6.5. Réduire sa facture d`énergie

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6.5. Réduire sa facture d`énergie
6.5. Réduire sa facture d’énergie
La Commission européenne fidèle à la Trias Energetica, met volontairement "l'efficacité et
l'économie" à l'avant-plan. Ces deux aspects garantissent la plus grande contribution au
caractère durable des systèmes d'énergie.
Dans un profil de croissance et de mondialisation, l'augmentation du coût de l'énergie est
inévitable. La crise financière nous a sensibilisé aux dangers de la spéculation sur les besoins
primaires, dont les énergies fossiles. La pérennité de nos entreprises et de notre mobilité passe
obligatoirement par la plus grande indépendance énergétique possible. La pérennité de notre
écosystème passe par une réduction des émissions de CO2.
Partant du principe que la meilleure énergie est celle qui n'est pas consommée, une gestion
durable de la consommation énergétique dans les milieux industriels et tertiaires répond d'une
part, aux politiques européennes et d'autre part, à des économies d'exploitation substantielles.
Si par ailleurs, l'investissement dans des moyens de production internes d'énergie s'avère
possible, l'autonomie et la facture énergétique de l'entreprise s'en trouvent encore améliorées.
Pour nous éclairer et débroussailler cette matière, nous avons rencontré deux interlocuteurs
spécialisés dans le domaine de la gestion durable de l'énergie. Monsieur Tanguy Detroz de la
société Dapesco basée à Louvain-la-Neuve qui développe avec son équipe un système
d'optimisation des données énergétiques d'un ou plusieurs sites pilotable à distance et Monsieur
Sébastien Ryhon de la société Coretec basée sur le site universitaire d'Angleur qui a déployé
son core business comme intégrateur de moyens durables de production et de contrôle
énergétiques regroupant les fonctions de trading, de bureau d'étude et d'entrepreneur. Ces
deux hommes passionnés collent au terrain et ont une approche très« friendly» de l'entreprise,
qu'elle soit PME ou multinationale.
UNE BONNE POLITIQUE ENERGETIQUE.
Economiser l'énergie est un état d'esprit. Il ne faut pas croire qu'efficience et rentabilité ne sont
accessibles qu'aux gros consommateurs. Il y a déjà des gestes qui payent pour une facture
énergétique de moins de 50.000 euros par an.
Une bonne politique énergétique commence par une analyse des modes et besoins de
consommation pour une utilisation rationnelle de l'énergie.
Tanguy Detroz nous fait ainsi remarquer qu'un audit énergétique de l'entreprise, qui sera
d'ailleurs obligatoire dans la Région Bruxelloise dès le 30 juillet 2012 et sans doute étendu
bientôt aux trois régions, prend 2 à 3 jours suivant le secteur et la disposition du site à étudier.
L'issue de cet audit détermine le profil de consommation de l'entreprise et débouche sur les
premiers gestes d'économies à pratiquer. C'est à ce stade que se décide l'opportunité d'une
campagne de mesure, dont l'objet est de placer pendant 2 à 3 semaines des capteurs à tous les
points de consommation. Le coût de ce type d'étude qui varie de 2000 à 5000€ est dans la
majorité des cas récupéré dans l'année grâce aux économies réalisées qui varient entre 10 à
30% de la consommation. Sans compter que dans la majorité des cas une subvention est
attribuée à ces interventions.
C'est ainsi que l'on constate, comme l'explique Monsieur Detroz, que l'éclairage (4TL) de la
porte d'un distributeur de boissons consomme 150€/an, ou encore qu'il est possible
d'économiser 40% d'énergie en vendant au consommateur, qui ne fait pas la différence, des
canettes à 9°C au lieu des 4°C habituellement pratiqués.
Cet exemple trivial étendu à un site industriel ou tertiaire illustre bien que l'amélioration d'une
situation énergétique ne peut être envisagée efficacement qu'au travers d'une approche
globale, intégrée et sur le long terme.
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BIEN ACHETER SON ENERGIE
La consommation existante enfin définie et rationalisée, la stratégie d'achat d'énergie devient
aussi un vecteur d'économies. Les fournisseurs d'énergie (suivant les régions il y en a plus
d'une vingtaine) n'ont pas avantage à se faire concurrence nous confie Tanguy Detroz. Il s'agit
de faire son marché et de choisir le moment où les cours de l'énergie sont au plus bas pour
conclure avec un fournisseur (Market analysis & Risk Management). Car les cours varient tout
au long de l'année comme on peut le constater sur belpex.be. C'est ainsi qu'un accord conclu au
plus bas peut vous garantir le prix pour toute la durée contrat (1 à 3 ans). Suivant le type de
contrat et les services proposés, il n'y aura pas d'obligation de volume, ce qui peut aussi laisser
l'opportunité de faire des achats spots à meilleur prix pour les éventuels pics saisonniers de
l'entreprise.
