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L’art à Rome du XVème au XVIIème siècle
Proséminaire SH 2002/2003
L’église du Gesù
Stella Wenger
[email protected]
Histoire de l’art en branche principale.
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Table des matières
1.
Introduction………………………………………………………………1
2.
Ignace de Loyola et la « Compagnie de Jésus »…………………. 1
3.
La Contre-Réforme…………………………………………………….. 4
4.
Le « style jésuite »………………………………………………………5
5.
Le cardinal Alessandro Farnese…………………………………….. 6
6.
Le Gesù……………………………………………………………………7
6.1
Les divers projets…………………………………………………………7
6.2
Le plan……………………………………………………………………. 9
6.3
La décoration intérieure………………………………………………….9
7.
Conclusion……………………………………………………………….15
8.
Bibliographie…………………………………………………………….16
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1.
Introduction
Il Gesù est l’église mère de l’ordre des jésuites. Il reçu, pendant sa phase de
construction, le soutien du cardinal Alessandro Farnese, neveu du pape Paul III
Farnese. L’église, bâtie durant les années de la Contre-Réforme, s’accorde
parfaitement aux principes du Concile de Trente et elle servira au cours des
années suivantes de grand modèle aux architectes des églises jésuites à venir.
L’église du Gesù est dédiée, comme son nom l’indique, à Jésus et à l’adoration
de Son nom.
Après une présentation de l’ordre des jésuites, je vais consacrer quelques
chapitres à la Contre-Réforme, à Alessandro Farnese, au « style des jésuites »
et à l’architecture de l’église du Gesù avant de me concentrer principalement
sur la décoration intérieure de l’édifice.
2.
Ignace de Loyola et la « Compagnie de Jésus »1
Ignace de Loyola naît dans la région basque de l’Espagne en 1491. Il
travaille pendant plus de dix ans en tant que page auprès du trésorier royal
Juan Velázquez de Cuéllar à la cour du roi Ferdinand, avant que sa vie ne
change brutalement en 1521. Sa jambe droite est alors touchée par la balle
d’un canon français lors d’une bataille aux portes de la ville de Pampelune et
durant sa longue convalescence, Ignace réalise que, bien que sa vie passée ai
été luxurieuse, elle ne lui avait apporté aucune satisfaction. Il décide ainsi de
mettre sa vie au service de Dieu. Puis, en 1523, il se met en route vers la Terre
Sainte. Mais bientôt il est renvoyé de Jérusalem par les franciscains qui
craignent, avec la venue d’un missionnaire, des troubles qui dérangeraient la
paix fragile qui règne entre les chrétiens et les Turcs. Après deux années
d’études de latin à Barcelone, il est admis à l’Université d’Alcala, près de
1
Les données biographiques sur Ignace de Loyola et les informations concernant la « Compagnie de
Jésus » sont tirées du Catalogue d’Exposition, Saint, Site and Sacred Strategy. Ignatius, Rome and
Jesuit Urbanism, Vatican: Biblioteca Apostolica Vaticana, 1990, pp. 17-43.
1
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Madrid, où il suit des cours de théologie et de philosophie. Mais il est incarcéré
à cause de ses idées et interdit d’expression jusqu’à la fin de ses études. C’est
pourquoi il change d’Université et s’inscrit à celle de Salamanque. Cependant,
là également il entre en conflit avec l’Inquisition et part finalement pour Paris où
il restera de 1528 à 1535, soit 7 ans.
Pendant ces années d’études, il avait réunit autour de lui un groupe
international de compagnons qui formera le noyau de ce qu’Ignace nommera
plus tard la « Compagnie de Jésus ». Parmi eux se trouvent les espagnols
François Xavier, surnommé l’Apôtre des Indes à cause des nombreuses
missions qu’il effectuera dans les pays d’Asie, Diego Lainez, qui succédera à
Ignace à la tête de la « Compagnie de Jésus », Alfonso Salmerón, et Nicholás
Bobadilla, le portugais Simão Rodrigues et le savoyard Pierre Favre.
Le 15 août 1534, alors que la fin de leurs études approche, les compagnons
font le serment de demeurer pauvres et chastes, de se rendre à Jérusalem pour
y donner leurs vies au service de Dieu, et que s’ils n’étaient pas acceptés làbas, ils iraient à Rome où ils offriraient leur soutien au pape. Ainsi les
compagnons se réunissent à Venise en 1537 et une délégation se rend à
Rome, auprès du pape Paul III pour recevoir une aide financière pour leur
voyage. Mais parce que le pape, ensemble avec l’empereur allemand, mène
une croisade contre les Turcs, il est impossible pour les compagnons
d’effectuer le voyage jusqu’à Jérusalem. Ils restent donc à Rome, prient dans
les rues de la ville et créent dans les majeures villes du Nord de l’Italie des
groupes de travail qui se concentrent principalement sur les travaux
apostoliques. En 1537 toujours, Ignace et deux compagnons s’installent en
dehors de la ville de Rome, dans la chapelle « la Storta », partiellement en
ruine, sur la Via Cassia. Là, Ignace aura une vision qui clarifiera sa mission et
qui le décidera à nommer son nouvel ordre la « Compagnie de Jésus ».
