrue peut encourager des mouvements spéculatifs de capitaux, risquant d'accroître ainsi la volatilité des marchés de capitaux internationaux. Cela peut - comme l'a montré la crise monétaire mexicaine en 1994-1995 et ses conséquences - avoir des répercussions graves et disproportionnées pour les pauvres, groupe le plus vulnérable à l'inflation. Des politiques monétaires prudentes peuvent ne pas suffire comme mesure de protection contre la volatilité inhérente aux marchés financiers. Des mesures de coopération multilatérales au développement dans le domaine de la gestion de la volatilité des mouvements spéculatifs internationaux et des mesures de protection à cet égard sont donc nécessaires. On est de plus en plus sensibilisé au fait que des institutions renouvelées et plus efficaces s'imposent pour opérer la médiation dans le domaine des finances internationales. Le système de Bretton Woods a été établi en 1945 pour réduire les risques. Et maintenant, l'économie mondiale a besoin d'un nouveau mécanisme de remplacement efficace. 8.0 Conclusion: l'agence de développement en tant qu'institution médiatrice dans le processus de mondialisation 26 Dans le présent document de travail, nous partons du principe que les interventions stratégiques d'aide au développement doivent expliquer de quelle façon, dans une localité donnée, la dynamique de la mondialisation interagit avec la problématique hommes-femmes. Ces interventions peuvent par la suite contribuer à élargir les débouchés offerts aux démunis par la mondialisation, de même qu'à réduire les risques inhérents que ce phénomène pose pour eux. Dans chaque cas, il est possible de choisir des « institutions médiatrices » qui jouent, ou peuvent jouer, le rôle d'intermédiaires entre l'individu ou le groupe et le facteur de risque. Selon une analyse des rapports entre la dynamique de la mondialisation et la problématique hommes-femmes, l'État, les institutions de la société civile, la collectivité, les ONG, les activistes et les groupes de bienfaisance peuvent tous jouer le rôle d'institutions médiatrices ou d'intermédiaires. Ces institutions ont le pouvoir de renforcer et d'accroître la vulnérabilité des démunis face au risque, de partager le fardeau de ce risque, et d'en protéger les démunis. Dans ce sens, par son programme de coopération au développement, l'ACDI peut être vue comme une institution médiatrice. Les institutions publiques ou médiatrices peuvent réussir à inclure les plus démunis, dont la majorité sont des femmes, dans le « public » qu'elles servent; elles peuvent les ignorer ou même les marginaliser davantage, par exemple en détruisant les logements de squatters sans offrir de solutions de rechange. Les interventions publiques de ces institutions traduisent la perception qu'elles ont de leur responsabilité sociale, leur intérêt stratégique à préserver la stabilité sociale et à promouvoir le développement humain au sein de leur société ou de leur milieu, ou leur intérêt pratique, l'intervention publique venant alors de groupes de femmes ou d'autres groupes. Cette intervention s'applique à un vaste secteur: il peut s'agir de l'action d'organismes publics, d'ONG, de groupes de pression (directe ou auprès du gouvernement), de réseaux sociaux, de syndicats, de groupes environnementaux, etc. # Dans la mesure où la coopération au développement est menée en collaboration avec les pays en développement et vise à réduire la pauvreté, elle doit également être menée de concert avec les agents de l'intervention publique et avec la participation de ceux qui vivent dans la pauvreté. Il existe déjà de nombreux partenariats et réseaux internationaux qui lient les institutions de la société civile du Sud et du Nord. Les groupes d'intérêt, les ONG, les groupes environnementaux et les groupements féminins peuvent, grâce aux techniques de communications mondiales (par ex. télécopieur, courrier électronique, Internet), constituer un véritable réseau d'intervenants. Par exemple, en ce qui concerne les questions de main-d'oeuvre que soulève le phénomène de la mondialisation, de tels réseaux d'organisations peuvent surveiller les pratiques d'emploi des sociétés transnationales, au moyen d'activités de suivi à l'échelle locale et d'activités de diffusion de l'information à l'échelle internationale. Avec l'accès à l'information mondiale et aux communications instantanées vient l'élaboration possible d'alliances stratégiques nouvelles ou plus englobantes. Celles-ci peuvent servir de contre-poids aux réseaux mondiaux et aux alliances stratégiques entre les sociétés transnationales et les intérêts financiers. # L'ACDI peut appuyer les alliances stratégiques internationales sociales et de développement en permettant aux groupes d'intervention publique locaux, dont les groupements féminins, d'accéder aux techniques de communications mondiales. 