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Éduquer au dialogue interculturel dans l’École Catholique Le 19 décembre 2013, la Congrégation pour l’éducation catholique, du Saint-Siège, a publié un document majeur intitulé : Éduquer au dialogue interculturel dans l’École Catholique. Vivre ensemble pour une civilisation de l’amour. S’adressant aux communautés éducatives des 57,7 millions d’élèves scolarisés des 209,670 écoles catholiques dans le monde, ce document de 32 pages invite à favoriser le dialogue entre les cultures et avec les autres religions au sein de l’école catholique, tout en réaffirmant notre identité chrétienne. Une telle réflexion tombe à point nommé au moment où le projet catéchétique Kleopas — volet Éducation Catholique, se lance dans la révision des conditions d’annonce et de transmission de l’Évangile au sein des écoles et collèges catholiques, marqués de fait par la pluralité culturelle et religieuse. Le document comprend cinq chapitres, encadrés d’une introduction et d’une conclusion. Le cinquième chapitre donne les pistes d’action pratique visant à transformer les écoles catholiques en « laboratoires d’interculture ». L’introduction pose d’emblée les défis mondialisés de la pluralité croissante des sociétés que l’on retrouve logiquement dans toute école catholique. Celle-ci est tenue, par sa vocation propre, à s’ouvrir aux différentes cultures et religions. Loin d’être une menace pour la cohésion sociale, la diversité culturelle aujourd’hui doit être vue comme une source d’enrichissement pour construire la civilisation de l’amour. L’éducation se trouve ainsi engagée à « rendre possible la coexistence entre la diversité des expressions culturelles et promouvoir un dialogue qui favorise une société solidaire et pacifique. » Face à ce défi, les écoles catholiques sont appelées à apporter leur contribution en raison de leur tradition pédagogique et culturelle, et à la lumière des projets éducatifs solides. Elles l’accompliront par les vertus de l’ouverture à l’autre et le dialogue interculturel sans affaiblir leur identité catholique. Chapitre 1 : le contexte. Ayant défini la culture comme « l’expression spécifique chez tout être humain, au sein d’une communauté, d’organiser sa présence au monde », le document relève le caractère pluriel des cultures. Elles sont à la fois diversifiées et métissées. Elles sont liées aux origines multiples. Mais l’histoire nous apprend que toute culture comporte une dimension transcendante, une âme, qui se rapporte généralement à l’expérience de Dieu et se manifeste dans la pratique multiforme de la religion. Or, celle-ci ne doit pas être reléguée au domaine privé, mais doit pouvoir trouver son expression dans l’espace public. Elle représente ainsi, dans la diversité de ses manifestations « une contribution décisive à la communauté sociale dans le respect du bien commun et l’effort pour la promotion de tout être humain ». Dans ce contexte le dialogue entre les différentes religions revêt une importance particulière. L’Église catholique, de son côté, « ressent le besoin d’un dialogue vrai qui, à partir de la conscience de l’identité de sa propre foi, puisse aider les personnes à entrer en contact avec les autres religions ». Ce dialogue peut prendre plusieurs formes : dialogue de vie — partage de joie et de peines, dialogue des œuvres pour promouvoir le développement humain dans le respect de la dignité de tout un chacun, dialogue de l’expérience religieuse, etc. Par conséquent, les écoles catholiques sont un lieu privilégié d’apprentissage aux diverses modalités du dialogue entre jeunes de cultures et de religions différentes. Tous les enfants et les jeunes doivent y avoir la possibilité d’accéder à leur propre religion, et des éléments caractéristiques des autres religions. Chapitre 2 : différentes approches du pluralisme. La multiculturalité est une donnée incontestable du monde d’aujourd’hui. La question fondamentale réside dans notre capacité d’entrer dans un véritable dialogue qui permet une saine intégration des différentes cultures. Des trois approches relevées pour appréhender la pluralité, il existe deux approches traditionnelles