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DIX-HUITIEME ANNEE. - N° 5053.
AUROUX STEPHANE
Numéro étudiant : A21000141
Code INE : 0202026160
LE NUMERO : 0,80 FR
Edition de
Algérie (messagerie-avion) : 35 fr. - 0,35 NP
Maroc : 40 fr.mar.; Tunisie : 35 m.; Italie : 60l.
Belgique-Luxemb : 3,50 fr.; Autriche : 3 sch.
Espagne : 3,50 pes ; Allemagne : 0,40 DM.
Grande-Bretagne : 8 d. ; Pays-Bas : 0,30 fi.
Portugal : 3 escudos ; Suisse : 0,35 franc.
5h00
MEMOIRE DE FIN D’ETUDES
Master 2 Création et gestion de l’image
numérique (Aix marseille Université)
Tarif des abonnements à l’intérieur.
ANNEE 2014-2015
COMPTE CHEQUE POSTAL :
AIX EN PROVENCE N° 4207-23
JURY PRESIDE PAR Renaud BEZY, Pascal
CESARO ET Francois LANDRIOT
Adresse télégraphique : KOMMANDERART
Tel : PRO. 91-29 ; TAI. 76-60
Mardi 1er Septembre 2015
Rédaction - Administration : 9 Place de l’humanité - Novi Sad XI
Directeur : Uberartoffizer der Artruppen
SOMMAIRE
I/ Problèmes d’ordre
philosophique
II/ Prétendre la réalité
pour mieux discourir
III/ Artruppen,
d’un extrème à un autre
La perception, source de toute
représentation (page 11)
Une révolution dans les règle de
l’Art (page 11)
Présentation (page 11)
L’image par rapport à la condition humaine (page 11)
Une récupération politique
La recherche de la vérité
Cross Média et Activisme
(page 11)
Symbolique du groupe (page 11)
(page 11)
(page 11)
Drapeau officiel des Artruppen, groupe médiactiviste craint de tout
les traîtres répendant le Rückstartding sur le monde.
Introduction
L’homme est un être de culture, c’est à dire
qu’il se distingue des autres espèces animales car
il se construit sa propre nature. Se cultiver signifie
«prendre soin» de soi au même titre que de son âme,
selon l’étymologie latine «cultura». Ainsi, la nature
de l’être humain n’est qu’artificielle, dans le sens ou
elle est fabriquée de toute pièce et transmise de générations en générations par le biais de nombreux domaines tels que l’histoire, la religion, la technique, le
travail, l’art et le langage. La culture permet à l’être
humain de s’identifier à un groupe et à un ensemble
d’individus qui l’ont précédé afin de se référencer autour de croyances communes, coutumes, traditions et
interdits. L’Homme est donc un animal de culture qui
agit selon des acquis artificiels et non innés, ce qui ne
le détermine pas selon ses instincts.
Le langage est un sujet de la culture qui est
considéré comme un cercle vicieux philosophique.
Comment aborder le langage en utilisant le langage?
La linguistique, ou l’étude du langage, a été inventé par Ferdinand de Saussure en 1916 grâce à son
«Cours de linguistique général». Il s’agit d’étudier le
langage comme un fait social et non dans son histoire,
son étymologie... Le fait de parler est une fonction
sociale de la communication entre les individus. La
langue est commune mais la parole est personnelle,
ce qui amène à une forme de réalité linguistique.
L’un des enjeux de la langue comme instrument de
communication est de faire que tout ce que l’on dit
est vrai.
La parole est une source de pouvoir dans le
sens ou un discours est efficace du moment qu’un
nombre conséquent de personnes l’approuvent, d’où
le principe même que ce dernier n’a pas comme impératif premier d’être vrai. Le concept de la parole
n’a pas de réalité extra linguistique puisque le sens
des mots est lié à la convention qui évolue suivant le
temps, le contexte. De ce fait, l’être humain apporte
des arguments dans son discours dans le but de modifier l’opinion ou le jugement de son ou ses interlocuteurs. Argumenter est donc une stratégie qui peut se
définir par l’approche de deux verbes : convaincre et
persuader.
Pour convaincre, celui qui argumente fait appel à
la raison, aux facultés d’analyse et de raisonnement
par le biais d’éléments de preuve et d’une formulation de thèse. L’éméteur du discours peut, si besoin
est, faire aussi appel à la persuasion, ou invoquer les
sentiments, les émotions en évoquant un système de
valeurs, de références culturelles communes afin de
provoquer un phénomène d’identification par le biais
de l’indignation ou de l’enthousiasme.
Mais quand le langage et ses formes d’argumentations ne suffisent pas, l’action d’un ou de plusieurs individus devient un argument complémentaire,
d’où le terme «activisme». Cette pratique qui préconise l’action directe de façon à peser sur un problème
auquel un ensemble de personnes peut être confronté,
et sans avoir besoin pour cela de faire appel à un intermédiaire ou personnalités politiques. Avec l’essor
d’internet dans les années 2000 et de nouvelles techniques de communication, les groupes activistes se
retrouvent confronté à une mutation révolutionnaire
par le biais d’une nouvelle forme de militantisme : le
«Médiactivisme», terme employé par Olivier Blondeau et Laurence Allard dans leur ouvrage intitulé
«Devenir média, l’activisme sur internet entre défections et expérimentations» dans lequel ils retracent
l’histoire et l’évolution de l’activisme médiatique. En raison de l’influence désormais dominante
de l’image dans la vie moderne, l’individu accorde de
plus en plus une primauté de l’image. Spontanément,
l’image véhicule un caractère d’objectivité jusqu’à
croire d’avantage à ce que l’on voit même si, selon
Platon, l’image n’est qu’une fausse représentation
du réel, comme une ombre, un reflet, une mise en
scène. Cette situation amène de plus en plus de ques-
EU
R
tionnement sur la valeur de la parole comparée à une
image. C’est pour cette raison que la réflexion de ce
mémoire portera sur la conviction ou la persuasion que
peut susciter une image auprès de son public, au point
de pouvoir perturber le jugement et la vision du réel.
Pour ce faire, nous étudierons dans un premier temps
aux sources même de la perception dans l’objectif de
donner des définitions précises sur le fonctionnement
de ce qui fait de l’Homme un être de perception. Dans
un deuxième temps, il s’agira de donner des exemples
concrets dans la politique, l’histoire de l’art ou encore
les faits divers afin d’introduire dans un dernier les
Artruppen, un groupe d’activistes factices et cyniques
à l’égard de l’art contemporain utilisant tous les supports de communication possible afin de persuader et
convaincre son auditoire.
EN
PE
TRANSKUNST
HINTERHART - Mardi 1er Septembre 2015
problèmes
d’ordre
philosophique
La perception,
source de toute représentation
L’Homme perçoit le monde
comme un objet. Ceci est la différence fondamentale entre un sujet
et un objet. Tout être vivant quel
qu’il soit perçoit le monde qui l’entoure de manière différente, que
ce soit tactile, visuelle... Ainsi un
cheval réagira de manière craintive face à un objet qu’un Homme
n’aura pas craint. La perception a
pour base les sens et c’est ce qui
va être développé dès maintenant.
La sensation, c’est avant
toute chose l’acte ou celui qui perçoit et celui qui se fait percevoir (un
objet par exemple) se rejoignent et
se mettent en contact. Or, chez les
Hommes et les animaux, il existe
des sensations diverses qui viennent
des cinq sens. Le premier des sens
évoqués est le toucher qui scientifiquement parlant, est plus sensible
lorsque la partie du corps qui rentre
en contact possède le plus de nervures. C’est le cas, de la bouche, de
la langue ou encore du sexe. Le sens
du toucher permet selon Aristote la
certitude, ce qui explique le statut
de sens le plus basique et répandu.
La peau est l’intermédiaire sensoriel
car elle peut percevoir un éventail
de sensations conséquent comme le
chaud, le froid, l’humide, le sec, la
gravité, le rugueux, le lisse... Cependant, l’acide, le sucré, le salé l’amer
sont des exemples de sensations que
le sens du goût réceptionne. Situé
dans les papilles gustatives avec
comme intermédiaire la salive, le
goût est, toujours selon Aristote,
le sens de l’équilibre, lié à la qualité, d’où l’expression : « Avoir du
goût ». L’odorat est le troisième sens
de la liste ; c’est le sens des odeurs
par le biais de l’air et des parfums.
C’est grâce notamment à ce sens
que l’être humain peut se faire une
idée de l’aura de son interlocuteur,
au même titre que les animaux qui
peuvent détecter cette trace invisible à partir d’une certaine distance.
L’odeur est donc liée à l’identité
d’une personne, ce qui fait de l’odorat le sens de la finesse, d’où l’expression « ne pas sentir quelqu’un ».
L’ouïe, quant à lui, est le sens de
l’équilibre saisissant les sons portés
par les différents milieux. Il s’agit
du sens de l’harmonie. L’oreille est
à l’ouïe ce que l’œil est à la vue. En
effet, le sens de la vue avec pour
objet de perception les couleurs. Il
perçoit le bleu, le rouge et le vert,
3 couleurs fondamentales avec lesquelles il peut être réalisé toutes les
autres couleurs. Aussi la forme de
l’objet dépend de la couleur. Il est
possible de donner l’illusion de la
profondeur grâce à la couleur et aux
dégradés tout en restant proche du
réel comme les impressionnistes.
Ainsi, la forme est par définition
la couleur qui se détache et non
l’inverse, ce qui rend le sens de la
vue fondamentale pour l’Homme.
La réalité possède donc cinq
portes d’entrée dans le conscient du
corps humain, correspondant aux
différentes manières que l’Homme
peut percevoir son environnement.
Cependant, si le réel est diffractée
en cinq aspects, comment se fait il
que ces cinq aspects puissent être fusionnés ou coordonnés en une seule
et même unité perceptible ? Comment peut on être sûr que tout ce que
l’on perçoit provient du même réel ?
Autant de question que le philosophe Hume s’est posé autour
d’une possible unité de perception.
Il en a déduit deux pistes : soit la
perception se décompose en sensations et se reproduit en l’Homme
par la perception, soit il produit et
associe les sensations entre elles.
Il existe en tout cas deux critères
irrévocables qui sont la simultanéité entre l’objet et les sens ainsi
que la continuité. Hume va jusqu’à
conclure que l’Homme ne ressent
pas le réel, il le produit. Si l’idée
de séquencer les sensations seraient
mis en pratique, alors l’être humain
ne les percevraient pas de la même
manière, ce qui est uni dans la réalité ne l’est pas forcément car l’unité
de perception crée les associations.
Désormais la question de l’unité de
perception se pose, d’où vient elle ?
Les différents caractères de
la perception
La perception est ce qui
est considéré comme une connaissance immédiate. Pour Aristote,
« au même moment ou je vois, j’ai
vu ». Or, « je ne peux pas dire qu’au
même moment ou j’ai pensé, je
pense ». Il en déduit que la sensation est instantanée. La sensation est
également passive contrairement à
la réaction qui est active car réagir
suite aux sensations perçues est une
cause attribuée à celui qui réagit.
La perception sépare l’intérieur de
l’extérieur, d’où le fait que les espèces s’adaptent à l’environnement
et aux changements externes à eux
même. Elle crée donc un lien entre
l’extérieur et l’intérieur. Il existe
une frontière entre ces deux univers.
L’empathie (du grec ancien
ἐν, dans, à l’intérieur et πάθoς, souffrance, ce qui est éprouvé) est une
notion désignant la « compréhension » des sentiments et des émotions
d’un autre individu, voire, dans un
sens plus général, de ses états nonémotionnels, comme ses croyances
(il est alors plus spécifiquement
question d’« empathie cognitive
langage courant, ce phénomène
est souvent rendu par l’expression
« se mettre à la place de » l’autre.
Cette compréhension se produit par
un décentrement de la personne (ou
de l’animal) et peut mener à des actions liées à la survie du sujet visé
par l’empathie, indépendamment, et
parfois même au détriment des intérêts du sujet ressentant l’empathie.
Dans l’étude des relations interindividuelles, l’empathie est donc différente des notions de sympathie, de
compassion ou de contagion émotionnelle qui peuvent en découler.
Le terme empathie a été créé
en allemand (Einfühlung, « ressenti de l’intérieur ») par le philosophe Robert Vischer en 1873 dans
sa thèse de doctorat «Über das optische Formgefühl» pour désigner
l’empathie esthétique, le mode de
relation d’un sujet avec une œuvre
d’art permettant d’accéder à son
sens. Adam Smith utilisait le terme
de « sympathie » pour désigner ce
qui est actuellement considéré sous
le nom d’empathie (non esthétique).
Le mot « empathie » fut par la suite
réutilisé en philosophie de l’esprit
par Théodore Lipps (une influence
reconnue de Sigmund Freud et des
phénoménologues) pour désigner,
dans ses premiers écrits, le processus par lequel « un observateur se
projette dans les objets qu’il perçoit ». Plus tard, Lipps introduisit
la dimension affective dont héritera
notre conception moderne : l’Einfühlung caractériserait par exemple
le mécanisme par lequel l’expression corporelle d’un individu dans
un état émotionnel donné déclencherait de façon automatique ce même
état émotionnel chez un observateur.
La perception est infiniment
plus riche que l’image. La perception se représente l’objet en sa présence alors que l’imagination suscitée pour créer l’image se représente
l’objet en son absence. Lorsque l’on
perçoit, on revient à la sensation.
Les problèmes de la
perception
Quel est le lien entre l’extérieur et
l’intérieur?
Comme il en a été question
précédemment, les choses sont perçues différemment selon les espèces
animales, du bœuf en passant par la
grenouille. Même entre les hommes,
la perception du monde est nuancé
en fonction de la culture de l’individu. D’un point de vue purement
biologique, les Hommes peuvent
interpréter des signaux différents
en fonction de leur propre organe.
Dans un cas extrême, un daltonien ne perçoit pas les couleurs. La
preuve en est par le biais de l’existence du dogmatisme ou un groupe
a la volonté d’imposer son point de
vue à un autre groupe. La problématique vient du fait qu’il ne faut pas
prendre la perception comme une relation d’identité mais plutôt comme
une relation de cause à effet. Le réel
frappe bel et bien nos sens et à donc
une incidence sur nos sensations.
Les connaissances sensibles
Les connaissances sensibles
s’opposent aux connaissances intelligible. Elles se font connaître de
manière sensorielles ou abstraites.
Une connaissance sensible est singulière, particulière et concrète
contrairement à la connaissance intellectuelle qui est une connaissance
universelle qui pose des pensés universelles. A titre de précision, les
animaux ne peuvent pas avoir de
connaissances universelles mais des
connaissances sensibles car ces derniers ne connaissent pas la science
à l’instar d’avoir un comportement instinctif qui le différencie de
l’Homme. La connaissance sensible
HINTERHART - Mardi 1er Septembre 2015
qui rentrent en compétition sur des
domaines comme les souvenirs familiaux ou touristiques, les exhibitions narcissique de soi, la pornographie privée, l’information, le
journalisme, la documentation, la
substitution au texte, l’archive ou
encore l’art.
s’éclate en plusieurs parties, autant
qu’il en faut pour se jumeler avec
les sens. Elle rend donc impossible
les jugements universels et entraîne toujours des contradictions.
Platon et l’allégorie de la
caverne
Chez les grecs, le terme
«vertu» a des valeurs d’idéal, ce qui
résume en quelque sorte des milliers
de questions relatives à la condition humaine telles que la question
de l’excellence, le juste, le beau.
Platon a longtemps chercher à englober l’ensemble de ces questions
sous un même terme. Il a remarqué que les Hommes n’arriveront
pas à définir ce qu’est le beau car
ils sont contradictoires par nature.
Les Hommes sont prisonniers et
privés de la connaissance sensible
car ces derniers se servent uniquement de la connaissance intellectuelle pour tenter une universalisation globale. Mais au fil du temps, il
s’avère que cette expérience est un
échec car il ne suffit pas d’être brave
pour être idéal. Le risque d’une
universalisation par la connaissance intelligible est que l’être humain peut être prisonnière d’une
image. L’exemple le plus flagrant
de nos jour reste la vision de l’excellence dans le cinéma américain
ou l’idée du héro qui n’abandonne
jamais quelque soit la situation.
En d’autres ouvrages, tel
qu’« Hippias », Platon s’est également posé la question de la beauté
pour rester dans la critique de domination des connaissances intelligible. Tel qu’il le décrit, la beauté
est «ce qui brille», ce qui resplendit.
Si l’on suit cette définition, il suffirait alors d’habiller d’or et de diamant un objet afin de le rendre beau.
Il en résulte alors des contradictions
et une conclusion claire: la beauté
n’est pas décrite en fonction de la
matière dans laquelle il est constitué.
Dans « Ménon », Platon
cherche ce qu’est la vertu mais surtout si la vertu s’enseigne. L’exemple
par excellence en Grèce d’une entité définissable de vertueuse est
Périclès mais ironiquement, sa
descendance ne l’est pas. Or, il est
important de garder à l’esprit que
l’excellence diffère en fonction de
la culture de l’individu. Socrate
a par ailleurs affirmé que Ménon
n’arrive pas à penser car il est pris
par ses connaissances sensibles.
L’allégorie de la caverne
est la représentation de cette problématique par la mise en scène de
la connaissance ou de la sagesse.
Comment passer de l’engourdissement de l’opinion à la lucidité d’un
sage? De la connaissance sensible à
la connaissance intelligible? Dans
une demeure souterraine, en forme
de caverne, des hommes sont enchaînés. Ils n’ont jamais vu directement la lumière du jour, dont ils ne
connaissent que le faible rayonnement qui parvient à pénétrer jusqu’à
eux. Des choses et d’eux-mêmes,
ils ne connaissent que les ombres
projetées sur les murs de leur caverne par un feu allumé derrière
eux. Des sons, ils ne connaissent
que les échos. « Pourtant, ils nous
ressemblent ». Que l’un d’entre eux
soit libéré de ses chaînes et accompagné de force vers la sortie, il sera
d’abord cruellement ébloui par une
lumière qu’il n’a pas l’habitude de
supporter. Il souffrira de tous les
changements. Il résistera et ne parviendra pas à percevoir ce que l’on
veut lui montrer. Alors, Ne voudrat-il pas revenir à sa situation antérieure ? S’il persiste, il s’accoutumera. Il pourra voir le monde dans
sa réalité. Prenant conscience de sa
condition antérieure, ce n’est qu’en
se faisant violence qu’il retournera
auprès de ses semblables. Mais
ceux-ci, incapables d’imaginer ce
qui lui est arrivé, le recevront très
mal et refuseront de le croire : « Ne
le tueront-ils pas ? ». Il se trouve
que l’origine des images que reçoivent les prisonniers de la caverne
sont l’œuvre des sophistes qui montrent quelque chose dans le but d’en
cacher une autre. La conclusion de
l’entretien est qu’il est nécessaire
de sortir de la connaissance sensible
car le monde sensible n’est qu’une
pâle copie du monde intelligible.
L’empirisme s’oppose à
l’idéalisme des peuples selon Locke
et Hume. Ces derniers se sont opposés à Descartes et sa conception
des idées innées telles que Dieu,
les substances, les libertés. Les empiristes pensent que nos connaissances dérivent de nos sens et que la
vérité d’une connaissance, c’est que
l’on puisse la ramener à une sensation élémentaire. Pour preuve, il est
difficile de sentir une idée comme
l’existence d’un dieu. Hume montre
par ailleurs que l’idée de dieu est
creuse car les Hommes ne le voit
pas comme l’idée de l’âme, du
monde, de la matière, de la liberté.
Il critique la causalité ou l’idée de
cause à effet n’est qu’une relation de
succession sans pour autant être liée.
Trouver dans la connaissance sensible la confirmation des connaissances, telle est le cheminement de
l’empirisme. Comment peut on passer de la sensation à l’idée? En guise
d’exemple, l’idée d’une rose vient de
la perception du végétal par les sens
comme le toucher, la vue, l’odeur;
la composition de ces trois sens
donne naissance à la perception, qui
donnera à son tour naissance à un
concept commun. L’idée est donc
une sensation affaiblie mais qui
fait partie d’une théorie empiriste
tournant autour des expériences.
La perception est une
connaissance qui fait de tout être
un sujet devant les objets. Les perceptions, pour que l’être en soit sujet, doit en avoir conscience car la
perception suppose la conscience.
