Le Journal de l`Institut Curie - n°65

Transcription

Le Journal de l`Institut Curie - n°65
JIC65_1COUVBAG 9/02/06 14:15 Page 1
LE JOURNAL
DE
L’INSTITUT CURIE
COMPRENDRE POUR AGIR CONTRE LE CANCER
ENTRE NOUS
Des Jardins pour la Vie,
une Jonquille pour Curie
ACTUALITES
Une assurance conçue
pour les anciens malades
atteints de cancer
DOSSIER
Jeunes et cancers
Un hôpital à leur écoute
# 65 - MARS 2006 - 1,25 € - ISSN 1145-9131
JIC65_2-3SR2BAG 9/02/06 14:16 Page 2
ACTUALITÉS
INSTITUT CURIE
p. 6
Dépistage : des examens
qui doivent devenir réflexes
DÉCRYPTAGE
h
Essais cliniques : les patients,
p. 7
partenaires de la recherche
p. 8
JEUNES
ET CANCERS :
UN HÔPITAL À
LEUR ÉCOUTE
Témoignage
p. 9
« Je souhaite contribuer à la création
d’une unité pour les ados »
p. 13
L’animation au service
des « 12-25 ans »
h ENTRE NOUS
Initiatives
Transformons l’essai
contre les cancers pédiatriques
« Des Jardins pour la Vie,
une Jonquille pour Curie »
Rétrospective
p. 14
p. 15
p. 19
Aujourd’hui, plus d’un patient atteint de cancer sur deux
guérit, trois patients sur quatre chez les enfants et jeunes
adultes. Tant que les 100 % de guérison ne seront pas
atteints, chercheurs et médecins-chercheurs n’auront de
cesse de perfectionner leurs connaissances, à commencer
par celles sur la cellule.
Pr Daniel Louvard,
Leurs acquis enrichissent jour après jour les programmes
directeur du Centre
de recherche
d’études visant à améliorer la pratique médicale tant
de l’Institut Curie
diagnostique, thérapeutique, que prédictive.
Fort du plus important centre de recherche français
en cancérologie et d’un hôpital de pointe, l’Institut Curie participe à ces avancées
en collaboration avec de nombreux établissements prestigieux français
ou étrangers, publics ou privés.
Dirigeant le Centre de recherche de l’Institut Curie depuis 1995, je suis fier d’avoir
vu s’ouvrir dans nos laboratoires de nouveaux champs d’investigation comme :
• la génomique – notamment les puces à ADN – et la protéomique, en premier lieu.
Ces disciplines accélèrent considérablement l’identification des gènes et des
protéines responsables de la transformation cancéreuse des cellules et de
leur croissance anarchique. Grâce à ces nouvelles technologies, les médecins
en savent plus sur les altérations génétiques des cancers de leurs patients ;
ils affinent la classification des tumeurs et individualisent les traitements,
offrant des thérapies moins lourdes aux malades moins gravement atteints.
• l’imagerie cellulaire, quant à elle, permet d’explorer le fonctionnement
des cellules saines et les anomalies apparues dans les cellules malignes.
Les chercheurs de l’Institut Curie bénéficient des toutes dernières générations
de microscopes et participent également au développement de nouveaux outils
d’exploration du vivant en collaborant avec des constructeurs.
• l’interface entre physique et biologie, enfin. Cette approche pluridisciplinaire,
devenue l’une des grandes forces de l’Institut Curie, est reconnue mondialement.
Les travaux conduits par les chercheurs dans ce domaine offrent plus que jamais
des perspectives d’innovation.
2005 a vu de nombreux travaux1 se concrétiser et mettre au jour des mécanismes
cellulaires ou génétiques inconnus, ouvrant de nouvelles pistes à explorer.
Pour rester à la pointe du progrès, l’Institut Curie se dote d’équipements
innovants grâce aux subventions de l’État, aux partenariats avec des entreprises
et à la générosité du public. Sans ces soutiens, nous ne pourrions espérer
« prendre le cancer de vitesse ».
1. Toute l’actualité scientifique et médicale : www.curie.fr
Activités et sciences… physiques
LE JOURNAL DE L’INSTITUT CURIE COMPRENDRE POUR AGIR CONTRE LE CANCER EST ÉDITÉ PAR L’INSTITUT CURIE - 26 RUE D’ULM, 75248 PARIS CEDEX 05 - FAX: 01 43 25 17 56 - [email protected]
- WWW.CURIE.FR - DIRECTEUR DE LA PUBLICATION: PR CLAUDE HURIET - RÉDACTRICE EN CHEF: NATHALIE BOISSIÈRE - RÉDACTION: CÉLINE GIUSTRANTI, SARAH MELHENAS, MATHILDE MAUFRAS,
CLEMENCE MUSA, FABIEN RIVENET - ICONOGRAPHIE: YASMINE BENZOUGAR (01 44 32 40 51) - DONS ET ABONNEMENTS: YOVAN VUJOSEVIC (01 44 32 40 80) - ONT PARTICIPÉ À CE NUMÉRO:
YOHANNS BELLAICHE, PR PIERRE BEY, MICHEL BORNENS, OLIVIER DELATTRE, DR VERONIQUE DIERAS, CECILE FLAHAULT, PR CLAUDE HURIET, RENAUD HUYNH, DR VALERIE LAURENCE,
PR DANIEL LOUVARD, DR JEAN MICHON, DR LAURENT MIGNOT, FLORENCE MOREAU-GACHELIN, SOLANGE DE NAZELLE, DR HELENE PACQUEMENT, DR ETIENNE SEIGNEUR - LE SOMMAIRE,
LES TITRES, CHAPÔS, INTERTITRES, ILLUSTRATIONS ET LÉGENDES SONT DE LA RESPONSABILITÉ DE LA RÉDACTION EN CHEF ET N'ENGAGENT PAS LES AUTEURS - PHOTO DE COUVERTURE :
E. BOUVET/INSTITUT CURIE - ABONNEMENT POUR 4 NUMÉROS/AN : 5 € - CRÉATION ET RÉALISATION : CITIZEN PRESS (01 53 00 10 00) - FABRICATION : TC GRAPHITE (MONTREUIL) - IMPRESSION :
LA GALIOTE PRENANT - 70/82, RUE AUBER, 94400 VITRY-SUR-SEINE - NUMÉRO DE COMMISSION PARITAIRE : 0907H82469 - DÉPÔT LÉGAL DU N° 65 : MARS 2006 - CE NUMÉRO A ÉTÉ IMPRIMÉ
À 165 000 EXEMPLAIRES.
02,
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
EN BREF
EXPO
GROS PLANS SUR LE
PERSONNEL SOIGNANT
,PARTENARIAT
Une assurance conçue pour
E. Bouvet/Institut Curie
Actualités générales
p. 5
Génomique, protéomique
et imagerie : trois chemins
vers des découvertes
DR
Une assurance conçue
pour les anciens malades
Une prise en charge
génétiquement adaptée
Noak/Le bar Floréal/Institut Curie
p. 3
Institut Curie
E. Bouvet/Institut Curie
Les anciens malades du cancer peuvent
désormais réaliser plus facilement
leurs projets, comme acheter un logement.
ÉDITORIAL
h ACTUALITÉS
h DOSSIER
h
SOMMAIRE
les anciens malades
S
pécialiste de la protection des
personnes, la société Swiss Life
vient de mettre sur le marché
un produit d’assurance «emprunteur»
conçu pour les personnes ayant eu un
cancer. À l’occasion d’un partenariat mis
en place en 2005 avec l’Institut Curie,
Swiss Life a été sensibilisé par les équipes
hospitalières aux difficultés rencontrées
par les anciens patients souhaitant
contracter un prêt immobilier. Ce nouveau
type d’assurance va permettre à nombre
d’entre eux d’être assurés et
donc d’obtenir leur prêt, ce qui n’était pas
toujours le cas jusqu’alors (lire encadré).
Tout prêt contracté auprès d’une banque
nécessite en effet une assurance qui
protège l’emprunteur et sa famille en cas
de décès, d’invalidité ou d’incapacité de
travail. Cette assurance obligatoire est
accordée en fonction de critères
financiers, mais aussi… médicaux. Les
personnes ayant un risque de santé
aggravé dû à un cancer se heurtent donc
souvent à des refus catégoriques de la
part des assurances ou à des surprimes
décourageantes et ce, malgré la
convention Belorgey qui protège les
emprunteurs de ce genre d’obstacles.
Comme le souligne Solange de Nazelle,
responsable du service social de l’Institut
Curie, «il est regrettable, et préjudiciable,
que certains malades aient à souffrir
deux fois de leur maladie, d’une part, de
son retentissement physique et, d’autre part,
du renoncement à leurs projets à venir,
dont on sait par ailleurs qu’ils contribuent
à l’amélioration de leur état de santé.» Cette
offre s’adresse à tous les anciens malades
où qu’ils aient été soignés. Swiss Life s’est
engagé à ce que des interlocuteurs
spécialisés étudient chaque cas
individuellement et répondent dans un
délai de trois jours1. La nouveauté
de ce contrat réside dans la mise en place
d’une surprime dégressive et limitée
dans le temps. L’objectif recherché est
de faire coïncider l’effort financier
complémentaire avec la diminution
du risque de récidive : avec le temps,
la surprime disparaît progressivement.