qui s’avèrent incomplètes. L’approche relativiste prône la neutralité et la tolérance. Elle présuppose le respect des différences sans chercher à promouvoir l’échange fécond entre les cultures. L’approche assimilationniste accepte la différence culturelle à condition que les cultures minoritaires fassent l’effort de s’adapter à la culture ambiante et dominante, à forte prétention universaliste. L’approche interculturelle, dans une perspective éducative, implique foncièrement un dialogue réel et fécond ayant « pour point de départ la conscience profonde de l’identité spécifique des différents interlocuteurs ». Elle favorise la transformation réciproque, rend possible le vivre ensemble et réalise l’intégration des cultures dans la reconnaissance mutuelle. Chapitre 3 : quelques fondements de l’interculture — Partant de l’enseignement de l’Église qui postule qu’il ne peut y avoir d’expérience véritablement humaine sans insertion dans une culture, la dynamique interculturelle trace le chemin royal d’une communauté de destin de l’humanité entière. Elle est fondée sur la solidarité et les valeurs fondamentales de la justice et de la paix. Toute personne humaine a la capacité propre d’être facteur de culture du fait qu’elle est créée à l’image et à la ressemblance de Dieu. Étant foncièrement un être de relation, cette « personne-communion » est ouverte et tournée vers ce qui est autre que soi. Elle ne se comprend et ne s’épanouit que dans un rapport d’amour à l’autre marqué par sa différence. D’où la nécessité pédagogique d’une éducation au dialogue interculturel, comprise comme un itinéraire d’engagement personnel dans un apprentissage réciproque, tout au long de la vie. Chapitre 4 : l’éducation catholique dans la perspective du dialogue interculturel — Forte d’une « vision dialogique des cultures », l’éducation catholique tire sa pédagogie de l’amour de la notion de « personne-communion ». Elle prône et allie, à la fois, « l’amour de l’éducation » et « l’éducation à l’amour », pour tous et entre tous. Ce faisant, elle assume l’altérité et préserve l’identité de chaque personne dans l’échange interculturel qu’elle promeut parmi les acteurs de la communauté scolaire : que ce soit « entre adultes (enseignants, parents, éducateurs, responsables d’établissements), qu’entre enseignants et élèves et entre les élèves eux-mêmes, sans préjugés par rapport à la culture, au sexe, à la classe sociale ou à la religion. » Cette pratique pédagogique est invariable. Elle ne saurait être conditionnée par le fait que des catholiques soient minoritaires ou majoritaires dans une école catholique. Chapitre 5 : la contribution de l’école catholique — Devant le taux croissant de la multi-religiosité au sein des écoles catholiques et des risques — soit de fermeture aux autres ou d’une mise sous boisseau de sa propre identité — qu’elles encourent, celles-ci doivent veiller à ne pas perdre leur âme dans le dialogue interculturel qui s’instaure. Pour cela, elles ont « la responsabilité d’offrir aux élèves catholiques une bonne connaissance de leur religion, également la possibilité de grandir dans l’adhésion personnelle au Christ dans l’Église ». Cette exigence va de pair avec le souci de toute école catholique de permettre à ses membres catholiques d’acquérir et de pratiquer la « grammaire du dialogue » au sein de la communauté éducative. Agissant ainsi, celle-ci peut être considérée comme un « laboratoire d’interculture ». Le dialogue interculturel, inscrit dans le projet éducatif, « englobe tous les aspects de l’expérience scolaire : les relations entre les personnes, la perspective à partir de laquelle considérer le savoir et les disciplines, l’intégration et les droits de tous... ». Les principaux axes d’engagement du projet éducatif catholique, dans une perspective interculturelle, sont : le critère de l’identité catholique ; qu’elle soit explicite sans tomber dans une affirmation agressive — la construction d’un horizon commun basé sur notre appartenance à l’humanité — l’ouverture raisonnée à la mondialité — la formation d’identités fortes capables de dialoguer et de reconnaître l’égale dignité de l’autre — le développement de