La nouvelle communauté religieuse est reconnue par le pape Paul III
Farnese, le 27 septembre 1540 et Ignace est élu supérieur général de l’ordre
des jésuites une année plus tard. Certains compagnons se mettent à prêcher
dans les hôpitaux et à enseigner dans diverses institutions. D’autres partent
pour des villes d’Italie, pour l’Allemagne, l’Espagne, l’Inde, le Japon et la Chine.
Les principales occupations des missionnaires sont alors les œuvres de charité.
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Mais si les jésuites, à leurs débuts, ne s’étaient occupés que d’activités
missionnaires, ils se tournent dès 1547 vers l’enseignement, qui deviendra
finalement l’activité principale de l’ordre vers la fin du siècle. Lorsque Ignace
meurt en 1556, la compagnie possède une petite église (S. Maria della Strada)
et assez de terre pour construire une résidence dans laquelle peuvent vivre
environ 80 personnes ; il y a à cette époque plus de 100 jésuites à Rome et
près de 1000 jésuites dans 100 maisons dispersées sur les quatre continents.
Ignace de Loyola et Francis Xavier sont canonisés en 1622.
Le but d’Ignace et des Jésuites était de trouver Dieu en toute chose et de
communiquer cette présence divine dans les situations concrètes de la vie
quotidienne et en utilisant chaque moyen de communication disponible. Ainsi,
trois éléments en particulier caractérisent Ignace tout au long de sa vie : son
sens pratique, son imagination et son adaptation aux changements du monde,
caractéristiques qui étaient transmises à chaque nouveau membre de l’ordre.
Dans chaque nouvelle ville et pays dans lequel se rendaient les missionnaires
jésuites, ils avaient pour but de s’attirer l’amitié des familles nobles et bien
placées, afin qu’elles interviennent en leur faveur auprès des autorités. Ils
s’assuraient ainsi un soutien financier stable.
La « Compagnie de Jésus » luttait contre l’influence protestante et devait
faire face cependant à de violentes persécutions dues à sa nouveauté, à son
soutien inconditionnel au pape, à l’efficacité de son organisation centralisée, à
son influence sur les rois et la haute noblesse, à ses positions théologiques et à
ses méthodes missionnaires. Le pape Clément XIV Ganganelli supprimera
d’ailleurs l’ordre en 1773. Il sera rétabli en 1814, mais les persécutions
continueront tout au long du XIXème siècle.
3
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3.
La Contre-Réforme
En réponse aux actions de la Réforme protestante, engagée par Martin
Luther, l’Église catholique dénonce ce qu’elle considère comme des excès et
des abus visant à saper sa suprématie.
L’expression de « Contre-Réforme », inventée par des historiens protestants
au XIXème siècle, désigne l’ensemble des mesures prisent par l’Église
catholique pour réformer les abus dénoncés par la Réforme protestante. Le
bouleversement des esprits et des mœurs, né de la Renaissance et de
l’humanisme, se traduisait par la décadence du clergé et le désarroi des fidèles
devant la dissonance entre la structure de l’Église et le message évangélique.
Un besoin profond de rénovation se faisait alors sentir.
Plus largement, ce terme évoque un mouvement inauguré par le Concile de
Trente en 1545. Convoqué par le pape Paul III, il se perpétua jusqu’en 1563. Il
n’avait pour d’autre but que de museler le protestantisme naissant, ce dernier
étant considéré comme hérétique par l’autorité pontificale. Le Concile de Trente
entreprit donc de redéfinir la totalité du dogme et de la discipline catholique.
Rome veilla aussitôt à l’application des décrets conciliaires. Mais le népotisme
pontifical et le cumul des bénéfices ne disparurent pas.