Pour les PME, il existe bien des groupements d'achat gérés par les Chambres de Commerce,
mais, estime Sébastien Ryhon, cela ne fonctionne pas bien. Pour lui, l'achat d'énergie reste un
métier de pros. Il a pour sa part au sein de sa filiale Coretec Invoicing une équipe de plusieurs
personnes dirigées par Pierre-Yves Dozo qui gèrent au jour le jour les achats de 400 clients qui
représentent quand même 3% de l'énergie totale consommée en Wallonie.
Sébastien Ryhon explique que le prix de l'électricité résulte de la somme de plusieurs
composantes (voir encadré). Une de ces composantes sont les certificats verts (CV) repris dans
le prix brut d'un fournisseur pour+/- 10%. En partant du ratio d'un CV par MW/h d'énergie grise
produite, les fournisseurs d'électricité doivent rétrocéder actuellement 19% de CV de leur
production totale pour atteindre progressivement en 2020, 37%. Le défaut de rétrocession de
ces CV au régulateur est taxé d'une amende 100€/CV alors que le cours moyen à ce jour du CV
est de n€. Dès lors c'est sur la base 1O0€ que sont facturés au client final les 19% de CV soit
19€/MW /ho La gestion dissociée de l'achat d'énergie primaire et de l'achat de CV permet de
gagner de 5 à 6€ par MW /ho Alors que le prix moyen est de 110€/MWh nous confie Sébastien
Ryhon, «j'ai des clients qui nous consultent, avec des prix payés de l'ordre de 150 à 180€.»
Tanguy Detroz et Sébastien Ryhon sont tout deux d'accord sur le fait qu'il y a moyen de réduire
sa facture d'énergie de 15 à 30%. C'est une économie durable pour autant que la cohérence et
le suivi des factures soient appropriés ainsi que celle des consommations.
GESTION D'UNE COMPTABILITE ENERGETIQUE
Après avoir agi sur les améliorations énergétiques des bâtiments (isolation, éclairage,
chauffage, équilibrage, régulation, comportements ... ) et sur l'amélioration énergétique des
process (Moteurs haut rendements, variateur de fréquence, équilibrage hydraulique, régulation,
air comprimé, gestion du froid, ... ) il s'agit de mettre en place un système de contrôle que l'on
peut piloter en interne ou externaliser.
Le logiciel de gestion EMIS développé dans cet esprit par Dapesco est une plateforme de
contrôle qui pour un coût modique de quelques euros/mois vous permet de maîtriser la gestion
de vos consommations énergétiques et de pérenniser les économies programmées. Grâce à cet
outil Tanguy Detroz et son équipe gèrent à travers le monde dans 58 pays la cohérence de
consommation de ses clients dont les magasins IKEA. Cela permet entre autre de comparer de
manière objective la consommation des différents sites et de donner l'alarme en temps réel ou
différé à chaque trouble de cohérence ou anomalie détectée au niveau des différents capteurs.
Le logiciel intègre bien sûr toutes les données et variables statistiques et comptables.
DE LA RECUPERATION DE L'ENERGIE FATALE A LA PRODUCTION D'ENERGIE lN SITU.
Toutes les mesures d'économies passives étant épuisées, l'audit énergétique peut préconiser
suivant certains process des mesures de récupération d'énergies dites fatales. La récupération
des hautes températures produites dans des fours rotatifs, des fours de recuit ou de verrerie
permet la production d'électricité, ou encore la production de vapeur ou d'eau chaude dans le
cas d'autres process comme les fours d'abattoir ou d'imprimerie.
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C'est ainsi que les Abattoirs Covameat à 8953 Wijtschate près de Ieper ont installé un
récupérateur de fumées du four à flamber la couenne pour produire de l'eau chaude sanitaire
pour le nettoyage des carcasses de porcs. Sébastien Ryhon affirme selon les dires de son client
qu'une économie de 60.000 litres de fuel a ainsi pu être réalisée. Ce type d'investissement a un
payback de deux ans et un coefficient de durabilité de 10 soit une récupération de 9 fois la mise
au bout de la vie économique de l'installation.
Un cinquième du chiffre d'affaires de Coretec engineering concerne l'installation de panneaux
photovoltaïque en milieu industriel et tertiaire. Cette solution dont l'investissement a fort
diminué reste très dépendante de la législation. Elle est bien adaptée aux exigences peu
énergivores. Pour une durée de vie de 25 ans et un payback moyen de 7 ans on obtient un
coefficient de durabilité de 3,6.
