Pages de jusrisprudence sociale n°39

Transcription

Pages de jusrisprudence sociale n°39
Supplément
Les
Sommaire
Jurisprudence Sociale
 contrat de travail
cdd d’usage d’un sportif professionnel
CA Lyon, ch. soc., sect. B, 28 mars 2013, n°11/07712
Christophe BIDAL ...........................................................
page
niveau de responsabilité et changement des
conditions de travail
CA Lyon, ch. soc., sect. B, 3 juillet 2013, n°11/07819
Mélanie CHABANOL .......................................................
page
Supplément au journal Tout Lyon affiches n°5076 du Samedi 23 novembre 2013
inaptitude physique à tous postes du secteur
d’activité de l’entreprise
CA Lyon, ch. soc., sect. A, 11 septembre 2013,
n°12/08217
Jean-Bernard MICHEL
page
 droit disciplinaire
règlement intérieur et mise à pied disciplinaire
CPH Lyon, industrie, 3 sept. 2013, n°12/002236
Olivier LACROIX ............................................................
page 7
test salivaire pratiqué en violation des dispositions
du règlement intérieur : preuve illicite et droit
d’alerte des délégués du personnel
CPH Grenoble, sect. ind., 20 septembre 2013,
n°13/01736
Eladia DELGADO ...........................................................
page
Salari”s prot”g”s : rejet de lÕautorisation
de
licenciement et légitimité de la mesure
CA Lyon, ch. soc., sect. B, 4 septembre 2013,
n°11/06756
Christine FAUCONNET ..................................................
page
 sante aU travail
Pages
risques psychosociaux : expertise cHsct
TGI Lyon, référés, 12 novembre 2012, n°12/09488
TGI Lyon, référés, 8 juillet 2013, n°13/04841
TGI Lyon, référés, 4 mars 2013, n°12/14274
Yves FROMONT ............................................................
page
de
Novembre 2013 - n°39
 elections proFessionnelles
contentieux électoral : demande d’annulation des
élections professionnelles (conditions)
TI Lyon, pôle 1, 2 juillet 2013, n°11-13-001367
Karine THIEBAULT ........................................................
page
 accidents aU travail
contestation du refus de prise en charge de
l’accident du travail et protection du salarié contre
le licenciement
CPH Lyon, départage, 26 mars 2013, n°10/04727
Dorian JARJAT ...............................................................
page
le critère du lien de subordination
CA Chambéry, ch. soc., 4 juin 2013, n°12/02483
Philippe GROS ................................................................
page
 procedUre prUd’HoMale
le rpva peut-il être utilisé devant la chambre
sociale d’une cour d’appel ? CA Lyon, sec. soc., 14 mai 2013, n°12/02094
CA Lyon, ch. soc., sect. A, 4 mars 2013, n°12/03398
Olivier BARRAUT
page
appel ou contredit ? un jugement, deux voies de
recours
CA Lyon, ch. soc., sect. B., 24 mai 2013, n°11/08522
Fabien ROUMEAS
........................................................................................
page
délai d’action en référé dans le cadre d’un
licenciement pour motif économique : régime
antérieur à la loi de sécurisation de l’emploi
TGI Privas, référé, 18 juillet 2013, n°13/00223
Georges MEYER
page
contrat de travail
CDD d’usage d’un sportif professionnel
Cour d’appel de Lyon, ch. soc., sect. B, 28 mars 2013, n°11/07712
recourir au contrat à durée indéterminée en raison de la nature de
l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces
emplois sont le suivants :
(…)
5° le sport professionnel … »
EXPOSE DES FAITS
Un joueur d’une équipe de hockey sur glace disputant le
championnat national, s’est engagé avec son club par contrats de
travail à durée déterminée successifs pour les saisons 2004 / 2005,
2005 /2006 et 2006 / 2007.
La qualification acquise par l’effet de la combinaison des articles L.
1242-2 et D. 1242-1 du code du travail, ne dispense pas, dans le
cadre du débat judiciaire de requalification, d’établir concrètement,
en cas de contrats à durée déterminée successifs, le caractère par
nature temporaire de l’emploi concerné (Cass. Soc. 23 janvier 2008
n° 06-44197 – RJS 3/08 n° 256), ni de vérifier que les contrats
discutés sont respectueux des conditions de forme prescrites par
l’article L. 1242-12 du Code du Travail, au premier chef desquelles la
« …définition précise de (leur) motif… » (Cass. Soc. 28 mai 2006 n°
05-10775 – RJS 2/07 n° 198).
La relation de travail a pris fin le 31 mars 2007, à l’échéance du terme
du dernier contrat de travail à durée déterminée conclu.
Deux ans plus tard, le joueur a saisi le conseil de prud’hommes de
Lyon d’une demande tendant à la requalification des contrats de
travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée
et à la condamnation subséquente du club à lui payer une indemnité
de requalification, les indemnités de rupture et des dommages et
intérêts pour licenciement dénué de cause réelle et sérieuse aux
motifs que :
- et d’autre part, les contrats de travail à durée déterminée conclus
ne comportaient pas une définition suffisamment précise de leur
motif.
2°/ La question de la définition formelle du motif aux contrats à durée
déterminée ne posant en l’espèce pas difficulté, dès lors qu’il était
stipulé que les contrats avaient été conclus pour une saison sportive
afin de disputer le championnat national de hockey sur glace, c’est
surtout sur le terrain de l’application des dispositions combinées des
articles L. 1242-2 et D. 1242-1 du code du travail, que la
requalification en contrat de travail à durée indéterminée était
poursuivie.
Par Arrêt confirmatif du 28 mars 2013, la Cour d’appel de Lyon a
débouté le joueur de sa demande de requalification et de ses
demandes indemnitaires subséquentes et l’a condamné au paiement
d’une indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de
procédure civile.
Le demandeur soulevait ici, pour l’essentiel, que sa pratique du
hockey sur glace n’était pas professionnelle mais celle d’un sportif
amateur, en raison d’un métier exercé par ailleurs, pour soutenir que
le club ne pouvait valablement recourir au contrat à durée
déterminée d’usage, applicable seulement au sport professionnel.
- d’une part, son statut était celui d’un sportif non professionnel mais
amateur pour ne pas faire de la pratique du hockey sur glace son
activité principale, de sorte que son emploi ne relevait pas du contrat
de travail à durée déterminée « …d’usage… »
Le moyen interpelle à double titre :
- d’abord, car, tant en droit commun qu’à l’aune de la convention
collective nationale des sports, l’existence d’un contrat de travail
dépend non de la fréquence de l’activité afférente, mais des
conditions – prestation de travail, rémunération et lien de
subordination juridique -, en l’espèce remplies, dans lesquelles elle
est pratiquée
OBSERVATIONS
1°/ Le dispositif du contrat de travail à durée déterminée dit «
…d’usage… », résulte de la combinaison des articles L. 1242-2 et D.
1242-1 du code du travail.
- ensuite, parce que le cumul des emplois salariés n’est pas interdit,
sauf à respecter les durées maximales du travail et, le cas échéant,
les obligations contractuelles particulières.
a) L’article L. 1242-2, qui définit les cas de recours au contrat de
travail à durée déterminée, dispose notamment :
Dans ces conditions, le moyen de requalification en demande était
insusceptible de prospérer.
« Sous réserve des dispositions de l’article L.1242-3, un contrat de
travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l’exécution
d’une tâche précise et temporaire, et seulement dans les cas
suivants :
(…)
3° Emplois à caractère saisonnier ou pour lesquels, dans certains
secteurs d’activité définis par décret ou par convention ou accord
collectif de travail étendu, il est d’usage constant de ne pas recourir
au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de
l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces
emplois ;… »
Partant, c’est à bon droit qu’il a été rejeté, au terme d’une motivation
qui, constatant au surplus le caractère par nature temporaire de
l’emploi concerné, est exempte de critique.
L’arrêt mérite une totale approbation.
christophe Bidal
Avocat au Barreau de Lyon
SCP Joseph Aguera & Associés
[email protected]
b) l’article d. 1242-1 précise :
« En application du 3° de l’article L. 1242-2, les secteurs d’activité
dans lesquels des contrats à durée déterminée peuvent être conclus
pour les emplois pour lesquels il est d’usage constant de ne pas
Supplément au journal
2
PRINCIPAUX ATTENDUS
Attendu qu’en l’espèce les contrats de travail à durée déterminée
conclus par M. R… avec l’association LHC, autorisés en leur
principe par l’article D. 1242.1 du code du travail, sont
parfaitement licites pour avoir été conclus pour une durée
déterminée, à savoir la durée d’une saison sportive, mais
également pour le motif bien déterminé et énoncé sur chacun
d’eux de la participation du salarié au Championnat de France de
1ère ou de 2ème Division, impliquant l’engagement du joueur
professionnel à être présent à toutes les rencontres et
entraînements de la saison sportive de hockey sur glace de 1ère
ou 2ème Division pour préparer et réaliser une performance
sportive dans le cadre de la compétition, conformément aux
dispositions de la convention collective nationale du sport… »
« Qu’il ressort de l’article D. 1242-1, 5° du Code du Travail que le
sport professionnel est un des secteurs d’activité dans lesquels
les contrats à durée déterminée peuvent être conclus en raison
de l’usage constant de ne pas recourir au contrat à durée
indéterminée, cette situation s’expliquant par le fait que l’emploi
de joueurs professionnels est de nature temporaire ;
La circonstance tenant à ce que la pratique du hockey sur glace
par Monsieur R… n’est pas son activité principale est sans
incidence sur l’application à son égard des dispositions des
articles précités dans la mesure où son activité relève bien du
sport professionnel, ainsi qu’il l’a lui-même reconnu, ces contrats
de travail à durée déterminée portant sur la pratique
professionnelle du hockey sur glace et non simplement sur une
pratique amateur de ce sport ;
Cour d’appel de Lyon, ch. soc.,
sect. B, 28 mars 2013, n°11/07712
(…)
Niveau de responsabilité et changement des conditions de travail
Cour d’appel de Lyon, ch. soc., sect. B, 3 juillet 2013, n°11/07819
Ainsi, la rémunération, emblème de l’élément essentiel du contrat de
travail ne peut-elle être modifiée, de quelque manière que ce soit,
sans l’accord du salarié.
