quel futur pour le commerce de proximité
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QUEL FUTUR POUR LE COMMERCE DE PROXIMITÉ ? DYNAMIQUES VAUCLUSE 18 Marquée par d'importantes élections locales, 2008 sera une année stratégique pour le commerce de proximité. Trop souvent oublié des programmes des candidats, il doit faire son entrée sur la scène politique locale. La CCI a lancé dès cette année des actions pour placer le commerce au cœur des préoccupations de nos futurs élus. Elle a ainsi réalisé des études et organise les "Forums du commerce" dans tout le département. Avant de lancer le débat, il faut savoir de quoi l'on parle. Pour mieux comprendre le commerce de proximité, la CCI a réalisé de très importantes études. Déjà, à l'été 2004, elle publiait le Schéma de développement commercial. Le SDC avait deux missions. D'une part dresser un état des lieux très précis du commerce dans l'ensemble du département. Et d'autre part, donner les chiffres de progression de chaque type de distribution pour permettre de conserver les grands équilibres d'ici 2010 entre les différents types de commerce, notamment entre magasins de proximité et magasins de périphérie. En 2006, la grande distribution avait largement dépassé les chiffres prévus au schéma au grand dam de nombreux acteurs locaux. Aujourd'hui, la CCI passe à la vitesse supérieure. En prévision des élections locales importantes de 2008, les municipales et les cantonales, la chambre organise dans les proc h a i n e s semaines cinq "Forums du commerce" dans tout le Vaucluse. Elle a lancé une vaste étude qualitative dont les résultats seront présentés lors des Forums et disponibles en intégralité sur le web. En voici les principaux enseignements. Aujourd'hui, la CCI passe à la vitesse supérieure MUTATIONS SOCIÉTALES CONSÉQUENCES POUR LE COMMERCE Le commerce est au service des consommateurs. Les modes de vie de ces derniers ont bien changé en quelques années. Ils ouvrent de nouvelles perspectives au commerce de proximité. L'enquête d'intelligence économique commandée par la CCI sur l'ensemble des études et des actions entreprises en France et en Europe apporte de très intéressantes pistes de réflexion qui sont autant de nouveaux gisements de clientèle. Les seniors : nouvelle catégorie de consommateurs à séduire Vu l'actualité sur les régimes de retraites, difficile d'ignorer le phénomène du papy boom. Les retraités et futurs retraités se caractérisent le plus souvent comme une clientèle exigeante, qui réclame un commerce de qualité, de l'accueil et du conseil. Ils disposent de plus de temps pour effectuer leurs achats. Une large partie d'entre eux bénéficie de revenus supérieurs à la moyenne nationale. Certains d'entre eux disposent d'une mobilité réduite propice au commerce de proximité. Famille recomposée, elle consomme autrement Si la population du Vaucluse croît de près de 1% par an, le nombre de ménages connaît une augmentation beaucoup plus importante. Le nombre des familles monoparentales et des célibataires ne cesse de croître. Ce phénomène a un impact positif sur la consommation de biens d'équipement, d’énergie, de transport, de télécommunication, de loisirs… Le travail féminin entraîne une nouvelle demande de services comme la restauration hors-foyers, l'aide à domicile, les livraisons à domicile. Il a fortement développé les achats sur le trajet domiciletravail, l'élargissement des horaires d'ouverture des commerces et la propension à commander en ligne. Organisation personnelle : un nouveau rapport au temps Une part croissante de la population optimise son emploi du temps au détriment du temps consacré aux achats. Cette nouvelle donne est préjudiciable aux hypermarchés. Les consommateurs se disent de plus en plus réticents à effectuer le trajet pour s'y rendre, à affronter le gigantisme des lieux et l'attente aux caisses. Le “rurbain” : un consommateur exigeant En Vaucluse, le nombre de “rurbains”, ces actifs qui travaillent à la ville et habitent à la campagne, est particulièrement important. Cette population issue des villes possède les mêmes exigences que la population urbaine. Elle attend, en zone rurale et périurbaine, un commerce sophistiqué. DYNAMIQUES VAUCLUSE 20 LES ACTEURS À CHACUN SON RÔLE Une relance du commerce de centre-ville ne peut s'effectuer qu'avec la participation active de tous ses acteurs. Chacun a son rôle à jouer et sa part de responsabilité dans la réussite d'un projet. Les commerçants Immigration : de l'ethnique à l'exotique La diversification ethnique de la population française génère la création de commerces, essentiellement en centre-ville. Si les boucheries halal, les épiceries maghrébines, les traiteurs et épiceries asiatiques répondent à une demande de personnes issues de l'immigration, elles satisfont une part croissante de consommateurs à la recherche de produits exotiques. Dans leur sillage apparaissent aujourd'hui des librairies anglophones, turques, les