archaeonautica - Dernières brèves
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ARCHAEONAUTICA 17 2 01 2 Livre-archaeonautica.indb 3 14/11/12 15:18 Pour toute information relative à la diffusion de nos ouvrages, merci de bien vouloir contacter notre service lecteurs : CNRS ÉDITIONS 15, rue Malebranche, F-75005 PARIS Tél. : 01.53.10.27.00 - Fax : 01.53.10.27.27 Courriel : [email protected] Site Internet : www.cnrseditions.fr © CNRS ÉDITIONS, Paris, 2012 ISBN : 978-2-271-07171-2 ISSN : 0513-945 Livre-archaeonautica.indb 4 14/11/12 15:18 SOMMAIRE HONOR FROST : UNE VIE UNDER THE MEDITERRANEAN .............................................................. 7 Patrice POMEY LE DOSSIER DE L’ÉPAVE DU GOLO (MARIANA, HAUTE-CORSE) ................................................ 11 Patrice POMEY NOUVELLES CONSIDÉRATIONS SUR LA CARGAISON DE L’ÉPAVE SANGUINAIRES A (AJACCIO, CORSE DU SUD) .................................................................................... 31 Franca CIBECCHINI, Claudio CAPELLI, Souen FONTAINE, Hervé ALFONSI L’ÉPAVE LA MADRAGUE DE GIENS (VAR) ET LA PLAINE DE FONDI (LATIUM) ....................... 71 Antoinette HESNARD L’ÉPAVE RICHES DUNES 5 À MARSEILLAN (HÉRAULT) : UN TRANSPORT D’OBJETS DÉCORATIFS À USAGE DOMESTIQUE AU IIe SIÈCLE APRÈS J.-C. .......................... 95 Hélène BERNARD, Marie-Pierre JÉZÉGOU, Philippe BLANC, Benoit MILLE L’ÉPAVE DE PAKOŠTANE, CROATIE (FIN IVe – DÉBUT Ve SIÈCLE APR. J.-C.) ................................................................................................. 105 Sous la direction de Giulia BOETTO, Irena RADIĆ ROSSI, Sabrina MARLIER, Zdenko BRUSIĆ L’EMBARCATION MONOXYLE ASSEMBLÉE DE DOUSSARD / BREDANNAZ (LAC D’ANNECY, HAUTE-SAVOIE, FRANCE) ....................................................................................... 153 Yves BILLAUD, Eric RIETH, avec la collaboration de Marc GINISTY BATEAUX DE GARONNE ET NAVIRES D’ATLANTIQUE ................................................................... 169 Sommaire Frédéric GERBER 5 001-006-sommaire.indd 5 15/11/12 10:03 L’EMBARCATION MONOXYLE ASSEMBLÉE DE DOUSSARD / BREDANNAZ (LAC D’ANNECY, HAUTE-SAVOIE, FRANCE) BATELLERIE DES EAUX INTÉRIEURES À LA FIN DE L’ÉPOQUE MÉDIÉVALE Yves Billaud * Eric Rieth ** avec la collaboration de Marc Ginisty *** CADRE GÉNÉRAL L’épave de Bredannaz est située dans la partie méridionale du lac d’Annecy, encore appelée le « petit lac ». Elle repose par moins de quinze mètres de fond, sur la rive occidentale, immédiatement à la sortie sud du hameau de Bredannaz, commune de Doussard (fig. 1). Elle a été repérée en 2003 par Noël Dupont, responsable de l’école de plongée de Talloires, et déclarée à l’antenne d’Annecy du Drassm (Département des Yves BILLAUD, Eric RIETH, with Marc GINISTY, The extended logboat of Doussard/Bredannaz (Lake Annecy, Haute-Savoie). Vessels of internal waters at the end of the medieval period Discovered in 2003 in the southern part of Lake Annecy, the Bredannaz wreck has been entirely cleared during two underwater excavation campaigns that have revealed a good state of preservation. The study, along with complementary observations made on a similar wreck from Lake Annecy, has led to the reconstitution of a vessel some 9 metres long and 2.30 metres wide, rectangular in plan and extending to a point at the prow. The architecture is archaic in principal, being of bottom based construction with the structure of an extended logboat/plank boat. Certain characteristics, such as the use of cramps, lead one to question the eventual relations between naval and rural architecture. The craft has also been studied from the point of view of metrology and has revealed the use of the Savoie foot. Its hydrodynamic characteristics have been examined with the aid of naval architecture software. The architectural particularities of the Bredannaz wreck, for which a date of 15th-16th century is proposed, make it an important milestone in our knowledge of the history of watercraft in the Alpine lakes. Recherches Archéologiques Subaquatiques et Sous-Marines), service appartenant au Ministère de la Culture. Fin 2003, une plongée d’expertise avec l’inventeur permettait d’estimer les dimensions de l’épave et de constater l’importance de son enfouissement ainsi que l’érosion des parties visibles. Ces caractéristiques étant nettement différentes de ce qui s’observe couramment sur les épaves récentes des lacs, un échantillon pour datation était également prélevé. L’hypothèse d’un âge assez ancien était confirmée par l’analyse radiocarbone de l’échantillon de bois, avec une attribution aux XVe-XVIe siècles. Fin 2004, une première campagne de fouille d’une dizaine de jours permettait de dégager une partie de l’arrière de l’embarcation, montrant la bonne conservation des parties enfouies (fig. 2). Le relevé architectural mettait en évidence des traits archaïques, avec la présence de bordés monoxyles de transition. Une deuxième campagne à l’automne 2005 portait la surface décapée à 21 m² en dégageant la totalité de l’épave (fig. 3). Après un relevé intégral de l’architecture, celle-ci a été recouverte Yves Billaud, Eric Rieth, avec la collaboration de Marc Ginisty Résumé Découverte en 2003 dans la partie sud du lac d’Annecy, l’épave de Bredannaz a été entièrement dégagée en deux campagnes de fouille subaquatique qui ont montré un bon état de conservation. Son étude permet, avec des observations complémentaires sur une autre épave similaire du lac d’Annecy, de reconstituer une embarcation de 9 m de long pour 2,3 m de large, au plan d’ensemble rectangulaire et prolongée à l’avant par une pointe. L’architecture est de principe archaïque, avec une construction sur sole et une structure de type monoxyle-assemblée. Certaines caractéristiques, comme l’emploi de clameaux, amènent à s’interroger sur les éventuelles relations entre architectures navale et rurale. L’embarcation est également étudiée sous l’aspect de la métrologie, mettant en évidence l’emploi du pied de la Chambre de Savoie. Ses caractéristiques hydrodynamiques sont abordées à l’aide d’un logiciel d’architecture navale. Les particularités architecturales de l’épave de Bredannaz, pour laquelle une datation aux XVe-XVIe siècles est proposée, en font un jalon important pour la connaissance de l’histoire de la batellerie dans les lacs alpins. 153 Livre-archaeonautica.indb 153 14/11/12 15:22 Annecy N Léman Genève lac cy ne n d’A lac d’Annecy Roc de Chère Talloires Le Bourget Lyon Aiguebelette Bredannaz sup. à 1500m Paladru 500-1500m 0-500m Doussard 50 km 5 km Grenoble Fig. 1 : Situation de l’épave de Bredannaz à Doussard, Haute-Savoie. bordé levée tribord courbe rehausse bordé levée babord courbe Nord coque planche planche anneau chaine clameau planche < profil bathymétrique > clameau 0 Fig. 2 : L’épave en cours de fouille ; marquage des éléments architecturaux en vue du relevé (Cliché E. Champelovier, MCC-DRASSM). 1 5m planche Fig. 3 : Plan général de l’épave, coque et éléments dissociés. Ouest Est surface du lac (446,7 m) V 0 Archaeonautice 17 – 2012 5 10 0 1 5m épave 15 Fig. 4 : Profil bathymétrique de la rive du lac d’Annecy au droit de l’épave. 154 Livre-archaeonautica.indb 154 14/11/12 15:22 DONNÉES DE TERRAIN LA COQUE Les dimensions maximales conservées de la coque sont de 7,8 m pour la longueur et de 2,3 m pour la largeur. Le plan d’ensemble est rectangulaire avec un prolongement en pointe à l’avant (fig. 5). L’embarcation présente un fond plat (la sole) et des flancs (les bordés) rectilignes, peu évasés. L’assemblage est assuré par des éléments transversaux (les membrures). L’arrière est fermé par un simple élément plat, vertical à l’origine (le tableau). L’avant se relève en formant une levée. En raison de la position oblique de l’épave sur la pente, le bordé tribord est conservé sur 40 cm de hauteur mais le bordé bâbord sur seulement 20 cm de haut. Ces bordés, constitués chacun d’une seule pièce de bois, sont d’un type particulier dit « bordé monoxyle de transition » dans lequel la jonction entre le fond et le flanc s’opère par le biais d’une pièce monoxyle en forme de cornière (fig. 6). Leurs longueurs sont de 6,3 m. Longitudinalement, les bordés sont rectilignes hormis celui de bâbord qui sur l’avant présente une légère déviation vers l’intérieur. Transversalement, le passage entre le fond et les flancs de l’embarcation est nettement marqué, avec un bouchain vif. Les flancs sont légèrement ouverts. L’angle avec le fond varie de 103° à 120°, valeurs probablement supérieures à celle d’origine qui, en se basant sur les courbes, devait être de l’ordre de 105°. La distance entre le bouchain et la première planche de la sole varie de 12 cm à l’arrière jusqu’à 20 cm vers l’avant. Le joint entre les bordés monoxyles de transition et les planches de sole n’est pas régulier mais peut présenter un écartement centimétrique. Aucun système de calfatage n’a été observé. Seul un démontage de la sole permettrait de confirmer ou d’infirmer cette absence de calfatage. Ajoutons par ailleurs