EXPOSE DES FAITS
Un salarié recruté aux fonctions de « manager Customer service »
au 1er septembre 2005 se voit affecté au 1er janvier 2008 à un poste
de « commercial grands comptes » au sein de la direction
commerciale de l’entreprise.
Le changement d’affectation du salarié entre dans le cadre du
pouvoir de direction de l’employeur, sous réserve qu’il n’y ait pas de
modification de la qualification du salarié et qu’il ne s’accompagne
pas d’une baisse de responsabilités, ce même en cas d’insuffisance
professionnelle (Cass. soc., 26 mai 2010, n°08-44.995 ; Cass. soc.,
7 juillet 2004, n°02-44.734)
Considérant que ce changement d’affectation emporte modification
de son contrat de travail au regard d’une diminution du niveau de
responsabilité, le salarié refuse cette nouvelle fonction.
Au cas d’espèce, le changement d’affectation n’emportait pas de
modification de la rémunération ni de la qualification professionnelle
du salarié.
L’employeur lui notifie alors son licenciement le 10 mars 2008 pour
cause réelle et sérieuse considérant que le salarié avait des
difficultés à manager son équipe et qu’il n’était pas en droit de refuser
le nouveau poste exigeant un « management transversal ».
Etait toutefois discutée la baisse du niveau de responsabilité, le
salarié exposant notamment que la nouvelle affectation constituait
une rétrogradation, dans la mesure où il se voyait retirer la
responsabilité d’une équipe de 70 personnes
La cour d’appel de Lyon confirmant le jugement entrepris, déboute le
salarié de ses demandes en retenant que l’affectation au poste de
commercial grands comptes au sein de la direction commerciale
constituait une simple modification des conditions de travail et ne
pouvait être constitutive d’une rétrogradation dès lors que le salarié
conservait le même niveau de rémunération, la même qualification
professionnelle et était employé sur le même lieu de travail.
L’employeur pour sa part sans contester la réduction d’effectif de
l’équipe encadrée, soutenait que le nouveau poste conférait à son
titulaire une responsabilité très importante en termes de chiffre
d’affaires et de stratégie commerciale.
La cour d’appel précise que le niveau de responsabilité d’un poste ne
peut s’apprécier sur le seul critère de l’effectif de l’équipe à encadrer.
La cour d’appel de Lyon procède à une comparaison globale du
niveau de responsabilité, qu’elle ne cantonne pas à l’importance de
l’équipe encadrée.
La Cour de cassation avait pour sa part pu retenir le critère de la taille
de l’effectif sous la subordination du salarié concerné pour qualifier la
nouvelle affectation de modification du contrat (Cass. soc., 6 octobre
2010, n°09-41.577 ; Cass. soc., 30 mars 2011, n°09-71.824).
OBSERVATIONS
A l’ancienne distinction entre les modifications substantielles et non
substantielles du contrat de travail, la jurisprudence a préféré
opposer la modification du contrat de travail que le salarié est
toujours en droit de refuser au simple changement des conditions de
travail auquel il ne peut s’opposer (Cass. soc., 10 juillet 1996, RJS
1996 n°900).
La Cour de Lyon pondère son appréciation en considérant que le
salarié nouvellement affecté se voyait confier une responsabilité
élargie en termes de chiffre d’affaires et de stratégie commerciale.
Ce faisant, la cour d’appel relevant que la qualification
professionnelle, le niveau hiérarchique et le niveau de rémunération
étaient inchangés, procède à une comparaison in concreto du niveau
de responsabilité attaché aux deux postes en concours, en fondant
son étude sur plusieurs critères.
En l’absence de définition légale de la notion de modification du
contrat, la directive communautaire du 14 octobre 1991 listant de
manière non exhaustive les éléments essentiels du contrat, la
terminologie employée par la Cour de cassation vise à distinguer ce
qui ressortirait de la sphère contractuelle, soumis dès lors au
consentement du salarié, de l’exercice du pouvoir direction de
l’employeur.
Supplément au journal
Mélanie chabanol
Avocat au Barreau de Lyon
SCP Antigone avocats
[email protected]
3
PRINCIPAUX ATTENDUS
Que l’appelant ne démontre pas que l’employeur est agi de
mauvaise foi par abus ou détournement de pouvoir ;
« Attendu que son affectation au poste de commercial grands
comptes au sein de la direction commerciale « trucks » ne constituait
nullement une rétrogradation puisqu’il conservait le même niveau
hiérarchique, le même niveau de rémunération et la même
qualification professionnelle ;
Qu’il est indifférent à cet égard que le nouveau poste auquel le
salarié a été affecté ne comportât point l’encadrement d’une équipe
importante comme le précédent, le niveau de responsabilité d’un
poste ne pouvant s’apprécier sur ce seul critère et alors que le poste
qui lui était proposé représentait une responsabilité considérable en
termes de chiffres d’affaires et de stratégie commerciale. »
Attendu qu’en réaliste, la nouvelle affectation du salarié ne
constituait qu’un simple changement de service, c’est-à-dire une
modification des conditions de travail et non pas une modification du
contrat de travail lui-même ;
Qu’il est loisible à l’employeur de modifier les conditions de travail
dans l’exercice de son pouvoir de direction.
Cour d’appel de Lyon, ch. soc., sect. B,
3 juillet 2013, n°11/07819
Inaptitude physique à tous postes
du secteur d’activité de l’entreprise
Cour d’Appel de Lyon, ch. soc., sect. A, 11 septembre 2013, n°12/08217
Les suites d'une déclaration d'inaptitude d'un salarié à occuper son
poste paraissent relativement limpides : l'employeur doit identifier les
postes correspondant aux qualifications du salarié, envisager leur
aménagement si nécessaire, et l'adaptation éventuelle du
collaborateur à son nouveau poste.
Jean-Bernard Michel
Avocat au Barreau de Lyon
SELARL Ellipse avocats Lyon
[email protected]
Il proposera ces postes au salarié, éventuellement après les avoir
soumis à l'approbation du médecin du travail.
Si le salarié accepte le nouveau poste, la relation de travail se
poursuivra sur les nouvelles fonctions.
En cas de refus du salarié, ou d'absence de proposition, l'employeur
devra procéder au licenciement.
Limpide.
Et pourtant, le contentieux en la matière est toujours aussi fourni.
Dans cette hypothèse, le salarié remet notamment en cause
l'exhaustivité de la recherche opérée par l'employeur.
PRINCIPAUX ATTENDUS
Et les sociétés de taille importante ou faisant partie d'un groupe se
verront souvent opposer cet argument: compte tenu de l'importance
de votre effectif, un reclassement était forcément possible !
«Mme X., qui n'a pas formé de recours à l'encontre
de la décision du médecin du travail est aujourd'hui
sans droit à remettre en cause les termes employés
par celui-ci. Il l'a déclarée inapte à son poste, ce
qu'elle ne dénie pas, et a ajouté «pas de
reclassement possible au sein de l'entreprise et dans
le secteur du B TP de façon générale», ces
préconisations devant être respectées par
l'employeur. »
L'arrêt rendu par la CA de Lyon (11 septembre 2013 RG 12/8217)
présente l'intérêt de rectifier cette logique apparente.
En l'espèce, la salariée contestait son licenciement, prononcé après
qu'elle ait été déclarée inapte non seulement à tout poste de
l'entreprise, mais également "à tous ceux du secteur du BTP".
La tâche de l'employeur était donc pratiquement désespérée, quelle
que soit la taille de son effectif ou des autres entités du groupe.
En effet, l'employeur est tenu par les termes de l'avis de l'inspecteur
du travail, et la taille n'a ici pas d'importance...
Cour d’Appel de Lyon, ch. soc., sect. A, 11 septembre 2013, n°12/08217
La Cour retient que la société s'est livrée aux recherches avec
loyauté, même si celles-ci sont demeurées vaines.
Le licenciement était donc bien fondé.
La salariée tentait par ailleurs de critiquer l'avis du médecin du travail,
rendu dans des termes très (trop ?) généraux.
La Cour la déboute également sur ce point, en constatant qu'elle
n'avait pas contesté cet avis, et qu'elle ne pouvait donc désormais
plus le faire devant le juge.
Cette logique là est limpide et incontestable.
Supplément au journal
4
droit disciplinaire
Règlement intérieur et mise à pied disciplinaire
Conseil de prud’hommes de Lyon, industrie, 3 septembre 2013, n°12/02236
EXPOSE DES FAITS
Cependant et dans ce cas, supprimer purement et simplement le
pouvoir disciplinaire de l’employeur et, ainsi, son pouvoir de
Direction ne conduirait-il pas à revenir sur l’existence du lien de
subordination et, dès lors, de celle même du contrat de travail ?
Un salarié, embauché après un contrat d’apprentissage puis
ultérieurement promu aux fonctions de chef d’équipe, a été
sanctionné d’une mise à pied disciplinaire de 11 jours pour faits
d’abandon de poste et non signalement de l’arrêt de la production. Il
fera l’objet, ensuite, d’un licenciement pour faute grave en raison de
nouveaux faits.
Il a contesté tant la sanction disciplinaire que son licenciement.
