Droit disciplinaire Pas de violence verbale ou physique dans l

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Droit disciplinaire Pas de violence verbale ou physique dans l
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Droit disciplinaire
Que faire quand les salariÉs « dérapent » au travail ?
Pas de violence verbale ou physique dans
l'entreprise
Lorsque les salariés s'insultent, se disputent violemment, voire en viennent
aux mains dans l'entreprise, l'employeur doit réagir. En effet, ces dérapages
ne relèvent pas que de « l'affaire personnelle » des salariés. Encore faut-il que
l'employeur identifie les actes à réprimer.
Pourquoi l'employeur doit-il « s'en mêler » ?
Un salarié ne doit exercer aucune violence dans l'entreprise pendant l'exécution de son contrat de
travail. Cette évidence s'impose au salarié que l'employeur l'ait ou non rappelée dans le contrat, dans le
règlement intérieur, etc., car elle relève de la discipline générale de l'entreprise. L'employeur peut donc
sanctionner le salarié qui ne respecte pas cette interdiction.
Par ailleurs, l'employeur est tenu d'assurer la sécurité et de protéger la santé physique et mentale des
salariés qui sont placés sous son autorité (c. trav. art. L. 4121-1). Il prend les mesures nécessaires à cet
égard et sanctionne, le cas échéant, les salariés qui mettent en cause leur santé ou leur sécurité ou celle
d'autres salariés. De leur côté, les salariés ayant un comportement violent contreviennent à leur propre
obligation en la matière (c. trav. art. L. 4122-1).
Identifier les violences répréhensibles
Menace, insulte et propos excessifs. - Un salarié qui insulte ou menace ses collègues, un responsable
hiérarchique, voire son employeur, doit être sanctionné. En effet, si, en principe, un salarié peut
s'exprimer librement dans l'entreprise, et en dehors de celle-ci, il ne doit pas en abuser (cass. soc. 14
décembre 1999, n° 97-41995, BC V n° 488).
Par exemple, il ne peut pas tenir de propos injurieux ou excessifs à l'égard d'un autre salarié ou de son
employeur (cass. soc. 9 novembre 2004, n° 02-45830 D).
À noter : Un employeur ne peut licencier un salarié qui a menacé ou insulté d'autres salariés
pendant qu'il exerçait son droit de grève qu'à la condition qu'une faute lourde lui soit imputable,
sous peine de nullité (c. trav. art. L. 2511-1 ; cass. soc. 8 juillet 2009, n° 08-40139, BC V n°
172).
Altercation physique. - L'employeur doit réagir, sur le plan disciplinaire, aux intimidations et aux
affrontements physiques qui interviennent entre les salariés, dans l'entreprise et pendant le temps de
travail.
Il peut aussi sanctionner le salarié qui se livre à des violences physiques en dehors de son temps de
travail, mais sur son lieu de travail. C'est notamment le cas lorsqu'un salarié commet des violences
inexcusables dans ces conditions alors qu'il se trouvait dans l'entreprise malgré l'interdiction contenue
dans le règlement intérieur (cass. soc. 28 mars 2000, n° 97-43823, BC V n° 127).
À noter : L'employeur peut sanctionner un salarié impliqué dans un affrontement physique qui
s'est déroulé en dehors du temps et du lieu de travail, dès lors que cela se rattache à sa vie
professionnelle (cass. soc. 6 février 2002, n° 99-45418 D).
Violence caractérisant un harcèlement. -L'employeur ne doit tolérer aucun propos ou acte violent,
de la part d'un salarié, qui constituerait des faits de harcèlement moral ou sexuel (c. trav. art. L. 1152-5
et L. 1153-6).
Dans le cas particulier d'un harcèlement entre collègues, l'employeur doit agir, car il engage sa
responsabilité même lorsqu'il n'est pas l'auteur des faits (cass. soc. 21 juin 2006, n° 05-43914, BC V n°
223). De plus, il manque à son obligation de sécurité de résultat lorsqu'un salarié est victime, sur le lieu
de travail, de violences physiques ou morales de la part d'un autre salarié, quand bien même il aurait
pris des mesures en vue de faire cesser ces agissements (cass. soc. 3 février 2010, n° 08-40144
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FPPBR).
Évaluer la faute
Estimer la gravité de la faute. - L'employeur apprécie la gravité des faits, mais il s'agit, en tout état
de cause, d'une faute disciplinaire. Il importe peu, en général, qu'il existe un lien hiérarchique entre le
salarié, auteur de l'agression, et le salarié qui en est victime. En pratique, le fait pour un salarié
d'agresser verbalement ou physiquement un autre salarié peut constituer, selon les circonstances, une
faute grave (voir tableau).
Prendre le contexte en compte. - L'employeur apprécie la gravité de la violence du salarié en fonction
des circonstances. En effet, la faute peut être atténuée :
- lorsqu'elle constitue un fait isolé (cass. soc. 9 décembre 2003, n° 01-43979 FD) ;
- lorsque le salarié répondait à la provocation ou à l'agression d'un de ses collègues (cass. soc. 28 juin
2006, n° 04-41085 D ; cass. soc. 11 juin 2002, n° 00-42629 FD ; cass. soc. 13 juin 1989, n° 86-43405
D), sauf si la riposte était disproportionnée (cass. soc. 14 mai 1998, n° 96-41755, BC V n° 250) ;
- lorsqu'elle ne perturbe pas la bonne marche de l'entreprise (cass. soc. 13 juillet 1989, n° 86-44959
D) ;
- lorsque les insultes, les sobriquets ou les propos familiers sont coutumiers dans le milieu professionnel
concerné ( cass. soc. 19 janvier 2010, n° 09-40018 D ; cass. soc. 8 octobre 1992, n° 91-43526 D) ou
lorsque le comportement injurieux s'inscrit dans le climat général de l'entreprise (cass. soc. 30 juin
1993, n° 91-45496 D).
