les infections cutanées en consultation sans rendez-vous

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les infections cutanées en consultation sans rendez-vous
F O R M A T I O N
C O N T I N U E
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LES INFECTIONS CUTANÉES
EN CONSULTATION SANS RENDEZ-VOUS
TOUT UN DÉFI !
Les infections cutanées constituent un motif de consultation fréquent au service
de consultation sans rendez-vous. Le défi consiste à repérer les infections cutanées graves
et celles qui présentent des risques de complications et de choisir l’antibiothérapie appropriée.
Nancy Watts
CAS NO 1
Éric, 40 ans, présente depuis 48 heures un œdème et une
1
CELLULITE NON COMPLIQUÉE DE L’AVANT-BRAS
rougeur progressive sur l’avant-bras droit. Il s’est brûlé
en sortant un chaudron du four. Son état général est bon.
Il n’est pas fébrile ni souffrant. Vous notez une rougeur et
un œdème diffus au pourtour de cette brûlure du 2e degré.
Quels seront votre diagnostic et votre conduite ?
LA CELLULITE NON COMPLIQUÉE
DE L’AVANT-BRAS (PHOTO 1)
La cellulite est une infection courante des tissus mous
prin­cipalement causée par certains germes de la peau,
parti­culièrement Staphylococcus aureus, un coccus à Gram
positif en amas. Son sanctuaire est le nez. Si on se mouche
ou se gratte le nez, on inocule ensuite le germe sur la peau.
Les animaux peuvent aussi transmettre cette bactérie. Moins
fréquemment, nous trouvons le streptocoque bêtahémolytique, un coccus à Gram positif en chaînettes, en général
du groupe A, mais aussi des groupes B, C et G. Il est propre
à l’humain. Son sanctuaire est le pharynx. Le groupe A est
la plupart du temps en cause (moins rarement le groupe G,
même si c’est possible) dans les complications non suppuratives, telles que la glomérulonéphrite et la valvulopathie. Les
facteurs prédisposants de la cellulite sont énumérés dans le
tableau I1,2. Les indications de traitement en soins ambulatoires de la cellulite se trouvent dans le tableau II1.
Nous dirigeons donc Éric en médecine de jour pour un trai­
tement ambulatoire parentéral par la céfazoline. Il est en
effet préférable de traiter les cellulites de plus de 10 cm à
13 cm par voie intraveineuse. Le patient doit être dans un
La Dre Nancy Watts, omnipraticienne, exerce
au GMF de Jonquière, de même qu’au service
d’hospitalisation de l’Hôpital de Jonquière. Elle
enseigne aux résidents en médecine familiale de
l’UMF d’Alma affiliée à l’Université de Sherbrooke.
lemedecinduquebec.org
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TABLEAU I
FACTEURS PRÉDISPOSANTS
DE LA CELLULITE1,2
Locaux
h Plaies, égratignures, brûlures
h Piqûres d’insectes
h Marques d’utilisation de drogues par voie intraveineuse
h Anciens points d’entrée de cathéter
h Dermatite (contact, stase)
h Pied d’athlète
Régionaux
h Lymphœdèmes (congénitaux, post-thrombophlébite,
suivant un évidement ganglionnaire et une saphénectomie)
h Insuffisance veineuse
Généraux
hCorticothérapie
h Intervention chirurgicale récente
hDiabète
hImmunodéficience
hObésité
hDénutrition
hAsplénie
h Abus d’alcool
19
TABLEAU II
CRITÈRES DE TRAITEMENT
AMBULATOIRE PAR VOIE
INTRAVEINEUSE D’UNE CELLULITE1
2
ÉRYSIPÈLE
Cellulite de taille importante (plus de 10 cm à 13 cm)
Patient dont l’état clinique est stable (absence de fièvre,
sans maladies concomitantes importantes)
h Patient qui a un bon degré de compréhension
h Patient motivé et qui reçoit du soutien de son entourage
h Patient qui n’abuse pas des drogues ni de l’alcool
h Retour facile aux visites de contrôle (domicile pas trop
éloigné, moyen de transport accessible)
h
h
état clinique stable, sans fièvre, pour pouvoir être soigné
en médecine de jour. La brûlure sera irriguée à l’aide d’une
solution saline. Un onguent antibiotique et un pansement
stérile seront ensuite appliqués.
