Concilier qualité de l`air et enjeux climatiques en Provence
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Concilier qualité de l`air et enjeux climatiques en Provence
Concilier qualité de l’air et enjeux climatiques en Provence-Alpes-Côte d’Azur Les enjeux de l’air et du climat en Provence-Alpes-Côte d’Azur : que savons-nous ? Les liens entre qualité de l’air et climat, d’un point de vue scientifique, sont nombreux. Les sources d’émissions sont globalement communes, certains composés sont impliqués à la fois dans les phénomènes de pollution locale et d’effet de serre. Par ailleurs, les paramètres météorologiques influent largement la pollution atmosphérique et le changement climatique impactera la qualité de l’air. En Provence-Alpes-Côte d’Azur, les problèmes de qualité de l’air dégradée sont récurrents et l’attention de l'État est donc particulièrement forte sur ce sujet comme en témoignent les quatre Plans de Protection de l'Atmosphère (PPA) applicables. Agglomérations fortement urbanisées, zone industrielle de premier plan, réseau routier dense, écosystème méditerranéen particulièrement émetteur de polluants (ou précurseurs) biogéniques et climat chaud, sec et très ensoleillé sont autant de facteurs se combinant pour générer des épisodes de pollution atmosphérique. Ce sont également des facteurs qui font de la région un territoire à la fois fortement émetteur de gaz à effet de serre et particulièrement vulnérable aux effets du changement climatique. De quels polluants parle-t-on ? Pollution atmosphérique Effet de serre / changement climatique Impacts locaux sur la santé humaine et l’environnement Impacts planétaires sur le climat Aérosols / Particules (PM10, PM2,5, etc.) : − carbone-suie (black carbon) − composés organiques volatils (COV) comme les Hydrocarbures Aromatiques Polycycliques (HAP) dont le benzène, mais aussi les dioxines et furanes − composés inorganiques (sulfates, nitrates, ammonium, etc.) − métaux Oxydes d'azote (NOx), notamment dioxyde d’azote (NO2) Ozone (O3) Monoxyde de carbone (CO) Dioxyde de soufre (SO2) Ammoniac (NH3) − Vapeur d’eau (H2O) Les gaz à effet de serre (GES) visés par le protocole de Kyoto : − dioxyde de carbone (CO2) − méthane (CH4) − protoxyde d'azote (N2O) − gaz fluorés comme les hydrofluorocarbures (HFC) et perfluorocarbures (PFC) − hexafluorure de soufre (SF6) Mais aussi : − ozone (O3) − certaines particules Les polluants peuvent avoir des origines naturelles ou anthropiques. La combustion (carburants, production de chaleur, incendies…) reste la source d’émissions la plus importante, qu’il s’agisse de polluants atmosphériques ou de GES : − le transport routier est sans conteste une source commune d’émissions de polluants locaux et de gaz à effet de serre ; − l’industrie et le bâtiment (logement, tertiaire) constituent également des contributeurs importants à ces émissions. Les émissions issues de sources naturelles sont loin d’être négligeables, plus encore en région PACA qu’ailleurs en France, notamment du fait des caractéristiques de la végétation – particulièrement émettrice de COV – et du climat méditerranéen. 2015 ⏐ Comment concilier qualité de l’air et enjeux climatiques en Provence-Alpes-Côte d’Azur ? Comment observer, comprendre et maîtriser les pollutions ? Emissions dans l’air et concentrations de polluants sont deux notions qui sont liées mais qui doivent bien être distinguées et considérées de manière complémentaire. Tant pour la qualité de l’air que pour l’effet de serre, les concentrations de polluants ou de GES dans l’air constituent l’indicateur de référence. Le lien entre concentrations et émissions diffère dans les deux domaines : − les concentrations de GES étant considérées de manière globale, à l’échelle de la planète, elles dépendent essentiellement des quantités de GES émises par les différentes sources, n’importe où sur Terre ; − les concentrations en polluants auxquelles une population donnée est exposée dépendent de nombreux facteurs, comme les quantités de polluants émises à proximité, mais également les quantités de polluants apportées depuis d’autres régions, la météorologie, la topographie, la réactivité chimique des polluants dans l’atmosphère, etc. − Des outils de calcul permettent de modéliser les liens entre émissions et concentrations, en prenant en compte les différents facteurs précédemment cités. Dans les deux cas, c’est principalement en agissant sur les émissions qu’il est possible de stabiliser ou faire baisser les concentrations. Ainsi, les objectifs internationaux et nationaux portent sur les deux indicateurs : concentrations et émissions. CONCENTRATIONS ÉMISSIONS Les polluants atmosphériques Les gaz à effet de serre Quoi ? L’inventaire