Le questionnement qui s’ensuit est
si la sensation est objective ou subjective. La sensation est elle une
représentation de ce qui nous apparaît? Dans ce cas là, elle serait objective. La perception nous ramène
à des éléments extérieurs et s’impose à nous. Enfin, il est difficile
de trancher sur celui qui a raison
entre Platon et Hume. D’un côté, la
connaissance sensible est tellement
multiple qu’il faut qu’un esprit rassemble les choses pour éviter que la
connaissance sensible s’apparente
à celle des animaux. Cependant,
Platon a raison sur le fait que les
points communs structurent la réalité et que l’empirisme n’est pas forcément lié aux sciences puisque la
gravité n’est pas perceptible lors de
la vie de tous les jours. D’un autre
côté, l’empirisme critique les idées
dites de l’innéisme qui viennent de
nulle part et qui n’ont aucuns fondements. En partant du principe
que tout ce que l’on peut concevoir
vient des sens, comment peut on
lier l’extérieur et l’intérieur? Pour
Aristote, nous pouvons imaginer
qu’à l’intérieur des objets, il existe
deux connaissances : les qualités
sensibles et les quantités qui définissent ces derniers. Tout ceci renvoie
à un sujet dans le sens substantiel.
Quant aux apparences, elles ne font
pas l’objet mais il faut quand même
qu’il y en est pour que l’objet existe,
ce qui rend l’objet et les apparences
complémentaires. Le paraître porte
donc à la connaissance de l’être qui
porte les apparences sur lui même.
L’image par rapport à
la condition humaine
Maintenant que nous avons réfléchi à la perception comme une
connaissance qui fait de l’Homme un sujet devant un objet par le biais de
ses sensations, nous pouvons nous questionner sur l’image crée en elle
même. Sont elles dangereuses, possèdent-elles un pouvoir d’ordre maléfique, peuvent elles envoûter, tromper, abuser les esprits ?
Une étude a recensé en 2001 plus de 86 milliards de photographies
prises dans le monde dont la plupart sur support argentique ou papier. Une
donnée à mettre en contraste en 2012 avec plus de 850 milliards de photographies prises jamais développés, juste mise en ligne sur des réseaux
sociaux. Ces éléments démontrent l’évolution d’une société de plus en plus
submergée par les images avec un regard qui, irrémédiablement, devient de
moins en moins attentif, attaché même si certains, parmi le flot d’images
qui leur sont proposés à la TV, sur internet ou dans la rue, feront attention
aux petits détails que la grande majorité a échappé.
La société est passé d’un statut où les images même privées pouvaient être rendues publiques, à celui où toutes les images sont publiques
d’une manière ou d’une autre. La révolution polaroïd, une société ayant
commercialisé un procédé de photographie à développement instantanée en
1948, a rendu enfin possible un voyeurisme d’ordre privée jusqu’ici interdit
par la présence du professionnel du développement au cœur du processus
de révélation. Elle est de nos jour bien dépassée par la le numérique qui
ne rend même plus nécessaire le développement et pulvérise la distinction
entre privé et public par la diffusion facile et instantanée. L’image y est dans
beaucoup de cas retouchée, diffusée, mixée et transformée. Les chiffres parlent de la massification des pratiques, autant professionnels qu’amateurs,
Autant de questionnement
que se posent Laurence HansenLove dans son livre intitulé « Les
images peuvent-elles mentir ? » datant de 2007 dans lequel elle considère l’image comme polysémie (du
latin « imago » : portrait, ombre d’un
mort, copie, comparaison) est la reproduction inversée qu’une surface
polie donne d’un objet qui s’y réfléchit. En physique corpusculaire,
les images sont considérées comme
des réalités solides et objectives. Un
photogramme est par exemple l’enregistrement d’une image sur une
pellicule et l’image rétinienne se
forme par impression des rayons lumineux sur la rétine. Les images de
ce types, autant naturelles qu’artificielles soient elles sont produites et
circulent indépendamment de ceux
qui les perçoivent et qui leur donnent éventuellement un sens. Dans
un deuxième temps, elle considère
aussi l’image comme la représentation ou la reproduction d’une autre
chose, une définition essentiellement
destinée au monde des arts, même
si cette dernière est la définition la
plus courante. Cependant, certaines
images sont conformes au plus près
possible de leur modèle comme avec
la peinture académiques tout comme
elles ne peuvent pas l’être comme
dans l’art moderne ou abstrait. Enfin, dans un troisième et dernier sens,
l’image est une production mentale
liée à l’imagination et c’est à ce titre
qu’elle est tenue en suspicion. Dans
la tradition philosophique rationaliste, l’image est opposée à l’idée et
au concept qui, en tant que productions conscientes de l’entendement,
sont seules capables d’être claires et
distinctes ; l’image en effet ne relève
pas de la pensée pure mais de l’interaction du corps et de l’esprit et,
dans cette mesure, elle ne peut nous
délivrer aucune certitude.
Par extension, l’image recouvre
tous les ensembles d’éléments, inventions, métaphores, figures littéraires ou formes diverses de fictions
qui font référence à une réalité distincte voire même imaginaire en
raison d’une approche similaire. Par
exemple, les productions oniriques
sont des images ou des représentations d’une réalité qui n’a pas eu
lieu, au même titre que les mythes et
les fictions. Dans cet usage élargi et
vulgaire du mot image, le champ de
l’imagination tend à recouper celui
de la représentation du réel et de ce
point de vue les images peuvent être
accusées de mentir.
Il est possible qu’une image
peut être l’illusion de la représentation la plus proche possible du
réel. Une ambition qui fut considéré
comme un gage de qualité durant
l’Antiquité jusqu’à l’émergence des
avant gardes du début du Xxème
siècles comme nous montre le mythe
de Zeuxis et Parrhasios raconté par
Pline l’Ancien, (en latin Gaius Plinius Secundus), né en 23 après J-C.
um (l’actuelle Côme) dans le nord
de l’Italie et mort en 79, à Stabie,
près de Pompei, lors de l’éruption du
Vésuve, un et écrivain et naturaliste
romain du Ier siècle, auteur d’une
monumentale encyclopédie intitulée
« Histoire Naturelles » rendue public
vers 77.
Zeuxis ou Zeuxippos est un
peintre grec d’Héraclée qui aurait
vécu de 464 à 398 avant J-C.. Jouant
sur les couleurs et les contrastes
d’ombres et de lumière, il excellait à
donner l’illusion de l’espace. On dit
que c’est lui qui a introduit l’esthétique du trompe-l’oeil dans la peinture grecque. Il était en concurrence
avec Parrhasius d’Ephèse, autre excellent peintre dont on disait qu’il
était inégalable dans la finesse des
lignes et des contours. Pour se départager, ils se mirent d’accord sur
un «duel pictural». Chacun aurait à
peindre une fresque, et un jury les
départagerait.
Zeuxis utilisait tous les trucs du
trompe-l’oeil. Ses tableaux frappaient dès le premier regard, tandis
que Parrhasius apparaissait comme
le challenger car il fallait du temps
pour apprécier sa peinture. Zeukis
se présenta donc le premier, sûr de
lui. Il souleva le rideau qui cachait
sa peinture, et l’on découvrit une
simple coupe de fruits, avec des
poires et du raisin. Pendant un long
silence, le jury contempla l’oeuvre,
quand soudain un oiseau se posa à
côté d’elle et commença à picorer la
grappe. Se heurtant au mur, il tomba
sur le sol. Tout le monde était stupéfait. Le jury n’aurait pas à se prononcer, car l’oiseau lui-même avait pris
la décision.
C’est alors que Parrhasius
se présenta. Chacun se tourna vers
le mur et attendit. Parrhasius restait
parmi la foule. Allons, regardons!
dit Zeukis. Il faut que Parrhasius
soulève le rideau, mais ce dernier
ne bougeait pas. La foule commença
à grommeler. Mais alors, qu’est-ce
qu’il attend? Le jury insistait. C’est
alors que Parrhasius répliqua : Je
n’ai rien à faire, vous regardez déjà
l’oeuvre. Alors seulement, on se rendit compte qu’il avait peint un rideau
de manière tellement réaliste que
personne ne s’en était rendu compte.
Zeukis ne discuta pas la victoire de
Parrhasius. Ce dernier avait réussi à
tromper des êtres humains, c’est-àdire des personnes qui s’attendaient
à être trompées, et non pas un animal, qui ne cherchait qu’à s’alimenter.
la culture et de la raison. Terroriste,
provocateur, iconoclaste, refusant
toute contrainte idéologique, morale
ou artistique, il prône la confusion,
la démoralisation, le doute absolu et
dégage les vertus de la spontanéité,
de la bonté, de la joie de vivre.
Le mouvement Dada fut
l’une des premières avant garde, si
ce n’est la première à faire distinguer sa démarche artistique et son
approche de l’image d’une autre par
le biais d’un athéisme et des limites
psychologiques de l’Homme. Richard Huelsenbeck, acteur du mouvement dadaiste, a écrit en 1920,
date effective du déclin du mouvement, « En avant dada – l’histoire du
dadaisme ». Il y décrit la démarche
dada comme une tentative d’unité
entre le bien et le mal, un pessimisme en l’avenir de l’humanité,
une suppression de l’ego de l’artiste,
une mise en avant de l’empathie...
De plus, il définit ce dernier comme
un mouvement artistique qui n’est
rien, ne sait rien, ne croit en rien et
Depuis le premier salon ne sert à rien, si ce n’est à refléter
des Refusés de 1863, autorisé par un flux, un présent immédiat chanNapoléon III, rendant public l’en- geant constamment. L’ensemble de
semble des œuvres refusées au Sa- ces éléments s’applique particulièrelon officiel présidée par l’Académie ment à l’image crée.
Royale de Peinture et de Sculpture
car ne répondant pas à la doctrine Paradoxalement,
l’échec
artistique de l’époque, la nature de dada par son activité de déconstrucl’image a changé suivant le courant tion et de destruction des langages
des techniques nouvelles jusqu’alors ne l’a pas empêché d’être particuencadrée par l’Académie Royale de lièrement productif de démarches
Peinture et de Sculpture. D’abord d’ordre visuelles qui furent enregisles impressionnistes de la deuxième trées dans la suite de l’histoire de
moitié du XIXème siècle, puis par le l’art contemporain, comme ce fut le
biais de l’ensemble des avant gardes cas pour le principe du photomondu début du XXème siècle, l’image tage, dont l’introduction en art est
n’est plus la représentation du réel. attribuée à Raoul Hausmann, un daElle est l’illusion par des procé- daiste berlinois dont l’œuvre « Elasdés de trompe l’œil, une décompo- ticum » de 1920, à base de collage
sition entre forme et couleur chez et de gouache, en est selon moi le
les cubistes, une démonstration du parfait exemple. Par cette nouvelle
mouvement pour les futuristes, un technique, les dadaistes se sont ofthéorème de la lumière originel de fert une forme d’expression polila création du mouvement par le dy- tique et impliquant des supports de
namisme des couleurs pour les or- presse dans leur processus créateur.
phistes, une revendication de la suprématie du geste créateur traduite Le mouvement dada, inspar des formes géométriques pures tauré à Zurich par Hugo Ball par son
chez les suprématistes ou encore manifeste de 1916 a donc remis en
une réaction émotionnelle chez les cause la composition et la perception
expressionnistes.
de l’image, a fait table rase de toutes
les conventions et contraintes idéo
Mais l’avant garde ayant le logiques, esthétiques et politiques
plus révolutionné l’approche intel- qui l’ont précédé.
lectuelle et artistique de l’image est
le dadaïsme, mouvement intellectuel Les artistes qui l’ont compoet artistique qui apparut à New York sé se sont donnés la réflexion d’une
et à Zurich (1916), se diffusa en Eu- remise en cause de l’image comme
rope jusqu’en 1923 et exerça, par sa représentation objective d’un réel
pratique subversive, une influence perceptible, ce qui a donné naissance
décisive sur les divers courants à une autre avant garde approfondisd’avant-garde.
sant cette démarche : le surréalisme.
Mouvement international d’artistes
et d’écrivains, né d’un intense dé- « L’image est une création
goût envers la guerre qui signait à ses pure de l’esprit. Elle ne peut
yeux la faillite des civilisations, de
naître d’une comparaison
mais du rapprochement de
deux réalités plus ou moins
éloignées. Plus les
rapports des deux réalités rapprochées seront
lointains et justes, plus l’image
sera forte — plus elle
aura de puissance émotive et
de réalité poétique... etc »
Pierre Reverdy, manifeste du surréalisme (1924)
Il s’agit d’un mouvement littéraire,
culturel et artistique du XXe siècle,
comprenant l’ensemble des procédés de création et d’expression utilisant toutes les forces psychiques
(automatisme par le réflexe, rêve, inconscient) libérées du contrôle de la
raison de l’artiste et dans la continuité de la lutte dadaiste contre les valeurs reçues. En 1924, André Breton,
initiateur de ce mouvement,le définit
dans son premier Manifeste du surréalisme comme un « automatisme
psychique pur, par lequel on se propose d’exprimer, soit verbalement,
soit par écrit, soit de toute autre manière, le fonctionnement réel de la
pensée. Dictée de la pensée, en l’absence de tout contrôle exercé par la
raison, en dehors de toute préoccupation esthétique ou morale ». C’est
aussi dans le second Manifeste du
Surréalisme de 1930 qu’André Breton affirme que « L’acte surréaliste
le plus simple consiste, revolvers
aux poings, à descendre dans la rue
et à tirer au hasard, tant qu’on peut,
dans la foule. »
Le surréalisme repose sur
la croyance à la réalité supérieure
de certaines formes d’associations
négligées jusqu’à lui, autrement
dit à une dimension dont il n’a pas
conscience, à la toute-puissance du
rêve, au jeu désintéressé de la pensée. Il tend à ruiner de manière définitive tous les autres mécanismes
psychiques.
Parmi les peintres les plus prolifiques du mouvement surréaliste,
René Magritte est celui qui a instauré et mis en pratique par le biais
de ses œuvres la théorie de l’image
surréaliste. En effet, dans sa biographie rédigée par Patrick Wladberg
intitulé « Magritte, peintures » de
1983 en page 19
« Une caisse auprès de son berceau,
la récupération d’un ballon de navigation échoué sur le toit de la maison familiale, la vision d’un artiste
peintre peignant dans le cimetière où
il jouait avec une petite fille... trois
souvenirs d’enfance que l’artiste
gardera toute sa vie», résume une
biographie de Magritte.
Ses peintures jouent dans beaucoup
de cas sur le décalage entre un objet et sa représentation sur toile. En
guise d’exemple le plus célèbre, figure un de ses tableaux : une image
de pipe sous laquelle figure le texte
« Ceci n’est pas une pipe » Intitulé
« La Trahison des images » de 192829, il s’agit de considérer l’objet
comme une réalité concrète et non
pas en fonction d’un terme à la fois
abstrait et arbitraire qui peut s’appliquer sous toutes les dimensions.
Magritte aurait par ailleurs déclaré
selon l’écrivain Pere Gimferrer dans
ses écrits intitulés « Magritte » : « La
fameuse pipe, me l’a-t-on assez reprochée ! Et pourtant, pouvez-vous
la bourrer ma pipe ? Non, n’est-ce
pas, elle n’est qu’une représentation.
Donc si j’avais écrit sous mon tableau « ceci est une pipe », j’aurais
menti ! »
La peinture de Magritte s’interroge sur sa propre nature, et sur
l’action du peintre sur l’image. La
peinture n’est jamais une représentation d’un objet réel, mais l’action de
la pensée du peintre sur cet objet par
le biais de ses sens. Magritte réduisait la réalité à une pensée abstraite
rendue en des formules que lui dictait son penchant pour le mystère :
« je veille, dans la mesure du possible, à ne faire que des peintures qui
suscitent le mystère avec la précision
et l’enchantement nécessaire à la vie
des idées », déclara-t-il. Toujours est
il que sa touche personnelle apparaît
volontairement neutre, académique,
met en évidence un puissant travail
de déconstruction des rapports que
les choses entretiennent dans la réalité et de ce fait enterre l’idée que
l’Homme est capable de représenter
le réel à cause de sa condition humaine.
Parmi les objets qui contribuent à faire de ses toiles de véritables énigmes tout en renforçant sa
théorie, un objet apparaît de façon
récurrente : une sphère noire, lisse,
fendu en son milieu et apparaissant
en tant que sujet dans de nombreuses
œuvres dont la plus parlante est « La
voie des airs » de 1931, dans des dispositions et des tailles extrêmement
différentes. Souvent qualifié d’œil
noir, de représentation d’un sexe féminin, ou d’une simple forme géométrique, l’artiste, a laisse intact le
mystère sur un objet qui concentre
l’attention tout en résistant à l’interprétation, montrant de ce fait une
nouvelle fois que la représentation
du réel n’est qu’une interprétation
subjective de l’inconscient.
Magritte est aussi considéré comme
un génie dans la représentation des
images mentales. Pour lui, la réalité
visible doit être approchée de façon
objective. Ce dernier possède une
manie de l’ordre qui se manifeste
dans l’agencement géométrique de
ses tableaux. Il est évident que Magritte a un dégoût de la peinture académique qui fut établit comme un
standard voir un dogme jusqu’à la
moitié du XIXème siècle. Magritte
souhaitait liquider tout ce qu’il considère comme l’idée d’une représentation réaliste du réel. Il déclara par
ailleurs que « L’art de la peinture ne
peut vraiment se borner qu’à décrire
une idée qui montre une certaine ressemblance avec le visible que nous
offre le monde » selon les propos
recueillis par Sylverster David dans
son livre intitulé « Magritte » de Juin
2009 . Pour lui, la réalité ne doit certainement pas être approchée sous
l’angle du symbolisme. Parmi les
tableaux les plus représentatifs de
cette idée, « La Clairvoyance » de
1936 montre un peintre dont le modèle est un œuf posé sur une table.
Sur la toile, le peintre dessine un
oiseau aux ailes déployées ; signant
la différence entre le réel et l’image
picturale.
Dans un autre tableau intitulé « La Reproduction interdite » de
1937, l’artiste montre un homme de
dos regardant un miroir, qui ne reflète pas le visage de l’homme mais
son dos. De la même manière, la
peinture n’est donc pas un miroir de
la réalité car les limites de l’Homme
ne lui permettent pas d’en faire un
miroir de la réalité.
Peintre de la métaphysique
et du sur réel, Magritte a traité ce qui
lui semblait évident avec un humour
certain, de manière à saper le fondement de la picturalité et brisé le
mur du sérieux. Il s’est glissé entre
les choses et leur représentation, les
images et les mots. Au lieu d’inventer des techniques nouvelles, il a
préféré explorer le fond des choses,
user de la peinture qui devient l’instrument d’une connaissance inséparable du mystère. « Magritte est un
grand peintre, Magritte n’est pas un
peintre », écrivait dès 1947 Scutenaire, poète surréaliste belge.
Afin d’illustrer cette ambition légitime de tenter de montrer la
réalité dans le cadre d’une création
artistique, on peut prendre l’exemple
de la photographie. Il n’est donc plus
question d’imiter la nature puisque
l’appareil photo n’imite pas le geste
du peintre, ni même de «représenter» la réalité comme il a été cité
plus haut, mais bien de la reproduire
comme elle se présente. C’est pourquoi la photographie est considéré
pour beaucoup comme un exemplelimite, à la frontière même de l’art à
cause de la technique employée, loin
du credo artisanal.
HINTERHART - Mardi 1er Septembre 2015
Au delà de l’ambiguïté que peut susciter la « photo d’art » et la
« photo de reportage », il faudrait faire la distinction entre ce que l’on appelle « le temps du photographique » : c’est le moment du “déclic”, de la
prise de vue, la reproduction à proprement parler, et « le temps du photographié » : ou le moment du développement, où peut se faire éventuellement un
travail de montage. A noter que le photomontage est propice à la création et
au travail de modification de la nature de l’image; mais ce serait également
revenir à dénaturer l’acte de photographier*, reproduire la nature comme
elle se présente.
Nous pouvons nous poser la question de la valeur de l’instant pris
en photo. Est-ce trop concéder au reportage « non-artistique », ou bien estce au contraire, dans la mesure où il s’agit bien pour le photographe d’être
là, au bon endroit et au bon moment, une authentique découverte du réel ?
On soutiendra ici que le propre de la photographie est de signifier un rapport spécifique au réel, le réel non pas comme la « réalité » objective mais
comme quelque chose qui apparaît et qui disparaît, qui peut être présent ou
absent, qui se voit ou qui ne se voit pas.
Le concept photographique de reproduire la réalité ne fait cependant
pas l’unanimité. Toute une catégorie d’artistes et de mouvements artistiques
mettent plutôt en avant l’imagination, la représentation de l’imaginaire parfois le plus débridé. Il faut déjà comprendre ce qu’est l’imagination et en
quoi elle consiste. Pendant longtemps l’imagination a été définie seulement
comme une faculté de se remémorer les images perçues, avec le risque d’illusion que cela comporte. Cette « folle du logis » comme l’appelle si bien
Nicolas Malebranche, théologien et philosophe français du XVème siècle, a
souvent été opposée à la raison. Puis cette faculté a été repensé, notamment
avec Emmanuel Kant, lorsque ce dernier a compris qu’elle ne servait pas
seulement à reproduire des images mais aussi à les formaliser et ainsi former
des objets mentaux spécifiques nommés « schèmes », qui prennent une part
décisive dans la subjectivité et même dans les processus de connaissance
intelligible.