27 Encadré 3: le programme de croissance commun Le débat sur le rôle du gouvernement dans la gestion de la mondialisation se reflète dans celui sur les « retombées communes de la croissance », qui vise à déterminer dans quelles circonstances la croissance économique influe sur la réduction de la pauvreté. Le cas remarquable de l'Asie a montré qu'il peut exister un lien positif entre la croissance, l'équité et la réduction de la pauvreté. Cependant, depuis la période 1985-1990, la croissance soutenue ne semble pas avoir favorisé une réduction accrue de la pauveté (Hunter,1995), ce qui renforce l'argument voulant que la croissance ne soit pas synonyme de réduction de la pauvreté, qu'il existe différentes façons de gérer cette croissance, et que l'ACDI ne doit pas tabler sur « l'effet de ruissellement » en Asie ou ailleurs. Cet argument s'applique plus particulièrement aux projets sur le développement du secteur privé et les services d'infrastructure. En ce qui concerne les risques que la mondialisation présente pour les démunis, les interventions des gouvernements sont capitales. Bien que le gouvernement d'un pays ait peu de contrôle direct sur le capital internationalisé, et bien que la mondialisation fasse peser des contraintes sur ses politiques, il peut néanmoins gérer le processus de la mondialisation à l'échelle du pays. En sa qualité d'institution médiatrice, le gouvernement joue un rôle prépondérant dans les négociations qui permettent de déterminer qui bénéficiera des retombées de la mondialisation et qui en assumera les coûts et les risques. Cette gestion se traduit par des activités touchant la redistribution, l'affectation des investissements publics et sociaux, et la réglementation (voir encadré 3). Par l'application de mesures coercitives, le gouvernement est également l'institution qui attribue des droits, par ex. le droit à l'éducation primaire, le droit à des conditions de travail sûres, ou le « droit » de polluer. # L'ACDI peut apporter son aide en mettant à profit ses compétences dans ce « domaine de gestion », en se fondant sur l'expérience canadienne, les valeurs culturelles canadiennes et sa connaissance des expériences en gestion des pays en développement. Les agents de l'ACDI peuvent prendre d'importantes décisions quant aux initiatives de gestion qui seront soutenues au moyen de projets sur le renforcement des institutions et le développement des capacités. Les syndicats et les groupements féminins sont d'importantes institutions médiatrices. Les travailleurs, et surtout les travailleuses, ne peuvent espérer améliorer, seuls, leurs conditions de travail: le risque de perdre leur emploi est trop grand. Selon le Rapport sur le développement dans le monde de 1995, « l'existence des syndicats libres est l'une des pierres angulaires de tout bon système de relations professionnelles qui vise à concilier la nécessaire compétitivité des entreprises et les aspirations des travailleurs à gagner davantage et à travailler dans de meilleures conditions ». # L'ACDI devrait continuer de collaborer avec les syndicats en tant que partenaires du développement. Ils constituent un élément important dans les rapports de force inégaux entre le capital mondial et les travailleurs, y compris les femmes, dans les pays en développement. 28 Les gouvernements et les syndicats ne sont que deux des nombreuses institutions capables de mener une intervention publique en faveur de la réduction de la pauvreté. Les gouvernements, et plus particulièrement les syndicats, subissent de plus en plus les contraintes de la mondialisation, qui exclut la réglementation et l'organisation. Des analyses de ce phénomène font en effet ressortir les tendances d'une mondialisation déréglementée et anarchique, tendances qui se situent au-delà du contrôle social. Il faut tenir compte des faits suivants dans la sélection des initiatives de développement et des partenaires au sein d'une économie qui se mondialise: En ce qui concerne le développement économique, le problème n'est pas de fixer les bons prix, mais bien d'établir de bonnes règles. Les prix ne sont que le produit de la convergence momentanée des facteurs que sont la technologie, l'écologie, les besoins humains, le revenu disponible, et les mesures institutionnelles, lesquelles déterminent les règles qui régissent les échanges. Le développement économique durable