local des émissions par source. Quoi ? L’inventaire local des émissions par source. Comment ? d’émissions. Comment ? d’émissions. Un calcul à partir des facteurs Un calcul à partir des facteurs Pourquoi ? Pour construire des modèles numériques permettant de représenter et de prévoir les concentrations de polluant dans notre atmosphère. Pourquoi ? Pour attribuer ces émissions (par type d’activité, par pays, etc.) et suivre l’effet des mesures prises pour leur atténuation. Quoi ? La concentration en atmosphère à l’échelle locale. notre Quoi ? La concentration globale en GES de notre atmosphère à l’échelle planétaire. Comment ? Un réseau d’environ 80 stations de mesure réparties dans la région. Comment ? Une station de mesure de référence à Hawaii et un réseau d’environ 130 stations de mesure réparties dans le monde. polluant de Pourquoi ? Pour vérifier les concentrations réelles afin de calibrer les modèles réalisés et surveiller les seuils définis par la réglementation. Pourquoi ? C’est une donnée essentielle qui alimente les modèles climatiques et permet les projections futures. Les quantités d’émissions « admissibles » sont ainsi définies en cohérence avec les objectifs de concentrations qu’il est souhaitable de retrouver dans l’air pour minimiser les effets de la qualité de l’air sur la santé et l’environnement d’une part ou pour limiter le changement climatique d’autre part. 2015 ⏐ Comment concilier qualité de l’air et enjeux climatiques en Provence-Alpes-Côte d’Azur ? Impact global, impact local Les gaz à effet de serre courants n’ont pas d’impact direct sur la santé humaine et ne sont donc pas considérés comme polluants atmosphériques pouvant avoir un impact local. Par contre, certains polluants atmosphériques locaux peuvent intervenir dans les phénomènes à l’origine du changement climatique. © Sébastien Bruyère L’ozone, formé à partir des polluants atmosphériques (NOx, COV), est lui même un gaz à effet de serre, même s’il reste peu de temps présent dans l’atmosphère (contrairement au CO2 et autres GES). De plus, il perturbe la productivité des végétaux et leur capacité d’absorption du CO2. La maîtrise des concentrations d’ozone constitue donc un enjeu à la fois pour la santé humaine et pour la lutte contre le changement climatique. Les particules peuvent également intervenir dans plusieurs phénomènes globaux impactant le climat de la planète, mais leur rôle précis est encore mal connu et le bilan final reste difficile à estimer. Par exemple, lorsque le carbonesuie, composé de particules noires, se dépose sur la neige ou la glace, les noircit, diminuant ainsi leur la capacité à réfléchir les rayonnements solaires vers l’espace (l’albédo). De cette manière, il contribue au réchauffement global. D’autres particules peuvent avoir des effets inverses. Compte-tenu de ces incertitudes sur le rôle des aérosols dans l’effet de serre, ces émissions restent avant tout préoccupantes pour la qualité de l’air à l’échelle locale. Conditions météorologiques et épisodes de pollution atmosphérique Le lien entre pollution atmosphérique et conditions météorologiques est très net. De nombreux facteurs météorologiques (température, humidité, vent, ensoleillement, etc.) influent sur la qualité de l’air, tant sur les réactions physico-chimiques à l’origine de la formation des polluants que sur la dispersion de ces polluants. D’une manière générale, des conditions calmes, anticycloniques, ensoleillées sont favorables à l’apparition d’épisodes de pollution. Des phénomènes météorologiques très localisés sont souvent en cause (comme les inversions de température, surtout l’hiver, ou les mouvements pendulaires des brises thermiques), phénomènes influencés également par la topographie du territoire et la nature de l’occupation du sol. Certains phénomènes restent cependant mal connus, comme les interactions entre la formation d’îlots de chaleur urbains et les épisodes de pollution. 3 2015 ⏐ Comment concilier qualité de l’air et enjeux climatiques en Provence-Alpes-Côte d’Azur ? Des mesures pour répondre à ces deux enjeux : co-bénéfices ou contradictions ? Lutte contre le changement climatique et amélioration de la qualité de l’air se rejoignent la plupart du temps au travers de mesures dites « gagnant-gagnant » ( ). Pour les collectivités, de nombreuses mesures peuvent être prises, en priorité dans le domaine des déplacements, mais également dans celui du logement et de l’urbanisme. Les actions d’information et d’éducation (plus que de sensibilisation) ne sont pas à négliger car les leviers comportementaux sont nombreux. La vigilance reste de mise sur quelques points ( ) afin d’éviter des effets négatifs dans l’un ou l’autre domaine, mais il s’agit