Grâce à certains courants artistiques post-romantiques, l’imagination
est devenue une faculté reine pour la création artistique au point même d’en
être la faculté même d’inventer des images. On pourrait citer simplement
le «surréalisme», mouvement littéraire et artistique né au début du XXème
siècle qui a véritablement mis en avant l’inconscient et l’imagination dans
son processus de création. Le surréalisme a promu des œuvres dérangeante
car non conventionnel, attaquant non seulement la raison mais aussi la signification elle-même. Dans la continuité du mouvement Dada, l’absurde
et le non sens accédaient à la dignité d’un chef d’œuvre. Et cependant, tout
rapport avec le réel n’est pas aboli puisque l’objectif est de révéler l’existence d’une «surréalité», soit un aspect de la réalité et surtout du psychisme
jusqu’ici inexploré.
La recherche de la Vérité
La vérité (du latin veritas,
« vérité », dérivé de verus, « vrai »)
est la qualité de ce qui est vrai. C’est
l’adéquation de l’idée, la pensée,
avec son objet, adéquation de ce
que l’on dit ou pense avec ce qui est
réel.
L’ambition de la science
d’aujourd’hui est de proposer une
description la plus rationnelle possible des phénomènes naturels et
des phénomènes humains. La raison, considérée comme une faculté
propre à l’esprit humain dont la
mise en œuvre lui permet de fixer
des critères de vérité et d’erreur, de
discerner le bien et le mal et aussi
de mettre en œuvre des moyens
en vue d’une fin donnée, prétend
donc explorer le labyrinthe du réel
pour en clarifier la structure. C’est
grâce à l’application des mathématiques à la nature que la physique
a pu prétendre au statut de science
comme l’ont démontré de nombreux personnages historiques, en
particulier Léonard de Vinci. Ainsi
l’expérience est devenue un outil de
la science. Elle s’est définie comme
expérimentation, en se fondant sur
une théorie, afin d’énoncer des lois
de la physique. La biologie, en tant
que science tournée vers le vivant,
tente aussi de décrire l’organisme
humain en termes physico-mathématiques, afin d’en imaginer le
fonctionnement. Cependant, une
question se pose relativement à
cette ambition scientifique : faut
il chercher aussi des lois physicomathématiques afin d’expliquer
le fonctionnement de l’esprit luimême ? Peut-on réduire ce que nous
sommes à de simples formules ma-
thématiques ? Avoir un point de vue
objectif est il incompatible avec une
vérité ? De cette interrogation, la
nécessite d’inventer d’autres modes
de connaissances peut apparaître légitime : plutôt que de démontrer, il
s’agirait de savoir interpréter, c’està-dire de savoir faire surgir un sens
qui n’a de valeur que par apport à
un sujet. Savoir ainsi interpréter la
démonstration scientifique ne serait
pas le seul chemin d’accès à la vérité. Dès que l’on touche à l’existence
humaine, la vérité ne peut émerger
qu’à partir d’une interprétation, au
sein d’une expérience unique, qui
vient dévoiler un sens resté jusquelà silencieux.
Platon avait déjà employé
le terme « image » pour désigner
une fausse réalité imposée aux sens
des prisonniers. Il l’a d’ailleurs illustrer bien avant ce dernier dans
sa caverne aux prisonniers soumis
à des images manipulées et donc
d’une fausse réalité. Ce dernier a
par ailleurs voulu démontrer que
le remède contre cette soumission
aux images, aux apparences, serait
d’être à la fois rationaliste (postuler
que le raisonnement consiste à déterminer que certains effets résultent
de certaines causes, uniquement à
partir de principes logiques) et métaphysique (recherche de causes à
effets).
Deux critères qui définissent
ce que l’on appelle le cartésianisme,
un courant philosophique se réclamant des principes, thèses et écrits
de la pensée de René Descartes
(1596-1650), mathématicien, philosophe et physicien français.
Ce courant philosophique s’est par-
ticulièrement illustré à travers son
premier ouvrage philosophique intitulé « Discours de la Méthode »
daté de 1637, sous-titré « pour bien
conduire sa raison et chercher la vérité dans les sciences ».
Il s’agit d’une théorie philosophique qui cherche à rendre
compte des relations entre l’esprit et
le monde. Il est tout aussi pertinent
de rapprocher cartésianisme et idéalisme qui, au passage, n’a rien à voir
avec un certain adjectif désignant un
principe de prendre des idées sans
fondements pour des réalités.
Plus être plus précis, l’idéalisme
cherche à répondre à la problématique qui est de savoir comment
l’esprit humain peut-il connaître
le monde extérieur ? Et peut-il le
connaître ? L’idéalisme répond de
manière générale à cette question
par deux pistes majeures : soit il est
difficile de connaître le monde tel
qu’il est (indépendamment de toutes
connaissances intelligibles et d’idées
objectives), soit qu’il est impossible
de le connaître tout simplement. Il
s’agit là d’une problématique épistémologique, c’est à dire de conflits
entre le domaine des sciences et de
la théorie de la connaissance. C’est
ce qu’on appelle l’idéalisme problématique, un mur invisible face auquel Kant s’est cogné au point d’en
arriver à la conclusion d’un réalisme
dit empirique selon lequel la seule
réalité connaissable est phénoménale, donnée dans le cadre transcendantal de l’espace et du temps, mais
seule l’expérience fournit un matériau valide pour la connaissance.
Mais la problématique est encore
ontologique, dans le sens précis ou
elle concerne encore la structure
même du monde qu’il s’agit de découvrir. L’idéalisme cherche
à comprendre de quoi le monde extérieur est composé. Qui ou qu’estce qui nous assure qu’il n’est pas
une illusion ? Dans ce cas, on dira
qu’il n’existe que un ou des esprits… L’idéalisme par du principe
de l’immatérialisme, dans le sens
ou la matière n’existe pas, elle n’est
qu’une fiction. C’est ce qu’on appelle l’idéalisme absolu, soutenu à
la fois par l’évêque irlandais George
Berkeley, et le philosophe allemand
Hegel ; à la seule différence que
pour le premier il existe plusieurs
esprits au delà de Dieu, pour le second, il n’existe qu’un seul esprit :
nous-mêmes sommes des illusions,
des avatars dans un langage moderne.
La théorie de l’idéalisme est
popularisée de nos jours par le biais
de nombreuses œuvres littéraires,
picturales mais aussi cinématographique dont la plus célèbre ayant
marqué l’histoire du cinéma pour
sa structure scénaristique, sa mise
en scène et ses effets spéciaux : la
trilogie Matrix dont le premier volet est sortie en 1999. Réalisé par
Lana et Andy Wachowski, elle est
la forme la plus imagée et la moins
conceptuelle de l’idéalisme initié
par Descartes, jusqu’à y concilier
l’idéalisme empirique au point d’en
inclure le « malin génie », désignation même d’une entité originel et
supérieur avec l’idée que le monde
à l’extérieur de l’esprit n’est qu’une
image.
Matrix est un film d’action qui suit Thomas Anderson, un
programmeur informatique que sa
vie secrète de hacker sur internet
l’a amené à prendre conscience
de l’existence d’un concept qu’il
nomme la Matrice et d’un homme
dont il saurait tout à ce propos :
Morpheus. Lorsque des agents, dont
Smith, commence à s’intéresser
également à celui qui se fait appeler Néo, le pseudonyme de Thomas
Anderson, Morphéus et ses hommes
libère le héro en lui révélant la vérité. La Matrice est le monde virtuel dans lequel vivait Néo depuis
sa naissance afin d’être maintenu
sous contrôle par des machines qui
ont renversé l’humanité il y a des
années et exploite désormais les
hommes comme source d’énergie.
En suivant les conseils de son mentor et en trouvant l’amour en la personne de Trinity, une autre humaine
libérée comme lui, Néo découvre
qu’il est l’élu, celui annoncé par la
prophétie, qui mettra un terme à la
domination des machines.
C’est dans les « Méditations
Métaphysiques » de Descartes, donc
au XVIIe, que naît à proprement
parler l’idéalisme, et que ce dernier
met au goût du jour une hypothèse
déjà abordée par Platon, mais très
proche du film Matrix.
Il est vrai que ce genre de
thèse existait déjà dans l’Antiquité, chez les sceptiques grecs. Mais
elle n’avait pas vraiment donné lieu
à de théories approfondies. Elle
n’était qu’une interrogation sur la
possibilité, pour l’esprit humain,
de connaître le monde extérieur, et
non une certitude aujourd’hui pour
certains philosophes. Pour preuve,
les sceptiques se basaient sur les
diverses illusions et hallucinations
pour dire que nous ne pouvons pas
connaître avec certitude le monde
extérieur.
Par ailleurs, Descartes reprend la
même question que se posaient
les sceptiques des temps anciens :
existe-t-il au moins une vérité ?
l’homme est-il ainsi fait qu’il peut
connaître (au moins) une vérité ?
Cette question va être traitée par
une drôle de méthode radicale : il
s’agit du doute dit « hyperbolique «
. Chaque fois qu’une vérité potentielle se présentera, Descartes se demandera si on peut ou non trouver
une raison de douter de sa vérité,
une moindre zone d’ombre. S’il y a
la moindre raison de douter, alors,
il faudra la déclarer dans le doute
fausse, nulle et non avenue.
Cette méthode de recherche de la
vérité amené à une thèse plus expéditive encore présentée ci dessous.
A ce moment précis de lecture, nous
HINTERHART - Mardi 1er Septembre 2015
pouvons nous poser la question s’il
Existe au monde quoi que ce soit de
certain ? En effet, analysons rapidement le parcours cartésien dans les
deux premières méditations. Qu’estce que nous tenons communément
pour vrai ? Ou encore, ce que nous
tenons communément comme étant
le plus certain est-il vrai ? Ou bien
peut-on trouver des raisons d’en
douter ?
Dans les « Méditations Métaphysiques », paragraphe 3, Descartes parle se place donc du point
de vue de celui qui commence à
philosopher et va même, par ce
raisonnement, jusqu’à remettre ses
propres propos en cause. Comment
peut on se baser sur nos sensations ?
Les philosophes même utilisent leur
condition humaine, leur sens pour
raisonner, comment être sûr que les
propositions formulées à partir de
nos sens sont fiables ?
Descartes en arrive à la conclusion que nos sens sont illusions et
évoque l’argument du rêve. Comme
il est impossible de discerner avec
certitude les objets réels de ceux qui
sont rêvés - ce qui est en cause, c’est
notre capacité à distinguer entre les
images et les objets matériels : nous
ne pouvons donc pas savoir si nous
ne rêvons pas… peut-être toute la
vie est-elle un songe… Une image
même que rapporte l’omniprésence
de la Matrice dans le film Matrix.
Il existe une multitude d’interprétations philosophique de la trilogie Matrix, même si cette dernière
n’est pas une trilogie commerciale
surfant sur le succès du premier film
mais plutôt un triptyque ou chaque
film a un point de vue plus nuancé
du même sujet tout en se complétant l’un l’autre. L’une des théories
qui a été intégré au premier volet
est « Simulacres et Simulation » de
Jean Baudrillard. Son livre apparaît
à l’écran comme une cache creuse
afin d’y dissimuler de l’argent et des
disquettes. Baudrillard, n’ayant pas
visionné la suite de la trilogie pensant que cela parlerait de la même
thématique, a déclaré avec perte et
fracas que les réalisateurs n’ont rien
compris à sa théorie.
«Simulacres et simulation» a été
écrit en 1981 par Jean Baudrillard.
Né en 1929 et mort le 6 mars 2007,
ce philosophe français a travaillé
dans ses différentes œuvres sur la
société contemporaine et les modes
de médiation de communication
post modernes.
Joel Costa, étudiant de la promotion
2014 du master Création et Gestion
de l’image numérique, a réalisé un
article détaillé de cette œuvre, publiée sur le blog officiel de la formation : un monde moderne, dont les
écrits ont été rapportés ci dessous :
Dans son œuvre « Simulacres et simulation » de 1981, Baudrillard pose le simulacre comme
« n’étant jamais ce qui cache la réalité« , il ajoute que c’est « la vérité
qui cache qu’il n’y en a pas« , que
« le simulacre est vrai« . Il affirme
à travers ses démonstrations, tout au
long de l’ouvrage, que le simulacre
a remplacé le sujet original auquel il
se rapporte.
Pour Baudrillard, « Dissimuler est feindre de ne pas avoir
ce que l’on a« , alors que « simuler est feindre d’avoir ce que l’on a
pas« . Ainsi, feindre ou dissimuler
« laissent intacte le principe de réalité« . La dissimulation, elle, remet
en cause la différence du vrai et du
faux, du réel et de l’imaginaire. Pour
appuyer sa thèse, il prend l’exemple
d’un malade. Un individu feignant
une maladie peut simplement se
mettre au lit et faire croire qu’il est
malade. Un individue simulant une
maladie émet des symptômes, et
ces symptômes sont vrais. La cause
n’est certes plus la maladie, mais le
symptôme est bien réel. Pour Baudrillard, on ne peut faire la distinction entre ce qui est « produit » et ce
qui est authentique. Il pose une autre
situation. Comment réagirait la lois
face à la simulation d’un Hold-up
? Comment persuader le service de
contrôle qu’il s’agirait d’un vol simulé ?
« Ce sont les mêmes signes que
pour un vol réel, or les signes ne
penchent ni d’un côté ni de l’autre.
Pour l’ordre établi, ils sont toujours
de l’ordre du réel. »
De part cette « impossibilité de
trouver un niveau absolu du réel »
et cette « impossibilité de mettre
en scène l’illusion » , Baudrillard
affirme que « l‘illusion n’est plus
possible, parce que le réel n’est plus
possible« .
Baudrillard critique également dans
une grande partie de son œuvre la
télévision. Pour lui, l’histoire est
« un mythe », un mythe fabriqué
artificiellement, détruit par les reportages et le cinéma. Il désigne
ces derniers comme des « mémoires
artificielles qui effacent la mémoire
des hommes« , leur mise en scène
comme une « solution finale à l’historicité de tout événement« .
Il en vient a tirer une inversion lassante entre sujet initial et objet produit. Lassante car récurrente dans la
totalité de son œuvre. Il affirme en
effet pour son exemple de film de
guerre que « la guerre se fait film »
et que « le film se fait guerre« .
La réflexion posée par Baudrillard
s’avérant la plus intéressante se
trouvent dans son étude du traitement de l’information par les médias.
Ainsi débute cette réflexion :
« Nous sommes dans un univers où
il y a de plus en plus d’informations,
et de moins en moins de sens. »
Pour lui, l’information « dévore ses
propres contenus« . Elle ne fait pas
communiquer mais « s’épuise dans
la mise en scène de la communication« , elle « dissout le sens« ,
proposant ainsi ce qu’il qualifie de
« contenus fantômes« . Il reprend
la formule de McLuan « medium is
message » et en pose une rectification. Pour lui, tous les contenus du
sens sont « absorbés dans la seule
forme dominante du medium« .
« Le medium seul fait événement.
Quels que soient le contenu« . Une
réflexion qui semble n’avoir jamais été aussi bien avérée qu’aujourd’hui.
« Simulacre et Simulations » pourraient être grossièrement résumé
à l’idée que nous vivons dans un
monde ou on ne vit plus pour de vrai
mais dans une simulation du vrai. On
ne croit pas en l’amour mais on croit
en l’amour tel qu’il a été rapporté
dans les médias et de ce fait, on le
fait depuis tellement longtemps que
l’on se retrouve dans une simulation
d’une simulation. Donc en vérité, on
ne vit rien. Baudrillard n’a donc pas
compris le sens de l’ensemble de la
trilogie car l’important n’est pas que
le livre soit présent à l’écran, mais
qu’il soit creux car il ne s’agit que
d’une vision de la société comme il
en existe tant d’autres. Sa théorie est
donc une simulation parmi d’autres
simulation, une possibilité parmi
une autre possibilité.
prétendre le réel pour mieux discourir
Une révolution
dans les règles de l’Art
Depuis l’Antiquité, le principe de la photographie dont étymologie vient de « photos » signifiant
la lumière a été observé pour la première fois par Aristote, philosophe
grec du VIième siècle avant JC. Il
a constaté un phénomène optique
suivant lequel lorsque la lumière du
jour est filtrée à travers un très petit
trou du nom de sténopé ( « sténos » =
étroit et « ôps » = œil) dans une pièce
par ailleurs plongée dans l’obscurité
totale, elle projette sur le mur d’en
face une image inversée des objets
qui sont placés devant l’ouverture, à
l’extérieur.
Au XVème siècle, Léonard de Vinci
fût le premier à constater du sténopé
se rapproche du fonctionnement de
l’œil humain. La lumière passe à
travers la pupille est se fait amplifier par le cristallin, qui joue le rôle
d’une lentille, et les images que nous
percevons sont projetées à l’envers
sur notre rétine. Par l’intermédiaire
des nerfs optiques, la rétine envoie
ces images au cerveau qui se charge
de les remettre à l’endroit.
En
1826-1827,
Joseph
Nicéphore Niépce associe l’ensemble des précédentes découvertes
sur la fixation de la lumière et parvient sur une plaque d’étain à figer
l’image d’une partie de sa propriété
au boit d’un temps de pose de plusieurs heures. Cette prouesse peut
être considérée comme la première
photographie. Cette dernière est actuellement exposée à L’université
d’Austin au Texas. Le procédé sera
amélioré par Louis Jacques Mandé
Daguerre qui parviendra à réduire le
temps de pose à quelques dizaines
de minutes et présentera son invention en 1839, qui deviendra la date
officielle d’invention de la photographie. La première photographie
couleur fut inventée en plusieurs
étapes mais c’est bien en 1869, à la
suite de la superposition des expositions des couleurs primaires que la
première photographie couleur fut
réalisée. Il faudra attendre 1903 pour
que les frères Lumières, également
inventeurs du Cinéma, parviennent
à réduire le temps d’exposition à
seulement quelques secondes. Enfin,
l’apparition de l’Ektachrome, une
gamme de films photographiques
réversibles permettra d’introduire la
photographie auprès des amateurs.
Le photomontage a été inventé bien
avant la naissance et l’avènement de
la photographie numérique. On peut
penser que dès la découverte de la
photographie, les photographes inventeurs passionnés de l’époque ont
commencé à expérimenter le trucage
photographique et le photomontage.
Les premiers photomontages avérés
datent des années 1860.
Il faut cependant savoir distinguer une retouche photographique
d’un trucage ou montage photographique. La première consiste à modifier une image de manière conséquente en changeant une partie de
cette dernière comme c’est le cas
pour des publicités ciblant la cosmétique ou la mode ou les mannequins
sont remodelé via ordinateur afin de
correspondre à un standard de beauté. La seconde action consiste plutôt
à modifier le sens même d’une photographie en mettant en relation des
éléments totalement étranger les uns
par apport aux autres comme dans
une incrustation.
La technique du photomontage par
collage fut introduit en art par les
dadaïstes* berlinois au lendemain
de la Première Guerre mondiale et
désigne des œuvres constituées entièrement ou partiellement d’éléments photographiques découpés et
assemblés selon un nouvel ordre à la
manière des collages. Les dadaïstes
entendaient par là clairement montrer leur mépris pour l’artiste traditionnel en se présentant comme des
ingénieurs et se dotant par la même
occasion d’un mode d’expression
purement politique. Ils tenaient à
inclure le monde de la mécanique
dans leurs œuvres aussi bien en tant
que technique qu’en tant qu’imagerie. Afin de lutter contre la supposée
singularité d’une œuvre sacralisée,
Dada inventa ce procédé consistant
à détourner de leur contexte original des images ou des textes souvent
fragmentés, empruntés aux médias
les plus répandus comme les journaux, affiches, dictionnaires, ouvrages de vulgarisation ou encore
catalogues publicitaires.
Dans l’Allemagne autour de
1920, le photomontage était enseigné au Bauhaus, qui au delà d’être le
lieu dit d’une institut des arts décoratifs et industriels, désigne un courant
artistique concernant l’architecture,
le design, la modernité, la photographie, le costume et la danse. Ce
mouvement posera les bases de la
réflexion sur l’architecture moderne
À la suite des dadaïstes, les surréalistes s’emparèrent de ce procédé qui
permettait de multiplier à l’infini les
associations absurdes ou étranges.
Ce fut le cas particulièrement éloquent de Man Ray, peintre et photographe acteur du dadaisme et plus
tard du surréalisme à l’origine même
du processus qui le rendra célèbre :
la solarisation. Cette manipulation
consiste en une inversion partielle
ou totale des densités d’une photographie qui intervient après une forte
exposition à la lumière blanche durant le développement. Même si ce
dernier ne considère pas son principe comme un trucage, toujours est
il que ses œuvres issues de ses manipulations ont eu un impact puissant
dans la signification qu’il a donné à
ses photos.
On distingue généralement
deux grandes tendances dans l’histoire du photomontage : l’une est
formelle et préoccupée de questions
artistiques ; l’autre est militante et
soucieuse de questions politiques.