L’influence considérable qu’a exercée la Contre-Réforme sur les arts
plastiques, aux débuts du baroque, au XVIIème siècle est due à divers facteurs
et l’essor de la « Compagnie de Jésus » joua un rôle déterminant dans la
diffusion et l’interprétation des arts nouveaux et de la culture, pour rénover et
fixer les principes de l’iconographie catholique, et pour utiliser l’art à des fins de
propagande. Mais s’il est vrai que la prodigieuse expansion du baroque en
Europe et en Amérique latine est pour une grande part due à la propagande
des jésuites en faveur de ce style, c’est en revanche une erreur d’identifier le
baroque au « style jésuite » ou à l’esthétique du Concile de Trente. La ContreRéforme adopta délibérément les décors baroques dans ses églises afin de
faire bénéficier le sentiment religieux et la piété de leur puissance de
séduction2.
2
Informations tirées du site : http://fr.encyclopedia.yahoo.com.
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4.
Le « style jésuite »
Avant que le terme de « baroque » ne soit établit au milieu du XIXème siècle
pour
décrire
péjorativement
les
phénomènes
stylistiques
suivants
la
Renaissance, le terme de « style jésuite » est alors couramment utilisé pour
définir ces caractéristiques. Alors que cette architecture se développe surtout
en Europe, notamment au Sud de l’Allemagne, en Belgique et en Pologne, on
en retrouve également des caractéristiques en Amérique latine, où elle avait été
introduite par les franciscains, puis revendiquée et propagée par les jésuites.
Actuellement, nous qualifions cette architecture de « baroque colonial »3.
Mais la question de savoir s’il existe réellement un « style jésuite » ou non
fut, et est encore, cause de nombreux débats. A l’origine, et selon les
Constitutions4 d’Ignace de Loyola, les églises jésuites se devaient d’être
simples et modestes et correspondaient à des règles strictes d’organisation de
l’espace5. En effet, cette organisation répond aux besoins des jésuites en
s’adaptant à leur mode de prédication : Une église devait pouvoir rassembler
tous les fidèles dans une sorte de grande halle, l’autel principal devait servir à
célébrer l’eucharistie, alors que la messe devait pouvoir être célébrée à
plusieurs endroits en même temps sur les autels annexes. De plus, le toit devait
être plat et de bois, pour éviter les échos.
D’après le père jésuite Joseph Braun, la « Compagnie de Jésus » n’aurait fait
qu’ apporter dans ses arts et son architecture les traditions des pays dans
lesquels elle édifiait ses églises et qu’elle n’aurait ainsi jamais créée son propre
style. Les jésuites se seraient simplement laissés influencer par l’architecture
des églises déjà présentent aux endroits où ils étaient envoyés en mission. En
effet, nous savons que les missionnaires jésuites s’intégraient totalement dans
les coutumes et les traditions des pays qu’ils avaient pour tâche de «convertir»,
3
Kaspar WALTER et al., Lexikon für Theologie und Kirche, Bâle: Herder, 1993, 3. Auflage, p.
Les Constitutions sont, avec les Exercices spirituels, l’ouvrage fondateur de l’ordre. Il donne toutes
les indications nécessaires au déroulement de la formation du futur jésuite par exemple, et toutes les
règles que doit minutieusement suivre chaque membre (obéissance, zèle).
5
Informations tirées du Catalogue d’Exposition, Saint, Site and Sacred Strategy…, p. 48.
4
5
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et leurs arts et leur architecture avaient, toujours selon Joseph Braun, la même
faculté d’adaptation6.
Mais pour d’autres auteurs, comme James S. Ackerman7, nous pouvons
parler, comme déjà cité plus haut, d’un nouveau type d’église. Il Gesù pourrait
être considéré, selon lui, comme une réponse aux nouvelles règles de la
Contre-Réforme également, qui exigeaient des nefs spacieuses pour y accueillir
de grandes congrégations et de nombreux autels pour y célébrer plusieurs
messes à la fois. La structure de l’espace, comme la désirait les jésuites, serait
donc en fait, dictée par le Concile de Trente. Un autre exemple qui démontre
que la « Compagnie de Jésus » promouvait en quelque sorte les principes
nouveaux de la Contre-Réforme, est la nouvelle forme de confessionnal qui
répond en fait également aux attentes des jésuites qui insistaient tout
particulièrement sur le fait que les pêcheurs se confessent8.
5.
Le cardinal Alessandro Farnese
Alessandro Farnese (ill. 1) vient au monde le 7 octobre 1520. Son père, Pier
Luigi Farnese, est le frère du futur pape Paul III. En 1534, alors qu’Alessandro
est encore étudiant à Bologne, Clément VII (de la famille Médicis et pape de
1523 à 1534) le désigne comme administrateur du diocèse de Parme (il n’a
alors que 14 ans). La même année, il est élu cardinal par son oncle, le pape
Paul III. En 1539, il est envoyé à la cours de Charles V, roi d’Espagne, en tant
que legatus a latere où il a pour mission d’instaurer la paix entre l’empereur et
le roi de France.