magasins de cosmétiques pour les populations subsahariennes en attendant l'arrivée de commerces d'autres traditions. Quête de sens et consommation responsable Toujours plus éduqué et instruit, le consommateur devient consom'acteur. Il recherche de plus en plus de produits bio et issus du commerce équitable pour son bien-être et celui de la planète. Une partie de la population dénonce la “malbouffe", motivée par les scandales alimentaires. Elle recherche l'expertise du commerçant garant de la qualité de l'origine des produits. De nouvelles marques et de nouveaux positionnements de distributeurs apparaissent et sont encore à inventer. Un grand nombre de commerçants ont su prendre leur destin en main : spécialisation, qualité reconnue, services aux clients. Ceux qui vont céder leurs magasins doivent tout mettre en œuvre pour valoriser leur fond de commerce, pour eux et leur successeur. La nouvelle génération doit bien capitaliser son entreprise, intégrer les données marketing et veiller à la formation professionnelle. Les associations de commerçants Les associations de commerçants ont un rôle crucial à jouer dans des actions constructives : recruter de nouveaux adhérents car "l'union fait la force", créer des réseaux d'influence, faire pression sur les décisions d'urbanisme et les représentants en CDEC, se regrouper autour de projets subventionnables, travailler à la rénovation des commerces et aux animations de centre-ville, intégrer et accompagner les nouveaux commerçants… Les consommateurs Constitués en association, ils sont aujourd'hui devenus de véritables leviers d'opinion auprès des décideurs publics. Ils font avancer les grandes questions de société dont beaucoup sont favorables au commerce de proximité. La CCI La CCI, comme ce dossier l'atteste, a la volonté d'être un partenaire compétent et opérationnel pour tous les acteurs du commerce dans le département. Par sa mission et ses DYNAMIQUES VAUCLUSE 21 moyens institutionnels, elle investit dans les études d'orientation du commerce, soutient les actions de communication et de promotion des centres-villes, pèse sur les instances décisionnaires en matière d'aménagement du territoire et d’urbanisme, sur les instances d'autorisation d'ouverture des GMS, favorise la rencontre avec des promoteurs et des financeurs d'espaces commerciaux en centre-ville. Ses élus au commerce peuvent être des relais d'opinion, d'information et de formation. Les services aux entreprises apportent aux commerçants le conseil à la création, au développement et à la transmission. Les collectivités territoriales Dans les faits, les collectivités territoriales sont les véritables maîtres du jeu et leurs décisions ont des conséquences à long terme. Le poids du commerce y est actuellement sous représenté. Il revient aux commerçants et à leurs associations de faire entendre leur voix. Aujourd’hui encore concurrente du commerce de proximité, la grande distribution pourra devenir demain son partenaire grâce à Internet ou en ouvrant des magasins de proximité de plus petite taille. Certaines enseignes ont compris que leur domination entraînait des contreparties. Les demandes de compensation des commerçants dans l'intérêt général peuvent passer aux travers d'instances institutionnelles. Les fournisseurs Par la qualité de l'offre, la création de nouveaux services, l'animation commerciale voire, dans l'investissement de travaux commerciaux, les fournisseurs sont des partenaires disposant d'études et de moyens financiers pour participer à la dynamisation des centres-villes. DYNAMIQUES VAUCLUSE 22 Paupérisation : l'explosion du premier prix Forme de distribution apparue il y a moins de quinze ans, le hard discount a su répondre à cette demande de produits “premier prix” dans des commerces de taille moyenne proches des zones de consommation à revenus modestes. Cette formule continue à prendre des parts de marché. Achat plaisir : le retour du lèche-vitrine Alors que la consommation en grande surface s'apparente à une corvée, le shopping en ville redevient un plaisir. Le centre-ville offre, plus que des produits, du contact et de la convivialité. Les rues commerçantes ont tout à gagner à organiser leurs vitrines et leur environnement en spectacle permanent. Internet : une deuxième boutique Plus de la moitié des ménages disposent de l'ADSL. Les commerçants ont tout à découvrir d'un outil qui leur permet d'informer leurs clients, d'élargir leur offre aux produits non vendus en boutique, de se mettre en valeur individuellement et collectivement. ENFIN DES MANAGERS DE CENTRE-VILLE DANS LE VAUCLUSE ? Parmi les nombreuses pistes proposées par l’étude de la CCI pour dynamiser le commerce de cœur de ville, le poste de manager de centre-ville a déjà fait ses preuves chez nos voisins européens, notamment britanniques et belges. Ces spécialistes sont apparus en France à la fin des années 90. Leur activité repose sur la réunion des