Prédication pour le 23 novembre 2003 Dimanche de l`éternité
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Prédication pour le 23 novembre 2003 Dimanche de l`éternité
Prédication pour le 23 novembre 2003 Dimanche de l'éternité Ce dernier dimanche de l'année de l'Eglise nous invite à nous souvenir de celles et de ceux qui nous ont quittés au cours des douze derniers mois de l'année de l'Eglise. Cette absence est peut-être pour les uns et les autres cruellement ressentie. Et le vide laissé dans nos existences a changé le cours de nos vies. Rien n'est plus comme avant. Il y a quelques dizaines d'années, les Eglises parlaient de ce dimanche comme du dimanche des morts. Entre temps, le nom a changé. Aujourd'hui, on parle du dimanche de l'éternité, avec pour thème la cité éternelle, la Jérusalem céleste. L'accent de ce dimanche n'est donc plus mis sur la mort, sur ce que nous considérons comme la fin ultime des choses. Mais l'accent est mis sur l'éternité, sur ce qui est au-delà de la mort, sur ce qui fonde notre espérance de chrétien, à savoir la vie éternelle et le Royaume de Dieu. Le texte d'aujourd'hui veut nous dire quelque chose à propos de la manière de laquelle nous pouvons vivre cette espérance. C'est la parabole des 10 vierges comme la rapporte l'évangéliste Matthieu. C'est au chapitre 25, les versets 1 à 13. C'est Jésus qui parle : Alors le Royaume des cieux ressemblera à ceci : Dix jeunes filles prennent leurs lampes et elles sortent pour aller à la rencontre du marié. Cinq d'entre elles sont imprudentes et cinq d'entre elles sont sages. Les jeunes filles imprudentes prennent leurs lampes, mais elles n'emportent pas de réserve d'huile. Les jeunes filles sages prennent leurs lampes et elles emportent de l'huile dans des récipients. Le marié ne vient pas tout de suite. Toutes les jeunes filles ont sommeil et elles s'endorment. Au milieu de la nuit, on entend un cri : "Voici le marié ! Sortez pour aller à sa rencontre !" Alors toutes les jeunes filles se réveillent et elles préparent leurs lampes. Les imprudentes disent aux sages : "Nos lampes s'éteignent. Donnez-nous un peu de votre huile." Mais les sages leur répondent : "Non ! Il n'y en a pas assez pour nous et pour vous. Allez plutôt chez les commerçants et achetez de l'huile pour vous." Les imprudentes vont donc acheter de l'huile, mais pendant ce temps, le marié arrive. Les jeunes filles qui sont prêtes entrent avec lui dans la salle du mariage, et on ferme la porte. Plus tard, les autres jeunes filles arrivent et elles disent : "Seigneur, Seigneur, ouvre-nous la porte !" Mais le marié répond : "Je vous le dis, c'est la vérité : je ne vous connais pas." Et Jésus ajoute : "Restez donc éveillés, parce que vous ne connaissez ni le jour ni l'heure." Alors qu'est-ce qui nous attend, nous les chrétiens, après cette vie, et donc après la mort ? Eh bien, c'est simple : une fête, une fête phénoménale, une fête gigantesque. A travers l'image du mariage, Jésus nous dit que nous sommes tous invités à la fête de l'éternité de Dieu. Et voyezvous, vous et moi, nous avons les cartons d'invitation dans la poche. Depuis le jour de notre baptême, Dieu nous a dit : "Je t'ai appelé par ton nom, tu es à moi." Depuis ce jour, le doute quant à notre avenir n'existe plus. L'hypothèque qui pesait sur notre avenir est levée. Nous l'avons entendu tout à l'heure dans la lecture du prophète Esaïe : "On n'entendra plus de pleurs ni d'appels au secours." Parce qu'il n'y aura plus aucune raison d'en entendre. Parce qu'il y a "un ciel nouveau et une terre nouvelle" et parce que "le monde ancien a disparu." C'est dans cette espérance que nous pouvons vivre aujourd'hui, une espérance qui éclaire nos jours, comme les lampes des dix jeunes femmes de notre parabole, dix jeunes femmes qui attendent l'arrivée du marié. Mais aujourd'hui notre quotidien est un peu différent. C'est un quotidien aux couleurs de la tristesse, de la souffrance, du deuil, de la mort. Un quotidien plutôt sombre, durant lequel toute l'huile de notre espérance s'épuise inutilement, mais s'épuise tout de même, dans la longue attente de jours meilleurs, de lendemains meilleurs. C'est de cette attente que parle notre histoire. Car dans notre histoire, le marié se fait attendre jusque tard dans la nuit. C'est à ce moment-là que l'attention baisse. On devient moins vigilant. Dans l'histoire, les dix jeunes femmes s'endorment, les unes avec une réserve d'huile, les autres sans