Son grand intérêt pour la littérature et l’art fait de lui l’un des plus importants
mécènes des arts visuels du XVIème siècle à Rome. Il est le patron de
l’architecte Giacomo da Vignola auquel il confie la construction du palais
6
Rudolf WITTKOWER, Irma JAFFÉ, Baroque Art. The Jesuit Contribution, New York: Fordham
University Press, 1972, p. 2.
7
James S. Ackerman publie plusieurs ouvrages sur l’architecture, dont un sur celle de Michel-Ange en
1968. Il a écrit un chapitre intitulé « The Gesù in the Light of Contemporary Church Design » dans
l’ouvrage de Rudolf WITTKOWER et Irma JAFFÉ, Baroque Art…, pp. 15-28.
8
Rudolf WITTKOWER, I. JAFFÉ, Baroque Art…, pp. 2-3.
6
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Farnèse de Caprarola, au bord du lac de Bracciano, et de l’église du Gesù à
Rome. Grand propagateur des réformes du Concile de Trente, il offre son
soutien inconditionnel à l’ordre des jésuites. Sa collection d’antiques (la plus
grande de Rome) se trouve actuellement en grande partie au musée
archéologique de Naples9.
6. Le Gesù
Comme nous venons de le voir, c’est grâce au neveu du pape Paul III, le
cardinal Alessandro Farnese, que les jésuites peuvent faire construire leur
première grande église. De plus, il s’agit de la première église bâtie à Rome
après le sac de la ville en 1527 et elle fut un exemple pour les églises de S.
Andrea della Valle et la Chiesa Nuova10.
Il n’y a aucun doute sur le fait que chaque fois que possible, les jésuites
préféraient employer des artistes membres de leur compagnie, comme le
faisaient également d’autres ordres de la Contre-Réforme (les barnabites, les
théatins). Mais étant donnée l’expansion rapide de l’ordre et de la nécessité
grandissante d’églises et de collèges, les jésuites se sont vus contraints de
demander de l’aide à des artistes extérieur à l’ordre11.
6.1
Les divers projets
Nanni di Baccio Bigio présente un premier projet de construction en 1550 (ill.
2). D’après la qualité du dessin, certains auteurs en déduisent que ce sont
Ignace de Loyola et Francis Borgia eux-mêmes qui avaient décidé du plan en
croix, avec des entrées dans les bras du transept, une immense nef, une
9
www.newadvent.org.
Clare ROBERTSON, Il gran Cardinale. Alessandro Farnese, Patron of the Arts, New Haven,
London: Yale University Press, 1992…, p. 181.
11
Rudolf WITTKOWER, Irma JAFFÉ, Baroque Art…, p. 5.
10
7
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grande abside capable de réunir assez de monde pour célébrer l’eucharistie et
une façade flanquée de tours. Mais ce projet n’avait pu être réalisé pour des
raisons financières.
Un second plan, qui date de 1554, avait d’abord été attribué à Michel-Ange.
En réalité, l’auteur nous reste inconnu, mais il s’agit peut-être d’un dessin de
Giovanni Tristano, un architecte jésuite, ou d’un second plan de Nanni di Baccio
Bigio. En 1561, après la mort d’Ignace de Loyola, Francis Borgia est nommé
supérieur général de l’ordre et le cardinal Alessandro Farnese offre son soutien
aux jésuites. Il prend part aux décisions concernant les projets de construction
et puisque l’ordre dépend de lui financièrement, il en profite pour imposer ses
idées. Il décide d’engager l’architecte Giacomo da Vignola pour réaliser le plan
définitif (ill. 3). Le frère jésuite Giovanni Tristano, également architecte, est
chargé de superviser les travaux, mais en réalité il n’a pas beaucoup
d’influence. Vignola adapte en 1563 le plan de 1554, mais les travaux pour la
nouvelle église ne commencent pas avant 1568. Quelques mois avant le début
des travaux, le cardinal écrit une lettre à Vignola dans laquelle il lui fait part de
ses conditions, ce qui nous donne une raison de croire, qu’entre 1563 et 1568,
les projets avaient été changés encore maintes fois12. Alessandro Farnese
exigeait donc que les coûts ne dépassent pas vingt-cinq mille ducats, il ne
devait y avoir qu’une seule nef avec des chapelles sur les côtés et non des nefs
latérales. De plus, la nef devait être voûtée, caractéristique qui ne correspond
nullement aux vœux des jésuites que nous avons cités plus haut. Ils désiraient,
en effet, que le toit soit plat, pour éviter les échos et pour que tous les fidèles
rassemblés dans la grande nef puissent entendre clairement le sermon tenu par
le prêtre sur le grand autel. Le cardinal demanda également à ce que l’église
soit orientée vers l’ouest, du côté de l’actuelle Piazza del’ Gesù, pour lui donner
plus de grandeur. Vignola avait cependant la liberté de donner au plan la forme
qu’il jugerait être la meilleure13.