plus de points d’attention que de réelles contradictions dans les mesures à prendre. Dans le dernier rapport du GIEC, paru en 2014, la réduction des émissions polluantes et nocives pour la santé humaine est bien identifiée comme un co-bénéfice des politiques de lutte contre le changement climatique et d’atténuation des émissions de GES. Transports et aménagement du territoire : report modal et maîtrise des déplacements La diminution des besoins de déplacements à travers l’organisation du territoire. L’exposition des populations lors des reports de flux de trafic Un report modal de la voiture particulière vers des transports collectifs et des modes actifs. Qualité de l’air, circulation d’air dans les quartiers et exposition des populations à des sources d’émissions intenses de polluants doivent être mieux pris en compte dans les projets d’urbanisme. Le développement du covoiturage. L’augmentation des parts du marché du fret ferroviaire et fluvial pour le transport de marchandises. Une consommation moindre grâce l’écoconduite, l’entretien des véhicules et la fluidification du trafic en zones congestionnées. Le choix des motorisations / carburants Favoriser le retrait de la circulation des véhicules anciens et leur remplacement par des véhicules à la norme Euro 6. Vérifier l’entretien des véhicules et la bonne utilisation des filtres à particules. En particulier pour les flottes captives, appliquer des contrôles stricts sur les FAP. Pour les flottes captives, dans les agglomérations où la qualité de l’air est régulièrement dégradée, chercher des alternatives aux moteurs à combustion (véhicules électriques) et, par précaution, éviter les motorisations diesel. Rester prudents sur le développement des biocarburants et encourager la recherche sur les prochaines générations de ces carburants alternatifs. Un parc de véhicules plus performant. Consommation des ménages : réduction des déchets Le traitement des déchets La réduction des déchets à la source : lutte contre le gaspillage alimentaire, réduction des emballages, fin de l’obsolescence programmée, etc. Le développement d’activités de type recycleries et réparation-revente. Les procédés de dépollution (air, sols, eau) du traitement des déchets peuvent être très consommateurs d’énergie. Attention à ne pas créer une autre source de pollution en voulant la limiter ... Le tri et le recyclage des déchets via des procédés appropriés. La mise en place de procédés de traitement performant avec valorisation énergétique. La promotion d’alternatives respectueuses de l’environnement pour éviter le brûlage des déchets verts. 4 2015 ⏐ Comment concilier qualité de l’air et enjeux climatiques en Provence-Alpes-Côte d’Azur ? Consommation d’énergie : performance des équipements et recours aux énergies renouvelables Le chauffage au bois La diminution des besoins en chauffage, rafraichissement et ventilation par la conception des bâtiments et leur usage. Il reste une alternative positive aux énergies fossiles mais il est impératif de prendre des mesures pour le remplacement des appareils de chauffage peu performants. La sensibilisation et l’information sont essentielles auprès du public et des professionnels pour que la réglementation en place soit bien comprise et acceptée. Les usages permettront de tirer profit de ce mode de chauffage sans nuire à la santé des habitants (choix du bois, stockage, entretien des appareils). Le développement de chaufferies collectives permettant d’investir dans des équipements les plus performants et de maîtriser la qualité du combustible, reste une solution préférable pour le chauffage principal des logements. La conception des espaces urbains. L’usage d’appareils performants. L’inspection appareils. et Le recours à renouvelables. l’entretien des réguliers sources des d’énergie La qualité de l’air intérieur Aller au delà de la réglementation pour les niveaux d’exigence en matière de renouvellement d’air et de ventilation dans les cahiers des charges des bâtiments sans se baser uniquement sur des critères de performance énergétique. Former les professionnels à la prise en compte de ces critères et l’installation d’équipements performants. Vérifier les émissions dans l’air intérieur des matériaux utilisés, y compris dans le cas de matériaux à faible impact environnemental. L’industrie : progresser dans la performance et la valorisation énergétique Le traitement des rejets L’amélioration de l’efficacité énergétique dans l’industrie. Certains procédés de traitement des rejets industriels peuvent être très consommateurs d'énergie. Le soutien aux projets d’écologie industrielle et de récupération de chaleur. L’agriculture : limiter l’usage d’engrais azotés L’enrichissement des sols L’amélioration de l’efficacité énergétique dans l’agriculture (pratiques culturales, parcs d'engins, énergies renouvelables). Optimiser la fertilisation azotée en utilisant la juste dose et en accroissant la fixation d’azote atmosphérique grâce à de légumineuses au sein des rotations. La limitation de l’utilisation des engrais à fort taux de volatilisation. 