Swiss Life réalisera une évaluation de
cette prestation dans un an pour
y apporter d’éventuelles améliorations.
Céline Giustranti
1. Pour toute information : 0825 015 931
(0,15 euro la minute)
Une sélection inédite
des magnifiques reportages
réalisés par le photographe
de renom Éric Bouvet 1,
sur les infirmières
et les aides-soignantes
de l’Institut Curie, donne
l’occasion de les « voir »
dans leurs faits et gestes
quotidiens au service des
malades. Ces professionnelles
sont plus que jamais
des maillons essentiels
de la chaîne de soins. Un bel
hommage à leur savoir-faire
et à leur disponibilité.
1. Une première sélection illustrait des
dossiers thématiques de l’Institut Curie
(sur commande et sur www.curie.fr).
h
Jusqu’au 31 avril 2006,
angle des rues d’Ulm
et Pierre-et-Marie-Curie, Paris 5e.
LA CONVENTION BELORGEY : TROP SOUVENT MÉCONNUE
Dans l’objectif d’améliorer l’accès à l’assurance des personnes à haut risque
de santé (cancers, hépatites, sida, obésité…), la convention dite Belorgey a été
signée en 2001 puis inscrite dans la loi relative aux droits des malades votée
l’année suivante. Elle prévoit pour le souscripteur d’une assurance emprunteur
des conditions d’accès plus favorables, avec notamment le respect de la
confidentialité des réponses au questionnaire de santé, une couverture du risque
décès pour les personnes malades et un réexamen individualisé en cas de dossier
refusé. Malgré quelques efforts, de nombreuses banques ignorent les dispositions
de cette convention 1.
1. Journal de l’Institut Curie #59, août 2004.
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
,03
JIC65_4-7SR1BAG 9/02/06 14:17 Page 4
ACTUALITÉS
ACTUALITÉS
INSTITUT CURIE
CHARENTON-LE-PONT
FINANCEMENT D’UN
NOUVEAU MICROSCOPE
Parce que les biologistes
doivent pouvoir «plonger»
dans la cellule pour explorer
ses secrets et décrypter les
anomalies qui la transforment
en cellule cancéreuse,
un microscope de dernière
génération est venu renforcer
l’équipement du laboratoire
Dynamique nucléaire et
plasticité du génome à
l’Institut Curie. Son système
de thermorégulation permet
d’étudier les cellules vivantes
sans les dénaturer. L’Institut
Curie a pu investir dans un
tel appareillage grâce à ses
donateurs et aux 26 581 euros,
réunis lors de la 4e expositionvente organisée par le Service
des retraités du centre
communal d’action sociale
de Charenton-le-Pont (Val-deMarne) et remis officiellement
le 24 janvier dernier.
04,
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
a un « sens »
Une prise en charge
LEUCÉMIE
UN COMPLICE DU
DÉVELOPPEMENT
TUMORAL DÉMASQUÉ
génétiquement adaptée
L
Enfermées dans un carcan, les cellules révèlent leurs réactions face aux contraintes spatiales. Des informations
précieuses pour comprendre leur division, dont le dysfonctionnement peut être à l’origine de cancers.
À
chaque instant, 250 000 millions de
cellules se divisent au sein de notre
organisme pour donner naissance à deux
fois plus de cellules filles. Cette étape
est essentielle, mais son dérèglement
peut être à l’origine de cancers, c’est
pourquoi son étude s’avère primordiale
pour mieux comprendre et lutter contre
les processus tumoraux 1. Afin d’analyser
l’influence de l’environnement sur
cette division cellulaire, l’équipe CNRS de
Michel Bornens à l’Institut Curie cultive
ses cellules dans des « micromoules »
qui reproduisent les contraintes de forme
qu’une cellule est susceptible de « sentir »
au sein d’un tissu ou d’un organe. Les
chercheurs ont ainsi montré le rôle
déterminant que jouent les protéines dites
d’adhésion dans l’orientation spatiale de
la division et dans le devenir des cellules
filles. Ces protéines sont donc des actrices
essentielles dans le positionnement
correct des cellules, indispensable pour
maintenir la forme de nos organes.
Au même moment, toujours à l’Institut
Curie, l’équipe CNRS de Yohanns Bellaïche
a mis en évidence l’action clé
d’une protéine lors de la division dite
asymétrique. C’est ce type de division
qui permet à une cellule d’engendrer
deux cellules différentes l’une de l’autre.
Lors de la formation d’un être vivant
par exemple, ce mécanisme conduit
à l’élaboration d’organes aussi différents
que le cœur, le foie ou les intestins.
La protéine Ric8, en particulier, intervient
sur l’axe de la division cellulaire.
Elle dirige indirectement la répartition
des composants cellulaires en deux lots
identiques ou non, maîtrisant ainsi
l’identité des futures cellules filles.
La division cellulaire recèle encore
de nombreuses zones d’ombre, sur
lesquelles les chercheurs s’attellent
petit à petit à faire la lumière.
Mathilde Maufras
Source : Nature Cell Biology, octobre et novembre 2005.
1. Lire le dossier thématique complet « Comprendre
la cellule cancéreuse pour la maîtriser »,
en vente par correspondance (cf. bulletin joint).
es équipes Inserm d’Olivier Delattre
à l’Institut Curie et de Jean-Yves
Delattre à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière
(Paris) ont fait une découverte qui devrait
améliorer la prise en charge des gliomes.
Ces tumeurs du cerveau sont les plus
répandues chez l’adulte 1. Ils ont identifié
plusieurs altérations génétiques
du chromosome 1 impliquées dans
le développement de ces cancers.
Mieux encore, ils ont mis en évidence
une corrélation entre ces anomalies
et la réponse aux traitements. Ainsi,
la perte d’une partie du chromosome 1
est associée à une meilleure efficacité
des chimiothérapies et à un meilleur
pronostic pour le malade. Une fois encore,
les puces à ADN 2 spécialement
développées à l’Institut Curie sont au
centre de ces travaux. Capables d’analyser
l’ensemble des gènes d’un individu,
ces laboratoires en miniature sont l’outil
idéal pour repérer les amplifications ou les
pertes de matériel génétique, fréquentes
dans les cellules tumorales. Depuis
Noak/Le bar Floréal/Institut Curie
En cette année mondiale
de la physique, l’Institut Curie a
doté un prix de 1 000 euros
partagé par des lycéens
de Thonon-les-Bains (74)
et Hénin-Beaumont (62).
Ces scientifiques en herbe ont
participé aux Olympiades
de physique, organisées
par l’Union des professeurs de
physique et chimie et la Société
française de physique. Ce
concours est destiné aux élèves
de première et de terminale
autour d’un projet d’atelier
scientifique. Ils bénéficient
de l’aide de chercheurs, parmi
lesquels ceux de l’Institut.
La division cellulaire
EN BREF
h
QUAND LES LYCÉENS
DEVIENNENT
CHERCHEURS
,CANCERS DU CERVEAU
M. Thery/Institut Curie
CONCOURS
,DÉCOUVERTE
h
EN BREF
INSTITUT CURIE
Les patients atteints de gliome bénéficient
désormais d’une nouvelle méthode de diagnostic
et de traitements optimaux pour combattre leur cancer.
la fin de l’année 2005, la recherche de
ces délétions sur le chromosome 1 fait
désormais partie des examens standards
pour préciser le diagnostic de ces tumeurs.
Ce test de dernière génération va
permettre de personnaliser le traitement
à chaque patient, en fonction du type
de gliome dont il est atteint, afin de
lui offrir la meilleure prise en charge.
1. Annals of neurology, septembre 2005.
2. Le Journal de l’Institut Curie # 60, p. 3.
,PARTENARIAT
Accord d’envergure avec Servier
L
’Institut Curie et le laboratoire
pharmaceutique Servier ont conclu un
partenariat de recherche en cancérologie.
L’objectif est d’identifier des cibles
thérapeutiques, de découvrir de nouvelles
substances actives et de mener des
études pour mieux prédire l’effet de ces
molécules chez les patients. Le premier
programme de recherche lancé dans le
cadre de cet accord concerne les cancers
du sein et du côlon. Il s’agit d’améliorer
leur diagnostic, mais aussi de développer
des médicaments novateurs afin de
disposer de traitements personnalisés
pour chaque patient. Cet accord est la
concrétisation de la volonté de l’Institut
Curie d’associer ses compétencesdans
la recherche fondamentale, préclinique
et clinique, et celles des professionnels
du médicament, toutes deux nécessaires
à l’émergence d’innovations.