Concernant la sanction, il a notamment soutenu que le Règlement
intérieur de l’entreprise ne prévoyait pas de durée maximale des
mises à pied disciplinaires contrairement à ce qu’exigent, comme
condition de validité de telles sanctions, tant le Conseil d’Etat que la
Cour de Cassation.
- Génératrice d’inégalité lorsque l’on sait qu’un Règlement intérieur
ne s’impose que dans les entreprises occupant au moins 20 salariés
(article L1311-2 du code du travail) et dans les trois mois suivant
l’ouverture de l’entreprise (article R1321-5 du code du travail).
Dans ces cas, il n’existe dès lors aucune obligation, du fait de
l’absence d’exigence de règlement intérieur, de prévision d’une
échelle des sanctions et, a fortiori, d’une durée maximale de mise à
pied disciplinaire.
Le Conseil de Prud'hommes de LYON, accueillant le moyen élevé a,
au visa de l’article L1321-2 du code du travail et de la jurisprudence
prise en son application, annulé la mise à pied disciplinaire.
Le salarié dont le seul tort est de travailler dans une structure de
petite dimension ou nouvellement créée se voit donc privé de règles
considérées comme protectrices de ses droits.
Convenons que la justification d’une telle différence de traitement
peut surprendre.
Manifestement embarrassée, la Cour de Cassation, par un arrêt du
19 janvier 2011 (N° 09-65916) a validé une sanction disciplinaire
prévue par un règlement intérieur qui n’avait pourtant pas fait l’objet
d’un affichage conforme ce dont se plaignait le salarié, motif pris que
la Cour d’Appel, pour dire cette sanction valable et justifiée, ne s’était
pas fondée sur les dispositions de ce règlement intérieur mais sur le
fait que le salarié n’avait pas respecté ses obligations (en n’assurant
pas son service de nuit sans prévenir en temps utiles).
OBSERVATIONS
Il est de principe aujourd’hui constant qu’est salarié celui qui
accomplit un travail pour un employeur dans un lien de subordination
lequel se caractérise, depuis l’arrêt de principe de la Cour de
Cassation du 13 novembre 1996 (n° 94-13187), par : « l’exécution
d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a pouvoir de donner
des ordres, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les
manquements de son subordonné ».
Doit-on en déduire qu’un employeur serait en droit de prononcer une
sanction disciplinaire, même non prévue ou prévue de manière non
conforme dans un règlement intérieur s’il précise se placer « hors »
de ce règlement ? Le raisonnement juridique semble, là encore,
sibyllin…
Le pouvoir disciplinaire de l’employeur, critère décisif de l’existence
du contrat de travail puisque directement issu du pouvoir de
direction, est cependant à limitation variable selon certains critères
dont, par exemple, la taille de l’entreprise. C’est, finalement, les
enseignements qui pourraient être tirés de la présente décision
laquelle, certes, ne fait que confirmer la position aujourd’hui tranchée
de la Cour de Cassation (Cass. soc. 26 octobre 2010 N° 09-427403).
Nous semble plus pertinente et garante des droits de tous la position
de la Cour d’Appel pourtant censurée par la Cour de Cassation par
son arrêt du 26 octobre 2010 susvisé qui retenait que : « Une
sanction est inhérente au pouvoir disciplinaire de l’employeur lequel
a la faculté, en l’absence de dispositions restrictives d’un Règlement
intérieur ou d’une convention collective, d’en faire usage sous la
seule réserve du contrôle de l’autorité judiciaire ».
En effet, au visa de l’article L1321-1 du code du travail, la Cour de
Cassation pose le postulat selon lequel une sanction ne peut être
prononcée contre un salarié que si elle est prévue par un Règlement
intérieur et, encore, qu’une mise à pied n’est licite que si ce
règlement intérieur en précise la durée maximale.
Il doit en effet être rappelé que le juge a le pouvoir légal d’apprécier
la régularité de la procédure suivie et, le cas échéant, d’annuler une
sanction injustifiée ou disproportionnée à la faute commise (article
L1333-2 du code du travail). Or, et précisément dans ce cadre il peut
être considéré qu’une sanction disciplinaire, même irrégulière en la
forme, n’est pas nécessairement annulable dès lors qu’elle est
justifiée. (Cass. soc. 07 janvier 1988 N° 85-42761, Cass. soc. 13
octobre 1988 N° 85-45646). Dans ce cadre, le pouvoir disciplinaire
de l’employeur, critère décisif du lien de subordination et, au-delà, du
contrat de travail serait préservé tout comme le serait le droit du
salarié de contester en justice une sanction prononcée à son
encontre, le juge ayant alors compétence pour apprécier la régularité
de la procédure suivie ainsi que le caractère justifié et proportionné
de la sanction prononcée au regard de la faute commise.
En clair, un employeur qui n’a pas établi de règlement intérieur (alors
qu’il aurait dû) ou dont le Règlement intérieur ne prévoit pas de
durée maximale des mises à pied disciplinaires ou, encore, qui n’a
pas affiché ce Règlement de manière suffisamment conforme dans
l’entreprise voire n’a pas respecté la formalité de communication à
l’Inspection du Travail n’est pas fondé à sanctionner un salarié… à
tout le moins et en l’état actuel par le biais d’une mise à pied
disciplinaire quelle que puisse avoir été la faute commise ayant
motivé cette sanction.
Pour la Cour de Cassation un tel manquement ne revêt pas une
simple irrégularité de forme mais un vice substantiel de fond ayant
pour nécessaire conséquence la privation de l’employeur d’une
partie importante de son pouvoir disciplinaire.
olivier lacroix
Avocat au Barreau de Lyon
Cabinet CEFIDES
[email protected]
Une telle position est dangereuse et créatrice de rupture d’égalité.
- Dangereuse car susceptible d’être étendue au licenciement lequel
constitue l’ultime sanction. Quel réel obstacle y aurait-il, en effet, au
visa du même article L1321-1 du code du travail, à dénier à un
employeur le pouvoir de rompre le contrat de travail d’un salarié soit
parce qu’il n’a pas établi de Règlement intérieur, soit parce qu’il ne
l’a pas correctement affiché ou transmis aux autorités compétentes
(même s’il est vrai que le licenciement est expressément prévu par
le code du travail et trouve ainsi sa source dans celui-ci) ?
Supplément au journal
4
PRINCIPAUX ATTENDUS
« L’article L.1321-2 du code du travail (Règlement intérieur chapitre
1er) stipule : « Les règles générales et permanentes relatives à la
discipline notamment la nature et l’échelle des sanctions que peut
prendre l’employeur ». Note : Si la mise à pied, qui est une mesure
de suspension temporaire du contrat de travail peut figurer dans
l’échelle des sanctions prévue par le Règlement intérieur, ledit
règlement doit en préciser la durée maximale (CE 21 septembre
1990 RJS 12/90 N° 966).
Attendu que le règlement intérieur doit impérativement préciser la
durée maximale d’une mise à pied disciplinaire. A défaut le
règlement intérieur encourt l’annulation ».
(…)
Attendu alors que le Conseil ne pourra qu’annuler la mise à pied
disciplinaire prononcée du 7 au 18 mars 2011, qu’en conséquence le
Conseil condamnera la société X au paiement du rappel de salaire,
outre les congés payés afférents pour la période considérée ».
(…)
Attendu dès lors que le règlement intérieur fixe les règles générales
et permanentes relatives à la discipline.
Au plan individuel, la chambre sociale de la Cour de Cassation a
jugé, dans un arrêt du 26 octobre 2010 que : une sanction ne peut
être prononcée contre un salarié que si elle est prévue par ce
règlement intérieur. Attendu qu’elle est licite que si ce règlement
précise sa durée maximale. (Cass. soc. 25 octobre 2010).
Conseil de prud’hommes de Lyon, industrie,
3 septembre 2013, n°12/02236
(…)
Test salivaire pratiqué en violation des dispositions du règlement
intérieur : preuve illicite et droit d’alerte des délégués du personnel
Conseil de prud’hommes de Grenoble, sect. ind., 20 septembre 2013, n°13/01736
EXPOSE DES FAITS
Un salarié est surpris par son supérieur hiérarchique sur son lieu de
travail en train de fumer ce que ce dernier suppose être du cannabis.
Un test salivaire lui est imposé dont le résultat conduira à son
licenciement pour faute grave.
Les délégués du personnel, appuyés dans leur action par leur
organisation syndicale, décident de faire usage de la procédure de
droit d’alerte et saisissent le conseil de prud’hommes en la forme des
référés.
Au soutien de leur argumentation ils font état de ce que le test a été
pratiqué en violation des dispositions du règlement intérieur qui ne le
prévoit pas, sans consultation préalable du CHSCT et dans des
conditions qui portent atteinte à la dignité du salarié ainsi qu’à sa santé
mentale dès lors qu’il a été pratiqué par une personne non habilitée,
en présence de témoins et à la seule lecture d’une notice.
Par jugement du 20 septembre 2013, le Conseil de Prud’hommes de
Grenoble déclare leur action recevable, constate le caractère illicite du
test salivaire de dépistage de produits stupéfiants, et en ordonne le
retrait immédiat du dossier personnel du salarié.
Il est également ordonné la remise immédiate du stock de tests
salivaires à la Médecine du travail.
protéger les salariés et celle de respecter leurs libertés individuelles ;
elle est donc parfaitement encadrée.
Le dépistage systématique est interdit par la circulaire n°90/13 du 9
juillet 1990.
Si le code du travail autorise, comme outil de prévention, la pratique
des tests de dépistage, (alcool mais aussi stupéfiants) notamment à
l’embauche ou encore en cours d’exécution du contrat de travail, ce
n’est qu’en raison de la nature du poste : postes à risques ou à
responsabilités (art.L.4624-7 du code du travail).
