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Dialogues Horizons 25
0123
Samedi 17 octobre 2009
Le casMitterrand
Médiatrice
I
Véronique Maurus
l est des causes dangereuses à plaider. Défendre un homme désigné
à la vindicte populaire expose inévitablement à en devenir, à son
tour, la cible. Le journal, par la plume de son directeur, Eric Fottorino, a pourtant choisi, dans l’édition du
10 octobre, de dénoncer la véritable
« chasse à l’homme» dont était victime
Frédéric Mitterrand, contraint, la veille,
de justifier sa vie privée devant des millions de téléspectateurs pour répondre à
une campagne féroce, sur fond d’amalgame et de scandale.
La réponse ne s’est pas fait attendre :
des centaines de réactions, tant sur la
Toile que dans le courrier des lecteurs.
Constatant la violence des critiques sur
Lemonde.fr, nous craignions le pire.
Il n’est jamais sûr : lettres et courriels
signés sont non seulement plus mesurés
mais aussi beaucoup plus nuancés sur le
fond – au point de se demander si la
« fachosphère» décrite par L’Express du
15 octobre (« Ce que cache l’affaire Mit-
terrand ») n’a pas pris, à l’occasion, notre
site en otage.
Compte tenu du nombre des courriers, nous publions ci-dessous une sélection de textes significatifs, impossibles à
citer in extenso dans cette chronique.
Une large partie des lecteurs, heureusement, partage la position du journal,
comme Jean-Pierre Bechtold et Janie Den
Boer (ci-dessous). Idem pour, entre
autres, André Sillam (Noisiel, Seine-etMarne), qui s’élève contre « cette politique spectacle, ce lynchage médiatique, ce
réquisitoire sans avocat, ce procès sur la
place publique sans règle ».
Une part non moins large des lecteurs, critique – posément – notre position au nom tantôt de l’analyse politique, tantôt de la morale. Les premiers,
comme Gabriel Sabbagh (ci-dessous), distinguent l’homme du responsable politique – « Frédéric Mitterrand, saltimbanque ou ministre ? », résume Claude Rollier (Paris). Les seconds, à l’instar de
Rémi Vincent (ci-dessous) ou de Françoi-
se Vidal (Paris), estiment que « Le Monde
défend l’indéfendable», c’est-à-dire le
tourisme sexuel.
Un troisième groupe prend parti sur
le fond, cette fois au nom de l’égalité. Ce
sont les plus virulents. Tels Jean-Claude
Courbis (ci-dessous), ces lecteurs s’élèvent contre ce qu’ils perçoivent comme
une insupportable complicité de « classe ». « Le milieu socioculturel (parisien,
amateur d’art…) dans lequel baignent les
rédactions ne pouvait que leur faire adopter, par mimétisme, cette position malencontreuse », relève, par exemple, Emmanuel Blachez (Saint-Maur, Val-de-Marne). « Cet éditorial, c’est les gens du château qui défendent d’autres gens du château », renchérit Briand Gibert (courriel).
Plus grave : certains soupçonnent le
journal non seulement de connivence
mais de collusion. Vincent Rivasseau
(Paris) évoque les journaux français « à
la botte d’un pouvoir lamentable », tandis que Claude Spriet-Pourra (Rueil-Malmaison, Hauts-de-Seine) s’interroge : « A
croire que vous avez été enrôlés par l’Elysée pour participer au sauvetage. »
Une dernière fraction, enfin, regrette
que le journal ait pris position sur le
« cas Mitterrand». Déplorant le titre de
l’éditorial (« Chasse à l’homme »), « trop
exagéré pour tous ceux qui peuvent avoir
un avis contraire, ou simplement avoir
des doutes », Roland Didier (SaintNabord, Vosges) remarque : « L’affaire
Mitterrand n’est tout de même pas l’affaire Salengro. » « Le Monde deviendrait-il
un quotidien d’opinion? », regrette Catherine Reynier-Barateau (courriel).
S’il ne revient pas à la médiatrice de commenter la ligne éditoriale du journal, il lui
est permis de dissiper erreurs et malentendus.