Pour ce qui est de la façade, le cardinal n’est pas satisfait des plans de
Vignola, fait prouvé par les nombreux projets qu’il donne à réaliser à d’autres
12
Clare ROBERTSON, Il gran Cardinale… pp. 184-194.
Peter MURRAY, L’architecture de la Renaissance italienne, Paris : Thames & Hudson, 1990, p.
200.
13
8
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architectes, tels que Galeazzo Alessi et Giacomo della Porta. Finalement, il
engage della Porta qu’il avait déjà vu travailler à l’Oratorio del Crocefisso14.
Il Gesù est terminé en 1575.
6.2
Le plan
Le plan final est en forme de croix latine et présente deux entrées dans une
large nef. Au lieu de bas-côtés, comme on en trouve dans les basiliques, il y a
dans l’église du Gesù, de chaque côté de la nef, une rangée de trois chapelles.
Un passage relie les chapelles entre elles, normalement séparées par des
barrières et permet ainsi aux prêtres de se diriger vers l’autel principal sans
déranger les messes tenues dans la nef15. Les extrémités du transept sont
plates et non en demi-cercle, probablement à cause des rues qui longent
l’église des deux côtés. Le chœur est surélevé et ouvert sur la nef. À côté du
chœur se trouvent encore une fois deux chapelles. Depuis celle de gauche, un
passage mène à une petite salle qui nous conduit à la sacristie, derrière le bras
gauche du transept.
6.3 La décoration intérieure
Le programme iconographique destiné à décorer l’intérieur de l’église et
instauré dans les années 1580 présente un schéma relativement continu et
fidèle aux thèses de la Contre-Réforme16. Alors que les jésuites n’avaient eu
que peu à dire au sujet de l’architecture, ils sont libre d’organiser la décoration
du Gesù à leur guise.
14
Clare ROBERTSON, Il gran Cardinale… p. 191
Clare ROBERTSON, il gran Cardinale… p. 181.
16
Rudolf WITTKOWER, Irma JAFFÉ, Baroque Art…, p. 31.
15
9
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Durant la première phase de décoration des églises jésuites de Rome, entre
1567 et 1600, plusieurs nouvelles églises, y compris le Gesù, sont décorées et
rénovées. Les chapelles latérales sont décorées par des commanditaires
privés, mais leur iconographie a dû être supervisée de très près par les jésuites.
La dédicace des dix autels secondaires, reflète un programme spirituel
répondant également aux pratiques de dévotion de la Compagnie. Un premier
élément qui tend vers une iconographie jésuite sont les scènes des martyrs des
missionnaires envoyés sur les quatre continents, mais le thème du martyr
correspond aussi aux exigences du Concile de Trente.
La deuxième phase importante de décoration des églises jésuites débute
dans les années 1660. Le cardinal Alessandro Farnese engage Giovanni
Battista Gaulli pour peindre la voûte de la nef ainsi que le dôme, en
collaboration avec le stucateur Antonio Raggi17. Le coordinateur de ces projets
est Gian Paolo Oliva, général de la « Compagnie de Jésus » de 1664 à 168118.
Giovanni Battista Gaulli , dit il Baciccio, naît à Gênes en 1639 et meurt à
Rome en 1709. Il est l'un des meilleurs représentants de la décoration baroque.
Il travaille sur le projet d’Oliva de 1672 à 1685 et couvre de fresques toute la
surface supérieure aux corniches : la nef de 1676 à 1679, la coupole entre 1672
et 1675, et enfin le transept gauche en 1685. La fresque de Gaulli (ill. 4)crée
une réelle illusion d’ouverture de la voûte. Les figures semblent flotter dans un
espace au-delà du nôtre et la nef du Gesù présente pour la première fois à
Rome un type d’iconographie triomphale qu’admirait tout spécialement l’ordre
des jésuites. La fresque représente l’Adoration du nom de Jésus et célèbre en
même temps le nom de l’église et celui de la « Compagnie de Jésus »19. Les
initiales du Christ apparaissent dans un faisceau de lumière, au centre de
l’œuvre et semble chasser le Mal vers l’Enfer. L’œuvre de Gaulli est entourée
d’un travail en stuc, réalisé par Antonio Raggi, qui se mêle parfaitement à la
fresque. Andrea Pozzo s’inspirera, quelques années plus tard, de cette fresque
pour réaliser The Allegory of the Missionary Work of the Jesuits (ill. 5) sur la
voûte de l’église de St Ignace, également une église jésuite de Rome.