Notre premier choix d’antibiotique est la céfazoline (Ancef),
1 g ou 2 g par voie intraveineuse toutes les huit heures. C’est
un antibiotique qui se donne en bolus (biberon ou seringue). Il
est pratique en traitement ambulatoire et moins irritant pour
les veines. Le relais par voie orale est le céfadroxil (Duricef) à
raison de 500 mg à 1000 mg, 2 f.p.j., ou encore la céphalexine
(Keflex) à raison de 500 mg, par voie orale, 4 f.p.j. La cloxacilline présente une meilleure concentration minimale
inhibitrice contre Staphylococcus aureus. Par contre, elle
est irritante pour les veines et nécessite quatre administrations par jour. Le relais par voie orale est la cloxacilline, qui
s’administre quatre fois par jour sur un estomac à jeun. Elle
peut occasionner des symptômes digestifs (nausées, vomissements, douleur épigastrique). Le sirop de cloxacilline a très
mauvais goût. La clindamycine constitue une solution de
rechange en cas d’allergie ou d’intolérance à la céfazoline ou à
la cloxacilline. Elle coûte plus cher, et plus de bactéries y sont
résistantes. Elle peut, en outre, occasionner des diarrhées3.
CAS NO 2
Nadia, 35 ans, présente depuis vingt-quatre heures
une rougeur et un œdème au visage. Elle s’était prélassée
quelques heures sous le soleil du printemps. Elle fait
de la fièvre et a des frissons. Son remplissage capillaire,
sa pression artérielle et sa saturation sont normaux.
Sa température buccale est de 39 8C, et elle est tachycarde.
Quels seront votre diagnostic et votre conduite ?
Quel traitement suggérez-vous ?
L’ÉRYSIPÈLE
L’érysipèle est une infection cutanée superficielle aiguë
(photo 2), limitée à l’épiderme et au derme. Le début est
20
Le Médecin du Québec, volume 51, numéro 8, août 2016
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TABLEAU III
INDICATIONS DE TRAITEMENT DE LA
CELLULITE EN MILIEU HOSPITALIER1,3
Sepsis, fièvre élevée, confusion, signes vitaux instables
Douleur : Normalement, une cellulite ne fait pas mal.
En cas de douleur, il faut envisager d’autres diagnostics,
tels que l’arthrite septique, la fasciite nécrosante et
la thrombophlébite. Il faut soupçonner une fasciite
nécrosante ou une gangrène gazeuse en présence
des éléments suivants4 :
• douleur disproportionnée ;
• anesthésie du foyer d’infection ;
• ecchymoses associées ;
• induration du foyer d’infection ;
• phlyctènes, surtout hémorragiques ;
• emphysème sous-cutané (signe souvent tardif) ;
• sepsis sévère ;
h Présomption d’atteinte articulaire ou osseuse
h Immunodéficience, asplénie
h Patient non fiable (toxicomane)
h Incapacité à tolérer la voie orale
h Contexte de varicelle
h Échec de l’antibiothérapie par voie orale
h
h
abrupt et s’accompagne de fièvre élevée, de céphalées, de
malaises et de frissons. Quelques heures après, une rougeur
vive, superficielle, bien délimitée, en relief de peau d’orange
apparaît. Les vaisseaux lymphatiques sont toujours en cause.
Les cas d’érysipèle sont en grande majorité dus aux streptocoques bêtahémolytiques (A plus que B, C, F et G). Aux fins
du traitement, l’érysipèle devait être considéré comme une
cellulite. Le tableau III1,3 précise les indications de traitement
de la cellulite en milieu hospitalier.