À l’Institut Curie, une équipe
Inserm vient d’apporter
la preuve de l’existence
d’un mécanisme longtemps
suspecté d’être à l’origine
de la formation des cellules
malignes dans un type fréquent
de leucémies. Cette catégorie
de cancer du sang, qui touche
les globules rouges, résulte
de l’apparition de deux erreurs
génétiques. La première,
dont le responsable était déjà
connu, bloque la spécialisation
des cellules. La seconde
mène à une prolifération
anormale des cellules, mais
il « restait » à comprendre
pourquoi. L’équipe de
Françoise Moreau-Gachelin,
de l’unité Inserm Transduction
du signal et oncogenèse,
a montré qu’une protéine,
dénommée Kit, est mutée dans
86 % des tumeurs étudiées.
Cette anomalie confère
une activité autonome
aux cellules et leur permet
par conséquent de proliférer
en l’absence de tout signal
extérieur, habituellement
nécessaire. La découverte
de cette mutation génétique,
associée à la seconde
mutation déjà connue, valide
donc le modèle « en deux
étapes » soupçonné d’être
à l’origine de ces leucémies.
L’identification précise de tous
les acteurs transformant
les globules rouges en cellules
cancéreuses est indispensable
pour la conception de nouveaux
traitements qui permettront de
mieux lutter contre la maladie.
Source : Cancer Cell, 12 décembre 2005.
M. M.
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
,05
JIC65_4-7SR1BAG 9/02/06 14:17 Page 6
DÉCRYPTAGE
ACTUALITÉS
Les patients,
GÉNÉRALES
partenaires de la recherche
Des examens qui doivent
h
Noak/le bar Floréal/Institut Curie
devenir réflexes
Dépistage, test, examen… C’est prendre soin de sa
santé en suivant les recommandations de son médecin.
EN BREF
EXPO
L’ÂGE D’OR
DES SCIENCES ARABES
Au-delà de l’astronomie et des
mathématiques, la civilisation arabomusulmane a accompli des
découvertes prodigieuses dans
différents domaines de la science,
qu’il s’agisse de la mesure du temps,
de la mise au point de dispositifs
mécaniques et optiques ou du progrès
médical. Une belle exposition
proposée par l’Institut du monde
arabe à Paris. Jusqu’au 19 mars 2006.
h Renseignements : 01 40 51 38 38
es enjeux sont de taille : plus les
diagnostics sont précoces, plus
l’efficacité des traitements est améliorée,
augmentant ainsi les chances de
guérison. Et pourtant, « les dépistages
des cancers suscitent le plus souvent
dans la population de l’indifférence,
voire de la peur », déclarent les auteurs
de la dernière grande enquête sur les
dépistages, Édifice 1. L’occasion de faire
le point sur le dépistage de trois cancers
– du sein, du côlon et du col de l’utérus –
que les pouvoirs publics plébiscitent.
Ainsi, depuis un an, le dépistage du
cancer du sein, premier cancer féminin,
est national. Tous les deux ans,
chaque femme de 50 à 74 ans est invitée
à passer une mammographie (deux
clichés par sein) et un examen clinique,
tous deux pris en charge à 100 %
par l’Assurance maladie. Cette action,
efficace, permet chaque année de sauver
des milliers de vie. Quant au cancer du
côlon, troisième cancer le plus fréquent
en France, son dépistage organisé
n’est pour l’instant expérimenté que
dans 23 départements pilotes 2. Le Plan
cancer prévoit sa généralisation d’ici à
2007 à tous les hommes et femmes âgés
de 50 à 74 ans. L’examen consiste,
tous les deux ans, en une recherche
de sang dans les selles, suivie d’une
coloscopie en cas de résultat positif.
Enfin, les femmes de 20 à 65 ans doivent
également penser au dépistage du
cancer du col de l’utérus. Après un frottis
cervico-vaginal normal par an pendant
deux ans, un frottis effectué tous les trois
ans permettra de découvrir d’éventuelles
affections précancéreuses. Organisés
par les pouvoirs publics ou proposés
par les médecins traitants, les
dépistages ne doivent pas être négligés.
En découvrant des lésions avant même
l’installation d’un cancer et l’apparition
de symptômes, ils sont un des moyens
essentiels de lutte contre le cancer.
Fabien Rivenet
1. Enquête « Édifice », octobre 2005.
2. Allier, Alpes-Maritimes, Ardennes, Bouches-duRhône, Calvados, Charente, Côte-d’Or, Essonne,
Finistère, Haut-Rhin, Hérault, Ille-et-Vilaine, Indreet-Loire, Isère, Marne, Mayenne, Moselle, Nord,
Orne, Puy-de-Dôme, Pyrénées-Orientales, SeineSaint-Denis, Saône-et-Loire.
,IMAGERIE MÉDICALE
h
Noak/le bar Floréal/Institut Curie
Le sous-équipement français
Le nombre d’examens d’imagerie ne
cesse d’augmenter. L’IRM en est un exemple,
elle qui observe avec une grande précision
de nombreux organes tels que le cerveau,
la colonne vertébrale et les tissus mous.
A
lors que le Plan cancer
vise un délai moyen de
15 jours pour proposer un
rendez-vous pour une IRM
(imagerie par résonance
magnétique), le délai
national moyen constaté est
actuellement deux fois plus
long, 29,3 jours exactement.
Selon les régions, il varie de
17 à 54 jours, révélant une
fois de plus l’inégalité dans
l’accès aux soins des Français.
L’engorgement des centres
d’imagerie s’explique par
l’augmentation du nombre de
prescriptions et par la faible
quantité d’appareils installés
en France, comparativement
à ses voisins européens.
Ainsi, avec 4,67 appareils
par million d’habitants, la
France se place loin derrière
l’Allemagne (16,97) ou
l’Italie (9). L’objectif pour 2005
était de 500 machines IRM.
Il n’a pas été pas atteint,
puisqu’il manque une
quarantaine de machines,
sans compter celles qui ne
sont pas encore en service.
De plus, ce chiffre est déjà
jugé bien trop faible par les
experts face aux besoins
qui ne cessent de croître.
Transition entre la recherche en laboratoire et les soins, les essais ou études cliniques
sont indispensables, en cancérologie comme dans toute discipline médicale, pour éprouver
les innovations et proposer aux patients une meilleure prise en charge thérapeutique,
qu’elle soit chirurgicale, médicamenteuse, radiothérapeutique ou autre.
En France, près d’une étude clinique sur
cinq concerne des pathologies cancéreuses,
soit environ 2 000 essais chaque année.
Avant tout, rien ne peut se faire sans
l’accord du patient, protégé depuis la loi
Huriet-Sérusclat révisée le 9 août 2004.
Sa participation doit être volontaire et
son consentement recueilli par écrit. Le
médecin en charge de l’essai a obligation
de lui donner une information claire et
complète sur l’étude (objectifs, protocole,
bénéfices attendus, effets secondaires
et risques éventuels). Plus le nombre
de patients-participants est élevé, plus
les résultats de l’étude seront complets et
pertinents. Pour avancer aussi rapidement
que possible, il faudrait qu’au moins
20 % de patients participent à de telles
études (ils sont aujourd’hui entre 5 et 10 %
selon les hôpitaux, faute de moyens
pour assurer le suivi de ces études).
l’homme, après son expérimentation en
laboratoire. Les médecins administrent la
substance étudiée (naturelle ou synthétique)
à une trentaine de malades, chez qui les
traitements de référence se sont révélés
inopérants. Pour différents dosages
du médicament, les praticiens suivent
la diffusion et l’élimination du médicament
dans l’organisme. Le but de cette phase
est de déterminer le meilleur dosage
et le meilleur schéma d’administration
du médicament. Cette étape dure
en général moins d’un an.
h LES ÉTAPES
Cette phase a pour but d’évaluer l’efficacité
du médicament, contre une pathologie
donnée diagnostiquée chez une quinzaine
à une soixantaine de patients.
Prenons, par exemple, l’essai clinique d’une
substance, candidat-médicament. Il se
déroule suivant quatre phases; le succès de
l’une conditionne le passage à la suivante.
PHASE I
Cette phase correspond à la première
administration du médicament chez
PHASE II
PHASE III
Cette phase porte sur des centaines,
voire des milliers de malades. Elle fait
la comparaison entre le traitement de
référence dit standard, lorsqu’il existe, et le
nouveau traitement potentiel. Deux groupes
de malades sont constitués par tirage
au sort (randomisation) : l’un reçoit
le traitement standard, le second
le traitement testé. Si la supériorité
du nouveau médicament par rapport
au standard est prouvée, une autorisation
de mise sur le marché est demandée
auprès des autorités sanitaires.
PHASE IV
Une fois le
traitement
utilisé en routine,
la pharmacovigilance permet
de surveiller
l’apparition d’une
toxicité ou d’effets
secondaires à l’échelle de l’ensemble
des patients.
Fabien Rivenet
Le cas des enfants
En cancérologie, 80% des enfants soignés participent à un essai clinique. Comme pour tous les
patients participant à une telle étude, l’information donnée au mineur doit être claire et adaptée
à son âge. Son consentement et celui de ses parents, ou tuteurs légaux, sont obligatoires.