n'est possible que si l'on établit les bonnes règles, à savoir des mesures institutionnelles. (Bromley, 1993) S'agissant des rapports entre la pauvreté et la mondialisation, il importe de promouvoir des mesures institutionnelles sociales aux niveaux local, national, régional et international, qui favoriseront l'insertion des démunis, qui les protégeront contre toute forme d'exploitation, qui appuieront l'égalité des sexes et qui permettront aux groupes défavorisés de développer leurs capacités. Le phénomène de la mondialisation s'est accompagné non d'un rapprochement des pays riches et des pays pauvres, mais d'une nette tendance à l'éloignement, de sorte que le fossé entre les riches et les pauvres s'élargit. Nous en avons maintenant la preuve. Tout au moins, il faudra élaborer des mesures institutionnelles sociales et économiques dans les régions où les démunis sont exposés aux nouveaux risques qui découlent de la mondialisation. En outre, les groupes qui ne sont pas en mesure à l'heure actuelle de bénéficier des retombées de la mondialisation devront avoir accès aux débouchés que cette dernière créera. Nous avons examiné les façons dont l'ACDI, en tant qu'institution médiatrice dans le processus de la mondialisation, peut influer sur ce processus et sur ses résultats à de multiples niveaux. Si les inégalités de la mondialisation et les déséquilibres de la croissance économique des quinze dernières années se poursuivent au-delà de l'an 2000, ils conduiront « à un monde aux excès gargantuesques et aux inégalités humaines et économiques ubuesques » (PNUD, 1996). 29 ANNEXE: LES NOUVEAUX ASPECTS STRUCTURELS DE LA MONDIALISATION Mobilité des capitaux et mondialisation financière Depuis vingt ans, grâce aux progrès de la technologie et à la libéralisation de l'environnement commercial planétaire, les frontières nationales sont de plus en plus perméables aux mouvements de capitaux, de ressources, de biens, de services et d'information, dont le volume augmente en flèche. Le commerce mondial croît en termes réels d'environ 6 % par année depuis les années 1950, soit 50 % plus vite que la production mondiale. Ces chiffres reflètent l'intégration économique de plus en plus poussée des pays commerçants. Auparavant, la croissance des exportations était attribuable à la hausse des exportations de produits manufacturés. Dernièrement, les services sont devenus le principal secteur porteur des échanges internationaux. En effet, on observe une nette baisse de l'importance relative des matières premières et des marchandises dans le commerce international. Ce qui est encore plus remarquable que la croissance des exportations, c'est l'augmentation spectaculaire de l'investissement étranger direct (IED). Le stock de l'IED à l'échelle planétaire a plus que doublé entre 1973 et 1980, et plus que triplé entre 1980 à 1990. Pendant les années 1980, la production mondiale a progressé en moyenne de 2,8 % par année, et le commerce international, de 5,4 %, tandis que les investissements étrangers directs ont augmenté en moyenne de 12,2 % (Harris 1993, Seebach 1993). Dans la deuxième moitié des années 1980, la tendance s'est accélérée et les flux sortants d'IED ont cru trois fois plus vite que les exportations mondiales de marchandises. En 1990, ils atteignaient en moyenne 220 milliards de dollars américains par année. Pendant les années 1970 et 1980, la part des États-Unis dans les investissements directs à l'étranger a continué de fondre, passant de 50,4 % en 1967 à 25,9 % en 1990, le taux de croissance des investissements directs japonais, européens, canadiens et australiens étant supérieur à celui des États-Unis. Si l'on examine la répartition des IED par secteur, on s'aperçoit que l'industrie des services connaît une croissance phénoménale. Globalement, dans les principaux pays industrialisés, elle reçoit désormais plus d'IED que l'industrie manufacturière (Dicken 1992). Les mouvements de capitaux de portefeuille (actions, obligations, etc.) entre pays industrialisés ont cru plus vite que les flux d'IED. Par rapport à la fin des années 1970, les flux sortants annuels moyens avaient augmenté de plus de 200 % au début des années 1980, et de plus de 300 % à la fin des années 1980. Les prêts bancaires outre-frontière ont progressé deux fois plus vite que le commerce international au cours des trente dernières années, et les innovations financières comme les instruments dérivés ont de plus en plus un effet multiplicateur sur le volume des instruments financiers échangés (Cable 1995). Depuis le début des années 1990, une part de plus en plus grande des