Pour exemple, en 1840,
Hippolyte Bayard, un des pionniers
français de la photographie, fut le
premier à tromper les spectateurs de
ses photographies en les manipulant
par le biais de la légende. Ainsi, son
« autoportrait en noyé » représentant un homme appartement inerte
et qualifié de mort de part son titre
n’est qu’en réalité une simple mise
en scène.
Vingt ans plus tard, c’est au tour du
portrait officiel de Abraham Lincoln, seizième et emblématique président des États Unis de 1960 à 1964
de subir le premier trucage photographique avec intention de trom-
per. En effet, la tête de ce dernier fut
remplacé par celle du sénateur John
Calhoun dans le but de faire ranimer
des intentions politiques similaires.
L’incrustation d’un visage d’un photographie à une autre met en avant
un système de production bien précis. En effet, si l’on veut garder une
seule partie d’une image, on peut,
avec une peinture masque, colorer sur le négatif la partie à enlever
avant d’agrandir l’image sur le positif. Ce procédé repose sur le fait que
le support exposé n’est pas impressionné en l’absence de lumière. Lors
de l’agrandissement sur le positif, la
partie masquée ne sera pas exposée.
Pour anecdote, une variante de ce
procédé consiste à créer un système
de cache et d’anti-cache, permettant
d’assembler deux images. Sur un
premier négatif, on colore une partie à enlever ; sur un second négatif,
on colore la partie opposée. On impressionne ensuite le positif avec les
deux négatifs l’un après l’autre, les
parties colorées n’ayant pas d’effet
sur ce dernier, il contiendra les deux
images assemblées.
Autre temps, autres mœurs,
l’affaire des fées de Cottingley de
1920 fait référence à une série de
cinq photographies prises par Elsie Wright et Frances Griffiths dans
lesquelles on les retrouve en train
d’interagir avec des fées. Largement
diffusées à travers toute l’Angleterre
comme preuve de l’existence des
fées, notamment par le biais d’écrits
de personnalités comme l’écrivain
écossais Arthur Conan Doyle, ce ne
sera que 83 ans plus tard que l’ainée,
Elsie Wright, agée à l’époque de 16
ans, avouera la supercherie. Les fées
sur les photographies sont fausses et
issues de magazines pour enfants.
Avec les années 90 et l’arrivée de
l’ère numérique, le montage et les
trucages photographiques prennent
un aspect plus commercial et proche
de la presse comme en témoigne
dès 1989 avec la couverture de Septembre du TV Guide, un magazine
de programme télévisuel américain,
sur laquelle le visage de l’animatrice de télévision américaine Opprah Winfrey a été placé sur le corps
de l’actrice Ann-Margret (actrice,
danseuse et chanteuse de la même
nationalité) récupérée d’une photographie publicitaire datant de 1979.
C’était sans compter l’absence d’accord auprès des parties concernées
que le styliste de l’actrice a dénoncé
la supercherie.
Pour rester dans le même domaine,
le plus gros scandale de l’ère numérique en terme de montage restera
sans nulle doute la couverture du
Time Magazine relatant le procès
d’O.J Simpson, un ancien sportif,
acteur de cinéma, essentiellement
connu pour avoir été accusé d’avoir
assassiné son ex épouse et le compagnon de cette dernière. La une
du magazine est une version altérée
d’une photographie d’O.J. Simpson
où l’on voit que sa peau a été noircie et son numéro de prisonnier intégré à l’image. Une controverse qui
a amené le magazine à se donner
une réputation raciste, même si Matt
Mahurin, le graphiste à l’origine de
la retouche, a toujours affirmé avoir
donné plus de puissance artistique à
l’image que de donner un sens racial.
Cette dernière affaire, même si ce
ne sera pas la dernière en terme de
ségrégation aux Etats Unis, a permis
entre autre le développement d’une
idéologie de diversité ethnique et
d’ouverture d’esprit au sein de différents établissements dont le social
a une importance capitale, comme
c’est le cas dans les universités.
Cependant, suite à avoir passé des
mois à chercher une photo originale
prônant la diversité de l’école sans
aucun succès, le magazine étudiant
de l’université du Wisconsin a publié en 2000 une une dans laquelle
un étudiant afro américain a été rajouté à une photographie d’étudiants
en liesse datant quant à elle de 1993.
Enfin, en Décembre 2007, une étude
de Dario Sacchi, Franca Agnoli et
Elizabeth Loftus, parue dans « Applied Cognitive Psychology », page
1005 jusqu’à 1022, affirme qu’un
photomontage peut renforcer par la
mémoire la puissance d’une photographie originale en mettant encore
plus en évidence les enjeux cachées
de cette dernière. Afin de démontrer
leur propos, ils firent l’expérience de
montrer la désormais célèbre photographie de l’opposant de Tiananmen, prise par Jeff Widener en 1989,
intitulé « l’Homme au Tank » ou
l’on voit un homme s’efforçant de
symboliquement bloquer la progression d’une colonne d’au moins 17
chars type 59 de l’Armée Populaire
de Libération. Dans la photographie truquée, ils placèrent de chaque
côté de la route une foule compact
symbolisant les protestations et surtout le massacre qui a lieu envers la
population au moment ou la photographie a été prise. En mettant plus
en évidence visuellement ce que la
mémoire de l’Homme n’a pas forcément conscience, la photographie
d’origine paraît dans de nombreux
cas plus puissante que jamais.
Le cinéma a lui aussi eu droit à son
lot de retouches et de trucages au fil
de son histoire. Le plus vieux procédé de capture d’images en mouvement est le Kinétoscope, imaginé en
1887-1888 par Thomas Alva Edison,
aussi l’inventeur du phonographe
et industriel américain, qui voulait
apporter pour l’œil ce que le phonographe avait apporté à l’oreille.
C’est cependant sans compter les
frères lumières qui, en 1895, dans le
but de concurrencer le Kinétoscope,
inventèrent le cinématographe, après
avoir racheté l’appellation à Léon
Bouly, un autre inventeur Francais
qui n’avait pas pu payer le maintien
de son droit.
Il faudra attendre le succès de certains films comme en 1902 avec «
Le voyage dans la Lune » de Georges
Mélies, considéré à l’époque non
pas comme un réalisateur mais plutôt comme un prestidigitateur. Ce
dernier intronisa les premiers effets
spéciaux. L’histoire raconte les péripéties du professeur Barbenfouillis
dont le projet est d’aller sur la Lune
à l’intérieur d’un obus tiré par un canon de plus de 300 mètres. Il y utilisa
de nombreux effets de trompe l’oeil,
des arrêts de caméra ou il interverti
la position de plusieurs éléments et
des surimpressions ou superpositions de plusieurs bandes.
Les effets spéciaux ne cesseront, avec l’évolution du cinéma,
de se perfectionner et de rendre le
propos du film encore plus éloquent,
que ce soit de manière mécanique ou
les éléments sont véritablement présent à l’écran comme ce fut le cas
dans « 2001, l’Odyssey de l’espace »
du désormais iconique célèbre réalisateur américain Stanley Kubrick
dans lequel les décors et effets sont
d’ordre purement mécanique ; ou de
manière numérique avec incrustation sur fond vert comme cela se fait
de plus en plus en plus dans le cinéma d’aujourd’hui dont l’exemple le
plus flagrant reste le film « Avatar »
de James Cameron sortie en 2009.
Certaines chaînes de télévision ont
par ailleurs dénoncé au travers de
faux documentaires le danger de
l’image au travers d’une société moderne aliénée comme ce fut le cas en
Octobre 2006, ou la chaine francaise
Canal+ diffusa un documentaire
consacré à un chanteur fictif : « Que
reste t’il de Chris Conty ? » L’opération fut étayée par une biographie
inventée de toutes pièces, des témoignages de personnes connues, des
sites web, des médias et personnalités complices du canular et même de
faux albums téléchargeables sur des
sites de partages comme emule*.
Mais c’est en 1993, sur cette même
chaîne télévisée, qu’un nouvel art
du subterfuge se met au jour et
s’attaque non plus à la véracité des
images, à son esthétique mais plutôt
au message même de cette dernière :
le détournement. Rendu célèbre, par
le biais du film « Le Grand Détour-
nement – La Classe américaine » encore des séries télévisées comme
réalisée par Michel Hazanavicius Star Treck voir même des clips muet Dominique Mézerette, deux réa- sicaux comme « Beat It »de Michael
lisateurs français. Ce dernier est Jackson (renommé pour l’occacomposé d’extraits de films du stu- sion « Bite it » ou « croque le » en
dio américain Warner Bros. réalisés francais).
entre 1952 et 1980, ainsi que d’un Le photomontage* et le trucage phobref extrait d’un épisode de la série tographiques* sont indissociables de
télévisée Maigret avec l’acteur Jean la pratique de la photographie elleRichard, montés et doublés afin de même, et ce depuis l’invention du
créer un film inédit. Il s’agit d’un procédé au 19eme siècle, au même
immense assemblage de plusieurs titre que le cinématographe. Depuis
morceaux de films différents re- les années 30, le photomontage a été
traçant l’enquête sur la disparition si largement utilisé qu’un inventaire
de George Abitbol, considéré par serait impossible, aussi bien dans le
les médias comme étant l’homme domaine de la publicité que dans les
le plus classe du monde, ainsi que activités purement artistiques, où il
de ses dernières paroles : « Monde est devenu une technique graphique
de merde ». Ce détournement qui au même titre que le dessin. Cepenpourrait être vulgarisé par le mot dant, même si les premiers montages
parodie donnera naissance à un en- ont été d’ordre technique et artissemble d’autres détournements in- tique, la politique et l’hégémonie
dépendants réalisés par des amateurs de certains hommes ont rapidement
comme la personne agissant sous le illustré leurs idéaux au point d’en
pseudonyme de Mozinor. Ce dernier faire un outil de propagande majeur
publie depuis 2004 divers détourne- qui constitue encore de nos jours une
ments sur des films cultes comme très grande part de l’inventaire du
Titanic, Terminator, 007, Matrix ou photomontage.
HINTERHART - Mardi 1er Septembre 2015
Une récupération
politique
Lorsque le monde politique
s’empare de l’image pour véhiculer une image saine des idéologies
qu’ils représentent, le terme propagande est dans très nombreux cas
associé. En latin de l’ère médiévale,
« propaganda » est l’adjectif verbal
de « propagare » signifiant littéralement « ce qui doit être propagé ». Il
s’agit d’un ensemble d’actions psychologiques exercées sur les pensées
et les actes d’une population, afin de
convaincre, persuader, influencer
et endoctriner. Elle se distingue du
monde de la publicité par son but de
ne pas faire la promotion de produits
de type commercial.
La première apparition de ce
terme ne date pas du XXème siècle
mais de 1622, peu de temps après
le début de la Guerre de Trente ans,
période durant laquelle l’ensemble
des états européens sont rentrés en
guerre les uns contre les autres sous
couvert de conflits religieux entre
la religion Catholique dominée par
l’Eglise Catholique Romaine et la
religion protestante. Le pape de
l’époque, Grégoire XV, fonda la
« Congrégation pour la propagation
de la foi », un comité de cardinaux
divers chargé de rapporter la propagation du christianisme par les missionnaires envoyés dans les pays à
évangéliser.
Bien que cette succursale
de l’Eglise Catholique Romaine ne
consistait qu’à édifier des rapports
géopolitiques et religieux et à informer depuis le terrain de la situation,
elle n’utilisait peu l’image comme
support de propagande hormis les
écrits.
Il ne faudra pas attendre le
XXème siècle pour connaître les
premières images dites de propagande mettant en scènes des personnages historiques sous des angles
héroïques. Ce fut le cas dès 1865, durant la guerre de Césession aux Etats
Unis, période de guerre civile survenue en 1861 et 1865 implaquant
les Etats du Nord appelés l’Union
dirigée par Abraham Lincoln et les
Etats Confédérés d’Amérique, plus
communément appelé la Confédération, dirigée par Jefferson Davis
(officier et homme politique américain) rassemblant onze états du Sud
ayant fait cesses ion pour protester
contre l’abolition de l’esclavagisme
qui leur devait être imposé et qui
constituait la base de leur principale
source de revenu. Le général Ulysses
Grant (qui deviendra en 1869 le dix
huitième président des Etats Unis),
commandant suprême des armées
de l’Union, a été l’objet d’un photomontage élaboré sur lequel il est représenté sur son cheval au front avec
ses troupes. En réalité, le fond de la
photo est en réalité une photographie
prise antérieurement sur laquelle
a été incrusté une photographie du
général de l’Union Alexander Mac
Cook sur laquelle le visage du généralissime Grant a été rajoutée.
Dans le même registre, un
an plus tard, en 1865, le général de
l’Union Sherman est pris en photographie entourée de ses généraux,
seul le général Francis Preston Blair
manque à l’appel, ce qui ne l’empêchera pas d’être tout de même présent en photomontage sur la photographie finale. A noter cependant
qu’au delà de ce rajout, l’arrière plan
a été travaillé, ce qui montre que la
pratique était déjà courante.
Mais les premières photographies de propagande souhaitant
particulièrement provoquer indignation chez la population ont bien été
produite lors de l’épisode sanglant
de la Commune de Paris de Mars à
Mai 1871, période durant laquelle
l’Assemblée nationale lance une
insurrection armée contre le gouvernement de Versailles, prônant
l’autogestion suite à la capitulation
du gouvernement durant la guerre
franco-prussienne de 1870. L’une
d’entre elle, une scène de massacre
des dominicains* d’Arcueil sur la
route d’Italie le 25 Mai 1871 faisant 18 victimes. En réalité, cette
photographie fut montée par Eugène Appert, photographe français
ayant pris part pour le régime de
Versailles. La position des acteurs se
faisant passer pour des communards
dans des positions excessives sont
invraisemblables, les fusils n’étant
pas pointés dans les bonnes directions également. Ces photographies
furent vendus avec succès comme
documents authentiques. Plusieurs
albums sont publiés avec cette dernière, ce qui a permis au régime de
noyer totalement la vérité historique. dérer comme la première superproduction en faisant évoluer à l’écran
Le terme propagande prend des milliers de figurants en simultaune connotation péjorative au cours née pour certaines scènes retracant
du XXème siècle, partiellement de manière volontairement enjod’abord à la suite de la Première livée les événements de la révoluGuerre mondiale de 1914-1918 tion russe d’Octobre 1917 durant
ou les états engagés dans le conflit laquelle les bolchevicks sont arrivés
avaient abusé massivement du au pouvoir . Tourné essentiellement
contrôle de l’information permettant vers la symbolique communiste,
de maintenir la cohésion sociale, l’idéal d’un peuple égal, unis et indont la révolution allemande de divisible face à la caricature d’une
1918-1919 déclenchée par les Spar- aristocratie tsariste et bourgeoise, le
takistes, un mouvement politique film est sortie le 14 Mars 1928, soit
d’extrême gauche marxiste, sonnera un an après le jubilé, due à la traque
la fin du conflit.
et l’exil d’un des acteurs majeurs de
la révolution : Léon Trotsky* dont
En 1930, le dictateur com- Eisenstein, face à cet imprévu, a mis
muniste totalitaire Joseph Staline fit un an pour effacer toute image de lui
de la retouche d’image un instrument dans son film.
politique majeur et emblématique de
son pouvoir. Ainsi, son régime prit
l’habitude d’effacer des photographies officielles toutes personnes
ayant tombé en disgrâce, comme le
commissaire du peuple aux affaires
intérieures Nikolaï Lejov, fusillé par
le régime comme étant le seul responsable « officiel » de la mort de
plus de deux millions de personnes
lors des purges staliniennes de 1936
à 1938.
La pratique s’est alors généralisée
en 1936 puisqu’à son tour, Mao Zedong, fondateur et dirigeant de la
République Populaire de Chine ou
encore Adolf Hitler utilisèrent ce
procédé pour effacer des personnes
indésirables après s’en avoir débarrassé car dissidente à l’idéologie instaurée.
Mais là ou l’image est devenue plus puissante que jamais par
le biais de la dictature, c’est dans sa
coordination et sa diversification, ou
elle est passée au rang d’arme pour
aliéner la population. En effet, les
supports papiers sont la première
source de propagation de l’image et
donc du message de propagande alliée à la technique du photomontage
comme en Allemagne Nazi ou encore en URSS. Les codes artistiques
divergent en fonction du pays mais
l’intention de frapper les esprits restent le même, le culte de la personnalité développé autour des dictateurs
se fait ressentir sur une grande partie
des affiches, servant essentiellement
a montrer la domination d’une idéologie, l’unité d’un peuple et la détermination ainsi que la conviction de
ce dernier.
Le développement des films
de propagande est une autre composante, avec la radio qui a développé l’efficacité de la propagation
du discours. En effet, la propagande
voit dans le cinéma un potentiel très
important et n’hésite pas à employer
des moyens financiers conséquents
dans le but de modeler un événement marquant de l’histoire du parti
tout en nuançant drastiquement à
leur avantage le déroulement des actions.
Côté Soviétique, le film le plus marquant considéré comme une forme
pure de propagande est intitulé
« Octobre » Il s’agit d’un film muet
commandé par le pouvoir russe de
l’époque pour la célébration du jubilé 1927 de la Révolution russe, le
tout réalisé par Sergueï Mikhaïlovitch Eisenstein, cinéaste russe de
la période communiste. Ce dernier
a produit ce que l’on pourrait consi-
Côté Troisième Reich, c’est
à la réalisatrice et photographe Léni
Riefenstahl que vient le rôle de réaliser un documentaire de propagande
sur les jeux olympiques d’été de Berlin se déroulant e 1936. Ce film a la
réputation non usurpé d’être la représentation esthétique la plus proche
de l’idéal de la race aryenne dans le
sens physique du terme. Comprenant
300 personnels de tournage dont 40
caméramens, Leni Riefenstahl, dont
les pleins pouvoirs ont été donné
par Hitler en personne, va tourner
et couvrir l’événement Olympique
et se donnera deux ans pour réaliser
le montage dont les scènes les plus
emblématiques comme les nus, la
compétition de plongeon ou encore
la traversée de la flamme Olympique
seront bien souvent raccordé aux
canons de la beauté grecque durant
l’Antiquité*. Le film sera présenté le
20 Avril 1938 et sera élevé au rang
de chef d’œuvre par l’ensemble du
parti nazi.
Helmut Herzfeld alias John Heartfield, né en 1891 en Allemagne à
Schmargendorf et mort en 1968 à
Berlin fut tout d’abord un peintre
puis un photographe. John Heartfield était très engagé politiquement
de part d’ailleurs le fait qu’il était
membre au Parti communiste. En
tant que photographe, il rejoint en
1918 le mouvement Dada à Berlin
avec son ami George Grosz. Il va ensuite s’éloigner du mouvement Dada
et créer ses premiers photomontages.
John Heartfield va alors se spécialiser dans cet art, il dénoncera grâce
à ses œuvres qu’il publiera dans des
magazines comme le journal populaire Arbeiter-Illustrierter-Zeitung
(AIZ, journal ouvrier illustré) la propagande politique et plus particulièrement le nazisme.
L’AIZ est un hebdomadaire
politique illustré fondé en 1924 à
Berlin et s’adressant non seulement
aux sympathisants du KPD, mais
plus largement aux milieux populaires et aux mouvement ouvriers international (…) a été apprécié aussi
des milieux de la gauche intellectuelle, il combine grand reportages
politiques et sociaux; textes sur la
vie quotidienne des couches défavorisées, rubriques féminine et pages
pour les enfants, avec des caricatures et de nombreuses photos, tan-
HINTERHART - Mardi 1er Septembre 2015
tôt de photographes professionnels,
tantôt de photographes ouvriers et
des photomontages de John Heartfield. Parmi les photomontages les
plus célèbres de John Heartfield et
qui plus est, le plus significatif dans
le contexte historique ou il a été crée
reste « Adolf le surhomme, avale de
l’or et crache de la camelote » de
1932 dans lequel on voit un portrait
d’Adolf Hitler, à l’époque dirigeant
du parti nazi, un an avant de devenir
le premier chancelier d’Allemagne,
dont le haut du corps a subit une radiographie ou l’on voit dans son estomac des pièces d’or. L’artiste met
en garde la population contre les
discours et promesses d’Hitler, qui
par le discours, a réussi à obtenir le
soutient de nombreux industriels qui
financent sa campagne de peur de
voir le parti communiste au pouvoir.
Cette œuvre fut tellement convaincante et puissante de sens qu’elle devint l’emblème de la lutte contre le
nazisme dans la campagne de 1933.
L’image devient à cet instant une
arme de propagande au service d’un
contre pouvoir.