Dr Véronique Diéras, responsable de l’Unité d’investigation clinique de l’Institut Curie.
F. R.
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
06,
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
Illustrations : Éléonore Lamoglia/Institut Curie
,DÉPISTAGE
L
ESSAIS CLINIQUES
,07
JIC65_8-13VB_SR1BAG 9/02/06 14:18 Page 8
DOSSIER
LES 12-25 ANS
h
E. Bouvet/Institut Curie
JEUNES ET CANCERS:
UN HÔPITAL À LEUR ÉCOUTE
Chaque année en France, plus de mille jeunes âgés de
12 à 25 ans apprennent qu’ils sont atteints d’un cancer.
Tous traverseront l’épreuve de la maladie avec ses
traitements lourds, l’éloignement de leur cadre amical
et familial et le chamboulement de leur « vie d’avant ».
L’impact psychologique et social de cette maladie est
encore mal connu chez les adolescents. Toutefois,
depuis quelques années, la situation semble évoluer.
En parallèle des recherches qui perfectionnent diagnostics
et traitements, l’amélioration de la prise en charge des
« 12-25 ans » est également d’actualité.
08,
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
D
ans le système de santé français,
les patients de la tranche d’âge
12-25 ans atteints d’un cancer sont
hospitalisés soit en pédiatrie au milieu
de très jeunes enfants, soit en oncologie adulte où la moyenne d’âge dépasse souvent
50 ans. Quelles sont les conséquences de telles
prises en charge ? De l’avis de nombre de patients
adolescents et jeunes adultes (dans la suite du texte,
l’appellation « jeunes » qualifiera l’ensemble de ces
patients [NDLR]), cette situation tend à amplifier
leur sentiment d’isolement dû à la maladie et à cet
espace impersonnel qu’est l’hôpital. Pas encore
adultes, mais plus tout à fait enfants, ils revendiquent le droit d’être soignés dans un environnement
adapté à leur âge. Cette demande est relativement
récente en France. Elle émerge publiquement en
L’ADOLESCENCE
COMMENCE
À LA PUBERTÉ
Vrai. La puberté,
du latin pubescere
« se couvrir de poils »,
c’est l’accès à une vie
sexuelle, à la capacité
de procréer. Elle
marque le début de
l’adolescence, du latin
adolescere « grandir »,
les critères sociaux
(indépendance
professionnelle,
stabilité affective, etc.)
en déterminent la fin.
L’Organisation
mondiale de la santé
(OMS) distingue
la préadolescence
(10-15 ans),
l’adolescence
(15-19 ans) et la
post-adolescence
(20-25 ans).
1998, lors des États généraux des malades du
cancer, organisés par la Ligue nationale contre le
cancer. Chloé, Marie, Damien et Nicolas exprimaient alors, tour à tour, le même désir d’être
écoutés et reconnus en tant que malades et peut-être
avant tout en tant qu’adolescents : « C’est déphasant d’être avec des adultes […] Le personnel n’est
pas formé […] Nous manquons de rapports avec
des jeunes gens de notre âge qui ont vécu
la même chose. » De leur rencontre naît l’idée d’une
association « pour s’épauler, créer des liens d’amitié, rompre notre isolement »… Depuis 2000, Jeunes
solidarité cancer est à l’origine de nombreuses
initiatives inédites 1, dont le lancement d’un forum
de discussion sur Internet, l’édition de guides pratiques et d’un carnet de bord pour accompagner les
jeunes tout au long de leur maladie.
Ce qu’être « ado » veut dire
L’adolescence constitue une période de fragilité et
d’étrangeté physique et psychologique liée à la
puberté. C’est aussi une période d’émancipation,
d’élaboration de projets personnels, professionnels,
affectifs… Lorsqu’un cancer survient, la situation
se complique encore : expérience de la maladie et
de la douleur, confrontation à la mort possible,
bouleversement de la scolarité, de la vie sociale et
familiale, dépendance parentale accrue, modifications corporelles liées aux traitements (perte des cheveux, chirurgie parfois mutilante avec cicatrices
et/ou séquelles fonctionnelles, amaigrissement ou
prise de poids, etc.), atteinte de l’estime de soi…
Face à ces difficultés et compte tenu des histoires
personnelle et familiale de chacun, les réactions
vont du repli à la révolte en passant par la tristesse,
la régression, la revendication, le mutisme, l’indifférence, les prises de risques, etc. Les contradictions de l’adolescence se trouvent comme décuplées. « Je m’approche, je m’éloigne, je viens, je
prends… L’adolescence, c’est ça », s’accordent à
dire les psychiatres et psychologues de l’Institut
Curie. Et d’ajouter : « Il est difficile pour les parents
et les professionnels de santé d’accepter d’être à
la fois attendus et rejetés, attaqués et désirés, agressés et demandés. » Dès lors, la présence de « psys »
constitue un précieux soutien. Pour les adolescents, il s’agit d’une forme de reconnaissance des
bouleversements qu’ils traversent : « C’est ■ ■ ■
1. Jeunes solidarité cancer édite des supports
gratuits disponibles dans les hôpitaux et bientôt
via www.jscforum.net.
TÉMOIGNAGE
« Je souhaite
contribuer à la création
d’une unité pour
les adolescents… »
CHARLES-HENRI,
20 ANS, SUIVI
À L’INSTITUT CURIE
DR
h
Sur le plan médical, psychologique
et social, une prise en charge
adaptée aux adolescents est
en train de voir le jour en France.
VRAI
OU FAUX?
« En juin 2002, j’ai
17 ans, j’apprends
que je suis atteint d’un
cancer des testicules
à un stade très avancé.
Je mets ma vie entre parenthèses,
je n’ai pas le choix. Je veux guérir.
Cures intensives de chimiothérapie,
interventions chirurgicales… Le garçon
très gentil et très calme que j’étais
change. Je pose toutes sortes de `
questions tout le temps : le nom des
traitements, leurs effets secondaires,
l’heure des soins, etc. Je m’emporte
très souvent. Je ne supporte pas les
imprévus : les retards dans les soins
ou les consultations me mettent dans
une colère noire. Loin de me faire
la morale, la « psy » que je décide
de voir à l’Institut Curie respecte mes
fureurs et me permet de prendre le recul
nécessaire pour accepter les traitements
et les hospitalisations au milieu d’adultes
avec lesquels je ne me sens pas à l’aise.
Fin 2003, le calvaire est fini ! J’ai besoin
de témoigner. Je me tourne vers maman
afin de transcrire, pour les dépasser,
les émotions du parcours que nous avons
vécues ensemble. Notre témoignage
à deux voix est aujourd’hui publié 1.
Mon association Mon Combat pour la vie 2
en reversera les droits d’auteur à l’Institut
Curie où une structure de soins pour les
adolescents doit voir le jour. Je serai si
heureux d’y apporter ma contribution. »
Propos recueillis par S. M.
1. Sans occulter les difficultés du parcours, lourd et
incertain, qui attend le malade et sa famille,
Ton combat pour la vie se veut un message d’espoir
pour tous ceux qui sont confrontés à la réalité
brutale de la maladie. Ton combat pour la vie,
Florence Péchery-Condat, Éd. Parole et silence,
60, rue de Rome, 75008 Paris.
2. Courriel : [email protected]
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
, 09
JIC65_8-13VB_SR1BAG 9/02/06 14:18 Page 10
DOSSIER
DOSSIER
LES 12-25 ANS
LES 12-25 ANS
GÉNÉROSITÉ
Incidence
250
Garçons
Filles
200
150
100
Cancers
de l'enfant
Cancers
de l'adulte
D’après The Lancet.
50
0
0
1-4
5-9
10-14
15-19
Tranches d'âges
ou des testicules,
tumeurs primitives de
l’os… (cf. la courbe
ci-dessous). Plus des
deux tiers des malades
peuvent aujourd’hui
guérir : le taux de
survie à 5 ans est passé
de 45 à 75 % en trente
ans. Mais, en Europe,
l’incidence des cancers
des 15-19 ans
a augmenté de 1,5 %
sur la même période.
Les chercheurs ne
se prononcent pas
sur les raisons de
cette augmentation.
La recherche doit
donc aller plus loin
dans divers domaines
(prédisposition,
diagnostic, traitement,
suivi, etc.), la
génomique est sans
doute l’une des voies
nouvelles et
prometteuses tant
pour le diagnostic que
pour le pronostic.