Ces tests doivent alors être pratiqués par un médecin ou un biologiste
qui doit informer le salarié de la nature et de l’objet du test et dont le
résultat est soumis au secret professionnel. En fonction du résultat le
médecin du travail se limitera à constater l’aptitude ou non du salarié
au poste.
C’est dans ce cadre précis, usant de son pouvoir disciplinaire, que
l’employeur par la voie du règlement intérieur (art.L.1321-1 du code du
travail) pourra imposer les tests de dépistage au salarié, à la condition
que les dispositions du règlement intérieur soient correctement
rédigées, nous rappelle le conseil de prud’hommes « un test salivaire
ne peut être réalisé sur la méthode de l’Ethylotest évoquée à l’article
24 du règlement intérieur ».
L’intérêt de cette décision réside dans le rappel du moyen procédural
efficace dont dispose les délégués du personnel avec la procédure
d’alerte et le cadre strict dans lequel le test salivaire peut être pratiqué.
C’est la violation de ces règles, faute de disposition spécifique dans le
règlement intérieur et de l’atteinte aux libertés individuelles qui en
découle, qui a conduit le Conseil de prud’hommes saisi par les
délégués du personnel et une organisation syndicale à déclarer le test
salivaire pratiqué illicite et ordonner son retrait du dossier du salarié.
OBSERVATIONS
Cette procédure d’alerte, en la forme des référés, ouverte aux
délégués du personnel par l’article L2313-2 du code du travail, peu
connu et sous utilisé est pourtant efficace notamment compte tenu de
sa rapidité.
C’est au visa de l’article L.1121-1 du code du travail que le jugement
de Grenoble a été rendu : « Nul ne peut apporter aux droits des
personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui
ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni
proportionnées au but recherché. »
Il reste au salarié licencié pour faute grave sur le fondement d’une
preuve illicite, en l’occurrence le test salivaire, de saisir lui-même le
conseil de prud’hommes pour obtenir la nullité de son licenciement.
eladia delgado
Avocat au barreau de Lyon
SELARL Delgado & Meyer
[email protected]
D’aucuns opposeront l’article L 4121-1du code du travail qui imposent
à l’employeur de prendre « les mesures nécessaires pour assurer la
sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs »
Face à ces deux impératifs, la mise en œuvre des tests de dépistage
ne peut donc résulter que d’un compromis entre la nécessité de
Supplément au journal
6
PRINCIPAUX ATTENDUS
« Si l’employeur peut utiliser le test salivaires pour détecter l’usage de produits stupéfiant, c’est à la condition que cette possibilité figure au
règlement intérieur, que le salarié ait été informé de ce dépistage, qu’il s’adresse aux salariés dont l’usage de drogue présente un risque pour
sa propre sécurité ou la sécurité d’autres salariés et qu’il ne peut donc être généralisé »
Conseil de prud’hommes de Grenoble, sect. ind.,
20 septembre 2013, n°13/01736
Salariés protégés : rejet de l’autorisation de licenciement et
légitimité de la mesure
Cour d’appel de Lyon, ch. soc., sect. B, 4 septembre 2013, n°11/06756
EXPOSE DES FAITS
et judiciaire légales.
Un salarié protégé conteste son licenciement pour cause réelle et
sérieuse autorisé par l’inspection du travail.
Jusque là tout va bien et le salarié aurait pu entendre cette décision.
Néanmoins, la Cour ne se contente pas de cette motivation et ajoute
: « Que si ces éléments ont pu paraitre insuffisants à la juridiction
administrative pour valider une autorisation de licenciement, ou au
juge d’instruction pour renvoyer l’intéressé devant la juridiction
pénale, ils justifiaient cependant le licenciement pour cause réelle et
sérieuse et qu’une décision de passer outre prise par l’[association]
aurait pu avoir pour celle-ci et pour les personnes placées sous sa
responsabilité des conséquences gravissimes ; »
Le salarié qui travaille au sein d’une association est en effet
soupçonné d’attouchement sexuel sur une résidente.
Deux procédures sont alors menées : l’une administrative, l’autre
pénale :
La procédure administrative : L’autorisation de licenciement est
annulée par le Tribunal Administratif de Lyon, confirmé par la Cour
administrative d’appel, le pourvoi formé par l’association étant par
ailleurs rejeté par le Conseil d’état.
La procédure pénale : Parallèlement une information judiciaire avait
été ouverte sur la plainte déposée par le tuteur de la résidente.
L’intérêt de l’arrêt réside dans cette diminution opérée de
l’indemnisation sur le fondement de la propre appréciation par la Cour
d’appel, des griefs, qui rappelons le étaient inexistants selon quatre
magistrats différents (Tribunal administratif, Cour Administrative
d’appel, Conseil d’Etat, Juge d’instruction), et sur le fondement d’un
simple risque.
Une ordonnance de non-lieu est rendue par le Juge d’instruction du
TGI de Lyon.
La décision est juridiquement juste dans le sens ou le juge judiciaire
conserve le pouvoir d’apprécier le quantum du préjudice.
Aucune voie de recours n’est par ailleurs diligentée.
Ensuite de ces deux procédures, le salarié saisit le Juge prud’homal
aux fins de solliciter : des dommages et intérêts pour licenciement
sans cause réelle et sérieuse ; un rappel de salaire au titre de la perte
de revenu ; des dommages et intérêts en réparation du préjudice
moral.
Néanmoins, la motivation laisse perplexe.
On devine à sa lecture, la volonté du juge judiciaire de ne pas être
qu’une simple chambre d’enregistrement du préjudice pour le salarié
protégé ayant triomphé devant le juge administratif.
Par jugement du 16 septembre 2011, le Conseil de Prud’hommes de
Lyon fait droit à ses prétentions et l’association relève appel de la
décision.
christine Fauconnet
Avocat au barreau de Lyon
SCP Revel, Mahussier & Associés
[email protected]
OBSERVATIONS
PRINCIPAUX ATTENDUS
Après avoir rappelé qu’en vertu du principe de séparation des
pouvoirs, le juge judiciaire ne peut revenir sur le bien fondé ou non du
licenciement préalablement apprécié par le juge administratif, la Cour
se prononce sur les trois chefs de demandes critiqués.
« Attendu que les trois rapports d’expertise psychologique de
Mme X. handicapée mentale concluent à la crédibilité de son
propos et soulignent la crainte par elle exprimée de se
retrouver en présence de M. F ;
Sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et
sérieuse
Que si ces élements ont pu paraitre insuffisants à la juridiction
administrative pour valider une autorisation de licenciement,
ou au juge d’instruction pour renvoyer l’interessé devant la
juridiction pénale, ils justifiaient cependant le licenciement pour
cause réelle et sérieuse et qu’une décision de passer outre
prise par l’[association] aurait pu avoir pour celle-ci et pour les
personnes placées sous sa responsabilité des conséquences
gravissimes ;
La Cour retient comme critère l’ancienneté du salarié pour venir
diminuer les dommages et intérêts alloués par le juge prud’homale
sur le rappel de salaire au titre de la perte de revenu
De même et s’agissant du salaire sollicité, la Cour rappelle le
paiement du préavis et diminue donc la somme allouée en première
instance.
Qu’ainsi aucun abus n’a été commis par l’association
appelante ; »
Sur le préjudice moral
C’est sur ce chef que réside l’intérêt (ou la particularité) de l’arrêt.
Cour d’appel de Lyon, ch. soc., sect. B,
4 septembre 2013, n°11/06756
La Cour vient réduire à néant le jugement prud’homal considérant
qu’il ne peut être reproché à l’association « un acharnement judiciaire
fautif » du seul fait d’avoir exercé les voies de recours administratives
Supplément au journal
7
santé au travail
Risques psychosociaux : expertise CHSCT
Tribunal de grande instance de Lyon, référé, 12 novembre 2012, n°12/09488
Tribunal de grande instance de Lyon, référé, 8 juillet 2013, n°13/04841
Tribunal de grande instance de Lyon, référé, 4 mars 2013, n°12/14274
Supplément au journal
8
Supplément au journal
9
elections professionnelles
Contentieux électoral : demande d’annulation des élections
professionnelles (conditions)
Tribunal d’instance de Lyon, pôle 1, 2 juillet 2013, n°11-13-001367
courante, le juge, pour les besoins du raisonnement, a tenu pour
acquis les faits exposés devant lui par la requérante, si peu étayés
soient-ils.
EXPOSE DES FAITS
La société X. a organisé les élections des délégués du personnel et
des membres élus du comité d’entreprise le 23 mai 2013.
Ainsi qu’il a été rappelé plus haut la société demanderesse invoquait
les articles L-59 et L-97 du Code électoral et, par référence à ces
textes, un manquement aux principes généraux du droit électoral.
Par requête enregistrée le même jour au greffe du tribunal
d’instance de Lyon, elle a sollicité l’annulation de ce scrutin.
L’article L-59 dispose : « Le scrutin est secret », Et cette règle, qui
vaut pour toutes les élections, qu’elles soient politiques ou
professionnelles, passe effectivement pour l’un des principes
fondamentaux du droit électoral.
A l’appui de ce recours, la société X. faisait valoir la commission, par
Madame G., d’ « actes frauduleux violant les principes généraux du
droit électoral », au visa (outre des textes du Code du travail
habituellement invoqués en la matière) des articles L-59, relatif au
secret du scrutin, et L-97, prévoyant des sanctions pénales à
l’encontre des auteurs de certaines manœuvres frauduleuses, du
Code électoral.
Le tribunal ne manque d’ailleurs pas de le rappeler, mais constate
aussitôt que les faits allégués, soit le comportement d’une seule
personne, ayant (à en croire la requérante, donc),
pris
connaissance du vote d’une seule électrice, n’ont pu suffire à porter
atteinte au principe précité.