Nous dirigeons Nadia vers notre collègue de l’urgence, car elle
présente un syndrome de réponse inflammatoire systémique
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3
CELLULITE NON COMPLIQUÉE
ET EAU CONTAMINÉE
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(SRIS) ou un sepsis. Ce collègue pro­
cédera à des prélèvements dans le but
d’obtenir une formule sanguine et des
hémocultures et de connaître le taux de
protéine C réactive et de créatinine. Il lui
prescrira par la suite de la céfazoline,
soit 2 g par voie intraveineuse, une solu­
tion saline à 0,9 % à raison de 100 cc/h.
Comme le taux de protéine C réactive
est de 60 mg/l, que l’analyse montre
une leucocytose à 15 000/mm3 et que
Nadia est en sepsis, elle est hospitalisée.
CAS NO 3
Pierre, 40 ans, présente depuis
quarante-huit heures une rougeur
évolutive à la jambe droite. Il
participait à une compétition de crosscountry et est tombé sur des roches
en traversant un ruisseau. Il a une
petite abrasion de 0,5 cm de diamètre
sur la diaphyse de la crête tibiale
ainsi qu’une rougeur et un œdème
de 4 cm environ. Son état général
est bon. Il a reçu un rappel du vaccin
contre la diphtérie et le tétanos
il y a un an. Quels seront votre
conduite et votre traitement ?
LA CELLULITE NON COMPLIQUÉE
APRÈS UNE BLESSURE EN EAU
CONTAMINÉE (PHOTO 3)
Les agents pathogènes de la cellulite faisant suite d’une exposition particulière
sont indiqués dans le tableau IV 4,5. En
lemedecinduquebec.org
TABLEAU IV
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AGENTS PATHOGÈNES DE LA CELLULITE EN CAS
D’EXPOSITIONS PARTICULIÈRES4,5
Types d’exposition
Organismes pathogènes soupçonnés
Traumatisme avec eau
contaminée
h Eau douce
h Eau de mer
hAquarium
h
Æromonas hydrophila, Pseudomonas
Vibrio vulnificus
h Mycobacterium marinum (granulome des aquariums)
h
Bains thermaux,
baignoire
Pseudomonas æruginosa
Contact avec poissons
de mer, crabes et autres
crustacés, volaille, porc
(bouchers, pêcheurs)
Erysipelothrix rhusiopathiæ (érysipéloïde)
Manipulation du gibier
ou piqûre de tique
Tularémie
Utilisateur de drogues
injectables
SARM extrahospitalier, Streptococcus viridans, bactéries
à Gram négatif (dont P. æruginosa ) et anaérobies,
Eikenella corrodens
Infection du pied
diabétique
Bactéries à Gram positif (Staphylococcus aureus) et
à Gram négatif (entérobactéries, parfois Pseudomonas),
bactéries anaérobies (Bacteroides, Peptococus)
Cirrhose
Bacilles à Gram négatif, Kebsiella pneumoniæ,
Escherichia coli, Capnocytophaga canimorsus,
Campylobacter fetus, Vibrio vulnificus
Morsures par :
hhumain
hchat
hchien
hrat
h
h
h
h
Eikenella corrodens, flore mixte de la bouche
Pasteurella multocida
Pasteurella multocida, Capnocytophaga canimorsus
Streptobacillus moniliformis
Contact avec des chats
Bartonella henselæ (maladie des griffes du chat) :
donne surtout des adénites
Inoculation traumatique
de terre, pénétration
d’épines
Mycobactéries non tuberculeuses
(Mycobacterium fortuitum, Mycobacterium chelonæ,
Mycobacterium ucerans), Nocardia, champignons
cas de blessure cutanée en eau douce,
il faut soupçonner une infection attribuable à Aeromonas hydrophila6, une
bactérie sensible aux fluoroquinolones,
aux tétracyclines, aux aminoglycosides,
aux carbapénèmes et aux céphalosporines de 3e et de 4e générations.