Géraldine Lebourgeois
Source : étude sur la base
de plus de 150 000 cancers de
l’adolescent diagnostiqués en
Europe entre 1970 et 1999
(Centre international de
recherche sur le cancer, The
Lancet, 2004).
une manière de leur dire que ce qu’ils ont
à vivre n’est pas facile et que le traitement d’un
cancer génère des difficultés qui ne font d’eux ni
des fous, ni des incapables et encore moins des
faibles. » Pour l’équipe médicale et soignante, un
« psy » offre la possibilité de parler, de souffler et
de prendre la distance nécessaire pour mieux
entendre et accompagner le jeune dans son parcours
de soins. Outre cette approche spécifique, la formation et l’expérience des professionnels restent
■■■
10,
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
Grâce au soutien de la Ligue contre
le cancer ou de la Fondation de France,
l’Institut Curie vient de lancer trois
programmes de recherche axés sur
les adolescents et jeunes adultes
atteints de cancer :
• L’autoconservation de sperme chez
les adolescents atteints de cancer 1.
Étude 2 rétrospective des pratiques
médicales et du vécu des jeunes gens
de 14 à 18 ans au moment de l’annonce
du diagnostic de cancer, et de
l’incidence des traitements sur
leur fertilité. Objectifs : améliorer
les conditions de cette annonce,
la qualité des supports d’information
et l’accompagnement quant à la
réalisation du recueil de sperme.
• Préservation de la fertilité
chez les jeunes patientes recevant
une chimiothérapie potentiellement
toxique pour les ovaires. Objectif :
évaluer les pratiques pour améliorer
l’information et l’accompagnement
des patientes dans cette situation.
• Les conditions et lieux de décès
des patients âgés de 15 à 25 ans 3.
Objectif : améliorer la prise en charge
des adolescents en fin de vie.
1. Avec le soutien de la Ligue contre le cancer.
2. Avec l’Institut Gustave-Roussy (Villejuif,
Val-de-Marne) et l’hôpital Cochin (Paris).
3. Avec le soutien de la Fondation de France.
essentielles. « Cela nous permet de dédramatiser
et de mieux comprendre les situations. Par exemple,
le refus d’un traitement traduit souvent le besoin
de se confronter aux soignants, de trouver un
espace de négociation, pour voir s’ils tiennent bon,
si le jeu en vaut la chandelle », expliquent les
Drs Valérie Laurence et Hélène Pacquement, respectivement oncologue adulte et oncologue pédiatre
à l’Institut Curie. Jusque-là absente des cursus de
formations français, la médecine des adolescents
E. Bouvet/Institut Curie
dont la fréquence
diminue avec l’âge, et
aux cancers de l’adulte,
dont la fréquence
augmente avec l’âge.
Ainsi, après l’âge de
10 ans, les tumeurs
pédiatriques telles que
les neuroblastomes et
néphroblastomes
tendent à disparaître,
alors que d’autres
deviennent plus
fréquentes :
lymphomes, tumeurs
germinales des ovaires
h
Le cancer est la
troisième cause
de décès chez les
adolescents, après les
accidents de la route
et le suicide. Dans un
cas sur trois, il s’agit
d’une leucémie (cancer
du sang) ; les autres
diagnostics relèvent
de tumeurs solides
de types très divers.
Les adolescents
sont en effet exposés
à la fois aux cancers
des grands enfants,
Les progrès
de demain se
préparent aujourd'hui
Poursuivre sa scolarité ou ses études à l’hopital, c’est aujourd’hui possible. Un moyen de garder de contact avec la « vraie vie ».
VRAI
OU FAUX?
fait aujourd’hui ses premiers pas en cancérologie ;
tout comme sa « grande sœur » la pédiatrie le faisait, il y a environ cinquante ans. L’avancée est de
taille, mais ne s’arrêtera pas là : l’idée de créer des
espaces spécifiques fait également son chemin.
LA RÉMISSION,
C’EST LA GUÉRISON ?
Faux. En l’absence
de tout signe de
maladie, le médecin
parle de rémission.
Pour certains cancers,
il parle de guérison dès
cinq ans de rémission.
Grâce au progrès
médical, la proportion
de jeunes ayant passé
ce cap est passée de
45 à 75 % en 30 ans.
Quand l’oncologie pour adolescents
émerge en France
Comparer les modes d’approche, évaluer les résultats thérapeutiques et proposer des prises en charge
médicales, psychologiques et socio-éducatives
adaptées : tels sont les objectifs des équipes soignant les adolescents et les jeunes adultes, afin
d’élaborer les stratégies les mieux à même de
vaincre les tumeurs spécifiques à cette tranche
d’âge (lire encadré p. 10). Les centres de cancérologie sont évidemment pionniers en la matière.
h
À la croisée des cancers
pédiatriques et adultes
« Notre choix a d’abord été de former nos équipes
et de recruter des personnels dédiés. Aujourd’hui,
nous réfléchissons ensemble à la possibilité de
créer une structure spécifique pour les jeunes âgés
de 12 à 25 ans », répondent les Drs Jean Michon
et Laurent Mignot, respectivement chef du
Département d’oncologie pédiatrique et chef du
Département d’oncologie médicale de l’Institut
Curie. Outre les aspects financiers, la réalisation
de ce projet pose encore nombre de questions :
déterminer l’organisation et la géographie de ce
service, le niveau de collaboration entre le personnel médical et soignant des deux départements
d’oncologie, etc. L’Institut Gustave-Roussy
(Villejuif, Val-de-Marne) a opté, quant à lui, pour
une unité réservée aux 13-20 ans.
Inaugurée en janvier 2003, elle a été la première ■ ■ ■
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
, 11
JIC65_8-13VB_SR1BAG 9/02/06 14:18 Page 12
DOSSIER
DOSSIER
LES 12-25 ANS
Des soutiens et des moyens
Les centres spécialisés en oncopédiatrie, tel l’Institut Curie, ont
bénéficié de moyens nouveaux. Sous l’impulsion du Plan cancer :
14,7 millions d’euros, dont 6,7 millions encore à venir en 2006-2007
ont été alloués pour l’ensemble du territoire français. À l’Institut Curie,
cette subvention a permis l’accueil de six professionnels de l’enfance
dont certains directement impliqués dans la prise en charge globale
d’adolescents et de jeunes adultes. Pour ces patients et face aux nombreux
projets imaginés par l’Institut, les soutiens des particuliers comme ceux
des associations sont les bienvenus. Véritables bouffées d’oxygène, ils sont
immédiatement investis dans un programme de recherche ou une initiative
mise en œuvre à l’hôpital de l’Institut Curie. Citons pour exemple la Ligue
nationale contre le cancer, pour 51 000 euros, et la Fondation de France,
pour 28 000 euros, finançant trois études lancées fin 2005 (lire encadré
« Générosité » p. 10). Durant la période 2000-2005, d’autres associations
comme Chauve-qui-peut, des fondations d’entreprises ou des particuliers
ont financé, à hauteur de 34 000 euros, des actions menées en direction
des jeunes, sans compter les 11 000 euros versés en 2005 par l’Association
de parents et amis d’enfants soignés à l’Institut Curie 1.
L’animation au service
des «12-25 ans»
h
1. Apaesic, tél. : 01 44 32 42 89, site Internet : www.apesic.com
■ ■ ■ unité française de cancérologie réservée aux
jeunes. « Il s’agit de développer ou d’apporter de
meilleures réponses thérapeutiques sur le plan
médical et psychosocial, mais également d’améliorer
la qualité de vie des jeunes malades et de leur famille
durant les traitements », explique le Dr Laurence
Brugières, oncologue pédiatre à Villejuif. Et de
préciser : «À terme, l’unité d’oncologie adolescents,
qui se situe dans le service de pédiatrie, fonctionnera
en binôme avec l’unité jeunes adultes “20-30 ans”,
qui devrait bientôt voir le jour dans le département
de médecine adulte. »
Cette nouvelle approche n’est pas propre à
la France. Bien au contraire. Elle s’inspire d’un
élan européen, et notamment britannique. OutreManche, les soins pour les jeunes atteints de
cancer sont particulièrement bien organisés, grâce
Y. Benzougar/Institut Curie
GRÂCE
À VOUS
LES 12-25 ANS
h
Ce n’est pas parce qu’on est malade et hospitalisée
qu’on ne veut pas rester belle, même à ses propres yeux.
À l’Institut Curie, la salle des « jeunes » est un espace de jeux, de repos et de
rencontre pour les patients adolescents.
VRAI
OU FAUX?
h
LE « PSY », C’EST
POUR LES FAIBLES ?
Faux. Le psychologue
est un professionnel
de confiance qui
écoute sans juger.
Parler avec un « psy »
permet de dire
ses craintes,
ses angoisses, de
poser ses questions
les plus intimes.
aux fonds récoltés par The Teenage Cancer Trust 2.
Résultats : plus d’une dizaine d’établissements
hospitaliers de Grande-Bretagne ont déjà créé une
unité dédiée, ou sont sur le point de le faire.
Dans un proche avenir, la prise en compte de
ces besoins jusque-là ignorés des systèmes de
santé permettra de mieux renseigner les études
sur les cancers qui touchent les adolescents et les
jeunes adultes, de mutualiser recherche clinique
et accompagnement médical, psychologique et
socio-éducatif, d’améliorer la qualité de vie de
ces patients pendant et après leurs traitements…
Et, au bout du compte, de faciliter leur passage
vers l’âge adulte tout en augmentant leur qualité
et leur espérance de vie.