qu’aucune agrafe du type « appe », associée traditionnellement au matériau de calfatage des embarcations des lacs alpins, n’a été découverte lors de la fouille. Le bois constituant les bordés monoxyles de transition est remarquable par sa couleur très sombre et son grain fin. La détermination proposée est le noyer1, essence paraissant a priori surprenante pour une utilisation dans l’eau. L’écartement entre les bouchains est de 2,05 m à l’arrière et se réduit très légèrement en allant vers l’avant. La sole elle-même est constituée de deux parties avec, à l’arrière, cinq planches de résineux et, à l’avant, quatre planches semblant de même essence que les bordés monoxyles mais restant à déterminer. Les planches de résineux ont des largeurs de 30 à 45 cm. Les joints sont à peine visibles, ce qui traduit un assemblage très soigné. Aucun calfatage n’est visible de l’intérieur. Un petit sondage de reconnaissance depuis l’extérieur n’a pas permis d’observer directement les joints. Mais, au moins au toucher, il ne semble pas exister de calfatage ni de systèmes tels que joints de recouvrement ou appes. Les deux planches latérales mesurent 5,25 m de longueur et présentent une découpe en oblique venant s’imbriquer avec la série de planches de l’avant (fig. 7). Les joints en oblique sont très serrés. Par contre, les joints transversaux sont lâches, avec un écartement d’un à deux centimètres. Aucun calfatage n’a été observé. Au niveau du joint, l’épaisseur des planches est de 4 à 5 cm. La tenue entre les deux séries de planches est assurée par sept crampons en fer (fig. 8). En forme d’agrafe, ils sont à rapprocher des clameaux utilisés pour l’assemblage des radeaux. Leur longueur est d’une vingtaine de centimètres. Disposés à partir de la face externe de la sole, ils traversent les planches. Les pointes, lorsqu’elles sont visibles, sont rabattues. Le tracé sinueux du joint entre les deux séries de planches de la sole et de la levée ainsi que le décalage par rapport à la terminaison avant des bordés monoxyles de transition participent à la rigidité longitudinale de l’embarcation. L’extrémité avant est érodée mais les planches latérales avant ont conservé les découpes obliques de la pointe permettant une restitution de cette dernière. Leurs prolongements se croisent à 2,5 m en avant de la terminaison des bordés monoxyles de transition. Ce croisement ne se fait pas sur l’axe de symétrie de la sole mais il est décalé de 20 cm sur tribord. Cette asymétrie paraît liée à la légère déviation vers l’intérieur (ou rentrée) de l’avant du bordé bâbord. La coupe longitudinale montre que la levée débute au niveau de la terminaison avant des bordés. L’angulation est rapide. L’angle de la levée peut être estimé à 14°. Les membrures sont de deux types : des pièces rectilignes, fixées uniquement au fond (les varangues plates, épars ou rables) et des pièces formant un angle et fixées au fond et sur les flancs (les courbes). Dans les deux cas, elles sont très régulièrement délignées avec une section de 10 cm par 7 cm (fig. 10). Entre les deux bordés monoxyles, dix-huit membrures sont très régulièrement réparties. L’entre-axe varie peu, autour de 34 cm, ce qui donne une maille (espace libre entre les membrures) de 27 cm. Depuis l’arrière de l’embarcation les membrures sont ordonnées en trois séquences constituées de deux rables et un couple de deux courbes puis deux séquences de trois rables et un couple de courbes. Les raisons de cette modification de la distribution des membrures n’apparaissent pas clairement. Entre les bordés, les rables vont d’un bouchain à l’autre. Ils sont disposés de chant. À la base, ils sont traversés par des anguillers disposés au niveau des jonctions entre les virures de la sole. L’assemblage avec la sole est assuré par des chevilles (les gournables) d’un diamètre de 22 à 27 mm, dont l’essence est le chêne. Au nombre de douze par membrure, elles sont réparties de part et d’autre des anguillers. Ces gournables semblent avoir été majoritairement enfoncées à partir de la face supérieure de droit (chant) des membrures. Les chevilles placées aux extrémités des rables assurent l’assemblage avec les bordés. Elles sont disposées obliquement, vers l’extérieur. Notons que ce même type d’assemblage au moyen de gournables se retrouve au niveau des bordages de surélévation. Les courbes sont affrontées, c’est-à-dire alignées en opposition par couple. Leur section augmente légèrement sur les bordés. Elles sont peu ouvertes, avec un angle de l’ordre de 105°. Les deux courbes affrontées d’une même membrure sont espacées sur la sole de 4 à 5 cm. Pour les trois à l’arrière (fig. 5 : M 3, M 6 et M 9), cet espace correspond à un joint entre des virures de sole, avec une alternance d’une membrure à l’autre. Pour les deux autres (M 13 et M 17), cet espace est légèrement décalé à tribord de l’axe de symétrie longitudinal de l’embarcation. Il n’a pas été observé sur les membrures, ni sur la sole, de structure particulière pouvant être mise en relation avec une emplanture de mât. Sur la levée, un seul rable est conservé en place. Mais les emplacements de trois membrures sont marqués par les trous de gournable et l’érosion différentielle des planches. L’entre-axe diminue légèrement en passant à 30 cm. L’arrière de l’embarcation est désassemblé. Il est constitué d’une simple planche formant tableau, assez mal conservée et rabattue. L’essence serait le noyer. L’épaisseur est de 3 à 4 cm. Le tableau est fixé à la sole à l’aide de clameaux. Latéralement, il n’a pas été observé de système de fixation aux bordés. Mais plusieurs autres clameaux, découverts immédiatement à proximité, pourraient avoir assuré cette fonction. Yves Billaud, Eric Rieth, avec la collaboration de Marc Ginisty d’un géotextile et d’une couche de sédiment lacustre. Le site est éloigné d’à peine une trentaine de mètres de la rive. À cet endroit, le profil du fond montre une « beine » (le plateau sous-lacustre) quasiment inexistante (fig. 4). L’épave repose sur le « talus » (la pente de craie), entre 12 et 14 m de profondeur, l’extrémité la plus basse posée sur un léger replat. L’embarcation est orientée nord-ouest / sudest, obliquement à la ligne de pente. Divers éléments dissociés, en bois mais aussi en fer, sont présents sur et à proximité immédiate de l’épave. 155 Livre-archaeonautica.indb 155 14/11/12 15:22 bordé monoxyle tribord avant rd No bordé monoxyle, bâbord avant pente du fond du lac [M22] [M21] [M20] M19 M19 Pl 6 Pl 7 Pl 8 Pl 9 M18 M17S M17N Pl 6 Pl 7 Pl 8 Pl 9 M16 M15 M15 BS Pl 1 Pl 7 Pl 8 Pl 9 Pl 5 BN M14 M13S M13N M12 M11 M10 M9N M9S M8 rehausse M7 M6N M6S M5 M4 M3S M3N M3S M3N M2 Pl 5 0 Pl 2 Pl 3 BN Pl 4 Pl 5 T1 PLAN 1 T1 Pl 4 tale horizon Pl 1 Pl 3 Coupes transversales Archaeonautice 17 – 2012 BN M1 M1 Pl 1 Pl 2 BN BS BS tale horizon Coupe longitudinale 5m Fig. 5 : Relevé de l’épave (Synthèse Y. Billaud, MCC-DRASSM). 156 Livre-archaeonautica.indb 156 14/11/12 15:22 Fig. 8 : Vue du raccord sole-levée à tribord entre les rables M14 et M16 ; à noter les deux pointes rabattues de clameaux (Cliché Y. Billaud, MCC-DRASSM). Fig. 7 : Vue du raccord sole-levée à bâbord (Cliché Y. Billaud, MCC-DRASSM). Fig. 9 : Vue de l’extrémité avant du bordé monoxyle de transition à bâbord et du clameau assurant la jonction avec le bordé monoxyle avant, actuellement désolidarisé ; à noter l’amorce de la découpe en pointe de la levée (Cliché Y. Billaud, MCC-DRASSM). LES ÉLÉMENTS DISSOCIÉS Au cours des deux campagnes de fouille, plusieurs éléments en bois, mais aussi d’autres en métal, pouvant se rapporter à l’épave ont été repérés à sa proximité immédiate (fig. 3). Positionnés sur un plan d’ensemble, ils ont été remontés puis dessinés. Ils viennent compléter notre vision de l’embarcation. Deux pièces de bois étaient particulièrement remarquables en raison de leur longueur. Elles étaient situées vers l’avant de l’épave, l’une au-dessous et un peu éloignée et l’autre, au-dessus, au contact de l’avant. Leurs longueurs respectives sont de 2,65 m et de 2,60 m. L’essence est la même que celle des bordés monoxyles de transition, probablement le noyer. Le bois érodé ne permet pas l’observation des surfaces d’origine. Ces deux pièces sont interprétables comme les bordés monoxyles de transition encadrant la levée. La pièce la mieux conservée viendrait à tribord avant (fig. 4). Elle présente le même profil en L légèrement ouvert, que les bordés monoxyles de transition associés à la sole. La forme est trapézoïdale avec, pour la partie correspondant au flanc, une hauteur passant d’une extrémité à l’autre, de 10 cm à 40 cm, soit la hauteur du flanc tribord. Les grands côtés sont rectilignes. Ils forment un angle de 12°, tout à fait comparable à celui estimé pour la levée à 14°. Depuis l’extrémité la plus importante, trois chevilles sont conservées (diamètres de 25 à 27 mm). Au-delà, deux dépressions sur la tranche de la pièce, espacées de 30 cm, peuvent être les traces d’autres chevilles. Leur disposition est cohérente avec celle des membrures de la levée. L’autre pièce, venant à bâbord avant (fig. 4), a un flanc très mal conservé, avec au maximum 10 cm présents. La partie horizontale est un peu mieux conservée. Trois chevilles, et la trace probable d’une quatrième, sont visibles. Leur disposition est compatible avec celle des membrures. Les longueurs des deux bordés sont cohérentes avec la dimension obtenue graphiquement pour l’avant de l’embarcation. Celle-ci se terminait donc en seuil étroit (en raison du raccord entre les deux bordés). Dans cette configuration, la longueur totale de l’embarcation peut alors être estimée à 9 m. L’assemblage entre les bordés de chaque bord était assuré, comme pour les deux séries de planches de sole, par des clameaux en fer (fig. 9). Ceux-ci étaient au moins deux comme l’indique à tribord, un clameau encore en place et un autre simplement tombé de Yves Billaud, Eric Rieth, avec la collaboration de Marc Ginisty Fig. 6 : Vue depuis l’arrière du bordé monoxyle de transition à tribord (noté BN), rables M1 et M2, courbe M3N (Cliché E. Champelovier, MCC-DRASSM). 