Un autre épisode marquant
dans l’utilisation de l’image dans la
lutte contre le pouvoir en place s’est
produit pendant la Deuxième guerre
mondiale, le 9 Novembre 1943 ou
des résistants belges préparèrent une
édition pirate du quotidien Le soir
(quotidien généraliste belge publié
en langue française), qui rendait
compte des retraites de l’armée allemande, magnifiait l’aviation alliée, et faisait prononcer à Hitler la
phrase désabusée attribuée à l’empereur d’Allemagne « Je n’ai pas voulu
cela ». Rapidement, l’occupant s’efforça de confisquer les exemplaires
du « faux Soir » ; la Gestapo finit par
identifier les auteurs du canular, qui
furent condamnés à mort ou envoyés
dans des camps dont ils ne revinrent
pas.
Selon Klutsis, qui
en fut l’un des instigateurs, le photomontage fit son apparition en
U.R.S.S. en 1919-20, sans doute
sans qu’il y ait eu de contact avec
Berlin. Il apparaissait comme un
moyen de propagande militante et
politique par l’image (affiches, couvertures de livres) particulièrement
adapté à l’immense tâche d’information et d’éducation à laquelle devait faire face le gouvernement révolutionnaire. C’est surtout à travers
la revue LEF, organe des constructivistes, que se diffusa la nouvelle
technique. Rodtchenko, qui était
l’un des responsables de la publication, en exploita de nombreuses
possibilités, l’une d’entre elles étant
la suite d’illustrations du poème de
Maïakovski « De Ceci « (1923). De
même, Lissitsky y eut souvent recours, parfois à une grande échelle,
pour les vastes fresques décorant des
pavillons d’expositions.
Définitivement et universellement après la seconde guerre mondiale de 1939-1945 et la défaite de
l’Allemagne nazi et de ses alliés de la
triple Entente, le terme propagande
est devenu péjoratif du essentiellement au fait que sous le Troisième
Reich, Joseph Goebells, l’un des di-
rigeant les plus influents du Reich
disposait d’une fonction de ministre
de la propagande avec un bureau fort
de plus de 15 000 personnes dont
285 cadreurs, 1 329 photographes et
un certain nombre de journalistes et
de radio-reporters.) n’a pas manqué
encore de nos jours de contribuer à
renforcer l’image négative du terme.
Il faut cependant nuancer le fait que
les syndicats et les parties politiques
continuaient à utiliser ouvertement
la propagande, allant même jusqu’à
l’énoncer à l’intérieur de leur propre
parti, et ce jusqu’à la fin des années
70. Il aura fallu attendre une forme
de prise de conscience pour que
l’expression « communication politique » remplace un terme devenu
extrêmement négatif car intimement
lié dans l’opinion à la notion de dictature et de manipulation de masse.
Mais la propagande dans l’ensemble
de son sens n’a aucunement disparu
du paysage politique, et ce quelque
soit le pays ou le parti politique. La
notion énoncé comme telle n’étant
pas politiquement correcte au même
titre que le culte de la personnalité*,
on peut retrouver dans la presse
de nombreux photomontages ou
des éléments ont été retouché afin
d’éviter toute forme de protestation.
Comme exemple, nous pouvons
citer la campagne de promotion à
la présidence de George Bush en
2004 ou dans un soucis d’ethnique
et d’éviter d’évoquer le sujet de la
guerre en Irak, il fut supprimé de la
photographie.
En France, nous pouvons citer la première page du journal papier Le Figaro ou l’on remarque la
ministre de la justice, Rachida Dati
sans aucun objet d’apparat coûteux
alors que dans la photographie originale, une grande bague en diamant
trône sur sa main. Cela déclencha
une polémique peut étonnante mais
logique quant à la possibilité que le
gouvernement vive au dessus de ses
moyens dans un pays en crise économique.
Enfin, en Italie, dernier exemple
flagrant, à la demande du président
italien Silvio Berlusconi ou de ses
délégués, une photographie officielle ou l’on voit ce dernier en plein
meeting a été gonflé au niveau de la
foule venue l’acclamer puisque l’on
constate des mêmes personnes apparaître plusieurs fois.
La propagande existe encore de nos jours et a bien évolué,
au même rythme que l’évolution des
techniques et la propagation des médias sur plusieurs supports comme
la radio, la presse, la télévision, internet... Cette mise en commun de
l’ensemble de ces supports va développer chez les entités sociales
de nouvelles stratégies de communication* aujourd’hui très rependue
comme le « Cross Média », pour désigner une création recourant à une
multiplicité de médias : l’image, le
son et le film ou la vidéo. Depuis,
son sens a dérivé pour englober les
logiciels, matériels et contenus éditoriaux interactifs mettant en œuvre
l’image fixe ou animée, le son, le
texte ou encore l’hypertexte*. Même
si cette nouvelle stratégie est souvent
raccordée à partir des années 80 au
monde de la politique ou encore du
commerce, les activistes vont également se l’approprier afin de faire
valoir leurs idées.
Cross Média et Activisme
L’activisme est une pratique
qui préconise des actions directes
de façon à peser directement sur
un problème auquel on peut être
confronté, et sans avoir besoin pour
cela de faire appel à un intermédiaire
ou personnalité politique.
L’action directe implique de nier les
règles et les procédures qu’appliquent les économistes et politiciens,
afin de déterminer ce qui est juste et
ce à quoi il faut résister. Bien que
cette dernière puisse être considérée
comme un des nombreux outils que
le militant peut se mettre à disposition, cela peut également signifier
que l’on est « prêt à se battre pour
prendre le contrôle de sa vie et à
essayer directement d’agir sur le
monde qui nous entoure », à prendre
ses responsabilités quant à ses actions et aux buts poursuivis.
L’action directe de type non violente
permettrait de sortir des modes d’actions conventionnels politiques tel
que créer un réseau de personnes
afin de promouvoir et défendre les
intérêts privés d’un groupe donné
en exerçant des pressions sur des
personnes ou institutions de pouvoir
ou encore les manifestations, rassemblements et autres pétitions. Ces
derniers peuvent représenter l’étape
d’une lutte mais l’action politique
limitée à ces éléments apparaît
aux supporteurs de l’action directe
comme un grand jeu inoffensif, prévisible, ennuyeux et manquant d’impact.
Les partisans de l’action directe non violente se proposent de
montrer que l’action politique peut
avoir un impact réel sans pour autant
que cela nécessite le rassemblement
simultané de plusieurs milliers de
personnes dans la rue (des actions
retentissantes peuvent être effectuée
par un nombre réduit de personnes).
Elle permettrait aux personnes de
développer leur confiance en elles et
de leur faire prendre conscience de
leur force individuelle et collective.
Avec l’essor d’internet au
début des années 2000, l’activisme
se retrouve confronté à une mutation
révolutionnaire par le biais d’une
nouvelle forme de militantisme :
« Le Médiactivisme ».
Olivier Blondeau et Laurence Allard
ont publié en 2007 un livre intitulé
« Devenir Média, l’activisme sur
internet, entre défection et expérimentation. » dans lequel ces derniers
retracent l’histoire et l’évolution de
l’activisme médiatique tourné vers
la protection de l’héritage culturel et
intellectuel.
Dans cet ouvrage, ses auteurs prennent le temps de définir dans un premier temps les différentes caractéristiques qui différencient l’activisme
désormais post-médiatique (c’est à
dire depuis la création d’internet)
de l’activisme traditionnel. En effet,
l’activisme post médiatique se sert
d’internet comme d’un support afin
de transposer les expérimentations
qu’il y réalise dans la vie réelle. A
défaut de s’enfoncer dans un monde
virtuel, internet lui permet d’acclimater, de moduler, d’ordonner
des idées nouvelles afin de pouvoir
les reproduire au travers de mouvements sociaux et d’événements.
Les TAZ (Temporary Autonomous
Zone), dénomination introduite par
Hakim Bey, écrivain politique américain, dans son livre intitulé « TAZ,
Autonomous Temporary Zone ».
Son œuvre, interprétée par ses lecteurs comme une forme d’organisation éphémère menant à l’anarchie
(proche de l’utopie pirate), est une
attaque en règle contre le pouvoir
établi ainsi que les lois du marché.
Bien que l’idée s’est propagée et développée sur le net, les activistes ont
retranscrit une volonté réelle d’établir des TAZ, notamment lors du rassemblement des partisans à l’élection présidentielle de George Bush
au Madison Square Garden de New
York en 2003 ou plus récemment, le
Burning Man dans le désert du Nevada, le Fusion Festival dans le Nord
de Berlin ou encore le CzechTek en
République Tchèque, tous des festivals de musique liés à l’idée de la
libre expression et de l’autogestion.
L’initiateur d’une action activiste
sur le net s’efface alors au profit
de cette dernière. Elle se porte sur
sa forme qui a été modulée spécifiquement et qui apporte un impact
ciblé et efficace. Et c’est là toute la
différence entre le Médiactivisme
et l’activisme pré-médiatique (voir
traditionnel). Le premier articule
une idée modulable au service de
la personne alors que le second met
la personne au service d’une idée
pré-définie, limite dogmatique, à la
forme acquise et déjà configurée par
défaut. De ce fait, le Médiactivisme
considère que toute action libre de
la pensée doit partir d’une feuille
blanche afin de proposer un contre
modèle efficace et déconstruire les
médias dominants et coutumiers par
une architecture nouvelle comme
c’est le cas avec E-Toy corporation,
groupe d’artistes et activistes numériques d’origine européenne, qui ont
fondé leurs actions autour du modèle
des entreprises à rayonnement mondial et agissent au nom de « l’entreprise » E-Toy Corporation dont le
siège social est enregistré en Suisse.
C’est également le cas avec la pratique du found footage dont le principe est de recomposer en redécoupant et réorganisant les différentes
séquences d’une vidéo afin de lui
donner un sens nouveau, dans un but
humoristique ou engagé. Il s’agit de
mettre les images dites dogmatiques
diffusées par les médias dominants
dans un contexte d’énonciation différent de leur contexte initial afin de
montrer ce que l’on ne veut pas voir
ou ne pas montrer.
Par cette pratique d’appropriation
des images et de réarrangements
survient un domaine cher au Médiactivisme : l’open source et les
licences Creatives commons. L’usager de morceaux de musique peut
désormais réarranger une composition pour en faire une œuvre à part
entière. Les acteurs des œuvres correspondantes peuvent décider de
l’usage que le public peut faire de
leurs créations au point qu’il s’agit
d’un compromis entre le contrôle total et l’omniprésence du copyright et
de la supposée anarchie d’internet et
la libre circulation des savoirs et des
acquis. C’est à partir de cette constatation qu’Olivier Blondeau et Laurence Allard pointent du doigt le fait
que le Médiactivisme a bouleversé
les conditions de productions et
l’usage des savoirs de ces derniers.
La dernière partie de l’ouvrage est
consacré au principe de la syndication de contenus web par le biais
des flux RSS. Ce système permet
d’accélérer la mise en commun de
données, d’informations sans passer par des moteurs de recherche.
La finalité étant de rendre indépendant les contenus de leur environnement éditorial d’origine au point
de ne garder que l’essence même
de l’information. Les flux rss peut
être assimilé à ne pieuvre ou la diffusion même des éléments revient
aux usagers de ce réseau et est donc
autonome et imprévisible car non
centralisé au même titre que The Pirate Bay, Emule, Limewire, autant
de noms donnés à des systèmes de
serveurs informatiques permettant
le partage de fichiers mutualisés par
le protocole de communication BitTorrent (ou P2P). La syndication du
Médiactivisme, au même titre que
l’open source ou les licences créatives commons ne configurent pas
un corps collectif mais donne de la
réalité ainsi que de la matière à des
objectifs, des devenirs communs.
La Temporary Autonomous
Zone (ou Zone Autonome Temporaire) citée plus haut est une dénomination introduite par Peter Lamborn
Wilson dit Hakim Bey (signifiant
« le sage » en arabe), dans son livre
homonyme TAZ paru en 1991. Dans
ses écrits, libre de droit, Hakim Bey
mène une attaque en règle contre la
société moderne. Il développe, sans
même chercher à définir clairement
ce qu’est une TAZ, le principe d’un
espace restreint éphémère, « proche
de l’utopie pirate », qui défierait
les lois du marché et le contrôle de
l’état. Une TAZ peut se voir attribuer le terme de nomade car elle se
déplace constamment afin d’échapper à la surveillance des autorités.
Ce livre est rapidement devenu culte
dans les milieux underground, et
a trouvé un écho auprès des utilisateurs d’internet, plus particulièrement chez les hackers. Ainsi, les
principes que l’on peut associer aux
TAZ sont toutes les actions et tous
les éléments qui nuiraient au commerce habituel, que ce soit les logiciels libre de droits, les attaques
contre les sites gouvernementaux et
d’autres formes d’autorités, le développement de sites d’échanges communautaires comme Wikipédia ou
encore l’avènement des sites Peer to
Peer.
Parmi les sites Peer to Peer suivant
à la lettre l’idéologie pirate jusqu’à
en faire référence au travers de leur
logo, The Pirate Bay fait figure de
référence indéniable. Crée en Suède
en 2003, il fait figure de résistance
contre toute réforme des droits
d’auteurs à travers le monde. Il est
d’ailleurs considéré comme le plus
grand serveur torrent du web, recevant chaque jour la visite de plusieurs centaines de milliers de visiteurs.
Du point de vue informatique, le procédé du Peer to Peer (Traduction anglaise de « Pair à Pair »)
consiste en un ensemble d’ordinateurs connectés les uns aux autres
et qui se partagent les informations.
Dans le cadre d’un fichier, si celui
ci est transféré sur un réseau Peer to
Peer afin d’être partagé, ce dernier
va voir ses pièces se faire transférées
individuellement de poste en poste
(ou de client en client). Il suffit alors
que le distributeur originel envoie
une copie du fichier pour que chaque
client du réseau en reçoit une copie.
Ce système, ou l’information est
dispersée puis innombrablement dupliquée et conservée en diverses endroits, est difficilement localisable et
attaquable, ce qui permet de conserver un flux constant d’échanges de
données, quelque soit les attaques.
En dehors du web, les serveurs ont
subi de très nombreuses migrations
internationales afin d’échapper à la
justice. C’est en Janvier 2007 que le
plus gros coup médiatique à ce sujet
s’est produit. The Pirate Bay avait
alors tenté de racheter suite à un appel aux dons de 2 000 000 de dollars
américain la principauté de Sealand,
une micronation non reconnue par
les nations unis située sur une plateforme militaire au large du Royaume
Uni. Cette transaction n’aboutira
pas. Le serveur torrent se doit par
ailleurs de renouveler constamment
ses différents noms de domaines en
fonction des fluctuations de la justice
auquel le nom de domaine est rattaché. Ainsi, en début Décembre 2013,
le nom de domaine thepiratebay.sx
hébergé sur l’ile de Saint-Martin fut
saisi sous la pression du BREIN (association hollandaise pour la protections des droits de l’industrie), c’est
alors qu’en l’espace d’une semaine,
The Pirate Bay transféra son nom de
domaine au Pérou, puis en Guyane
avant de retourner en Suède.
Malgré l’interdiction au Royaume
Uni, en Irlande, en Finlande, en Iran,
en Corée du Nord, au Pays Bas, en
Belgique, au Danemark et en Italie,
The Pirate Bay continue de défier,
tant et si bien que sa seule activité
ininterrompu depuis sa création est
un véritable pied de nez à l’industrie
de droit et aux cadres du commerce.
Cet état d’esprit directement
inspiré des Temporary Autonomous
Zone est une guerre permanente, un
jeu et de la souris qui rappelle les
paroles de Hakim Bey dans l’émission Tracks Spécial Pirates passé sur
Arte: « Le plus grand Jihad, c’est le
combat que l’on mène sur soi même,
et sur son environnement immédiat. A plus grande échelle, on peut
considérer le Jihad comme une révolution permanente, omniprésente,
et qui perdure sous une forme ou
une autre. C’est ce que j’entends par
« Jihad » ». Une révolution permanente qui n’arrêtera pas de secouer
le web 2.0.
La culture underground a
souvent un lien étroit avec l’activisme de part les techniques communes qu’elles emploient. Mais
l’activisme peut se muer en d’autres
activités dont la culture dites « jamming » en est la détentrice. « Jamming », que l’on peut traduire en
français par sabotage culturel ou
détournement culturel, est l’acte de
subvertir de l’intérieur le fonctionnement d’un média de masse existant, en usant de la même méthode
de communication utilisée par ce
média afin de le détruire ou le substituer. Il peut prendre la forme d’un
militantisme satirique qui s’oppose
généralement au monde du business,
du capitalisme, du commerce et des
grandes marques. Utilisant la tactique de l’ironie, ces actes peuvent
s’apparenter à une véritable « guérilla des communications ». Souvent, les sabotages culturels visent à
rendre visibles certains présupposés
politiques ou sociaux qui sous-tendent la culture commerciale. Différents mouvements activistes l’utilisent pour dénoncer ce qui est perçu
comme une hégémonie de la culture
marchande. Parmi leurs modes d’action : la réappropriation de logos, de
slogans publicitaires et des codes
d’une image de marque. D’autres
fois, le détournement culturel s’apparente davantage à une pratique
créative de l’ordre de la passion
amateur, sans porter de revendication politique ou de message protestataire par le biais de fanarts, de
fanfictions voir même de détournements*.
L’intention de ces pratiques
de la ruse diffère de celle de l’appropriation artistique (qui est faite dans
le but de produire une œuvre d’art,
le plus souvent destinée à un marché de l’art) et du vandalisme (où
destruction ou mutilation sont les
buts premiers), bien que les résultats obtenus ne soient pas toujours
si éloignés. Le sabotage culturel
peut prendre des formes très variées
: détournement publicitaire, canular
médiatique, détournement de nom
de domaine, bombardement Google,
remix, mashup vidéo, hacking,
slashing, piratages radios et télévisés, contre-surveillance vidéo.
Parmi les groupes d’activistes issues de la culture jamming
ayant eu des actions directes contre
la classe politique, nous pouvons citer le Parti de la Jeunesse Internationale (The Youth International Party),
dont les membres étaient courrament appelés Yippies. Il s’agissait
d’un groupe radical à majorité étudiante, contre culturel et révolutionnaire pour la liberté de parole et
contre toute forme de guerre dans
les années 60. ce dernier fut fondé le
31 Décembre 1967. Ils n’hésitaient
pas à se mettre en scène, à faire des
coups de théâtre, comme présenter
un cochon nommé « Pigasus l’immortel » à la présidentielle américaine de 1968, afin de se moquer du
statut quo social que s’imposait le
gouvernement de l’époque. Ils ont
été également décrit comme anti autoritaire et anarchiste. ABC News,
une chaine télévisée américaine, les
a même surnommée les « Groucho
Marxists » en référence au nom de
scène du comédien Julius Henry
Marx qui possédait une allure volontairement très typée.
Dans le même registre, Veterans of
Future Wars (VFW ou « Les Vétérans des Futures Guerres ») était une
organisation étudiante formée en
1936 et élevée au rang de canular à
l’Université de Princeton aux Etats
Unis. Le groupe fut crée en guise de
réaction satirique à un projet de loi
accordant le versement anticipé de
primes aux vétérans de la première
guerre mondiale de 1914-1918
comme il est articulé dans leur manifeste :
« Comme il est inévitable
que ce pays sera de nouveau engagée dans une guerre durant les trente
prochaines années et comme il est
inévitable que toutes les personnes
en âge de faire leur service militaire seront obligé d’y prendre part.
Nous, futurs soldats, demandons
que le gouvernement fasse connaître
ses intentions de dédommager par
avance, à auteur de 1000 dollars,
tous les citoyens mâles américain
entre l’âge de 18 et 36 ans à partir du
1er juin 1965. De plus, l’histoire de
ce pays nous a montré qu’il est courant de payer des dédommagements
par avance*. En occurrence, nous
demandons un dédommagement en
liquide, en plus des 3% d’intérêt déduit annuellement et rétroactivement
du 1er Juin 1965 jusqu’au 1er Juin
1935. C’est un droit fondamental
que de demander le dédommagement dès maintenant, pour les nombreuses futures victimes et blessés
de la prochaine guerre ; et par conséquent, ces hommes les plus méritants
n’auraient pas reçu les honneurs de
la nation.
Ce manifeste circula à travers le pays alors que la presse
s’empare progressivement du sujet. Le sénateur de l’Arkansas de
l’époque, Claude Fuller, contribuera
même contre sa volonté à la visibilité du mouvement en le dénonçant
publiquement sur le parvis de la
chambre d’état. Bientôt, ce sont des
annexes par dizaines qui s’ouvrent à
travers le pays, dans la plupart des
campus universitaire. Les nouveaux
membres pour le moins enthousiaste
jusque dans le Dakota du Nord remettent leurs cotisations au QG du
mouvement situé à Princeton et
adoptent par la même occasion le
salut de l’organisation, le bras levé
en direction de Washington avec la
main plate et docile, un clin d’œil
moqueur envers le salut fasciste se
rependant à travers l’Europe.
