Nouvel article de Marie-Jeanne Pasquette. Ecureuil 1

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Nouvel article de Marie-Jeanne Pasquette. Ecureuil 1
BPCE abandonne 315 millions pour éviter un redressement fiscal
Nouvel article de Marie-Jeanne Pasquette. Ecureuil 1- Fisc 0. PicanoNacci renonce à laver son honneur. En se déclarant victimes
irresponsables des pertes de leurs traders, les banques restent
maîtresses du jeu et le fisc français doit leur accorder les exonérations
qu’elles revendiquent. Aux Etats-Unis, les autorités infligent des
amendes à la hauteur des fraudes qui renflouent les finances
publiques, en France les contribuables paieront les exonérations et
impunités, parfois contestables, dont profitent nos champions
bancaires.
Le groupe BPCE, né en juillet 2009 de la fusion des Banque Populaire et des Caisses
d’Epargne consécutive à leurs déboires spéculatifs, a renoncé à réclamer un
dédommagement à son trader pour ne pas perdre la déductibilité de sa perte. (photo ©
GPouzin)
Boris Picano-Nacci s’est désisté. L’ex-trader des Caisses d’Epargne a renoncé à
sa défense, il reste donc coupable d’abus de confiance condamné en
correctionnel à 2 mois de prison avec sursis et au civil à 315 millions d’euros
de dommages et intérêts. Mais le plaignant (Banques Populaires Caisses
d’Epargne), l’a finalement exempté. Un accord secret a été signé, affirme
Mediapart. Boris Picano-Nacci aurait renoncé à faire appel, tandis que la
banque aurait renoncé à lui réclamer la somme exorbitante de 315 millions
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BPCE abandonne 315 millions pour éviter un redressement fiscal
d’euros, selon le site d’information.
Au Tribunal, l’affaire a été vite pliée. Boris Picano-Nacci étant dispensé
d’audience ce mercredi 25 juin, c’est son avocat Martin Reynaud qui a annoncé
le désistement, l’avocat général Dominique Gaillardot acceptant cette
rétractation qui arrangeait tout le monde. Ainsi, la cour d’appel de Paris
présidée pour l’occasion par Catherine Dalloz, n’a pas eu à contredire le
jugement de la cour de cassation sur l’affaire Kerviel ( lire « Qui veut perdre
des milliards ? L’Ecureuil et son trader en procès revisitent l’affaire Kerviel »).
BPCE ne voit pas sa responsabilité liée à la perte de 752 millions d’euros du
trader, remise en cause par le Tribunal. Et Société Générale évite un
précédent sur le partage des responsabilités entre banque et « rogue trader ».
Le grand gagnant étant Jean Reinhart, à la fois avocat de BPCE dans cette
affaire et de la Générale face à Kerviel. Il remporte la première manche.
On est d’autant plus curieux de connaître le contenu exact du compromis entre
BPCE et Picano-Nacci, que le 13 février 2013 dans la foulée du jugement en
correctionnelle, ce dernier voulait, au contraire, en découdre. « Pourquoi je
fais appel » c’était le titre de la publication sur son blog chez Mediapart, d’une
longue liste d’éléments à décharge.
Il écrivait que le procès verbal de la Brigade financière du 3 février 2011
faisant suite à 27 mois d’enquête et d’investigations, ne révèlait « aucun
élément frauduleux … pas la moindre manoeuvre malveillante de sa part »
. Au cours du procès, la banque, comme son avocat, la présidente du tribunal,
ou encore le procureur, avaient même déclaré que le trader était honnête et
qu’il n’y avait jamais eu de dissimulation de sa part. « En outre, mon avocat a
fait valoir des arguments juridiques sérieux sur l’absence de tout abus de
confiance » ajoutait Boris Picano-Nacci. S’en suivait une liste d’arguments
pour prouver sa bonne foi, pourtant, laissés de côté par le juge, selon lui.
Meurtri, il se faisait fort de prouver en appel que ce qu’il avait fait n’était pas
interdit et voulait laver son honneur.
Mais tout a un prix. On ne saura sans doute jamais exactement lequel. L’avocat
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Martin Reynaud explique que son trader était fatigué du procès. Interrogé
suite au désistement sur le compromis signé avec son trader, BPCE s’est
refusé tout commentaire. Ce que la banque s’empresse de dire en revanche,
c’est qu’elle ne se considère plus en risque fiscalement, depuis juin 2013. Nous
avions écrit qu’un procès en appel qui déciderait d’un partage de
responsabilité entre BPCE et Picano-Nacci pouvait remettre en cause la
déductibilité fiscale des 750 millions d’euros de pertes imputées initialement à
Boris Picano-Nacci. BPCE assure que l’administration fiscale a examinée son
dossier dès juin 2013, pour conclure que la perte constituait bien une charge
fiscalement déductible, et cela, avant même l’issue du procès en appel.
De deux choses l’une, soit l’Ecureuil bluffe, soit les inspecteurs des impôts, qui
se devaient d’attendre la fin de l’action en justice pour validé ou non la
déductibilité des pertes, auraient outrepassé leurs droits pour des raisons
mystérieuses.
Marie-Jeanne Pasquette
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