La cogénération procure directement 20% d'économie primaire, cependant sa grosse contrainte
reste l'adaptation de consommation à une production simultanée de deux sources d'énergie,
sauf possibilités de stockage d'énergie. Un payback de 2 à 4 ans pour une durée de vie de 10
ans donne un coefficient de durabilité de 3,3.
Comme on peut le constater les solutions ne manquent pas pour diminuer l'empreinte CO2 et la
facture énergétique. Les métiers de la gestion de l'énergie durable se sont fort développés en
Europe et c'est en cela le philosophe et économiste américain Jeremy Rifkin, professeur à la
Wharton School Université de Pennsylvanie affirme que l'Europe prépare la Troisième Révolution
Industrielle car, de son point de vue, nous sommes les seuls au monde à avoir pris conscience
que les énergies fossiles et naturelles ne sont pas exploitables à l'infini. L'Europe n'est pas en
déclin, elle est train d'inventer une nouvelle façon de produire…
CORETEC SA
Créée en 2004 - CORETEC société d'engineering spécialisée en énergétique se positionne
comme entrepreneur-intégrateur, responsable de l'étude, de l'implantation, de l'optimisation
et de la supervision de systèmes d'économies d'énergie complets et de leurs auxiliaires.
Elle réalise un CA de 7 millions d'euros et compte 30 collaborateurs dont 17 ingénieurs.
Parmi ses clients : Les Ateliers du Saupont, Sucrerie Couplet, Kraft, Spa, D'ieteren,
Delhaize, BNP Parisbas, Dexia, ABInBev, Ferrero ou la Région Wallonne ...
www.coretec.be
DAPESCO SA
Créé en 2002, transformée en SA en 2007, le cabinet de conseils spécialiste en Optimisation
Energétique : actif depuis la collecte des informations jusqu'à la mise en place de solutions
d'indépendance énergétique en passant par l'analyse des performances.
La société réalise un CA de 2 millions d'euros et compte 25 collaborateurs.
Parmi ses clients : Delhaize, Accor Belgique, Dexia, D'ieteren, Dalkia, Ikea, Ferrero ou la
Région Wallonne.
www.dapesco.com
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L'industrie belge consomme 46% de l'énergie électrique soit 38 TW/h (2010). Le secteur
tertiaire (services publics et commerces) absorbe quant à lui 22TW/h soit 27% de la
consommation totale tandis que le résidentiel a consommé +/- 20TW/h soit 24%. Les
transports (trains, trams, métros) utilisent 2% de l'énergie.
Quant au gaz, la consommation de l'industrie hors production d'électricité était pour 2011
47TW/h soit 26%, la distribution résidentielle et PME 82,5TW/h soit 45% et les centrales
électriques 53,9 TW/h soit 29%. (source CREG).
Si selon l'Apere (association pour la promotion des énergies renouvelables) la production
d'électricité renouvelable a augmenté (6,1%), elle est encore loin des 21% que la Belgique s'est
engagée à produire d'ici 2020.
Le rapport la CREG fait état d'une production en 2011 de 80.600 GWnl dont 57% produite par le
nucléaire et 26,8% par le gaz naturel (voir tab) soit 5,2 TW/h de moins qu'en 2010. C'est la
deuxième année consécutive que l'on constate une diminution de production.
Le Prix de l'électricité se compose du prix de l'électricité primaire produite (25 %), de la gestion
(fournisseurs) et du transport sur le réseau HT (20 %), des coûts des réseaux de distribution
locale gérés par des intercommunales, (30 %), des frais d'organisation (régulateurs), des taxes
et TVA (6 à 21 %), soit en moyenne 20 %, en plus des remboursements pour les certificats
verts (5 %). Le prix public peut être de 4 à 6 fois le prix de l'électricité de base à la bourse
Belpex.
Sébastien Rybon (1973)
Administrateur délégué de Coretec sa
Ingénieur civil électromécanicien (Université de Liège), il intègre en 1997 le département R&D
de Techspace Aero pour le développement de nouveaux moteurs qui le conduit sur le
site américain de la société Général Electric à Cincinnati.
En 2002, responsable technique d'Optrion, une spin-off émanant du Centre Spatial de Liège.
En 2004, il crée sa propre société Coretec avec comme 1er client Techspace Aero.
Tanguy Detroz (1974)
Ingénieur Industriel - Managing Director 2000-2002 - Business Development Manager chez
LEM, un leader de marché fournisseur de solutions innovatrices et qualitatives de mesure de
paramètres électriques.
2002 création de DAPESCO
USINE ENTREPRISE - JUIN 2012 – N°3108
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