157 Livre-archaeonautica.indb 157 14/11/12 15:22 maillons sont au nombre de 21. Seul le treizième en partant de l’anneau, long de 69 mm, est un maillon simple, ovale. Les autres, longs de 95 à 140 mm, sont resserrés en leur milieu. Rappelons que le tableau arrière de la nau d’Yvoire est muni d’une cheville à boucle portant un croc auquel est accrochée une chaîne de fer forgé à maillons ovales non pincés d’une quinzaine de centimètres de long2. MATÉRIEL ARCHÉOLOGIQUE Archaeonautice 17 – 2012 Fig. 10 : Vue de la partie centrale de l’épave avec ses membrures ; alternance de séries de trois rables et de paires de courbes affrontées (Cliché Y. Billaud, MCC-DRASSM). sa position d’origine. À bâbord, un clameau est également encore en place et un autre a été découvert à proximité immédiate dans l’épave. Deux courbes très érodées ont été trouvées sur tribord avant. Chacune a un angle de l’ordre de 105°. La mise en relief des fibres du bois indique leur débit dans un départ de branche. L’essence est le châtaignier. Toutes les courbes étant présentes dans la partie principale de l’embarcation, ces éléments confirment que, comme on pouvait le supposer, au moins un couple de courbes opposées est présent sur la levée. Bien que ces courbes soient incomplètes, les traces de chevilles encore visibles permettent de les replacer sur la membrure M21 (fig. 3). Cette disposition de deux courbes affrontées permettrait également d’expliquer la présence particulière des deux chevilles rapprochées sur la planche Pl 8. Plusieurs planches ont été découvertes durant la fouille. Deux du côté bâbord et une dans l’épave sont très érodées, avec une forte mise en relief des fibres du bois. Leurs longueurs sont respectivement de 120 cm, 145 cm et 420 cm. L’essence est la même que celle des bordés. Ces trois éléments peuvent correspondre au bordé bâbord dont le flanc aurait été démantelé à la faveur d’une cassure longitudinale. Une autre planche découverte à tribord est de grande dimension avec une longueur de 4,4 m, pour une largeur maximale de 30 cm. Elle se distingue des précédentes par son essence, un résineux, et la présence de plusieurs chevilles. Leur répartition permet de proposer une position pour cette pièce, entre les membrures M 3 et M 19 (fig. 4), et d’envisager qu’il s’agisse d’un bordage de surélévation. La hauteur intérieure totale serait alors d’au moins 70 cm. Sept pièces métalliques en forme d’agrafe, similaires à celles assurant la jonction entre les bordés et entre les parties de sole, ont été découvertes dans ou à proximité de l’épave (fig. 11). Elles sont constituées d’un corps rectiligne à section rectangulaire, variant autour de 3 cm de large pour 1 cm d’épaisseur. La longueur va de 17,5 cm à 27 cm. Chaque extrémité porte une pointe pliée perpendiculairement et dont la longueur peut atteindre 10 cm. Ces pointes sont pour la plupart rabattues soit dans l’axe du corps du clameau soit le plus souvent perpendiculairement. Deux pièces (fig. 11 / 1 et 7) se distinguent des autres par l’orientation de l’une des pointes qui est non pas perpendiculaire au corps mais déjetée. Il est à noter que ces deux clameaux ne sont pas identiques mais symétriques et qu’ils ont été découverts à l’arrière de l’épave, respectivement sur bâbord et sur tribord. Il est vraisemblable qu’ils participaient à la fixation du tableau arrière. À l’extérieur de la coque, sur tribord arrière, a été découverte une chaîne en fer d’une longueur totale de 2,30 m, terminée à une extrémité par un anneau et à l’autre par un crochet (fig. 11 / 9). L’aspect de surface de cette chaîne et la forme de l’anneau, avec une fixation par deux pattes rabattues, comme celles des clameaux, permettent de la rattacher, en toute probabilité, à l’embarcation. Les La fouille de la coque a livré très peu de matériel pour lequel, par ailleurs, la contemporanéité avec l’embarcation n’est pas établie. La céramique est représentée par un seul petit tesson. Il s’agit d’un fragment de fond plat d’un récipient en pâte brun-rouge couverte, uniquement à l’intérieur, d’une glaçure rougeorangée (fig. 12 / 1). Il pourrait correspondre à une « biche », récipient à usages multiples, encore utilisé il y a peu. Quatre flotteurs de filet en bois ont été découverts dans la craie emplissant l’épave à bâbord (fig. 12 / 5 à 7). Trois sont quadrangulaires à bords arrondis. Ils mesurent environ 6 cm de côté pour moins de 2 cm d’épaisseur. Ils sont traversés en leur centre par une perforation plus ou moins ovalisée, de 14 à 18 mm de plus grand axe. Le quatrième flotteur est sub-circulaire avec comme plus grande dimension 77 mm pour une épaisseur de 33 mm (fig. 12 / 4). Il est traversé par une perforation de 18 mm. Ces quatre flotteurs de filet présentaient des restes de cordage dans leur perforation. Dans la terminologie lémanique, il s’agit du « chalame », cordage bordant le haut du filet et dans lequel sont fixés les « bignets » ou petits flotteurs3. D’autres fragments de cordage ont été vus à la fouille mais, en raison de leur très mauvais état de conservation, seul un fragment a pu être prélevé. Il s’agit d’un cordage de diamètre moyen, de deux centimètres au maximum, et, semble-t-il pour certains fragments, à deux torons. Par contre, il n’a pas été vu de cordage de petit diamètre pouvant se rapporter directement à un filet. Contre la coque, à tribord arrière, a été découvert un anneau en fer de 56 mm de diamètre, avec un jonc circulaire, de 3 mm de diamètre (fig. 12 / 2). Ce type d’anneau est classiquement interprété comme un élément de filet de pêche. Un galet plat, de 11 cm par 6 cm pour une épaisseur de 2 cm, porte des encoches opposées obtenues par l’enlèvement de quelques éclats (fig. 12 / 3). Ce type de galet aménagé rentre dans la grande catégorie des galets à encoches dont l’utilisation est attestée en domaine lacustre depuis le Néolithique et qui sont interprétés comme lests, voire encore plus précisément comme « pierres à filets »4. Mais l’emploi de ce type de galet jusqu’au milieu du 158 Livre-archaeonautica.indb 158 14/11/12 15:22 1 2 3 4 5 6 7 0 2 10 cm 9 Fig. 11 : Éléments en fer, clameaux et chaîne à crochet (Dessin Y. Billaud, MCC-DRASSM). Yves Billaud, Eric Rieth, avec la collaboration de Marc Ginisty 8 159 Livre-archaeonautica.indb 159 14/11/12 15:22 1 0 2 2 10 cm Si le tableau arrière est une pièce soumise à de fortes contraintes et peut être amené à être changé, dans le cas présent, il est dans la même essence que les bordés, ce qui plaide pour une homogénéité de l’ensemble. Malgré tout, la datation obtenue doit être considérée comme seulement indicative en attendant de pouvoir réaliser de nouvelles analyses sur d’autres éléments architecturaux. L’ÉPAVE DU ROC DE CHÈRE 3 5 4 6 7 Fig. 12 : Objets divers découverts dans l’épave (Dessin Y. Billaud, MCC-DRASSM). XXe siècle est souligné. Ce galet est à rapprocher des « pierres » qui servaient à lester des filets comme les « montes », sortes de sennes employées sur le Léman. Le galet est tenu à l’aide d’une ficelle, la « zie », passant dans les encoches5. La totalité de la coque n’a livré qu’un nombre réduit d’éléments lithiques. Il s’agit d’une vingtaine de petits blocs de calcaire dont la longueur ne dépasse pas vingt centimètres. Il est probable qu’une partie de ces petits blocs ne soit arrivée qu’après la mise en place de l’épave, en glissant le long de la pente de craie, comme cela s’observe encore actuellement. Archaeonautice 17 – 2012 TAPHONOMIE À partir des observations de terrain, une hypothèse peut être proposée pour la mise en place de l’épave. La dégradation de la coque, en particulier de la pointe avant, plaide non pas pour un naufrage mais plutôt pour une évolution en deux temps. L’embarcation est certainement restée échouée sur la berge pendant quelques années, temps nécessaire pour que débute l’altération de la proue. Déstabilisée, par exemple au cours d’une tempête, elle aurait ensuite glissé sur la pente pour venir se bloquer à la faveur d’un petit