Nous procédons à une culture de la plaie
après irrigation. Nous traitons Pierre à
l’aide de ciprofloxacine (Cipro), à rai­
son de 500 mg, 2 f.p.j., et de céfadro­xil
(Duricef), à raison de 1 g, 2 f.p.j. (cou­
verture de Staphylococcus aureus et
du streptocoque bêtahémolytique
pos­sible). Vous le revoyez soixantedouze heures plus tard. Son état s’est
amélioré. La culture de plaie révèle la
présence d’Aeromonas hydrophila.
L’antibiothérapie est donc modifiée.
Vous gardez la ciprofloxacine et cessez
le céfadroxil. Vous aviez prévu un relais
par l’ertapénem par voie intraveineuse
ou une céphalosporine de 3e ou de
4e gé­né­ration en cas d’évolution de la
cellulite ou de signes de dégradation
21
4
ABCÈS À SARM EXTRAHOSPITALIER
ABCÈS COMPLIQUÉ
À SARM EXTRAHOSPITALIER
 iStock. Reproduction autorisée.
 Science Source. Reproduction autorisée.
de l’état général. Bien entendu, nous lui
recommandons de surélever sa jambe.
C’est un atout important dans la guéri­
son d’une cellulite.
vous de suivi dans quarante-huit heures.
Bien sûr, vous l’informez des signes
et symptômes de dégradation de son
état général nécessitant une consulta­
tion à l’urgence.
CAS NO 4
Jean, 60 ans, présente depuis
quarante-huit heures une induration
(2 cm x 1 cm) légèrement fluctuante,
rougeâtre et œdématiée sur la région
trochantérienne de sa hanche gauche.
Il souffre de diabète de type 2 et
d’insuffisance rénale. Sa clairance
de la créatinine est de 48 ml/min.
Il ne consomme pas de drogues,
mais néglige sa santé et est porteur
du SARM extrahospitalier (aussi
appelé SARM communautaire
ou SARM-C). Quels seront votre
diagnostic et votre conduite ?
L’ABCÈS COMPLIQUÉ À SARM
EXTRAHOSPITALIER (PHOTO 5)
L’ABCÈS À SARM
EXTRAHOSPITALIER
Vous soupçonnez un abcès à Staphy­
lococcus aureus extrahospitalier
ré­sis­tant à la méthicilline (photo 4).
Vous procédez à une aspiration du
liquide avec une aiguille de calibre
22 g après une injection d’une petite
quantité de solution saline à 0,9 % pour
faire une culture bactériologique. Vous
récoltez à peine un millilitre de pus.
Vous remettez à Jean une ordonnance de
clindamycine par voie orale et lui don­nez
congé. Vous lui assignez un rendez-
22
5
Jean a écouté vos conseils et s’est pré­
senté à l’urgence, car il avait de la fièvre
et des frissons. Votre collègue a drainé
l’abcès devenu fluctuant et a commencé
la vancomycine par voie parentérale.
Le résultat de la culture montrait la
présence de SARM extrahospitalier
résistant aussi à la pénicilline et à l’oxa­
cilline. Jean a donc été hospitalisé.
En Amérique du Nord, on note une incidence accrue d’infections cutanées par
Staphylococcus aureus extrahospitalier
résistant à la méthicilline et à l’oxacilline
qui est différent de celui qu’on trouve
à l’hô­pi­tal. La prévalence de cette bactérie transmissible par l’humain et les
animaux atteint jusqu’à 60 % dans
certains États américains1,7. L’infection
qu’elle provoque est plutôt flamboyante
TABLEAU V
et suintante et entraîne des lacs de pus.
