lagunes de Mercier - Ville de Châteauguay

Transcription

lagunes de Mercier - Ville de Châteauguay
Contamination des lagunes de Mercier
HISTORIQUE D’UNE CATASTROPHE ÉCOLOGIQUE ANNONCÉE
Mars 1968
Contamination des eaux de surface et souterraines sur le territoire de la
ville de l’Assomption, causée par le dépôt et l’entreposage de déchets
huileux au dépotoir Hétu et Thouin.
1968 et 1969
La Régie des Eaux et le ministère de la Santé émettent des permis à
Lasalle Oil Carriers Inc. pour le déversement et l’entreposage de déchets
liquides dans les anciennes lagunes de Ville Mercier, une ancienne
gravière désaffectée, sans étude hydrogéologique préalable et sans avoir
recours aux informations et connaissances disponibles à l’époque sur la
géologie et l’hydrologie de la région et le comportement des contaminants
dans le sol et les eaux souterraines. Les organismes gouvernementaux
n’ont également pas jugé bon d’agir avec prudence suite à l’incident de
l’Assomption.
1968 à 1972
Suite à l’octroi des permis le Gouvernement du Québec permettait à
LaSalle Oil Carriers Inc. de continuer de déverser des déchets huileux
dans les lagunes alors qu'il avait pleine connaissance, depuis le printemps
1969, que les opérations de cette compagnie ne respectaient pas les
conditions d’exploitation prévues par lesdits permis. De même, le
gouvernement a permis ces déversements alors qu’il savait, depuis
au moins octobre 1971, que lesdites opérations non conformes
avaient pour effet de contaminer les eaux souterraines.
Cette inertie du gouvernement a permis le déversement et l’entreposage
de plus de 150 000 de mètres cubes de déchets liquides (principalement
des huiles et solvants) dans les lagunes de Ville Mercier, composées
principalement de sable et de gravier perméables.
1970
Goodfellow (aujourd’hui Laidlaw) acquiert le site des anciennes lagunes de
Mercier pour y construire un incinérateur, avec l’assentiment du
gouvernement du Québec, en vue de récupérer et de traiter sur place les
déchets contenus dans les lagunes.
1972
Le gouvernement reconnaît sa responsabilité au dossier en acceptant
d’assumer les frais relatifs à la récupération et la destruction du contenu
des lagunes et ceux de la construction d’un aqueduc afin de raccorder le
réseau d’alimentation en eau potable de Ville Mercier à celui de la Ville de
Châteauguay;
Septembre 1972 Le gouvernement du Québec donne à Goodfellow (subséquemment
Laidlaw) l’exclusivité de l’élimination des déchets organiques dangereux
produits sur presque tout le territoire du Québec et procède à
l’inauguration de l’incinérateur.
Juillet 1973
Une entente conclue entre le gouvernement du Québec, la municipalité de
Ville Mercier et Goodfellow, prévoit la récupération et l’incinération, aux
frais du gouvernement, des déchets contenus dans les lagunes dans les
22 mois (au coût de 675 000 $). L’entente n’est pas respectée et les
déchets ne sont pas traités. Pire encore : la compagnie continue de
déverser dans les lagunes les produits chimiques qu’elle reçoit et qu’elle
ne peut brûler.
Le gouvernement de l’époque envoie des inspecteurs sur les lieux qui
constatent que la compagnie n’effectue pas le nettoyage convenu et que la
hauteur des lagunes monte au lieu de descendre. Toutefois, ceux-ci ne
prennent aucune mesure pour que ces déversements cessent et/ou afin de
contrôler davantage les actions de Laidlaw et al.
1974 et 1976
Prolongement du réseau d’aqueduc le long du rang Saint-Joseph en
direction de Sainte-Martine.
Automne 1980
Le gouvernement du Québec émet un certificat d’autorisation pour la
récupération des déchets non pompables et leur traitement sécuritaire,
ainsi que pour le nivellement de la structure des lagunes et leur
recouvrement et s’engage à surveiller activement les travaux. Toutefois,
les représentants du ministère de l’Environnement approuvent la fermeture
des lagunes sans s’assurer que les travaux ont été effectués.