replat visible sur le profil bathymétrique. Une phase d’évo- lution sur place se serait alors traduite par le désassemblage de l’avant, l’érosion des parties hautes puis le colmatage de la coque par des sédiments crayeux. ÉLÉMENTS DE DATATION ET DE COMPARAISON ANALYSE RADIOCARBONE Pour un calage chronologique absolu, la dendrochronologie n’a pas pu être employée. En effet, il n’existe pas de courbes de référence pour les essences utilisées pour les membrures et les bordés monoxyles (respectivement le châtaignier et le noyer). Et s’il existe des références pour les résineux des planches de la partie arrière de la sole, les bois utilisés ici ne permettent pas de constituer une courbe locale étayée en raison de leur débit et de la grande largeur des cernes. Il a donc été fait appel au radiocarbone. Une analyse effectuée à partir d’un échantillon prélevé sur le tableau arrière a donné le résultat de : 420 ± 45 BP (ARC2377) soit 1410-1640 cal AD. L’échantillon est caractérisé par un faible nombre de cernes, seulement sept en raison d’un débit sur dosse. Ni le cœur ni l’aubier n’ont été observés. D’intéressants éléments de comparaison ont été récemment obtenus au cours d’une brève intervention d’évaluation d’une autre épave du lac d’Annecy. Cette épave est située dans le « grand lac », sur la rive ouest, au nord de Talloires (fig. 1). Elle repose par 49 m de fond au pied des falaises du Roc de Chère. Découverte dès les années 1960 et redécouverte en 1998, elle est fréquemment visitée par des plongeurs sportifs. Fin 2006, quelques plongées, réalisées dans des conditions délicates en raison de la profondeur, du froid et de l’obscurité, nous ont permis de dresser un état des lieux, favorisé par un recouvrement sédimentaire très faible (resp. Y. Billaud). L’embarcation repose à plat sur le fond. Elle est tout à fait comparable à celle de Bredannaz tant en terme de morphologie (avec un plan d’ensemble rectangulaire fermé à l’arrière par un tableau et prolongé à l’avant par une pointe), d’architecture (avec une sole et des bordés monoxyles de transition ainsi que l’utilisation de clameaux) que de dimensions (avec des dimensions maximales de 9,3 m pour la longueur et de 2,55 m pour la largeur). Sa conservation permet de préciser certains points qui n’ont pu être observés à Bredannaz. L’extrémité avant est d’une largeur totale de 50 cm (fig. 13). Il est à noter qu’elle est totalement ouverte. De plus, elle présente un prolongement de l’une des virures avec une découpe et une large perforation permettant très probablement un amarrage. Pour les flancs, la hauteur conservée est de 40 cm pour la pièce monoxyle. Ils sont complétés par une rehausse de 35 cm. Ces dimensions sont là aussi similaires à celles observées sur l’épave de Bredannaz. Quelques clichés pris par les inventeurs montrent qu’en 1988 ces rehausses étaient en place. Malheureusement il n’en est plus de même à ce jour, la fréquentation par les plongeurs ayant fortement porté atteinte aux structures. Malgré tout, il est encore possible d’observer que la rehausse avant paraît ployée et recouvre la jonction entre le bordé monoxyle principal et celui de la pointe (fig. 14). Une caractéristique étonnante de cette épave est que, malgré son naufrage, elle a conservé son chargement constitué de tuiles. Hormis quelques tuiles creuses de grande dimension (50 cm), il s’agit uniquement de 160 Livre-archaeonautica.indb 160 14/11/12 15:22 Fig. 13 : Vue de l’extrémité avant de l’épave du Roc de Chère à Talloires, lac d’Annecy, Haute-Savoie ; à noter le prolongement d’une des virures de la levée (Cliché A. Pinot). tableau Fig. 14 : Vue depuis l’avant de la partie centrale et du chargement de tuiles plates à crochet de l’épave du Roc de Chère à Talloires, lac d’Annecy, Haute-Savoie ; à noter le ploiement de la rehausse (Cliché A. Pinot). bordage de surélévation (rehausse) bordé monoxyle de transition bordé monoxyle de transition a : coupe longitudinale 0 1 5m bordage de surélévation (rehausse) rable courbes opposées virure de sole b : coupes transversales bordé monoxyle de transition tuiles plates à crochet et à terminaison en pointe. Leurs dimensions sont de 34 cm pour la longueur (soit un pied de la Chambre de Savoie) et de 15 cm pour la largeur. Leur module et leur mode de fabrication ne sont pas incompatibles avec une datation au XVe ou XVI e siècle6. Bien que présentant quelques différences de détail avec l’embarcation de Bredannaz (essences utilisées, disposition des virures de sole), l’épave du Roc de Chère paraît donc tout à fait relever d’un même modèle de chaland lacustre utilisé au moins durant le XVe ou le XVIe siècle et pour lequel une reconstitution peut être proposée à titre d’hypothèse (fig. 15). CARACTÉRISTIQUES ARCHITECTURALES STRUCTURE La coque de l’épave de Bredannaz est caractérisée par un principe de construction « sur sole » et une structure monoxyle-assemblée. C’est, en effet, à partir de la surface plate de la sole constituée des cinq virures en résineux Pl 1 à Pl 5 et des deux bordés monoxyles de transition en noyer BS et BN, que la structure générale de la coque a été réalisée. Cette première partie du bateau, correspondant à son corps, est prolongée sur l’avant par une levée ployée se terminant en un seuil étroit. La structure de la levée reprend le même principe que celui du corps, à savoir quatre virures en noyer Pl 6 à Pl 9 et deux bordés monoxyles de transition en noyer (éléments 11 et 8). En toute vraisemblance, quatre bordages disposés à franc-bord sur le can supérieur des bordés monoxyles de transition, et dont un élément a été partiellement conservé (planche 34) à l’extérieur de l’épave, venaient surélever à l’origine la coque. L’ensemble de ces éléments est organisé selon une logique architecturale longitudinale dans laquelle les bordés monoxyles de transition taillés en cornière à bouchain vif légèrement ouvert (angle d’environ 105°) Yves Billaud, Eric Rieth, avec la collaboration de Marc Ginisty Fig. 15 : Proposition de restitution de l’embarcation de Bredannaz (Dessin Y. Billaud, MCC-DRASSM). 161 Livre-archaeonautica.indb 161 14/11/12 15:22 Archaeonautice 17 – 2012 assurent la rigidité et le renfort longitudinaux de la sole, de la levée et des flancs. À cette logique longitudinale primaire vient se superposer une logique architecturale transversale secondaire matérialisée par les membrures en châtaignier M 1 à M 27 (varangues plates et courbes). Celles-ci sont destinées essentiellement à assurer l’assemblage, la cohésion et la rigidité transversale de l’ensemble des pièces longitudinales de la coque. Quatre caractéristiques particulièrement importantes sont à souligner. Premièrement, les bordés monoxyles de transition BS et BN appartenant au corps de la coque ont leur extrémité antérieure qui se relève à partir de la membrure M 18 en amorçant le relèvement de la levée. Cette mise en forme de l’extrémité antérieure des deux bordés monoxyles de transition suppose, en toute logique, que le constructeur avait une perception des formes d’ensemble de la coque (corps et levée) dès les premières phases du chantier. Deuxièmement, la liaison entre les virures de la sole et celles de la levée est localisée à environ 1,15 m en arrière du départ de l’inclinaison de la levée. Cet intervalle important séparant le niveau d’assemblage entre les virures de la sole et de la levée d’une part, et le niveau de ployage des virures de la levée d’autre part, réduit dans une large mesure, les risques de rupture d’une zone fragilisée en raison des contraintes (tension et compression) exercées sur les fibres ployées. Troisièmement, les deux écarts en forme d’empatture formant un encastrement entre les virures Pl 1-Pl 5 de la sole et Pl 7-Pl 9 de la levée d’un côté et les écarts francs, sans encastrement, des bordés monoxyles de transition BS-B1 et BN-B2 de l’autre sont décroisés de manière à éviter toute ligne de faiblesse. Ce décroisement est d’autant plus important du point de vue structural que certains écarts se trouvent localisés à des niveaux de fortes contraintes mécaniques. C’est le cas, par exemple, des écarts situés entre les bordés monoxyles de transition de la sole et ceux de la levée. Quatrièmement, enfin, deux procédés de fixation des pièces sont employés. Les membrures (varangues plates et courbes) sont systématiquement assemblées aux virures de la sole et de la levée, aux bordés monoxyles de transition et aux bordés de surélévation par des gournables qui semblent avoir été enfoncées, majoritairement, à partir de la face supérieure de droit (le chant) des membrures. Si cette première technique d’assemblage n’est en rien exceptionnelle, la deuxième, en revanche, l’est beaucoup plus. Des crampons en fer, comparables morphologiquement à des clameaux, servent à fixer un certain nombre d’éléments de l’embarcation. Dans le cas de la liaison des bordés monoxyles de transition de la sole et de la levée d’une part, et de celle entre les virures de la sole et celles de la levée d’autre part, la question se pose de savoir