Sarah Mélhénas
2. The Teenage Cancer Trust (Fondation pour les
adolescents atteints de cancer) organise un congrès tous les
deux ans à Londres ; le prochain congrès se tiendra le 31
mars 2006 au Royal College of Physicians.
E. Bouvet/Institut Curie
REMERCIEMENTS
LE JOURNAL DE
12 , L’INSTITUT CURIE
Merci à Anne-Sophie et Sébastien, qui ont accepté la présence
du photographe Éric Bouvet durant leur hospitalisation à l’Institut Curie.
Ont également collaboré à ce dossier, à l’Institut Curie, Michèle Delage
et Cécile Flahault, psychologues, Michèle Douarre, cadre de santé,
et Dr Étienne Seigneur, psychiatre.
Accéder à des activités ludiques et
poursuivre ses études lorsqu’on a entre
12 et 25 ans et qu’on est hospitalisé,
c’est possible à l’Institut Curie, mais
ce n’est pas encore le cas partout en France.
L’objectif est bien sûr de rompre le
sentiment d’isolement et de permettre la
poursuite de ses projets. Outre la mise en
place d’activités créatives et l’organisation
d’ateliers d’écriture, de percussion ou
d’arts plastiques, avec l’aide d’intervenants
extérieurs, l’un des objectifs de
Paula de Mélo, animatrice des adolescents
et jeunes adultes, est de favoriser
« le(s) lien(s) ». De ce point de vue, la
« salle ados », installée à la manière d’un
salon, constitue un espace privilégié. C’est
ici que la jeune femme réunit les jeunes à
l’occasion de soirées thématiques (crêpes,
DVD, jeux de société, etc.) ou rassemble les
« plumes » de Brèves de Curie, le journal des
ados et des jeunes. « Parfois, explique-t-elle,
ils veulent rester dans leur chambre et jouer
aux cartes ou simplement discuter. D’autres
fois, ils disent non à tout… Alors, je m’adapte. »
Respect des demandes et souplesse des
réponses prévalent également pour le
professeur des écoles spécialisé,
Bénédicte Sylvestre. Responsable du
dispositif école-collège-lycée de l’Institut
Curie, elle coordonne les cours dispensés
gratuitement par les professeurs bénévoles
de l’association l’École à l’hôpital 1, en
pédiatrie. Même chose pour Anne-Marie
Castex, déléguée de cette association à
l’Institut Curie, qui assure le suivi des jeunes
hospitalisés chez les adultes, qu’ils soient
au lycée, en formation professionnelle
ou dans l’enseignement supérieur.
« Quelle que soit l’attitude de ces “ados“ aux
personnalités multiples, nous nous devons de
les encourager à exister en tant qu’élèves »,
expliquent-elles d’une seule voix.
Et de conclure : « À l’Institut Curie, nous avons
à cœur d’encourager les jeunes à maintenir
leur projet de vie pour qu’ils s’affirment
et se tournent résolument vers l’avenir. »
1. Tél. : 01 46 33 44 80,
courriel : [email protected]
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
, 13
JIC65_14-19BAG 9/02/06 14:19 Page 14
ENTRE NOUS
ENTRE NOUS
INITIATIVES
INITIATIVES
,ÉVÉNEMENT
VOTRE FONDATION
UNE JONQUILLE POUR CURIE »
Du 22 au 26 mars 2006, les « Jardins pour la Vie » vont refleurir
autour du Panthéon qui, pour l’occasion, va revêtir un manteau de
60 000 jonquilles. Ces fleurs, offertes par Truffaut, sont le symbole
international de la lutte contre le cancer.
,SOLIDARITÉ
TRANSFORMONS L’ESSAI
CONTRE LES CANCERS PÉDIATRIQUES
1. Envoyez le mot CURIE au 8 28 28
(1,50 euro par envoi + coût de deux SMS).
h
DR
C
LE JOURNAL DE
14 , L’INSTITUT CURIE
’était il y a sept ans. Anne Lettrée,
galeriste, passionnée par l’art contemporain, apprend qu’elle a un
cancer du sein. Sans jamais abandonner
ses projets personnels, parcourant le
monde à la rencontre de nouveaux talents,
les exposant dans sa galerie parisienne,
elle lutte sans relâche contre la maladie.
Elle en est sortie victorieuse. Cette fois,
pour faire progresser la recherche contre
le cancer et soutenir les femmes, Anne
Lettrée a fait un geste fort en vendant aux
enchères, le 8 décembre dernier, une partie de sa collection privée : plus de trois
cents tableaux qui reflètent à la fois
ses voyages, ses coups de cœur et ses
espoirs. Près de 50 000 euros collectés à
cette occasion permettront de créer une
bourse d’étude pour favoriser la formation de jeunes chirurgiens étrangers à
l’Institut Curie.
La vente aux enchères fut précédée d’une
table ronde sur les avancées chirurgicales contre le cancer du sein, animée
par les Drs Françoise Firmin, spécialiste
en chirurgie réparatrice et plastique, et
Henri Tristan, radiologue-cancérologue,
sous la présidence du Dr Rémy Salmon,
chef du Département de chirurgie à l’Institut Curie.
Noak/le bar Floréal/Institut Curie
UN NOUVEAU COMBAT POUR UNE ANCIENNE MALADE
cette « fête » – puisqu’il s’agit véritablement d’un
moment chargé d’espoir – se déroulera pour la
première fois sur cinq jours.
Pour apporter votre soutien à la recherche à l’Institut Curie, vous pourrez faire des dons en ligne, par
SMS1 ou acheter des T-shirts illustrés gracieusement par le couturier Karl Lagerfeld. Parallèlement,
dans tous les magasins Truffaut, des bouquets de
jonquilles seront vendus au profit de l’Institut.
1. Envoyez le mot CURIE au 8 28 28
(1,50 euro par envoi + coût de deux SMS).
h
h http://rugby.curie.fr
Zelphis/Institut Curie
la marraine de l’Institut Curie, Amélie
Mauresmo accompagnée d’un enfant
soigné à l’Institut Curie. À cette occasion,
chacun pourra soutenir l’Institut Curie en
téléchargeant une jonquille sur son
mobile1. Les bénéfices de ces gestes contribueront à la recherche sur les cancers
pédiatriques. Le rugby, sport d’équipe
intense et poignant, est aussi symbolique
de la lutte contre le cancer : une force, un
combat et solidarité pour la gagner.
,VENTE CARITATIVE
« La vente de tableaux dirigée par Me Cornette
de Saint-Cyr comme la table ronde sont un
message d’espoir. Je souhaitais dire aux femmes
qu’il faut se battre jusqu’au bout. Parlons librement
de notre épreuve et, surtout, soutenons-nous.
Nous en avons toutes besoin. » Anne Lettrée,
galeriste, généreuse mécène de l’Institut Curie.
C
ette année encore, l’Institut Curie a la main
verte pour lutter contre le cancer avec « Des
jardins pour la Vie, une Jonquille pour
Curie ». Pour cette nouvelle édition, des jardins
s’étendent autour du Panthéon : thématiques, ils
incarneront les quatre saisons. La journée du
mercredi 22 mars inaugurera ce grand rendezvous caritatif au profit de la recherche sur le cancer menée à l’Institut Curie. Elle sera dédiée aux
enfants. Des ateliers de rempotage, de peinture
sur pot et des séances de maquillage leurs seront
proposés. Des clowns et des échassiers animeront l’après-midi. À partir de 16 heures, un goûter sera offert par les biscuits Lu aux enfants. Et
DR
D
imanche12 mars 2006, la France
et l’Angleterre s’affronteront pour
gagner le Tournoi annuel des
VI Nations. La Fédération française de
rugby (FFR) a décidé de témoigner son
soutien à l’Institut Curie et renouvelle ainsi
son engagement dans la lutte contre le
cancer, comme elle l’avait déjà fait en
février 2003 lors de la rencontre FranceÉcosse. Chaque joueur de l’équipe de
France jouera aux « couleurs » de l’Institut
Curie avec une jonquille – symbole de la
lutte contre le cancer – brodée sur une
manche de son maillot. Le coup d’envoi
sera donné au Stade de France par
ILS NOUS
SOUTIENNENT
« DES JARDINS POUR LA VIE,
L’Institut Curie dispose de l’expertise, des structures et des ambitions nécessaires pour « prendre
le cancer de vitesse ». La continuité de la recherche et des soins dans un même lieu, unique en son
genre, stimule l’innovation, favorise les échanges et le travail commun des chercheurs, médecins
et soignants pour accélérer la mise à disposition des nouveaux traitements aux patients. Notre
volonté de progresser est encouragée par le soutien et la générosité de nos donateurs et testateurs.
h Où : parvis du Panthéon, Paris 5e.
h Quand : du mercredi 22 au dimanche 26 mars,
Les bénéfices de la vente de ces T-shirts sont
consacrés à la lutte contre le cancer à l’Institut Curie.