Elle exposait en substance que Madame G., par ailleurs adhérente
au syndicat Force Ouvrière, s’était rendue au domicile d’une salariée
de l’entreprise alors en arrêt-maladie, de surcroît illettrée, pour
s’emparer de ses deux enveloppes de vote, y introduisant des
bulletins, lui faisant signer lesdites enveloppes, avant de les
emporter pour les poster.
L’article L-97, selon nous présenté à tort par la société X. comme
relevant des principes fondamentaux du droit électoral (sous
prétexte, croyons-nous comprendre, qu’il relève du droit pénal) ,
dispose : « Ceux qui, à l’aide de fausses nouvelles, bruits
calomnieux ou autres manœuvres frauduleuses, auront surpris ou
détourné des suffrages, déterminé un ou plusieurs électeurs à
s’abstenir de voter, seront punis d’un emprisonnement d’un an et
d’une amende de 15 000 €. »
Informée de ces accusations, Madame G. a immédiatement déposé
plainte pour dénonciation calomnieuse, de sorte que devant le
tribunal elle faisait plaider à titre principal le sursis à statuer dans
l’attente des suites réservées à cette plainte, et subsidiairement le
rejet de la requête.
Ce texte, reconnaissons-le, est curieusement rédigé : si, par les
différentes manœuvres qu’il prévoit (nous n’avons pas trouvé de
jurisprudence concernant la mystérieuse notion de « bruits
calomnieux »), quelqu’un détermine un seul électeur à s’abstenir de
voter, il est coupable ; si, par de mêmes manœuvres, un vote est «
surpris » ou « détourné », il ne l’est pas puisqu’il en faut plusieurs.
Comprenne qui pourra.
En dépit du soutien apporté à la société X. par plusieurs
organisations syndicales, le Tribunal d’instance de Lyon a dit n’y
avoir lieu à surseoir et rejeté la requête, après avoir considéré, dans
des termes sur lesquels nous allons revenir, qu’à supposer avérés
les faits imputés à Madame G., ceux-ci n’étaient pas de nature à
entraîner l’annulation du scrutin.
Le juge n’a donc eu qu’à poursuivre son raisonnement : à supposer
les faits avérés, ils ont conditionné un vote, pas une abstention ; et,
faute d’en avoir affecté plusieurs, ils n’entraient donc pas dans les
prévisions de l’article L-97 du Code électoral.
De sorte que, par ce même raisonnement tenant pour acquis les
faits allégués par la demanderesse, le juge a estimé qu’il n’y avait
pas besoin, pour statuer au fond et débouter, de surseoir à statuer
dans l’attente des suites données à la plainte déposée par Madame
G.
C’est la décision brièvement commentée ici.
OBSERVATIONS
Cette décision nous paraît devoir être entièrement approuvée, tant
pour la solution qu’elle adopte que pour la motivation qui la soutient.
In fine, et de manière à notre sens surabondante, le juge fait état du
fait que, de toutes façons, la fraude alléguée n’était pas de nature à
corrompre le résultat du scrutin, s’agissant d’un seul suffrage.
(jurisprudence constante, voir par exemple Cass.soc., 10 oct. 2012,
n°11-60.196)
Le bref commentaire que nous tentons d’en proposer n’échappe
pas, au-delà des aspects purement juridiques, à une certaine
frustration s’agissant des éléments factuels.
On ignore quels éléments de preuve des agissements prêtés à
Madame G. ont été présentés au tribunal par la société X., laquelle
a soutenu devant lui, semble-t-il sans être démentie, qu’ils
consistaient en une attestation de la salariée concernée, dont cette
dernière, illettrée, ne pouvait cependant pas être l’auteur, et de la
relation des faits par des membres du CHSCT lui ayant rendu visite,
sans que l’on soit à même de comprendre dans quelles
circonstances, sur quel fondement juridique s’il y en a un, ni
davantage quelle forme a pu prendre devant le juge ce témoignage
par nature indirect.
D’autres décisions s’en sont contentées.
Il est néanmoins permis de déplorer la façon dont il n’a pas été fait
application de l’article 700 du Code de procédure civile au profit de
la défenderesse, dans une espèce où la requérante, pour des
raisons qui nous échappent mais qui doivent bien exister, avait saisi
le tribunal sans le moindre espoir de succès.
Karine thiébault
Avocat au barreau de Lyon
SCP Antigone avocats
[email protected]
On ignore tout autant le résultat du scrutin dont l’annulation était
demandée, donnée potentiellement décisive pourtant, dans la
mesure où elle permet d’apprécier si la fraude alléguée a pu – ou
non – avoir une incidence significative sur les élections.
Le tribunal ne donne pas ces précisions, donnant ainsi à
comprendre qu’elles eussent été inopérantes, mais il applique le
droit ; le commentateur – même frustré – ne saurait l’en blâmer.
Par une figure de rhétorique classique à défaut d’être tout à fait
Supplément au journal
9
PRINCIPAUX ATTENDUS
« Dès lors que la manœuvre alléguée n’aurait eu pour victime qu’une personne, Madame L. visitée par Madame G. alors qu’elle était en
arrêt de travail, et qu’il n’est ni établi ni même soutenu que l’auteur des agissements contestés ou un autre salarié aurait usé de la même
pratique à l’égard d’un quelconque autre électeur, l’irrégularité invoquée ne peut s’analyser en un manquement au principe général du
droit électoral tel qu’il résulte de l’article L-97 du Code électoral. »
Tribunal d’instance de Lyon, pôle 1, 2 juillet 2013, n°11-13-001367
accidents au travail
Contestation du refus de prise en charge de l’accident du travail et
protection du salarié contre le licenciement
Conseil de prud’hommes de Lyon, 26 mars 2013, n°10/04727
EXPOSE DES FAITS
Une société licencie une salariée en arrêt maladie pour absence
prolongée perturbant gravement le fonctionnement de l’entreprise et
entrainant la nécessité de la remplacer définitivement, alors même
que cet arrêt de travail fait suite à une déclaration d’accident du
travail. Cette déclaration avait cependant fait l’objet d’un refus de
prise en charge par la CPAM, confirmé par la Commission de
Recours Amiable mais contesté devant le T.A.S.S. au jour du
licenciement
Le Conseil de Prud’hommes estime que la protection accident du
travail devait s’appliquer dès lors que l’employeur avait connaissance
de l’origine professionnelle de l’accident ce qui était, selon lui, le cas
lorsque l’employeur avait été informé d’un refus non définitif de prise
en charge au titre du régime accident du travail. Durant la période de
protection, le licenciement n’étant possible que pour faute grave, le
motif d’absence prolongée désorganisant l’entreprise ne pouvait être
valablement retenu.
OBSERVATIONS
L’impossibilité de licencier un salarié au cours d’un arrêt maladie pour
accident du travail en raison de la désorganisation engendrée par son
absence prolongée et de la nécessité de pourvoir à son
remplacement définitif n’appelle aucun débat compte tenu de la clarté
tant des textes que de la jurisprudence en la matière.
Le jugement rendu par le Conseil de Prud’hommes de Lyon explore
une hypothèse qui mérite cependant un examen plus attentif ; celle
d’une salariée ayant effectué une déclaration d’accident du travail qui
n’a pas été prise en charge par la Caisse Prime d’Assurance Maladie
ce qu’elle conteste judiciairement devant le Tribunal des Affaires de
Sécurité Sociale. La protection légale attachée aux accidents du
travail doit-elle jouer en faveur d’un salarié poursuivant judiciairement
la reconnaissance d’un accident du travail devant les juridictions de
sécurité sociale après un refus de la C.P.A.M. ?
Sur ce point, le Conseil de Prud’hommes de Lyon a fait une stricte
application de la jurisprudence de la Cour de cassation qui considère
que les règles protectrices en matière d’accident du travail
s’appliquent dès lors que l’employeur a eu connaissance de l’origine
professionnelle de l’accident et qu’il en est ainsi alors même qu’au
jour du licenciement l’employeur était informé d’un refus de prise en
charge par la sécurité sociale (Soc. 29 Juin 2011 n°10-11699).
du travail a été ouverte, même si des réserves sont formulées par
l’employeur (Soc. 7 mai 1996 n°92-44873). La protection A.T. est
donc subordonnée non à la prise en charge effective mais à
l’existence d’une procédure pendante en vue de celle-ci.
La protection A.T. étant ouverte au salarié demandant initialement la
reconnaissance d’un A.T., sans préjuger du bienfondé de sa
demande, il est cohérent que cette protection se poursuive tant et
aussi longtemps qu’une contestation est en cours et que la demande
n’a donc pas été définitivement tranchée.
Au cas d’espèce, le Conseil de Prud’hommes a justement relevé
qu’au jour du licenciement la salariée poursuivait la reconnaissance
de l’accident du travail devant le T.A.S.S. ce dont l’employeur était
parfaitement informé puisqu’il était partie à l’instance. Le Conseil de
prud’hommes en a donc justement tiré les conséquences en estimant
que « les règles protectrices (…) s’appliquent dès lors que
l’employeur a connaissance de l’origine professionnelle de l’accident,
il en est ainsi, alors même qu’au jour du licenciement, l’employeur a
été informé d’une refus non définitif de prise en charge ». La
protection aura donc été ouverte même si in fine le T.A.S.S. a rejeté
l’A.T.
Si ce jugement est donc parfaitement conforme à la jurisprudence, on
peut s’interroger sur le maintien à terme de celle-ci. En effet, une telle
jurisprudence faisait parfaitement sens dès lors que la
reconnaissance définitive de l’accident du travail en droit de la
sécurité sociale était la condition nécessaire de l’ouverture de la
protection en droit du travail. Rappelons cependant que depuis un
arrêt du 4 Mai 1999 (n°97-41484) la Cour de cassation estime que les
dispositions du Code du travail sont autonomes par rapport au droit
de la sécurité sociale et que les juridictions du travail ne sont pas
tenues par les décisions des C.P.A.M.