Le message du mouvement a obtenu
un écho rare qui a interpellé à la fois
les conservateurs et les républicains,
qui l’ont traduit par une bonne intention afin de garder l’actuel président Roosevelt de mener le pays à
la banqueroute à cause notamment
de son budget militaire. D’un autre
côté, les libéraux pacifistes ont vu le
mouvement comme une opportunité
de satiriser la guerre en elle même.
Cependant, beaucoup de vétérans
ont été déçu des réactions du gouvernement et en sont ressortis avec
un goût amer.
En Juin 1936, les Vétérans des Futures Guerres ont atteint le pic des
50000 adhésions en règle réparties
dans 584 campus universitaire. Durant l’année universitaire suivante,
la nation fut focalisée sur l’élection
présidentielle, qui donnera Francklin
Roosevelt successeur à sa propre
succession. Le mouvement cessa
alors ses activités en Avril 1937.
Ironiquement, le manifeste de ce
groupe servit de prophétie qui joua
un bien mauvais tour aux fondateurs
même de ce dernier. En effet, hormis
un homme ayant eu un accident de
voiture, tous les fondateurs servirent
dans les corps armés américains durant la seconde guerre mondiale.
Le détournement de nom de
domaine est une autre tactique d’occupation de l’espace médiatique, qui
est parfois aussi utilisée à des fins
militantes ou politiques. Comme l’a
démontré des étudiants québécois
protestant contre la hausse des frais
de scolarité décidée par le gouvernement de Jean Charest en 2011. Ces
derniers ont alors acheté et occupé
le nom de domaine linebeauchamp.
com, récupérant ainsi le nom de la
ministre de l’Éducation Line Beauchamp (qui n’avait pas acheté le
nom de domaine, cedernier pouvant
être récupéré légalement en payant
les droits) pour faire passer leur
message de protestation. Ce mouvement étudiant a également appelé
ses membres à se rendre sur le site
HINTERHART - Mardi 1er Septembre 2015
HINTERHART - Mardi 1er Septembre 2015
artruppen, d’un extrême à un autre
Présentation
gouvernemental droitsdescolarité.com, qui
faisait la promotion de la réforme gouvernementale, dans le but d’épuiser le budget
publicitaire que le ministère de l’Éducation,
du Loisir et du Sport avait alloué à cette
campagne. Selon les responsables de l’opération, chaque clic dans les pages du site
coûtait entre 0,15 $ et 1,20 $ au gouvernement, et les bandeaux publicitaires auraient
rapidement disparu du site, signe que l’opération aurait réussi.
Schwa (traduction hébraïque de
« vain ») est un concept artistique underground réalisé par Bill Barker. Nous savons
peu des choses à propos de l’auteur mais ce
dernier a dessiné de manière simple des petits hommes verts et des vaisseaux aliens en
noir et blanc afin de les imprimer sur des
autocollants. Même si sa démarche n’a pas
comme motif l’existence des aliens, il s’agit
en réalité d’analyser comment les sujets réagissent à la présence de ses stickers. Barker
veut les utiliser comme métaphore pour illustrer l’instant ou la société fait face à de
nouvelles idées dérangeante.
Bill Barker a également fait équipe
avec AOL (American Online, une soicité
américaine de services internet) pour créer
un jeu en ligne pour le moins déroutant.
Exclusivement accessible par les clients
d’AOL, il travailla également avec le défunt
Studio Orbital sur ce jeu dont les thèmes
sont la conspiration, les corporations et les
aliens. Les instructions initiales du jeu donne
le ton : « Ne suis pas les règles. Méfiez vous
en. Elles ne sont pas ce qu’elles prétendent
être. » Le joueur incarne un petit homme
vert au beau milieu du monde sombre et
conspirationniste de Schwa. Il doit trouver
son chemin pour atteindre le sommet de
la pyramide en collectant et alimentant sa
source de pouvoir par le biais des médias,
des multinationales et du gouvernement
dans l’optique de dominer le monde.
Le jeu a été lancé le 9 Mars 1998 et est devenue une référence underground des années
90. Une suite à ce jeu nommée « Schwa
Conspiracy » a été annoncé pendant des années, mais ne fut jamais achevée.
Dans le monde de la presse écrite,
« Adbusters » ,fondé en 1989 fondé par
Kalle Lasn et Bill Schmalz, est à la fois un
magazine (Adbusters magazine), une fondation (Adbusters Media Foundation) et une
référence dans la culture jamming. Financièrement soutenu par ses seules ventes sans
aucune publicité ni commanditaire, il est publié dans plusieurs pays grâce à Adbusters
Media Foundation. Son tirage est évalué à
120 000 exemplaires.
Celle-ci se définit elle-même comme un réseau de militants, d’écrivains et d’artistes qui
veulent innover dans de nouvelles formes
de militantisme propres à l’ère de l’information qui caractérise notre époque. Cette
fondation s’engage dans de nombreuses
causes sociales ou politiques, dont la plupart
s’opposent à la consommation de masse
voir même anticapitaliste. Elle promeut des
campagnes-chocs comme « la journée sans
achats », « la semaine sans télé » et du mouvement plus récent « Occupy Wall Street »,
inspiré des révolutions tunisiennes et égyptiennes de 2011, ou des centaines de militants ont établit pendant plusieurs jours un
camp de fortune aux abords de Wall Street
dans le but de dénoncer le capitalisme.
Mais la référence absolue de la culture jamming tout comme une figure emblématique
du médiactivisme est le groupe Yes Men
ou les Béni Oui Oui. Composé de ses deux
membres fondateurs : Jacques Servin et
Igor Vamos, connus sous les pseudonymes
respectifs de Andy Bichlbaum et Mike Bonanno. Ces derniers dénoncent le libéralisme par la caricature et la satire au travers
de différents moyens. Ils ont essentiellement
connus pour leurs plus grands « méfaits »
comme celui ou en se faisant passer pour
des intervenants lors du sommet de l’OMC
(Organisation Mondiale du Commerce) de
l’an 2000, ils ont entre autres prononcé des
discours satiriques sur la privatisation du
marché des votes et sur l’apologie de l’esclavage à domicile, lesquels n’ont pas suscité de réactions particulières de la part des
spectateurs présents, si ce n’est des remerciements. Ils ont également diversifié leurs
cibles, parmi lesquels le président américain George W. Bush ou encore le groupe
chimique industriel Dow Chemical. Ils ont
également fait parler d’eux le 12 Novembre
2008 ou ils ont diffusé à 100 000 exemplaires un faux numéro du quotidien New
York Times dans lequel ils ont titré que « La
guerre en Irak est finie ».
Enfin, Etoy Corporation est un
groupe d’artistes médiactivistes fondée sous
la forme d’une entreprise multinationale en
1994 par Gino Esposto, Michel Zai, Daniel
Udatny, Martin Kubli, Marky Goldstein,
Fabio Gramazio et Hans Bernhard dont le
siège social est enregistré à Zurich comme
une société d’actionnaires conformément
à la loi Suisse (RC CH-170.3.029.244-4)
. Elle est composée d’un noyau dur interchangeable regroupant différents corps de
métiers comme des ingénieurs, des musiciens, des artistes, des architectes, des
avocats et des graphistes. Etoy œuvre donc
comme une équipe à géométrie variable et
un ensemble de talents en mouvement. En
conséquence, la glorification de l’artiste
individuel comme une star ne s’est jamais
présentée pour Etoy. L’architecture et l’esthétique d’Etoy sont basées sur la somme
d’idées et de ressources engagées par un
bon nombre de personnes. Ces derniers
communiquent entre eux grâce à un système
d’ordinateurs en réseau qui permet à chaque
Etoy agent de travailler ensemble malgré la
distance géographique.
Le groupe est considéré comme un
mensonge idéologique naïf ainsi qu’une fi-
celle marketing superflue pour promouvoir
l’idée que les artistes travaillent en dehors
du système financier. Pour eux, la réalité
économique fait partie de la vie, du développement, de la production et de la distribution. L’art n’en est évidemment pas exclu
ou innocent. Ce qui ne veut pas dire que
nous acceptons la réalité économique et les
structures politiques telles quelles. Etoy et
ses associés remettent en question, manipulent et jouent avec les codes et les règles qui
constituent la société, dès qu’il y a un intérêt
à le faire.
Cette manière d’agir n’a pas toujours plu
aux autorités. En effet, ces derniers ont infiltré en 1996 le Web en se servant d’un logiciel qui a miné la Toile de milliers de fausses
pages, référencées avec les 2 400 mots clés
les plus demandés sur les moteurs de recherche. Yahoo, Altavista, HotBot & Co ont
complètement perdu le Nord, laissant les internautes converger vers des « trappes » à
surfeurs. Une façon de montrer que le Net
n’est pas aussi neutre et indépendant qu’il
y paraît, puisqu’on peut le manipuler à sa
guise. Les services secrets américains en
collaboration avec le bureau autrichien antiterroriste ont alors lancé des raids dans les
bureaux des fournisseurs et les studios Etoy
basés à Vienne dans le but de les fouiller.
Essayer de remettre en question et d’élargir
les limites de la loi dans des domaines où
cela s’avère nécessaire est l’un des objectifs
principaux d’Etoy comme les réglementations concernant les drogues, la désobéissance civile, la liberté de parole, le cryptage,
les droits d’auteur ou les lois se rapportant
à la citoyenneté. Etoy prépare toujours soigneusement et accomplit des opérations
délicates en proche collaboration avec des
avocats et des spécialistes extérieurs si le
projet l’exige.
En 1998, Etoy s’introduit en Bourse. Le
premier lot d’actions est remis au chancelier autrichien Viktor Klima en personne.
Ce n’est pas une vraie « IPO » (Initial Public Offering) au Nasdaq, mais sur le marché international de l’art. On paie toutefois
en vrais dollars pour acheter les parts de
ce qui devient alors une holding. Parmi les
plus de 2 000 actionnaires et 640 000 actions disponibles, on retrouve l’activiste
John Perry Barlow. Selon Hans Bernhard,
l’un des fondateur d’Etoy: « L’introduction
en Bourse d’Etoy n’était pas vraiment une
question d’argent. Puisqu’en réalité, nous
n’avions pas de dividendes à verser. » En
somme, c’était plutôt du mécénat des temps
modernes.
Mais c’est bien en 1999 que fut réalisé le
plus gros coup d’éclat du groupe artistique,
nom de code : Toywar. Etoy.inc, une entreprise multinationale de fabrication de
jouets, voulu acheter a Etoy.corp
pour 516 000 dollars leur nom de
domaine dans le but qu’il n’y ai
plus d’ambiguïté entre les deux
entités. En refusant leur offre,
Etoy.inc a alors poursuivit en
justice la société d’actionnaires
artistiques pour « compétition
déloyale, commerce frauduleux,
fraude sécuritaire, contrebande,
contenu offensant et apologie
du terrorisme ». Ce à quoi Etoy.
corp a vigoureusement répliqué
en produisant une campagne médiatique massive via internet et
conduisant des attaques de dénis
de services (DdoS) contre leur
site officiel. Lorsque Etoy.inc décida d’abandonner les charges, la
multinationale avait perdu 60%
de valeur en bourse et a enregistré une perte de 4,5 milliards de
dollars, ce qui fait de la Toywar,
l’action artistique la plus chère de
l’histoire de l’art.
Mais Etoy ne s’arrête
pas aux rapports économiques entre l’art
et le monde de la finance. Leur récent projet « Mission Eternity » interroge la mort
à travers les fragments numériques des
défunts. « Mission Eternity » propose un
culte mortuaire des temps numériques. Il
s’agit de permettre l’immortalité virtuelle
de « Pilots », par le biais de portraits numériques, intitulés par les artistes « capsules
Arcanum », qui leur survivront. Comme le
projet est en phase de test, les « Pilots » sont
actuellement des novateurs dans l’informatique et des nouvelles technologies : il s’agit
de Timothy Leary, le seul décédé, en 1996,
chantre du psychédélisme et de la cybernétique, et de Sepp Keiser, un entrepreneur et
pionnier du micro-film en Suisse. Ce dernier
a expérimenté avec le collectif pour créer
sa propre capsule (à base de textes et de fichiers audiovisuels, de multiples contextes
et provenances).
Un autre élément du projet est le
« Sarcophagus », un container aménagé en
lieu de culte et posé pendant le festival près
de l’Ars Electronica Center. Les capsules
peuvent y être consultées. C’est également
le lieu où reposent une partie des cendres
des « Pilots », l’interface entre corps et
données. Il est exposé dans les lieux d’art
comme représentation visuelle du projet.
Ainsi, le festival a accueilli une cérémonie
où 8g de cendres de Timothy Leary ont été
mélangées à du béton pour former un cube
(appelé « Terminus ») qui a été posé dans le
mur, remplaçant un pixel en mouvement. Le
Sarcophagus contient plus de 17 000 pixels
et peut donc accueillir plus de 17 000 Pilots.
Les capsules sont également disponibles en
ligne : lorsque chaque Pilot a « franchi la
date limite », selon le slogan du projet, c’està-dire meurt, sa capsule est rendue publique
dans le Sarcophagus et sur Internet. Aucune
capsule n’est consultable à l’heure actuelle
puisque le seul Pilot pour lequel un dossier
a été conçu, Sepp Keiser, est toujours en vie.
Le stockage de ces capsules se fait de manière novatrice : au lieu de centraliser tout
sur leur serveur, les artistes font appel à des
« Data Angels », des personnes qui mettent
à disposition du projet 50 Mo de leur disque
dur. En multipliant les fichiers et en les gérant grâce à des logiciels libres, « Mission
Eternity » propose un mode d’archivage
participatif, qui répond à la proposition du
projet de lieu collectif, hors de toute religion, pour se souvenir des morts. D’autres
« Angels » accompagnent les etoy.agents
(les membres d’etoy.corporation) pour discuter de ce qui est en jeu avec ce projet, que
ce soit par rapport à l’art, la technologie ou
bien le droit.
L’infiltration et le concept de virus
sont cruciaux dans l’etoy.art, sur le net ou en
dehors. etoy est un virus controversé mais
généralement sympathique, qui pénètre un
système sans le détruire ou l’endommager.
L’etoy.virus modifie seulement la façon de
fonctionner du système. Dans la plupart des
cas, son intervention améliore les qualités
du système. Si l’hôte se sent agressé, il rejette ou même anéantit le virus. Par conséquent, un virus performant à long terme
doit toujours trouver un compromis avec le
corps récepteur.
Il est nécessaire de préciser que
l’idée ou le besoin de l’Homme de se dresser contre l’ordre établit a été annoncé
dans les années 50 par l’École de Francfort (en allemand « Frankfurter Schule »)
est le nom donné, à partir des années 50, à
un groupe d’intellectuels allemands et par
extension à un courant de pensée, souvent
considéré comme fondateur ou paradigmatique de la théorie critique. Il retient en effet
du marxisme et de l’idéal d’émancipation
des Lumières l’idée principale que la philosophie doit être utilisée comme critique
sociale du capitalisme et non comme justification et légitimation de l’ordre existant,
critique qui doit servir au transformisme.
En conclusion de cette partie, bien
que l’image était déjà considéré comme
une représentation d’une représentation du
réel par le biais de nos sens, l’apparition
de la photographie et du cinéma ont forcé
les Hommes à reconsidérer leur vision du
réel et a tout changé dans l’histoire de l’art
elle même. D’abord considéré comme un
procédé artistique porteur d’un message de
protestation et engagé selon les avant garde
du début du XXème siècle, le photomontage devint progressivement la composante
même de la propagande des états totalitaires,
au même titre que le cinéma. Effacement
de personnalités désavouées, assemblages
d’affiches, rajouts d éléments permettant
d’amplifier la puissance d’une image, réinvention de l’histoire, tout est bon pour organiser un culte de la personnalité autour du
dictateur. Avec l’apparition dans les années
80 du Cross Média, de nombreux groupes
jusqu’à alors militants conventionnels, deviennent des médiactivistes, c’est à dire un
ensemble d’individus dont les armes sont
essentiellement liées aux réseaux sociaux
internet, à la culture underground/jamming.
Prônant l’action directe, ces derniers sont à
l’origine de nombreux coups d’éclats médiatiques par l’usage de faux, de diffusion
de masse, de rassemblements illégaux dans
le but de dénoncer une société aliénée régie
par des règles favorisant le profit à l’Humanisme.
Étymologie: mélange du vant un chevalet à essayer de transfrançais «Art» et de l’allemand poser leur propos dans une scène
«Truppen» («troupes» en français). mythologique. Les futuristes n’auraient même pas eu la possibilité
Les Artruppen sont un groupe de revendiquer quoi que soit sans
d’activistes militaire qui dénoncent la puissance du moteur à explosion.
ce qu’ils appellent le Rückstartding, Malheureusement, le fléau de l’huune forme d’art dominante qui privi- manité qu’était la nature commenlégie la renommée de l’artiste et le çait insidieusement à refaire. Bien
message que peut véhiculer l’œuvre sûr sous un visage différent mais le
à la pratique et la technique assidue loup sous les vêtements d’une tendre
du médium.
grand-mère restait une bête assoifNous savons peu de choses quand fée de sang.
à la date de sa formation. Cepen- Désormais, les libérateurs d’hier
dant, les premières apparition du voyaient leur propos outrageusegroupe se seraient produites dans la ment détourné par une caste pseudeuxième moitié du printemps de do-artistique sans aucun scrupule.
l’année 2013 à la faculté de Lettres Elle n’avait que l’argent aux lèvres,
d’Aix en Provence, sur le site Ro- baignant dans des abus repoussant
bert Schumann. Certaines rumeurs jour après jour les limites de la déprétendent même qu’il y aurait des cence. Cette ignominie portant le
étudiants du secteur Arts plastique nom de rückstärtding, prenait avec
à l’origine de cette mouvance. Les la fin de la seconde guerre une place
Artruppen utilisent massivement toujours plus importante sur ce qui
le cross média et l’action directe à n’était plus qu’un marché de l’Art.
la fois pacifique et violente comme La régression semblait inévitable
armes de prédilection.
mais pourtant une lueur d’espoir apparaissait à l’horizon. Certains di
Leur emblème est un aigle sent qu’il s’agissait des membres du
bicéphale tenant dans ses griffes un Pop Art, mais l’Autocratie ni voit la
pinceau, déployant ses larges ailes et qu’une façade que la bien pensante
couronné par des rayons de soleil.
générale tente d’instaurer. En effet
La symbolique de l’aigle corres- en se projetant plus en avant dans la
pond au ciel, au soleil ainsi qu’au ligne temporelle, les vrais génies se
divin. Plus encore, la combinaison trouvaient être des hommes comme
de l’aigle et du soleil correspond à MC Carthy rallumant le flambeau
la perception directe de la lumière des avants-gardes d’antan. Avec un
intellective. Chaque tête de ce der- cynisme et un réalisme sans faille,
nier correspondent respectivement à ce dernier avait comme ses aïeux un
la technique et la théorie, symboli- regard perçant sur les dépravés de
sant un équilibre entre les deux élé- son époque tout en utilisant la pointe
ments. Enfin, le pinceau tenu par ses en matière de technologie pour enregriffes acérées désigne le domaine gistrer ses performances. Tout était
dans lequel les Artruppen évoluent: bien dans le meilleur des mondes file monde de l’Art.
nalement ?