Cela étant, l'employeur doit toujours veiller à réprimer les discriminations, notamment sous forme de
sobriquet, surnom, etc.
Gérer les violences contre les clients
Les salariés ne doivent commettre aucun acte de violence, verbale ou physique, envers les clients de
l'entreprise. Le fait, pour un salarié, d'agir en violation de cette interdiction constitue, en principe, une
faute grave (cass. soc. 29 mars 2000, n° 98-40068 D).
Toutefois, lorsqu'un salarié commet une violence envers un client, l'employeur doit prendre en compte
les circonstances pour apprécier la gravité de cette dernière, comme il le fait en cas de violences
commises entre salariés. Ainsi, par exemple, le fait, pour une salariée, d'avoir exercé des violences
physiques à l'encontre d'un jeune résident de l'établissement dans lequel elle travaillait ne justifie pas
son licenciement pour faute grave en raison de la provocation physique préalable du résident, de
l'ancienneté de 13 ans de la salariée et de son comportement habituellement irréprochable (cass. soc.
18 mars 2009, n° 08-40384 D).
Sanctionner les violences
Choisir la sanction adéquate. - L'employeur peut sanctionner l'auteur des violences par un
avertissement, une mise à pied, un licenciement, etc.. Il peut s'agir d'un licenciement pour faute grave
(cass. soc. 24 novembre 2009, n° 08-43481 D).
À noter : En cas de faute grave ou lourde, lorsque l'employeur hésite sur le choix de la sanction, il
peut prendre le temps de la réflexion en mettant à pied, à titre conservatoire, le salarié concerné
(voir RF Social, Revue d'actualité 81, pp 26 à 29 ou sur www.rfsocial.com).
Sanctionner différemment des salariés violents. - L'employeur peut, dans l'intérêt de l'entreprise et
dans l'exercice de son pouvoir d'individualisation des mesures disciplinaires, sanctionner différemment
des salariés qui ont participé à une même faute. Encore faut-il que cette individualisation ne constitue
pas une discrimination prohibée ou un cas de détournement du pouvoir par l'employeur (c. trav. art. L.
1132-1 ; cass. soc. 14 mai 1998, n° 96-41755, BC V n° 250).
Respecter la procédure disciplinaire. - Lorsque l'employeur envisage de prononcer une sanction, il
met en œuvre la procédure disciplinaire [voir Dictionnaire Social, « Procédure de licenciement
(personnel) »].
Rappelons qu'en principe, un employeur ne peut pas sanctionner une faute plus 2 mois après en avoir eu
connaissance (c. trav. art. L. 1332-4).
Violences justifiant un licenciement (exemples)
Violences verbales
Le fait, pour un salarié, d'avoir un comportement réitéré excessif, vexatoire, humiliant voire insultant envers ses
subordonnés justifie son licenciement pour faute grave, malgré l'ancienneté ou les résultats du salarié (cass. soc.
28 juin 2006, n° 05-40990, BC V n° 231).
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Le fait, pour un salarié, de proférer des injures à connotation raciste à l'encontre d'une autre personne travaillant
dans l'établissement justifie son licenciement pour faute grave, car ces propos interdisent toute relation ultérieure
de travail (cass. soc. 12 octobre 2004, n° 02-41563, BC V n° 247).
Le fait, pour un salarié, de prononcer une injure unique, à l'égard de l'employeur, au cours d'une discussion
véhémente justifie son licenciement pour cause réelle et sérieuse, mais pas pour faute grave en raison (cass. soc.
16 février 1987, n° 84-41065, BC V n° 79) :
- de l'ancienneté de 20 ans du salarié ;
- de la liberté dont il disposait dans ses relations avec son patron ;
- des propos habituellement utilisés dans le milieu professionnel ;
- de ses excuses.
Le fait, pour un salarié, de proférer des insultes et de manquer de correction verbale à l'encontre d'un subordonné
à la santé fragile justifie son licenciement pour faute grave (cass. soc. 19 janvier 2010, n° 08-42260 FD).
Violences physiques
Le fait, pour un salarié, d'exercer des violences physiques au temps et au lieu du travail sur un autre salarié, ces
faits ayant par ailleurs été sanctionnés par une condamnation pénale, justifie son licenciement pour faute grave,
malgré (cass. soc. 21 octobre 1987, n° 85-40413, BC V n° 584) :
- le caractère unique des faits ;
- l'ancienneté du salarié ;
- les qualités professionnelles du salarié ;
- l'absence de tout reproche antérieur.
Le fait, pour un salarié, d'avoir un comportement violent en s'acharnant sur un adversaire à terre et âgé justifie
son licenciement pour faute grave, même si le salarié licencié n'était pas l'auteur du premier coup (cass. soc. 14
mai 1998, n° 96-41755, BC V n° 250).
Le fait, pour un salarié, de sortir un couteau de sa poche, au cours d'une violente altercation, et, après l'avoir
ouvert, de menacer un salarié et d'en faire usage contre lui justifie son licenciement pour faute grave alors même
que le salarié avait fait l'objet de provocations verbales (cass. soc. 12 octobre 2000, n° 98-44158 D).
Le fait, pour un salarié, d'agresser verbalement ses subordonnés et de laisser volontairement tomber, depuis un
échafaudage, un marteau sur son employeur justifie son licenciement pour cause réelle et sérieuse (cass. soc. 9
février 2010, n° 08-70281 D).
Article paru le 04/2010
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Pour: SOUBILS CAROLINE
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