investissements de portefeuille, y compris ceux des grandes institutions, sont faits dans les soi-disant « marchés émergents ». Si l'on se tourne vers les placements plus liquides, on observe dans les marchés monétaires d'aujourd'hui une mobilité et un volume spectaculaires. Le capital qui peut être mobilisé du jour au lendemain sur les marchés monétaires dépasse de loin ce que n'importe quel gouvernement peut réunir en utilisant ses réserves de change. Comme nous avons pu le constater au début des années 1990, les gouvernements des pays industrialisés, même en se concertant, ne peuvent réussir à contrôler ou à orienter les marchés monétaires. La valeur des opérations de change dans les places financières internationales dépasse un billion de dollars par jour, soit au moins cinquante fois la valeur du commerce mondial et plus que le stock total des réserves de change détenues par tous les gouvernements 10. 10 Ces chiffres doivent être envisagés dans une perspective impressionniste: les opérations de change se faisant très vite, la même somme peut être échangée plusieurs fois par jour. Par définition, les réserves des gouvernements (sauf dans le cas des ajustements aux portefeuilles de devises) ne se négocient pas sur les marchés. 30 Depuis la crise de la dette du début des années 1980, les sources privées de capitaux et de financement exercent une influence de plus en plus grande dans les finances publiques, les prêts gouvernementaux et l'APD pour la plupart des pays en développement. Ceci s'est traduit par une intensification des pressions exercées en faveur de la création d'un milieu favorable aux capitaux, c.-à-d. un environnement stable et relativement exempt de restrictions ou de contrôles gouvernementaux. La stabilité issue de l'équilibre macro-économique, y compris celui de la balance des paiements, et des cadres législatifs fiables tend à profiter à tous les acteurs économiques (alors que l'inflation a tendance à toucher surtout les pauvres). Cependant, les mesures destinées à favoriser l'équilibre macro-économique, à juguler les déficits gouvernementaux et à réduire la dette accumulée se répercutent de façon disproportionnée sur les pauvres. Voilà le lien entre l'ajustement structurel et la mondialisation. Les capitaux étant de plus en plus mobiles, ils deviennent aussi de plus en plus difficiles à imposer. À l'instar du commerce international des marchandises, les mouvements de capitaux ont été facilités par des politiques de libéralisation et de déréglementation, la plus fondamentale étant la libéralisation des taux de change (maintenant déterminés par le marché), qui s'est traduite par l'abandon de l'étalon-or et des taux de change fixes dans les années 1970. On a ensuite assisté dans les années 1980 et 1990 au retrait ou à l'assouplissement des contrôles sur les mouvements de capitaux dans de nombreux pays: abandon de la répression financière, réduction de la participation et du contrôle des gouvernements dans la réglementation des banques et institutions financières, et assouplissement des règles sur les investissements directs et de portefeuille par les étrangers. Les réformes financières en cours dans la plupart des pays visent à créer des marchés plus efficaces et à attirer (et retenir) une partie de la masse grandissante des capitaux d'investissement fortement mobiles. On se préoccupe beaucoup de la volatilité des fonds internationaux et des effets déstabilisateurs qu'ils peuvent avoir sur la balance des paiements et, par voie de conséquence, sur le rendement macro-économique global des pays en développement. La réalité de la mondialisation financière, c'est que les gros mouvements de capitaux d'investissement et l'affectation du financement échappent de plus en plus au contrôle des gouvernements nationaux et des institutions financières internationales (Fonds monétaire international, Banque mondiale et banques régionales de développement). Ce risque d'instabilité a été mis en évidence lors de la crise du peso mexicain en 1994-1995, qui a eu des effets dévastateurs sur les producteurs, les travailleurs et les consommateurs mexicains. Réseaux de production transnationaux Ce qui caractérise le plus le phénomène de mondialisation, c'est la structure en réseau des organisations et la rationalisation géographique de la production. Les sociétés transnationales inventent de complexes structures organisationnelles et géographiques. Les relations entre sociétés prennent des formes de plus en plus variées, depuis les alliances stratégiques internationales aux réseaux complexes de sociétés indépendantes ou quasi indépendantes, en