Non, le quotidien n’a pas défendu le tourisme sexuel. L’éditorial qualifiait non seulement d’«erreurs», mais aussi, trois lignes
plus bas, de «bassesses», les fautes confessées par Frédéric Mitterrand. Et, non, bien
sûr, il n’a pas été «enrôlé» par l’Elysée pour
sauver le soldat Mitterrand. Grâce à la composition de son capital et à ses statuts, Le
Monde est encore l’un des rares groupes de
presse à rester indépendant de tous les pouvoirs.
C
ertes, le «quotidien de la rue des Italiens», comme on disait jadis, est parisien; de plus il est fait (et lu en majorité) par ceux qu’on peut qualifier d’«intellectuels». Cela ne rend pas pour autant ses
journalistes (directeur compris) complices
des «élites politico-médiatiques» ou des
milieux de la culture qu’ils fréquentent par
obligation professionnelle. La distance par
rapport aux sources existe et fait partie des
règles de déontologie de la rédaction.
Quant à la présumée «neutralité» du
quotidien, c’est une légende. «La première
ambition du Monde, écrivait son fondateur, Hubert Beuve-Méry, dans le premier
numéro, est d’assurer au lecteur des informations claires, vraies et, dans toute la
mesure du possible, rapides, complètes.» Il
ajoutait toutefois: «Mais notre époque
n’est pas celle où l’on peut se contenter d’observer et de décrire.» Le journal ne s’est
jamais privé de prendre position
sur les affaires du temps.
Il l’a fait, non pas pour obéir à une quelconque ligne politique, mais au nom de
grandes valeurs, restées inchangées à ce
jour et qu’on peut qualifier d’humanistes:
liberté, démocratie, justice, tolérance, lutte
contre les discriminations, les humiliations et tout ce qui porte atteinte à la dignité de l’homme. C’est ainsi qu’Hubert BeuveMéry, tout en condamnant fermement le
putsch d’Alger et l’OAS, avait, le 21avril
1962, plaidé la clémence pour l’un des putschistes, le général Jouhaud, dans un éditorial commençant par ces mots: «Pâques,
joyeuses Pâques… Mais un homme est
condamné à mort.» Il s’agissait certes de la
peine de mort et non d’un hallali médiatique, mais la démarche du journal, défendant un homme dont il condamnait les
actes, était comparable.
Il n’avait choisi ni la facilité ni le silence.
«Il est important, quand une affaire fait
débat, de la confronter aux valeurs que
nous défendons, explique Eric Fottorino.
Défendre un homme humilié, victime d’un
lynchage médiatique, ne signifie pas qu’on
absout l’exploitation sexuelle dans le tiersmonde. Il faut avoir lu le livre de Frédéric
Mitterrand en entier pour comprendre que
c’est le livre d’un homme dans le remords.
J’écris de bonne foi, au nom de nos valeurs.
J’attends qu’on me lise avec bonne foi.» p
Courriel : [email protected]
Courrier
Amalgames
Plus tard – dans quelques mois sans doute –, on se demandera: mais
comment en sommes-nous arrivés là, à ces amalgames, ces lynchages?
D’une affaire Polanski qui concerne la justice d’un pays où l’Etat de
droit permet toutes les voies de recours sans interférence décisive des
autorités politiques, on en arrive à une affaire franco-française à la suite
d’une déclaration inopportune et maladroite de notre ministre de la
culture. Une guerre civile des mots est enclenchée qui prend le peuple
en otage. Est-ce bien raisonnable?
Frédéric Mitterrand s’est mis de son propre chef dans une position
embarrassante: il a réagi avec ses tripes plus qu’avec son esprit. La
mayonnaise médiatique avait les ingrédients à portée pour prendre les
proportions que nous sommes nombreux à déplorer. Pour autant il ne
devrait pas y avoir une « affaire » Mitterrand: le contenu de son livre ne
relève pas d’une révélation soudaine, postérieure à sa nomination.
Après tout, c’est au président de la République – qui affirme avoir lu le
livre de son ministre – d’évaluer l’opportunité de cette nomination et
d’en assumer les conséquences.