si ces crampons n’avaient pas été utilisés à titre de pré-assemblage avant l’introduction et la fixation des membrures ou, tout au moins, d’une partie d’entre elles. Il n’est pas impossible, non plus, que ces mêmes crampons aient été employés pour renforcer des assemblages soumis à des efforts importants. Il est certain, en tout cas, que les sept crampons localisés au niveau de la jonction entre les virures de la sole et celles de la levée, comme les cinq fixant le bas du tableau arrière, ont été disposés à partir de la face extérieure de la sole et de la levée. Cette mise en place suppose soit que la coque était surélevée par rapport au niveau du sol pour permettre l’enfoncement des pointes des crampons, soit qu’elle était inclinée sur un flanc. En l’occurrence, ces deux positions d’une coque à fond plat en cours de construction ou de réparation correspondent à des pratiques techniques attestées dans les chantiers navals traditionnels. Si l’utilisation des clameaux est classique dans l’architecture rurale de la région des Alpes, elle apparaît exceptionnelle dans le cadre de la construction navale. Il est vrai que les épaves fouillées dans les lacs de Savoie et de Haute-Savoie sont très rares et que la documentation demeure, donc, très fragmentaire. Les deux seules attestations archéologiques, à notre connaissance tout au moins, proviennent du lac Léman. La première est celle de l’épave de la nau d’Yvoire (Haute-Savoie), datée de la fin du XVIIIe-début du XXe siècle, dont les bordés sont assemblés intérieurement par des crampons en forme de U pour certains, similaires à ceux de l’épave de Bredannaz, et en forme de L pour d’autres7. La deuxième attestation est celle de l’épave (ou des épaves) du Bouveret (Suisse) dont trois fragments sont datés par le radiocarbone du VIIe siècle après J.-C.8. Dans une étude récente consacrée aux épaves du Léman, Carinne Bertola indique « que des pièces métalliques (clameaux et clous) étaient attachées à certains fragments [du Bouveret] »9. Ces éléments métalliques viennent d’être récemment « redécouverts » dans les réserves des Musées de Nyon ». Parmi les attestations archéologiques situées hors du contexte alpin, on peut citer le cas d’une pirogue monoxyle provenant du lac Chiem, en Bavière (Allemagne), dont les nombreuses réparations ont été réalisées au moyen de crampons en fer du type clameaux10. L’une des questions soulevées par l’emploi de ces crampons dans la construction des bateaux est celle des relations éventuelles entre architecture rurale et architecture navale. Seraient-elles limitées à un simple usage d’un même moyen d’assemblage ou pourraient-elles traduire, plus largement, des pratiques de construction partagées entre charpentiers de maisons et de bateaux ? Peutêtre des éléments de réponse pourraient-ils être trouvés dans des marchés de construction mentionnant les noms et les métiers des charpentiers dans l’hypothèse où des marchés, pour des constructions de bateaux de la taille de celui de Bredannaz, donnaient lieu à un acte écrit devant notaire, pratique qui semblerait loin d’être fréquente. D’autres éléments de réponse pourraient peut-être aussi être découverts dans les registres paroissiaux des villages riverains du lac d’Annecy. À titre de comparaison, la région du Chablais oriental peut fournir quelques éléments de réponse et axes d’étude. Selon les résultats, encore inédits, des recherches conduites par l’historien de l’architecture navale lémanique Paul Bloesch11 de nombreux charpentiers de « bateaux plats », à architecture « sur sole » conceptuellement analogue à celle de l’embarcation de Bredannaz, sembleraient posséder une solide expérience de charpenterie de maisons. Plusieurs de ces constructeurs de « bateaux plats », qui se distinguaient de ceux travaillant à la construction des barques du Léman bâties sur quille selon des techniques similaires à celles en usage dans les chantiers navals maritimes méditerranéens, paraîtraient avoir souvent fait leur premier apprentissage loin des rives du lac Léman. C’est ainsi qu’un certain Guerhard Bieler, arrivé à Morges peu avant 1700, venait de Morat où il avait acquis sa formation de charpentier en travaillant dans les chantiers de la ville. Au début du XVIIIe siècle, un dénommé André Hadorn venait de la région de Thun tandis qu’un certain Jean Lodé, quant à lui, arrivait de Château-d’Oex. Selon Paul Bloesch, il semblerait que la construction des « bateaux plats » ne permettait pas toujours d’assurer la subsistance régulière des familles de charpentiers. Guerhard Bieler se plaignait ainsi de cette situation qui le conduisait à travailler soit pour la ville de Morges, soit au château. Outre l’usage de clameaux pour certains assemblages du bateau de Bredannaz, Paul Bloesch a attiré notre attention sur un autre marqueur archéologique susceptible de témoigner de cette relation entre architecture rurale des régions alpines et architecture navale lacustre de ces mêmes territoires, à savoir les bordés monoxyles de transition. En effet, certains petits édifices ruraux en bois, notamment les greniers à grains ou à fromages, des XVI e et XVIIe siècles, possèdent deux sablières taillées en forme de bordés monoxyles de transition angulaires12. Dans la perspective d’un apprentissage du métier de charpentier de bateaux auprès de charpentiers de maisons, cet emploi de pièces de charpente morphologiquement, structuralement et fonctionnellement comparables semblerait d’autant plus envisageable que la géométrie développable du sol, des parois et du toit d’un grenier en bois, à base de droites, présente certaines analogies avec la géométrie développable de la sole, de la levée avant, du tableau et des bor- 162 Livre-archaeonautica.indb 162 14/11/12 15:23 du fond dénué de calfatage ». Rien n’interdit de s’opposer à un processus de montage du bateau de Bredannaz conduisant à fermer la sole et la levée avec un serrage similaire rendant les coutures auto-étanches. Notons une dernière remarque à propos de la structure de la coque. Le décalage entre la ligne d’assemblage des virures de la sole à celles de la levée et le départ de la virure ployée de manière à éviter toute zone de faiblesse d’une part, la symétrie des deux écarts en forme d’empatture entre les virures latérales de la sole et de la levée d’autre part, sont révélateurs d’une très bonne maîtrise des techniques d’assemblage de la part du constructeur. Dans ce contexte technique, le recours aux bordés monoxyles de transition relève-t-il d’un choix favorisé par des facilités d’approvisionnement du chantier naval en bois de noyer suffisamment échantillonné ou, au contraire, a-t-il été imposé par les difficultés d’assemblage et d’étanchéité rencontrées dans la réalisation d’un bouchain composite ? MORPHOLOGIE Cette étude est basée sur la restitution de la coque qui, soulignons-le, comporte une part d’hypothèse très réduite concernant principalement la manière dont la virure de surélévation s’achève sur la levée, avec ou sans réduction de la largeur. Au regard de cette restitution, la principale caractéristique morphologique de l’embarcation est une géométrie de formes planes presque intégralement développables. En plan, la coque, d’une longueur horstout de 9,10 m, se décompose schématiquement en un corps trapézoïdal de 6,40 m de long (correspondant à la dimension des bordés monoxyles de transition BS et BN) pour 2,06 m de largeur moyenne intérieure arrière et 2 m de largeur intérieure moyenne avant. Le corps de la coque est prolongé sur l’avant par une levée trapézoïdale de 2,60 m de long pour 2 m de largeur à sa grande base et 0,40 m à sa petite base. Remarquons que cette forme trapézoïdale du corps de la coque se retrouve également dans l’épave de la nau d’Yvoire qui, comme nous le verrons dans un prochain paragraphe, se rattache à la même grande famille architecturale. En section transversale, la coque se caractérise par un fond plat et des flancs rectilignes dotés, dans le corps de la coque, d’une ouverture constante de l’ordre de 105°. En élévation, le tableau arrière est vertical. Le fond, horizontal sur 6,25 m de long, se prolonge par une levée de 2,75 m de long qui présente une inclinaison d’environ 12 degrés. Le plat-bord est horizontal et parallèle à la plus grande partie du fond. Il se relève ensuite d’environ 5° au niveau de la levée. Ces formes géométriquement développables et architecturalement simples sont constituées de surfaces planes et d’éléments architecturaux rectilignes, y compris la levée ployée dont la courbure est peu sensible. Comme le fait observer François Beaudouin15, « cette géométrie particulière constitue l’essentiel de la technique du bateau fluvial » et lacustre ajouterons-nous. L’une des conséquences de cette géométrisation poussée est de permettre l’utilisation de planches délignées et non brochetées. À la simplicité des formes s’ajoute une simplicité de débitage des planches de la sole, de la levée, du tableau arrière et des bordés. Cette même simplicité de réalisation se retrouve au niveau des