Ne serait-il pas temps pour les juridictions du travail d’aller au bout de
ce principe d’autonomie et de se prononcer de façon autonome sur la
qualification d’A.T. et donc sur l’ouverture du statut protecteur en se
basant, non sur l’état d’avancement d’une procédure de sécurité
sociale, mais sur les éléments factuels qui leurs sont soumis ?
Une telle évolution aurait l’infini mérite de justifier l’application de la
protection par des éléments factuels témoignant d’un lien de
causalité entre l’accident et l’activité professionnelle.
dorian Jarjat
Avocat au barreau de Lyon
SELARL Renaud avocats
[email protected]
La jurisprudence estime de manière constante que la protection A.T.
est ouverte dès lors qu’une procédure de reconnaissance d’accident
Supplément au journal
11
PRINCIPAUX ATTENDUS
« A la date du licenciement, le 20 janvier 2010, l’employeur était informé de l’origine professionnelle de l’accident puisque la salariée faisait
état d’une fait survenu au temps et au lieu du travail le 22 Février 2009. Les règles protectrices applicables aux victimes d’un accident du
travail ou d’une maladie s’appliquent dès lors que l’employeur a connaissance de l’origine professionnelle de la maladie ou de l’accident
et, il en est ainsi, alors même qu’au jour du licenciement, l’employeur a été informé d’un refus non définitif de pris en charge au titre du
régime des accidents du travail. »
Conseil de prud’hommes de Lyon, 26 mars 2013, n°10/04727
Critère du lien de subordination
Cour d’appel de Chambery, ch. soc., 4 juin 2013, n°12/02483
EXPOSE DES FAITS
Monsieur Olivier S., salarié technicien au sein d’EDF-GRDF, avait
notamment comme missions de traiter les dossiers de chantiers,
d’organiser des sessions de formations d’agents à la conduite. Cette
activité s’exerçait librement…
nécessaire de rechercher si l’accident est survenu à l’occasion d’un
acte professionnel ou d’un acte de la vie courante, sauf pour
l’employeur ou la Caisse à rapporter la preuve que le salarié avait
Le jeudi 7 octobre 2010, pendant qu’il était en mission avec le
véhicule de l’entreprise, Monsieur Olivier S, a été victime d’une forte
douleur au dos alors qu’il sortait de ce véhicule pour acheter des
cigarettes.
interrompu sa mission pour un motif d’intérêt personnel et
indépendant de l’emploi ». (Cass. soc., 19 juillet 2001, n°99-20.603 et
n°99-21.536).
En l’espèce le salarié soutenait que l’accident avait eu lieu pendant
ses heures de travail et alors qu’il était à la recherche d’un lieu pour
la future formation professionnelle dont il avait la responsabilité.
Le certificat médical initial, daté du même jour, faisait état d’un
lombago aigu-contracture 4ème para-vertébrale gauche.
La Cour d’appel rejette cette argumentation en estimant que
Monsieur Olivier S. s’était soustrait à l’autorité de son employeur aux
motifs que :
le salarié s’était vu confié, le matin de son accident, la
préparation d’un chantier sans déplacement ;
l’accident avait eu lieu à un endroit situé
géographiquement à l’opposé du lieu habituel retenu pour la
formation professionnelle, et dans la proximité immédiate du cabinet
de son médecin traitant.
L’employeur a régularisé une déclaration d’accident du travail en
formulant des réserves quant à la matérialité et à l’imputabilité de
l’accident.
La Caisse primaire d’assurance maladie a refusé la prise en charge
de cet accident au titre de la législation des risques professionnels au
motif que l’accident était survenu au cours d’activités personnelles
sans lien avec le travail.
Saisi par le salarié, le Tribunal des affaires de sécurité sociale
reconnaissait le caractère professionnel de l’accident. Un appel a été
interjeté par la Caisse primaire d’assurance maladie et par la Société
ERDF.
Ainsi en quittant volontairement son lieu de travail habituel pour
effectuer une toute autre mission que celle qui lui avait été confiée (à
savoir acheter un paquet de cigarette), Monsieur Olivier S. s’est
volontairement soustrait à l’autorité de son employeur, ce qui de facto
rompt le lien de subordination et fait tomber la présomption
d’imputabilité.
La Cour d’appel de Chambéry par un arrêt du 4 juin 2013 infirme la
décision du Tribunal des affaires de sécurité sociale au motif que le
salarié s’était volontairement soustrait à l’autorité de son employeur
et n’était donc plus sous la subordination de son employeur.
Le jugement rendu par la Cour d’appel de Chambéry est parfaitement
conforme à la jurisprudence précitée.
Il est également à rapprocher d’un arrêt de la Cour d’appel de Lyon
du 15 janvier 2013, n°12/03349, ayant d’ailleurs fait l’objet d’un
commentaire dans un précédent numéro (Les Pages de
Jurisprudence Sociale, juillet 2013, n°38).
OBSERVATIONS
La Cour d’appel de Chambéry a rappelé, dans ce jugement, la règle
selon laquelle constitue un accident du travail, l’accident survenu au
salarié lorsqu’il se trouve sous l’autorité de son employeur.
L’article L.411-1 du code de la sécurité sociale dispose que l’accident
du travail est « l’accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail
et à toute personne salariée ou travaillant à quelque titre que ce soit,
pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d’entreprise ».
philippe Gros
Avocat au Barreau de Lyon
Cabinet CEFIDES
[email protected]
La jurisprudence constante de la Cour de cassation subordonne la
reconnaissance du caractère professionnel de l’accident à l’existence
du lien de subordination lors de sa survenance, lequel se matérialise,
notamment, par l’immixtion de l’employeur dans la direction et la
surveillance du travail effectué par le salarié.
La Cour de cassation a admis dans son arrêt de principe du 19 juillet
2001 que le salarié en mission « a droit à la protection prévue par
l’article L.411-1 du Code de la sécurité sociale pendant tout le temps
nécessaire à l’accomplissement de sa mission, sans qu’il soit
Supplément au journal
11
PRINCIPAUX ATTENDUS
« Attendu que conformément à l’article L 411-1 du code de la sécurité sociale, est considéré comme accident du travail, quelle qu’en soit
la cause, l’accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail et à toute personne salariée ou travaillant à quelque titre que ce soit, pour
un ou plusieurs employeurs ou chefs d’entreprise ; »
(…)
« Attendu que la présomption d’imputabilité telle qu’édictée par l’article précité tombe dès lors qu’il est démontré que le salarié a cessé
d’être sous l’autorité de l’employeur ou que l’accident est survenu au cours d’un acte sans aucun rapport avec l’exécution du travail
demandé ; »
(…)
« Attendu que monsieur Olivier S. en quittant volontairement son bureau pour effectuer une toute autre mission que celle qui lui avait été
confiée, s’est volontairement soustrait à l’autorité de son employeur et n’était donc plus sous la subordination de celui-ci ; »
Cour d’appel de Chambery, ch. soc., 4 juin 2013, n°12/02483
procédure prud’homale
Le RPVA peut-il être utilisé devant
la Chambre sociale d’une cour d’appel ? Cour d’appel de Lyon, sec. soc., 14 mai 2013, n°12/02094
Cour d’appel de Lyon, sec. A., 4 mars 2013, n°12/03398
La recevabilité de l’appel porté devant la chambre sociale connaît de
nouveaux développements depuis que le législateur a instauré une
nouvelle voie procédurale : la voie électronique.
se fondant sur la rédaction
matière.
Cette voie est-elle recevable devant une juridiction où la
représentation par un avocat n’est pas obligatoire ?
EXPOSE DES FAITS
La réponse est à l’évidence positive si l’on s’en tient à la
règlementation en la matière illustrée par deux arrêts rendus l’un par
la Cour d’appel de LYON et l’autre par la Cour d’appel de
CHAMBERY.
Le premier retient le principe même de la recevabilité de l’appel par
la voie électronique, même dans le cadre d’une procédure sans
représentation obligatoire ;
Le second admet que le dispositif mis en place permet de garantir la
sincérité de l’appel notamment au niveau de l’identification de son
auteur.
1 – Le principe de l’appel électronique appliqué à la chambre sociale
: l’arrêt du 4 mars 2013 rendu par la Cour d’appel de LYON le 4 mars
2013
La question pouvait en effet se poser de savoir si devant une
juridiction où la représentation par un avocat n’est pas obligatoire, on
pouvait admettre l’utilisation de la voie électronique dès lors que les
parties peuvent interjeter appel d’un jugement prud’homal, par
exemple, sans avoir recours à un avocat.
En d’autres termes, admettre l’appel électronique, pour les parties
qui sont assistées d’un avocat, en plus des voies classiques, pour
celles qui se défendent seules, laisse coexister deux types de
procédures radicalement différents qui sont susceptibles de générer
quelques difficultés pratiques.
Si l’une des parties utilise le RPVA, mais pas son contradicteur, cette
situation n’est-elle pas de nature à perturber la bonne
communication entre elles ?
En effet, au-delà du simple acte d’appel, ce sont les conclusions et
pièces qui sont transmises par le réseau électronique.
La Cour d’appel de LYON ne s’est pas attachée à ces considérations
pratiques mais a tranché la question de la recevabilité de l’appel en
Supplément au journal
même des textes applicables en la
Après avoir saisi le Conseil de prud’hommes de LYON, lequel, par
jugement du 20 mars 2012, a considéré que la rupture de son contrat
s’analysait en une démission, un salarié a interjeté appel de cette
décision par voie électronique le 20 avril 2012.