passant par des contrats de sous-traitance. La rationalisation des installations de production à une échelle internationale est un élément dynamique fondamental d'une plus grande circulation de la production. Tout comme les capitaux, les installations de production et d'activités connexes sont plus mobiles. Les nouvelles structures en réseau sont à la fois stables et souples, et elles permettent des économies d'organisation en misant simultanément sur la coopération et la concurrence au sein du réseau. Le système de livraison juste-à-temps en étoile conçu par les entreprises japonaises est un modèle important à plusieurs égards. La production est efficace parce que des fournisseurs se livrent concurrence au sein du réseau, ce qui garantit des prix faibles et une qualité élevée. Par ailleurs, les membres du réseau collaborent les uns avec les autres: ils peuvent avoir accès à de la formation technique et à de l'information sur les normes et spécifications, et peuvent se servir du réseau comme tremplin pour pénétrer des marchés 31 étrangers. Des progrès dynamiques sont aussi réalisés en encourageant tous les membres du réseau à innover: la souplesse même du réseau sert de mécanisme pour mobiliser le savoir et le travail intellectuel. Ces dynamiques n'existent pas dans les structures où les départements subordonnés ne font que remplir des commandes. Les indicateurs traditionnels des statistiques d'État sur le commerce et l'investissement montrent mal ces aspects de la mondialisation. La société transnationale (STN) est le principal moteur de ces réseaux de production. Non seulement elle contrôle et coordonne ses propres réseaux internes complexes à une échelle internationale ou planétaire, mais elle contrôle aussi indirectement bon nombre des réseaux dont elle est membre (Dicken, 1992). Dans les pays en développement, la proportion des investissements effectués par des sociétés transnationales ne cesse de croître. Selon les analyses et les données du PNUD, les STN sont les principaux acteurs du processus d'intégration économique planétaire et contrôlent presque 75 % des échanges mondiaux de produits de base, de produits manufacturés et de services. Environ le tiers de ces échanges sont internes, c.-à-d. qu'ils se font entre les multinationales et leurs sociétés affiliées à l'étranger (PNUD, 1994:87). Au début des années 1980, les échanges entre les 350 premières STN représentaient environ 40 % du commerce mondial (Stewart, 1994). L'organisation des réseaux de production est donc souple, caractérisée par la coopération et la concurrence internes, et axée sur l'innovation. Cependant, elle demeure fondamentalement hiérarchique, le leader de la technologie étant habituellement fermement aux commandes. Les activités et techniques de production peuvent être transférées d'un endroit à l'autre, mais la société chef de file conserve les commandes grâce à sa capacité de R-D, à la fourniture de machinerie (le résultat d'une fabrication complexe) et à sa capacité de distribution et de marketing. Les contradictions inhérentes à ces réseaux sont, d'un côté, les retombées et possibilités pour les participants, et de l'autre, la hiérarchie et la dépendance. Un autre aspect du réseau de production, outre la prolifération des liens transfrontières entre les sociétés mères et leurs sociétés affiliées et fournisseurs, est l'expansion du nombre d'alliances internationales. Alors que les années 1980 ont été marquées par les fusions ou acquisitions de grandes sociétés, ce qui a donné naissance à d'immenses conglomérats (dont certains ont dû se « restructurer » ou se réorienter depuis), on assiste dans les années 1990 à une augmentation des alliances dites stratégiques. Ces alliances ont été créées pour faire face à l'augmentation des coûts de la recherche et développement (R-D), aux exigences des partenaires concernant l'implantation d'entreprises, et au besoin de répondre plus efficacement aux préférences locales des consommateurs et à leurs attentes pour un meilleur service après-vente. Les alliances, y compris entre concurrents, prennent la forme d'entreprises conjointes, de marchés de sous-traitance, et d'accords de licence et de R-D. Elles donnent lieu à de complexes réseaux d'information transnationaux sur la recherche, la production et le marketing. En 1993, selon la CNUCED, les ventes des sociétés affiliées à des STN se sont élevées à 5,5 billions de dollars américains, tandis que la valeur des échanges mondiaux de biens et services s'élevait à 4 billions de dollars américains. C'est-à-dire que la production financée par l'IED et attribuable aux alliances stratégiques transfrontières dépasse celle attribuable au commerce (Dunning, 1993:4). 