Le peuple n’a pas besoin de nouvelles victimes expiatoires. On se
contentera de mettre au crédit de ces lamentables prises de bec la
condamnation réaffirmée de la pédophilie et du tourisme sexuel. Ça
suffit pour siffler la fin de cette partie de dupes.
Jean-Pierre Bechtold
Montoire-sur-le-Loir (Loir-et-Cher)
Elites protégées
On en a assez de voir certaines élites politico-médiatiques, celles-là
mêmes qui nous font la morale à
tout bout de champ, qui se
croient au-dessus des lois et ne
supportent pas la moindre remise
en cause. Le gouvernement de
M.Sarkozy nous rebat les oreilles
avec la tolérance zéro mais n’en
comprend pas moins un ministre
dont les propres écrits laissent planer un sérieux doute quant à sa
crédibilité morale.
Jean-Claude Courbis
Chambéry
DU 19 AU 25 FÉVRIER 2010
Exception culturelle
L’homosexualité masculine entre
adultes consentants est tout à fait
légale, mais des relations sexuelles avec de jeunes mineurs constituent une variante non légale
dans la plupart des pays et fort
goûtée dans la Grèce antique.
Le hic est que, dans notre société
actuelle, cette variante, dont nombre d’aînés de Frédéric Mitterrand, de Gide à Montherlant,
ont tâté, est au minimum un délit
et que ni Gide ni Montherlant
n’ont été nommés ministres de la
culture après publication d’un
livre relatant leurs « exploits ».
Il faut croire que l’exception culturelle française couvre des domaines très étendus. Il est très facile
d’avoir des ministres pour obligés
et très difficile d’avoir en même
temps la considération des lecteurs.
Gabriel Sabbagh
Paris
En exclusivité pour les lecteurs du Monde,
une superbe aventure musicale au cœur même des festivités du bicentenaire,
de Cracovie et des mines de sel de Wieliczka à Varsovie et Zelazowa Wola,
concerts, visites, rencontres uniques et récitals privés.
Exploitation de la misère
Comment oser écrire que, dans les
bordels thaïlandais, il pourrait
exister des rapports sexuels librement consentis? La prostitution
dans le tiers-monde comme
ailleurs naît de la misère, de la
pauvreté, de la violence qui brise
et contraint les individus. Personne ne peut ni ne doit l’ignorer,
ministre, futur ministre, journaliste, simple citoyen. Tous doivent
condamner sans réserve et non
pas excuser le tourisme sexuel.
Au prétexte de ne pas confondre –
à juste titre – homosexualité et
pédophilie, il ne faut oublier de
condamner l’exploitation des
corps et ne trouver aucune excuse
à ceux qui en usent et abusent.
Rémi Vincent
Pantin (Seine-Saint-Denis)
IVO POGORELICH et MURRAY PERAHIA
en concert à la Philharmonie de Varsovie
Voyage accompagné par Olivier LUCIANI,
premier prix de piano au Conservatoire national supérieur de musique de Paris.
Licence 075960149 - Crédit photo : Fotolia.
Allons, allons, que l’on ne se leurre pas. Marine Le Pen d’un côté,
Benoît Hamon de l’autre, se
moquent éperdument des activités de Frédéric Mitterrand en
Thaïlande. Ils ont tout simplement reniflé le maillon le plus faible du gouvernement.
Ce qu’ils veulent, pour Benoît
Hamon, c’est un scandale autour
d’un homme qui a rejoint le
camp adverse et, pour Marine Le
Pen, un scandale tout court qui
éclabousse la droite et la gauche.
Ainsi, le Front national, virginal
tel Jeanne d’Arc, contemple en
ricanant la mêlée et se régale
d’être rejoint par le Français
moyen qui déteste pêle-mêle les
homos, les artistes, les gens cultivés, les « bourgeois », etc. Je pense
depuis longtemps que nous adoptons bien des travers des EtatsUnis : en voici un, redoutable, qui
consiste à fouiller dans la vie des
gens pour les démolir. On y trouve toujours quelque chose ! Ceux
qui jettent les pierres devraient se
méfier…
Janie Den Boer
Lyon
à l’occasion du bicentenaire de la naissance
de Frédéric Chopin
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