Lors de l’audience, la Cour a soulevé d’office la recevabilité de
l’appel et invité les parties à s’expliquer.
La partie défenderesse s’en est remis à l’appréciation de la Cour.
OBSERVATIONS
La Cour d’appel a conclu à la recevabilité de l’appel électronique en
se fondant essentiellement sur les dispositions de l’article 748-1 du
code de procédure civile en prenant le soin de rappeler que ce texte
est commun à toutes les juridictions.
En effet, la Cour a fait implicitement référence à l’article 749, placé
en toute fin du Livre Premier du code de procédure civile, qui
dispose :
« Les dispositions du présent livre s’appliquent devant toutes les
juridictions de l’ordre judiciaire statuant en matière civile,
commerciale, sociale, rurale et prud’homale, sous réserves des
règles spéciales à chaque matière et des dispositions particulières à
chaque juridiction. »
De ces dispositions il ressort que la communication électronique
prévue à l’article 748-1 précité s’applique devant l’ensemble des
juridictions y compris celles qui traitent des affaires sociales ou
prud’homales.
La solution est donc logique et juridique.
Le critère tiré du caractère obligatoire ou non de la représentation
devant la juridiction n’est donc pas pertinent pour écarter la
recevabilité de l’appel.
12
La Cour, quant à elle, vise expressément l’arrêté ministériel du 5 mai
2010 qui traite plus particulièrement de la communication électronique
dans les procédures sans représentation obligatoire devant les Cours
d’appel.
Le chapitre IV de cet arrêté traite de l’identification des parties à la
communication électronique et sa fiabilité.
Au demeurant, la Cour s’est également appuyée sur l’arrêté du 5 mai
2010 traitant plus particulièrement des actes effectués par voie
électronique devant les juridictions d’appel sans représentation
obligatoire, comme l’a fait la Cour d’Appel de CHAMBERY.
2 – La sincérité de l’appel électronique : l’arrêt rendu le 14 mai 2013
par la cour d’Appel de CHAMBERY
Plus particulièrement l’article 17 dispose que :
« L’adresse de la boîte aux lettres sécurisée de l’auxiliaire de justice
est hébergée par un serveur de messagerie, l’utilisation de cette
adresse de messagerie couplée à l’utilisation du certificat électronique
permet de garantir l’identité de l’auxiliaire de justice en tant
qu’expéditeur ou destinataire du courrier électronique.
EXPOSE DES FAITS
A la suite d’un jugement rendu le 13 septembre 2012 par le TASS de
la Haute-Savoie, un salarié a interjeté appel par voie électronique,
(par l’intermédiaire de son avocat).
Dès lors qu’il n’était pas démontré que l’acte d’appel effectué par voie
électronique était contraire aux modalités rappelées ci-dessus, la Cour
ne pouvait que reconnaître la validité de l’appel.
Devant la Cour, son employeur a contesté la recevabilité de l’appel au
motif que la déclaration d’appel ne comportait pas la signature du
déclarant, en méconnaissance des dispositions de l’article 933 du
code de procédure civile qui renvoient aux prescriptions de l’article 58
du même code.
Là-encore, la solution dégagée est logique et juridique.
conclusion
Encore peu usitée devant la chambre sociale de la Cour d’appel, la
procédure dite électronique va certainement se généraliser : d’une
part elle assure une certaine célérité dans la transmission des
documents aussi bien à La partie adverse qu’à la juridiction
concernée, d’autre part et surtout, elle évacue toute difficulté relative à
l’identification de l’auteur de l’acte d’appel.
OBSERVATIONS
La Cour ne peut que rejeter cet argument en rappelant que la
signature électronique est juridiquement assimilable à la signature
exigée par les articles 58 et 933 du code de procédure civile.
En effet les dispositions du décret n° 2010-434 du 29 avril 2010
disposent que :
On se souvient encore des décisions qui avaient été rendues,
notamment par la Cour d’appel de LYON, aux termes desquelles
l’appel avait été jugé irrecevable car signé « pour ordre » par une
secrétaire, ou dont le nom de l’avocat n’était pas identifiable…
« Vaut signature, pour l’application des dispositions du code de
procédure civile aux actes que les auxiliaires de justice assistant ou
représentant les parties notifient ou remettent à l’occasion des
procédures suivies devant les juridictions des premier et second
degrés, l’identification réalisée, lors de la transmissions par voie
électronique, selon les modalités prévues par les arrêtés ministériels
pris en application de l’article 748-6 du code de procédure civile.»
Ces erreurs ne sont plus permises grâce au certificat électronique qui
garantit l’identité de l’auxiliaire de justice.
olivier Barraut
Avocat au Barreau de Lyon
SELAS Jacques Barthélémy et Associés
[email protected]
Il résulte de ce texte que les modalités de transmission électronique
suffisent à garantir la signature de chaque acte accompli par l’avocat.
En somme, la transmission régulière des données par le RPVA vaut
signature.
PRINCIPAUX ATTENDUS
« Attendu que selon l’article 748-1 du code de procédure civile, qui se trouve dans le livre premier de ce code (« dispositions communes à
toutes les juridictions »), les envois, remises et notifications des actes de procédure, des pièces, avis, avertissements ou convocations, des
rapports, des procès-verbaux ainsi que des copies et expéditions revêtues de la formule exécutoire des décisions juridictionnelles peuvent
être effectuée par voie électronique dans les conditions et selon les modalités fixées par le présent titre, sans préjudice des dispositions
spéciales imposant l’usage de ce mode de communication ;
Qu’un arrêté ministériel du 5 mai 2010 relatif à la communication par voie électronique dans la procédure sans représentation obligatoire
devant les cours d’appel a fixé les garanties auxquelles doivent satisfaire les envois et remises des déclarations d’appel, des actes de
constitution et des pièces qui leur sont associés lorsqu’ils sont effectués par voie électronique entre auxiliaires de justice assistant ou
représentant les parties ou entre un tel auxiliaire et la juridiction ;
Que l’appel que Monsieur L. a interjeté le 20 avril 2012 sur le réseau indépendant privé dénommé « Réseau privé virtuel avocat » (RPVA)
est conforme aux dispositions de l’article 748-1 du code de procédure civile, dont l’arrêté du 5 mai 2010 a défini les modalités d’application
pour ce qui concerne la procédure sans représentation obligatoire devant la cour d’appel. »
CA Lyon, ch. soc., sect. A, 4 mars 2013, n°12/03398
« La transmission de la déclaration d’appel enregistrée au nom de Monsieur K. le 3 octobre 2012 a été assurée par son avocat, Maître B.
identifiée par son numéro d’inscription associé à son adresse de messagerie électronique, par le canal du Réseau privé Virtuel des Avocats,
dans les conditions définies par l’arrêté ministériel pris le 5 mai 2010, ce qui permettait à l’appelant de justifier d’une signature électronique
juridiquement assimilable à la signature exigée par les dispositions combinées des articles 58 et 933 du code de procédure civile, de telle
sorte que l’appel formé par Monsieur K. doit être déclaré recevable. »
CA Chambéry, sec. soc., 14 mai 2013, n°12/02094
Supplément au journal
13
Appel ou contredit ? un jugement, deux voies de recours
Cour d’appel de Lyon, ch.. soc., sec. B., 24 mai 2013, n°11/08522
EXPOSE DES FAITS
Les procédures orales se caractérisent par leur (relative) simplicité
et il est rare (en tout cas plus rare que dans certaines matières) que
les chambres sociales aient à trancher des questions de procédure.
Tel est en tout cas l’intérêt de l’arrêt, objet du présent commentaire,
rendu le 24 mai 2013 par la Chambre Sociale de la Cour d’Appel de
LYON saisie d’un appel à l’encontre d’un jugement rendu par le
Conseil de Prud’hommes de LYON qui, d’une part s’était déclaré
incompétent, au profit du Tribunal de Grande Instance de LYON,
pour connaître de la demande de dommages et intérêts faite par la
salariée relativement à des tests de produits pharmaceutiques
auxquels elle prétendait avoir été soumise par son employeur et,
d’autre part, l’avait déboutée de sa demande de dommages et
intérêts pour licenciement abusif.
La Cour avait été saisie par la seule voie d’un appel régularisé par
la salariée.
L’intimée soulevait, devant la Cour, l’irrecevabilité (partielle) de
l’appel sur la partie du jugement qui s’était déclaré incompétent
pour trancher la question de l’indemnisation du préjudice invoqué à
raison des tests des produits pharmaceutiques.
constantes que ce type de litige relève de la compétence exclusive
du Tribunal d’Instance ou de Grande Instance à l’exclusion de la
juridiction prud’homale (CA PARIS, 1er juin 1994 ; Cass. Soc. 20
avril 1989 n°87-14.014, CA BESANCON 14 novembre 1997 Me
AUBERT C/ Mme SASSET, CA MONTPELLIER 15 mai 2008
n°07/05238, CA BORDEAUX 27 octobre 2009 n°08/05892).
De même que le lien de subordination entre l’employeur et le
salarié n’accapare pas tous les rapports de droit pouvant exister
entre eux, le jugement statuant à la fois sur une question de
compétence matérielle et tranchant, au fond, un autre litige entre
les mêmes parties, ne fait pas disparaître les règles spécifiques de
procédure relatives aux voies de recours.
La pilule est peut-être amère (pour la demanderesse) mais le
diagnostic (posé par la Cour) est irréprochable.
Fabien rouméas
Avocat au Barreau de Lyon
Cabinet Fabien Rouméas
[email protected]
L’appelante soutenait, quant à elle, qu’en raison de l’indivisibilité
des prétentions, le jugement ne pouvait être attaqué que par la voie
de l’appel.
PRINCIPAUX ATTENDUS
Fallait-il donc régulariser un appel, formé un contredit ou former un
appel et un contredit ?