32 BIBLIOGRAPHIE Agence canadienne de développement international. Politique de l'ACDI en matière d'intégration de la femme au développement et d'égalité des sexes, Hull (Québec), 1995. Agence canadienne de développement international. Politique de l'ACDI sur la réduction de la pauvreté, Hull (Québec), 1995. Agence canadienne de développement international et Fondation pour la formation internationale. Forum Report: Poverty Reduction Strategies for Development, Toronto, 13 et 14 juin 1995. Banque africaine de développement. Gender Indicators of Developing Asian and Pacific Countries. Manille, 1993. Banque mondiale. Rapport sur le développement dans le monde 1995: Le monde du travail dans une économie sans frontières, Washington, 1995. Banque mondiale. China: South-western Poverty Reduction Project, Staff Appraisal Report, Agriculture Operations Division, China and Mongolia Department, East Asia and Pacific Regional Office, Washington, 1995. Bernard, Mitchell et Ravenhill, John. « Beyond Product Cycles and Flying Geese: Regionalisation, Hierarchy and the Industrialisation of East Asia », World Politics, vol. 47, no 2, 1995, pp. 171-209. Bernard, Mitchell. The Pattern and Implications of Transnational Production in Eastern Asia, University of Toronto/York University, Joint Centre for Asia Pacific Studies, Eastern Asia Policy Papers, monographie, 1994. Bromley, Daniel W. « Reconstituting Economic Systems: Institutions in National Economic Development », Development Policy Review, vol. 11, no 2, 1993, pp. 131-151. Cable, Vincent. « The Diminished Nation State: A Study in the Loss of Economic Power », Daedalus, vol. 124, no 2, 1995. Catagay, Nilufer, Elson, Diane et Grown, Caren. « Introduction: Gender, Adjustment and Macroeconomics », World Development, numéro spécial, novembre 1995. Christie, Keith H. Globalisation and Public Policy in Canada: In Search of a Paradigm, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, document d'orientation no 93/01, Ottawa, 1993. Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement, Rapport sur l'investissement dans le monde 1994. New York et Genève, United Nations, 1994. Conseil économique et social des Nations Unies. Effective Mobilisation and Integration of Women in Development: Gender Issues in Macroeconomic Policy-Making and Development Planning, Rapport du Secrétaire général, session de fond de 1995, Genève, 26 juin - 28 juillet 1995. Dicken, Peter. Global Shift: The Internationalisation of Economic Activity, Second Edition, Londres, Paul Chapman Publishing Ltd. 1992. Dunning, J.H. « Globalisation: The Challenge for National Economic Regimes », Dublin: The Economic and Social Research Institute, 1993. Elson, Diane. « From Survival Strategies to Transformation Strategies: Women's Needs and Structural Adjustment ». In: L. Beneria and S. Feldman (eds.), Unequal Burden, Economic Crisis, Persistent Poverty and Women's Work, Chapter 2, Oxford: Westview Press, 1992. Elson, Diane. « Gender-Aware Analysis and Development Economics », Journal of International Development, vol. 5, no 2, 1993, pp. 237-247. Elson, Diane. « Micro, Meso, Macro: Gender and Economic Analysis in the Context of Policy Reform ». In: Isabella Bakker (ed.), The Strategic Silence: Gender and Economic Policy, Londres, Zed Press, 1993. Elson, Diane. « Public Action, Poverty and Development in a Gender-Aware Analysis ». In: Joseph Mullen (ed.). Rural Poverty Alleviation, Avebury, Aldershot, 1995. 33 Elson, Diane. « Unpaid Labour, Macroeconomic Adjustment and Macroeconomic Strategies », Gender Analysis and Development Economics Programme, Agence suédoise de développement international, Working Paper No. 3, mai 1993. Elson, Diane and McGee, Rosemary. Gender Equality, Bilateral Programme Assistance and Structural Adjustment: Policy and Procedures, ébauche, sans date. Esping-Anderson, Gusta. After the Golden Age: The Future of the Welfare State in the New Global Order, Sommet mondial pour le développement social. Occasional Paper No. 7, Genève, Institut de recherche des Nations Unies pour le développement social, 1994. FIDA. The State of World Rural Poverty: An Inquiry into Its Causes and Consequences. I. Jazairay, M. Alamgir et T. Pannuccio (eds.), New York, New York University Press, 1992. Ghosh, Jayanti. Structural Adjustment and Female Employment: Issues Relating to Rural Women, Paper presented at the ILO/National Commission for Women National Workshop on Employment, Equality and Impact of Economic Reform for Women, sans