bordés monoxyles de transition, ceux de la sole tout au moins, dont l’ouverture reste constante sur toute leur longueur. Dans le contexte lacustre alpin, l’un des meilleurs documents de comparaison repéré au stade d’avancement de notre recherche est un détail d’une gravure de Robert Gardelle, datée de la première moitié du XVIIIe siècle, figurant l’entrée du port de Genève16. Le naviot représenté au premier plan montre une silhouette générale très proche de celle de l’embarcation de Bredannaz : fond plat, levée avant marquée de l’ordre de 15 degrés, tableau arrière vertical. Un examen attentif de la gravure fait apparaître quelques différences. C’est ainsi que le naviot du Léman a des dimensions plus réduites. Sa longueur peut être estimée à environ 6 m pour une hauteur de l’ordre de 0,40 m. Sa largeur, plus difficile à estimer en raison de la représentation en perspective de l’embarcation, pourrait se situer entre 1 m et 1,50 m. Par ailleurs, la liaison entre le corps horizontal du naviot et la levée semble plus angulaire que dans le cas de l’épave de Bredannaz. Cette même caractéristique de l’embarcation du Léman paraît se retrouver, en l’occurrence, au niveau du bordé. Enfin, l’extrémité de la levée semble s’achever en pointe plutôt qu’en seuil étroit. Mais hormis ces différences, la morphologie générale des deux bateaux semble bien se rattacher à une même grande famille architecturale, aux « branches » variées, qui est attestée sur le Léman depuis la fin du Moyen Âge tant par l’iconographie (carte du Léman du syndic Duvillard datée de 1588, plan de la ville de La Tour-de-Peilz daté de 1700, plan de la paroisse de Lutry daté de 170517) que par l’archéologie (l’épave de la nau d’Yvoire). Sans doute une recherche iconographique limitée aux lacs d’Annecy et du Bourget permettraitelle de retrouver d’autres modèles plus locaux de cette grande famille architecturale. DIMENSIONS C’est principalement sous l’aspect de la métrologie que cette question sera envisagée. L’élément dimensionnel le mieux conservé de l’épave et le plus objectif au niveau de la Yves Billaud, Eric Rieth, avec la collaboration de Marc Ginisty dés d’une coque monoxyle-assemblée du type de celle de l’épave de Bredannaz. Une caractéristique singulière de l’épave de Bredannaz est l’absence apparente, déjà constatée en 2004, de tout vestige de matériau d’étanchéité des coutures de la coque. Au niveau de la sole, il avait été observé que les joints internes entre les planches étaient si serrés qu’il était difficile de les distinguer. Extérieurement, des sondages ponctuels n’avaient pas permis, par ailleurs, de déceler de traces de calfatage. Cependant, le caractère très partiel de ces observations sur la face extérieure de la coque doit nous conduire à une certaine prudence. En 2005, au niveau de la levée où les coutures des virures sont légèrement ouvertes, aucun indice d’un calfatage n’a été relevé en dépit d’un examen attentif et systématique des vestiges. Dès lors se pose la question de l’absence effective de calfatage en relation avec une mise en place forcée d’une ou de plusieurs virures de la sole et de la levée aboutissant à une auto-étanchéité des joints. La difficulté d’identification des coutures de la sole pourrait être l’un des marqueurs d’une telle procédure qui, en l’occurrence, n’est pas exceptionnelle dans la construction « sur sole ». C’est le cas, par exemple, du bateau nantais de la première moitié du XXe siècle13 dont la construction du fond débutait par les virures latérales (les douces), était suivie par les autres virures de la sole dont la dernière à être disposée, celle du centre (le perclos), l’était en force, « à la masse, afin d’obtenir un bon serrage de l’ensemble ». Cette introduction forcée de la dernière virure n’est rendue possible que par la fixation provisoire des douces du fond au chantier de construction. Dans le cas de l’épave de Bredannaz, l’introduction en force de la virure centrale de la sole Pl 3 et de la virure de la levée Pl 17 ou Pl 18 supposerait que les deux bordés monoxyles de la sole et de la levée étaient provisoirement assemblés à un chantier de traverses. Aucun indice archéologique d’un tel assemblage, indispensable techniquement à une telle procédure, n’a pu être identifié. Ajoutons que dans la construction du bateau nantais, les virures de la sole sont reliées, au niveau de leur can, par des gournables (les goujons) chassées horizontalement, et que les coutures sont étanchées intérieurement par palâtrage. Un autre exemple de mise en place forcée de virures de sole, mais sans aucune liaison entre les planches ni aucun calfatage des joints, est celui de la lasse de Marennes, embarcation traditionnelle du bassin de la Seudre, en Charente-Maritime14. La lasse possède deux caractéristiques particulières, une sole dotée d’une « quille » beaucoup plus large que haute et des bordages disposés transversalement. Ces pièces sont clouées à la virure centrale formant « quille » en « laissant trois ou quatre vides, qui seront fermés par des planches enfoncées en force. Ces clores feront clés en serrant l’ensemble pour assurer l’étanchéité 163 Livre-archaeonautica.indb 163 14/11/12 15:23 Tableau 1 : Dimensions restituées de l’embarcation de Bredannaz, exprimées en mètres et en pieds. Dim. métriques plan restitué Nature des mesures Archaeonautice 17 – 2012 Longueur hors-tout Longueur sole (bordés monoxyles de transition BS et BN) Largeur intérieure (bouchain à bouchain) Largeur intérieure (virures Pl1 à Pl5) Creux Longueur (bordés monoxyles de transition 8 et 11) Largeur intérieure au départ de la levée (bouchain à bouchain) Largeur intérieure au sommet de la levée (bouchain à bouchain) Creux à la base de la levée Creux au sommet de la levée prise des mesures est la valeur de l’intervalle d’axe en axe entre les membrures (varangues plates et courbes) de la sole qui est régulièrement de 0,34 m. Il s’agit, soulignons-le, d’une valeur non restituée. Au niveau de la levée, en revanche, cet intervalle, plus irrégulier, se réduit à une trentaine de centimètres. Au regard de l’entre axe de 0,34 m des membrures du corps de la coque, le rapprochement avec la valeur de 0,3394 m du pied de Chambre de Savoie semble s’imposer18. Selon le système de numérotation duodécimale, le pied se divise classiquement en douze pouces eux-mêmes divisés en douze lignes. Les grandes dimensions restituées du corps et de la levée de la coque ont été considérées en pieds pleins, en référence à ce système régional de mesures (tableau 1). Dans les limites d’une comparaison basée sur un plan restitué de l’épave, la bonne concordance générale (écarts les plus importants toujours inférieurs à 5 %) entre les équivalences métriques des valeurs en pieds pleins de Savoie d’une part et les valeurs, en système métrique, des grandes dimensions restituées du corps et de la levée de la coque d’autre part, semblerait conforter l’hypothèse d’une utilisation du système de numérotation duodécimale en pieds de Chambre de Savoie dans la conception dimensionnelle de l’embarcation de Bredannaz. En outre, le fait que l’intervalle d’axe en axe entre les membrures de la sole corresponde précisément à la valeur du pied de Chambre de Savoie vient renforcer cette interprétation. Dans les pratiques traditionnelles de constructeurs de bateaux à fond plat tout particulièrement, il était fréquent, en effet, qu’un modèle déterminé d’embarcation soit désigné simplement par une dimension de base, la longueur de la sole, reposant sur la valeur de l’entre axe entre les membrures qui agit, en quelque sorte, comme référence dimensionnelle19. Ainsi, x intervalles d’axe en axe correspondent-ils à x membrures et à une longueur de sole de x pieds de long. Dimensions pieds de Savoie 9,10 m 6,40 m 2,03 m 1,70 m 0,72 m 2,60 m 2,02 m 0,40 m 0,72 m 0,35 m PROPULSION Aucun vestige ni même aucune trace d’un dispositif d’emplanture de mât n’a été observé au niveau des membrures qui, rappelons-le, sont remarquablement conservées. Sauf à envisager une emplanture mobile simplement encastrée sur les membrures, sans aucun assemblage, complétée en partie supérieure par un bau-étambrai destiné à créer un second point d’appui au mât, l’hypothèse d’un usage de la voile semblerait devoir être écartée. Ajoutons par ailleurs que les efforts de compression verticale qui s’exercent habituellement au niveau du pied d’un mât se traduisent, en règle générale, par un écrasement des fibres du dos des membrures. Aucun indice de marques de cette nature n’a été relevé sur les membrures. Les deux autres modes de propulsion possibles sont la perche et la rame. La perche, qui fonctionne par appui sur le sol, implique une navigation par faible profondeur. Dans le secteur de l’épave, la « beine » qui correspond à cette zone de navigation est très proche du rivage. Ce mode de propulsion n’implique aucun aménagement particulier de la coque et ne laisse, par conséquent, aucune trace archéologiquement identifiable au niveau des vestiges. La rame, dont le fonctionnement par appui n’est pas limité à une profondeur déterminée, suppose un dispositif et de support et de pivotement du manche dans le haut de la coque qui, en contexte lacustre alpin, prend souvent la forme, dans la batellerie traditionnelle, d’une estrope (boucle de cordage) passée dans une perforation aménagée dans la partie supérieure du bordé. Compte tenu du mauvais état de préservation du seul fragment d’un des bordés de surélévation de l’épave de Bredannaz, l’absence de trace de ce type d’aménagement n’est pas significative. 