L’emblème des Artruppen se re- La réponse est désastreusetrouve sur différents supports ment non. Le cycle nauséabond du
comme les drapeaux, les étendards, rückstärtding initié après guerre se
les tampons, les affiches de propa- renouvelle inexorablement. Cette
gandes, les vidéos, les pochoirs ou fois-ci c’est l’hybridation qui porte
encore les documents officiels.
la faux mortuaire, s’élançant pour
anéantir une bonne fois pour toute
Leur raison d’être se base sur l’âme de l’Art. Aucun être ne semble
un document dont tout membre du vouloir créer une rupture directe
groupe a pris connaissance et consi- s’opposant à cette facilité abrutisdère comme un texte fondamental. sant sans vergogne la moindre parIl s’agit de la doctrine «10011936», celle d’intellect propre à l’Homme.
publiée le 09 Février 2013. C’est Le passé nous a appris qu’une ludans ces écrits qu’apparaît pour la mière dans les ténèbres ne suffit pas
première fois le terme «Rückstar- pour éradiquer le mal. La nature, les
tding», englobant l’art minimal, discours abscons, et bien d’autres
l’arte povera, l’art conceptuel et cer- ont été des freins à l’expansion intains artistes pratiquant des perfor- tellectuelle de notre espèce. Cela
mances inspirées des actionnismes doit cesser si nous voulons un jour
viennois*.
continuer notre évolution. Nous,
Plus qu’un constant accablant, ces Artruppen, l’avons toujours revenécrits sont une prise de conscience diquer et nous continuerons à nous
qui amènent les Artruppen à agir et à battre jusqu’à ce que cet objectif
donner un sens à leur combat.
soit rempli. Notre abnégation dans
cette guerre est totale. Chaque unité,
I / Comprendre le passé pour sauver chaque section, chaque corps agît
l’avenir
comme un seul homme pour rétablir une création plastique à la fois
Le XXème semblait promet- en rupture avec le siècle précédent
teur. L’humanité dans son ensemble et ses démons tout en étant la tête
avançait dans un roulement méca- de ligne des Arts du nouveau millénique raisonnant dans le cœur des naire.
villes tout comme la campagne. La
nature après dès millénaire de domination voyait enfin son règne tou- II/ L’opposition des deux camps et
chait à sa fin. C’est ainsi que pour leurs rôles respectifs
la première fois de son histoire,
l’Homme a pu s’émanciper de sa Le rückstärtding moderne
servitude en effaçant de l’équation est, comme son homologue passé,
toutes les contraintes auxquelles la norme englobant la sphère aril était confronté. Sans conteste le tistique du XXIème siècle. Il remeilleur et le plus pertinent des coupe en son sein des pratiques
exemples était celui du monde de comportant discours et méthodes
l’Art. Jusqu’à présent la question de archaïques vouant un culte au nomla représentation restait au cœur des brilisme et à l’autosatisfaction. En
préoccupations académiques et sans agissant de la sorte, il se crée une
les progrès scientifiques du XIXème barrière spéculative au centre de
nous serions encore aujourd’hui de- laquelle baigne un monologue vide
vant nos toiles ou face à un bloc de de sens n’ayant que pour simple
marbre. L’inventivité humaine ar- justification le mot « art » et pour
rivée à son apogée ouvrait la voie simple objectif le mot « dividende ».
aux grands et principaux artistes du Les résultats plastiques, que l’on ne
siècle suivant. L’avant-garde venait peut décemment pas appeler œuvres,
de percer les derniers remparts de peuvent paraître pour les non-initiés
la représentation pour se concen- difficile à cerner. Il est de notre detrer sur la puissance sémantique. voir d’expliquer comment les repéLes dadaïstes n’auraient jamais pu rer afin qu’elles ne fassent plus de
exprimer avec tant de vigueurs leur doute dans leur têtes. L’hybridation
vision du monde s’ils avaient été de- apparaît en chef de file de cette mou-
vance, s’écrasant contre le récif du
nouveau millénaire pour ne laisser
apparaître qu’une écume nauséeuse.
S’approprier ou allier des techniques dans le but sémantique est
une chose mais cela réclame un tact
et une précision d’orfèvre. Or dans
le cas des rückstärtding moderne
l’hybridation est perçu comme un
bon moyen de produire du contenu
« original » sans avoir besoin d’y
ajouter une base solide. Cependant
le fond est une tapisserie des années
soixante mal entretenue, qu’ils refusent absolument de retirer pour enlever la moisissure.
Ce n’est malheureusement pas la
seule facette de leur pratique, et cela
crée un amalgame entre ce qu’est
véritablement l’Art et ce qu’ils font
passer pour art. L’exemple du rückstärtding a toujours attiré la foule de
néophytes, l’enrobage est soigné et
le piège mortel. Certains vont les
prendre en exemple, les mettre en
valeur tandis que l’autre partie va
mal comprendre la supercherie pour
finalement abandonner l’Art. Là encore, le but de ses partisans du buzz
est sournois. En essayant d’éradiquer les futures menaces et en bourrant le crâne des plus faibles, ils se
placent dans une idéologie parasitaire vidant le fluide vital de leur
hôte sans état d’âme. Oui, ils font
mourir, comme dirait Descartes,
l’essence artistique de toute une
génération. L’originalité n’est plus
qu’une chimère meurtrie qu’ils utilisent à tord et à travers pour se justifier tout en profitant de cette dernière
pour pointer du doigt les « créatifs »
qu’ils soutiennent. L’Histoire est
réécris par les vainqueurs d’aujourd’hui, et ils en jouent sans vergogne. Mais ils n’en joueront plus
longtemps, et ils le savent.
Les clairons d’un vent de liberté raisonnent. Les vrais Artistes
enfilent leur tenue de combat partant au front sous la même bannière.
L’Autocratie représente le dernier
rempart face à l’obscurantisme ambiant. Elle porte en elle, l’espoir
d’un renouveau artistique par la
puissance d’une volonté sans faille.
Le but n’est pas financier comme le
rückstärtding voudrait vous le faire
croire mais purement humaniste.
C’est avec l’Art que l’Homme doit
relever fièrement la tête, portant
en lui la graine d’un savoir faire
nouveau pour fertiliser les champs
de l’avenir. Notre rôle dans cette
histoire est d’être l’engrenage infaillible de cette mécanique afin
d’atteindre l’objectif commun que
nous nous sommes fixés. Les Artruppen regroupent, pour se faire, l’armée la plus compétente et la plus
motivée qui soit, n’ayez à la fois aucune pitié pour ceux sortis du droit
chemin tout en étant prêt à faire le
sacrifice ultime pour le bien commun. Nous avons toujours su que
pour être effectif un collectif se devait d’être organiser, indissociable,
et fraternelle. L’uniforme permet de
créer cette unicité capable d’ébranler le système en place. Le moindre
équipement de l’humble unterkampfsoldart à l’incorruptible Artoffizer,
en passant par les chercheurs de la
N.B.C.A, est une solide protection
contre la propagande et le despotisme du rückstärtding moderne.
Grâce à ce redoutable ensemble le
dialogue entre les deux extrêmes ne
peut plus avoir lieu, laissant le libre
champ au puissant monologue
d’acier et de plomb autocratique.
Néanmoins, il serait déplacé de
n’avoir qu’une vision policière de
notre organisation. Ce qui fait la
force des Artruppen c’est leur pluridisciplinarité. Système martial d’un
côté mais aussi force de création
artistique de l’autre. Les interventions, véritables performances armées, sont toujours mises en avant
comme présentation d’un savoir
faire et d’une idéologie en rejet
constant du système établi. L’aspect
subversif des œuvres de l’Autocratie est validé, contrôlé, régulé par
le personnel le plus qualifié qu’il
soit afin de ne produire aucune erreur rendant le travail indigne d’une
production plastique. Pour ce qui
est des Grands Arts qui ont marqué
l’Histoire comme la peinture ou la
photographie, là encore il n’est pas
question de se perdre en les assemblant tel un monstre de foire mais
bien de les mettre en valeur en tirant
tout le potentiel sémantique qui leur
est propre. Les Artruppen ont également un rôle de guide dans le milieu
artistique puisque à ce jour, ils en
sont la seule force créatrice. Comme
un père sévère mais juste avec ses
enfants, ils savent récompenser de
leur approbation les esprits combatifs emboîtant leurs pas. Même un
membre hors de l’Autocratie peut se
révéler être un atout majeur luttant
avec ferveur contre la bien pensante.
Il est aussi question dans cette relation paternelle d’une aide pour les
quelques naïfs gangrenés par le
spectre du déjà vu. Nous prouvons
encore là notre dévouement le plus
total dans cette grande entreprise
pour le bien commun, pour l’Art,
pour l’humanité, pour les Artruppen.
Les Artruppens agissent dans l’anonymat et s’organisent autour d’une
hiérarchie purement militaire, regroupant centre de commandement
et unités spécialisées distinctes.
Chaque membre sous couvert Artruppen porte sur lui un code vestimentaire rigoureux et un masque à
gaz recouvrant l’ensemble de son
visage. Ce dernier doit obligatoirement avoir sur lui une carte d’identification filigrammée comportant des
numéros de séries codées permettant
à autorités supérieures de reconnaître le possesseur de la carte sans
que ce dernier ne retire son masque
à gaz et s’expose à des regards indiscrets.
En fonction des envies et des
compétences de l’activiste, celui ci
sera raccordé à la Kampfdivision*
et ainsi rejoindre une unité bien spécifique. Nous en décomptons 4 à ce
jour :
Untersoldarten der Artruppen :
Bien que peu équipées mais doté
d’une très grande motivation, ces
unités sont les plus nombreuse de
toute la Kampfdivision. Elles sont
en première ligne de toutes les performances, agissent consciencieusement en suivant les et surtout reflètent l’esprit du mouvement. L’art
pour l’art, faire briller le nom des
Artruppen, et s’occuper de rétablir
les valeurs artistiques nobles.
Soldarten der Artruppen :
Les unités les mieux équipées de
toute la Kampfdivision. Affectés à la
réalisation des performances les plus
délicates ou dangereuses, on les voit
également épauler les Untersoldarten sur des missions plus basiques
avec leur expertise et le matériel
supplémentaire dont ils disposent.
Le port du casque obligatoire dans
cette unité est une marque de fade sa propre force policière. L’autobrique.
cratie ne déroge pas à la règle. Outre
Nazviterbiologikcupenart der Ar- son aspect sécuritaire se chargeant de
truppen ( N.B.C.A der Artruppen cadrer au mieux les Kampfdivision,
cette branche à part se charge éga):
Troupe à part, rare et souvent mé- lement des interrogatoires des oppoconnue, la N.B.C.A agit comme une sants. Ils sont chargés de connaître
unité de reconnaissance. Elle fait en la nature de la menace, son but, et
sorte qu’aucun élément ne puisse surtout se chargent de la faire disperturber la création artistique et paraître de manière subtile ou pas,
l’emmener vers une réponse incor- selon la performance en vigueur. Ils
recte. Ses membres se caractérisent se faufilent au milieu des Kampfdipar le remplacement du masque à vision et ne sont identifiables qu’au
gaz réglementaire par un modèle dernier moment, généralement trop
plus adapté à leur fonction, ainsi que tard. Plus récement, ce sont eux qui
par une tenue anti-sous-art ( Unte- s’occupent de la sécurité rapporchée
des «Officiers».
rartprotectzion komplett kurps ).
supérieurs nommé les Überartoffizeren. Ils sont les têtes pensantes du
mouvement. Sans eux, les Artruppen
verraient leurs actions au point mort
car toute action du mouvement passe
par leur approbation. Ils n’hésitent
pas à passer occasionnellement leur
uniforme d’apparat pour descendre
sur le terrain, faire des apparitions
afin de s’assurer que les performances se déroulent exactement selon leurs prévisions*.
Dans la plus pure tradition de
la culture jamming, les artruppen ont
également fait parlé d’eux au travers
de l’exposition Dodécadox (voir annexe 1), du 12 au 13 Décembre au
Tout cet ensemble, dont les Patio du Bois de l’Aune à Aix en
La Wehrpolizei der Artruppen :
Le mouvement a également besoin effectifs sont extrèmement flou, est Provence; ou ces derniers ont précommandé par un corps d’officiers senté leur projet expérimentale Ge-
HINTERHART - Mardi 1er Septembre 2015
la surveillance du spectateur. Armée
du webcam prenant contre le gré du
spectateur une photo de ce dernier
lorsqu’il rentre sur le lieu de l’exposition, le programme va utiliser
son image pour le mettre dans une
situation qu’il n’a jamais vécu. La
proximité immédiate entre le lieu
ou la photo a été prise et celui ou le
photomontage lui sera révélé permet d’instaurer le doute, le malaise,
comme s’il n’avait pas prêté attention à ce qui se passait autour de lui.
Pourtant, le surréalisme de la scène
photomontée est telle que la victime
se rendra compte de la supercherie.
Bien que le doute subsistera toujours
puisque des Soldarten seront présents dans la salle pour rappeler au
spectateur qu’il est surveillé à l’œil.
L’installation pose également la
question de la sécurité et la falsification des données, à l’heure la création d’avatar, de compte et de profils
sur internet ne cesse de croître.
Cette installation avait également pour but ultime de démontrer
la puissance de la manipulation des
images ainsi dévoilées aux spectateurs. L’installation eu également
pour but de tester un nouveau procédé d’interraction et ainsi dresser
une étude statistique sur la manière
dont le public réagit en la supposée
présence des Soldarten. L’image
même d’un Artruppen activé à distance peut faire changer drastiquement le comportement d’un individu
jusqu’à le questionner même sur le
fonctionnement du procédé auquel il
est confronté. Une démarche que les
activistes d’aujourd’hui emploient
de manière récurrentes afin de laisser leur auditoire prendre conscience
de ce pourquoi ils combattent.
clair, incisif. Les Artruppen mettent
en avant un culte de la personnalité
autour du Soldarten* parfait, défini
par l’uniformité, l’obeissance, la
compétance et le dévouement sans
faille. Un modèle que doit suivre
chaque militant.
Par le biais d’une couleur dominante
qui peut varier en fonction de l’atmosphère désignée, la propagande
donne au soldat parfait une posture
dominante et propose au spectateur
de devenir une personne nouvelle en
intégrant leur rang.
Parmi les plus grandes actions directes jamais réalisée par les
Artruppen, la 51ème conférence sur
l’Art Pur est de loin celle qui a fait le
plus grand bruit. Exclusivement réservée aux membres du mouvement
et à quelques rares «invités», cette
conférence eut lieu pour la première
fois dans un amphitéâtre Guillon
(Campus Robert Schumann, Aix en
Provence) comble. Selon la communication à base d’affiches et de
tracts qui a été faite par les militants
la semaine précédent l’évènement*,
la conférence eut lieu le 01 Février
2015 aux alentours de 20h00, elle se
termina vers 23h00 sous les applaudissements massifs de la foule. L’intitulé de la conférence fut résumé
par le contenu des tracts :
«Dans un monde aux aboies,
où la raison laisse place à l’obscurantisme le plus primaire, l’Art reste
le seul garant de l’intégrité humaine.
Au diable les théories fumeuses de
tribu sortant à peine de leur état de
quadrupède ! Mettons fin à cette infâme volonté nombriliste voulant réduire à néant des millénaires d’évolutions . Ouvrez les yeux une bonne
fois pour toute, abandonnez vos tra
La propagande fait partie des vers de paria pour renaître enfin en
domaines privilégiés de ce groupe tant qu’Artiste !
activiste aux valeurs autocratiques. Une nouvelle fois, la KommandanElle doit agir comme un coup de tur Suprême Artistique s’est chargé
poing afin de faire passer un message d’organiser une programmation
HINTERHART - Mardi 1er Septembre 2015
exceptionnelle afin de réunir l’ensemble de ses effectifs dans le cadre
de la 51 ème conférence sur l’Art
Pur.
Le but étant d’informer la totalité des institutions du mouvement
sur l’urgence de la situation face au
ruckstarding préférant s’enivrer toujours plus dans sa décadence verbale
plutôt que de rejoindre le droit chemin artistique. Plus qu’hier et moins
que demain, les rebuts qui le composent se voilent la face, se détournant
de l’action concrète pour s’enfoncer
inexorablement dans leur couvre
abyssal verbal.
La défense de l’Art Pur dans le
contexte actuel est plus qu’une nécessité : un devoir. Celui de tout
ceux qui ont un minimum de dignité,
marchant la tête haute avec l’unique
avant-garde artistique de ce siècle :
les Artuppen.»
Mais là ou cette conférence
eut un large écho auprès du public,
au delà de la participation emblématique du Suprême Überartoffizer
der Artruppen*, c’est dans les photographies officielles prise par le
département de la propagande du
mouvement. En plus de l’affiche et
de 3 de ces photographies montrant
l’ambiance qui en découle, j’ai eu
l’opportunité et l’autorisation de
les exposer à la galerie Andiamo à
l’occasion de l’exposition DIGITAL CRISPS (voir annexe 2), du 16
au 27 Mars 2015*. Une exposition
médiactique qui a eu le mérite de
faire couler pas mal d’encre quant à
la véricité de l’existance d’une telle
conférence.
L’ensemble de ses actions
ont donné par ailleurs naissance à
plusieurs légendes urbaines que des
artistes anonymes ont illustré en fanarts, montrant une nouvelle fois
l’intérêt de certain pour un movement qui serait qualifier pour certain
de fantomique.
Référence
et niveaux d’interprétation
Que vous aviez apprécié
ou non les Artruppen, que vous les
aviez compris ou non, nous ne pouvons pas nier que ces derniers ne
laisse pas indifférent son public par
les nombreuses symboliques qu’ils
incarnent et les différents niveaux
de lectures par lesquelles ils peuvent
être interprété. Mais bien que beaucoup de personnes ont fait le rapprochement entre les Artruppen et des
mouvements totalitaires comme le
nazisme ou encore le communisme,
ces derniers n’ont pas réussi à interpréter au delà de leur propre ressenti et parfois même de leur rejet
automatique de tout ce qui n’est pas
politiquement correct. Vous n’avez
pas compris les Artruppen si vous
n’avez pas laissé votre conscience
morale de côté.
Il est nécéssaire de garder à
l’esprit la citation de Gunther Anger, critique d’art allemand «il faut
grossir les choses pour que les gens
comprennent» afin de comprendre la
vitrine dont se dotent les Artruppen
pour évoquer la conscience morale
et le politiquement incorrect.
L’emblème des Artruppen
est un aigle bicéphale tenant dans
ses griffes un pinceau, déployant
ses larges ailes et couronné par des
rayons de soleil.
La symbolique de l’aigle telle qu
les Artruppen la décrivent correspond au ciel, au soleil ainsi qu’au
divin. Plus encore, la combinaison
de l’aigle et du soleil correspond à
la perception directe de la lumière
intellective. Chaque tête de ce dernier correspondent respectivement à
la technique et la théorie, symbolisant un équilibre entre les deux éléments. Mais il est impossible de nier
le rapprochement dans le design de
ce symbole avec celui du Troisème
Reich. Cet aigle est le détournement
même de celui du nazisme à la seule
différence que ce dernier a été com-
pilé avec d’autres iconographies
d’aigles bicéphaesl antérieur à la
période de la Seconde Guerre Mondiale comme l’aigle Bicéphal du
Saint Empire Romain germanique
apparu en 1400. Cette héraldique
(ou science du blason) est particulièrement présente encore aujourd’hui
dans l’Europe de L’Est. Le fait qu’il
soit également recouvert de noir
ajoute un ton lugubre et fait naitre
chez le spectateur, et ce de manière
volontaire, une possible présence de
rouge (autre couleur symbolique,
avec le noir, du Parti Nazi). Il faut
également compter avec ca un vocabulaire franco allemand donnant
naissance à des expressions propres
et le drapeau officiel des Artruppen, qui est généralement représenté
sous forme d’étendard. Cette configuration n’est pas due au hasard
puisqu’encore une fois, même s’il a
été inspiré du drapeau de la Corée du
Nord et que le rouge ait été remplacé
par un vert neutre en hommage à la
dominante nuance de vert présente
dans l’ensemble des uniformes des
membres, la culture historique et
contemporaine de l’Homme d’aujourd’hui fera irrémédiablement le
rapprochement avec l’Allemagne
Nazi, dont les étendards flottaient au
dessus de leur plus grands rassemblements.
sassinnats et attentats et employant
une technique de guerrilla, c’est à
dire frapper là ou le gouvernement
s’attend le moins et se fondre dans la
population pour échapper aux représailles. Ce n’est d’ailleurs pas pour
rien que la doctrine et le texte fondateur des Artruppen se nomme la
doctrine «10011936», en référence à
la Loi francaise du 10 Janvier 1936
rendant illégal sur le sol national
tout groupe de combats et milices
privées.
La doctrine «10011936» est
par ailleurs directement inspirée de
la doctrine Jdanov* qui au début de
la guerre froide, le 22 Septembre
1947 affirme une vision du monde
entre les forces dites impérialistes,
dirigées par les Etats Unis, et les
pacifistes, menées par l’URSS. la
doctrine des Artruppen peut être
grossièrement interprété comme
une appropriation du discours du
troisième secrétaire du Parti communiste de l’Union Soviétique et un
moyen de signifier de manière simple
qu’il existe deux types d’art selon
eux : un art qu’ils qualifient de Pur
entre un retour à une dénomination
de la technique académique adaptée
aux nouveaux procédés de création
allié à un message pertinent et les
autres formes d’art ou le Rückstartding symbolisant la recherche du
La manière de se montrer et profit sur l’art, l’escroquerie par la
de procéder est également au centre masturbation intellectuelle et le laisd’une évocation de conscience mo- ser aller ambiant de certains artistes
rale. Le fait de faire référence à l’ac- contemporains qui, à défaut d’être
tion directe, brutale et expéditive des médiums ouvert sur le monde, se
sans compter l’omniprésence d’élé- constituent une élite avec ses codes
ments vestimentaires provocateurs et et ses moeurs artistiques coupées du
de mises en scène menacantes n’est monde.
pas sans rappeler les «années de
plomb» période de la fin du XXème Il ne va pas sans dire que les
siècle avec l’émergeance de groupes Artruppen dénoncent la crise de l’art
extrémistes armés en France comme contemporain et le non renouvellel’Action Directe, groupe terroriste ment de la création artistique, entraianarchiste et communiste des an- nant ainsi la remise en cause la légitinées 70 ou encore la Fraction armée mité de certains artistes aux yeux du
rouge en Allemagne, commettant as- public. Les Überartoffizer auraient
donc lu Yves Michaud dans «L’art à
l’état gazeux» publié en 2003, essai
dans lequel il met en avant le principe
que la création contemporaine est à
mettre en parallèle avec l’industrie
de la culture et la multiplication des
musées, mis en place ces dernières
années. Nous sommes entrés dans
un monde qui est celui de la production culturelle également celui de la
consommation. Nous consommons
non seulement des produits mais des
expériences et des sensations. L’instauration de la bourse en art se calquant sur les marchés boursiers ainsi
que la proliférations de musées, fondations, centres de création, autant
publics que privés, dont les configurations sont plus pensées comme des
lieux de vente que comme des lieux
au service des œuvres d’art, attisent
l’idée que l’art est désormais considéré inconsciemment par le spectateur comme un bien de consommation avec une étiquette de valeur,
bien plus que comme une œuvre
singulière dénonçant ou illustrant un
message ou la vision de son auteur.
