Chaud débat en vue sur le financement de la

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Chaud débat en vue sur le financement de la
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24 heures | Jeudi 15 mai 2014
Vaud
Vevey
«Les praticiens mieux
traités que les canailles»
Le procureur déplore
une disposition qui met
à l’abri d’une lourde peine
le toubib qui a mis 30 000
comprimés de Dormicum
sur le marché noir
La mosquée de Vevey nécessite des travaux pour un montant de l’ordre de 2 millions de francs. GÉRALD BOSSHARD
Chaud débat en vue sur le
financement de la mosquée
La Municipalité de
Vevey propose
d’endosser les
intérêts d’un prêt
que va contracter
la Fondation
islamique, qui doit
rénover sa mosquée
Christophe Boillat
La mosquée de Vevey est installée
depuis cinq ans dans un ancien
garage. Le vendredi, jour de
grande prière, 400 fidèles s’y
massent (Vevey compte environ
1900 musulmans, soit 10% de sa
population). En l’absence de ventilation et de chauffage dignes de
ce nom, en présence de fuites
d’eau, les conditions sont loin
d’être idéales pour la pratique du
culte. «Une fournaise l’été, un
frigo l’hiver», résume Grégory
Stergiou, président de la Fondation islamique du district RivieraPays-d’Enhaut, fondée il y a vingt
ans à Vevey. «Pire, les installations ne sont plus aux normes. Il
faut y remédier», ajoute l’imam
veveysan Abdelhamid Chakir.
Les musulmans de la région
ont adressé récemment une demande d’aide financière à la Ville.
De l’ordre de 200 000 francs sur
dix-sept ans. Exclusivement pour
qu’elle paie les intérêts (ribà)
d’un emprunt bancaire, ce qu’interdit le droit canonique musulman. Les remboursements du
prêt seront assumés par la communauté musulmane. L’exécutif
a décidé de relayer favorablement cette nouvelle démarche
auprès de son parlement, qui se
déterminera en juin (lire ci-contre).
Refus en 2011
En fait, la fondation prévoit depuis 2011 déjà des travaux d’envergure et coûteux: 2 millions de
francs. Ses responsables envisagent depuis la même date de recourir à un prêt bancaire. Dans
un premier temps, ils avaient approché la Municipalité afin que la
Ville contracte le prêt – que la
fondation aurait remboursé année après année – et paie les intérêts. Le Conseil communal n’était
même pas entré en matière.
Les musulmans ont remis
l’ouvrage sur le métier et revienVC4
Contrôle qualité
nent donc avec une demande
quelque peu différente. Et aussi
avec 300 000 francs de fonds
propres, argent récolté auprès
des membres. Leurs responsables
ont adressé des demandes de prêt
à des organismes bancaires pour
le 1,7 million restant. «Nous pourrons rembourser les échéances,
100 000 francs par an, mais se
pose toujours le problème de l’intérêt», rappelle l’imam. La requête porte désormais sur le seul
paiement des intérêts par la Ville.
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C’est, en millions, le montant
envisagé pour rénover
la mosquée de Vevey
«L’aide financière apportée
par la Ville serait environ de l’ordre de 200 000 francs sur dixsept ans. Avec des paiements dégressifs: 33 000 francs la première année, 5000 la dernière»,
analyse Etienne Rivier, municipal
des Finances. Cette aide est considérée par le syndic, Laurent Ballif, «comme une solution acceptable à l’intention des musulmans
de la région, fort bien intégrés».
Certes, mais, après un premier
refus, la demande n’est-elle pas
maladroite? «Non. Nous faisons
partie intégrante de la vie vevey-
sanne. Outre les rencontres cultuelles, notre mosquée accueille
des classes d’enfants, des rencontres œcuméniques avec les autres
religions, et peut être mise à disposition de la protection civile.
Nous demandons un coup de
pouce comme peuvent le faire
des associations sportives ou culturelles», détaille Grégory Stergiou, qui espère que le Conseil
communal accédera cette fois à la
requête. A noter que c’est la Fondation islamique de la région qui
est à l’origine de la très appréciée
Fête multiculturelle de Vevey.
Indépendance
Mais pourquoi les musulmans de
Vevey n’approchent-ils pas de riches donateurs acquis à leur
cause pour financer leurs travaux? «C’est délicat. Nous ne souhaitons pas recevoir d’argent de
pays comme l’Arabie saoudite ou
ailleurs, déclare Grégory Stergiou. Car nous voulons garder notre indépendance.» Pour Abdelhamid Chakir, l’aide financière de
Vevey permettrait d’ancrer un
peu plus le lieu de culte dans le
patrimoine de la ville: «Ainsi, les
Veveysans seraient fiers de leur
mosquée, au même titre que pour
leur temple ou leur église. Et les
liens qui existent entre nous et les
autorités successives depuis vingt
ans seraient encore renforcés.»
