Si j`étais une fille
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Si j`étais une fille
« Si j’étais une fille ? » Un documentaire en objet-rama 52 min co-mitonné par les frères Pablof ©Raoul POURCELLE Une production BOUFFOU Théâtre avec le soutien de la D.M.D.T.S. - Ministère de la culture et de la communication, du centre culturel Athéna – Auray, du Théâtre de l’Arpenteur - Rennes et de la compagnie Papier Théâtre, La Quincaillerie - Le Vieux Marché Distribution Avec Raoul POURCELLE & Stéphane ROUXEL Textes Raoul POURCELLE Musique Stéphane ROUXEL Mise en scène Les frères Pablof avec la complicité de Serge BOULIER Construction décor Nadia JEGO et Thierry PRONO ainsi que les élèves du CAP d’Enseigne Lumineuse du lycée professionnel Emile Zola, Hennebont Merci à Frédéric CELIBERT pour sa collaboration technique. Technique Stéphane LE TALLEC Merci à Alexandre, André, Cyril, Fabrice, Franck, Fabrice, François, Jean-François, Fred, Gaëtan, Gilles, Gurvan, Hubert, Jack, JeanJacques, Jean-Manuel, Jean-Paul, Jean-Pierre, Fred, Jérémie, Jo, Jao, Loïc, Michel, Maxime, Sylvain, Olivier, Patrick, Paul, René-Charles, Paul, Thierry, Thomas et Olivier pour leur mise à nu. Peut-être avez-vous pensé un jour à changer de sexe ? Peut-être avez-vous imaginé chausser des lunettes de filles ? Voir la vie en rose ? Porter une mini jupe ? Vous épiler les papattes ? Peut-être vous êtes-vous posé la question de ce que ressent une femme après l’amour ? ou pendant ? Peut-être n’avez-vous jamais osé imaginer que ce serait vous la maman ? Vertige ! Les frères Pablof ont passé trois mois dans les coulisses d’un salon de coiffure pour homme. Ils ont capté de l’autre côté du miroir des paroles d’hommes en posant la question « si j’étais un fille ? » à des garçons. Alors si j’étais une fille ? Je ne serais pas pareil ! Je serais poupée, androgyne ou virago ? Ce vrai-faux documentaire brosse des portraits d’hommes, défrise une identité masculine en déroute, passe au peigne fin les mèches misogynes rebelles et colorise les épis féministes encore debout..... ©Jean HENRY Note d’intention Je me regarde dans la glace et je me demande « si j’étais une fille ? » : mon nez, ça pourrait aller ou il est définitivement tarin ? Mes yeux ? Pas de problème, ma bouche ? Pas assez pulpeuse à mon goût. C’est sûr je n’aurais pas besoin de me raser, quoi que ce poil sur le nez ! La pilosité n’est pas réservée aux hommes. Mon grain de beauté sur la joue fait très fille, enfin je le trouve pas mal pour un garçon. La coquetterie ? Les hommes aussi ! Mais ce serait moi la maman ? Vertige ! Enfanter ? Quelle responsabilité ! Quelle expérience ! Moi qui suis si douillet, je ne suis pas sûr d’avoir envie. Certains disent c’est une histoire d’instinct, d’hormones, d’épanouissement de la femme… Enfin bon si je ne veux pas, je porterais la culotte. C’est sûr, il n’est pas question que je sois bobonne à la maison. Subir la domination d’un macho, niet ! Ou alors je crois que j’utiliserais mon charme pour arriver à mes fins, enfin c’est ce que je fais déjà… Mais je pourrais le faire en mieux, je serais plus jolie, j’aurais plus d’atouts pour mater le matou. Quoique l’habit ne fait pas le moine. Pour interroger l’identité masculine dans le miroir de la féminité, Raoul POURCELLE et Stéphane ROUXEL ont rencontré 35 hommes, d’âge et d’horizons divers, à qui ils ont posé la question « Si j’étais une fille ? ». De là, ils ont tiré la matière première de leur spectacle, ont imaginé des situations et écrit des textes. Avec « si j’étais une fille ? », ils traquent les clichés, les lieux communs, du romantisme au machisme et cherchent à révéler la poésie contenue dans ces paroles singulières. Théâtre d’objet Les objets apportent une réalité au plateau. On les reconnaît, on les possède, ils sont les témoins muets de notre histoire, de notre temps et de notre espace. Certains transportent malgré eux une identité de genre, le blaireau fait penser au moustachu de Cabu, le rimmel à la pleureuse, le bigoudi à l’anglaise, le sac à main (fidèle compagnon féminin) au jardin secret, etc. Ce spectacle cherche à mettre en relation par association d’idée l’objet (témoin) et les paroles d’hommes (témoignages) pour illustrer, raconter, provoquer du décalage, de l’humour et de la poésie. Documentaire au théâtre ou comment glisser le réel dans l’épique Chausser un point de vue, des lunettes de myopes ou de presbytes, des lunettes en relief, une lunette panoramique et regarder ses pieds. C’est déjà une démarche documentaire, c’est soumettre « la réalité » à « la subjectivité ». Poser sur le visage d’un garçon des lunettes de fille, qu’il regarde ses pieds et les voit en escarpins, puis faire en sorte qu’il se raconte, saisir son trouble et enregistrer l’entretien. Par cette « captation » du