différents acteurs économiques du centre-ville : associations de commerçants, municipalités, chambres consulaires. Une nécessité dans les grandes villes du Vaucluse ? Le profil des managers est très variable mais leur objectif reste partout la dynamisation des cœurs de villes pour éviter la fuite des consommateurs vers la périphérie. Le manager assure la promotion et l’animation du site et gère les relations entre le commerce et l’espace public. La garantie de l’action du manager tient pour l’essentiel à son indépendance : il doit agir dans l’intérêt du commerce en général, au-delà des intérêts particuliers des commerçants. Il joue un rôle d’interface entre les services spécialisés de la ville (commerce, voirie, urbanisme…), les associations de commerçants, qui continuent à représenter les intérêts particuliers des commerçants, les professionnels de l’immobilier commercial, les chambres consulaires… Le manager doit donc gérer des intérêts et des objectifs différents, parfois divergents. Il prend des initiatives et doit être force de proposition, notamment en mobilisant des acteurs économiques et financiers autour de projets viables. Enfin, il est le porte-parole et l’interlocuteur privilégié de son périmètre. Les recettes de la grande distribution ? Même si de plus en plus de villes créent ce poste, avec des succès évidents comme à Bayonne ou à Cergy Pontoise, les managers de centreville français n'ont pas encore autant de pouvoirs que leurs homologues belges, qui eux, par exemple, gèrent leur centre-ville comme un véritable centre commercial, avec des pouvoirs sur les cessions de magasins, la circulation, le stationnement… En France, les managers mettent en place des actions concrètes dans deux domaines : 1. La promotion 1. et l’animation du site Faire connaître aux différents acteurs le projet de management collectif Bâtir et mettre en place le programme d’animations et de promotion Identifier les cellules commerciales vides et conseiller pour les recommercialiser Recherche de nouveaux exploitants lors du départ à la retraite d’un commerçant Mettre en place une stratégie et des outils de communication pour le centre-ville : web, édition… Monter des dossiers de présentation du site pour attirer des investisseurs Organiser l’ingénierie financière des projets opérateurs locaux. Une structure réunissant les différents partenaires est une garantie mais, à défaut, un comité de pilotage réunissant l’ensemble des opérateurs devrait être mis en place. Dans un département où les parties prenantes du commerce se plaignent souvent de ne pas avoir d’interlocuteur identifié, le recrutement de ces professionnels devrait être une priorité. Les managers belges gèrent leur centre-ville comme un véritable centre commercial 2. Les relations entre 1. le commerce et l’espace public Dresser un inventaire, diagnostic du site, s’informer sur les actions et projets du site Proposer des solutions pour améliorer la fréquentation et l’image du site et donc intervenir dans des opérations d’aménagement urbain, de réhabilitation de logements, de stationnement, etc. Agir en tant que médiateur afin de favoriser les initiatives et partenariats Tenir le rôle de guichet unique du commerce (réglementation et fonctionnement des commerces et de la ville). L'employeur du manager doit assurer son indépendance par rapport aux DYNAMIQUES VAUCLUSE 23 Commerçants, du 22 au 29 octobre, venez participer aux Forums du commerce organisés près de chez vous. Toutes les pistes proposées par l’étude de la CCI y seront abordées : stewards urbains, réglementation sur l’affichage et la signalétique commerciale, livraison à domicile, concept de multiservices, animations commerciales, parkings relais, défense du patrimoine architectural... WWW.VAUCLUSE.CCI.FR 04 90 14 87 51 Président de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Vaucluse Pourquoi avoir engagé une réflexion sur l’avenir du commerce de proximité en Vaucluse ? Depuis 20 ans, ce sont les grandes surfaces en périphérie de nos villes qui se sont le plus développées. Pourquoi ? Parce que cette forme de distribution a répondu aux attentes des consommateurs. Mais ce qui était vrai hier ne le sera pas forcément demain. Dans le Vaucluse comme dans le reste de la France, nous observons des changements dans la manière de consommer. Je suis persuadé que le commerce de proximité doit saisir cette nouvelle opportunité. S’il ne le fait pas, d’autres sauront profiter de ce retour vers un commerce à dimension humaine. Les enseignes de la grande distribution peut-être ? Soyons clairs : le commerce de proximité structure nos centres urbains. Il en assure l’animation, il garantit une forme de lien social et de convivialité. Il joue aussi un rôle en matière de sécurité. Nos élus locaux ont tout intérêt à conserver des centres-villes dynamiques et animés. Or ils n’ont pas toujours conscience que leur politique d’aménagement et de transport a