7 partie Les forces liées à la rotation Applications à la terre.
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7 partie Les forces liées à la rotation Applications à la terre.
7ème partie Les forces liées à la rotation Applications à la terre. Notes de cours de Licence de Physique de A. Colin de Verdière Pour un physicien observant des résultats d’expériences sur la terre, la rotation de celle-ci pose problème puisque le référentiel terrestre n’étant pas inertiel, on ne peut pas appliquer la 2ème loi de Newton. Le but de ce chapitre est de voir comment la 2ème loi doit être modifiée lorsque le référentiel est en rotation solide. Pour autant, observateurs terriens, nous utilisons la 2ème loi telle quelle en permanence ! Cela veut il donc dire que les modifications cherchées ne sont pas très importantes? Ce n’est pas si simple et on va voir qu’elles peuvent devenir importantes sur des échelles spatiales suffisamment grandes. Aux échelles de temps et d’espace de nos activités quotidiennes, on serait bien en mal de trouver une expérience de laboratoire qui révèle que la terre tourne*. Et pourtant, cette terre tourne vite : c’est à l’équateur que vous êtes le plus éloigné de l’axe de rotation de la terre et votre vitesse vaut Ω RT ≈ 466 m s-1 où RT le rayon terrestre ≈ 6 370 km et Ω = 7,292 10-5 s-1. C’est pour les mouvements de grande échelle de temps et d’espace (typiquement des temps supérieurs à la journée et des distances supérieures à quelques kilomètres) que la rotation induit une nouvelle dynamique. On a déjà vu dans la partie 6 un effet de la rotation qui a un peu déformé la terre et on a déjà montré comment on peut additionner (vectoriellement) l’accélération centrifuge et la gravité pour obtenir une gravité effective qui n’est plus radiale mais on ne voit pas bien de nouveaux effets qui pourraient résulter de cette gravité légèrement corrigée des effets de la rotation. Y a t-il autre chose ? La façon la plus directe de voir de nouveaux effets est de considérer une particule libre dans un repère inertiel. Sa trajectoire rectiligne uniforme située dans le plan équatorial xy est indiquée ci-dessous. J’ai pris une vitesse de 1 m s-1 et indiqué la position de la particule tous les mois. L’autre trajectoire en forme de spirale est la trajectoire de la même particule observée depuis le référentiel terrestre. Le vecteur Ω, perpendiculaire à la figure, pointe vers le * Les expériences de lavabos qui se videraient dans des sens différents selon l’hémisphère Nord ou Sud sont citées à tort. Mécanique Physique (S2) 7ème partie – page 1 lecteur et le référentiel tourne dans le sens positif (contraire aux aiguilles d’une montre). La particule a été lâchée de l’origine prise sur l’axe de rotation à t = 0. Si la particule était immobile dans le repère inertiel, sa trajectoire dans le repère terrestre serait évidemment un cercle mais décrit dans le sens opposé (vitesse angulaire - Ω) : c’est le cas par exemple des étoiles fixes vues de la terre. Cette spirale vue par un observateur terrestre est évidemment interprétée par cet observateur comme le résultat de forces s’appliquant sur cette particule car sans ces forces la particule devrait se déplacer en ligne droite. Comme il n’y a aucune force dans le repère inertiel on s’aperçoit que c’est la place de l’observateur dans le référentiel en rotation qui est la cause de ces forces, des pseudo-forces car uniquement dues au choix du référentiel tournant. Vous remarquerez que ces forces sont faibles car l’échelle est graduée en milliers de km et que la déviation sur la droite qui apparaît ne devient significative qu’au bout d’un mois. Pour aller plus loin on peut se dire que si les positions des points de la spirale sont connues en fonction du temps, on peut avoir accès aux pseudo-forces en dérivant les positions deux fois par rapport au temps. Si on connaît la position d’un point P(x,y) dans un repère inertiel, le premier objectif est donc de trouver les coordonnées de ce même point P dans un repère qui a tourné d’un certain angle θ (cad de reconstruire la figure ci dessus). y y’ P x’ ey’ ex’ H θ x O Sur le dessin, l’abscisse x’ de P est tout simplement OH où H est la projection orthogonale de P sur Ox’. Ainsi si ex’ est le vecteur unitaire selon Ox’ : x’ = OP ⋅ ex’ Les coordonnées de