EN BREF
Dîner générosité
Pour la deuxième année
consécutive, le restaurant
Nomad’s a organisé
un dîner de solidarité envers
l’Institut Curie. Cette soirée
caritative a permis
de collecter 6 770 euros
intégralement reversés
au profit des missions
de l’Institut.
de 10 heures à 19 heures.
h http://jonquille.curie.fr
« Tout sauf le blues »
Les 24 et 25 novembre
dernier, deux soirées
exceptionnelles ont rassemblé
des musiciens amateurs issus
du monde de l’entreprise et de
la communication au Petit
Journal Montparnasse à Paris.
« Tout sauf le blues » a permis
pour la seconde fois de
collecter quelque 1 500 euros
en faveur de l’Institut Curie.
Le classique aussi
Comme en 2004, l’association
Phares a apporté son soutien
à l’Institut Curie en organisant
un récital exceptionnel. Nada
Loutfi, pianiste de renommée
internationale, y a interprété
des œuvres de Schubert et
de Liszt. Les 3 210 euros
de recette ont été investis
dans la lutte contre le cancer.
Truffaut : Fidèle à
l’Institut Curie et
à sa devise « Plus
belle sera la terre »,
le pépiniériste participe
comme chaque année
à cette manifestation et
offre notamment
60 000 jonquilles, ainsi
que l’installation
des différents jardins.
Les Monuments
nationaux : Depuis
2004, le Centre des
monuments nationaux
met gracieusement
à la disposition
de l’Institut Curie le
Panthéon, l’un des plus
prestigieux édifices
parisiens dans lequel
ont été transférées
les cendres de Pierre
et Marie Curie.
RATP : Une partie du
réseau d’affichage
de la RATP annoncera
« Des Jardins pour
la Vie, une Jonquille
pour Curie. » La station
de RER Luxembourg
et les lignes
de bus desservant le
Panthéon s’associeront
à l’événement.
Au moment de
l’impression du journal,
d’autres partenaires
proposaient
leurs soutiens.
h Renseignements :
• Messagerie :
01 42 34 63 15,
• Site Internet :
http://jonquille.curie.fr
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
, 15
JIC65_14-19BAG 9/02/06 14:19 Page 16
ENTRE NOUS
ENTRE NOUS
INITIATIVES
INITIATIVES
,RENCONTRE
,COURIR POUR LA VIE
LES COMMUNES
PARTICIPANTES À COURIR
POUR LA VIE 2005
A. Krellenstein/Institut Curie
Communes
Une fois encore l’association Courir pour la Vie, Courir pour
Curie s’est battue aux côtés de l’Institut Curie. Depuis 1989,
ses bénévoles sont fidèles à l’Institut Curie et organisent des
manifestations de générosité sportives, familiales et conviviales
dont les bénéfices sont entièrement reversés à l’Institut.
D
epuis la naissance de Courir pour la
Vie, Courir pour Curie, au total, près
de 780 000 participants ont parcouru plus de 6 millions de kilomètres
dans plus de 3 000 communes françaises.
L’association est aujourd’hui plus que
jamais ambitieuse et désireuse de perpétuer cette relation qui l’unit à l’Institut.
Ainsi, le dimanche 9 octobre 2005, à Paris,
1 032 participants ont parcouru 10 000 km
et ont permis de collecter 33 000 euros.
Parmi les coureurs, le ministre de la
Recherche, François Goulard, la nageuse,
Muriel Hermine ou encore la première
gymnaste française championne olympique, Émilie Le Pennec. La fin de journée
a été rythmée par le passage des 8 000
patineurs de la Roller Ballade qui ont marqué une pause symbolique devant l’hôpital de l’Institut Curie.
La solidarité ne s’est pas manifestée uniquement à Paris. Trente communes ont,
elles aussi, organisé leur challenge. La
mobilisation collective a fait de cette maniLE JOURNAL DE
16 , L’INSTITUT CURIE
festation un véritable succès : plus de 17500
participants et près de 107 000 euros
collectés ! Deux villes sont les grandes
gagnantes 2005: Boeschèpe (Nord) a relevé
le défi sportif avec 18 641 km parcourus
et Janzé (Ille-et-Vilaine) le défi financier
avec près de 40500 euros collectés.
Les sommes collectées ont été remises en
février dernier à l’unité Inserm « Imagerie
intégrative : de la molécule à l’organisme »
spécialisée en imagerie cellulaire et moléculaire. Ces fonds ont financé l’achat d’un
microscope donnant des images en 3 D
(images tridimensionnelles) qui permettra
au laboratoire du directeur de recherche
Alain Croisy d’avancer dans la compréhension des mécanismes qui mènent des
cellules à devenir cancéreuses.
Chaque année, ces manifestations riment
avec émotion et générosité ; elles reflètent
tout particulièrement la motivation nationale pour « prendre le cancer de vitesse »,
devise de l’Institut Curie.
Clémence Musa
Dépt.
Dates
Boeschèpe
59
09/10/05
Braine
02
09/10/05
Cesson/Vert St Denis
77
10/09/05
Agde
34
23/10/05
Chirac
48
09/10/05
Carcassonne
11
10/09/05
Confolens
16
08/10/05
Courgivaux
51
08/10/05
Florac
48
14/08/05
Grenade sur Adour
40
02/10/05
Herbitzheim
67
Janzé
35
27-28/08
&01/10/05
31/09
&01-02/10/05
La Motte d’Aveillans
38
08/10/05
Le Theil Nolent
27
01-02/10/05
Lee
64
09/10/05
Lisses
91
08/10/05
Maugio-Carnon
34
09/10/05
Ploubezre
22
18/09/05
Riom-es Montagnes
15
02/07/05
Rivarennes
36
30/09
&01-02/10/05
Roissy en Brie
77
03/09/05
Sivom Outarville
45
16-17/10/05
St Denis les Rebais
77
01-02/10/05
Saint Gély du Fesc
34
11/09/05
Saint Leonard
76
08-09/10/05
Saint Pierre d’Autils
27
02/10/05
Vaux sur Seine
78
22/05/05
Villefranche sur Cher
41
08/10/05
Vitry en Artois
62
08/10/05
Depuis 2004, la championne de tennis Amélie Mauresmo apporte bénévolement son
soutien à l’Institut Curie. Elle nous explique sa démarche.
Comment êtes-vous devenue Marraine de l’Institut Curie ?
Amélie Mauresmo : À l’occasion d’un
match de démonstration dans la région
parisienne, j’ai d’abord rencontré des
enfants soignés dans le Département
de pédiatrie de l’Institut Curie et les
soignants qui les entourent. Je ne pouvais pas arrêter là mon action. Comment oublier ces jeunes patients et leur
lutte quotidienne contre la maladie ?
Et les personnels formidables qui sont
à leur chevet nuit et jour ? Je souhaitais
pouvoir donner aux malades du courage et un peu de bonheur. C’est donc
tout naturellement que j’ai accepté
cette mission.
Comment percevez-vous votre rôle ?
Devant la maladie, à la manière d’un
combat sportif, il faut toujours aller de
l’avant, se battre. Quelle que soit la raison, l’effort et l’envie de vaincre doivent
être là. C’est là le moindre de nos points
communs, aux malades et aux sportifs.
Mon rôle est également de faire bénéficier de ma notoriété l’Institut Curie et
les malades pour qui il œuvre. Je souhaite faire parler de cette cause dans les
médias, mobiliser mes amis, sportifs
ou non, et inciter mes sponsors à s’engager tout comme moi à soutenir l’Institut Curie (lire ci-dessous).
Quelle est votre prochaine action pour
l’Institut ?
Nous avons de nombreux projets, mais
d’ores et déjà, j’invite tous les Parisiens
à se rendre du 22 au 26 mars prochain
au Panthéon dans les « Jardins pour la
Vie » pour fêter le printemps et soutenir l’Institut Curie dans sa lutte contre
le cancer en cueillant symboliquement
une jonquille en échange d’un don.
Propos recueillis par Fabien Rivenet
K. Huck/Institut Curie
EXCEPTIONNELLE !
SERVICE GAGNANT CONTRE LE CANCER
h Depuis deux ans, la championne de
tennis met sa notoriété, sa générosité
et son esprit de « gagneuse » au service de
l’Institut Curie et des malades du cancer.
,VENTE AUX ENCHÈRES
UNE VICTOIRE POUR AMÉLIE,
PRÈS DE 43 000 EUROS
POUR L’INSTITUT CURIE
S
Philippe Buissin
UNE SOLIDARITÉ SPORTIVE
a victoire aux Masters de Los Angeles
(Californie), le 13 novembre 2005,
n’a pas fait oublier à Amélie Mauresmo
la cause qu’elle défend. Ce tournoi Sony
Ericsson prévoit une « récompense humanitaire et caritative» vendue aux enchères au
profit d’une cause choisie par la gagnante.
