Ghost Road : un voyage imposant

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Ghost Road : un voyage imposant
Nieuwe Rotterdamsche Courant
21.9.2012
Ghost Road : un voyage imposant
«Il faut de la friction, les cultures doivent s’affronter. Alors seulement il peut être question de quelque
chose de neuf et de nouveaux développements surgissent.» C’est par ces mots que le bourgmestre de
Rotterdam Aboutaleb a inauguré hier soir le festival de théâtre De Keuze du Rotterdamse Schouwburg.
Ce festival de douze jours qui a débuté sous le nom de Internationale Keuze, amène à Rotterdam du
théâtre surprenant et novateur. Le directeur Jan Zoet donne au festival une belle devise : «The freedom
to do what exactly ?»
Liberté : il s’agit de cela, tant sociale qu’artistique. Aboutaleb a souligné qu’une ville comme Rotterdam
qui compte 174 nationalités est «une ville de liberté». Une liberté qui ne peut être atteinte que lorsque
«chacun écoute les arguments de l’autre». Ecouter est également le mot-clé de l’imposant spectacle
d’ouverture Ghost Road de la troupe flamande LOD/Muziektheater. Dans l’obscurité lointaine du
plateau pauvrement éclairé, l’actrice Viviane De Muynck raconte sa rencontre fictive avec la légendaire
actrice américaine Marta Becket. De Muynck (66) a un passé théâtral impressionnant. Sa voix est
rauque, elle a vécu.
Marta Becket a quitté New York et entamé une nouvelle vie dans une «ghost town» de Califonie. Elle a
transformé un théâtre délabré en un bâtiment florissant qu’elle a baptisé Amargosa Opera House. Elle
mène à présent une vie retirée, personne ne peut voir sa vieillesse, elle a aujourd’hui 88 ans. Le fait
que De Muynck et son metteur en scène Fabrice Murgia aient réussi à retrouver la trace de l’actrice
donne lieu à une scène impressionnante où les fantômes du passé ne veulent pas trouver le repos.
Jeunesse et vieillesse, jadis et aujourd’hui : Ghost Road tourne autour de ça. Des images vidéo et
des sons du compositeur Dominique Pauwels transforment le spectacle en un «road movie» apaisé,
presque féérique. Des images filmées de la Vallée de la Mort se déroulent dans le décor. La cantatrice
Jacqueline Van Quaille évolue dans un royaume des ombres brumeux, comme si sa voix sortait des
enfers. Le spectateur part en voyage avec De Muynck et vit de manière sensationnelle le vide de
l’Ouest américain où se dressent des maisons qui furent jadis des maisons de rêve mais qui sont
maintenant réduites à l’état d’épaves.
Viviane De Muynck atteint avec sa voix à un apaisement intense. Le tragique de la vieillesse est si
lugubrement grand que les mots de théâtre sont bien obligés de chuchoter. Ghost Road montre le côté
obscur d’ l’Amérique, le pays de la liberté inconnue. Ce pays est à présent pris dans l’étau de cet idéal
de liberté révolu. Ce rêve n’existe plus qu’au théâtre.
Kester Freriks