ex’ dans le repère Oxy sont de même les projections orthogonales de ex’ sur Ox et Oy à savoir cos θ et sin θ respectivement. En effectuant le produit scalaire ci dessus on trouve : x’ = x cos θ + y sin θ et de même : y’ = - x sin θ + y cos θ [car ey’ a pour coordonnées (- sin θ, cos θ) et y’ = OP ⋅ ey’]. Maintenant que l’on sait obtenir les coordonnées d’un point dans un référentiel x’y’ tourné d’un angle θ par rapport à un autre, on voit immédiatement que l’on sait obtenir les Mécanique Physique (S2) 7ème partie – page 2 coordonnées dans un repère en rotation solide à la vitesse angulaire Ω dont l’axe z est perpendiculaire au plan xy. On peut choisir l’origine des angles telle que : θ = Ωt et on a : x ' = x cos Ωt + y sin Ωt y' = − x sin Ωt + y cos Ωt z ' = z (1) Les coordonnées dans la direction z de l’axe de rotation ne changent évidemment pas. Voilà cette formule de changement de coordonnées est la seule chose dont nous ayons besoin pour relier les points d’une trajectoire dans un repère inertiel et dans un repère tournant. Maintenant si une particule est libre dans le repère inertiel, sa trajectoire est : x = ut y=0 z=0 où on a choisi x = 0 à t = 0 par simplicité. En injectant dans (1), la trajectoire dans le repère tournant obéit à : x’ = ut cos Ωt y’ = - ut sin Ωt z’ = 0 (2) L’équation en coordonnées polaires r’, θ permet d’apprécier que la trajectoire est celle de la spirale d’Archimède : r'= u t θ = −Ωt ⇒ r'= − u θ Ω Mais ce sont les forces qui nous intéressent. Dans le repère inertiel aucune car &x& = 0. Dans le repère en rotation, la vitesse vaut : et l’accélération : x& ' = u cos Ωt − u Ωt sin Ωt y& ' = − u sin Ωt − u Ωt cos Ωt z& ' = 0 (3) &x&' = −2u Ω sin Ωt − ut Ω 2 cos Ωt 2 &y&' = −2u Ω sin Ωt + ut Ω sin Ωt &z&' = 0 (3) Visiblement des accélérations et donc des forces apparaissent un peu partout sauf dans la direction z’ (parallèle à Ω). Cette expression (4) n’est pas très intuitive et on aimerait retrouver par exemple l’accélération centrifuge qui ne dépend que de la position par rapport à Mécanique Physique (S2) 7ème partie – page 3 l’axe de rotation (ici l’origine). Peut-on éliminer le temps dans (4) et obtenir une expression qui ne dépend que des positions et vitesses instantanées ? On voit que la vitesse (3) peut s’écrire** : u cos Ωt = x& ' - Ωy’ - u sin Ωt = y& ' + Ω x’ 0 = z’ (5) et si on substitue les termes en u cos Ωt et u sin Ωt dans (4) grâce à cette relation (5) on obtient la relation cherchée valable pour tout t : &x&'−2Ωy& '−Ω 2 x ' = 0 2 &y&'+2Ωx& '−Ω y' = 0 &z&' = 0 (6) Le troisième terme à gauche est familier et pas autre chose que l’accélération centripète - Ω2 R’ (R’ vecteur perpendiculaire à Ω) déjà rencontrée. Le nouveau terme est le deuxième de − 2 Ω y& ' composantes + 2 Ω x& ' . Maintenant peut on écrire le résultat sous la forme compacte 0 vectorielle ? Si on dénote par v’ la vitesse de la particule dans le repère en rotation, ce terme 0 se ré-écrit vectoriellement 2 Ω × v' puisque Ω = 0 . Ce terme s’appelle l’accélération de Ω Coriolis. Ainsi l’expression (6) fait donc apparaître deux forces dans le repère en rotation si on fait passer les deux termes à droite (pour une particule de masse m) : 2 m a’ = − Ω2 ×4 m3 v' + m R' 1Ω 23 124 Force de Coriolis • Dès qu’il existe un mouvement dans le repère en rotation apparaît une force perpendiculaire à v’ et sur la droite de v’ lorsque Ω pointe vers le lecteur. Elle est visiblement responsable de la déviation à droite de la trajectoire alors que la force centrifuge « écarte » la particule de l’origine. (7) Force centrifuge v’ Ω m • Si v’ parallèle à Ω, la force est nulle. • Comme cette force est perpendiculaire à v, elle ne travaille pas. Force de Coriolis Note : Comme u cos Ωt et - u sin Ωt sont les composantes de la vitesse inertielle v dans le repère Ox’y’, (5) se réécrit vectoriellement : V = V’ + Ω × r’ ** Mécanique Physique (S2) 7ème partie – page 4 Toute cette « dérivation » a été faite pour une particule libre, non accélérée, dans un repère inertiel xy. Que se passe-t-il si la particule est soumise à des forces F donc accélérée dans le repère inertiel ? Comme l’expression (6) est instantanée, on voit qu’il y aura à droite un seul terme supplémentaire l’accélération propre de la particule et (6) se réécrira vectoriellement : a = a'+2Ω × V '−Ω 2 R ' (8) L’accélération dans le repère inertiel a causée par des forces F cause des accélérations relatives a’ dues aux forces F mais dues aussi aux pseudo-forces de sorte que (7) se généralise à: ma’ = F – 2 Ω × mv’ + m Ω2R’ (9) Si on réécrit (9) en introduisant la gravité effective ge : ge = g + Ω2 R’ ma' = −2Ω × mv '+ mg e + F ' (10) F’ représentant les forces autres que le poids. On voit sur (10) que la dynamique étudiée dans un référentiel en rotation fait intervenir essentiellement ce nouveau terme de Coriolis qui semble compliquer le problème. D’un autre côté on en voit pas bien comment étudier le mouvement d’objets sur la terre à partir de référentiels inertiels extérieurs à la terre. Ce n’est pas pratique compte tenu des énormes vitesses de rotation terrestre comparées aux vitesses sur la terre. Tout d’abord dans les mouvements de la vie ordinaire, a’ (d’ordre U2/L si la vitesse d’une particule change de U sur une longueur L) est beaucoup plus grande que l’accélération de Coriolis 2ΩU : U2 /L U = >> 1 2ΩU 2ΩL U/2ΩL, nombre de Rossby (qui était un météorologiste du milieu du 20ème siècle). Pour des mouvements atmosphériques qui ont des vitesses U ∼ 10 m s-1 et des échelles L ∼ 1000 km typiques des dépressions des latitudes tempérées U/2ΩL = 7 10-2 : la force de Coriolis domine les accélérations relatives à ces échelles. Par contraste calculez le nombre de Rossby pour l’écoulement de votre lavabo et concluez sur l’importance de la rotation de la terre. Quelques exemples : (i) Considérons un lac gelé au pôle Nord. On lance un palet de Hockey sur la glace. Si on néglige le frottement, le poids est équilibré par la réaction normale à la surface et donc la force v’ Force de de Coriolis est la seule force horizontale. Comme elle est A Coriolis perpendiculaire à la vitesse et à droite, elle est centripète si la trajectoire s’effectue dans le sens des aiguilles d’une montre. v' 2 Donc = 2Ωv' dans la direction du centre de la trajectoire A alors que dans la r dv' = 0. Ainsi v’ est constante et la trajectoire est un cercle de direction tangentielle dt Mécanique Physique (S2) 7ème partie – page 5 rayon r = v’/2Ω. Imaginons que ce palet parte à 50 km/h, il exécutera alors un cercle dit « inertiel » de rayon proche de 100 km. Voilà c’est une des originalités des effets de la rotation de la terre. Si la trajectoire d’un palet au pôle Nord est d’un intérêt somme tout limité, mentionnons que ce type de mouvements dits inertiels s’observe aussi dans l’océan et dans l’atmosphère. (ii) Laissons tomber un caillou dans un puits de mine à l’équateur (pour simplifier) sans vitesse initiale (v’ = 0). Ω y x ⊗ Le puits de mine est orienté sur la verticale locale. Le mouvement sur cette verticale (axe y) est peu influencé par la force de Coriolis et donc v’y ≈ gt. Dans la direction x on a alors : &x&' = 2Ω v’y = 2 Ω gt 1 x’ = Ω gt3 3 soit : Comme le déplacement vertical y’ ≈ 1 2 gt , on peut éliminer t pour obtenir : 2 x= 23 / 2 Ω 3 / 2 y 3 g Le déplacement est dans la direction Est (x>0) et mesurable. Notes : (a) Vérifiez a posteriori l’ approximation faite dans la direction y (2Ω x& ' << g). (b) On peut aussi voir ce problème dans un repère inertiel. La particule qui conserve son moment cinétique « m r v » voit v augmenter quand r diminue sur une trajectoire qui est une ellipse comme on l’a vu dans le chapitre gravitation. Comme v augmente alors que la vitesse azimutale de la terre Ωr diminue avec r, on voit que le caillou tombe à l’est de la verticale locale. (iii) Les observations barométriques à l’échelle de l’Europe on permis dès le début du 20ème siècle de tracer des cartes d’égale pression dans un plan horizontal : En un point A quelconque la force de pression est dirigée vers un bas (low) de pression. Lorsqu’elle est équilibrée par la force de Coriolis, le mouvement s’effectue le long des isobares (courbe p = cste) et donc dans le sens inverse des aiguilles d’une montre dans l’hémisphère Nord autour d’une dépression (le sens opposé autour d’un haut de pression (un anticyclone). Le vent calculé par cet équilibre est une bonne approximation de celui observé à 1 km au-dessus de la surface de la terre. Isobare Low -∇p Force de A Coriolis Une dépression cyclonique de l’hémisphère nord Mécanique Physique (S2) 7ème partie – page 6