Elle est aussi contagieuse. Cette bactérie peut être présente dans la famille
et sur les animaux domestiques. Des
bassins d’éclosion existent également
dans les écoles, les centres sportifs et
les prisons. Le tableau V3,4,7,8 décrit les
situations cliniques évoquant une infection cutanée à SARM extrahospitalier.
Nous pouvons drainer et inciser les
abcès non compliqués sans donner d’an­
ti­biotique. Pour les abcès compliqués
avec cellulite, nous recommandons toutefois le drainage et l’incision ainsi que
l’ajout d’un antibiotique par voie orale
pendant de sept à dix jours (cé­pha­lexine
et triméthoprime-sulfaméthoxazole ou
clindamycine seule). Si le patient présente un état septique, il faut lui donner de
la vancomycine et de la clin­da­mycine par
voie intraveineuse. L’antibiothé­rapie sera
réajustée selon le résultat de la culture.
Pour les cellulites accompagnées d’un
écoulement purulent et lorsque le SARM
extrahospitalier est fortement soupçonné, il est recommandé de prescrire au
patient de la clindamycine par voie orale
pendant de sept à dix jours ou encore
du triméthoprime-sulfaméthoxazole
(ne couvre pas le streptocoque), de la
doxycycline, de la minocycline ou du
linézolide (cher). En ce qui concerne
les cellulites sans écoulement mais
pour lesquelles le médecin soupçonne
aussi une infection à streptocoque, il
faut prescrire de la céphalexine et du
triméthoprime-sulfaméthoxazole ou de
la clindamycine seule par voie orale.
Voici quelques mesures pour empê­cher
la propagation du SARM extrahos­pi­
talier. Il faut couvrir la plaie, se laver les
CRITÈRES D’UNE INFECTION À SARM EXTRAPOSPITALIER3,4,7,8
Infections cutanées à répétition dans la famille, telles que furoncles et abcès
Patient ou membre de la famille porteur connu du SARM extrahospitalier
h Épidémiologie locale (ex. : prévalence plus importante dans les colliectivités
du nord du Québec ou dans certains États américains)
h Réponse insatisfaisante à l’antibiothérapie
h Utilisateur de drogues injectables
h Détenu (milieu carcéral)
h
h
Le Médecin du Québec, volume 51, numéro 8, août 2016
F O R M A T I O N
mains, éviter le par­tage d’objet. Il faut changer les draps et
les serviettes, pren­dre un bain chaque jour, désinfecter l’environnement, les poignées de porte, les comptoirs, le bain,
le siège de toilette. Il faut également désinfecter et nettoyer
le matériel sportif 7. On peut envisager la décolonisation
du patient ou de son entourage en présence d’infections
récurrentes à SARM extrahospitalier. L’onguent à base de
mupirocine sera prescrit deux fois par jour dans les narines,
en plus d’un bain ou d’une douche avec une solution ou un
savon de chlorhexidine tous les jours et d’une antibiothérapie par voie orale1,7,8. Le traitement des infections à SARM
extrahospitalier est détaillé dans le tableau VI1,8.9.
CAS NO 5
Rock, 27 ans, a participé à une escarmouche dans un
bar il y a quarante-huit heures. Il présente maintenant
une rougeur et une plaie superficielle à la face dorsale
de la main droite. Il ne se souvient plus des détails
de l’incident. À l’examen, vous notez une petite plaie
punctiforme avec rougeur, un œdème de 3 cm de diamètre
au niveau des deuxième et troisième articulations
métacarpophalangiennes. La palpation et la mobilisation
de ces deux articulations sont aussi douloureuses. L’état
général de Rock est bon, et il ne fait pas de fièvre. Il a reçu
un rappel de vaccin contre la diphtérie et le tétanos il y a
un an. Quels seront votre diagnostic et votre conduite ?
