A la Gloire du Grand Architecte de l`Univers

Transcription

A la Gloire du Grand Architecte de l`Univers
A la Gloire du Grand Architecte de l’Univers
GRANDE LOGE DE FRANCE
Francs-Maçons de Rite Ecossais Ancien et Accepté
LIBERTE
EGALITE
FRATERNITE
Respectable Loge N°1408 : LE CHEMIN D’ANTHROPE
Question n°1 aux FF éloignés
***
« La recherche de la vérité est-elle plus facile à faire
individuellement qu’en groupe ? »
Planche tracée le 20 novembre 6010
par le Frère Marc P ...
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J’ai voulu choisir quelques extraits de notre rituel pour me guider dans
l’élaboration de ma réponse :
La déclaration de Principes du Convent de Lausanne de septembre 1875 :
- La FM proclame, comme elle a proclamé depuis son origine, l’existence
d’un principe Créateur sous le nom de Grand Architecte de l’Univers.
- Elle n’impose aucune limite à la recherche de la Vérité et c’est pour garantir
à tous cette liberté qu’elle exige de tous la tolérance
- Plus loin il est dit qu’elle est une école mutuelle et progressive…
Le Rituel d’ouverture au 1er Degré :
FF Second Surveillant, qu’avons-nous demandé en entrant dans le Temple ? (Je
pense qu'il s’agit des termes exacts mais à vérifier sur le Rituel que je n’ai pas)
- La Lumière VM.
Le tuilage des FF. Visiteurs :
Mon F. d’où venez-vous ?
- De la Loge de Saint-Jean, Vénérable Maître
Qu’en apportez-vous ?
- Soumission au Vénérable Maître, santé et prospérité à tous mes FF.
Que venez-vous faire ici ?
- Vaincre mes passions, soumettre ma
volonté et faire de nouveaux progrès dans la
F.M.
Ainsi nos textes associent dans notre
recherche la Lumière, la Vérité et le
G.A.D.L.U. Ils manifestent partout, tant dans
les moyens que dans les buts poursuivis les
concepts de groupe, de mutualisation, de
Fraternité en même temps que de liberté et
de justice, montrant que loin d’être
contradictoires, ces notions sont cohérentes,
voir indissociables.
Pour la Franc-Maçonnerie, la Loge est le
creuset de notre perfectionnement et de notre
progrès dans la recherche de la Vérité
Dans la Loge ouverte au grade d’apprenti, le VM. représente le Principe qui illumine
la conscience.
L’accès au VM. ne peut-être qu’indirect ; la parole ne peut lui être demandée que par
l’intermédiaire des Surveillants en fonction de sa place dans le Temple, nous
rappelant ainsi par analogie que tant que l’illusion et les préjugés nous aveuglent,
l’obscurité règne en nous et nous rend insensibles à la splendeur du Vrai.
La Lumière ne nous étant pas intelligible, nous ne pouvons nous adresser à elle
directement.
Le Rituel nous dit donc clairement à la fois que nous ne pouvons nous approcher de
la Vérité seul, que le travail pour progresser consiste en un travail sur soi et que nous
avons besoin des autres pour nous comprendre et nous exprimer.
A la question « Etes-vous F.M. ? », la réponse de l’Apprenti doit être «Mes FF. me
reconnaissent comme tel . « Pourquoi répondez-vous ainsi ? » lui est-il demandé :
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« Parce qu’un apprenti FM. doit se défier de lui-même et craindre de porter un
jugement avant d’avoir fait appel aux lumières de ses FF. ».
Se défier de soi-même amène soit à fuir de manière consciente ou inconsciente, soit
à accepter de prendre des risques.
En fait le premier dilemme de la recherche de la Vérité n’est pas de savoir s’il est plus
facile de la faire individuellement ou en groupe, mais de décider si on veut et si on va
pouvoir vraiment la faire ; c’est de s’engager en conscience qui est difficile.
En postulant à entrer en Franc-Maçonnerie, le candidat initie sa démarche grâce à
la conjonction de deux facteurs :
- une disponibilité de fond, un quelque chose en son for intérieur qui lui dit qu’il doit le
faire, un devoir inéluctable envers lui-même en quelque sorte ; tout à la fois il le doit, il
le veut et il en a aussi très peur.
- l’autre facteur est l’opportunité offerte par une personne de confiance, la chance de
pouvoir faire cette démarche accompagné, de ne pas être seul.
Morts à ce que nous étions, il paraît bien difficile de déplier seul les bandelettes
qui nous enserrent. Ensuite c’est l’aventure !