date. Goetz, Anne Marie. Macro-Meso-Micro Linkages: Understanding Gendered Institutional Structures and Practices. Contribution to the SAGA Workshop on Gender and Economic Reform in Africa, 13 octobre 1995. Goetz, Anne Marie. Disorganising Gender: Women Development Agents in State and NGO Poverty-Reduction Programmes in Bangladesh, ébauche, octobre 1995. Gouvernement du Canada. Le Canada dans le monde - Énoncé du gouvernement. Ottawa, 1995. Harris, Richard G. « Globalisation, Trade and Income », Canadian Journal of Economics, vol. 26, no 4, 1993, pp. 775-776. Hay, Keith et Keller-Herzog, Angela. Poverty Reduction and the Bangladesh Garment Export Sector, Hull (Québec), Agence canadienne de développement international, 1994. Helleiner, Eric. Regionalisation in the International Political Economy: A Comparative Perspective, University of Toronto York University, Joint Centre for Asia Pacific Studies. Eastern Asia Policy Papers. monographie, 1994. Heyzer, Noeleen et Sen, Gita (eds.). Gender, Economic Growth and Poverty: Market Growth and State Planning in Asia and the Pacific. Centre de développement pour l'Asie et le Pacifique, New Delhi, Kali for Women, 1994. Humphrey, John. Gender and Work in the Third World: Sexual Divisions in Brazilian Industry, Londres, Tavistock Publications, 1987. Hunter, Brian. Growth, Equity & Poverty: Asian Experience, Paper for Conference on Japanese & Canadian Official Development Assistance, Strategic Approaches for Asia Pacific, Montréal, 1995. Institut de recherche des Nations Unies pour le développement social. States of Disarray: The Social Effects of Globalisation, Rapport présenté par l'Institut au Sommet mondial pour le développement social, Londres, Banson, 1995. Joekes, Susan. Trade-Related Employment for Women in Industry and Services in Developing Countries, Sommet mondial pour le développement social, document hors-série no 5. Genève, Institut de recherche des Nations Unies pour le développement social, 1995. Keller-Herzog, Angela et Munachonga, Monica. Gender and the Micro-Meso-Macro Linkages of Structural Adjustment: Zambia Case Study, document préparé pour l'Agence canadienne de développement international dans le cadre du Programme spécial d'assistance en faveur de l'Afrique, Hull (Québec), 1995. Mies, Maria. Patriarchy and Accumulation on a World Scale, Londres, Zed Books, 1986 Mies, Maria. The Lace Makers of Narsapur: Indian Housewives Produce for the World Market, étude préparée pour l'Organisation internationale du travail dans le cadre du Programme mondial de l'emploi, Londres, Zed Press, 1982. 34 Milimo, John. Participatory Poverty Assessment, vol. 4, Zambia Poverty Assessment, Washington, Banque mondiale, 1995. Moser, Caroline O.N. Confronting Crisis: A Comparative Study of Household Responses to Poverty and Vulnerability in four Poor Urban Communities, Environmentally Sustainable development Studies and Monographs Series No. 8. Washington, Banque mondiale, 1996. Nations Unies. The World's Women 1995: Trends and Statistics. Department for Economic and Social Information and Policy Analysis, Statistical Division, New York, 1995. OCDE. Globalisation and Linkages to 2020: Challenges and Opportunities for OECD Countries. Réunion internationale d'experts de haut niveau, résumé des discussions, juin 1996. OIT. World of Work. Genève, 1994. Peterson, V. Spike et Runyan, Anne S. Global Gender Issues, Boulder, Colorado, Westview Press, 1993. Programme de développement des Nations Unies, Rapport mondial sur le développement humain 1995, New York, Oxford University Press, 1995. Programme de développement des Nations Unies, Rapport mondial sur le développement humain 1996, New York, Oxford University Press, 1996. Seebach, Dennis. « Globalisation: The Impact on the Trade and Investment Dynamic », ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, document d'orientation 93/01, Ottawa, 1993. Stewart, F. « Globalisation, Poverty and International Action », document préparé pour la Table ronde du PNUD sur le changement mondial. Stockholm, 1994. Uhn Cho. « Economic Growth and Poverty in Korea: A Gender Perspective », In Noeleen Heyzer et Sen, Gita (eds.). Gender, Economic Growth and Poverty: Market Growth and State Planning in Asia and the Pacific. Centre de développement pour l'Asie et le Pacifique, New Delhi, Kali for Women, 1994. Women in Development Europe (WIDE). Document préparatoire pour la Quatrième conférence mondiale des Nations Unies sur les femmes à Beijing, Network Women in Development Europe, Alternative Economics from a European Perspective, ébauche, 23 juin 1995. 35 36 37 38 39 40 41