L’ARTHRITE SEPTIQUE DE LA MAIN (PHOTO 6)
Vous soupçonnez une blessure par coup de poing et une
contamination par la flore buccale humaine. Vous demandez
une radiographie pour éliminer une fracture. Vous contac­
tez le chirurgien plasticien de garde, car vous pensez à une
arthrite septique des deuxième et troisième articulations
métacarpophalangiennes de la main droite. Votre patient
aura besoin d’un débridement, d’un nettoyage, de cultures et
devra commencer des antibiotiques par voie intraveineuse.
TABLEAU VI
C O N T I N U E
//
TRAITEMENT DES INFECTIONS
À SARM EXTRAHOSPITALIER1,8,9
Cellulite avec écoulement purulent
SARM extrahospitalier . streptocoque
h Antibiothérapie par voie orale de 7 à 10 jours :
•clindamycine
•triméthoprime-sulfaméthoxazole*
•doxycycline
•minocycline
• linézolide (cher)
Cellulite sans écoulement purulent
Streptocoque . SARM extrahospitalier
H Antibiothérapie par voie orale de 7 à 10 jours :
• clindamycine seule
• céphalexine et triméthoprime-sulfaméthoxazole
Abcès non compliqué
h Incision et drainage sans antibiotique par voie orale ou
intraveineuse
h Utilisation possible d’un onguent antibiotique topique à
base de mupirocine
Abcès compliqué avec cellulite
SARM extrahospitalier et streptocoque
h Incision et drainage
h Antibiothérapie par voie orale de 7 à 10 jours :
• céphalexine et triméthoprime-sulfaméthoxazole
• clindamycine seule
h Si le patient est en sepsis ou a une infection grave :
• vancomycine et clindamycine par voie intraveineuse
*Ne couvre pas le streptocoque.
6
ARTHRITE SEPTIQUE DE LA MAIN
Le taux d’infection de la main à la suite d’une blessure causée
par un coup de poing sur la bouche est de 50 % en raison de
la proximité de la peau sur la capsule articulaire. Le taux
d’infection est moindre sur le poignet et l’avant-bras du fait
de l’épaisseur des tissus graisseux. Les complications sont
l’arthrite septique, l’ostéomyélite et la ténosynovite10,11.
On trouve des bactéries aérobies et anaérobies, dont le
streptocoque, Staphylococcus aureus et les diverses espèces
d’Eikenella, de Fusobacterium, de Peptostreptococcus, de
Prevotella et de Porphyromonas. Des antibiotiques à large
spectre (vancomycine et pipéracilline-tazobactam) seront
prescrits contre une arthrite septique durant de trois à quatre
semaines selon les résultats de la culture12,13.
lemedecinduquebec.org
 Dermquest. Reproduction autorisée.
CONCLUSION
Pour tout patient au service de consultation sans rendezvous pour une infection cutanée, l’anamnèse doit être bien
ciblée. Vous devez rechercher des facteurs prédisposants
locaux, régionaux et généraux. Vous devez soupçonner
23
et traiter certains agents pathogènes en cas d’exposition
particulière. Vous devrez rester à l’affût des complications
possibles sous-jacentes et des urgences pour diriger votre
patient au bon endroit, soit à l’urgence, en médecine ambulatoire ou à la maison. //
Date de réception : le 29 janvier 2016
Date d’acceptation : le 21 février 2016
La Dre Nancy Watts n’a déclaré aucun conflit d’intérêts.
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CE QUE VOUS DEVEZ RETENIR
On doit envisager un autre diagnostic que celui de cellulite
en cas de douleur. Il faut alors penser à une arthrite septique, à une fasciite nécrosante ou à une thrombophlébite.
h La surélévation du membre inférieur ou supérieur infecté
est un élément essentiel à la guérison d’une cellulite.
h Il faut soupçonner une infection à SARM extrahospitalier
en présence d’infections cutanées à répétition (furoncles
et abcès) dans une même famille, surtout si un membre
est porteur de cette bactérie.
h
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POUR EN SAVOIR PLUS...
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h
24
Le Médecin du Québec, volume 51, numéro 8, août 2016