L’intuition nous fait appréhender les difficultés du chemin : sauvage est le vent qui
élague nos idées préconçues, nos préjugés ; apaisante et
féconde est l’eau qui nous soulage de nos erreurs, mais
redoutables en sont ses remous au risque de se noyer
dans le subalterne ou l’accessoire ; ravageur mais aussi
régénérateur sera le feu qui, nous l’espérons, nous
ranimera.
Plusieurs grandes difficultés guettent toute entreprise
solitaire :
- avoir les bons outils et savoir s’en servir malgré le
manque d’expérience
- être
en
mesure
de
pouvoir
contrôler
objectivement son travail
- faire le point par rapport à la direction, réajuster
l’orientation s’il y a lieu
- disposer de la présence à la fois d’un référentiel et de la diversité des
possibles
- garder sa lucidité en toute circonstance
La Franc-Maçonnerie et le Rite Ecossais Ancien et Accepté nous offrent
l’ensemble : les outils sont des symboles, la Loge, dans la globalité de ses aspects,
est notre Maître.
Elle est le lieu de toutes les rencontres, en particulier de soi-même : visite l’intérieur
de la terre et en rectifiant tu trouveras la pierre occulte des sages. Nos FF. sont les
miroirs vivants de notre être intérieur et également notre protection, notre rempart à
l’errance.
Car le principal écueil est soi-même, le danger notre ego qui dévie, fausse ou
voile notre vision des choses et donc falsifie notre jugement. C’est notre ego qui
soumet notre être véritable, le rendant passif, dépendant et le soumettant ainsi aux
passions.
Piloté par la peur de manquer, il concentre aveuglément, ici et maintenant,
l’énergie de la survie matérielle et physique de notre existence. Sa présence
incontrôlée nous prive du recul nécessaire à la découverte du sens et de la mise en
perspective. Il nous prive dans nos pensées de la présence permanente de l’autre
dans sa diversité, de la différence sans laquelle il ne peut y avoir de mesure de ce qui
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est bien ou mal ni ouverture à la pensée métaphysique. L’unité ne se décrète pas,
elle se construit en intégrant le tout, comme le dit notre Rituel.
Soumettre ses passions n’est pas tuer notre ego mais c’est travailler à l’isoler pour
mieux le maîtriser et ainsi progresser vers la Lumière.
Et je pense qu’être seul dans ce travail est la véritable difficulté.
D’ailleurs les ordres monastiques gardent dans leurs pratiques pleine conscience
de cette difficulté. J’ai organisé à titre privé il y a deux mois une rencontre entre trois
moines bouddhistes et le Frère Hôtelier de l’Abbaye cistercienne de Sénanque à côté
de chez moi. A la fin de notre visite le F. cistercien demande au grand Vénérable quel
sujet aimerait-il aborder grâce à cet échange. Et le Frère bouddhiste dit la chose
suivante : Je n’aurais jamais pu entrer ni progresser dans la voie sans mon Maître,
mais je me rend compte en même temps, avec le recul, que je n’ai pas le même
chemin que lui. Dit en d’autres termes, chaque chemin nous est propre, mais il ne
peut s’accomplir sans Maître.
La réflexion s’est alors prolongée sur la vie monastique, en particulier sur la
nécessité du groupe dans la recherche spirituelle.
A Sénanque, comme dans toute Abbaye je pense, les moines se réunissent
chaque jour (ici à 20h) autour de leur père Abbé dans la salle capitulaire ou salle du
chapitre pour l’écoute d’un chapitre de la règle de Saint Benoît.
C’est là que les moines prennent les décisions concernant la communauté, que
s’effectuent les prises d’habit, les professions monastiques ou l’élection du Père
Abbé. C’est là également que les moines rapportent leurs
travaux, leurs manquements à la règle, leurs difficultés. Ce
qui caractérise la salle d’origine, encore intacte aujourd’hui,
c’est la finesse de son acoustique : la parole s’y fait
entendre sans effort grâce notamment à la présence de six
croisées d’ogives. C’était la seule pièce où il était permis
de parler : c’est celle où on a voix au chapitre !
Les moines bouddhistes de la tradition Theravada
historiquement la plus ancienne, encore appelée Hînayâna
ou Le Petit Véhicule, ont à l’image de la vie du Bouddha,
la tradition de se retirer en forêt pour s’isoler du monde, trouver la paix des sens
comme de l’esprit et méditer.
J’ai appris à cette occasion qu’ils ont l’obligation de revenir au Temple une fois par
mois ou de se regrouper au nombre de quatre minimum pour y réaliser les mêmes
pratiques : lecture de la règle en langue Pâli, avancée sur le chemin, écarts, vie de la
communauté. A défaut d’être devenu l’Eveillé soi-même, les repères finissent par
s’estomper avec le temps ; trop longtemps seul dans la forêt, on finit par se perdre !