Autre argument que pourrait
soulever le débat au Conseil communal, la possibilité dans certains
cas – extrêmes – pour les musulmans d’emprunter avec intérêt.
Ce fut le cas pour ceux de Vevey
lorsqu’ils ont acheté le garage
transformé en mosquée il y a cinq
ans alors qu’ils avaient déjà engagé 100 000 francs qu’ils risquaient de perdre sans nouvel apport. «Dans le canton, sur 15 lieux
de culte environ, outre Vevey,
seuls ceux de Moudon, d’Ecublens et de Prilly sont propriété
d’associations qui ont reçu des
dons pour y accéder», précise
Pascal Gemperli, président de
l’Union vaudoise des associations
musulmanes (UVAM).
Exceptions autorisées
Dans des cas individuels, le
Conseil européen de la fatwa permet à un musulman de contracter
un prêt avec intérêt pour l’achat
d’un logement. «C’est vrai, cela
existe en Suisse comme ailleurs,
dit Abdelhamid Chakir. S’il s’agit
d’une nécessité vitale, s’il y a un
intérêt personnel prépondérant.
Comme pour un père, par exemple, qui veut mettre sa famille à
l’abri alors qu’il n’a pas l’entier
des fonds propres. Cela ne peut
en revanche pas s’appliquer à notre mosquée, qui n’est pas un lieu
où l’on vit, mais où l’on prie.»
Environ 30 000 musulmans
vivent dans le canton. «Les pratiquants sont de l’ordre de 10% à
12%, même proportion que pour
les autres religions», indique le
président de l’UVAM.
Les élus veveysans sont partagés
U L’organe délibérant veveysan
se penchera en juin sur l’octroi
ou non d’une aide financière en
faveur de la Fondation
islamique du district RivieraPays-d’Enhaut. Chef de file des
UDC, le député Bastien
Schobinger s’y oppose: «Je n’ai
rien contre les musulmans de
Vevey. Mon opposition se
focalise d’abord sur l’aspect
financier. Nous sommes en
pleine période d’austérité et
n’avons pas les moyens d’offrir
200 000 francs pour cette
cause. Par ailleurs, la
communauté orthodoxe, quand
elle a effectué des travaux dans
son église, n’a sollicité aucun
soutien financier de la Ville. Les
musulmans doivent faire de
même. Il ne faut pas créer de
précédent.»
Patrick Bertschy (PLR) abonde
dans ce sens. «Certes, les
musulmans ont fait des efforts
importants pour trouver de
l’argent. Mais ce n’est pas à nous
de contribuer. Ou alors pourquoi
ne pas donner aux orthodoxes,
aux évangélistes, aux juifs. La loi
vaudoise stipule que l’on ne peut
soutenir que deux religions: les
catholiques et les protestants. Les
autres doivent se débrouiller.»
A la gauche de la gauche,
Alain Gonthier (Alternative) veut
soutenir le projet municipal:
«Nous sommes en effet favorables pour aider les musulmans.
Le signal est fort pour qu’ils
puissent exercer leur religion
Le ministère public a requis hier
2 ans avec sursis contre le médecin jugé depuis mardi à Lausanne
pour un vaste trafic de somnifères
assimilés à des stupéfiants. «Ce
n’était pas un trafic sous le manteau, mais sous une bâche!» lâche
le procureur Christian Buffat. Il
rappelle que l’homme de l’art a
acheté et remis sans ordonnance
30 000 comprimés de Dormicum
à un ami qui affirmait sans preuve
que la marchandise était destinée
à des hôtes du Golfe de passage à
Genève. Pourquoi le sursis? Parce
que l’histoire a suffisamment
éprouvé ce praticien au passé sans
tache pour qu’une récidive ne soit
pas à craindre.
Aux yeux du magistrat, cette
affaire soulève un problème plus
général: «Il a été admis qu’à partir
de 2400 de ces comprimés la
peine est de 1 an de prison au
moins, sinon c’est 3 ans au plus.
Or, la loi sur les stups considère
que cette gradation ne s’applique
à un professionnel de la santé que
s’il trafique par métier, notion liée
au chiffre d’affaires ou au gain.
Cela n’est pas le cas pour ce médecin, qui n’a reçu que deux fois
500 francs.» Pour Christian Buffat, il s’agit d’une grave lacune de
la loi: «La commission parlementaire avait voulu que les praticiens
ne soient pas traités plus favora-
blement que les canailles, et on
voit que ce n’est pas le cas.»