l’auto-réflexivité par la pratique de relecture — le respect et la compréhension des valeurs des autres cultures et religions — l’éducation à la participation et à la responsabilité à tous les niveaux. Ces engagements trouvent leur expression concrète dans les programmes à travers lesquels « la communauté scolaire explicite finalités, objectifs et contenus, avec les modalités permettant de les réaliser efficacement ». Pour autant, ces programmes doivent dépasser une visée académique restrictive pour s’inscrire dans une vision de sagesse. Car l’école catholique est appelée « à promouvoir la société de la sagesse, à aller au-delà du connaître pour enseigner à penser, à évaluer les faits à la lumière des valeurs, à éduquer à la prise de responsabilité et à l’engagement, et à l’exercice de la citoyenneté active ». Sur le plan didactique, l école doit exprimer son souci d’interculturalité en tenant compte des deux dimensions fondamentales de l’apprentissage : « la dimension cognitive (la connaissance) et la dimension relationnelle et affective (sagesse). Face au défi de l’éducation interculturelle, basée sur l’art de dialoguer avec d’autres visions de l’existence sans renier ni perdre son identité, l’enseignement scolaire de la religion catholique s’avère capital. L’enseignement religieux se distingue de la catéchèse par sa finalité propre et se soucie de « transmettre aux élèves des connaissances rationnelles concernant l’identité du christianisme et de la vie chrétienne ». Il permet ainsi à ce que « l’école et la société s’enrichissent de véritables laboratoires de culture et d’humanité, dans lesquels, en déchiffrant l’apport significatif du christianisme, on permet à la personne de découvrir le bien et de croître dans la responsabilité, de rechercher la confrontation et d’affiner le sens critique... » L’enseignement religieux bénéficie également du statut de discipline scolaire au même titre que les autres matières enseignées et, par conséquent, peut participer au dialogue interdisciplinaire que des enseignants doivent développer dans la perspective d’une éducation intégrale. L’éducation catholique ne peut se contenter de la formation initiale, assurée par l’État, de ses enseignants et de ses dirigeants. Pour être des acteurs porteurs du projet éducatif catholique, engagés dans l’interculturalité, ceux-ci nécessitent une formation complémentaire et approfondie sur « les fondements culturels et pédagogiques qui constituent l’identité de l’école catholique ». Pour développer une conscience et une compétence d’ordre interculturel, la formation doit porter son attention en trois directions : l’intégration — l’interaction — la reconnaissance de l’autre. Il revient aux autorités dirigeantes de l’éducation catholique de concevoir et d’implémenter des programmes de formation professionnelle à l’adresse de ses acteurs porteurs de son projet. Être enseignants dans une école catholique nécessite la prise de conscience d’appartenir à une communauté éducative où la relation professionnelle dépasse le cadre formel pour devenir plus engagée et approfondie dans l’expérience d’un « vivre ensemble » prophétique. Être dirigeants d’une école catholique requiert l’art d’un guide authentique « capable de rappeler les valeurs de référence et de valoriser toutes les ressources professionnelles et humaines dans son travail de direction (...) en étant conscient de porter une mission ecclésiale et pastorale enracinée dans un rapport loyal avec l’église locale. En conclusion, l’éducation catholique aujourd’hui doit œuvrer à « devenir une école ouverte à l’universalité du savoir et, en même temps, porteuse d’une spécificité qui est donnée par l’enracinement dans la foi au Christ Maître et par l’appartenance à l’Église ». Le cheminement Kleopas aujourd’hui ouvre l’opportunité à l’école catholique d’entrer résolument sur la voie de l’interculturel et contribue à faire advenir la civilisation de l’amour » en terre mauricienne. Résumé présenté par P. Alain Romaine Pour voir le document ‘Eduquer au dialogue interculturel à l’école catholique’ dans son intégralité: http://www.vatican.va/ roman_curia/congregations/ccatheduc/index_fr.htm