5 2015 ⏐ Comment concilier qualité de l’air et enjeux climatiques en Provence-Alpes-Côte d’Azur ? Vers une planification climat-air-énergie territoriale… Pour intégrer au sein des documents de planification (PCAET mais aussi SCoT, PLU, PLUi, PDU, etc.) les enjeux climat, air et énergie qu’ils sont tenus de prendre en compte, plusieurs principes doivent être appliqués : − rechercher en priorité la réduction à la source des impacts avant la substitution par une solution technologique alternative ; − étudier les projets selon des grilles multi-critères intégrant les impacts sur la qualité de l’air au même niveau que les émissions de GES, les consommations d’énergie et d’autres critères environnementaux, sociaux et économiques ; − prendre en compte le contexte local car les enjeux d’exposition des populations seront variables selon qu’on se trouve en centre-ville, en milieu péri-urbain ou rural, de même que l’état général de la qualité de l’air, les conditions climatiques et topographiques, etc. Il n’y a pas forcément de réponse unique à chacune des questions soulevées ici. Les sources d’émissions étant souvent communes, une évaluation ex ante est possible à partir des facteurs d’émissions (base de données du CITEPA par exemple). Elle repose sur des indicateurs communs comme la quantité de carburant économisé, à partir de kilomètres évités ; la quantité d’énergie économisée, par type d’énergie ; etc. Une telle approche nécessite une bonne connaissance du territoire en termes de parc de véhicules, typologies de déplacements, équipement des ménages en chauffage, etc. Plus d’information… • • La DREAL PACA, Unité Energie-Climat-Air. Plus d’information sur : Accueil > Climat - Air - Energie. • Le service énergie-climat-air (SECA) de la Région (Standard : 04.91.57.50.57). Plus d’information sur : www.regionpaca.fr > Développement durable > Transitions énergétiques > Climat, air, énergie. • L’observatoire régional énergie climat air (ORECA) www.oreca.regionpaca.fr met en ligne toutes les études réalisées sur ces thèmes pour le compte des services de l’État, de la Région et de l’Ademe. • Soutenu par la Région PACA, la DREAL, Air PACA et GeographR, le Pôle métier Climat & Air du CRIGE-PACA encourage le partage et le transfert des connaissances et expériences, la mise en réseau des acteurs régionaux, l'innovation et la recherche, la production de données et d'outils nécessaires à une meilleure gestion des actions favorisant l’adaptation au changement climatique et l’amélioration de la qualité de l’air dans nos territoires… Plus d’information sur : www.crige-paca.org/poles-metiers/pole-metier-climat-et-air et le blog geographr.typepad.fr/pole_metier_climat_air. • Air PACA (www.airpaca.org), association régionale agréée pour la surveillance de la qualité de l'air, propose une écoute et une aide à la décision aux partenaires régionaux et locaux, une expertise technique et scientifique et une contribution à l'éducation à l'environnement des professionnels et de la population. Le site grand public d’Air PACA propose une information accessible à tous, pour faciliter la communication vers le grand public et la pédagogie : www.lesbonsplanspourlair.org. • Les sites emiprox.airpaca.org et energair.airpaca.org offrent un accès libre aux inventaires des émissions PACA (GES et polluants) à différentes échelles géographiques. • • Le CITEPA centralise l’ensemble des facteurs d’émissions utiles pour les inventaires www.citepa.org La direction régionale de l’ADEME (www.paca.ademe.fr) propose des expertises techniques, des accompagnements méthodologiques et des aides financières sur les thématiques notamment de l’air, du changement climatique et des économies d’énergie. Dans la rubrique Notre offre, la liste des personnes ressources par thématique permet de contacter des experts directement. L’INERIS met à disposition les textes réglementaires et propose des guides pratiques pour les activités industrielles : www.ineris.fr. Ce document constitue une synthèse de l’étude réalisée par l’association pour l’innovation et la recherche au service du climat, AIR Climat, pour la Direction Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement (DREAL) Provence-Alpes-Côte d’Azur en novembre 2015 (disponible sur le site www.oreca.regionpaca.fr). Contacts : www.air-climat.org / Marie LOOTVOET/ [email protected]