27 pieds 19 pieds 6 pieds 5 pieds 2 pieds 8 pieds 6 pieds 1 pied 2 pieds 1 pied Equivalences métriques 9,16 m 6,44 m 2,06 m 1,69 m 0,68 m 2,71 m 2,03 m 0,34 m 0,68 m 0,34 m CARACTÉRISTIQUES HYDROSTATIQUES L’étude des caractéristiques hydrostatiques du bateau a été réalisée par Marc Ginisty, architecte naval professionnel, concepteur et constructeur de voiliers multicoques et d’embarcations hauturières à rames, qui a été associé au cours de ces dernières années à plusieurs programmes de recherche archéologique : épave du caboteur mérovingien de Port Berteau II (Charente-Maritime) ; épave du milieu du XVe siècle de l’embarcation à clin d’Urbieta (Gipuzkoa, Espagne) ; épaves des pirogues monoxyles Pg 2 et Pg 3 du lac de Paladru (Isère) et de Mortefon 2 (CharenteMaritime). Le premier objectif de cette étude architecturale de dimension strictement technique est de fournir, à partir d’un plan des formes, un ensemble de données numériques, en terme de poids, de surface, de volume Le deuxième objectif est de permettre de construire, à partir de ces données techniques, une analyse de dimension historique. Dans cette perspective de recherche, la collaboration entre architecte naval et archéologue est fondamentale. Le document de base utilisé par Marc Ginisty pour établir le plan des formes, transversal et longitudinal (fig. 16), est le plan restitué de l’embarcation établi selon les principes de la « minimum reconstitution » tels qu’ils ont été définis récemment par les archéologues Ole Crumlin-Pedersen et Seán McGrail20, à savoir : un recours aux seules données de la fouille de l’épave considérée et à des données de comparaison empruntées à des bateaux de même famille architecturale, excluant toute hypothèse architecturale, tout emprunt à des épaves appartenant à d’autres familles architecturales et tout apport anachronique. Le plan des formes et les calculs hydrostatiques ont été élaborés au moyen du logiciel d’architecture navale Prolines Vacanti. 164 Livre-archaeonautica.indb 164 14/11/12 15:23 1m c b a Fig. 16 : Plan des formes, transversal et longitudinal, avec indication de trois positions de la ligne de flottaison ; a : tirant d’eau 10 cm, déplacement 1 225 kg ; b : tirant d’eau 25 cm, déplacement 3 450 kg ; c : tirant d’eau 50 cm, déplacement 7 650 kg (D’après document M. Ginisty). Tableau 2 : Devis de poids de la coque. Type des pièces Bordés monoxyles de transition BN, BS, B1, B2 Virures de sole Pl1 à Pl 5 Virures de levée Pl6 à Pl8 Tableau arrière Bordés de surélévation Membrures Total bois Crampons en fer Total coque Essence Noyer Résineux Noyer Noyer Noyer Châtaignier Densité 0,67 0,46 0,67 0,67 0,67 0,59 Volume 0,54 m³ 0,54 m³ 0,17 m³ 0,06 m³ 0,22 m³ 0,38 m³ Poids 360 kg 250 kg 114 kg 40 kg 147 kg 226 kg 1 137 kg 6 kg 1 143 kg Tableau 3 : Données numériques des embarcations charentaises prises comme éléments de comparaison. Embarcation Longueur Largeur Creux Poids coque lège Port maximum Mortefon 9,08 m 0,88 m 0,47 m 649 kg 1 800 kg Orlac 15,50 m 2,10 m 0,42 m 4 000 kg 8 200 kg Port Berteau II 14,29 m 4,80 m 1,20 m 5 736 kg 10 500 kg* LE DEVIS DE POIDS DE LA COQUE Le devis de poids de la coque a été réalisé à partir du plan restitué de l’épave en prenant en compte les différentes essences de bois utilisées dans la construction de la coque (tableau 2). La coque, d’un poids total de 1 143 kg, se décompose de la manière suivante : 360 kg pour les bordés monoxyles de transition, 364 kg pour les virures de la sole et de la levée, 40 kg pour le tableau arrière, 147 kg pour les bordages de surélévation, 226 kg pour les membrures, 6 kg pour les crampons. Ce devis de poids est une évaluation qui, de ce fait, ne se confond pas avec celui du bateau de Bredannaz au moment de sa mise à l’eau il y a plusieurs centaines d’années. Toutefois, la part réduite de restitution du plan de l’épave par rapport aux vestiges conservés rend cette évaluation sans doute relativement proche du devis de poids d’origine. Par ailleurs, les densités considérées sont des densités ne prenant pas en compte le taux d’imprégnation en eau du bois lié à l’utilisation de l’embarcation. Ce devis de poids correspond donc au bateau au moment de son lancement. POIDS ET STRUCTURE Si l’on traduit ces chiffres en termes de pourcentage, on constate tout d’abord que les bordés monoxyles de transition constituent à eux seuls 31,5 % du poids total de la coque. Ces mêmes pièces représentent près de 65 % du poids de l’ensemble constitué par les virures de la sole et de la levée, les bordés de surélévation et le tableau arrière. Ces deux pourcentages sont révélateurs de l’importance structurale des bordés monoxyles de transition. Les membrures, quant à elles, ne représentent que 19,75 % du poids total de la coque, pourcentage qui souligne leur fonction structurale secondaire. Ajoutons que les éléments métalliques d’assemblage constituent à peine 0,5 % du poids total de la coque, chiffre révélateur d’une culture technique du bois dominante dans la construction du bateau de Bredannaz. Il n’est pas inintéressant de comparer le poids de la coque lège du bateau de Bredannaz avec ceux d’autres embarcations pour lesquelles nous possédons des données numériques précises (tableau 3). Nous avons choisi trois cas de bateaux provenant du même bassin fluvial, celui de la Charente, et relevant de trois architectures différentes : monoxyle avec l’épave de la pirogue 2 de Mortefon (Charente-Maritime) 21 ; monoxyle assemblée avec le chaland d’Orlac (CharenteMaritime)22 ; intégralement assemblée avec le caboteur fluvio-maritime de Port Berteau II (Charente-Maritime) 23. Suivant le point de vue adopté par Ole Crumlin-Pedersen et Athena Trakadas24, comparons le poids représenté par une section de coque d’un mètre de long (tableau 4). Ces chiffres appellent trois observations principales. Premièrement : le rapport le plus élevé concerne le caboteur fluvio-maritime de Port Berteau II. Le principe architectural de ce voilier de charge – construction intégralement assemblée de principe « proto membrure Yves Billaud, Eric Rieth, avec la collaboration de Marc Ginisty * Il s’agit du port maximum en charge de navigation maritime 165 Livre-archaeonautica.indb 165 14/11/12 15:23 Tableau 4 : Comparaison de l’embarcation de Bredannaz avec embarcations fluviales charentaises. Embarcation Poids pour un mètre de coque Charge morte / charge utile première » –, ses formes de carène (bouchain en forme) et son milieu de navigation mixte impliquant une coque (charpente longitudinale, charpente transversale, bordé) résistante aux contraintes mécaniques imposées par une navigation en milieu maritime, se traduisent par une coque fortement échantillonnée et à structure lourde. Deuxièmement, le rapport le plus faible est associé à une coque monoxyle dont les capacités nautiques demeurent cependant limitées en termes de milieu de navigation et de port. Troisièmement, le rapport du chaland monoxyle-assemblé d’Orlac est révélateur d’une construction – choix ou contrainte ? – lourde en comparaison avec le rapport de l’embarcation monoxyle-assemblée de Bredannaz qui est égal à un peu plus de la moitié de celui d’Orlac. Au regard de ces différences de valeurs, la construction monoxyle-assemblée du bateau de Bredannaz semble pouvoir être interprétée comme la résultante d’un choix architectural, celui de construire une coque à structure légère. Ces différentes valeurs sont révélatrices, également, de la diversité morphologique et structurale de l’architecture monoxyle-assemblée. Archaeonautice 17 – 2012 POIDS ET FONCTION Considérons à présent les résultats des calculs hydrostatiques (tableau 5) qui fournissent une série de données selon trois configurations de déplacement : coque lège armée (avec matériel d’armement évalué à 80 kg) correspondant à un déplacement en eau douce de 1 225 kg pour un tirant d’eau de 10 cm et un franc-bord central de 65 cm ; coque chargée correspondant à un déplacement en eau douce de 3 450 kg et une capacité de charge de 2 225 kg pour un tirant d’eau de 25 cm et un franc-bord central de 50 cm ; coque chargée correspondant à un déplacement de 7 650 kg et une capacité de charge de 6 425 kg pour un tirant d’eau de 50 cm et un franc-bord central de 25 cm. Avec un port minimum de 2 225 kg, le rapport entre la capacité de charge et le poids de la coque armée est de l’ordre de 55 %. Avec un port maximum de 6 425 kg, par contre, le rapport entre la capacité de charge et le poids de la coque armée s’établit autour de 19 %. Précisons que dans cette