Les études subséquentes estiment à environ 10 000m3 le volume de
boues huileuses qui aurait été enfoui sous terre par le remblayage effectué
par Laidlaw avec l’assentiment du gouvernement du Québec, qui était
« présent » lors dudit remblayage. Si le gouvernement avait agi de
manière diligente en exigeant une caractérisation des sols avant de
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permettre le remblaiement, la catastrophe n’aurait pas l’envergure que
nous lui connaissons aujourd’hui.
1981
Une étude de caractérisation des eaux souterraines commandée par le
ministère de l’Environnement du Québec, conclut à l’existence d’une zone
fortement polluée de 2 km2 et d’une zone de moindre contamination
s’étendant sur plus de 30 km2.
10 juillet 1981
L'honorable Marcel Léger, alors Ministre de l'Environnement prononçait
les propos suivants lors d’une conférence de presse relativement à la
situation de Ville Mercier : « Treize (13) ans plus tard, il est facile d'accuser nos
prédécesseurs. Mais l'analyse sommaire du dossier semble montrer que la
décision du temps n'a pas été prise en tenant compte des considérants
environnementaux. Le sol était particulièrement inadéquat. Il n'y avait, derrière
cette décision, aucune politique de gestion des déchets, c'est le moins qu'on
puisse dire, ni aucune technologie de traitement et d'élimination de ces déchets….
Nous payons aujourd'hui la négligence, l'insouciance et l'irresponsabilité de
décisions antérieures... »
1982
Adoption du Règlement sur la protection des eaux souterraines, pour
contrôler l’usage industriel des eaux souterraines et interdire tout
prélèvement d’eau dans un périmètre restreint établi autour des lagunes.
Printemps 1983
Le gouvernement accepte de faire construire et d’exploiter à ses frais une
station de pompage et une usine de traitement des eaux souterraines
contaminées. Or, certains problèmes liés au pompage causent un rejet de
plus de 18 millions de gallons d’eau fortement contaminée dans
l’environnement sans traitement préalable, et ce, à la connaissance du
ministère de l’Environnement
Février 1989
Une étude démontre que le système de pompage amorcé en 1984 permet
de confiner la contamination dans l’aquifère de sable, mais n’a pas l’effet
désiré sur la partie rocheuse. Le système de pompage en place ne permet
donc pas la réhabilitation du site.
1991
Un rapport d’enquête de la division d’enquête du ministère de
l’Environnement fait état de la découverte de 573 barils et 355
condensateurs contaminés par des BPC enfouis à proximité des
anciennes lagunes.
1992
Le gouvernement conclut, à la suite de l’étude Lapierre (Proposition d’une
stratégie d’intervention optimale pour la restauration du lieu contaminé de
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Ville Mercier) visant l’élaboration de scénarios de restauration du site, que
« la seule solution définitive qui s’offre aux autorités gouvernementales est donc
l’excavation de la totalité des sols contaminés localisés dans la zone de l’ancienne
lagune, suivie de leur gestion sécuritaire… »
4 novembre 1992 Lettre signée par M. Jean J. Charest, alors Ministre de l’Environnement
du Canada, adressée à la greffière de ville Mercier qui reconnait que pour
« restaurer définitivement le site, il faudra s’assurer d’extraire et de traiter en toute
sécurité les sols contaminés de la zone des anciennes lagunes. »
Novembre 1992
Le ministre de l’Environnement faisait signifier à Services
Environnementaux Laidlaw (Mercier) Ltée deux avis suivant l'article 115.1
de la Loi sur la qualité de l'environnement, lui ordonnant d’excaver tous les
sols contaminés et les résidus contaminés localisés sur les aires indiquées
en annexe de l’avis;
Janvier 1993
Laidlaw entreprend des procédures légales visant à obtenir de la Cour
Supérieure un jugement déclarant qu’elle ne pouvait être tenue
responsable de la contamination et mandate parallèlement un groupe de
travail composé de spécialistes canadiens et américains, qui conclut que
les travaux d’excavation étaient susceptibles d’occasionner des risques
pour la santé des travailleurs et de la population. Ils proposent plutôt de
maintenir le système de pompage existant, de recouvrir les lagunes d’une
couche imperméable et de réaliser des études supplémentaires pour
identifier les autres interventions possibles.