Première Française à remporter ce tournoi,
la marraine de l’Institut Curie a décidé que la
Porsche Cayenne S offerte serait vendue
au profit de la lutte contre le cancer menée
à l’Institut. Les enchères ont atteint 52 700
dollars, soit près de 43 000 euros, qui ont
été remis lors de l’Open Gaz de France 2006,
à Paris.
Cette somme permettra à l’Institut Curie de
financer l’un de ses projets de recherche ou
d’amélioration de la qualité des soins.
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
, 17
JIC65_14-19BAG 9/02/06 14:19 Page 18
ENTRE NOUS
ENTRE NOUS
INITIATIVES
RÉTROSPECTIVE
DEUX FOIS PLUS DE PATIENTS TRAITÉS
ACJC
h
Nathalie Boissière
1. Lire « Les nouveaux atouts de la
radiothérapie », dossier thématique de
l’Institut Curie (en vente par correspondance).
Frédéric Joliot au tennis, 1946.
S
Ce système combinant
un signal vidéo à l’appareil
de radiothérapie améliore
considérablement la
précision du traitement.
partie d’un des meilleurs clubs de la capitale: «Avant, inter-gauche : Joliot. Joue depuis
trois ans à côté de son centre. Toujours un
péril pour le goal adverse » 5…
Cet intérêt pour le sport sera porté par
d’autres scientifiques et médecins de l’Institut Curie, et aujourd’hui le sport nous le
rend bien. Pour preuve, les nombreux soutiens que reçoit l’Institut de la part de sportifs de haut niveau comme Amélie Mauresmo, marraine de l’Institut, bien sûr, mais
également la Fédération française de rugby
(lire page 14).
qu’elle apprend la création d’un Parc des
sports pour garçons, elle s’indigne : « Doisje comprendre que la possibilité de favoriser
l’éducation physique des filles n’a pas été envisagée par l’Université de Paris ? Nos filles
n’ont-elles donc point besoin d’exercice et de
santé ? Ne sont-elles donc, bien plus que nos
garçons, privées de tous moyens convenablement organisés pour profiter des jeux et exercices de plein air ? Et n’est-ce point le rôle de
l’Université de combattre les préjugés (…) ? » 3
En digne héritière de sa mère, « Irène prodiguait infatigablement des leçons de natation.
Elle appréciait vivement les dons sportifs et
les encourageait à l’égal des autres. » 4 Irène
pratiquait en effet la natation, mais aussi
les marches en forêt ou en montagne,
l’escalade, le ski, le tennis et la bicyclette.
Lorsqu’elle rencontre Frédéric Joliot, elle
constate qu’il est épris comme elle de
science et de sport. Ski, aviron, tennis, jiujitsu…, Frédéric Joliot s’enthousiasmait pour
tout. Au lycée, il ne consacrait au travail scolaire que le temps strictement indispensable, et il s’en fallut de peu qu’il ne devint
professionnel de football ! À 17 ans, il fait
h
i les travaux scientifiques de Marie
Curie sont connus de tous, beaucoup
ignorent son attachement à la nature 1
et aux activités physiques.
Ses vacances ont toujours été, pour elle, un
moment propice pour profiter du grand air.
L’été, plusieurs scientifiques célèbres se
retrouvaient en famille pour passer l’été en
Bretagne, sur la pointe de l’Arcouest. À « Sorbonne-plage », comme l’écrivent les journalistes, ou « Fort-la-Science », véritable
annexe de l’Université de Paris, les compétitions nautiques font rage. Marie Curie « ne
pratique pas le “crawl” et le “trudgeon”, chers
à ses filles et à leurs camarades. Méthodiquement entraînée par Irène et Eve, elle a appris
un “over arm stroke” de bon style ». Fière de
ses talents, elle compare ses résultats à ceux
des autres savants : « Jean Perrin a fait une
belle performance, aujourd’hui. Mais hier,
j’avais été plus loin que lui… » 2
Soucieuse de l’éducation et de la santé de
ses deux filles, Marie Curie insiste pour
qu’elles complètent leur scolarité avec
d’autres activités. Cette préoccupation va
bien au-delà de celle d’une mère. Lors-
ACJC
Si certains imaginent difficilement un scientifique délaissant
quelque temps son laboratoire pour la pratique d’un sport, un
bref regard vers le passé nous prouve qu’ils ont tort : l’activité
physique n’est pas incompatible avec l’obtention de prix Nobel !
Noak/le bar Floréal/Institut Curie
Noak/le bar Floréal/Institut Curie
h
«Le soutien de
l’Association de prévoyance
santé des professions
libérales de la Région
Île-de-France permet
désormais de traiter deux
fois plus de patients avec
la technique innovante qu’est
la radiothérapie asservie
à la respiration. » Dr Philippe
Giraud, radiothérapeute
à l’Institut Curie.
PHYSIQUES
mouvoir des actions relevant de la
santé, de la prévention et d’aides
sociales ainsi que d’informations
diverses. L’Institut Curie lui présenta alors son projet d’équipement du plateau technique de
radiothérapie, déjà l’un des plus
performants en Europe.
Leur soutien a immédiatement été
investi et, depuis juillet 2005, le
nouvel appareillage est installé
pour le plus grand bénéfice des
patients et à la grande satisfaction
de ses bienfaiteurs.
h
G
sont traités pour une maladie de
Hodgkin. Il n’existait qu’un seul
dispositif à l’Institut lorsqu’au printemps 2005 René Crampont recherchait pour son association un
projet d’amélioration des soins en
cancérologie en quête de financement. Avant même l’appel solennel
du président de la République faisant de la lutte contre le cancer
une priorité nationale, l’ADPS des
professions libérales de la Région
Île-de-France avait en effet choisi
d’agir et avait mis l’amélioration de
la qualité de la prise en charge des
patients atteints de cancer au cœur
de son action de bienfaisance. Le
but des ADPS est en effet de pro-
Frédéric Joliot au
Jiu-Jitsu, vers 1930.
ACTIVITÉS ET SCIENCES…
GRÂCE À UNE ASSOCIATION DE PRÉVOYANCE SANTÉ,
râce à votre généreuse action,
notre Département de radiothérapie va dispenser ce traitement innovant à deux fois plus de
patients.» C’est par ces mots que le
chef du Département de radiothérapie de l’Institut Curie, le Pr JeanMarc Cosset, et le Dr Philippe
Giraud, spécialiste de la radiothérapie asservie à la respiration, ont
accueilli René Crampont, président
de l’Association de prévoyance
santé (ADPS) des professions libérales de la Région Île-de-France.
Cette ADPS et l’un de ses partenaires, les assurances AGF, viennent de financer cet équipement à
hauteur de près de 36 700 euros.
Sur invitation du secrétaire général
de l’hôpital, Gérard Pinson, ils ont
visité cette installation technologique de dernière génération.
Grâce à cette ADPS, l’hôpital de
l’Institut Curie dispose d’un second
dispositif qui permet à la radiothérapie de s’affranchir des mouvements respiratoires du thorax du
patient, limitant les effets secondaires du traitement. En 2004, l’Institut était déjà le premier centre
européen à coupler un accélérateur de radiothérapie et un scanner à un détecteur de mouvement
synchronisant précisément et à
chaque instant la délivrance des
rayons au moment adéquat du
cycle respiratoire.
Cette synchronisation d’un signal
vidéo à l’appareil de radiothérapie,
ou radiothérapie dite « asservie à la
respiration » 1, améliore encore la
précision des traitements. Cela est
particulièrement adapté aux patients porteurs d’une tumeur
mobile avec la respiration, comme
les cancers du poumon, du sein et
du foie et aux jeunes malades qui
h
, LE CORPS ET L’ESPRIT
,HISTOIRE D’UN SOUTIEN
Renaud Huynh
Musée Curie, Institut Curie
1. Journal de l’Institut Curie, # 61.
2. Madame Curie, Ève Curie, 1937.
3. Lettre au recteur de l’Université, 12/06/1919,
archives du musée Curie (réf. 00248).
4. Heures claires, Aline Perrin (amie
d’enfance d’Irène), 1956.
5. Archives du musée Curie (réf. CDP-1715).
Si Marie Curie m’était contée…
Venez découvrir et faire découvrir aux
enfants l’histoire de la plus grande Dame
de la Science, au destin exceptionnel, sous
forme de conte… « Je suis de ceux qui pensent
que la science a une grande beauté. Un savant,
c’est aussi un enfant placé en face des
phénomènes naturels qui l’impressionnent
comme un conte de fées. » Marie Curie, 1933.
Cette activité a obtenu le soutien de
la délégation régionale à la recherche et
à la technologie d’Île-de-France et du
ministère délégué à la Recherche, dans le
cadre de l’Année mondiale de la physique.
Irène et Frédéric Joliot-Curie au ski, fév. 1929.
À partir de 6 ans. Chaque mercredi
sauf fériés. Sur inscription : 01 42 34 67 94 ou
[email protected]
ACJC
LE JOURNAL DE
18 , L’INSTITUT CURIE
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
, 19