configuration, les normes de sécurité apparaissent satisfaisantes dans le cadre d’une navigation littorale par conditions météorologiques moyennes. Dans une perspective d’économie des transports, le rapport de 19 % – charge morte/ Mortefon 71,50 kg 36,00 % Orlac 258,00 kg 48,75 % Port Berteau II 401,50 kg 54,65 % charge utile – apparaît, bien évidemment, beaucoup plus favorable en termes de rentabilité du bateau que le premier et tendrait plutôt à privilégier, dans cette configuration de rapport de poids, une fonction dominante de transport. L’utilisation de la perche, voire de la rame, ne s’oppose pas à une telle fonction de transport même si, en termes de rentabilité, la propulsion à la voile, n’impliquant pas de « moteur humain », apparaît beaucoup plus favorable. Dans la deuxième configuration où le rapport charge morte/charge utile est sensiblement égal, il semble alors que la fonction de pêche apparaît plus favorable. L’absence de toute trace d’emplanture de mât et la découverte dans l’épave de flotteurs de filets avec des restes de cordage (ralingue supérieure), d’un anneau métallique et d’un galet en forme de « pierre à filet » (lest de ralingue inférieure), sembleraient plutôt appuyer cette seconde hypothèse fonctionnelle. Cependant, cette interrogation est à examiner avec prudence dans la mesure où l’on ignore l’articulation chronologique entre ce mobilier de pêche et l’épave. Il n’est pas inintéressant de comparer ces rapports de poids du bateau de Bredannaz avec ceux d’autres embarcations pour lesquelles nous possédons des données numériques précises. Nous avons repris pour ce faire le choix précédent de l’architecture monoxyle avec l’épave de la pirogue 2 de Mortefon, de l’architecture monoxyle-assemblée avec le chaland d’Orlac et de l’architecture intégralement assemblée avec le caboteur fluvio-maritime de Port Berteau II. Les rapports poids de la coque lège/port maximum ou charge morte/charge utile sont traduits en termes de pourcentage (tableau 4). Il ne fait aucun doute que le rapport économiquement le plus favorable est celui de l’embarcation de Bredannaz. Il faut toutefois relativiser quelque peu ces valeurs brutes nous semble-t-il. En effet, en termes d’interprétation historique des données, ces valeurs doivent être resituées dans le contexte de l’économie régionale des transports par eau variable selon les époques et les milieux nautiques considérés. Il apparaît évident, à cet égard, que l’économie des transports sur le lac d’Annecy à la fin du Moyen Âge et au début de l’époque moderne ne se confond pas, par exemple, avec celle du bassin de la Charente aux premiers temps de la féodalité. N’oublions pas qu’un bateau, quel qu’il soit, est avant tout, au-delà de ses caractéristiques architecturales et techniques, l’expression matérielle d’une situation géo-historique déterminée que Bredannaz 134,00 kg 19,00 % l’analyse archéologique a pour objet d’essayer de restituer. CONCLUSION Avec les épaves de la nau d’Yvoire et de la barque-cochère Neptune de Saint-Gingolph, l’épave de Bredannaz est la troisième, hormis les épaves de pirogues monoxyles, à avoir été fouillée dans un lac alpin. De la même manière que les fouilles des épaves d’Yvoire et de SaintGingolph avaient conduit à un apport important de données inédites, celle de Bredannaz a mis en évidence des particularismes architecturaux jusqu’alors peu ou mal connus qui contribuent, d’une façon déterminante, à enrichir notre connaissance de l’histoire de la batellerie lacustre des Alpes en général et de celle du lac d’Annecy en particulier. Un aspect notablement intéressant à examiner concerne la place de l’embarcation dans l’histoire de l’architecture navale régionale. L’analyse des vestiges a montré que tant au niveau du débitage régulier des matériaux (délignage à la scie des virures de la sole et de la levée par exemple) qu’à celui de la conception maîtrisée de la structure monoxyleassemblée et de la géométrie des formes de la coque construite « sur sole », le bateau de Bredannaz suppose, en termes de chaîne opératoire et de logique constructive, que sa mise en chantier, dans un contexte technique spécialisé, se rattache à une tradition architecturale bien établie. Les questions sous-tendues par cette interprétation des données archéologiques sont celles portant sur le passé et le devenir de cette tradition d’une part et de son étendue régionale d’autre part. Peut-être des réponses à ces interrogations sur les savoirfaire et les savoirs des charpentiers locaux pourront-elles être fournies par deux autres épaves de bateau à fond plat situées dans les eaux du lac d’Annecy, épaves dont l’étude sera cependant très difficile en raison de leur situation à 49 m de profondeur pour celle précédemment citée et à 59 m pour une autre. Dans une large mesure, l’archéologie subaquatique de la batellerie de nos lacs en est encore à ses débuts. Nous espérons que le présent travail a montré les potentialités de ce domaine pour lequel on peut espérer des développements semblables à ceux de la batellerie fluviale au cours de ces trente dernières années. 166 Livre-archaeonautica.indb 166 14/11/12 15:23 Tableau 5 : Caractéristiques hydrostatiques de l’embarcation de Bredannaz pour trois valeurs de tirant d’eau (M. Ginisty, logiciel Prolines Vacanti). Cette série de données numériques sert à déterminer, en les quantifiant précisément, les caractéristiques hydrostatiques d’une coque. Toutes ces valeurs correspondent aux critères actuels de définition technique adoptés en architecture navale. Ces valeurs permettent d’établir des comparaisons entre différents bateaux sur des bases objectives, identifiées et contrôlables. REMERCIEMENTS Saltwater 1 261.268 Kgs 3 550.797 Kgs 7 878.668 Kgs Fresh Water 1 225.700 Kgs 3 450.665 Kgs 7 556.490 Kgs Prismatic Cp 0.912 0.865 0.781 Block Cb 0.842 0.818 0.727 Waterplane Cw 0.962 0.917 0.838 65.164 Kg-m 80.024 Kg-m 106.328 Kg-m 144.01 159.494 181.797 Nous souhaitons adresser nos profonds remerciements à Paul Bloesch qui, avec sa générosité habituelle, a répondu à toutes nos questions en nous adressant des informations inédites extraites de ses recherches dans les fonds d’archives et dans les bibliothèques. Nos remerciements vont également à Étienne Champelovier, technicien au Drassm, qui a assuré l’encadrement technique des chantiers subaquatiques ainsi qu’à Alain Pinot qui a aimablement mis à notre disposition ses clichés pris dans des conditions difficiles sur l’épave du Roc de Chère. Enfin, il est à noter que le texte a bénéficié de la relecture attentive faite par Louis Bonnamour. NOTES Tirant d’eau 10 cm 25 cm 50 cm Displacement Coefficients Mom To Trim l cm KG:Cm Immer Ratios 242.008 331.768 3.029 3.255 3.596 Length/Draft 66.351 29.676 17.423 Beam/Draft 21.903 9.117 4.846 VCG of Hull 0.140 M Below LWL -0.010 M Below LWL -0.260 M Below LWL LCG of Hull 5.238 M Aft "0'' 5.238 M Aft "0'' 5.238 M Aft "0'' LCB 6.008 M Aft "0'' 5.848 M Aft "0'' 5.637 M Aft "0'' VCB 0.045 M Below Lwl 0.117 M Below Lwl 0.232 M Below Lwl Gmt 4.093 Meters 1.700 Meters 1.010 Meters Bmt 4.278 Meters 1.807 Meters 1.037 Meters Load Waterline 6.647 Meters 7.423 Meters 8.715 Meters Length Over All 9.133 Meters 9.133 Meters 9.133 Meters Waterline Beam 2.194 Meters 2.280 Meters 2.424 Meters Deck Beam 2.571 Meters 2.571 Meters 2.571 Meters Max Freeboard 0.890 Meters 0.740 Meters 0.490 Meters Fairbody Draft 0.100 Meters 0.250 Meters 0.500 Meters Waterplane 14.027 SqMt 15.525 SqMt 17.696 SqMt Lateral Plane -0.378 SqMt -0.310 SqMt 3.691 SqMt Wetted Hull Aera 15.293 SqMt 18.875 SqMt 24.743 SqMt Total Hull Surface 31.371 SqMt 31.371 SqMt 31.371 SqMt 3.371 BHP 9.489 BHP 21.054 BHP Centers Transverse Metacenters Length-Width-Heigth Aeras Required Power Brake Horse Pwr Centers of Action 5.897 M aft "0'' 5.668 M aft "0'' 5.370 M aft "0'' 0.124 M Below LWL 0.237 M Below LWL 0.232 M Below LWL 5.944 M aft "0" 4.580 M aft "0" 5.346 M aft "0" Gml 34.344 M 16.729 M 11.762 M Bml 34.530 M 16.836 M 11.789 M Long. Ctr of Float Vertical CLP Longitudinal CLP Longitudinal Metacenters * Ingénieur de recherche, Ministère de la Culture, Département des Recherches Archéologiques Subaquatiques et Sous-Marines, 147 plage de l’Estaque, 13016 Marseille, France. ** Directeur de recherches, Département d’Archéologie Navale, CNRS-LAMOP (UMR 8589), Musée National de la Marine, 17 place du Trocadéro, 75116 Paris, France. *** Architecte naval, MGM, 1 rue Katell Cornic, 29000 Quimper, France. 1. Les essences de bois ont été déterminées par C. Dormy, Archéolabs. 2. Rieth 1997, p. 84-85. 3. Charmillot 1993, p. 39. 4. Leuvrey 1999, p. 76-77. 5. Charmillot 1993. 6. Communication orale de Joël Serralongue, archéologue départemental de la Haute-Savoie. 7. Rieth 1997, 1999. 8. Arnold 1992, t. 2, p. 102. 9. Bertola 1999, p. 676. 10. Pflederer 2005, p. 43. 11. Bloesch 1994, 1996, 1999a, 1999 b, 2003. 12. Anderegg 1987, p. 368 ; Furter 1999, p. 81-82. 13. Beaudouin 1985, p. 137-138. 14. Barrès 2005, p. 44. 15. 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