un impact direct sur le commerce. Quant à nous, Chambre de Commerce, nous avons un devoir et une réelle compétence à organiser le débat sur ce thème. Une enquête a été menée auprès des commerçants et des consommateurs de Vaucluse et nous avons procédé à une étude documentaire sur les nouveaux comportements de consommation en France à l’étranger. De quelles évolutions parlons-nous ? D’évolutions incontournables et durables : vieillissement de la population, recherche d’économie dans les déplacements et dans le temps consacré aux besoins de base, personnalisation du service, sécurité, développement durable, explosion des services et du commerce par Internet, achat plaisir… Pour les nouveaux consommateurs, la notion de proximité redevient un atout majeur. Le commerce dominant actuel, à savoir la grande distribution, a commencé à perdre des parts de marché. Un nouvel équilibre, en phase avec les attentes des consommateurs et avec l’intérêt général, reste à trouver. Pour nos villes, c’est certainement l’enjeu social et économique des 10 ans à venir. Pour les nouveaux consommateurs, la notion de proximité redevient un atout majeur Et maintenant, comment comptez-vous passer à l’action ? Nos villes ont besoin d’un commerce moderne et dynamique. La CCI est compétente pour s’exprimer sur le commerce mais n’a pas les moyens d’agir sur lui. Nous avons donc choisi de mobiliser les commerçants au travers de leurs associations. Longtemps cantonnées au rôle d’opposant aux grandes surfaces, ces associations ont aujourd’hui un rôle important à jouer pour réunir les forces dispersées et faire entrer le commerce de proximité dans le 21e siècle. C’est à elles de revendiquer une place dans toutes les instances qui influencent l’avenir du commerce de proximité. Nous mettons à leur disposition tous les éléments de l’étude pour qu’elles construisent un discours et un argumentaire et s'inventent "un avenir". Si elles entament une démarche constructive avec les décideurs politiques, nous serons à leurs côtés pour créer cette nouvelle dynamique positive. DYNAMIQUES VAUCLUSE 24 SONDAGE Vous parlez de changements dans les modes de consommation, que vous a appris l’étude ? L'AVIS DES CONSOMMATEURS ET DES PROFESSIONNELS 3 QUESTIONS À FRANÇOIS MARIANI L'enquête diligentée par la CCI a permis de questionner 300 commerçants et 1315 consommateurs. Les réponses sont riches d'enseignements. Disparité dans la progression de l'activité commerciale Ceux qui pensent avoir gagné de la clientèle sont les boutiques de prêt-à-porter et de chaussures, les coiffeurs, la restauration, les salons de thé, les fleuristes. Mais aussi, d'une manière plus marginale les bouchers, les pressings ou les marchands de produits régionaux. Les commerçants s'accordent à dire que depuis trois ans, les consommateurs sont devenus plus exigeants sur les prix, la qualité et la demande de conseils. Image de leur ville : les commerçants sans concessions En comparaison des notes émises par les commerçants dans d'autres villes de France, ceux du Vaucluse accordent à leurs villes respectives des notes plutôt basses avec une moyenne de 3,31 sur 7. Vaison-la-Romaine, Isle-sur-la-Sorgue et Apt font néanmoins figurent de bons élèves. Horaires d'ouverture : des pics et des creux à aplanir 45,5% des commerces sont ouverts à 13 heures et 59% le lundi (70 % à Carpentras, 40 % à Vaison-la-Romaine). Pourtant, l'ouverture entre midi et deux heures concentre déjà 13% des achats. Une ouverture dans ce créneau inciterait-elle les consommateurs à y faire leurs courses ? Le débat est ouvert. Danger : menace de désertification Les commerçants manifestent une forte inquiétude sur la désertification des centres-ville. Cette crainte passe désormais avant le développement des grandes surfaces. L'insécurité, la hausse des loyers qui freine l'arrivée de jeunes commerçants et réduit le nombre de cellules commerciales au profit des banques et des bureaux et la politique de leur municipalité arrivent ensuite. Le e-commerce, par contre, n'est pas ressenti comme une menace. Initiatives : ce que les commerçants sont prêts à faire La mise en place d'un site Internet est le souhait qui revient de manière récurrente chez les commerçants interrogés par les auteurs de l'étude. Cette proposition dépasse largement les autres demandes. RETROUVEZ L’INTÉGRALITÉ DE L’ÉTUDE SUR WWW.VAUCLUSE.CCI.FR Consommateurs : rebutés par le stationnement Les consommateurs préfèrent le centre-ville pour son cadre architectural, ses espaces verts accueillants, le plaisir de pouvoir y retrouver des amis et le conseil des professionnels. Ils y apprécient la qualité des magasins d'équipement de la personne et de culture-loisirs. Ils souhaiteraient y trouver encore plus de services. Par contre, le centre-ville leur semble moins sûr que les zones commerciales et plus cher. Surtout, ils considèrent les difficultés de stationnement comme un point noir. DYNAMIQUES VAUCLUSE 24