autre huile que celle qui est dans leurs lampes, parce qu'elles n'ont certainement pas compté avec un retard du marié. Quand le temps s'écoule comme une eau tranquille, quand rien ne se passe, quand la vie reste sans anicroches, nous sommes dans la même situation que nos jeunes filles. Nous nous endormons. Il n'y a aucune raison de se poser des questions quant à la vie, quant à la mort. Aucune raison de se poser des questions quant au sens de l'existence. La maladie, la mort qui pourraient faire irruption dans nos existences, et tout chambouler, bouleverser, tout cela passe au second plan, pour ne pas dire au troisième. Et sans y prendre garde, l'huile de notre espérance s'épuise, se raréfie. Personne ne songe à cela, personne ne pense à recharger les réserves. Le réveil est souvent brutal : l'imprévisible, l'inattendu, l'inexplicable fait irruption dans la vie. Sans crier gare, sans prévenir en aucune manière, la mort pénètre dans nos vies. Et puis vient le temps des regrets : celui de n'avoir pas tout dit, pas tout fait, pas tout partagé, celui des projets avortés, des rêves évanouis. Tout d'un coup, d'un seul, tout a changé. Que c'est bon alors, d'avoir une réserve d'espérance, une réserve de cette huile qui allait manquer aux cinq jeunes femmes. Que c'est bon d'avoir pris en compte ces échéances-là, en particulier cette dernière, celle de la mort. Les cinq jeunes femmes imprudentes de notre histoire se rendent vite compte qu'elles ne pourront pas participer à la fête avec leurs lampes éteintes. "Nos lampes s'éteignent. Donneznous un peu de votre huile." Le refus des autres jeunes femmes est à peine poli. Allez voir ailleurs. Elles ne sont pas prêtes à partager. Avec l'argument que la réserve serait dans ce caslà insuffisante pour tout le monde. Nos cinq jeunes femmes imprudentes sont obligés de reconstituer leurs réserves. Mais c'est trop tard. La noce est passée, la porte fermée. A bien y réfléchir, cette dernière partie de l'histoire racontée par Jésus me fait peur. A quel groupe est-ce que j'appartiens ? Ma réserve d'huile est-elle suffisante ? Serais-je de la fête ? L'histoire semble me dire qu'il s'agit d'une réserve qu'on ne peut partager. Cette espérance, cette confiance que je mets en Dieu, je ne peux pas la partager comme on partage un morceau de gâteau. Cette espérance doit naître et croître en chacun d'entre nous. Cette décision pour Dieu, chacun doit la prendre pour lui-même, et uniquement pour lui-même. La foi, l'espérance, la certitude de l'éternité de Dieu, je peux pas l'acheter, et surtout, pas tout de suite vite fait, bien fait. Cette espérance demande à être entretenue, soignée, et renouvelée jour après jour au contact de la Parole de Dieu. Cette histoire que raconte Jésus, cette histoire des dix jeunes femmes invitées au mariage, est une histoire sérieuse. Elle me dit que, ni dans ma vie ni dans ma mort, je peux me faire représenter par quelqu'un d'autre. C'est mon affaire et uniquement mon affaire. Et c'est à moi de me préparer pour ce moment, et c'est à moi de remplir ma réserve d'espérance et de foi. L'appel à la vigilance de Jésus me dit que je dois compter, jour après jour, avec la réalité de la mort, avec la réalité de ma mort. Celui qui prend sa mort en compte apprend à recharger régulièrement ses batteries, il sait aussi distinguer dans sa vie ce qui est utile de ce qui ne l'est pas. Et il sait goûter le plaisir de la présence de Dieu. Mes amis, aucune crainte à avoir de faire partie du groupe des cinq jeunes femmes qui trouveront portes closes à leur retour. Vous et moi, nous tenons entre nos mains les cartons d'invitation au mariage, et ce depuis notre baptême. Parce que vous et moi, nous savons quel est notre futur entre les mains de Dieu. Et parce que nous savons que nos réserves ne sont pas inépuisables. Nous savons qu'il faut recharger les batteries régulièrement dans les stationsservice que sont nos cultes, nos lectures quotidiennes de la Bible, et nos prières. Je ne peux pas vous donner symboliquement un flacon d'huile d'espérance à chacun d'entre vous, que vous pourriez emporter chez vous, dans votre quotidien. Mais je peux vous confier une parole, et croyez-moi, elle est importante : "Dieu essuiera toutes les larmes de vos yeux. La mort n'existera plus, il n'y aura plus ni deuil, ni cris, ni souffrances." Avec le souhait que cette parole remplisse votre cœur et reconstitue un peu, ou beaucoup, votre réserve d'espérance. Amen !