Cette action où Ville Mercier est mise en cause, est demeurée en suspens
pendant plusieurs années et a finalement été rayée du rôle en 2007 sous
prétexte de négociations prétenduement concluantes intervenues entre les
parties.
Janvier 1994
Dépôt du rapport du comité d’experts indépendants mandatés par le
ministère. Contraiement aux rapports précédents du ministère, celui-ci va
dans le sens préconisé par les experts de Laidlaw, en excluant également
l’excavation des sols comme solution de réhabilitation.
1994
Réalisation d’un rapport d’enquête et d’audience publique sur la
restauration du lieu contaminé de Mercier, du Bureau d’audiences
publiques sur l’environnement (BAPE). Le BAPE indique à titre de
conclusion : « Un mur de confinement devrait aussi être installé dès les
débuts de l'intervention. Pour la Commission, cette barrière physique
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devrait entourer les sables et les graviers les plus contaminés, ce qui
représente un confinement d'une superficie plus grande que celle
proposée par le comité d'experts du MEF. La Commission croit aussi
qu'une excavation partielle des sols à l'intérieur de cette zone
confinée permettrait d'extraire rapidement et dans la mesure du
possible les contaminants les plus facilement accessibles ».
1994 à auj. :
Aucune démarche afin de mettre en œuvre les recommandations
pourtant claires contenues au sein du rapport du BAPE et de la Proposition
d’une stratégie d’intervention optimale pour la restauration du lieu
contaminé de Ville Mercier déposé par M. Lapierre. Laxisme et
immobilisme du gouvernement dans le dossier, (mis à part deux nouvelles
études commandées par ce dernier).
1999 :
Dépôt par les trois municipalités concernées de Requête introductive
d’instance en dommages et intérêts contre le gouvernement, et
réclamation de la décontamination du site. Ces procédures parallèles à
l’action déclaratoire intentée sont nécessaires en raison du constat par les
municipalités de l’absence de volonté des parties de faire avancer ledit
dossier;
1999 à 2007
Aucune mesure significative du gouvernement, qui justifie son immobilisme
continu dans la restauration du site et ce contrairement à ce que
recommandait le BAPE. Il appuie son argumentaire sur les procédures
judiciaires intentées par Laidlaw (1993) et les municipalités (1999).
Mars 2007
Nouveau rapport d’expert commandé par le gouvernement (Rapport
Lefevbre). L’auteur indique que le BAPE a conclu qu’il ne fallait pas
soutenir l’excavation en tant qu’approche applicable. Pourtant, cette
prémisse sur laquelle s’appuie M. Lefebvre pour mettre de côté
l’excavation à titre de technique de décontamination est fausse, puisque le
rapport du BAPE concluait, bien au contraire, que l’excavation était
nécessaire.
Août 2012
Les trois municipalités vont de l’avant dans le dossier judiciaire entamé en
1999 afin d’obliger les parties défenderesses, incluant le gouvernement, à
prendre des actions précises pour la restauration du site des anciennes
lagunes de Mercier. Afin de réactiver le dossier judiciaire, elles
amenderont substantiellement l’action déposée au dossier de la Cour
Supérieure en 1999 et demanderont à ce que des mesures précises soient
prises.
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En résumé, depuis le dépôt du rapport du BAPE, en 1994, aucune mesure n’a été prise par le
gouvernement afin de procéder à la réhabilitation environnementale des anciennes lagunes de
Mercier. Ainsi, depuis plus de 40 ans, les municipalités, de même que leurs citoyens, se butent
à l’immobilisme, au laxisme et à la négligence de l’État dans ce dossier et doivent assurer
seules les responsabilités de cet enjeu majeur, qui prend des allures de saga
environnementale.
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