« Attendu que c’est en procédant par pure affirmation que
Vivianne D. soutient qu’il existerait un lien entre le préjudice
qu’elle prétend avoir subi à la suite de l’utilisation de ces produits
et la rupture du contrat de travail ;
La Cour d’Appel répond que seule la voie de l’appel était ouverte
concernant la partie du jugement ayant statué sur les demandes de
dommages et intérêts pour licenciement abusif, mais que, en
revanche, c’est un contredit qu’il fallait former à l’encontre du
jugement s’étant déclaré incompétent pour trancher la question de
l’indemnisation des dommages subis du fait de la réalisation des
tests de produits pharmaceutiques.
OBSERVATIONS
La solution, qui peut surprendre de prime abord, est toutefois
irréprochable sur le plan juridique.
Si seule la voie du contredit est en effet ouverte à l’encontre des
jugements se prononçant sur la compétence sans statuer sur le
fond du litige (quand bien même le juge aurait tranché la question
de fond dont dépend la compétence – article 80 du CPC -), c’est en
revanche uniquement la voie d’appel qui doit être régularisée pour
solliciter la réformation d’un jugement ayant statué sur le fond du
litige.
En l’occurrence, la demande de réparation faite par la
demanderesse à l’encontre d’une entreprise qu’elle accusait de lui
avoir causé un préjudice à raison des tests de produits
pharmaceutiques auxquels elle indiquait avoir été soumise relevait
de la seule compétence du Tribunal d’instance ou de Grande
Instance selon le montant des demandes dès lors que ce litige était
étranger à la relation de travail qui liait le demandeur au défendeur,
quand bien même le premier était salarié du second.
La jurisprudence a déjà eu l’occasion de rappeler que le lien de
subordination existant entre l’employeur et le salarié n’a pas pour
effet d’absorber toutes les relations de droit pouvant exister entre
les parties au contrat de travail.
Ainsi, dans le cadre du contentieux relatif au prêt accordé par
l’employeur à son salarié, les juridictions rappellent de manière
14
Supplément au journal
Qu’elle est dans l’incapacité totale et absolue de démontrer
qu’elle n’a utilisé lesdits produits que pour obéir aux instructions
reçues de l’employeur
Que dès lors, l’utilisation en dehors du lieu et du temps de travail
de ces produits qui on été régulièrement mis à la disposition du
public revêt un caractère purement privé et qu’aucun lien, aussi
ténu fût-il, n’est établi avec la relation contractuelle de travail
unissant les parties ;
Qu’il suit de là que la demande de dommages et intérêts fondée
sur les dommages résultant de l’utilisation de produits fabriqués
par la S.A. TEXINFINE est sans aucun lien avec le litige qui
oppose les parties au sujet de la rupture du contrat de travail qui
les unissait ;
Attendu que c’est par conséquent à bon droit que le Conseil de
Prud’hommes s’est déclaré incompétent au profit de la juridiction
de droit commun sur ce chef de prétention ;
Qu’il il y a lieu de déclarer l’appel irrecevable de ce chef alors
que la décision attaquée ne pouvait l’être, sur ce point, que par
la voie du contredit ».
Cour d’appel de Lyon, ch.. soc., sec. B.,
24 mai 2013, n°11/08522
Délai d’action en référé dans le cadre d’un licenciement pour motif
économique : régime antérieur à la loi de sécurisation de l’emploi
Tribunal de Grande Instance de Privas, référé, 18 juillet 2013, 13/00223
EXPOSE DES FAITS
Un projet de licenciement collectif et un projet de PSE ont été
présentés au CCE de la société O. le 18 février 2013 puis examinés
lors de plusieurs réunions de cette instance, notamment lors de la
restitution du rapport de l’expert-comptable. Le Comité d’établissement
de Saint-Désirat examinait le PSE les 28 et 29 mai 2013.
Aux termes d’une assignation en référé délivrée le 11 juillet 2013, le
Syndicat CGT de l’entreprise demandait au juge de :
- constater l’insuffisance du PSE,
- déclarer nulle la procédure de licenciement en faisant valoir l’absence
de motif économique,
- dire que la procédure devait être reprise à son début, soit pour les
premières réunions du CCE et du Comité d’établissement, sur la base
d’un nouveau PSE conforme.
Subsidiairement, il demandait à être autorisé à assigner au fond, à
date fixe, aux mêmes fins.
Le juge des référés de Privas déclarait irrecevable l’action du Syndicat
au motif que le délai de 15 jours de l’article L1235-7 du Code du travail
était dépassé.
Et, la Cour de cassation a jugé, s’agissant de l’action individuelle du
salarié sur le fondement de cet alinéa 2 que le délai de 12 mois était
applicable (uniquement) aux contestations susceptibles d’entraîner la
nullité du PSE et non à la contestation de la cause réelle et sérieuse
(Cass. soc. 15 juin 2010, n° 09-65062). La nullité appartient ainsi à la
catégorie validité.
Cette limitation peut enfin se retrouver dans l’intention du législateur
(Cf. la position du rapporteur au Sénat du texte et de la circulaire
DGEFP-DRT 2005-47 du 30 décembre 2005).
A cet égard, l’ordonnance du TGI de Privas apparaît contestable dans
la mesure où le Syndicat sollicitait la nullité de la procédure et du PSE
en raison de l’absence de motif économique (Cf. débat autour de l’arrêt
Vivéo, Cass. soc. 3 mai 2012 n° 11-20.741) et de l’insuffisance de
PSE.
Ces actions relèvent d’une contestation de fond qui, si elles sont
susceptibles d’être examinées par le juge des référés sur le fondement
de l’article 809 du CPC, ne constituent pas de simples problématiques
de régularité de la procédure.
Là encore, une action au fond aurait pu permettre d’éviter l’écueil et de
… sécuriser l’action du Syndicat, à tout le moins sur le plan procédural.
OBSERVATIONS
A noter enfin que le litige avait été engagé avant la loi de sécurisation
de l’emploi du 14 juin 2013, celle-ci étant applicable aux procédures de
licenciements collectifs engagées à partir du 1er juillet 2013.
Il résulté de l’article L 1235-7 alinéa 1er du Code du travail, dans sa
rédaction antérieure à la loi de sécurisation de l’emploi du 14 juin 2013,
que :
Or, ce débat appartient désormais à l’histoire du droit du travail dans la
mesure où cette loi a purement et simplement supprimé ce premier
aliéna de l’article L 1235-7 du Code du travail.
« Toute action en référé portant sur la régularité de la procédure de
consultation des instances représentatives du personnel est introduite,
à peine d'irrecevabilité, dans un délai de quinze jours suivant chacune
des réunions du comité d'entreprise ».
En effet, la loi soumet désormais tous les licenciements économiques
collectifs de plus de 9 salariés avec PSE à une procédure d’information
et de consultation spécifique. Celle-ci exclut toute possibilité de
recours au juge judiciaire et donne compétence exclusive à
l’administration du travail (puis au juge administratif) pour apprécier la
régularité et la validité de la procédure et du PSE (article L 1235-7-1
nouveau).
Ce délai d’action, introduit par la loi dite de programmation pour la
cohésion sociale du 18 janvier 2005 avait comme ambition affichée de
« sécuriser » les procédures de licenciements économiques collectifs,
en tentant de lutter contre les actions judiciaires jugées « tardives ».
Seules sont concernées les actions en référé. De sorte que l’obstacle
peut être aisément contourné par la saisine du juge du fond, dans le
cadre d’une procédure à jour fixe.
Il n’en demeure pas moins que les licenciements économiques
collectifs ne nécessitant pas la mise en œuvre d’un PSE (entreprise de
moins de 50 salariés ou licenciements de moins de 10 salariés)
auraient pu continuer à être visés par ce texte. Mais, ces procédures
ont probablement moins besoin d’être sécurisées…
En l’espèce, le Syndicat demandait l’autorisation d’assigner à jour fixe
mais formait cette demande devant le juge des référés et
subsidiairement à ses demandes principales ; il s’exposait ainsi à voir
ses demandes déclarées irrecevables en application de l’article L
1235-7 alinéa 1.
Georges Meyer
Avocat au barreau de Lyon
SELARL Delgado & Meyer
[email protected]
Une saisine autonome du juge du fond, sur requête, (au besoin
accompagnée d’un référé-suspension dans l’attente d’une décision au
fond) aurait pu être envisagée, d’autant que les premiers licenciements
ne semblaient pas prévus avant le 1er janvier 2014. Mais cela ne
correspondait peut-être pas à la temporalité de cette affaire.
PRINCIPAUX ATTENDUS
Par ailleurs, le texte ne vise que « les actions portant sur la régularité
de la procédure de consultation des instances représentatives du
personnel ». Cette notion doit être interprétée restrictivement comme
se rapportant aux problématiques de délais et de forme (absence ou
nombre de réunions du CE, ordre du jour, délai d’examen insuffisant,
recueil et formulation des avis…) et non sur le fond, notamment les
actions portant sur la validité du PSE.
« Le délai de 15 jours est très largement dépassé, que l’on
prenne comme point de départ du délai la première réunion du
CCE (février 2013) ou du Comité d’établissement (29 mai 2013).
A la date de délivrance de l’assignation et même du dépôt de la
requête, le demandeur était forclos ».
Cela peut se déduire de la nécessité d’interpréter strictement une
limitation du droit d’agir en justice mais aussi de la rédaction plus large
de l’alinéa 2 du même article L 1235-7 du Code du travail. Ce dernier
enferme dans un délai de 12 mois, « toute contestation sur la régularité
ou la validité du licenciement ».
Supplément au journal
Tribunal de Grande Instance de Privas, référé, 18 juillet 2013,
13/00223
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