17
Rudolf WITTKOWER, Irma JAFFÉ, Baroque Art…, p. 27.
Catalogue d’Exposition, Saint, Site and Sacred Strategy…, p. 51.
19
Catalogue d’Exposition, Saint, Site and Sacred Strategy…, p. 53.
18
10
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Les chapelles:20
Le cardinal Farnèse meurt le 4 mars 1589, et les travaux en cours cessent
pour quelques temps. Mais la décoration des chapelles, soutenue par des
patrons privés, continue. En effet, comme déjà cité plus haut et comme c’était le
cas dans la plupart des églises, les chapelles du Gesù avaient été vendues à
des citoyens. Selon le programme iconographique, les thèmes illustrant les
chapelles forment un développement, mais les styles ne s’unifient nullement
puisque chaque patron avait le loisir de choisir l’artiste qui exécuterait les
tableaux. Ainsi, il n’y a pas d’unité stylistique. Les chapelles vont toujours de
pair avec la chapelle opposée, de l’autre côté de la nef. Elles sont obscures et
isolées de la large nef voûtée et de la croisée du transept. En s’approchant de
la croisée, les choix iconographiques deviennent toujours plus complexes en
allant des sujets terrestres (martyrs) jusqu’aux thèmes célestes (Trinité et
anges).
A droite de l’entrée se trouve la chapelle de St André qui présente, en plus
de son martyr (ill. 6), également les martyrs de Stéphane (ill. 7), Laurent,
Catherine (ill. 8) et Agnès ainsi qu’une peinture de la Vierge sur la voûte en tant
que reine des martyrs (ill. 9). On y voit en haut, au centre, l’Agneau, symbole du
Christ entouré d’un hâle de lumière ; puis la Vierge sur un nuage porté par des
putti et tout autour des figures de martyrs. Les peintures de cette chapelle son
attribuées à Agostino Ciampelli. Le premier patron de cette chapelle fut Paolo
Morelli qui finança la chapelle du 6 juillet au 11 décembre 1585. Sur l’autel sont
peintes les armes de la famille Ravenna, de Francesco Ravenna, le second
patron de la chapelle. Le tableau au dessus de l’autel est actuellement une
œuvre d’Andrea Pozzo, St Francis Borgia in Prayer, qui se trouvait à l’origine
dans la deuxième chapelle à droite. En face est située la chapelle de St Pierre
et de St Paul, également des martyrs (ill. 10-11). Du côté droite du tableau du
martyr de St Paul, on remarque la personnification de la charité et à gauche la
personnification de la religion. La scène centrale illustre la mort de saint Paul,
événement dont il existe plusieurs versions ; l’une d’elle voulant que le saint ait
été incarcéré par les autorités impériales en 66, sous le règne de Néron, et
20
Les informations concernant le décor et les propriétaires des chapelles sont tirées de Rudolf
WITTKOWER, Irma JAFFÉ, Baroque Art…, pp. 34-47.
11
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finalement décapité à l’emplacement de l’actuelle basilique de Saint-Pierrehors-les-Murs. The Crucifixion of St Peter présente les personnifications de la
foi et de l’espoir. Comme St Paul, et selon la tradition, il aurait également été
emprisonné sous le règne de Néron et fut crucifié avec la tête vers le bas, aux
environs de l’an 64. Giulio Folchi en fut le premier patron. Ainsi, les deux
premières chapelles après l’entrée sont dédiées respectivement aux martyrs et
aux apôtres. Ensemble, elles illustrent le travail des apôtres qui, les premiers,
prêchèrent au nom du Christ, de pair avec des évêques chrétiens et des
martyrs dont les vies étaient littéralement vouées au nom du Christ. C’est le
symbole de la victoire de l’Église sur le paganisme par de dangereuses
missions à travers le monde entier.
La pair centrale est dédiée à Jésus. Bien que les deux autels originaux aient
disparu, nous savons maintenant encore à quoi ils devaient ressembler grâce à
une gravure de Sadelaer: sur un côté était peinte La Nativité, de Hans von
Aachen (ill. 12). Il avait crée ce tableau en 1588, une sorte d’adoration dans le
style du maniérisme tardif. Une représentation de la Nativité est également
illustrée sur la voûte de cette chapelle. À l’origine, la chapelle appartenait à
Agostino Bragheri de Tortona. C’est probablement lui qui a fait la commande à
Hans von Aachen. Vers 1639, la chapelle passe aux mains de la famille Cerri et
l’autel porte ses armes. Dans la chapelle située de l’autre côté de la nef est
placée une Pietà de Scipione Pulzone (ill. 13), dit aussi il Gaetano. Elle est
datée de 1591 et sur la voûte est peinte l’Adoration de la croix (ill. 14). Bianca
Mellini en est la première patronne. Gaspare Celio fut payé pour effectuer une
partie des peintures de la chapelle à partir de 1590 ou même avant. La chapelle
revint aux héritiers de Bianca Mellini, c’est-à-dre, à la famille Cardelli, et l’autel
porte ses armes.