Contre le comparse, un courtier en assurances, le ministère
public demande 4 ans ferme. Non
seulement parce qu’il n’échappe
pas à l’aggravation impossible à
retenir pour son ami médecin,
mais parce que son cas s’alourdit
d’un phénoménal excès de vitesse
de 324 km/h filmé par lui sur l’A1
malgré cinq retraits de permis entre 2005 et 2010.
Face au réquisitoire musclé du
procureur, la défense n’a pas ménagé son talent. Au côté du médecin, Me Vincent Spira s’est livré à
une longue démonstration tendant à démontrer que le Dormicum n’est pas perçu comme un
stupéfiant à part entière, et à tout
le moins que son client était en
droit de le penser. Et de lancer:
«Sinon il faudrait aussi poursuivre
le grossiste!» Il réclame un acquittement sur ce point, tout en admettant une infraction à la loi sur
les produits thérapeutiques et à
celle sur la santé publique.
Me Roland Bugnon, défenseur
du comparse, a suivi le même raisonnement en ce qui concerne les
stups. Mais il s’est aussi efforcé de
battre en brèche l’accusation d’excès de vitesse. D’abord en contestant la licéité de la preuve par cette
vidéo du tableau de bord découverte par hasard dans le téléphone
de son client. Ensuite en balayant
les indices qu’on peut y trouver:
«C’est comme un bikini qui montre beaucoup mais pas l’essentiel,
en l’occurrence l’identité du
conducteur.» Verdict vendredi.
Georges-Marie Bécherraz
dans des conditions dignes. Et la
dépense minime: en moyenne
1 fr. 50 par an pour chaque
Veveysan pendant dix-sept ans.
On est loin des 120 francs annuels
que chaque habitant doit verser
pour les religions dites officielles.»
Clément Tolusso (Les Verts)
est quelque peu partagé: «Ce
serait la moindre des choses que
de soutenir les musulmans de la
région. L’effort financier n’est
pas important. Mais nous
manquons encore d’informations. Il faut attendre les
délibérations et le rapport de la
commission ad hoc chargée
d’étudier ce projet afin d’avoir
toutes les données pour pouvoir
se prononcer au mieux.»
Parmi les chefs-d’œuvre, Thétis, la mère d’Achille, découverte
dans la Maison aux mosaïques (IVe siècle av. J.-C.). ESAG, A. VOEGELIN
Les archéologues suisses
depuis 50 ans en Grèce
L’Ecole suisse
d’archéologie en Grèce,
dont le siège se trouve
à Lausanne, fête 50 ans
de fouilles à Erétrie,
en Eubée
Erétrie: une des cités qui ont fait la
grandeur de la Grèce antique, de
par son rôle dans la colonisation
du monde méditerranéen, la diffusion de l’alphabet au VIIIe siècle
av. J.-C. et la vie politique de l’époque classique. De ce long passé, la
ville située sur l’île d’Eubée a conservé de nombreux vestiges, tels
qu’un sanctuaire d’Apollon, des
thermes, des quartiers d’habitation, un théâtre et bien d’autres
bâtiments et chefs-d’œuvre.
Toutes ces découvertes ont été
réalisées et étudiées depuis 1964
par l’Ecole suisse d’archéologie en
Grèce (ESAG), dont le siège se
trouve à Lausanne. L’ESAG, qui a
reçu son titre des autorités archéologiques grecques en 1975, est la
seule mission archéologique suisse
permanente hors des frontières
nationales. Elle possède un appartement à Athènes et une maison de
fouilles à Erétrie, où un important
travail se fait à l’année. L’école, qui
encourage la relève, accueille aussi
des étudiants des universités suis-
ses, qui ont la possibilité de prendre part aux fouilles et aux études
des vestiges et des trouvailles.
Cette année, l’institut suisse
fête ainsi un demi-siècle de découvertes sur le site hellénique. «C’est
une grande chance de travailler
avec cette culture qui est au début
de notre propre civilisation, de
voir les progrès depuis tout ce
temps», se réjouit Karl Reber, professeur d’archéologie classique à
l’Université de Lausanne et directeur de l’ESAG. Pour célébrer
l’événement, l’école organise une
manifestation au Musée de l’Acropole à Athènes aujourd’hui et un
colloque réunissant des spécialistes de divers pays demain. «Nous
aurons aussi la chance de recevoir
Planet Solar, qui fera escale à Erétrie le 1er août, ce qui nous offre
une certaine visibilité», souligne le
directeur. Plus près de chez nous,
l’ESAG organisera une célébration
le 21 novembre à l’Université de
Lausanne. Des Suisses travaillant
sur le site archéologique viendront
y présenter l’état de leurs recherches. A.H.
Plus de photos des
fouilles et découvertes
eretrie.24heures.ch