réel, la démarche d’écriture s’apparente à celle du cinéma documentaire. Le théâtre est affaire d’illusion, rien à voir avec le documentaire. La réalité au théâtre c’est la lampe de projo qui éclate pendant la séance, le siège 18J du troisième rang qui couine, le plateau qui grince sous les pieds des acteurs… Le théâtre nous fait oublier le théâtre, tout ce qui se passe sur scène participe à l’illusion. Le public n’est pas dupe, il vient pour y croire. Et voilà le pied de nez, accoler « documentaire » à « théâtre », faire intervenir sur le lieu de l’illusion des objets, des sons, des témoignages qui nous semblent plus réels parce qu’ils nous sont plus familiers, parce qu’ils appartiennent à notre réalité quotidienne, hors du théâtre. Il s’agit donc de produire des effets de réel, fabriquer en quelque sorte un vrai faux documentaire ! Un salon de coiffure. Pour homme ? On trouvera sur scène quelques signes qui définissent un salon de coiffure. Un fauteuil de coiffeur, une tablette lumineuse, présentoir pour poser les produits du salon, la machine à permanente, le fer à friser. Quand on va chez le coiffeur on se retrouve devant la glace et on ne peut pas tricher, on ne choisit pas la position de sa tête pour la rendre plus avantageuse à la lumière, c’est le coiffeur qui décide. On ne fait pas de grimace comme seul dans sa salle de bain. C’est un endroit où l’on change de tête. On raccourcit, on frise, on change de forme, on tire la raie… Avec les pattes ? Sans les pattes ? Et bien souvent, on essaie de retrouver cette tête qui nous va si bien. C’est le seul endroit où l’on regarde sa nuque, et où l’on vous demande « la nuque ça va ? ». Bref, vous l’avez compris, c’est un rendez-vous avec soi. Les plus timides échangent quelques banalités et gardent leur pensée, compagne de leur reflet. Les plus bavards s’étalent, racontent et se racontent au coiffeur qui feint une mine intéressée, tout concentré qu’il est sur sa responsabilité. Ici on ne se paie pas la tête du client. Sous les cheveux il y a mille façons de penser. Même les chauves se font coiffer ! Malgré son air pincé, les paroles des clients ne tombent pas dans l’oreille d’un sourd, il retient les commentaires et lâche de temps un temps dans un soupir : « ça me défrise ! » Pour la plupart, les salons sont devenus mixtes. Alors, en plus de raser Norbert, brosser Claude, coiffer Pierre, Paul ou Jacques, notre coiffeur devrait permanenter Gisèle, colorer Nathalie, friser Odette, tailler les pointes de Catherine, dégrader Jocelyne et raccourcir Nénette. Ca le défrise ! Et le son ? Mon oreille est un pavillon de banlieue. Elle possède une mémoire de mille et une madeleines, sons d’enfances, de cuisines, de chambres, de toilettes, de voluptés permises et interdites. Elle classe, trie, désigne, identifie certains sons comme appartenant à mon père (le son du pipi de mon père, tombé de haut avec un léger écho cristallin), d’autres à ma mère (le son du pipi de ma mère, plus sec, plus dru et finalement plus grave) ; elle réussit même à donner un sexe à certains sons (qui, comme chacun sait ne sont pas des anges). Elle peut aussi reconnaître des sons familiers, qui appartiennent à mon quotidien, ma réalité, d’autres qui sont plus exotiques, plus abstraits. L’espace sonore de « Si j’étais une fille » serait une opération d’import-export de son du dehors (hors du théâtre celui de « la vraie vie ») et du son fabriqué dedans (chez nous ou à l’atelier). On collerait aussi la parole des hommes, des « vrais » et puis de petites mélodies avec des instruments de musique, « des vrais » aussi. Bref, ce serait une vraie poésie documentaire ! Les frères Pablof Stéphane ROUXEL et Raoul POURCELLE se sont rencontrés autour d’une cafetière électrique dans un hall de MJC un mercredi aprèsmidi. Rendez-vous pris les mercredis suivants, ils se sont longuement côtoyés à l’heure de la pause café un verre de plastique dans une main, une cigarette dans l’autre. Tous les deux comédiens, ils ont imaginé un crieur public : « l’annonceur public N°1 », qui ne crie pas mais collecte et annonce avec un « divan à confidence » des histoires de quartier. Puis « l’annonceur » a mené une enquête « d’intimité publique », une sorte de micro-trottoir, en demandant à des quidams de raconter leur naissance. Raoul a rejoint la compagnie BOUFFOU Théâtre en septembre 2000 et Stéphane en septembre 2001. Tous les deux comédiens, ils sont devenus marionnettistes. Ils jouent dans « Vache à Plumes (et autres poules à pis) », « Bynocchio de Mergerac » et dans la dernière création « le Manteau ». Forts de leurs premières aventures de marionnettistes et soucieux de restituer les histoires de naissances, ils créent en 2003 sous le nom les frères Pablof un premier essai de documentaire en Objet-Rama, « Extraits de naissance ».