Il en résulte une affiliation entre le
phénomène et une présence de plus
en influente du secteur privé dans le
milieu jusqu’alors public et proche
du « sacré » des musées. En effet,
l’influence de plus en plus importante des collectionneurs qui acquièrent et mettent de ce fait un prix afin
d’évaluer le poids des collections
amènent une mutation de l’art vers
les biens de consommations et fait
de l’art une valeur refuge, idée qui
ne cesse de se développer depuis ces
dix dernières années.
La multiplication des lieux de monstrations ne servent plus qu’à cultiver
le « profane », mais deviennent des
entonnoirs privés de débats étalant
des richesses au point d’y noyer les
messages suscités par les artistes.
pagande. Tous les soldats sont égaux
entre eux, ils ne sont pas jugés par
leur physique ou leur milieu social mais par leur action et la pierre
qu’ils apportent à l’édifice du mouvement. Chaque membre du groupe,
en portant sur son visage le masque
à gaz, devenu accessoire emblématique, laisse son individualité de côté
et met son corps entier et son esprit
dans la cause commune. Le type de
masque à gaz officiel des Artruppen
est le GP5, de conception russe mis
en service en 1955 et fabriqué par
dizaines de millions d’exemplaires.
Couvrant l’ensemble de la tête, offrant une protection rustique mais
optimale, le choix de ce masque,
dont le design est l’un des plus
connu de la culture populaire, n’est
pas sans rappeler les heures les plus
sombres de l’histoire notamment
à cause de la catastrophe nucléaire
de Tchernobyl (26 février 1986),
causant plus de 100 000 morts, en
grande majorité dans les rangs des
personnes, qui en échange d’une
prime et d’un diplome sans valeur,
ont été envoyé sans protection si ce
n’est pour les plus chanceux munis
du fameux GP5, aux abords et dans
la centrale dans le but de déblayer
les déchets radioactifs.
Il est clair que tout en restant
dans l’extrémisme politique, Artruppen souhaite brouiller les pistes et ne
veut pas être la vitrine d’un extrémisme unique. C’est en grande partie
pour cette raison que les uniformes
que portent les miltants peuvent prêter à confusion. En effet, quelque
soit le grade porté, chaque soldarten
est équipé aussi assiduement qu’une
reconstitution historique. Tous les
éléments vestimentaires et équipements sont issus des stocks militaire
de la défunte République Démocratique Allemande de 1956 à 1990 et
de son armée : La Nationale Volksarmee (traduite par Armée Nationale
du Peuple) durant la Guerre Froide.
Inspirée directement des uniformes
de la Wehrmarcht et épurée de tout
élément humain proche de l’ancien
gouvernement nazi, l’armée d’Allemagne de l’Est était l’armée la plus
puissante des républiques populaires
sous domination de l’Union Soviétique. C’est donc dans un soucis purement esthétique et moqueur que
le mouvement adopta les uniformes
d’une armée communiste qui pouvait facilement se faire passer auprès
d’observateurs non avertis comme
des éléments nazis et encore plus
évoquateurs.
Mais le plus important dans
cet ensemble n’est pas le fait qu’un
Par son comportement, les militant des Artruppen porte un
Artruppen semblent ne pas vouloir masque à gaz avec un lourd passif,
se soumettre à une quelconque au- mais plutôt que ce dernier cache son
torité si ce n’est celle imposée par identité au point de le rendre physiles Überartoffizer. Dévouement, quement inhumain. Nous y revienloyauté, compétant, soumission, à drons quand nous aurons fini de traila hiérarchie, autant d’éléments qui ter la symbolique du mouvement.
font naitre dans le groupe une idéologie du soldat parfait. Idéologie qui D’un point de vue représenest mise en avant dans la stratégie tation et organisation, les Artruppen
globale de communication et de pro- se rapprochent de certains groupes
activistes en fonction de leur ampleur mais aussi des moyens de communication utilisés, à savoir l’usage
de faux et la guerre médiatique. D’un
côté, créé en Suisse en 1994 par des
artistes de différentes nationalités,
etoy corporation* utilise le statut de
l’entre­prise et travaille aux frontières
de l’art, de la politique et de l’économie. Rapidement, etoy corporation
prend un ca­ractère international et
le nombre de personnes impliquées
s’élève aujourd’hui à plusieurs
centaines, réparties dans le monde
entier et agissant de manière anonyme. Leurs inter­ventions peuvent
se lire comme des tentatives pour
com­prendre et montrer comment
le champ économique influe sur
les autres champs, afin de pouvoir
s’y repérer. Une de leurs méthodes
d’in- vestigation est l’incarnation
plastique de valeurs virtuelles. Les
formes de l’art miment alors celles
de l’entreprise, y compris ses modes
de financement, à cette différence
près qu’etoy corporation n’a rien
vendre.
D’un autre côté, les Yes Men (les
béni oui oui), deux activistes du canular (Jacques Servin et Igor Vamos,
connus sous les pseu­donymes de
Andy Bichlbaum et Mike Bonanno),
qui dénon­cent le libéralisme par la
caricature. En se faisant passer pour
des intervenants de l’OMC, ils ont
entre autres prononcé des discours
satiriques sur la privatisation du
marché des votes et sur l’apologie
de l’escla­vage à domicile, lesquels
n’ont pas suscité de réaction parti­
culière de la part des spectateurs
et participants présents, si ce n’est
des remerciements. Ils ont ensuite
diversifié leurs cibles, parmi lesquelles George W. Bush et le groupe
chimique Dow Chemical.
Enfin, pour conclure le premier volet de cette symbolique, il
est nécéssaire de parler du monde du
cinéma et du film «la vague» sortie
en 2008, réalisé par Dennis Gansel
et très librement inspiré par «La troisième Vague» de Ron Jones. «La
troisième vague» est une étude expérimentale du fascisme menée par
le professeur Ron Jones avec des
élèves de première du Lycée Cubberley en Californie durant l’année
1967. N’arrivant pas à expliquer à
ses élèves com­ment les citoyens allemands avaient pu laisser sans réagir le parti nazi procéder au génocide
de populations entières, Ron Jones
décida d’organiser une mise en situation qui s’avere­ra concluante. Il
fonda un mouvement étudiant sur
une semaine nommé «la troisième
vague» dont l’idéologie vantait les
mérites de la discipline et de l’esprit
de corps, et qui visait à la destruction de la démo­cratie, considérée
comme un mauvais régime en raison
de ses idées individualistes. Un bien
étrange son de cloche quand nous
nous souvenons que des rumeurs circulaient sur une possible fondation
du mouvement des Artruppen par
des étudiants de la faculté de lettres
d’Aix en Provence.
Pour ce premier niveau de
lecture, nous pouvons en conclure
que les artruppen peuvent être considéré comme une possible fiction
cynique mettant en oeuvre différents éléments historiques pourtant
opposés idéologiquement ensemble
de manière à répondre à la cris de
l’art contemporain. Pour sortir de
cette crise, ils utilisent des moyens
de communications répendus et des
codes idéologiques extremistes afin
de prôner un art «Pur» encadré par
des hommes de goût qui dicterait
l’équilibre entre la recherche technique et l’engagement de l’artiste à
faire passer un message. Ils sont également une caricature du danger qui
pourrait gueter la société si un rejet
trop massif d’une idée nouvelle arrivait à se produire, comme un écho
face à l’actualité d’aujourd’hui à la
montée de l’extrémisme quelqu’il
soit fait bien trop souvent les gros
titres. L’histoire pourrait donc se répéter, comme un retour à l’Académisme dans le monde de l’art à cause
d’une crise prolongée ou un retour
de la suppression des libertés.
Ceci étant, cette conclusion
représente le niveau le plus facile de
lecture que pourrait avoir un critique
envers cette mouvance. Mais c’était
sans compter un ecrtain nombre de
références artistiques que le véritable
sens des Artruppen va se réléver.
Dans le monde de l’art, il
existe 4 références qui peuvent se
raccorder à l’univers des Artruppen.
La plus évidente d’entre toute, si ce
n’est la toute première référence que
les Artruppen n’ont jamais eu, est «
The Painter » (1995), vidéo de l’artiste contemporain américain Paul
McCarthy. Dans cette oeuvre audiovisuelle, le plasticien interprète une
version caricaturée à l’extrême de
l’artiste abstrait, de l’acte créatif et
du monde de l’art.
Dans une atmosphère grotesque,
bancale, l’artiste mutile à l’aide d’un
hachoir les prothèses en latex qui lui
servent de doigts, simule des actes
sexuels sur ses toiles et son matériel
de peinture, hurle, crie, aboie, geint,
se prend pour un animal en déféquant dans un plante, et finit par se
faire renifler l’arrière-train par un
critique d’art tout aussi caricaturé. Il
s’agit d’une satire de l’artiste peintre
américain Willem De Kooning, par
le biais d’une crise d’identité que caractérisent ces diverses scènes. C’est
de cette performance que les Soldarten aurait pris conscience qu’une
caricature bien orchestrée pouvait
tout aussi bien qu’une représentation proche d’une réalité délivrer un
message évident aux yeux des spectateurs.
La deuxième référence est
«Nantes Projets d’artistes», une vidéo rendue publique en 2001 ou
Pierrick Sorin se met lui-même en
scène pour incarner plusieurs artistes européens aux projets les plus
loufoques et futuristes. il questionne
donc par là la légitimité des artistes
dans un format documentaire / reportage et la pertinance esthétique de sa
démarche était elle que sûrement au
moins un des membres fondateurs
des Artruppen, selon les rumeurs, aurait été influencé par ce projet dont le
détournement des codes télévisuels
ont été déterminant dans l’éfficacité
de la vidéo.
La troisième référence est
la théorie de «La main à 6 doigts»
d’Eric Duyckaerts dans laquelle ce
dernier évoque les bienfaits apportés
à l’Homme que d’avoir un deuxième
pouce à sa main. Il alimente sa thèse
par des dessins d’anatomie, des vidéos, des sculptures et un semble
d’autres supports afin de diversifier
son point de vue et toucher le plus
grand nombre de scientifique. Cette
théorie a convaincu les Artruppen de
la multiplicité des supports afin de
convaincre son auditoire.
La quatrième et dernière référence n’est autre qu’un projet méconnu mais au combien étonnant
quand le spectateur y a été confronté. Il s’agit des «Trésors du Rhône»
de Mark Dion, une installation qui
a pris place en 2007 au musée des
Arts Antiques d’Arles. Le visiteur
de l’exposition principale, à la fin
de celle ci, croyant se diriger vers la
sortie, se retrouvait confronté dans
une salle à une mise en scène d’un
laboratoire d’études similaire à ceux
existants dans ce même musée. Mais
à la place des objets Antiques, ce
sont des déchets et des babioles que
l’on trouvait exposé sur les étagères
et derrière les vitrines des armoires.
Surpris par la supercherie, certains
spectateurs passeront à côté du message de l’installation et iront même
marquer dans le livre d’or du musée
leur indignation envers le musée qui
a dépensé une somme conséquente
pour un art qu’ils ne reconnaissaient
pas, contrairement aux objets antiques présentés plus tôt (dont des
amphores retrouvées dans le Rhônes
qui ne sont en réalité que des déchets
antiques non réutilisible, les canettes
en aluminium d’hier). La pertinance
du contexte spacial et temporel sera
retenu dans cette oeuvre par le mouvement.
Pour des militants partis en
guerre contre l’art contemporain
dans un certain sens, le premier niveau de lecture se présente comme
un terrible désavoeu. Ces 4 réfé-
rences dites piliers sont la base même
de toute réalisation des Artruppen et
pose même la question de la véracité
de l’ensemble du mouvement. Avons
nous affaire à une fiction cynique?
Un mouvement réel mais amplifié
par ses productions?
Pour anecdote, les Artruppen, dans leur mimiques et leur trait
de caractères, ont souvent été rapproché des performances musicales
et scéniques du Blue Man Group, un
groupe artistique constitué par Phil
Stanton, Chris Wink et Matt Goldman formé en 1988 à New York. Il
est composé de trente-huit membres,
dont les trois fondateurs et une
femme : sept troupes, dont une basée
toute l’année à Las Vegas, sillonnent
le monde.
Inspiré directement par le peintre
Jackson Pollock, leurs performances
allient avec subtilité la peinture, la
mu­sique, le théatre ainsi que l’intéraction avec le public, le tout interprété par les Blue Man, des entités a
quelques détails prêt similaires, symbolisant le côté curieux et artistique
qui sommeille en chaque individu.
Si nous associons également
la théorie de Sigmund Freud, célèbre
médecin neurologien autrichien et
inventeur de la psychanalyse*, sur
le moi, le surmoi et le ça. Alors que
le moi correspond à la partie défensive de notre personnalité et donc la
plus consciente et le ça à l’émetteur
des pulsions, le surmoi représente
l’agent critique, l’interiorisation des
interdits et des exigences parentales,
sociales et culturelles. Il agit comme
un gendarme interne et inconscient
qui rejette les pulsions ou les canalisent.
Et ce constat est primordial
pour les Artruppen, si nous n’arrivons pas à identifier un Artruppen
de manière individuelle, et que le
surmoi se base sur des valeurs morales communes à un certain nombre
d’humain, alors la personnification
de la conscience morale pourrait très
bien correspondre à celle d’un soldat
Artruppen.
Donc à la manière du Blue
Man Group, la mouvance seraient
une fiction cynique et une caricature de notre conscience morale
qui, mise en commun avec d’autres
consciences morales, agissent aussi
violement que des pulsions sur ce
qu’ils considèrent comme le bien
ou le mal, le beau ou le laid. Les
Artruppen seraient donc le reflet de
notre alienation aux valeurs morales
instaurée par une forme d’éducation
globale et que même inconsciement,
la morale peut aussi être un rejet de
l’ouverture d’esprit qui permettrait
une société d’avancer.
HINTERHART - Mardi 1er Septembre 2015
En conclusion, depuis que l’Homme s’est posée la question de sa propre
condition humaine, l’image au sens représentation visuelle de quelque chose,
est un terme qui est perçu par nos sens. La perception est une connaissance
qui fait de tout être un sujet devant les objets. Les perceptions, pour que
l’être en soit sujet, doit en avoir conscience car la perception suppose la
conscience. Le questionnement qui s’ensuit est si la sensation est objective
ou subjective. L’image picturale est donc une représentation d’une représentation face à une recherche de la vérité qui tend plutôt à montrer qu’il peut
exister un ensemble de vérité.
L’apparition de la photographie et du cinéma ont forcé les Hommes
à reconsidérer leur vision du réel et a tout changé dans l’histoire de l’art
elle même. D’abord considéré comme un procédé artistique porteur d’un
message de protestation et engagé selon les avant garde du début du XXème
siècle, le photomontage devint progressivement la composante même de la
propagande des états totalitaires, au même titre que le cinéma. Effacement
de personnalités désavouées, assemblages d’affiches, rajouts d éléments
permettant d’amplifier la puissance d’une image, réinvention de l’histoire,
tout est bon pour organiser un culte de la personnalité autour du dictateur.
Avec l’apparition dans les années 80 du Cross Média, de nombreux groupes
jusqu’à alors militants conventionnels, deviennent des médiactivistes, c’est
à dire un ensemble d’individus dont les armes sont essentiellement liées
aux réseaux sociaux internet, à la culture underground/jamming. Prônant
l’action directe, ces derniers sont à l’origine de nombreux coups d’éclats
médiatiques par l’usage de faux, de diffusion de masse, de rassemblements
Bibliographie
illégaux dans le but de dénoncer une société aliénée régie par des règles
favorisant le profit à l’Humanisme.
Enfin, les Artruppen, groupe d’activistes militaire qui dénoncent ce
qu’ils appellent le Rückstartding, une forme d’art dominante qui privilégie
la renommée de l’artiste et le message que peut véhiculer l’œuvre à la pratique et la technique assidue du médium.
Ils peuvent être considéré comme une possible fiction cynique mettant en
oeuvre différents éléments historiques, pourtant opposés idéologiquement,
ensemble de manière à répondre à la crise de l’art contemporain. Pour sortir de cette crise, ils utilisent des moyens de communications répendus et
des codes idéologiques extremistes afin de prôner un art «Pur» encadré par
des hommes de goût qui dicterait l’équilibre entre la recherche technique et
l’engagement de l’artiste à faire passer un message. Ils sont également une
caricature du danger qui pourrait gueter la société si un rejet trop massif
d’une idée nouvelle arrivait à se produire, comme un écho face à l’actualité d’aujourd’hui à la montée de l’extrémisme quelqu’il soit fait bien trop
souvent les gros titres. L’histoire pourrait donc se répéter, comme un retour
à une forme d’Académisme dans le monde de l’art à cause d’une crise prolongée ou un retour de la suppression des libertés.
Mais suivant un autre niveau de lecture, la mouvance seraient une
fiction cynique et une caricature de notre conscience morale qui, mise en
commun avec d’autres consciences morales similaires, agissent aussi violement que des pulsions sur ce qu’ils considèrent comme le bien ou le mal, le
beau ou le laid. Les Artruppen seraient donc le reflet de notre alienation aux
valeurs morales instaurée par une forme d’éducation globale et que, même
inconsciement, la morale peut aussi être un rejet de l’ouverture d’esprit qui
permettrait une société d’avancer.
Sitographie
«Devenir média, l’activisme sur internet entre défections et expérimenta- Histoire de l’empathie
tions» Olivier Blondeau et Laurence Allard
http://www.franceculture.fr/emission-l-essai-et-la-revue-du-jour-une-histoire-de-l%E2%80%99empathie-revue-gradhiva-2012-05-21
«Cours de Linguistique Générale» Ferdinand de Saussure 1916
Le Faux Soir
«Hippias majeur» dialogue de PLaton
http://archives.lesoir.be/le-faux-soir-l-8217-histoire-d-8217-une-vraieliberte_t-20110503-01DLDT.html
«Ménon» dialogue de Platon
Inspiration générale
Livre VII de «La République» Platon
https://unmondemoderne.wordpress.com/
« Les images peuvent-elles mentir ? » Laurence Hansen-Love 2007
«Histoire naturelle - LIVRE XXXV» Pline l’ancien vers 77
« En avant dada – l’histoire du dadaisme » Richard Huelsenbeck 1920
Manifeste du Surréalisme André Breton 1930
«Magritte-peintures» Patrick Wladberg 1983
« Magritte » Pere Gimferrer
« Magritte » Sylverster David Juin 2009
« Discours de la Méthode » Descartes 1637
« Méditations Métaphysiques » Descartes 1641
« Simulacres et Simulation » de Jean Baudrillard
« TAZ, Autonomous Temporary Zone » Hakim Bey 1991
Annexes
Remerciements
Je voudrais remercier dans un premier temps les Artruppen, qui ont supporté
ma présence et mes blagues pas drôles depuis maintenant 5 ans. Ce fut une
expérience inoubliable marquée par l'apprentissage, les bons moments et les
chasses au dissidents. Ce mémoire leur ai dédié.
Un grand merci à Pascal Césaro, Francois Landriot, Fabrice Métais, Jean
Paul Fourmentraux, Renaud Bezy, Cyril Blazy et Marc Chostakoff sans qui
je n'aurai jamais eu les outils pour réaliser ce mémoire.
Remerciements exclusif au H264 crew, promotion 2015 posay, qui m'ont fait
avalay ces deux ans de Masta plus easy. Big Up.
La propagande par le cinéma
http://propagande-par-le-cinema.over-blog.com/pages/Un_exemple_
de_film_de_propagande_sovietique_Octobre_de_Serguei_Eisenstein-4416414.html
Les photomontages marquants de l’histoire de l’humanité
http://twistedsifter.com/2012/02/famously-doctored-photographs/
Le surréalisme
http://elisabeth.kennel.perso.neuf.fr/le_surrealisme.htm
Histoire du photomontage
http://evene.lefigaro.fr/arts/actualite/photomontage-heartfield-sovietiqueretz-mois-photo-553.php
Théorie critique
http://www.dicopo.fr/spip.php?article107
Symbolique de Matrix
https://www.youtube.com/watch?v=QrGeSQo11XY
Culture Jamming
https://en.wikipedia.org/wiki/Culture_jamming
S 423
Conclusion