La troisième et dernière pair est dédiée à la Trinité, aux anges et aux
archanges, les habitants spirituels du paradis. Dans la chapelle de gauche se
trouve le tableau de Francesco Bassano, appelé l’Adoration de la Trinité (ill.
15). Le premier patron de cette chapelle est monseigneur Pirro Taro. Son
héritier Pompeo Arrigoni fit décorer les chapelles, mais l’autel porte la marque
du premier propriétaire. Celio, qui travailla également pour les chapelles,
attribue les fresques de la Trinité à Fiammeri, un élève florentin d’Ammannati.
La Trinité avait une symbolique particulière pour St Ignace et la création de la
12
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chapelle semble refléter le premier passage de l’ouvrage des Exercices
Spirituels. Dans la chapelle des anges sont également représentés l’Enfer et le
Purgatoire. Le fondateur de la chapelle, en 1588, est Gaspare Garzione. Mais il
perdit sa fortune et dû céder la chapelle en 1590, Les nouveaux patrons
apposèrent leurs armes sur l’autel. Selon Celio, les fresques furent réalisées
par Federico Zuccari, Archangels Adoring the Trinity (ill. 16). Sept anges sont
agenouillés en demi cercle, en face du visiteur, sur un tapis de nuage. Seul
l’archange Michael est reconnaissable par sa cuirasse portant le chrisme, le
monogramme du Christ, et son casque. Leurs regards se lèvent vers
l’idéogramme de la sainte Trinité et des putti indique également par leurs
regards et leurs gestes sur le triangle symbolique, entouré d’un hâle de lumière
et contenant les lettres grecques Alpha et Omega, signifiant le début et la fin.
Zuccari est l’un des premier artiste du XVI e siècle, depuis le Moyen Age, à
reprendre le motif de l’Adoration des Anges. Ce tableau remplace en fait une
œuvre de Scipione Pulzone. Ce tableau devait être très similaire à celui de
Zuccari, mais certain éléments ne correspondaient pas aux conventions du
concile de Trente, comme, par exemple, le fait que les archanges
ressemblaient trop fortement à des portraits de personnes célèbres, ou à cause
des débats qui se tenaient au sujet du nombre et des noms des archanges
(Michael, Raffael, Gabriel, Uriel ; Jehudiel, Barachiel Sealtiel). Pulzone avait
très probablement inscrit le nom de chaque archanges sur son tableau21.
L’ange jouait un rôle important pour les jésuites, qui le voyaient comme un
médiateur entre Dieu et les hommes. Représenté dans une chapelle, il prend le
rôle d’intercesseur entre les morts et les vivants. L’archange Michael, lui, était
vu, par les catholiques de la Contre-Réforme, comme le combattant des forces
ennemies de Dieu, et c’est lui qui accompagne les âmes au Purgatoire et les
défendra au moment du Jugement dernier.
Selon la légende, saint Ignace avait vu à plusieurs reprises, dans ses visions,
le symbole de la Trinité, qui devint un élément de méditation important pour
l’ordre. Le choix de Zuccari pour le symbole paléochrétien et non pour une
21
Rudolf WITTKOWER, Art et architecture en Italie. 1600-1750, l’âge du baroque, s.l. : Hazan, 1991,
p
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personnification, comme c’était pourtant de coutume à son époque illustre la
volonté de l’ordre de retourner aux sources de la croyance.
Le sujet de l’ange gardien, illustré dans un médaillon devint très populaire,
largement grâce aux jésuites.
On peut résumer le programme iconographique du Gesù comme suit :
Crucifixion
Trinité
Résurrection
Anges
Nativité Passion
Apôtres Martyr
En dessous de la coupole, sur les piliers, Giovanni de Vecchi a peint les 4
pères de l’ouest22, docteurs de l’église: Jérôme (34-420, le traducteur de la
Bible en version latine), Ambroise (340-397), Augustin (354-430) et Grégoire de
Nazianze (330-390), qui élaborèrent et transmirent la théologie de l’église
papale. Leur enseignement et leur doctrine ont enrichi la tradition de l'Église de
façon particulière. L'église avait alors besoin des docteurs de l'Église puisque la
foi s'incarne dans les cultures, parce que la foi est attaquée et contestée, et
enfin parce que l'Esprit Saint ne cesse de guider l'Église et de développer
certains points qui ont besoin d'être écrits à l'aide de l'intelligence. Il y a eu des
grandes périodes doctrinales pour l'Église, riches en docteurs, pendant les
premiers temps, où certains des Pères de l'Église ont particulièrement guidé la
formulation et la compréhension de la foi chrétienne23.