S’affronter seul à soi-même dans ce long processus qu’est la recherche de la
Vérité, qui plus est plongé dans le monde profane, est presque mission impossible
tant les écueils peuvent être nombreux : voies sans issues, doutes dépressifs,
renoncements inavoués, tricherie avec soi, exposition aux fausses idées, acceptation
tacite de son ignorance dans le meilleur des cas, ou encore frustrations, critique
systématique, rejet d’autrui, des hiérarchies des valeurs, des compétences et des
intelligences, bref de l’autorité au sens de la supériorité des connaissances et du
mérite, puis haine et tyrannie compensatrice pour le pire. Cela ne semble-t-il pas
rappeler un peu trop le monde dans lequel nous vivons ?
Il serait bien présomptueux de penser être plus fort seul contre tous, car il ne peut
s’agir que d’être contre à ce stade. Ce seul signifie une unicité fragile isolée,
vagabonde, errante dans l’attente d’une lumière sur le chemin. Etre fort c’est le
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devenir par le travail, construire son propre Temple pour qu’il puisse s’intégrer à
l’ensemble, découvrir et tailler sa pierre pour en faire un édifice harmonique, à l’abri
des vicissitudes contingentes. La chance d’être en Loge est de vivre dans un monde
dont la vocation est d’être à l’image du grand tout, un monde ordonné et orienté,
créateur de sens. Chercher la Vérité, c’est rechercher en soi et autour de soi l’unité,
principe de toute énergie créatrice.
L’humilité est-elle un préalable ou le fruit de notre travail ?
« La Franc-Maçonnerie n’impose aucune limite à la recherche de la Vérité et c’est
pour garantir à tous cette liberté qu’elle exige de tous la tolérance » nous annonce la
G.L.D.F. dans ses principes.
Tolérer, c’est accepter que l’autre soit ce qu’il est, - je ne dis pas accepter dans
ses actes ce qui peut nuire à mon intégrité ou à celle de la société - ; c’est accepter
les différences et donc s’accepter soi-même, l’un faisant progresser l’autre.
Je crois que c’est l’acceptation qui ouvre le chemin de la véritable humilité.
Quant à Sénèque et Marc Aurèle, ils nous
expliquent en substance que l’acceptation de la
mort éclaire la vie. Il faut avoir respiré sa
petitesse pour espérer quelque grandeur. Pour
ma part, je voudrais vous dire que je ressens
cette acceptation, qui se traduit me semble-t-il
par le sentiment d’abandon de soi - mais
pouvons-nous avoir autre chose qu’un
sentiment tant qu’on ne l’a pas vécu en Vérité?
- que je ressens cette acceptation, disais-je, à la
fin de nos travaux, dans notre chaîne d’union,
les pieds sur terre, la tête dans les étoiles et les
cœurs unis. Ainsi nous est-il permis d’éprouver
le consentement et au fond, c’est peut-être cela
notre salaire.
Et puisque j’ai l’opportunité aujourd’hui de pouvoir échanger avec vous mes FF.,
permettez-moi de vous dire un passage des Elégies de Duino (Neuvième Elégie), de
Rainer Maria Rilke, qui n’est pas sans rapport avec notre recherche du sens :
Pourquoi, s’il est possible d’accomplir le temps de l’existence,
comme fait le laurier par un vert plus sombre que tout autre vert,
et ces ondulations légères en bordure des feuilles, tel un sourire du vent ;
pourquoi faut-t-il alors être rivé à l’humain,
fuir le destin tout en l’appelant ?
Oh ! non pas que le bonheur existe :
Avantage provisoire d’une défaite prochaine.
Non point par désir de connaître, pour exercer le cœur,
On trouverait tout cela dans le laurier…
Mais parce qu’être ici est beaucoup ;
qu’apparemment tout ici a besoin de nous ; ces choses éphémères,
étrangement nous concernent.
Nous les plus éphémères.
Une fois chaque chose, seulement une fois.
Une fois et jamais plus. Et nous aussi
une fois. Jamais plus.
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Mais ceci, avoir été une fois - même si ce ne fut qu’une fois avoir été de cette terre, cela semble irrévocable.
Ainsi hâtons-nous vers l’accomplissement,
afin de le contenir entre nos mains nues,
dans le regard trop plein et le cœur muet,
nous voulons devenir accomplis. – A qui l’offrir ?
Il serait bon de tout garder, à jamais… Pourtant, dans l’ailleurs
hélas ! Qu’emporterons-nous ?
Non pas le regard lentement appris, ni rien de ce qui est arrivé ici.
Rien.
La douleur cependant ? Oui, avant tout, cette pesanteur,
cette longue expérience de l’amour – bref, rien que de l’indicible…
J’ai dit VM
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