La chapelle à gauche du transept à été réalisée par Andrea Pozzo entre
1696 et 1700 (ill. 17 et 18). Un premier projet d’Andrea Pozzo place l’autel
presque au second plan, dans un grand ensemble architectural. Une ouverture
au fond de l’abside devait donner une illusion d’ouverture et deux fenêtres,
cachées de la vue, avaient été prévues pour apporter de la lumière sur l’autel24.
L’autel, entouré d’une balustrade, renferme une statue de St Ignace en marbre,
argent et autres matériaux précieux. Quatre colonnes revêtues de lapis-lazuli
reposent sur des bases en marbre vert ornées de bas-reliefs en bronze doré.
Au sommet domine le groupe de la Trinité où un enfant soutient un globe
22
Clare ROBERTSON, il gran Cardinale…, p. 195.
http://fr.encyclopedia.yahoo.com.
24
Catalogue d’Exposition, Saint, Site and Sacred Strategy…, p. 204.
23
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terrestre. La statue extatique de St Ignace contemple le Père et le Fils, au
sommet du fronton. Jésus porte une croix et Dieu semble poser son regard sur
le Saint. L’autel représente la vision que St Ignace a vécu à son arrivée à Rome
dans la chapelle de la Storta25. De part et d’autre de l’autel, deux groupes de
statues allégoriques illustrent l’action de la compagnie de Jésus. À gauche on
trouve La Foi triomphant de l’Idolâtrie, de Giovanni Théodon et à droite, La
religion écrasant l’Hérésie du sculpteur Pierre Legros.
7. Conclusion
L’église du Gesù, devint par la suite un grand modèle pour les églises
jésuites de part le monde en général et à Rome en particulier.
Cependant, la question du style, de l’influence des nouveaux principes de la
Contre-Réforme et du Concile de Trente reste ouverte et il serait intéressant
d’éclaircir ce problème et d’étudier à quel niveau, ces divers facteurs ont
réellement influencé l’architecture et la décoration du Gesù.
Il reste un point que je n’ai pas traité dans mon travail, car j’ai considéré qu’il
s’éloignerait trop de mon sujet, mais qu’il est tout de même important de
signaler, est le fait que le cardinal Alessandro Farnese voyait dans le
financement du Gesù, une concurrence avec le cardinal Federico Cesi qui
faisait construire environ à la même époque l’église de S. Caterina de’ Funari.
Farnese considérait l’église du Gesù comme sienne et il fallait, naturellement,
qu’elle soit plus belle et plus imposante que les autres. Car tout ce qu’une
famille finançait, était le reflet de leur propre grandeur26.
25
ème
ème
ème
Émile MÂLE, Art religieux de la fin du XVI , du XVII
et du XVIII siècle. Étude sur
l’iconographie après le concile de Trente, Paris :Librairie Armand Collin, 1951, p. 156.
26
Clare ROBERTSON, il gran Cardinale..., p 183.
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8.
Bibliographie
Émile MÂLE, Art religieux de la fin du XVIème, du XVIIème et du XVIIIème siècle.
Étude sur l’iconographie après le concile de Trente, Paris :Librairie Armand Collin,
1951, pp. 155-171, 193-201, 206-216, 229-232, 431-443.
Peter MURRAY, L’architecture de la Renaissance italienne, Paris: Thames &
Hudson, 1990.
Clare ROBERTSON, Il gran Cardinale. Alessandro Farnese, Patron of the Arts,
New Haven, London: Yale University Press, 1992.
Kasper WALTER et al., Lexikon für Theologie und Kirche, Basel: Herder, 1993, 3.
Auflage.
Rudolf WITTKOWER, art et architecture en Italie. 1600-1750, l’âge du baroque,
s.l. : Hazan, 1991.
Rudolf WITTKOWER, Irma JAFFÉ, Baroque Art. The Jesuit Contribution, New
York: Fordham University Press, 1972.
Catalogue d’Exposition, Saint, Site and Sacred Strategy. Ignatius, Rome and
Jesuit Urbanism, Vatican: Biblioteca Apostolica Vaticana, 1990.
The Dictionary of Art, Londres: Jane Turner, 1996.
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